<p><strong>Abstract :</strong> In this paper we discuss about the role of trust in the informational practices of commanders. We discuss about the concept of trust of both organizational and interpersonal levels. This original paper is based on qualitative empirical study. Twenty-seven interviews were conducted according to Dervin&rsquo;s sense-making methodology.</p> <p><strong>Keywords :</strong>&nbsp;Information practices, information behaviour, trust, informational sources, information sharing, commanders, military domain, empirical qualitative survey</p> <h2>INTRODUCTION&nbsp;</h2> <p>A l&rsquo;heure du d&eacute;veloppement des technologies num&eacute;riques, l&rsquo;objectif de cet article est de prendre du recul sur notre fa&ccedil;on de construire les dispositifs de communication afin d&rsquo;identifier les pistes qui permettraient d&rsquo;am&eacute;nager concepts m&eacute;thodes et outils pour mieux prendre en compte l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute;.&nbsp;</p> <p>Dans un contexte de g&eacute;n&eacute;ralisation des technologies num&eacute;riques et de renforcement des &eacute;changes entre individus, que ceux-ci soient r&eacute;sidants ou r&eacute;cemment install&eacute;s, nous pouvons constater un foisonnement des interactions entre initi&eacute;s et une mise &agrave; l&rsquo;&eacute;cart de fait d&rsquo;un grand nombre de personnes. Dans leurs activit&eacute;s professionnelles ou personnelles de nombreux acteurs, pour diff&eacute;rentes raisons, se retrouvent exclus de la vie num&eacute;rique.&nbsp;&nbsp;</p> <p>L&rsquo;objet de cet article n&rsquo;est pas de d&eacute;tailler les raisons de l&rsquo;exclusion, mais de porter un regard sur la fa&ccedil;on dont nous abordons en sciences humaines et sociales (SHS) et plus particuli&egrave;rement en sciences de l&rsquo;information et de la communication (SIC) la construction de dispositifs de communication, puis de rep&eacute;rer comment mieux appr&eacute;hender l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute;.&nbsp;</p> <h2><a id="t2"></a>1- LA PROBLEMATIQUE</h2> <p>Le travail r&eacute;alis&eacute; ces derni&egrave;res ann&eacute;es en SHS et en SIC a permis d&rsquo;am&eacute;liorer dans de larges proportions la qualit&eacute; des dispositifs num&eacute;riques de communication (Riccio, 2010).</p> <p>Le fait de mieux comprendre les enjeux et normes port&eacute;s par les acteurs en situation &agrave; l&rsquo;aide par exemple de la th&eacute;orie s&eacute;mio-contextuelle des communications (Mucchielli, 2000) ou de mieux appr&eacute;hender les luttes de pouvoir et de positionnement des diff&eacute;rents acteurs &agrave; l&rsquo;aide par exemple de la th&eacute;orie acteur-r&eacute;seau (Akrich Callon et Latour, 2006) facilite d&eacute;sormais la construction de dispositifs de qualit&eacute;. Ces derniers sont aujourd&rsquo;hui beaucoup plus satisfaisants&nbsp;: pour les utilisateurs, comme pour les &eacute;quipes de conception.</p> <p>A noter que nous nous appuyons ici sur la notion de dispositif propos&eacute;e par Michel Foucault : &laquo;&nbsp;un ensemble r&eacute;solument h&eacute;t&eacute;rog&egrave;ne, comportant des discours, des institutions, des am&eacute;nagements architecturaux, des d&eacute;cisions r&eacute;glementaires, des lois, des mesures administratives, des &eacute;nonc&eacute;s scientifiques, des propositions philosophiques, morales, philanthropiques, bref&nbsp;: du dit, aussi bien que du non-dit&nbsp;&raquo; (Foucault, 1994).</p> <p>Mais, les approches utilis&eacute;es permettent-elles de prendre en compte l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute;, entendue comme une appr&eacute;hension de ce qui est autre, de ce qui est diff&eacute;rent&nbsp;?</p> <p>La r&eacute;ponse est complexe.</p> <p>Nous avons travaill&eacute; par exemple sur la conception de dispositifs destin&eacute;s &agrave; des populations fragiles&nbsp;: travail centr&eacute; sur la mise au point d&rsquo;un dispositif de r&eacute;&eacute;ducation fonctionnelle pour les d&eacute;ficients visuels (Vasquez, 2000). Le dispositif cr&eacute;&eacute; est un succ&egrave;s, il est aujourd&rsquo;hui utilis&eacute;&nbsp;en Europe comme en Am&eacute;rique du nord.&nbsp;</p> <p>Mais en prenant du recul, la d&eacute;marche que avons mise en &oelig;uvre - une combinaison d&rsquo;approches s&eacute;mio-contextuelle et acteur-r&eacute;seau bas&eacute;e sur une validation par saturation qualitative et triangulation - permet avant tout de traiter des groupes assez homog&egrave;nes. Elle laisse peu de place pour appr&eacute;hender une distribution de l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute;.