<p><strong>Abstract :</strong> We&nbsp; assume that researchers and laboratories must develop a policy of digital diffusion of publications and research data in order to fit into the international movement for open scientific data. If then don&rsquo;t, they increase the informational distance with their work and develop a risk of being isolated. This paper presents the findings of the study of the practices of social science laboratories of the University of Poitiers in research data.&nbsp;</p> <p><strong>Keywords&nbsp;:</strong> research data, open data, informational distance, information</p> <p>Dans un article paru en 2010, Bernhard Rieder a d&eacute;fini la notion de &laquo;&nbsp;distance informationnelle&nbsp;&raquo; comme &laquo;&nbsp;la probabilit&eacute; qu&rsquo;un internaute se trouve confront&eacute; &agrave; une certaine information (un document, une id&eacute;e, etc.). Pens&eacute;e comme relationnelle, cette distance d&eacute;pend &agrave; la fois de l&rsquo;usager, de l&rsquo;information et de l&rsquo;ensemble des couches m&eacute;diatrices.&nbsp;&raquo;</p> <p>Cette d&eacute;finition, de port&eacute;e g&eacute;n&eacute;rale, nous interpelle pour ce qui concerne le champ particulier des chercheurs, devenus/devenant internautes. De m&ecirc;me qu&rsquo;il n&rsquo;est pas suffisant qu&rsquo;un jeune adulte soit <em>digital native</em> pour inf&eacute;rer qu&rsquo;il maitrise &eacute;videmment ces usages, rep&egrave;res, savoir-faire et outils d&rsquo;internet que l&rsquo;on regroupe sous l&rsquo;expression <em>digital litteracy</em>, il n&rsquo;est pas certain qu&rsquo;un chercheur soit, parce qu&rsquo;il est apte &agrave; traiter de gros volumes de donn&eacute;es en milieu complexe dans son domaine d&rsquo;expertise, habile &agrave; r&eacute;duire la distance informationnelle qui le s&eacute;pare des productions scientifiques qui lui seraient utiles.&nbsp;</p> <p>La question qui nous int&eacute;resse dans cette communication est celle de la d&eacute;marche entreprise par des laboratoires de recherche afin de pousser vers les chercheurs ou, &agrave; tout le moins, ne pas soustraire aux chercheurs, l&rsquo;acc&egrave;s &agrave; des donn&eacute;es de recherche qui pourraient trouver un second usage scientifique par leur r&eacute;emploi par d&rsquo;autres chercheurs ou &eacute;quipes. Plus directement pos&eacute;e, la question est la suivante&nbsp;: les laboratoires de recherche ont-ils une d&eacute;marche visant &agrave; r&eacute;duire la distance informationnelle avec les donn&eacute;es de recherche&nbsp;?</p> <p>Nous introduirons dans une premi&egrave;re partie la notion de distance informationnelle scientifique, posant plus particuli&egrave;rement la question de la distance &agrave; laquelle se trouvent les donn&eacute;es de recherche. La seconde partie pr&eacute;sentera l&rsquo;&eacute;tude men&eacute;e aupr&egrave;s de sept laboratoires en sciences humaines de l&rsquo;universit&eacute; de Poitiers quant &agrave; leurs pratiques de partage des donn&eacute;es de recherche.&nbsp;&nbsp;</p> <h2><a id="t1"></a>1- DISTANCE INFORMATIONNELLE SCIENTIFIQUE DES DONN&Eacute;ES DE RECHERCHE</h2> <h3>1-1- Introduction de la notion de la distance informationnelle scientifique</h3> <p>L&rsquo;acc&egrave;s par Internet aux publications de recherche est d&eacute;sormais devenu d&rsquo;un usage courant. Une quinzaine de plateformes, gratuites ou payantes, permettent cet acc&egrave;s (Froissard, 2010). Les universit&eacute;s mettent usuellement &agrave; disposition des &eacute;tudiants et des chercheurs des offres qui articulent tout ou partie de ces plateformes professionnelles, quoi que s&rsquo;observe un mouvement fort de d&eacute;sabonnement des revues num&eacute;riques en ligne pour des raisons de tarifs (Larousserie, 2014&nbsp;; Bianchini, 2014). Malgr&eacute; ce mouvement qui pose question &agrave; terme, la <em>distance informationnelle scientifique</em> que nous proposons d&rsquo;approcher par la <em>probabilit&eacute; qu&rsquo;un chercheur n&rsquo;acc&egrave;de pas via Internet &agrave; une certaine ressource num&eacute;rique utile &agrave; son travail de recherche</em> est aujourd&rsquo;hui relativement faible concernant les publications. Dans bien des cas, seule la question du co&ucirc;t d&rsquo;acquisition du document constitue la limite &agrave; l&rsquo;acc&egrave;s.</p> <p>Cette probabilit&eacute; d&eacute;pend &eacute;videmment (1) des habilet&eacute;s num&eacute;riques du chercheur, lesquelles s&rsquo;inscrivent dans le contexte plus global de ses &laquo;&nbsp;pratiques informationnelles&nbsp;&raquo; que Ihadjadene et Chaudiron (2008, p. 14) d&eacute;crivent comme &laquo; la mani&egrave;re dont un ensemble de dispositifs, de sources formelles ou non, d&rsquo;outils, de comp&eacute;tences cognitives sont effectivement mobilis&eacute;es, par un individu[&hellip;] dans les diff&eacute;rentes situations de production, de recherche, d&rsquo;organisation, de traitement, d&rsquo;usages, de partage et de communication de l&rsquo;information.&raquo; Meilleure est l&rsquo;habilet&eacute; du chercheur, plus faible est la distance informationnelle scientifique (DIS).&nbsp;</p> <p>Cette probabilit&eacute; d&eacute;pend &eacute;galement (2) des informations recherch&eacute;es (donn&eacute;es de recherche, r&eacute;sultats de recherche, textes scientifiques) et des &laquo;&nbsp;couches m&eacute;diatrices&nbsp;&raquo; qui favorisent ou non l&rsquo;acc&egrave;s &agrave; celles-ci, notamment les dispositions mises en &oelig;uvre par le collectif des chercheurs et les structures de recherche pour favoriser la structuration num&eacute;rique des donn&eacute;es, leur accessibilit&eacute; et leur partage.</p> <p>La distance informationnelle scientifique d&eacute;pend enfin aussi, sans doute, (3) des normes et r&egrave;gles en usage dans le groupe social d&rsquo;appartenance du chercheur&nbsp;(Savolainen, 2008) dont les pratiques se &laquo;&nbsp;saisissent comme des ph&eacute;nom&egrave;nes de signification dans des lieux sociaux sp&eacute;cifiques&nbsp;&raquo; (Souchier, Jeanneret et Le Marec, 2003).</p> <h3>1-2- Le cas des donn&eacute;es de recherche&nbsp;</h3> <p>Le questionnement sur la distance informationnelle scientifique trouve un terrain d&rsquo;analyse particuli&egrave;rement sensible sur le sujet des donn&eacute;es de recherche.