<p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:107%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-family:"Times New Roman",serif">Les bibliothèques nationales, les institutions d’archives et les musées intègrent de plus en plus la dimension numérique à leurs collections (Epron et al., 2014). En ce sens, l’apparition des ressources électroniques a constitué une profonde révolution pour ces structures, les incitant à travailler davantage en réseau et à développer de nouveaux outils et compétences (Blin, 2007). Plus particulièrement, les collections à caractère patrimonial revêtent une importance singulière pour les nations et les individus et une sources d’informations incontournable pour la recherche scientifique et la préservation de la mémoire collective (Warwick et al., 2012).</span></span></span></span></p>
<p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:107%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-family:"Times New Roman",serif">Par ailleurs, la numérisation massive des collections patrimoniales a renouvelé la relation du public aux contenus numériques par de nouveaux modes de communication et de valorisation. Cette nouvelle donne a donné lieu notamment à des activités d’éditorialisation et de médiation qui sont venues s’ajouter aux pratiques de constitution et de gestion des collections numériques (Laborderie, 2020). Ces activités consistent en la production et la circulation des contenus dans l’espace numérique et plus particulièrement sur le Web. Elles renvoient désormais à des techniques, des pratiques et des formes qui constituent de nouveaux modèles de production et de diffusion des savoirs (Vitali-Rosati, 2016).</span></span></span></span></p>
<p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:107%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-family:"Times New Roman",serif">S’inscrivant dans cet objectif, les institutions documentaires majeures, notamment les bibliothèques, les services d’archives ou encore les musées se sont ainsi imposées en tant que parties prenantes de ces projets, cherchant à ouvrir leurs collections au grand public via les plateformes numériques (Clavier & Paganelli, 2015). Dans cette perspective, si la numérisation a changé la nature du document et celle du corpus (Pédauque, 2006), le Web a profondément transformé le rapport à la connaissance, remettant en question le livre comme mode privilégié d’accès au savoir au profit de la base de données qui s’impose comme forme culturelle dominante de notre époque (Manovich, 2010). En offrant de nouvelles modalités d’éditorialisation, le Web a largement contribué à la multiplication des options d’accès aux collections numériques par les possibilités techniques de mise en réseau et de manipulation des objets multimédias et multimodaux (Lebrun et al., 2012).</span></span></span></span></p>
<p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:107%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-family:"Times New Roman",serif">Ceci dit, si la numérisation de collections patrimoniales se poursuit à un rythme soutenu, les discours qui accompagnent ces réalisations mettent en avant des préoccupations de conservation et de mise à disposition du grand public. De plus, de multiples interrogations et préoccupations émergent du côté des professionnels et des chercheurs. Ces interrogations sur le patrimoine numérique se situent au croisement des questions autour des technologies mises en œuvre pour la numérisation, le traitement ou la conservation des collections numérisées ; des aspects juridiques qui entourent les projets de numérisation ; de la notion de mémoire qui invitent à s’interroger sur les choix en matière de conservation et leur finalité ; des aspects documentaires relatifs aux traitements développés sur les fonds numérisés ; de l’appropriation et des usages des dispositifs de médiation ; enfin d’enjeux économiques et politiques de la numérisation (Clavier & Paganelli, 2015).</span></span></span></span></p>
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<p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:107%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-family:"Times New Roman",serif">Le paysage documentaire marocain n’échappe pas aux tendances actuelles en matière de numérisation et de mise à disposition des collections patrimoniales. En ce sens, la Bibliothèque Nationale du Royaume du Maroc (BNRM), principale institution détentrice de fonds patrimoniaux sur le plan national, a procédé à la numérisation et la diffusion des collections patrimoniales libres de droit qui font partie de son fonds documentaire (Ameur, 2021, 2004). Dans le même sens, les Archives du Maroc<a href="#_ftn1" name="_ftnref1" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:11.0pt"><span style="line-height:107%"><span style="font-family:"Times New Roman",serif">[1]</span></span></span></span></span></a> a entamé un programme ambitieux visant à numériser les fonds d’archives en provenance aussi bien des organismes publics que des personnes physiques et organisations non-gouvernementales (Essoulami, 2010).</span></span></span></span></p>
<p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:107%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-family:"Times New Roman",serif">Par ailleurs, suite à la propagation de la pandémie du Covid-19 à l’échelle planétaire, les autorités publiques marocaines ont déclaré l’entrée en vigueur de l’état d’urgence sanitaire lié à ladite pandémie à partir du 22 mars 2020<a href="#_ftn2" name="_ftnref2" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:11.0pt"><span style="line-height:107%"><span style="font-family:"Times New Roman",serif">[2]</span></span></span></span></span></a>. Entre autres, les décisions prises ont concerné la fermeture des établissements de tous genres, dont les bibliothèques, les archives et les musées, à partir de la même date. </span></span></span></span></p>