&nbsp;</p> <p>En fait, ces th&eacute;ories &ndash; sans le revendiquer de fa&ccedil;on explicite &ndash; sont construites sur la base de la notion de classe. Rappelons que la classe peut &ecirc;tre d&eacute;finie comme&nbsp;: &laquo;&nbsp;un ensemble d&rsquo;individus poss&eacute;dant la m&ecirc;me structure et le m&ecirc;me comportement&nbsp;&raquo; (Stefik &amp; Bobrow, 1986). L&rsquo;identification en situation des attributs (des propri&eacute;t&eacute;s) et des individus permet de construire des groupes d&rsquo;acteurs. Un individu d&egrave;s qu&rsquo;il poss&egrave;de l&rsquo;ensemble des attributs qui caract&eacute;risent une classe est alors rattach&eacute; &agrave; cette classe, par exemple : clients, commer&ccedil;ants, concurrents &hellip;&nbsp;</p> <p>Ces th&eacute;ories permettent aussi d&rsquo;identifier les individus qui poss&egrave;dent un poids particulier en regard de l&rsquo;une des dimensions (attributs ou propri&eacute;t&eacute;s) propre &agrave; la grille de lecture utilis&eacute;e comme&nbsp;: les enjeux, les normes, le pouvoir, ou encore la position. Mais il est beaucoup plus difficile de prendre en compte les individus qui n&rsquo;appartiennent pas &agrave; une classe, sans pour autant que leurs propri&eacute;t&eacute;s intrins&egrave;ques attire l&rsquo;attention de l&rsquo;analyste.</p> <p>Aussi, que fait-on dans ce cas des individus &ndash; comme l&rsquo;ornithorynque d&rsquo;Umberto Eco (Eco, 1997) &ndash; qui appartiennent &agrave; plusieurs classes et <em>a fortiori</em> des individus qui n&rsquo;appartiennent &agrave; aucune des classes ?</p> <p>Comment &agrave; l&rsquo;aide de ces th&eacute;ories peut-on appr&eacute;hender l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; ?</p> <h2><a id="t3"></a>2- LE CONTEXTE</h2> <p>Pour permettre au lecteur de comprendre plus facilement notre d&eacute;marche, nous allons&nbsp; maintenant pr&eacute;senter de fa&ccedil;on synth&eacute;tique les trois &laquo;&nbsp;th&eacute;ories&nbsp;&raquo; sur lesquelles nous nous appuyons.</p> <h4>2-1- La th&eacute;orie s&eacute;mio-contextuelle</h4> <p>L&rsquo;objet de la th&eacute;orie s&eacute;mio-contextuelle des communications (Mucchielli, 2000) est de faire &eacute;merger, dans une approche syst&eacute;mique et constructiviste (Morin, 1994), le sens qui accompagne toute communication g&eacute;n&eacute;ralis&eacute;e, expression d&rsquo;intentionnalit&eacute;s explicites ou latentes dans une situation d&rsquo;&eacute;change par et pour des acteurs.</p> <p>L&rsquo;annotation s&eacute;mio-contextuelle (Riccio, 2003) consiste &agrave; rep&eacute;rer dans le r&eacute;cit &ndash;&nbsp;issu de la mise au net des &eacute;l&eacute;ments d&rsquo;informations collect&eacute;s &ndash; les processus de communication et l&rsquo;impact de ces processus sur les contextes de la situation (spatial, physique, temporel, position, normes, relations, enjeux). Ces annotations, &agrave; situer au plus pr&egrave;s du texte, facilitent l&rsquo;&eacute;mergence du sens et l&rsquo;analyse qui va permettre la compr&eacute;hension g&eacute;n&eacute;rale de la situation.&nbsp;</p> <h4><em><strong>Le contexte spatial</strong></em></h4> <p>Le lieu de r&eacute;union, l&rsquo;am&eacute;nagement de la salle, la position des individus autour de la table, la distance entre les personnes, les moyens techniques, etc. sont des composantes qui &eacute;voqu&eacute;es ou manipul&eacute;es par les acteurs d&rsquo;une situation influencent le sens des communications.</p> <h4><em><strong>Le contexte physique et sensoriel</strong></em></h4> <p>Des impacts sensoriels multiples (visuels, sonores, olfactifs, tactiles) en combinaison avec un contexte spatial organis&eacute; et des acteurs pr&eacute;dispos&eacute;s, peuvent transformer les modalit&eacute;s de perception et la signification des communications.</p> <h4><em><strong>Le contexte temporel&nbsp;</strong></em></h4> <p>Toute communication g&eacute;n&eacute;ralis&eacute;e s&rsquo;inscrit dans un contexte historique (elle vient se positionner dans le cadre de ce qui a d&eacute;j&agrave; &eacute;t&eacute; communiqu&eacute;) et dynamique (elle se caract&eacute;rise par un rythme, r&eacute;gulier ou en rupture, et par des appels au temps, explicites ou implicites).</p> <h4><em><strong>Le contexte des positions respectives des acteurs</strong></em></h4> <p>Chaque individu propose &agrave; travers son langage (tutoiement / vouvoiement) mais aussi son paralangage (habillement) sa vision du positionnement des acteurs de la situation. L&rsquo;&eacute;change est une lutte permanente dans laquelle tout individu cherche &agrave; valoriser sa position.