<p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Les travaux du philosophe italien Giorgio Agamben sont aujourd&rsquo;hui incontournables s&rsquo;agissant de r&eacute;fl&eacute;chir aux enjeux soulev&eacute;s par l&rsquo;&eacute;tat d&rsquo;exception dans les d&eacute;mocraties contemporaines. L&rsquo;une des th&egrave;ses centrales d&eacute;fendues par Agamben consiste en effet &agrave; voir dans l&rsquo;&eacute;tat d&rsquo;exception non pas un simple &eacute;cart <span style="letter-spacing:-.2pt">passager par rapport aux normes juridiques existantes et &agrave; l&rsquo;&Eacute;tat de droit, mais au contraire &laquo;&nbsp;la structure politico-juridique originaire&nbsp;&raquo; sur laquelle repose depuis toujours les formes du pouvoir politique en Occident<a name="_ftnref1"></a><a href="#_ftn1"><sup><span style="color:black">[1]</span></sup></a>. Cette th&egrave;se, il la d&eacute;veloppe notamment &agrave; partir de la pol&eacute;mique qui opposa nagu&egrave;re Carl Schmitt et Walter Benjamin<a name="_ftnref2"></a><a href="#_ftn2"><sup><span style="color:black">[2]</span></sup></a>. De la pol&eacute;mique entre le juriste </span>s&eacute;rieusement compromis avec le r&eacute;gime nazi et le philosophe victime de sa barbarie, Agamben tire deux le&ccedil;ons en vue d&rsquo;analyser la fonction centrale qu&rsquo;occupe l&rsquo;&eacute;tat d&rsquo;exception au sein du dispositif politico-juridique du pouvoir. Il reprend tout d&rsquo;abord &agrave; Schmitt sa fameuse d&eacute;finition de la souverainet&eacute; selon laquelle &laquo;&nbsp;est souverain celui qui d&eacute;cide de l&rsquo;&eacute;tat d&rsquo;exception&nbsp;&raquo;. Pour Schmitt comme pour Agamben, le pouvoir de d&eacute;cider ce qui rel&egrave;ve (ou non) de l&rsquo;&eacute;tat d&rsquo;exception et de suspendre en cons&eacute;quence l&rsquo;&Eacute;tat de droit au nom de la pr&eacute;servation de l&rsquo;ordre juridico-politique est ce qui caract&eacute;rise en propre le souverain. La reprise de la d&eacute;finition schmittienne de la souverainet&eacute; est ensuite imm&eacute;diatement contrebalanc&eacute;e par Agamben lorsqu&rsquo;il <span style="letter-spacing:-.2pt">adopte le diagnostic pos&eacute; par Benjamin</span> dans ses <i>Th&egrave;ses sur le concept d&rsquo;histoire</i> suivant lequel &laquo;&nbsp;&ldquo;l&rsquo;&eacute;tat d&rsquo;exception&rdquo; est &agrave; pr&eacute;sent la r&egrave;gle&nbsp;&raquo;. En combinant la d&eacute;finition schmittienne de la souverainet&eacute; et le diagnostic benjaminien sur la normalisation de l&rsquo;exception, le philosophe italien nous invite &agrave; r&eacute;fl&eacute;chir sur les situations politiques &ndash;&nbsp;comme celle qui a suivi les attentats du 11&nbsp;septembre 2001 et les mesures anti-terroristes prises dans la foul&eacute;e par bon nombre de gouvernements&nbsp;&ndash; o&ugrave; le caract&egrave;re exceptionnel de la suspension de l&rsquo;&Eacute;tat de droit tend &agrave; devenir la norme.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">&Agrave; c&ocirc;t&eacute; des r&eacute;f&eacute;rences &agrave; Schmitt et &agrave; Benjamin, Agamben mobilise un autre auteur qui semble pourtant &agrave; premi&egrave;re vue &eacute;tranger &agrave; la probl&eacute;matique&nbsp;de l&rsquo;&eacute;tat d&rsquo;exception&nbsp;: Michel Foucault. Agamben pr&eacute;sente son entreprise philosophique comme une mani&egrave;re <span style="letter-spacing:-.1pt">de poursuivre les travaux de Foucault</span> tout en leur apportant un certain nombre de correctifs et d&rsquo;inflexions (&agrave; l&rsquo;aide notamment des th&egrave;ses de Schmitt et