</p> <p>Les d&eacute;finitions et l&rsquo;appr&eacute;hension de l&rsquo;&eacute;tendue de ce que l&rsquo;on peut nommer &laquo;&nbsp;donn&eacute;es de recherche&nbsp;&raquo; sont assez variables. Le Groupe de travail sur la strat&eacute;gie des donn&eacute;es de recherche canadien d&eacute;finit comme des &laquo; <em>&eacute;l&eacute;ments factuels utilis&eacute;s comme principales sources de recherche et commun&eacute;ment accept&eacute;s au sein du milieu de la recherche comme &eacute;tant n&eacute;cessaires &agrave; la validation des r&eacute;sultats de recherche. </em>&raquo; (Rapport sur le sommet 2011, p. 4) La Ligue des Biblioth&egrave;ques Europ&eacute;ennes de Recherche (LIBER) les r&eacute;sume &agrave; la mati&egrave;re premi&egrave;re des recherches quand Simukovic et al (2014, cit&eacute;s par Prost et Sch&ouml;pfel, p. 10) retiennent &agrave; la fois ladite mati&egrave;re premi&egrave;re qualifi&eacute;e de &laquo;&nbsp;donn&eacute;es sources&nbsp;&raquo; sur la base desquelles le chercheur construit son travail et les donn&eacute;es &laquo;&nbsp;r&eacute;sultats&nbsp;&raquo; des travaux conduits par le chercheur.&nbsp;</p> <p>Le questionnement sur le partage des donn&eacute;es de recherche par leur publication, que les anglo-saxons d&eacute;signent par l&rsquo;expression <em>research data publishing</em> d&eacute;finie comme &laquo;&nbsp;<em>the release of (research) data for (re)use by others</em>&nbsp;&raquo; (Assante et al, 2016) n&rsquo;est pas nouveau en soi. Si l&rsquo;on en cro&icirc;t Mochmann (2007), les premi&egrave;res initiatives fortes en vue du partage des donn&eacute;es pour la recherche compar&eacute;e internationale datent de 1946. Caporali <em>et al</em> (2015) exposent de mani&egrave;re synth&eacute;tique les multiples int&eacute;r&ecirc;ts du partage des donn&eacute;es&nbsp;pour les sciences sociales : production d&rsquo;analyses secondaires, v&eacute;rification et r&eacute;plicabilit&eacute; des &eacute;tudes, progression des connaissances, d&eacute;couragement de la fraude scientifique, enseignement des m&eacute;thodes d&rsquo;analyse, am&eacute;lioration de la connaissance du travail des chercheurs, justification du co&ucirc;t des enqu&ecirc;tes&hellip;&nbsp;&nbsp;</p> <p>Ces avantages, ainsi que les exigences nouvelles dans le cadre des appels &agrave; projet H2020 par exemple, expliquent sans doute l&rsquo;&eacute;mergence de projets visant &agrave; favoriser le partage de donn&eacute;es et l&rsquo;acc&egrave;s &agrave; ces donn&eacute;es, ce qui r&eacute;duit d&rsquo;autant la distance informationnelle scientifique. Dans le champ des sciences humaines, citons l&rsquo;exemple du projet ADONIS visant &agrave; offrir aux chercheurs un &laquo; espace de navigation unifi&eacute; &raquo; pour explorer les documents et les donn&eacute;es num&eacute;riques des sciences humaines et sociales. &laquo;&nbsp;Dans cette vision, les donn&eacute;es correspondent aux mat&eacute;riaux bruts et les publications aux r&eacute;sultats de l&rsquo;exploitation des donn&eacute;es.&nbsp;&raquo; (Aussant, 2009). Plus largement, le projet Science Commons aspire &eacute;galement &laquo; &agrave; aller au-del&agrave; de l&rsquo;acc&egrave;s ouvert aux r&eacute;sultats de la recherche, en facilitant un partage non seulement des donn&eacute;es et de l&rsquo;information mais des donn&eacute;es brutes et des outils logiciels.&nbsp;&raquo; (Bourcier, 2010) Les r&eacute;seaux sociaux de la recherche tels que Researchgate, Academia ou ou MyScienceWork se situent, nous semble-t-il dans la m&ecirc;me logique, m&ecirc;me s&rsquo;ils recueillent essentiellement des travaux publi&eacute;s.&nbsp;</p> <p>Les exemples mentionn&eacute;s ci-dessus s&rsquo;inscrivent dans le mouvement &eacute;mergent de l&rsquo;open data scientifique, un mouvement qui ne va pas sans questionner profond&eacute;ment les chercheurs. Caporali et al ont expliqu&eacute; l&rsquo;inqui&eacute;tude des chercheurs &agrave; l&rsquo;&eacute;gard de cette derni&egrave;re id&eacute;e, citant De Moor et Van Zanden (2008) : &laquo; les chercheurs ne sont pas &agrave; l&rsquo;aise avec l&rsquo;id&eacute;e que d&rsquo;autres puissent b&eacute;n&eacute;ficier de jeux de donn&eacute;es &eacute;labor&eacute;s &agrave; grand-peine et, peut-&ecirc;tre plus important encore, ils craignent qu&rsquo;en rendant leurs donn&eacute;es publiques, des erreurs ne soient d&eacute;couvertes dans la collecte et le traitement des donn&eacute;es et dans les r&eacute;sultats qu&rsquo;ils ont publi&eacute;s ou qu&rsquo;ils publieront &raquo;.&nbsp;</p> <p>Il faut bien reconna&icirc;tre que la mise en &oelig;uvre d&rsquo;un projet de partage de donn&eacute;es est d&rsquo;une grande complexit&eacute; et peut mettre en tension des pratiques des chercheurs. Ainsi, pour le Comit&eacute; Consultatif Commun d&rsquo;Ethique pour le Recherche Agronomique&nbsp;(2016, p.5): &laquo;&nbsp;<em>Le partage des donn&eacute;es suppose un travail rigoureux qui commence d&egrave;s la conception d&rsquo;un projet de recherche et peut se prolonger bien au-del&agrave; de son ach&egrave;vement. En effet, la mise en ligne de donn&eacute;es doit &ecirc;tre pr&eacute;c&eacute;d&eacute;e d&rsquo;une d&eacute;licate &eacute;tape de pr&eacute;paration et d&rsquo;organisation pour les rendre non seulement accessibles, mais aussi intelligibles en dehors de leur contexte d&rsquo;origine. Produire des donn&eacute;es de grande qualit&eacute; repr&eacute;sente une exigence d&eacute;ontologique majeure pour chaque chercheur. Cependant, le partage des donn&eacute;es implique aussi de pouvoir fournir la preuve de leur fiabilit&eacute;, et par cons&eacute;quent de d&eacute;velopper un contr&ocirc;le qualit&eacute; exhaustif. Enfin, la r&eacute;utilisation des donn&eacute;es ne sera possible que si elles sont &laquo; portables &raquo;, &laquo; inter-compatibles &raquo; et &laquo; interop&eacute;rables &raquo;, ce qui implique un consid&eacute;rable effort de standardisation qui ne pourra &ecirc;tre men&eacute; &agrave; bien qu&rsquo;en s&rsquo;appuyant sur des collaborations internationales.