</p> <h4><em><strong>Le contexte culturel de r&eacute;f&eacute;rence aux normes</strong></em></h4> <p>Que ce soit dans la vie professionnelle ou dans la vie personnelle, les normes (culturelles et sociales) et les r&egrave;gles (r&egrave;glements, pratiques et usages) forment un &laquo;&nbsp;d&eacute;j&agrave; l&agrave; &raquo; et d&eacute;finissent un sens a priori partag&eacute; par un groupe d&rsquo;individus.</p> <h4><em><strong>Le contexte relationnel imm&eacute;diat</strong></em></h4> <p>Chaque individu utilise le langage et le paralangage pour s&eacute;duire et influencer ses interlocuteurs. Pour faire &eacute;merger le sens, il est n&eacute;cessaire d&rsquo;identifier les composantes valorisantes et d&eacute;valorisantes mises en &oelig;uvre dans l&rsquo;&eacute;change.</p> <h4><strong><em>Le contexte expressif de l&rsquo;identit&eacute; des acteurs</em></strong></h4> <p>Tout individu est dot&eacute; d&rsquo;un syst&egrave;me de pertinence qui en fonction de ses pr&eacute;occupations forme sa vision du monde, c&#39;est-&agrave;-dire une perception s&eacute;lective des ph&eacute;nom&egrave;nes de la vie (Schutz, 1994). Il n&rsquo;est pas possible de saisir le sens d&rsquo;une communication sans comprendre la motivation des acteurs dans la situation, leurs enjeux.</p> <h4>2-2- La th&eacute;orie de l&rsquo;acteur-r&eacute;seau</h4> <p>La th&eacute;orie de l&rsquo;acteur r&eacute;seau est une th&eacute;orie originale d&eacute;velopp&eacute;e sous l&rsquo;impulsion du Centre de sociologie de l&rsquo;innovation (CSI) de l&rsquo;Ecole des mines de Paris afin d&rsquo;analyser les diff&eacute;rentes fa&ccedil;ons dont soci&eacute;t&eacute; et sciences se m&eacute;langent (Akrich Callon et Latour, 2006). Elle propose de nombreux outils pour la gestion de l&rsquo;innovation et le suivi des transformations techniques.</p> <p>L&rsquo;originalit&eacute; de la th&eacute;orie de l&rsquo;acteur r&eacute;seau, qui s&rsquo;appuie sur le concept d&rsquo;acteur, est de consid&eacute;rer qu&rsquo;il n&rsquo;y a pas dans une situation de micro-acteurs et de macro-acteurs, mais un ensemble d&rsquo;acteurs isomorphes (Callon, 2006). L&rsquo;isomorphie ne signifie pas que tous les acteurs ont la m&ecirc;me taille, mais que la taille ne peut pas &ecirc;tre d&eacute;cid&eacute;e a priori car elle est le r&eacute;sultat de processus de n&eacute;gociation achev&eacute;s ou en-cours.&nbsp;</p> <p>La pratique g&eacute;n&eacute;rale consiste &agrave; utiliser des grilles d&rsquo;analyse diff&eacute;rentes pour &eacute;tudier les micro-acteurs et les macro-acteurs. Mais, un cadrage trop &eacute;troit peut conduire &agrave; des interpr&eacute;tations erron&eacute;es, des contresens. Un cadrage trop large ne permet pas d&rsquo;appr&eacute;hender l&rsquo;ensemble des ph&eacute;nom&egrave;nes. Aussi, la th&eacute;orie de l&rsquo;acteur r&eacute;seau propose d&rsquo;utiliser la m&ecirc;me grille d&rsquo;analyse pour appr&eacute;hender l&rsquo;ensemble des acteurs impliqu&eacute;s dans la situation.</p> <p>L&rsquo;&eacute;tude est &laquo; simplifi&eacute;e &raquo; gr&acirc;ce &agrave; l&rsquo;utilisation d&rsquo;un m&eacute;canisme appel&eacute; : &laquo; bo&icirc;te noire &raquo;. Dans cette approche, le macro-acteur est un micro-acteur assis sur des bo&icirc;tes noires. Les bo&icirc;tes noires sont compos&eacute;es de raisonnements, d&rsquo;habitudes, de forces, d&rsquo;objets, r&eacute;sultats d&rsquo;une n&eacute;gociation et stabilis&eacute;s.</p> <p>&nbsp;</p> <p>Le travail consiste alors &agrave; analyser les op&eacute;rations par lesquelles un acteur cr&eacute;e des asym&eacute;tries plus ou moins durables. Celles-ci peuvent &ecirc;tre expliqu&eacute;es gr&acirc;ce au concept de traduction, d&eacute;velopp&eacute; par Michel Serres (Serres, 1974) et repris par Michel Callon (Callon, 1975). Par traduction est entendu : &laquo; l&rsquo;ensemble des n&eacute;gociations, des intrigues, des actes de persuasion, des calculs, des violences gr&acirc;ce &agrave; quoi un acteur ou une force se permet ou se fait attribuer l&rsquo;autorit&eacute; de parler ou d&rsquo;agir au nom d&rsquo;un autre acteur ou d&rsquo;une autre force &raquo; (Callon et Latour, 2006).</p> <p>Le fait de centrer l&rsquo;&eacute;tude sur l&rsquo;identification des &laquo; n&eacute;gociations &raquo; dans le cours d&rsquo;action et d&rsquo;en inf&eacute;rer le positionnement des acteurs est une voie int&eacute;ressante pour comprendre plus facilement et plus rapidement les composantes essentielles de la situation.</p> <h4>2.3 - La th&eacute;orie des prototypes</h4> <p>Des Grecs de l&rsquo;antiquit&eacute; et plus particuli&egrave;rement d&rsquo;Aristote, nous avons h&eacute;rit&eacute; d&rsquo;une &laquo;&nbsp;tradition &raquo; de classification des objets du monde. Les objets sont organis&eacute;s en groupes ou classes, chaque classe &eacute;tant caract&eacute;ris&eacute;e par un ensemble de propri&eacute;t&eacute;s.