de Benjamin sur l&rsquo;&eacute;tat d&rsquo;exception). D&rsquo;apr&egrave;s lui, l&rsquo;un des objets des recherches de Foucault aura &eacute;t&eacute; d&rsquo;&eacute;tablir une analyse de la fa&ccedil;on dont le pouvoir en Occident touche &agrave; la vie m&ecirc;me des individus. Un tel &laquo;&nbsp;biopouvoir&nbsp;&raquo; s&rsquo;&eacute;tend du droit de vie et de mort absolu dont b&eacute;n&eacute;ficie le souverain sur ses sujets depuis l&rsquo;&acirc;ge classique jusqu&rsquo;aux politiques eug&eacute;nistes et de r&eacute;gulation des populations men&eacute;es au si&egrave;cle dernier. Au sein de ce &laquo;&nbsp;biopouvoir&nbsp;&raquo;, Foucault aurait distingu&eacute; entre, d&rsquo;un c&ocirc;t&eacute;, les &laquo;&nbsp;technologies politiques&nbsp;&raquo; par lesquelles le pouvoir vise la vie humaine dans son ensemble et, de l&rsquo;autre, les &laquo;&nbsp;technologies du soi&nbsp;&raquo; au travers desquelles le pouvoir participe du processus de subjectivation des individus<a name="_ftnref3"></a><a href="#_ftn3"><sup><span style="color:black">[3]</span></sup></a>. Le biopouvoir s&rsquo;exercerait selon deux modalit&eacute;s diff&eacute;rentes, chacune correspondant &agrave; des &laquo;&nbsp;techniques de pouvoir&nbsp;&raquo; qui vont du contr&ocirc;le des naissances aux pratiques de l&rsquo;aveu et de la confession. De la sorte, il aurait, d&rsquo;une part, une vis&eacute;e totalisante (il saisirait la vie dans sa globalit&eacute;) et, de l&rsquo;autre, des effets individualisants (il fa&ccedil;onnerait l&rsquo;individualit&eacute; des sujets). Mais le n&oelig;ud o&ugrave; se m&ecirc;lent ces deux modalit&eacute;s d&rsquo;exercice du pouvoir en Occident serait cependant rest&eacute; un point aveugle des recherches de Foucault. C&rsquo;est ce point demeur&eacute; aveugle chez Foucault qu&rsquo;Agamben propose pour sa part de mettre en lumi&egrave;re.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.2pt">Son hypoth&egrave;se est que, contrairement &agrave; ce qu&rsquo;avait sugg&eacute;r&eacute; Foucault, il est impossible de s&eacute;parer &laquo;&nbsp;le mod&egrave;le juridico-institutionnel&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;le mod&egrave;le biopolitique&nbsp;&raquo; du pouvoir. Foucault avait en effet construit l&rsquo;ensemble de ses analyses du biopouvoir moderne en opposant ce dernier au pouvoir souverain d&rsquo;&eacute;dicter et de faire respecter la loi. Pour Agamben, le mod&egrave;le juridico-institutionnel du pouvoir souverain et le mod&egrave;le du biopouvoir, loin de s&rsquo;opposer,</span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"> vont au contraire n&eacute;cessairement de pair&nbsp;: &laquo;&nbsp;l&rsquo;implication de la vie nue dans la sph&egrave;re politique constitue le noyau originaire &ndash;&nbsp;quoique occult&eacute;&nbsp;&ndash; du pouvoir souverain&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref4"></a><a href="#_ftn4"><sup><span style="color:black">[4]</span></sup></a>. Rendre compte de la fonction centrale qu&rsquo;occupe l&rsquo;&eacute;tat d&rsquo;exception dans le dispositif de pouvoir propre &agrave; l&rsquo;Occident suppose d&rsquo;associer &agrave; l&rsquo;analyse foucaldienne de la biopolitique (la mani&egrave;re dont le pouvoir moderne s&rsquo;est saisi de la vie humaine comme d&rsquo;un probl&egrave;me &agrave; traiter) la d&eacute;finition schmittienne de la souverainet&eacute; comme d&eacute;cision sur l&rsquo;&eacute;tat d&rsquo;exception. Agamben r&eacute;sume ainsi la conclusion &agrave; laquelle l&rsquo;am&egrave;ne son premier amendement des th&eacute;ories de