</em>&nbsp;&raquo;</p> <p>Une &eacute;tude men&eacute;e aupr&egrave;s d&rsquo;environ 3000 chercheurs autrichiens publi&eacute;e en 2015 (<em>Researchers and their Data. An Austrian Survey</em>), montre que dans 93% des cas, c&rsquo;est le chercheur lui-m&ecirc;me qui archive ses donn&eacute;es de recherche, &agrave; 71% sur son propre ordinateur, dans 64 % des cas sur un disque dur externe. Seuls 27 % des r&eacute;pondants de l&rsquo;&eacute;tude affirment assurer de mani&egrave;re syst&eacute;matique cet archivage et 17% seulement selon des standards qui permettent un r&eacute;emploi. Autre information importante&nbsp;: 39 % des chercheurs stockent leurs donn&eacute;es de recherche sur le serveur d&rsquo;une institution. Ces pratiques, dont nous faisons l&rsquo;hypoth&egrave;se qu&rsquo;elles ne sont pas fondamentalement diff&eacute;rentes en Autriche de ce qui se pratique ailleurs, assurent de mani&egrave;re peu rassurante la p&eacute;rennit&eacute; des donn&eacute;es en les exposant &agrave; l&rsquo;obsolescence du mat&eacute;riel, son renouvellement non ma&icirc;tris&eacute; en termes de transfert des donn&eacute;es, une difficile r&eacute;utilisation... Surtout, ce type de pratique individualis&eacute; ne favorise pas le partage des donn&eacute;es de recherche.</p> <p>Il semble par cons&eacute;quent que la distance informationnelle scientifique des donn&eacute;es de recherche est relativement forte, au contraire de la DIS des publications scientifiques&nbsp;: une large fraction des acteurs de la recherche rechigne &agrave; partager ses donn&eacute;es ou ne sait comment faire, alors qu&rsquo;elle aspire &agrave; voir ses publications lues et s&rsquo;active en ce sens. Cela n&rsquo;est pas sans poser question quant au risque de creusement d&rsquo;une <em>alt&eacute;rit&eacute; informationnelle scientifique</em> des laboratoires et chercheurs qui se tiendraient &agrave; l&rsquo;&eacute;cart du mouvement en faveur du partage des donn&eacute;es de recherche. Les d&eacute;marches entreprises par les universit&eacute;s de Lille, Paris Diderot&hellip; pour acc&eacute;l&eacute;rer la r&eacute;flexion et l&rsquo;inflexion des pratiques en ce sens sont significatives d&rsquo;une prise de conscience des enjeux. &nbsp;&nbsp;</p> <h2><a id="t2"></a>2- RISQUE D&#39;ALT&Eacute;RIT&Eacute; INFORMATIONNELLE SCIENTIFIQUE : UNE &Eacute;TUDE DE L&#39;&Eacute;PAISSEUR SOCIALE DES PRATIQUES DANS LES LABORATOIRES DE SHS &Agrave; L&#39;UNIVERSIT&Eacute; DE POITIERS</h2> <h3>2-1- Origine et cons&eacute;quences de l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; informationnelle scientifique</h3> <p>L&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; informationnelle scientifique <em>nait d&rsquo;une mise &agrave; l&rsquo;&eacute;cart de la communaut&eacute; scientifique internationale</em> aux multiples causes&nbsp;: non insertion dans les mouvements scientifiques (non participation aux colloques, non insertion dans des projets de recherche), difficult&eacute; de publication, difficult&eacute; de connexion &agrave; Internet, manque de moyens pour effectuer des recherches&hellip; Elle <em>consiste en une mise &agrave; l&rsquo;&eacute;cart de la dynamique de la recherche</em> qui a pour cons&eacute;quence une moindre visibilit&eacute; des travaux produits, une perte de contact avec l&rsquo;actualit&eacute; des d&eacute;couvertes qui peut conduire &agrave; une d&eacute;connexion des travaux par rapport aux derni&egrave;res connaissances &eacute;labor&eacute;es et une sorte d&rsquo;oubli ou de mise &agrave; l&rsquo;&eacute;cart par les pairs.</p> <p>Compte tenu du mouvement naissant &eacute;voqu&eacute; plus haut, cette alt&eacute;rit&eacute; pourrait bien aussi &agrave; br&egrave;ve &eacute;ch&eacute;ance &ecirc;tre caus&eacute;e par <em>le maintien durable hors du mouvement de transformation du rapport aux donn&eacute;es de recherche qui s&rsquo;op&egrave;re dans le cadre de la transformation num&eacute;rique de nos soci&eacute;t&eacute;s</em>. Celui-ci r&eacute;duirait la probabilit&eacute; que des productions scientifiques, ou des donn&eacute;es sources &eacute;labor&eacute;es ou collect&eacute;es par des chercheurs, soient consult&eacute;es et contribuent &agrave; de nouvelles recherches.&nbsp;</p> <p>En r&eacute;sum&eacute;, l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; informationnelle scientifique se d&eacute;duit d&rsquo;un allongement de la distance informationnelle scientifique. Elle place le chercheur &agrave; l&rsquo;&eacute;cart du mouvement, l&rsquo;isole, le marginalise. Il en va de m&ecirc;me, probablement, pour les laboratoires de recherche qui ne se pr&eacute;occupent pas du mouvement en cours.&nbsp;</p> <h3>2-2- Une &eacute;tude de l&rsquo;&eacute;paisseur sociale des pratiques</h3> <p>Notre &eacute;tude du risque d&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; informationnelle scientifique laisse de c&ocirc;t&eacute; la question des habilet&eacute;s individuelles des chercheurs en mati&egrave;re de num&eacute;rique et celle des couches interm&eacute;diaires que repr&eacute;sentent les plateformes d&rsquo;acc&egrave;s en ligne aux publications et donn&eacute;es, dispositifs de m&eacute;diation qui m&eacute;riteraient d&rsquo;&ecirc;tre questionn&eacute;s par ailleurs. Ces aspects, et d&rsquo;autres encore sont d&eacute;j&agrave; largement abord&eacute;s dans le livre blanc <em>Une science ouverte dans une r&eacute;publique num&eacute;rique</em> (CNRS, avril 2016). Nous nous centrons ici sur l&rsquo;exploration de ce que Souchier, Jeanneret et Le Marec (2003) appellent &laquo;&nbsp;l&rsquo;&eacute;paisseur sociale des pratiques&nbsp;&raquo;, une &eacute;paisseur profond&eacute;ment marqu&eacute;e par le contexte de mise en &oelig;uvre des pratiques, notamment dans le cadre de syst&egrave;mes norm&eacute;s. Les pratiques ont une &eacute;paisseur sociale si elles sont marqu&eacute;es par des normes peu &eacute;volutives, ancr&eacute;es dans la culture d&rsquo;un groupe.