&nbsp;</p> <p>Cette &laquo; tradition &raquo; culturelle, &eacute;l&eacute;ment essentiel de nos apprentissages, est &agrave; la base de notre perception du monde : animaux, &eacute;l&eacute;ments naturels, ou objets de la vie courante. Si un objet (par exemple ma voiture) appartient &agrave; une classe (voiture de sport) il en poss&egrave;de alors sans exception toutes les propri&eacute;t&eacute;s (axiome du tiers exclu).</p> <p>S&rsquo;il faut reconna&icirc;tre que la classification aristot&eacute;licienne a facilit&eacute; pendant plusieurs si&egrave;cles le partage et la redistribution des savoirs, le nombre croissant d&rsquo;exceptions &ndash; de l&rsquo;ornithorynque aux connaissances partag&eacute;es par un collectif (Eco, 1997) &ndash; dans un monde complexe en r&eacute;seaux, a conduit ces derni&egrave;res ann&eacute;es de nombreux sp&eacute;cialistes &agrave; s&rsquo;interroger sur le m&eacute;canisme de classification et son impact dans diff&eacute;rents domaines d&rsquo;application. Quelle peut-&ecirc;tre la valeur d&rsquo;un mod&egrave;le sans une vision diachronique du syst&egrave;me (Le Moigne, 1990) ?</p> <p>De p&egrave;re anglais et de m&egrave;re russe, Eleanor Rosch a grandi aux Etats-Unis. Dipl&ocirc;m&eacute;e de Harvard &agrave; la fin des ann&eacute;es 60, elle devient ensuite professeur au d&eacute;partement de Psychologie &agrave; Universit&eacute; de Californie &agrave; Berkeley. Au terme de sa formation, elle d&eacute;cide de partir &eacute;tudier avec son mari anthropologue la population des Danis en Nouvelle Guin&eacute;e. Elle effectuera deux s&eacute;jours en immersion. Son travail a port&eacute; d&rsquo;une part sur les cat&eacute;gories de couleurs et de formes chez ces indig&egrave;nes, d&rsquo;autre part sur l&rsquo;&eacute;ducation des enfants qui est, selon elle : &laquo; un ensemble d&rsquo;&eacute;v&eacute;nements m&eacute;moris&eacute;s d&rsquo;interactions entre m&egrave;res et enfants &raquo;.</p> <p>Il existait jusqu&rsquo;au milieu du XX&egrave;me si&egrave;cle, une vision dominante de la classification des objets du monde : l&rsquo;esprit &laquo; occidental &raquo; &eacute;tait capable d&rsquo;abstraire le savoir des idiosyncrasies de l&rsquo;exp&eacute;rience individuelle quotidienne et, ce faisant, utilisait les lois aristot&eacute;liciennes de la logique.</p> <p>Appliqu&eacute; &agrave; la classification, cela signifiait que pour conna&icirc;tre une cat&eacute;gorie (ou un ensemble de classes) il fallait avoir des crit&egrave;res abstraits, pr&eacute;cis, n&eacute;cessaires et suffisants pour d&eacute;finir les &eacute;l&eacute;ments qu&rsquo;elle incluait (i.e. pour &eacute;noncer ses propri&eacute;t&eacute;s) (Rosch et Lloyd, 1978).&nbsp;</p> <p>Passionn&eacute;e par la probl&eacute;matique langage / perception, Eleanor Rosch, qui travaillait depuis plusieurs ann&eacute;es avec Roger Brown (psycholinguiste sp&eacute;cialiste du &laquo;&nbsp;spectre des couleurs &raquo;) &agrave; Harvard, d&eacute;cide d&rsquo;observer in situ une population indig&egrave;ne de l&rsquo;&acirc;ge de pierre, les Danis de Nouvelle Guin&eacute;e, dont la particularit&eacute; est de n&rsquo;utiliser que deux noms pour d&eacute;signer l&rsquo;ensemble des couleurs : mola pour les nuances brillantes et chaudes, et mili pour les nuances froides et sombres.</p> <p>Dans une premi&egrave;re exp&eacute;rimentation, Eleanor Rosch pr&eacute;sente aux Danis 40 pi&egrave;ces de couleur (4 niveaux de brillance et 10 niveaux de teinte), et leur demande de nommer les pi&egrave;ces. Il faut pr&eacute;ciser qu&rsquo;&agrave; cette &eacute;poque de nombreux chercheurs consid&eacute;raient que la s&eacute;paration entre couleurs &eacute;tait arbitraire, aboutissement d&rsquo;un processus culturel traduit sous une forme linguistique. A chaque extr&eacute;mit&eacute; du spectre des couleurs les Danis &eacute;taient d&rsquo;accord entre eux, et, m&ecirc;me si le consensus n&rsquo;&eacute;tait pas complet concernant les couleurs interm&eacute;diaires, les premiers essais confirmaient une &eacute;vidence : les Danis poss&egrave;dent une culture diff&eacute;rente de la n&ocirc;tre.</p> <p>Dans la deuxi&egrave;me exp&eacute;rimentation, Eleanor Rosch demande aux Danis de reconna&icirc;tre une pi&egrave;ce de couleur. Elle pr&eacute;sente &agrave; chaque individu une pi&egrave;ce, lui demande de patienter dans l&rsquo;obscurit&eacute;, puis de retrouver cette pi&egrave;ce parmi l&rsquo;ensemble des pi&egrave;ces disponibles. Dans le contexte g&eacute;n&eacute;ral, les r&eacute;sultats sont particuli&egrave;rement &eacute;tonnants : les Danis reconnaissent les couleurs d&rsquo;une fa&ccedil;on tr&egrave;s semblable &agrave; celle des &laquo;&nbsp;occidentaux&nbsp;&raquo;. Roger Brown pr&eacute;cise : &laquo;&nbsp;L&rsquo;ironie fascinante de l&rsquo;histoire est que cette recherche a commenc&eacute; dans un esprit de fort relativisme et de d&eacute;terminisme linguistique, et qu&rsquo;elle arrive &agrave; la conclusion de l&rsquo;universalisme culturel de l&rsquo;insignifiance linguistique. &raquo; (Brown, 1975).