Foucault&nbsp;: &laquo;&nbsp;<i>la production d&rsquo;un corps biopolitique est l&rsquo;acte originaire du pouvoir souverain</i>. En ce sens, la biopolitique est au moins aussi ancienne que l&rsquo;exception souveraine&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref5"></a><a href="#_ftn5"><sup><span style="color:black">[5]</span></sup></a>. Autrement dit, le biopouvoir et la d&eacute;cision souveraine sur l&rsquo;&eacute;tat d&rsquo;exception participent d&rsquo;un seul et m&ecirc;me paradigme politique dans lequel nous serions encore et toujours emp&ecirc;tr&eacute;s. Le sort r&eacute;serv&eacute; aux prisonniers des camps de Guantanamo, d&eacute;tenus en dehors de tout encadrement juridique, offrirait aujourd&rsquo;hui un exemple criant des impasses vers lesquelles m&egrave;ne un tel paradigme politique<a name="_ftnref6"></a><a href="#_ftn6"><sup><span style="color:black">[6]</span></sup></a>.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">Agamben effectue un second pas de c&ocirc;t&eacute; par rapport aux analyses de Foucault, </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">en rapprochant celles-ci de la th&egrave;se benjaminienne sur l&rsquo;exception devenue la r&egrave;gle. Si l&rsquo;on admet que la production par le pouvoir d&rsquo;une forme de vie a toujours accompagn&eacute; la d&eacute;cision souveraine sur l&rsquo;exception, l&rsquo;id&eacute;e avanc&eacute;e par Foucault d&rsquo;un &laquo;&nbsp;&ldquo;seuil de modernit&eacute; biologique&rdquo; d&rsquo;une soci&eacute;t&eacute;&nbsp;&raquo; &agrave; partir duquel &laquo;&nbsp;l&rsquo;esp&egrave;ce entre comme enjeu dans ses propres <span style="letter-spacing:-.1pt">strat&eacute;gies politiques&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref7"></a><a href="#_ftn7"><sup><span style="color:black">[7]</span></sup></a> doit alors &ecirc;tre revue en direction d&rsquo;une autre forme d&rsquo;&eacute;cart au sein de l&rsquo;histoire du pouvoir en Occident. </span>Pour Foucault, le fait que le vivant devienne une cible privil&eacute;gi&eacute;e du pouvoir marquait une c&eacute;sure propre &agrave; la modernit&eacute;. Agamben situe quant &agrave; lui la c&eacute;sure au moment o&ugrave; &laquo;&nbsp;l&rsquo;espace de la vie nue, situ&eacute; &agrave; l&rsquo;origine en marge de l&rsquo;organisation politique&nbsp;&raquo; co&iuml;ncide avec &laquo;&nbsp;l&rsquo;espace politique&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref8"></a><a href="#_ftn8"><sup><span style="color:black">[8]</span></sup></a>. De biopolitique moderne, il en est alors v&eacute;ritablement question non pas lorsque la politique prend la vie pour cible de ses strat&eacute;gies &ndash;&nbsp;ce qui d&rsquo;apr&egrave;s Agamben a en Occident toujours &eacute;t&eacute; le cas, au moins depuis les conceptions classiques du souverain comme b&eacute;n&eacute;ficiant d&rsquo;un droit de vie et de mort sur ses sujets&nbsp;&ndash; mais quand la politique s&rsquo;indiff&eacute;rencie avec la vie. M&ecirc;me si biopouvoir et pouvoir souverain ont toujours &eacute;t&eacute; intimement li&eacute;s, la modernit&eacute; politique marque une nouvelle &eacute;tape dans leurs relations, qui se caract&eacute;rise par une indistinction de la politique et de la vie. Avec l&rsquo;av&egrave;nement de la modernit&eacute;, la vie occupe d&eacute;sormais l&rsquo;&eacute;picentre du pouvoir. Cette &laquo;&nbsp;politisation de la vie&nbsp;&raquo; contribue &agrave; faire de l&rsquo;&eacute;tat d&rsquo;exception la r&egrave;gle selon le diagnostic pos&eacute; par Benjamin, puisque plus aucun obstacle ne vient &agrave; pr&eacute;sent s&rsquo;opposer &agrave; la mainmise totale du pouvoir souverain sur la vie de ses sujets.