&nbsp;</p> <p>Plus pr&eacute;cis&eacute;ment, nous avons &eacute;tudi&eacute; un aspect de l&rsquo;&eacute;paisseur sociale des pratiques des laboratoires de recherche en sciences humaines et sociales de l&rsquo;universit&eacute; de Poitiers s&rsquo;agissant de la conservation, de l&rsquo;organisation et de la mise en partage des donn&eacute;es de recherche. Notre conviction est en effet que c&rsquo;est au niveau de la direction d&rsquo;un laboratoire que se trouve l&rsquo;une des cl&eacute;s de l&rsquo;&eacute;volution des pratiques de partage des donn&eacute;es de recherche, donc une des cl&eacute;s de l&rsquo;int&eacute;gration &agrave; la communaut&eacute; scientifique num&eacute;rique ou du d&eacute;veloppement d&rsquo;une alt&eacute;rit&eacute; scientifique. Cette position peut &ecirc;tre discut&eacute;e. La Ligue Europ&eacute;enne des Biblioth&egrave;ques de Recherche (LIBER) estime par exemple que les biblioth&egrave;ques ont vocation &agrave; jouer ce r&ocirc;le, mais avec prudence&nbsp;: &laquo;&nbsp;<em>Libraries should be careful not to place too much emphasis on &lsquo;open&rsquo; (as in &lsquo;open data policies&rsquo;) because especially in the early stages of a research project most researchers do not want their data to be &lsquo;open&rsquo;, certainly not without their consent and outside their control.&nbsp;</em>&raquo; <sup><a href="https://revue-cossi.info/numeros/n-2-2017-l-information-la-communication-et-les-organisations-au-defi-de-l-alterite/562-1-2017-revue-marcon#ftn1" id="ftnref1" name="_ftnref">[1]</a>
</sup></p> <p>L&rsquo;&eacute;tude a pris la forme d&rsquo;une s&eacute;rie d&rsquo;interviews semi qualitatives des directeurs des laboratoires de recherche. &nbsp;Il s&rsquo;agissait, dans une perspective de recherche compr&eacute;hensive, de saisir le regard qu&rsquo;ils portent sur les donn&eacute;es de recherche produites par leur laboratoire, d&rsquo;appr&eacute;hender la d&eacute;marche de celui-ci en mati&egrave;re de conservation de ces donn&eacute;es et le r&ocirc;le attribu&eacute; &agrave; chacun en cette mati&egrave;re, d&rsquo;identifier l&rsquo;institution d&rsquo;une politique pr&eacute;cise de gestion des donn&eacute;es de recherche (ou non) et enfin de comprendre la r&eacute;ceptivit&eacute; m&ecirc;me des personnes interrog&eacute;es au principe du partage des donn&eacute;es de recherche.</p> <p>Les sept entretiens ont dur&eacute; en moyenne entre trente minutes et une heure et demie. Ils ont &eacute;t&eacute; r&eacute;alis&eacute;s, apr&egrave;s formation, par des &eacute;tudiants en premi&egrave;re ann&eacute;e de master dans le cadre d&rsquo;un cours <em>d&rsquo;introduction &agrave; la recherche</em>, qui a vu les &eacute;tudiants participer &agrave; l&rsquo;&eacute;laboration m&ecirc;me de la d&eacute;marche de recherche. Les entretiens ont &eacute;t&eacute; enregistr&eacute;s puis enti&egrave;rement report&eacute;s sur papier, h&eacute;sitations et digressions comprises. C&rsquo;est ce mat&eacute;riau que nous avons analys&eacute; pour &ecirc;tre pr&eacute;sent&eacute;.</p> <p>En termes de disciplines, sept des neuf laboratoires en sciences humaines de l&rsquo;universit&eacute; de Poitiers ont &eacute;t&eacute; questionn&eacute;s. Il s&rsquo;agit des laboratoires d&rsquo;&eacute;conomie (CRIEF), de gestion (CEREGE), de sociologie (GRESCO), de g&eacute;ographie (RURALITE) et de langues et litt&eacute;rature (FORELL), d&rsquo;histoire - histoire de l&rsquo;art et musicologie (CRIHAM), histoire et arch&eacute;ologie (HERMA). Il n&rsquo;a pas &eacute;t&eacute; possible de questionner les autres responsables sur la p&eacute;riode consacr&eacute;e &agrave; la collecte des r&eacute;sultats.</p> <h3>2-3- Les r&eacute;sultats de l&rsquo;&eacute;tude</h3> <p>&radic; Pour la conservation des donn&eacute;es, la pratique commune est le stockage individuel, dans son propre ordinateur, avec les risques que cela implique qui semblent une sorte de fatalit&eacute;.&nbsp;</p> <dl> <dt> <blockquote>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; &laquo;&nbsp;Chacun est responsable de ses donn&eacute;es.&nbsp;&raquo;</blockquote> </dt> <dt> <blockquote>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; &laquo;&nbsp;C&rsquo;est souvent li&eacute; effectivement &agrave; une personne&nbsp;&raquo;</blockquote> </dt> <dt> <blockquote>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Les recherches sont en g&eacute;n&eacute;ral solitaires et chacun a son propre syst&egrave;me, ce qui est une &laquo;&nbsp;catastrophe&nbsp;&raquo; car il n&#39;y a aucune proc&eacute;dure de stockage</blockquote> </dt> <dt> <blockquote>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; &laquo;&nbsp;Chacun ici g&egrave;re ses donn&eacute;es. Enfin, c&rsquo;est le milieu universitaire.&nbsp;&raquo;</blockquote> </dt> <dt> <blockquote>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; &laquo;&nbsp;Les gens on une vision du stockage individuelle des donn&eacute;es donc c&rsquo;est limit&eacute;, quand c&rsquo;est conserv&eacute;&nbsp;! &raquo;</blockquote> </dt> <dt> <blockquote>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; &laquo;&nbsp;Tr&egrave;s franchement, je ne suis pas s&ucirc;r que mes coll&egrave;gues voient un int&eacute;r&ecirc;t &agrave; ce que le laboratoire archive les donn&eacute;es de recherche, mais il faudrait que je leur pose la question pour savoir. Chaque chercheur est persuad&eacute; du fait qu&rsquo;il faut archiver les donn&eacute;es de recherche, il n&rsquo;y a pas le moindre doute par rapport &agrave; cela. Mais le fait de proposer &agrave; nos coll&egrave;gues de leur r&eacute;server un espace d&rsquo;archivage de leurs donn&eacute;es de recherche qui soit prot&eacute;ger avec un acc&egrave;s limit&eacute;, pourquoi pas ? Il faudrait que mes coll&egrave;gues y trouvent un int&eacute;r&ecirc;t, et je ne suis pas s&ucirc;r du tout qu&rsquo;ils y trouvent un int&eacute;r&ecirc;t, donc je me pose la question et c&rsquo;est une question que je pourrais poser &agrave; l&rsquo;occasion, par exemple, du conseil scientifique du laboratoire.