<p align="center" style="text-align:center"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria"><b><span style="font-size:14.0pt">Quelles évaluations numériques pour la conception et la construction des bâtiments ?</span></b></span></span></p>
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<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria">Si les premiers dispositifs d’évaluation émergent à la fin du XIX<sup>e</sup> siècle (Le Moënne et Parrini, 2010), ceux relatifs aux processus professionnels se développent dans le sillage de la production de masse avec Taylor et Ford au début du XX<sup>e</sup> siècle (Coriat, 1979). L’évaluation de la production participe alors à la rationalisation et à la normalisation du travail, sources du développement de la bureaucratie (Hibou, 2012). Le développement de cette évaluation par les normes connaîtra un élan international avec l’invention de l’International Standard Organization (ISO) au milieu du XX<sup>e</sup> siècle. Depuis, l’évaluation de la qualité par les normes n’a eu de cesse de se propager dans tous les secteurs professionnels. De nombreux travaux ont étudié ces démarches qualités et cette inflation normative, notamment par le prisme de leurs écritures et des dispositifs informatiques qui les accompagnent à partir des années 1980 (Fraenkel, 2001). </span></span></p>
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<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria">Dans le secteur de la construction, ces démarches se sont finalement peu développées sur les chantiers. Si elles se sont installées au niveau de la conception, notamment chez les maîtres d’ouvrage, l’évaluation de la qualité semble beaucoup plus difficile à mettre en œuvre sur les chantiers de construction. La transmission des consignes auprès des ouvriers et compagnons se font encore largement de manière orale, appuyée par des croquis réalisé à la main, sans que la mise en œuvre ne soit ensuite réellement contrôlée et sans traçabilité. Or, les problèmes qualité sur un chantier sont bien réels. Les cadres de la maîtrise d’ouvrage publique et des entreprises générales en France que nous avons pu interroger déclarent tous des problèmes de qualité sur leurs chantiers. Si plusieurs dispositifs d’évaluation et de contrôle ont été mis en œuvre, essentiellement via les réunions de chantier et les contrôles sur site, rien de systématique n’a encore été mis en place. Mais le développement du BIM (Building Information Model, Modeling, Management) et des machines numériques dans le secteur du bâtiment semblent aujourd’hui apporter de nouvelles perspectives dans ce domaine (Chaudet, 2019). Nous souhaitons ainsi interroger dans cet article les nouvelles formes d’évaluation des processus de travail, aussi bien en conception qu’en construction, induites par le développement du BIM auprès des maîtrises d’ouvrage et des entreprises qui participent à la construction des bâtiments.</span></span></p>
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<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria">Nous avons en effet mené de nombreux entretiens et observations dans le cadre d’un projet de recherche mené avec l’Union Sociale pour l’Habitat et sept organismes HLM sur leurs modalités de mise en œuvre du BIM. Plusieurs axes ont été investigués dont un consacré au chantier. Ce dernier apparaît ainsi comme un point de rupture dans la chaîne de traçabilité. Si celle-ci permet d’évaluer la qualité en phase conception, elle ne l’est effectivement plus en phase réalisation. Le BIM et sa maquette numérique associée, actifs informationnels (Maurel, 2013) qui permettent de réduire les erreurs et d’augmenter la qualité de l’ouvrage en conception, sont finalement très peu utilisés en phase réalisation. Les défauts de mises en œuvre, la non-correspondance entre la maquette numérique avant et après le chantier et l’ensemble des dommages-ouvrages qui persistent placent ainsi de manière centrale la question du suivi qualité sur le chantier. Or, de nombreux projets qui visent actuellement à contrôler et évaluer le travail sur le chantier sont aujourd’hui prévus dans le contexte du développement des machines numériques associées à la maquette produite avec le BIM. Telles sont les pratiques et les usages que nous souhaitons ici présenter autour de la problématique suivante : quelles sont les nouvelles formes d’évaluation mises en œuvre par les acteurs du bâtiment dans le contexte du développement du BIM et des machines numériques associées ? </span></span></p>
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<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria">Dans une première partie, nous présenterons le projet de recherche ainsi que le contexte de développement du BIM dans le secteur de l’habitat en relation avec la question de l’évaluation. Une deuxième partie sera consacrée à la présentation et la discussion des nouvelles évaluations numériques mises en place en phase conception et réalisation. Sur la base de ces développements et expérimentations, nous discuterons les difficultés d’ordre méthodologique et conceptuel induite par ces nouveaux contrôles numériques. </span></span></p>
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<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria"><b>Bibliographie</b></span></span></p>
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<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria">Chaudet, B. (2019). Le BIM : nouvelles formes de collaboration pour les acteurs du bâtiment ? <em><span style="font-family:Cambria">Interfaces numériques</span></em>, 2019, vol. 8, n°3.</span></span></p>
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<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria">Coriat, B. (1979). <i>L’Atelier et le chronomètre</i>. Christian Bougois éditeur.</span></span></p>
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<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria">Fraenkel, B. (2001). La résistible ascension de l’écrit au travail. <em><span style="font-family:Cambria">Langage et Travail. Communication, cognition, action</span></em>, CNRS Editions, pp. 113-134.</span></span></p>
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<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria">Hibou, B. (2012). <i>La bureaucratisation du monde à l’ère néolibérale</i>. La Découverte.</span></span></p>
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<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria">Le Moënne, C. et S. Parrini-Alemanno. (2010). Management de l’évaluation et communication. <i>Communication & organisation</i>, 38, 7-14.</span></span></p>
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<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Cambria">Maurel, D. (2013). Gouvernance informationnelle et perspective stratégique. <i>In</i> V. Clavier et C. Paganelli (dir.). <i>L’information professionnelle</i>. Paris : Lavoisier, 175-198.</span></span></p>