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Il ne s&rsquo;agira pas dans ce qui suit de revenir sur les torsions nombreuses qu&rsquo;Agamben fait subir &agrave; la notion foucaldienne de biopolitique<a name="_ftnref9"></a><a href="#_ftn9"><sup><span style="color:black">[9]</span></sup></a>, mais de prendre au s&eacute;rieux son hypoth&egrave;se selon laquelle une forme d&rsquo;exception est en jeu dans la biopolitique moderne. Nous nous attarderons tout d&rsquo;abord sur la mani&egrave;re dont le couplage entre biopouvoir et pouvoir souverain d&eacute;bouche chez Agamben sur le diagnostic d&rsquo;une &laquo;&nbsp;politisation totale&nbsp;&raquo; de la vie. Dans un second temps, nous verrons comment, &agrave; partir d&rsquo;une nette opposition entre pouvoir souverain et biopouvoir, le traitement foucaldien du th&egrave;me de la biopolitique s&rsquo;inscrit quant &agrave; lui dans un tout autre cadre d&rsquo;analyse&nbsp;: celui d&rsquo;une histoire de la &laquo;&nbsp;gouvernementalit&eacute;&nbsp;&raquo;. En conclusion, on se demandera si, sur fond de confrontation entre la &laquo;&nbsp;bio-souverainet&eacute;&nbsp;&raquo; d&rsquo;Agamben et la biopolitique gouvernementale au sens de Foucault, ce ne sont pas deux r&eacute;gimes d&rsquo;exceptionnalit&eacute; qui aujourd&rsquo;hui se dessinent sous nos yeux. M&ecirc;me s&rsquo;ils ont en commun de suspendre ou de supprimer leur rapport au droit et &agrave; la loi, ces deux r&eacute;gimes d&rsquo;exception &ndash;&nbsp;l&rsquo;une qui a son origine dans le pouvoir souverain, l&rsquo;autre dans les techniques gouvernementales &ndash; le font selon des modalit&eacute;s tr&egrave;s diff&eacute;rentes auxquelles il s&rsquo;agit de rester attentifs si nous voulons correctement saisir les d&eacute;fis sp&eacute;cifiques qu&rsquo;ils posent aux d&eacute;mocraties contemporaines.</span></span></span></span></p> <h2><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><b><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="text-transform:uppercase">Agamben&nbsp;: de la bio-souverainet&eacute; &agrave; l&rsquo;exception biopolitique</span></span></span></b></span></span></h2> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">En reprenant &agrave; Schmitt sa d&eacute;finition de la souverainet&eacute;, Agamben estime que ce qui constitue en propre la souverainet&eacute;, c&rsquo;est la d&eacute;cision sur l&rsquo;exception. La d&eacute;cision souveraine porte non pas tant sur le partage entre le licite et l&rsquo;illicite, le permis et le d&eacute;fendu, qui rel&egrave;ve d&eacute;j&agrave; du langage juridique, que sur la fronti&egrave;re qui s&eacute;pare le juridique de l&rsquo;extra-juridique, la norme du fait. Par rapport &agrave; Schmitt, Agamben pr&eacute;cise cependant que la fronti&egrave;re t&eacute;nue que trace le pouvoir souverain entre le droit et le non-droit correspond en m&ecirc;me temps &agrave; la production d&rsquo;une forme de vie. Ce que produit le souverain d&egrave;s lors qu&rsquo;il d&eacute;cide de l&rsquo;exception, c&rsquo;est la &laquo;&nbsp;vie nue&nbsp;&raquo; en tant qu&rsquo;&eacute;l&eacute;ment &agrave; la fois <i>inclus dans</i> et <i>exclus hors</i> de la zone du droit. C&rsquo;est ainsi que &laquo;&nbsp;l&rsquo;implication originaire du vivant dans la sph&egrave;re du droit&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref10"></a><a href="#_ftn10"><sup><span style="color:black">[10]</span></sup></a> repose en dernier ressort sur une logique paradoxale d&rsquo;<i>exclusion inclusive&nbsp;</i>: incluse dans et exclue hors du droit, la &laquo;&nbsp;vie nue&nbsp;&raquo; d&eacute;signe la zone d&rsquo;exception et d&rsquo;indistinction entre le juridique et l&rsquo;extra-juridique, entre le droit et le non-droit, entre la norme et le fait, dont d&eacute;cide le souverain.