&nbsp;&raquo;</blockquote> </dt> </dl> <p>Deux directeurs posent la question des risques g&eacute;n&eacute;r&eacute;s par cette conservation individuelle&nbsp;: la perte des donn&eacute;es lorsque le chercheur cesse ses activit&eacute;s d&rsquo;une part et le risque technique li&eacute; &agrave; la d&eacute;faillance du mat&eacute;riel d&rsquo;autre part. L&rsquo;id&eacute;e d&rsquo;offrir des espaces de stockage via l&rsquo;universit&eacute; ou une biblioth&egrave;que est assez peu &eacute;voqu&eacute;e, ou marqu&eacute;e par un fort doute quant &agrave; sa r&eacute;alisation, en raison notamment de l&rsquo;investissement en temps n&eacute;cessaire pour classer les donn&eacute;es. Sur ce point, le fait qu&rsquo;aucun directeur de laboratoire ne soit issu de la documentation nous semble expliquer l&rsquo;absence de questions relatives &agrave; la gestion de contenu et &agrave; la documentation des archives.&nbsp;</p> <p>Seul le laboratoire d&rsquo;arch&eacute;ologie est habitu&eacute; &agrave; un stockage administratif ext&eacute;rieur, au niveau du minist&egrave;re de la culture. &nbsp;</p> <p>&nbsp;</p> <p>&radic; La question des types de donn&eacute;es qui doivent &ecirc;tre conserv&eacute;e et de la dur&eacute;e de leur conservation suscite un quasi consensus. Quasiment toutes les donn&eacute;es de recherche m&eacute;ritent d&rsquo;&ecirc;tre conserv&eacute;es, sur la p&eacute;riode la plus longue possible, en coh&eacute;rence avec les usages propres &agrave; chaque domaine scientifique. &nbsp;&nbsp;</p> <blockquote> <p>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; &laquo;&nbsp;infinie&nbsp;&raquo; car, en arch&eacute;ologie on d&eacute;truit le site que l&rsquo;on explore.</p> <p>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; &laquo;&nbsp;Une donn&eacute;e n&rsquo;est pas disqualifi&eacute;e, notamment par rapport &agrave; cette perspective socio-historique qui est de plus en plus pr&eacute;sente en sociologie. Et il y aurait une autre raison [&hellip;]&nbsp; qui serait une contribution &agrave; l&rsquo;histoire de la discipline.&nbsp;&raquo;</p> <p>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; &laquo;&nbsp;On consid&egrave;re qu&rsquo;on peut garder au moins 10 ans, travailler au moins 10 ans sur les m&ecirc;me donn&eacute;es&nbsp;&raquo;&nbsp; [&hellip;] Donc il y a l&rsquo;obligation dans nos disciplines de faire des s&eacute;ries longues et il y a l&rsquo;obligation de garder aussi des donn&eacute;es assez longtemps, consid&eacute;rant que ces donn&eacute;es peuvent toujours illustrer le propos parce que c&rsquo;est des choses qui ne changent pas aussi vite.&nbsp;&raquo; &nbsp;</p> <p>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; &laquo;&nbsp;Il est int&eacute;ressant de conserver les donn&eacute;es tr&egrave;s longtemps pour pouvoir avoir une appr&eacute;hension longitudinale des choses, c&rsquo;est-&agrave;-dire une appr&eacute;hension dans la dur&eacute;e. Il n&rsquo;y a pas de r&egrave;gles universelles.&nbsp;&raquo;</p> </blockquote> <p>&nbsp;</p> <p>&radic; La r&eacute;ticence au partage des donn&eacute;es est tr&egrave;s forte. Elle est principalement expliqu&eacute;e par le sentiment de propri&eacute;t&eacute; de ses donn&eacute;es de recherche que conf&egrave;re l&rsquo;habitude du travail individuel. Le partage n&rsquo;est envisag&eacute; qu&rsquo;&agrave; raison d&rsquo;une relation &eacute;troite avec ceux avec qui l&rsquo;on accepte(rait) de partager.</p> <blockquote> <p>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Il faut &laquo;&nbsp;que tout le monde joue le jeu&nbsp;&raquo;&nbsp;; je suis &laquo;&nbsp;ouverte, mais &ccedil;a d&eacute;pend des gens&nbsp;[&hellip;] Il faut conna&icirc;tre les gens pour partager et d&rsquo;une certaine mani&egrave;re avoir confiance&nbsp;&raquo;</p> <p>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; &laquo;&nbsp;On est quand m&ecirc;me encore tr&egrave;s marqu&eacute; par la recherche individuelle du chercheur qui porte son projet, qui r&eacute;cup&egrave;re son mat&eacute;riel. [&hellip;] Et donc la mise en commun (cherche ses mots / h&eacute;sitant) y&rsquo;a le rapport &agrave; &agrave; son propre mat&eacute;riau qui fait que l&rsquo;archiver ou le stocker, &ccedil;a veut dire le rendre public [&hellip;] Je ne dis pas que &ccedil;a bloque, mais [&hellip;] &ccedil;a peut provoquer des blocages.&nbsp;&raquo;</p> <p>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; En sont responsables &laquo;&nbsp;tous ceux qui participent &agrave; une enqu&ecirc;te donn&eacute;e et une &eacute;tude donn&eacute;e. Ce n&rsquo;est pas forc&eacute;ment une personne qui dirige les choses mais &ccedil;a appartient &agrave; tous ceux qui participent au projet. C&rsquo;est l&rsquo;&eacute;quipe des chercheurs qui disposent des donn&eacute;es et qui a &laquo;&nbsp;droit de propri&eacute;t&eacute;&nbsp;&raquo; de ces donn&eacute;es. C&rsquo;est eux qui g&egrave;rent si on a le droit de les diffuser ou pas.&nbsp;&raquo;</p> <p>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; &laquo;&nbsp;On donne rarement b&eacute;n&eacute;volement. Les enqu&ecirc;tes ont un co&ucirc;t. Il est difficile de dire &laquo;&nbsp;moi je ne supporte pas les co&ucirc;ts seulement les b&eacute;n&eacute;fice&nbsp;&raquo;.</p> <p>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; &laquo;&nbsp;Les gens ne sont pas r&eacute;ticents du tout &agrave; travailler de mani&egrave;re collective. [&hellip;]&nbsp;on a l&rsquo;occasion aujourd&rsquo;hui de le faire plus. Je vous parle pour mon labo, mais je pense que c&rsquo;est quand m&ecirc;me une tendance g&eacute;n&eacute;rale pour les Sciences Humaines et Sociales. Il y a plus d&rsquo;occasions de travailler de mani&egrave;re collective. &Ccedil;a n&rsquo;emp&ecirc;chera pas que les gens continuent &agrave; travailler de mani&egrave;re individuelle. Pour une raison simple, c&rsquo;est que l&rsquo;&eacute;valuation dans la recherche en Sciences Humaines et Sociales se fait &agrave; partir d&lsquo;articles. lls sont plus souvent &eacute;crits seuls dans le domaine des Sciences Humaines et Sociales qu&rsquo;en sciences.&nbsp;&raquo;</p> <p>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; &laquo;&nbsp;On consid&egrave;re, c&rsquo;est un usage chez nous, que ces donn&eacute;es appartiennent aux chercheurs. Et je pense que dans beaucoup de champs disciplinaires c&rsquo;est le cas. On ne va pas n&eacute;cessairement mettre en commun des donn&eacute;es, sauf peut- &ecirc;tre sur des programmes de recherche o&ugrave; l&rsquo;on travaille &agrave; plusieurs, des programmes de recherche collectifs.