</p> <p>Eleanor Rosch r&eacute;alisera ensuite de nombreuses exp&eacute;rimentations, pour arriver &agrave; la conclusion que les cat&eacute;gories sont construites autour d&rsquo;un &eacute;l&eacute;ment central qu&rsquo;elle appellera : prototype. La principale caract&eacute;ristique d&rsquo;un prototype est de partager de nombreuses propri&eacute;t&eacute;s avec certains objets du monde (qui forment une cat&eacute;gorie) et peu avec les autres objets (qui de fait appartiennent &agrave; d&rsquo;autres cat&eacute;gories).</p> <p>Nous ne sommes plus dans le cadre o&ugrave;, pour appartenir &agrave; une classe, l&rsquo;objet doit poss&eacute;der l&rsquo;ensemble exhaustif des attributs de cette classe. Nous sommes plut&ocirc;t dans une logique &laquo; floue &raquo; ou la composition de la cat&eacute;gorie est d&eacute;termin&eacute;e par une relative proximit&eacute; &agrave; un objet &eacute;mergeant : le prototype.</p> <h2><a id="t4"></a>3- LES PISTES POUR MIEUX PRENDRE EN COMPTE L&rsquo;ALTERITE</h2> <p>En pr&eacute;ambule &agrave; l&rsquo;esquisse des diff&eacute;rentes pistes qui vont nous permettre de mieux prendre en compte l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute;, il nous semble important de pr&eacute;ciser que notre d&eacute;marche n&rsquo;est pas de construire une ou des classes dans lesquelles nous allons grouper ceux qui sont diff&eacute;rents. Mais bien d&rsquo;identifier la capacit&eacute; des individus, dans un ensemble, &agrave; conduire une t&acirc;che pour laquelle ils ne poss&egrave;dent pas toutes les qualit&eacute;s&nbsp;a priori.</p> <h4>3-1- Premi&egrave;re piste&nbsp;: mise en &oelig;uvre de la th&eacute;orie des prototypes&nbsp;</h4> <p>La premi&egrave;re piste &ndash; sans modifier le fondement des approches s&eacute;mio-contextuelle et acteur-r&eacute;seau qui ont prouv&eacute; leur efficacit&eacute; &ndash; est de trouver une nouvelle fa&ccedil;on de construire des classes d&rsquo;acteurs, mieux orient&eacute;e sur la possibilit&eacute; de conduire ou de participer &agrave; une t&acirc;che au moment de l&rsquo;action. Ceci permettra d&rsquo;&eacute;viter que des individus qui ne poss&egrave;dent pas toutes les qualit&eacute;s requises soient &eacute;cart&eacute;s dans le processus.</p> <p>Pour ce faire, nous proposons de convoquer la th&eacute;orie des prototypes imagin&eacute;e par El&eacute;anor Rosch afin de construire les cat&eacute;gories autour d&rsquo;un &eacute;l&eacute;ment central appel&eacute; &nbsp;prototype (Rosch, 1975).</p> <p>La principale caract&eacute;ristique d&rsquo;un prototype est de partager des propri&eacute;t&eacute;s avec certains objets du monde (qui forment une cat&eacute;gorie ou classe) et peu avec les autres objets (qui forment d&rsquo;autres classes). Nous ne sommes plus dans le cadre o&ugrave; pour appartenir &agrave; une classe, l&rsquo;objet doit poss&eacute;der l&rsquo;ensemble exhaustif des attributs de cette classe. Nous sommes dans une logique &laquo;&nbsp;floue&nbsp;&raquo; o&ugrave; la composition de la classe est d&eacute;termin&eacute;e par une proximit&eacute; relative des d&rsquo;objets ou individus &agrave; un prototype qui de fait constitue le centre de gravit&eacute; de cette classe.&nbsp;</p> <p>Il est donc n&eacute;cessaire d&rsquo;identifier quelles sont les qualit&eacute;s n&eacute;cessaires pour conduire ou participer &agrave; une t&acirc;che. Selon l&rsquo;origine et les connaissances de l&rsquo;analyste, son syst&egrave;me de pertinence (Schutz, 1994), le terme qualit&eacute; peut &ecirc;tre remplac&eacute; par d&rsquo;autres termes : dimensions, crit&egrave;res ou attributs.</p> <p>Il est ensuite n&eacute;cessaire d&rsquo;&eacute;valuer de fa&ccedil;on quantitative ou qualitative pour chaque individu et pour chaque qualit&eacute; un niveau. L&rsquo;&eacute;chelle est ici importante, nous reviendrons sur cette question un peu plus tard.</p> <p>Bien entendu, le prototype qui mat&eacute;rialise le centre de gravit&eacute; de la classe est un individu r&eacute;el ou virtuel qui poss&egrave;de les meilleurs r&eacute;sultats possibles sur l&rsquo;ensemble des qualit&eacute;s propres &agrave; cette classe.