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">Agamben exemplifie la relation d&rsquo;exception qui unit et d&eacute;sunit &agrave; la fois le pouvoir souverain &agrave; la vie nue &agrave; travers l&rsquo;institution archa&iuml;que de la mise au ban. Ce ch&acirc;timent en vigueur au Moyen-&Acirc;ge privait l&rsquo;accus&eacute; des droits que lui reconnaissait le pouvoir souverain en le livrant <i>de facto</i> &agrave; la vindicte populaire. Le ban donne concr&egrave;tement &agrave; voir la logique paradoxale d&rsquo;exclusion inclusive &agrave; l&rsquo;&oelig;uvre dans les relations entre le pouvoir souverain et la vie nue&nbsp;: &laquo;&nbsp;Ce qui a &eacute;t&eacute; mis au ban est restitu&eacute; &agrave; sa propre s&eacute;paration et, en m&ecirc;me temps, livr&eacute; &agrave; la merci de qui l&rsquo;abandonne&nbsp;: il est &agrave; la fois exclu et inclus, rel&acirc;ch&eacute; et en m&ecirc;me temps captur&eacute;.&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref11"></a><a href="#_ftn11"><sup><span style="color:black">[11]</span></sup></a> L&rsquo;institution du ban montre en quoi l&rsquo;&eacute;tat d&rsquo;exception et d&rsquo;indistinction entre le droit et le non-droit, dans lequel se trouve la vie nue face au souverain, marque litt&eacute;ralement l&rsquo;&laquo;&nbsp;abandon&nbsp;&raquo; de la vie aux mains du pouvoir. La vie nue est &laquo;&nbsp;abandonn&eacute;e&nbsp;&raquo; au pouvoir souverain en un double sens&nbsp;: abandonn&eacute;e par un souverain qui l&rsquo;a priv&eacute;e de ses droits, elle est, du m&ecirc;me coup, enti&egrave;rement livr&eacute;e &agrave; sa merci. Pour tenter de cerner cette vie nue abandonn&eacute;e au souverain, Agamben fait appel &agrave; une autre figure du droit archa&iuml;que&nbsp;: celle de l&rsquo;<i>homo sacer</i>. En droit romain, le caract&egrave;re &laquo;&nbsp;sacr&eacute;&nbsp;&raquo; de l&rsquo;<i>homo </i></span></span></span><i><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.3pt">sacer </span></span></span></i><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.3pt">consistait dans le fait d&rsquo;&ecirc;tre &agrave; la fois &laquo;&nbsp;insacrifiable&nbsp;&raquo; selon les rites officiels en vigueur et expos&eacute; &agrave; tout moment au meurtre (mais sans toutefois que celui-ci soit qualifi&eacute; d&rsquo;homicide)<a name="_ftnref12"></a><a href="#_ftn12"><sup><span style="color:black">[12]</span></sup></a>.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.2pt">Selon une conception classique, le souverain est celui qui dispose d&rsquo;un droit de vie et de mort absolu sur ses sujets. En s&rsquo;appuyant sur les deux institutions du ban et de l&rsquo;<i>homo sacer</i>, Agamben montre que le rapport du souverain &agrave; la vie est en fait plus complexe. La souverainet&eacute; repose tout enti&egrave;re sur l&rsquo;&eacute;tat d&rsquo;exception et sur sa logique paradoxale d&rsquo;une exclusion inclusive de la vie. Pour Agamben, l&rsquo;exclusion inclusive de la vie nue par le pouvoir souverain &agrave; travers le dispositif de l&rsquo;&eacute;tat d&rsquo;exception ne constitue ni plus ni moins que &laquo;&nbsp;la relation politique originaire<a name="_ftnref13"></a><a href="#_ftn13"><sup><span style="color:black">[13]</span></sup></a>&nbsp;&raquo; dont les deux institutions