&nbsp;[&hellip;] Tout travail m&eacute;rite salaire. A partir du moment o&ugrave; l&rsquo;on fait une recherche o&ugrave; l&rsquo;on fait des efforts pour recueillir des informations et les analyser soi-m&ecirc;me, on n&rsquo;a pas envie que la Terre enti&egrave;re y ait acc&egrave;s. Pas m&ecirc;me les autres membres du laboratoire. Je vois difficilement comment les chercheurs accepteraient comme &ccedil;a de partager leurs donn&eacute;es de recherche avec tout le monde, m&ecirc;me apr&egrave;s les avoir exploit&eacute;es.&nbsp;&raquo;</p> <p>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Ne pas donner ses donn&eacute;es de recherche par peur d&rsquo;&ecirc;tre jug&eacute; sur ce que l&rsquo;on a fait ? &laquo;&nbsp;Alors, non &ccedil;a ne rentre pas vraiment en ligne de compte.&nbsp;&raquo;&nbsp;</p> </blockquote> <p>Plusieurs directeurs de th&egrave;ses consid&egrave;rent diff&eacute;remment le cas des doctorants &agrave; qui l&rsquo;on demande de joindre leurs donn&eacute;es de recherche en annexe de leurs th&egrave;ses, ce qui revient &agrave; leur imposer de les partager, &agrave; tout le moins avec les membres du jury. Pour l&rsquo;un d&rsquo;entre eux, en contrepartie, &laquo;&nbsp;les coll&egrave;gues seraient compl&egrave;tement pr&ecirc;ts &agrave; donner leurs sources de base &agrave; des doctorants, s&rsquo;ils veulent faire des comparaisons.&nbsp;&raquo;</p> <p>Il faut signaler &eacute;galement que la diversit&eacute; des champs disciplinaires couverts par les directeurs de laboratoire interrog&eacute;s a mis en &eacute;vidence une difficult&eacute; triviale, celle due &agrave; la grande diversit&eacute; des donn&eacute;es de recherche&nbsp;: enregistrements d&rsquo;entretiens, prises de notes, journal, bases de donn&eacute;es quantitatives, statistiques, archives, mat&eacute;riaux arch&eacute;ologiques, sources litt&eacute;raires anciennes, gravures, inscriptions, archives, presse, sculptures, &oelig;uvres d&rsquo;art, partitions de musique&hellip; Tout mat&eacute;riau de recherche doit &ecirc;tre consid&eacute;r&eacute; non seulement dans sa dimension <em>donn&eacute;e</em> mais &eacute;galement dans sa mat&eacute;rialit&eacute;, laquelle rend substantiellement diff&eacute;rente la probl&eacute;matique du stockage et du partage selon les types d&rsquo;objet supports. Si des photos ou des images num&eacute;riques peuvent, dans bien des cas, constituer des empreintes satisfaisantes en terme de contenu informationnel, le contact avec l&rsquo;objet lui-m&ecirc;me reste, dans certaines disciplines, difficilement rempla&ccedil;able, ce qui fait du partage de donn&eacute;es num&eacute;riques une op&eacute;ration appauvrie dans sa substance dans certaines disciplines.</p> <p>&nbsp;</p> <p>&radic; Le questionnement sur les risques associ&eacute;s &agrave; la mise &agrave; disposition d&rsquo;autres chercheurs de certaines donn&eacute;es, notamment les risques d&eacute;ontologiques&nbsp;li&eacute;s &agrave; la confidentialit&eacute;, est fort d&egrave;s que le mat&eacute;riau de travail du laboratoire comporte une forte proportion d&rsquo;&eacute;tudes qualitatives par entretiens.</p> <blockquote> <p>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; &nbsp;&laquo;&nbsp;On peut diffuser les analyses que l&rsquo;on peut faire &agrave; partir d&rsquo;une enqu&ecirc;te. Mais livrer les chiffres eux m&ecirc;me, les informations, c&rsquo;est plus compliqu&eacute;. Il y a des probl&egrave;mes de d&eacute;ontologie qui se posent. A mon sens d&egrave;s l&rsquo;instant o&ugrave; c&rsquo;est un peu confidentiel, c&rsquo;est toujours difficile de mettre sur la place publique.&nbsp;&raquo;</p> <p>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; &laquo;&nbsp;Il y a quand m&ecirc;me une fronti&egrave;re qui est une fronti&egrave;re d&eacute;ontologique de la profession. Quand on fait des entretiens par exemple, on garantit l&rsquo;anonymat.&nbsp;&raquo;</p> <p>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; &laquo;&nbsp;Il peut y avoir des donn&eacute;es confidentielles, parce qu&rsquo;il y a beaucoup d&rsquo;enqu&ecirc;tes qualitatives. On pourrait cacher les noms, anonymer les enqu&ecirc;tes sans probl&egrave;mes. Les th&egrave;mes que l&rsquo;on traite, c&rsquo;est &eacute;videmment des th&egrave;mes qui int&eacute;ressent le grand public. Il faudrait arriver &agrave; faire de l&rsquo;open data [&hellip;] D&rsquo;ailleurs le fait que l&rsquo;on ait [ce] contrat avec la r&eacute;gion va nous y obliger. Je pense que la r&eacute;gion va se poser la question avec nous de savoir comment elle peut rendre accessible toutes ces donn&eacute;es &agrave; la communaut&eacute; humaine.&nbsp;&raquo;</p> <p>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; &laquo;&nbsp;Rendre les enqu&ecirc;tes anonymes c&rsquo;est compl&egrave;tement possible. Alors apr&egrave;s [le probl&egrave;me vient] des tous petits &eacute;chantillons. M&ecirc;me si c&rsquo;est anonym&eacute;, on reconnait tout de suite d&rsquo;o&ugrave; &ccedil;a vient. [&hellip;] Si vous faites une enqu&ecirc;te sur la concentration des immigr&eacute;s &agrave; Poitiers, si vous &ecirc;tes avec des petits &eacute;chantillons de blocs de maisons, de blocs de HLM par exemple, assez vite les gens du quartier qui consulteraient ces donn&eacute;es pourraient faire le lien entre les r&eacute;ponses et les auteurs.&nbsp;&raquo;</p> <p>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; &laquo;&nbsp;On va se poser la question de savoir si l&rsquo;acc&egrave;s &agrave; cette connaissance qui sera mise &agrave; disposition du public peut entrainer des r&eacute;actions discriminatoires. Je crois que dans 99,9 % des cas ce ne sera pas le cas. Il faudra regarder quand m&ecirc;me les 0,01 % restant. Qu&rsquo;est ce que &ccedil;a veut dire discriminatoire ? Qu&rsquo;on ne peut pas utiliser ces donn&eacute;es contre les gens qui sont concern&eacute;s par cette enqu&ecirc;te l&agrave;.