<p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:107%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-family:"Times New Roman",serif">Devant ce fait, ces établissements se sont trouvés face à une situation leur exigeant de s’adapter à la nécessité de continuité d’offre de service à leurs utilisateurs, notamment à l’aide des technologies numériques. Pour répondre à cette exigence, ces institutions ont commencé, à divers degrés, à proposer des contenus numériques en ligne à destination de leurs publics, en ouvrant notamment d’accès à leurs réservoirs digitaux afin d’assurer une continuité de leur service. Parallèlement aux opérations de mise à disposition des collections numériques existantes, ces institutions ont aussi prévu une augmentation quantitative et qualitative de leurs programmes de constitution des collections numériques.</span></span></span></span></p>
<p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:107%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-family:"Times New Roman",serif">L’objectif de la présente contribution consiste à analyser la consistance de l’offre numérique en termes de collections patrimoniales détenues par deux institutions nationales majeures, à savoir la Bibliothèque Nationale et les Archives Nationales du Maroc. Tout particulièrement, nous souhaitons examiner dans quelle mesure les conditions liées à la crise sanitaire ont affecté les stratégies de ces acteurs en termes de types de corpus numériques à constituer et de contenus à prioriser.</span></span></span></span></p>
<p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:107%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-family:"Times New Roman",serif">A cet effet, l’analyse porte sur deux éléments principaux. Il s’agit, en premier lieu, des stratégies adoptées par la BNRM et les Archives Nationales du Maroc pour garantir un accès pérenne à leurs collections patrimoniales numériques existantes en temps de crise. Dans ce sens, deux questions majeures se posent : Quelles sont les modalités d’accès prévues par ces institutions à leurs collections patrimoniales numériques durant la période de confinement liée à la pandémie du Covid-19 ? En quoi ces modalités diffèrent-elles de celles qui prévalaient avant la crise ?</span></span></span></span></p>
<p style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:107%"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><span style="font-family:"Times New Roman",serif">En deuxième lieu, il s’agit de saisir les orientations de ces institutions quant à l’adoption de nouvelles mesures et initiatives afin d’étoffer leur offre numérique et leurs programmes de digitalisation des collections revêtant un aspect patrimonial. A cet effet, d’autres questions se posent : quelle est l’incidence de la crise sur les programmes de numérisation mis en place par ces deux institutions ? Qu’est ce qui caractérise les nouvelles orientations en matière de constitution et de mise à disposition des collections patrimoniales digitales ?</span></span></span></span></p>
<p><span style="font-size:11.0pt"><span style="line-height:107%"><span style="font-family:"Times New Roman",serif">Pour répondre aux différentes questions de recherche posées, notre démarche méthodologique s’appuie sur un corpus documentaire et un corpus issu d’une investigation empirique. D’une part, il s’agit de la prise en compte de la documentation produite par ces instituions, notamment via l’analyse des contenus des sites Web de ces acteurs. D’autre part, l’enquête menée auprès des responsables de ces structures a été prévue dans un but d’apporter des éléments de réponse aux principaux objectifs de la présente contribution. Les résultats préliminaires de l’enquête en cours montrent notamment que la BNRM a renforcé son dispositif de mise en ligne de ses réservoirs numériques, aussi bien les fonds patrimoniaux que les ressources électroniques commerciales. De plus, un effort a été déployé par l’institution pour documenter et archiver les événements phares de la crise sanitaire liée à la Covid 19 au Maroc. En revanche, il semble que les Archives Nationales, et en dépit de la richesse de ses collections patrimoniales numériques, ne prévoit toujours pas d’accès distant à ces collections d’archives. Par ailleurs, les deux institutions sont en cours de renforcer leurs programmes de numérisation en termes de contenus et de ressources financières et matérielles nécessaires pour les mise en œuvres de tels programmes.</span></span></span></p>
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<hr align="left" size="1" width="33%" />
<div id="ftn1">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><a href="#_ftnref1" name="_ftn1" title=""><span style="font-size:8.0pt"><span style="background:white"><span style="font-family:"Times New Roman",serif"><span style="color:#313131"><span style="font-size:8.0pt"><span style="background:white"><span style="line-height:107%"><span style="font-family:"Times New Roman",serif"><span style="color:#313131">[1]</span></span></span></span></span></span></span></span></span></a><span style="font-size:8.0pt"><span style="background:white"><span style="font-family:"Times New Roman",serif"><span style="color:#313131"> Les Archives du Maroc est une institution nationale créée en 2007 en vertu de la loi 69-99 relative aux archives. Mise sous la tutelle du ministère de la Culture, sa mission consiste à « sauvegarder le patrimoine archivistique national et assurer la constitution, la conservation, l’organisation et la communication des archives publiques ».</span></span></span></span></span></span></p>
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<div id="ftn2">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:Calibri, sans-serif"><a href="#_ftnref2" name="_ftn2" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="line-height:107%"><span style="font-family:"Calibri",sans-serif">[2]</span></span></span></span></span></a> <span style="font-size:8.0pt"><span style="background:white"><span style="font-family:"Times New Roman",serif"><span style="color:#313131">A ce propos, le Gouvernement marocain a adopté le 22 mars 2020 le projet de décret-loi no. 2.20.292 relatif à l’établissement des mesures spéciales à l’état d’urgence sanitaire dans l’ensemble du territoire national.</span></span></span></span></span></span></p>
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