archa&iuml;ques du ban et de l&rsquo;<i>homo sacer</i> portent la trace. Pour r&eacute;sumer en une formule la conception de la souverainet&eacute; qui se d&eacute;gage des r&eacute;flexions d&rsquo;Agamben, il serait possible par cons&eacute;quent de parler de &laquo;&nbsp;bio-souverainet&eacute;&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref14"></a><a href="#_ftn14"><sup><span style="color:black">[14]</span></sup></a> au sens o&ugrave; le trait essentiel par lequel se d&eacute;finit d&egrave;s l&rsquo;origine le pouvoir souverain est la capture de la vie dans les rets de l&rsquo;exception.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.05pt">En tant que &laquo;&nbsp;relation politique originaire&nbsp;&raquo; qui caract&eacute;rise depuis toujours le pouvoir occidental, le concept de bio-souverainet&eacute; s&rsquo;av&egrave;re toutefois insuffisant pour expliquer la sp&eacute;cificit&eacute; <i>moderne</i> de la biopolitique au sens o&ugrave; l&rsquo;entend Foucault. Il faut souligner qu&rsquo;Agamben reste ambigu quant &agrave; l&rsquo;acte de naissance de la biopolitique moderne. D&rsquo;un c&ocirc;t&eacute;, il semble assumer &agrave; demi-mots que le passage de la bio-souverainet&eacute; &laquo;&nbsp;originaire&nbsp;&raquo; &agrave; la biopolitique moderne rel&egrave;ve moins d&rsquo;un changement historiquement identifiable que d&rsquo;une pente fatale &agrave; laquelle &eacute;tait d&rsquo;embl&eacute;e soumis le dispositif de la souverainet&eacute;<a name="_ftnref15"></a><a href="#_ftn15"><sup><span style="color:black">[15]</span></sup></a>. De l&rsquo;autre, il semble vouloir faire remonter &ndash;&nbsp;suivant en cela les analyses de Hannah Arendt<a name="_ftnref16"></a><a href="#_ftn16"><sup><span style="color:black">[16]</span></sup></a>&nbsp;&ndash; la biopolitique &agrave; l&rsquo;av&egrave;nement de l&rsquo;&Eacute;tat-nation moderne. C&rsquo;est en effet avec l&rsquo;&Eacute;tat-nation que l&rsquo;appartenance &agrave; la communaut&eacute; politique en vient pour la premi&egrave;re fois &agrave; &ecirc;tre d&eacute;finie de mani&egrave;re quasi biologique &ndash;&nbsp;en vertu du droit du sol ou du droit du sang&nbsp;&ndash; par la naissance (&laquo;&nbsp;nation&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;naissance&nbsp;&raquo; partageant au passage la m&ecirc;me racine &eacute;tymologique)<a name="_ftnref17"></a><a href="#_ftn17"><sup><span style="color:black">[17]</span></sup></a>. Mais que la biopolitique soit d&rsquo;embl&eacute;e inscrite dans la structure originaire du pouvoir occidental ou qu&rsquo;elle &eacute;mane historiquement de l&rsquo;&Eacute;tat-nation moderne, ce qui para&icirc;t d&eacute;terminant aux yeux d&rsquo;Agamben, c&rsquo;est qu&rsquo;elle s&rsquo;accompagne d&rsquo;une normalisation de l&rsquo;exception et d&rsquo;une totale indistinction du pouvoir et de la vie.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">Tandis que la bio-souverainet&eacute; laissait malgr&eacute; tout subsister une diff&eacute;rence entre pouvoir souverain et vie nue selon la logique d&rsquo;exclusion inclusive qui la caract&eacute;rise, la biopolitique moderne tend quant &agrave; elle &agrave; supprimer une telle diff&eacute;rence en g&eacute;n&eacute;ralisant l&rsquo;&eacute;tat d&rsquo;exception. C&rsquo;est ici que le th&egrave;me foucaldien de la biopolitique se conjugue, dans les analyses d&rsquo;Agamben, </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">avec la th&egrave;se benjaminienne sur le devenir permanent de l&rsquo;&eacute;tat d&rsquo;exception. Plus exactement, le &laquo;&nbsp;seuil de