&nbsp;&raquo;&nbsp;</p> </blockquote> <p>&nbsp;</p> <p>&radic; Lorsque la question du partage des donn&eacute;es avec le grand public&nbsp;est abord&eacute;e, elle suscite de nombreuses appr&eacute;hensions. L&rsquo;un &eacute;voque des probl&egrave;mes s&eacute;mantiques (interpr&eacute;tation des mots plus connot&eacute;e par le grand public que par les chercheurs), l&rsquo;aspect disparate des donn&eacute;es difficile &agrave; comprendre, la confidentialit&eacute; dans le domaine du qualitatif, la difficult&eacute; technique d&rsquo;acc&egrave;s aux donn&eacute;es, une nouvelle fois le sentiment de la propri&eacute;t&eacute; des donn&eacute;es, enfin le risque de perturbation des sites de fouille et de pillage si leur localisation devait &ecirc;tre tout &agrave; fait pr&eacute;cise.</p> <blockquote> <p>Je serais r&eacute;ticent sur les cahiers d&rsquo;observations ethnographiques parce que c&rsquo;est not&eacute; [&hellip;] &agrave; l&rsquo;&eacute;tat brut. Alors faut pas non plus que ce soit m&eacute;sinterpr&eacute;t&eacute; [&hellip;]ces archives pour qu&rsquo;elles soient int&eacute;ressantes, [il faut qu&rsquo;elles] soient reli&eacute;es aux productions scientifiques r&eacute;alis&eacute;es &agrave; partir de ces archives. Parce que si elles sont &agrave; l&rsquo;&eacute;tat brut, &ccedil;a peut &ecirc;tre difficile de comprendre dans quel contexte elles ont &eacute;t&eacute; obtenues et &agrave; quoi elles ont servi en fin de compte.&nbsp;&raquo;&nbsp;</p> </blockquote> <p>&nbsp;</p> <p>&radic; Notre hypoth&egrave;se &eacute;tait que le directeur du laboratoire a un r&ocirc;le central dans l&rsquo;impulsion d&rsquo;une r&eacute;flexion ou d&rsquo;une action en mati&egrave;re de conservation et/ou de partage des donn&eacute;es. Or les directeurs interrog&eacute;s ne se consid&egrave;rent pas responsables dans ce domaine et n&rsquo;ont rien entrepris de particulier en mati&egrave;re de conservation s&eacute;curis&eacute;e des donn&eacute;es ou de partage de donn&eacute;es. Deux groupes se distinguent&nbsp;: les plus nombreux sont ceux qui semblent consid&eacute;rer l&rsquo;&eacute;tat actuel comme non r&eacute;formable (pour les raisons &eacute;voqu&eacute;es ci-dessus)&nbsp;; deux par contre reconnaissent se sentir questionn&eacute;s dans leurs pratiques par l&rsquo;interview &agrave; laquelle ils ont r&eacute;pondu.&nbsp;</p> <blockquote> <p>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; &laquo;&nbsp;Pas directement en tant que directeur, mais ce sont les responsables des &eacute;tudes qui sont responsables de leurs donn&eacute;es. Ils les archivent eux-m&ecirc;mes. Il n&rsquo;y a pas de centralisation au niveau du laboratoire. Chacun est propri&eacute;taire de ses donn&eacute;es d&egrave;s l&rsquo;instant ou &ccedil;a r&eacute;sulte d&rsquo;enqu&ecirc;te.&nbsp;&raquo;&nbsp;</p> <p>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; &laquo;&nbsp;Il faudrait qu&rsquo;on progresse l&agrave;-dessus. On n&rsquo;a pas syst&eacute;matiquement vers&eacute; dans un pot commun quand les personnes s&rsquo;en vont, [&hellip;] la partie base de donn&eacute;es de leurs recherches. Moi je vais le faire par exemple [&agrave; propos de la mati&egrave;re r&eacute;unie par une doctorante], enfin on le mettra quelque part. Mais on ne sait pas o&ugrave; est le quelque part justement. [&hellip;]. Quand les gens partent ou quand les gens ont termin&eacute; une recherche, c&rsquo;est un vrai probl&egrave;me. C&rsquo;est une question qu&rsquo;il faudra que l&rsquo;on se pose. Votre venue elle est utile pour moi parce quelle me fait prendre conscience de &ccedil;a.&nbsp;&raquo;</p> <p>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; &laquo;&nbsp;Ce sont les chercheurs qui conservent par devers eux les donn&eacute;es de recherche. Le laboratoire n&rsquo;y a pas acc&egrave;s. Pourquoi le laboratoire n&rsquo;y a pas acc&egrave;s, parce que nous consid&eacute;rons quelque part que ces donn&eacute;es de recherche rel&egrave;vent de la propri&eacute;t&eacute; intellectuelle de chaque chercheur.</p> <p>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; &laquo;&nbsp;A l&rsquo;&eacute;chelle de l&rsquo;&eacute;quipe on ne sait jamais vraiment pos&eacute; la question de mettre en commun des donn&eacute;es&nbsp;&raquo;</p> <p>-&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; &laquo;&nbsp;Il va falloir qu&rsquo;on y pense&nbsp;&raquo;</p> </blockquote> <p>&nbsp;</p> <p>&radic; Notons pour terminer que l&rsquo;un des entretiens a &eacute;volu&eacute; vers une r&eacute;flexion, non recherch&eacute;e initialement, sur l&rsquo;hypoth&egrave;se de la vente de donn&eacute;es de recherche, forme envisageable de partage des dites donn&eacute;es. La r&eacute;action du directeur de laboratoire confront&eacute; &agrave; cette question a &eacute;t&eacute; celle d&rsquo;une opposition tr&egrave;s vive et ferme &agrave; ce qui lui est apparu comme de la sous-traitance, voire de la &laquo;&nbsp;prostitution intellectuelle.</p> <blockquote> <p>&laquo;&nbsp;Est-il envisageable pour les chercheurs de partager leurs donn&eacute;es de recherche en &eacute;change d&rsquo;une contrepartie &eacute;conomique ? Personnellement j&rsquo;y suis hostile. [&hellip;] Je pense que d&rsquo;autres ne seraient pas contre, mais j&rsquo;y suis hostile parce qu&rsquo;&agrave; ce moment-l&agrave;, si les donn&eacute;es de recherche deviennent des donn&eacute;es commercialisables... de toute mani&egrave;re rassembler des donn&eacute;es qui n&rsquo;ont pas &eacute;t&eacute; recueillies de la m&ecirc;me mani&egrave;re, avec le m&ecirc;me protocole et essayer d&rsquo;exploiter des donn&eacute;es plus larges, d&rsquo;un point de vue scientifique cela va poser des probl&egrave;mes m&eacute;thodologiques. Imaginons qu&rsquo;on essaye d&rsquo;utiliser les donn&eacute;es collect&eacute;es sur une recherche de type entretien semi-directif men&eacute; chez un constructeur automobile, une recherche de type ethnographie men&eacute;e chez un fabricant d&rsquo;&eacute;lectrom&eacute;nager, le mode de collecte des donn&eacute;es n&rsquo;a pas n&eacute;cessairement &eacute;t&eacute; le m&ecirc;me et donc ensuite essayer de rapprocher ces donn&eacute;es va poser un probl&egrave;me m&eacute;thodologique &eacute;norme. Je dis bien d&rsquo;un point de vue m&eacute;thodologique de recherche. D&rsquo;un point de vue &eacute;conomique, je vois un probl&egrave;me d&rsquo;&eacute;thique qui se pose : c&rsquo;est que les &eacute;quipes de recherche les mieux dot&eacute;es en moyens financiers seront capables d&rsquo;acheter les donn&eacute;es des autres et donc produiront des recherches avec des donn&eacute;es &agrave; plus large &eacute;chelle, ainsi de suite, et dans le contexte acad&eacute;mique actuel o&ugrave; plus vous faites d&rsquo;&eacute;tudes de cas, plus vous multipliez les donn&eacute;es, plus on pense que c&rsquo;est fiable, [alors que] ce n&rsquo;est pas toujours le cas, alors ils en tireront un m&eacute;rite sup&eacute;rieur, ils en garderont une reconnaissance suppl&eacute;mentaire et r&eacute;colteront des fonds plus importants. Donc en d&eacute;finitive, si vous faites &ccedil;a, vous aller mettre en place un syst&egrave;me o&ugrave; l&rsquo;on ne va pr&ecirc;ter qu&rsquo;aux riches. Et ce sont les gros laboratoires avec de gros moyens financiers qui vont r&eacute;cup&eacute;rer les donn&eacute;es.