Depuis 2023 et la sortie de GPT d’Open AI, l'Intelligence artificielle (IA), définie comme la « capacité d’une unité fonctionnelle à exécuter des fonctions généralement associées à l’intelligence humaine, telles que le raisonnement et l’apprentissage »<a href="#_ftn1" name="_ftnref1" title="">[1]</a>, n’en finit plus de gagner en compétences. Elle investit ainsi tous les champs d’activité, y compris artistiques, dans une boulimie de connaissances qui paraît indéfinie. Si beaucoup de voix s’élèvent contre cette omniscience technologique, traduisant leurs inquiétudes légitimes quant à l’automatisation grandissante avec pour corollaire la perte d’emplois, la crise existentielle due à la perte d’identité, entre autres exemples, nous avons souhaité nous intéresser aux opportunités qu’elle offre pour repenser l’éthique rédactionnelle au sein des organisations. En effet, bien que l’éthique rédactionnelle soit universellement reconnue dans la création et la diffusion de contenu, elle recouvre des concepts pluriels et se manifeste de manière inégale en contexte professionnel. Ainsi, elle peut être questionnée au prisme des pratiques et codes éthiques des rédacteurs (Beaudet C., Rey V., 2014), tels l’exactitude, l'honnêteté et l'équité dans la représentation des faits et des opinions ; mais aussi, sur le respect du droit d’auteur, le non-plagiat, enfin l'obligation de transparence vis-à-vis des conflits d'intérêt. Nous discuterons ici du droit d’auteur et plus particulièrement du droit moral. Aujourd’hui, il est unanimement reconnu que l’éthique rédactionnelle est à géométrie variable selon les secteurs et les pratiques. Car, si le droit moral des contenus — c'est-à-dire, le lien indissociable entre l'auteur et son &oelig;uvre — est largement préservé et respecté dans certains milieux professionnels tels que le journalisme, la recherche scientifique, ou encore la publicité, il est par trop souvent invisibilisé dans d'autres. Nous tenterons de démontrer dans cette contribution que l’absence de reconnaissance de la paternité/maternité (droit d’auteur reconnu) et de respect de « l’intégrité contenuelle » (protection du contenu contre les altérations non désirées), inhérents pourtant au droit moral, dans certains contextes professionnels s’expliquent au prisme de l’intellectualité conférée à l’écrit – Un document produit par une TPE, aussi intéressant soit-il, est-il une &oelig;uvre de l’esprit ? Que met-on derrière le vocable « &oelig;uvre de l’esprit » finalement ? – ; ce phénomène s’explique également par des impensés liés à des usages professionnels – la propriété intellectuelle des contenus organisationnels revient toujours à l’organisation sauf ceux créés par les concepteurs-rédacteurs dans le domaine de la publicité ; enfin, ce phénomène s’explique aussi par le manque de normes cadrant le métier de rédacteur web, qui disposent pourtant de compétences relatives aux écrits d’écran comme par Jeanneret et Souchier (2005), et d’organes représentatifs. Ce point vidé, nous nous interrogerons sur « l’effet IA » sur les contenus. En effet, « la génération automatique de métadonnées pour des médias et contenus numériques participe à l’enrichissement de ces derniers et a un impact impor- tant sur les moteurs de recommandation et optimisant le référencement (SEO) » (Huot C., 2023). Dans ce contexte, pourrait-elle faire émerger une nouvelle forme d'éthique rédactionnelle en capitalisant sur les injonctions des moteurs de recherche à toujours plus de transparence et d’autorialité ? Autrement dit, est-ce que les moteurs de recherche pourraient développer des algorithmes favorisant les contenus dont l'autorialité est clairement définie ? Le corollaire serait donc de pousser les organisations à visibiliser le travail des rédacteurs. Peut-on envisager, dans ce cas, d’autres standards de publication dont les normes influenceraient positivement les pratiques des organisations ? Quels avantages naitraient de celles-ci ? Pour nous aider à répondre à ces questions et illustrer nos propos, nous proposerons une définition stabilisée de l’éthique rédactionnelle et des contenus organisationnels. Puis, après avoir montré les marqueurs différenciants de ces contenus en terrain imprimé et numérique, dont le principal est l’info-performativité, nous monterons l’intérêt des moteurs de recherche à normer les pratiques pour enfin proposer une piste de normalisation possible. <div>  <hr align="left" size="1" width="33%" /> <div id="ftn1"> <a href="#_ftnref1" name="_ftn1" title="">[1]</a> Norme ISO/IEC 2382-28 :1995, Technologies de l'information — Vocabulaire — Partie 28 : Intelligence artificielle — Notions fondamentales et systèmes experts, révisée par ISO/IEC 2382 : 2015.   Bibliographie : Beaudet Céline et Rey Véronique, « Éthique appliquée et communication écrite : qu’en disent les rédacteurs professionnels ? », Communiquer, 11 | 2014, 29-44. Huot Charles, « Tendances et perspectives de l’intelligence artificielle dans le secteur de l’information-documentation : vision prospective R&D et applications dans le monde des affaires », dans « L’intelligence artificielle » I2D - Information, données & documents, 2022/1 (n° 1) Jeanneret Yves, Souchier Emmanuël (2005). “L’énonciation éditoriale dans les écrits d’écran”, Communication et langages, 145, p. 3-15.<br style="font-variant-ligatures:normal; font-variant-caps:normal; orphans:2; widows:2; -webkit-text-stroke-width:0px; text-decoration-thickness:initial; text-decoration-style:initial; text-decoration-color:initial; word-spacing:0px" /> DOI : <a href="http://dx.doi.org/10.3406/colan.2005.3351" style="overflow-wrap:break-word; font-variant-ligatures:normal; font-variant-caps:normal; orphans:2; widows:2; -webkit-text-stroke-width:0px; word-spacing:0px; color:blue; text-decoration:underline">10.3406/colan.2005.3351</a> Née Émilie, « La « rédaction web » : normes, contextes, textualités », Corela [En ligne], HS-33 | 2020, mis en ligne le 24 septembre 2020, consulté le 04 février 2024. URL : http://journals.openedition.org/corela/11888 ; DOI : <a href="https://doi.org/10.4000/corela.11888" style="color:blue; text-decoration:underline">https://doi.org/10.4000/corela.11888</a>   </div> </div>