</p> <p>Chaque individu &ndash; dont le profil forme un vecteur &ndash; peut &ecirc;tre alors positionn&eacute; &agrave; une certaine distance du prototype. Cette cartographie &eacute;volue en permanence, &agrave; travers la valorisation des qualit&eacute;s des individus qui vont elles-m&ecirc;mes &eacute;voluer dans le temps.</p> <p>Ce n&rsquo;est qu&rsquo;au moment de l&rsquo;action, voire m&ecirc;me en projetant les profils des individus dans le temps de l&rsquo;action, que les limites des diff&eacute;rentes classes seront alors d&eacute;finies.</p> <h4>3-2- Deuxi&egrave;me piste&nbsp;: appui sur une th&eacute;orie de l&rsquo;utilisation</h4> <p>La deuxi&egrave;me piste est qu&rsquo;il convient de d&eacute;terminer quelle combinaison de qualit&eacute;s (valorisation des dimensions, crit&egrave;res ou attributs) est n&eacute;cessaire pour d&eacute;finir une classe, et au-del&agrave; chacune des classes.&nbsp;</p> <p>La proximit&eacute; d&rsquo;un individu par rapport &agrave; un ou plusieurs prototypes (et de fait son appartenance &agrave; une classe donn&eacute;e) peut alors &ecirc;tre &eacute;valu&eacute;e par comparaison entre son profil &ndash; r&eacute;sultat de l&rsquo;agr&eacute;gation de l&rsquo;ensemble de ses &laquo;&nbsp;qualit&eacute;s&nbsp;&raquo; &ndash; et le profil du ou des prototypes les plus proches.</p> <p>Pour ce faire nous proposons de nous appuyer sur une th&eacute;orie de l&rsquo;utilisation qui postule que pour un dispositif l&rsquo;utilisation r&eacute;sulte de la combinaison de pratiques, identifi&eacute;es comme l&rsquo;ensemble des comp&eacute;tences et motivations port&eacute;es par l&rsquo;individu en situation, et d&rsquo;usages, identifi&eacute;s comme l&rsquo;ensemble des fonctions mises &agrave; disposition des utilisateurs.</p> <p>En ce qui concerne les usages&nbsp;: le dispositif, dans le sens de Michel Foucault, est con&ccedil;u pour proposer un ensemble de fonctions aux utilisateurs. La machine &agrave; caf&eacute; ne sert a priori qu&rsquo;&agrave; faire du caf&eacute;, mais un robot m&eacute;nager proposera par exemple une assez large palette de fonctions. De nombreuses &eacute;tudes, comme celles de Victor Scardigli (Scardigli, 1992) ont montr&eacute; que la relation entre fonctions et utilisateur peut &ecirc;tre assez complexe. L&rsquo;utilisateur peut refuser d&rsquo;utiliser certaines fonctions, ne pas &ecirc;tre capable de les utiliser, ou encore les d&eacute;tourner pour faire autre chose. Dans le m&ecirc;me esprit les concepteurs peuvent oublier de mettre &agrave; disposition certaines fonctions, choisir de ne pas les d&eacute;ployer, ou encore les mettre &agrave; disposition de fa&ccedil;on inutile car par exemple masqu&eacute;es ou non document&eacute;es. La question de l&rsquo;appropriation d&rsquo;un dispositif est donc de fait des usages est loin d&rsquo;&ecirc;tre simple.</p> <p>En ce qui concerne les pratiques&nbsp;: comme le pr&eacute;cise Alfred Schutz chaque individu est dot&eacute; d&rsquo;un syst&egrave;me de pertinence qui &agrave; travers l&rsquo;ensemble de ses apprentissages forme sa vision du monde et de fait sa capacit&eacute; &agrave; faire ou ne pas faire. Aussi, nous proposons le parti pris suivant qui est de consid&eacute;rer que les pratiques sont constitu&eacute;es pour chaque individu des comp&eacute;tences acquises et de sa motivation &agrave; faire. Au moment o&ugrave; l&rsquo;Homme est amen&eacute; durant sa carri&egrave;re professionnelle &agrave; exercer des activit&eacute;s qui peuvent &ecirc;tre tr&egrave;s diff&eacute;rentes, cela pose la question du potentiel de l&rsquo;individu et de l&rsquo;ajustement de celui-ci &agrave; travers par exemple des actions destin&eacute;es &agrave; compl&eacute;ter sa formation ou &agrave; renforcer sa motivation.&nbsp;</p> <p>L&rsquo;utilisation optimale devient alors une question de mise en ad&eacute;quation des usages et pratiques dans une approche diachronique. Il ne s&rsquo;agit plus uniquement d&rsquo;&eacute;valuer un ensemble &agrave; un moment donn&eacute; qui est celui du d&eacute;part de l&rsquo;action, mais de projeter l&rsquo;ensemble des dimensions dans le temps pour maximiser le r&eacute;sultat final&nbsp;: la r&eacute;ussite de l&rsquo;action.</p> <p>Cette d&eacute;marche qui peut sembler complexe pr&eacute;sente toutefois un avantage ind&eacute;niable&nbsp;: la possibilit&eacute; de mieux int&eacute;grer dans un processus dynamique ceux qui sont au d&eacute;part diff&eacute;rents mais poss&egrave;dent un certain potentiel. En jouant sur la formation, sur la motivation, mais aussi sur la nature des fonctions op&eacute;rationnelles du dispositif &agrave; d&eacute;ployer, la d&eacute;marche contribue &agrave; une meilleure prise en compte de l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute;.