&nbsp;&raquo; [&hellip;] Nous [pourrions] peut-&ecirc;tre gagner de l&rsquo;argent en faisant &ccedil;a, mais en termes de reconnaissance de notre qualit&eacute; de chercheur, il n&rsquo;y aurait plus rien. Je vais utiliser un terme tr&egrave;s fort : c&rsquo;est de la prostitution intellectuelle, c&rsquo;est-&agrave;-dire que dans un domaine o&ugrave; nous devons valoriser notre capacit&eacute; &agrave; fournir des r&eacute;sultats de recherche et construire des th&eacute;ories originales, certains d&rsquo;entre nous choisiraient de ne plus &ecirc;tre reconnus pour &ccedil;a, simplement faire de l&rsquo;argent en vendant leurs services &agrave; d&rsquo;autres qui cherchent la reconnaissance.&nbsp;&raquo;</p> </blockquote> <h2><a id="t3"></a>3- CONCLUSION</h2> <p>Notre &eacute;tude montre bien l&rsquo;existence <em>d&rsquo;une forme d&rsquo;&eacute;paisseur sociale commune</em> aux diff&eacute;rents laboratoires de sciences humaines &eacute;tudi&eacute;s, celle de pratiques de conservation des donn&eacute;es avant tout personnelles accompagn&eacute;es d&rsquo;une forte r&eacute;ticence au partage des donn&eacute;es, partage acceptable avec les membres d&rsquo;un m&ecirc;me projet de recherche, voire avec un tout petit nombre de chercheurs proches mais sans plus. Le partage dans un esprit <em>d&rsquo;open data</em> est quasiment exclu. Si l&rsquo;expression de ces habitus varie, le fond reste le m&ecirc;me. Certains interrog&eacute;s estiment ces usages communs aux sciences humaines et sociales qui seraient moins habitu&eacute;es aux pratiques collectives que les sciences de la mati&egrave;re ou la m&eacute;decine par exemple. Nous entendons cette explication mais n&rsquo;y souscrivons pas.</p> <p>Il serait tout &agrave; fait pr&eacute;tentieux d&rsquo;affirmer quoi que ce soit pour l&rsquo;avenir, mais nous estimons que cette &eacute;paisseur sociale peut &ecirc;tre &agrave; l&rsquo;origine d&rsquo;un risque r&eacute;el d&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; informationnelle scientifique des laboratoires de l&rsquo;&eacute;tude et, plus largement, des laboratoires qui resteront dans cette d&eacute;marche. Il est &agrave; craindre que les laboratoires ne se comportent pas en &laquo;&nbsp;couches m&eacute;diatrices&nbsp;&raquo; du partage des donn&eacute;es mais en filtres protecteurs de leurs chercheurs.</p> <p>La question m&eacute;rite d&rsquo;&ecirc;tre pos&eacute;e strat&eacute;giquement. Le portail europ&eacute;en pour la recherche et l&rsquo;innovation Horizon 2020 sugg&egrave;re une volont&eacute; d&rsquo;aller vers un partage des donn&eacute;es de recherche, d&egrave;s lors qu&rsquo;elles ont fait l&rsquo;objet d&rsquo;un financement europ&eacute;en. Les &eacute;quipes et laboratoires qui entrent dans ce processus prennent l&rsquo;habitude de ce partage. Ce faisant, ils obtiennent des financements et ne sont pas d&eacute;pouill&eacute;s de leurs possibilit&eacute;s de publication par les voies usuelles scientifiques. En termes d&rsquo;intelligence &eacute;conomique, l&rsquo;influence de ces laboratoires promet de s&rsquo;accroitre alors que leurs pratiques &eacute;volueront dans le sens de l&rsquo;<em>open data</em> aujourd&rsquo;hui fortement pr&eacute;conis&eacute;. Partager des donn&eacute;es qui ont &eacute;t&eacute; exploit&eacute;es, ce n&rsquo;est pas se priver de la possibilit&eacute; de les r&eacute;exploiter soi-m&ecirc;me. Ce peut &ecirc;tre aussi une mani&egrave;re d&rsquo;affirmer un travail r&eacute;alis&eacute;. Selon le Knwoledge Exchange and Science Europe Briefing Paper de mai 2016 (p. 8), &laquo;&nbsp;<em>Research Data Management is undeniably part of good scientific practice ; RDM implies specific tasks and responsibilities which require adequate support and provision to be properly undertaken by researchers.</em>&nbsp;&raquo;</p> <p>Les r&egrave;gles du jeu scientifique sont en train de changer. Il sera peut-&ecirc;tre difficile &agrave; des scientifiques qui aspirent, comme citoyens, &agrave; un large partage des connaissances dans le contexte de l&rsquo;open data administratif par exemple, de maintenir la privaut&eacute; de donn&eacute;es de recherche lorsqu&rsquo;elles ne sont sous-tendues par aucune une obligation de confidentialit&eacute;. Si les arguments techniques, m&eacute;thodologiques, documentaires demandent un examen attentif, il nous semble que certains arguments deviendront assez vite obsol&egrave;tes dans les ann&eacute;es &agrave; venir, notamment l&rsquo;argument de la propri&eacute;t&eacute; individuelle des donn&eacute;es de recherche par un chercheur appoint&eacute; par la nation. Les nombreuses initiatives prises au cours des derniers mois, &eacute;voqu&eacute;es plus haut, semblent donner le sens de l&rsquo;histoire dans ce domaine.&nbsp;</p> <h2>4- BIBLIOGRAPHIE</h2> <p>Assante M. et al, (2016) Are Scientific Data Repositories Coping with Research Data Publishing, <em>Data Science Journal</em>, 15&nbsp;:6, pp. 1-24</p> <p>Aussant D., (2009), Le nouveau visage des donn&eacute;es de recherche, <em>Documentaliste - Sciences de l&rsquo;information</em>, vol. 46, n&deg;1, p. 15-17</p> <p>Bianchini L. (2014), Dans les universit&eacute;s, d&eacute;sabonnements en masse aux revues scientifiques, <em>L&rsquo;Obs-Rue 89</em>, mis en ligne le 3 f&eacute;vrier. 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