</p> <p>La construction des classes peut alors s&rsquo;effectuer &agrave; travers un rep&eacute;rage d&rsquo;un ensemble de qualit&eacute;s li&eacute;es &agrave; la comp&eacute;tence, la motivation et la capacit&eacute; &agrave; utiliser certaines fonctions des dispositifs. &nbsp;</p> <h4>3-3- Troisi&egrave;me piste&nbsp;: assemblage par agr&eacute;gation multicrit&egrave;re</h4> <p>La troisi&egrave;me piste r&eacute;side dans la fa&ccedil;on d&rsquo;assembler les diff&eacute;rents &eacute;l&eacute;ments.</p> <p>En effet pour composer les classes, il est n&eacute;cessaire d&rsquo;&eacute;valuer la distance entre chaque &nbsp;individu et les diff&eacute;rents prototypes afin de d&eacute;terminer quels sont les individus qui vont &ecirc;tre rattach&eacute;s &agrave; chacune des classes. Aussi, il est n&eacute;cessaire d&rsquo;imaginer une fonction d&rsquo;agr&eacute;gation.&nbsp;</p> <p>Chaque qualit&eacute; (dimension ou crit&egrave;re) peut &ecirc;tre pond&eacute;r&eacute;e, et la fonction naturelle d&rsquo;agr&eacute;gation g&eacute;n&eacute;ralement utilis&eacute;e est la moyenne pond&eacute;r&eacute;e. Mais cette fonction ne permet pas toujours de traduire un objectif complexe.</p> <p>Par exemple, celle-ci est peu adapt&eacute;e pour traduire le besoin suivant : &laquo;&nbsp;pour compl&eacute;ter mon &eacute;quipe je souhaite retenir une personne qui poss&egrave;de de bonnes connaissances en math&eacute;matiques et un assez bon niveau de connaissances en fran&ccedil;ais ou bien qui peut acqu&eacute;rir ces connaissances assez rapidement&nbsp;&raquo;.</p> <p>Il existe d&rsquo;autres fonctions d&rsquo;agr&eacute;gation&nbsp;comme par exemple l&rsquo;int&eacute;grale de Choquet 2-additive. Cette derni&egrave;re est un peu plus complexe, mais elle permet de traduire de fa&ccedil;on beaucoup plus fine l&rsquo;expression d&rsquo;un besoin en s&rsquo;appuyant sur une &eacute;valuation quantitative et / ou qualitative des crit&egrave;res mesur&eacute;s &agrave; un moment donn&eacute; (celui de l&rsquo;action) tout en &eacute;tant capable de prendre en compte dans l&rsquo;agr&eacute;gation le potentiel de progression identifi&eacute; en amont.</p> <p>Sans trop entrer dans les fonctions math&eacute;matiques, ce que nous ferons prochainement dans une version &eacute;tendue de cet article, l&rsquo;id&eacute;e est valoriser une coh&eacute;rence d&rsquo;ensemble au d&eacute;triment des particularit&eacute;s sp&eacute;cifiques.</p> <p>Voici un exemple simplifi&eacute;. Pour compl&eacute;ter ou composer notre &eacute;quipe nous avons le choix entre trois individus&nbsp;(&eacute;valuation bas&eacute;e sur les capacit&eacute;s et le potentiel) : le premier est tr&egrave;s bon en math et moyen en fran&ccedil;ais, le deuxi&egrave;me moyen en math et tr&egrave;s bon en fran&ccedil;ais, le troisi&egrave;me bon en math et en fran&ccedil;ais. Si nous attribuons aux trois individus les scores suivants (20, 10), (10, 20) et (15, 15) nous voyons bien que la moyenne pond&eacute;r&eacute;e va nous donner le m&ecirc;me r&eacute;sultat. Or, nous percevons bien que le troisi&egrave;me individu serait plus int&eacute;ressant &agrave; recruter. Il est donc n&eacute;cessaire de trouver une nouvelle fonction d&rsquo;agr&eacute;gation qui va renforcer la coh&eacute;rence de l&rsquo;assemblage. De fa&ccedil;on sch&eacute;matique l&rsquo;int&eacute;grale de Choquet 2-additive permet de retrancher une partie de la diff&eacute;rence entre les valeurs extr&ecirc;mes &agrave; la moyenne. De fait, le troisi&egrave;me profil plus coh&eacute;rent va naturellement &eacute;merger.&nbsp;</p> <h2><a id="t5"></a>4- DISCUSSION</h2> <p>Nous venons de pr&eacute;senter trois pistes qui combin&eacute;es permettent &agrave; notre avis de faciliter la prise en compte de l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute;.</p> <p>La premi&egrave;re piste permet de construire des classes souples, qui ne sont plus fond&eacute;es sur le fait de poss&eacute;der ou non une qualit&eacute;, mais bien sur une combinaison de l&rsquo;ensemble des qualit&eacute;s pour conduire une t&acirc;che ou rejoindre une &eacute;quipe.</p> <p>La seconde piste donne un guide pour identifier les qualit&eacute;s (dimensions ou crit&egrave;res) n&eacute;cessaires pour &eacute;valuer l&rsquo;aptitude d&rsquo;un individu &agrave; rejoindre une classe &agrave; un moment donn&eacute;. Ces qualit&eacute;s qui sont fond&eacute;es sur les comp&eacute;tences, les motivations, la capacit&eacute; &agrave; utiliser les fonctions d&rsquo;un dispositif, sont centr&eacute;es sur la recherche du meilleur assemblage possible pour r&eacute;aliser une t&acirc;che avec succ&egrave;s.</p> <p>Enfin, la troisi&egrave;me piste propose une fa&ccedil;on originale d&rsquo;assembler les individus pour composer une &eacute;quipe.</p> <p>La question est maintenant de savoir quel peut l&rsquo;impact de cette fa&ccedil;on de proc&eacute;der sur les approches classiques en Sciences de l&rsquo;Information et de la Communication afin d&rsquo;&eacute;laborer des dispositifs plus ouverts &agrave; l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute;.</p> <p>D&egrave;s lors que nous ne sommes pas dans le cas d&rsquo;une micro-situation, c&#39;est-&agrave;-dire d&rsquo;une &eacute;tude portant sur un nombre tr&egrave;s limit&eacute; de faits et d&rsquo;acteurs, il est g&eacute;n&eacute;ralement n&eacute;cessaire de conduire une enqu&ecirc;te assez large pour disposer des &eacute;l&eacute;ments indispensables &agrave; la compr&eacute;hension de la situation.</p> <p>Les techniques pour conduire ce type d&rsquo;enqu&ecirc;te sont depuis longtemps ma&icirc;tris&eacute;es&nbsp;: observation, observation participante, entretiens individuels non directifs centr&eacute;s, entretiens qualitatifs de groupes, &eacute;tude des traces &hellip;</p> <p>Mais il est d&rsquo;exp&eacute;rience assez difficile de tout observer, d&rsquo;interviewer l&rsquo;ensemble des acteurs. Cela conduit assez rapidement l&rsquo;analyste &agrave; composer des groupes, des classes, avec toujours un doute sur la couverture&nbsp;g&eacute;n&eacute;rale : est-ce que j&rsquo;ai bien rassembl&eacute; l&rsquo;ensemble des points de vue pour une situation donn&eacute;e ?</p> <p>Nous savons bien que la qualit&eacute; de l&rsquo;analyse est largement d&eacute;pendante de la qualit&eacute; des donn&eacute;es et informations collect&eacute;es. Or, le m&eacute;canisme cit&eacute; ci-dessus laisse peu de place &agrave; l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute;.</p> <p>Sans constituer une baguette magique, l&rsquo;approche que nous proposons peut &agrave; notre avis grandement am&eacute;liorer le r&eacute;sultat final.&nbsp;</p> <p>Et cela peut se faire de diff&eacute;rentes fa&ccedil;ons&nbsp;:</p> <ul> <li>en facilitant la composition des groupes &agrave; interviewer,</li> <li>en facilitant le rep&eacute;rage des &laquo;&nbsp;forces&nbsp;&raquo; en pr&eacute;sence,</li> <li>en identifiant en amont des minorit&eacute;s pertinentes (dont l&rsquo;avis peut &ecirc;tre important),</li> <li>&hellip;</li> </ul> <p>De fait il ne s&rsquo;agit plus de chercher &agrave; rep&eacute;rer dans la situation des groupes d&rsquo;acteurs, mais bien des prototypes autour desquels l&rsquo;ensemble des acteurs vont pouvoir &ecirc;tre positionn&eacute;s, et si n&eacute;cessaire repositionn&eacute;s.</p> <h2><a id="t6"></a>CONCLUSION</h2> <p>Nous proposons une approche nouvelle pour la composition des groupes d&rsquo;acteurs ou la cr&eacute;ation de dispositifs.</p> <p>Les groupes d&rsquo;acteurs peuvent &ecirc;tre cr&eacute;&eacute;s par rapport &agrave; un objectif pragmatique en s&rsquo;appuyant sur des crit&egrave;res comme la comp&eacute;tence, la motivation et la capacit&eacute; &agrave; utiliser un dispositif. D&eacute;gag&eacute;e de crit&egrave;res comme le physique, ou l&rsquo;origine, cette d&eacute;marche facilite la prise en compte de l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute;.&nbsp;</p> <p>De plus, dans un processus inverse elle permet d&rsquo;appr&eacute;hender quels sont les points &agrave; am&eacute;liorer pour int&eacute;grer plus facilement un groupe ou une &eacute;quipe&nbsp;: la mise &agrave; niveau ou la formation des individus ; ou encore la fa&ccedil;on de les motiver &agrave; entreprendre.&nbsp;</p> <p>En partant cette fois du centre de gravit&eacute; (ou prototype) il est aussi possible d&rsquo;imaginer quelle sont les fonctions d&rsquo;un dispositif &agrave; construire et d&eacute;ployer pour &ndash; dans un processus inverse &ndash; adapter celui-ci &agrave; la population cible.</p> <p>Enfin, que ce soit dans la collecte des informations ou dans leur analyse, les concepts m&eacute;thodes et outils des SIC peuvent &ecirc;tre am&eacute;nag&eacute;s pour int&eacute;grer cette d&eacute;marche dans un ensemble m&eacute;thodologique.&nbsp;</p> <h5>BIBLIOGRAPHIE</h5> <p>AKRICH M., CALLON M. et LATOUR B., (2006), Sociologie de la traduction&nbsp;: textes fondateurs, Presses des Mines, Paris.</p> <p>BROWN R., (1975), Reference : In memorial tribute to Eric Lenneberg, Cognition 4, 125-53.</p> <p>CALON M., (1975), L&rsquo;op&eacute;ration de traduction, In Incidence des rapports sociaux sur le d&eacute;veloppement des sciences et techniques (sous la direction de Roqueplo P.), Cordes, Paris.</p> <p>CALON M. et LATOUR B., (2006), Le grand L&eacute;viathan s&rsquo;apprivoise-t-il ? 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