modernit&eacute;&nbsp;&raquo; biopolitique se situe au moment o&ugrave; le pouvoir en vient &agrave; se prononcer sur ce qui fait (ou non) la valeur d&rsquo;une vie humaine. Depuis l&rsquo;&acirc;ge classique au moins, le souverain a toujours b&eacute;n&eacute;fici&eacute; de la pr&eacute;rogative d&rsquo;un droit de vie et de mort absolu sur ses sujets. Mais le caract&egrave;re in&eacute;dit de la biopolitique moderne par rapport au droit ancestral de vie et de mort r&eacute;side dans le fait de &laquo;&nbsp;s&rsquo;&eacute;manciper de l&rsquo;&eacute;tat d&rsquo;exception pour se transformer en un pouvoir de d&eacute;cider du moment o&ugrave; la vie cesse d&rsquo;&ecirc;tre politiquement pertinente&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref18"></a><a href="#_ftn18"><sup><span style="color:black">[18]</span></sup></a>. Pour Agamben, la biopolitique moderne consiste en un &eacute;tat d&rsquo;exception g&eacute;n&eacute;ralis&eacute; o&ugrave; politique et vie tendent &agrave; se confondre sans qu&rsquo;aucune m&eacute;diation (de nature juridique ou autre) ne s&rsquo;intercale plus entre elles deux. En ce sens, les politiques eug&eacute;nistes pratiqu&eacute;es sous le r&eacute;gime nazi et les tentatives contemporaines de d&eacute;finir, sur le plan clinico-l&eacute;gal, l&rsquo;&eacute;tat de mort d&rsquo;un patient en situation de coma avanc&eacute; d&eacute;pendent d&#39;une seule et m&ecirc;me &laquo;&nbsp;politisation de la vie&nbsp;&raquo;. Dans les deux cas, le pouvoir ne se contente plus seulement de capturer la vie en l&rsquo;incluant dans son exclusion, mais d&eacute;finit lui-m&ecirc;me les crit&egrave;res qui d&eacute;terminent si telle ou telle forme de vie vaut ou non d&rsquo;&ecirc;tre v&eacute;cue.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Autant l&rsquo;institution archa&iuml;que de la mise au ban incarnait la bio-souverainet&eacute; &laquo;&nbsp;originaire&nbsp;&raquo;, autant le &laquo;&nbsp;camp&nbsp;&raquo; est selon Agamben l&rsquo;espace qui &agrave; pr&eacute;sent mat&eacute;rialise l&rsquo;exception g&eacute;n&eacute;ralis&eacute;e de la biopolitique moderne. Des premiers camps de concentration install&eacute;s par les Anglais dans la guerre coloniale contre les Boers au d&eacute;but du XX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle aux actuels camps de r&eacute;fugi&eacute;s en situation de guerre civile en passant par les camps de concentration et d&rsquo;extermination nazis, le camp appara&icirc;t d&egrave;s les d&eacute;buts de la modernit&eacute; comme &laquo;&nbsp;l&rsquo;espace biopolitique le plus absolu qui ait jamais &eacute;t&eacute; r&eacute;alis&eacute;, o&ugrave; le pouvoir n&rsquo;a en face de lui que la pure vie biologique sans aucune m&eacute;diation&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref19"></a><a href="#_ftn19"><sup><span style="color:black">[19]</span></sup></a>. Par rapport &agrave; l&rsquo;institution du ban, le camp a ceci de particulier que la loi y est ind&eacute;finiment suspendue et qu&rsquo;il pousse &agrave; l&rsquo;extr&ecirc;me la logique de l&rsquo;exception. Le camp est la parfaite illustration de l&rsquo;exception g&eacute;n&eacute;ralis&eacute;e en r&eacute;gime biopolitique, dans la mesure o&ugrave; les d&eacute;tenus y sont irr&eacute;m&eacute;diablement r&eacute;duits &agrave; la &laquo;&nbsp;survie&nbsp;&raquo; pure et simple<a name="_ftnref20"></a><a href="#_ftn20"><sup><span style="color:black">[20]</span></sup></a>. Le camp se pr&eacute;sente ainsi comme le laboratoire d&rsquo;un nouvel ordre politique qui d&eacute;sormais ne touche plus la vie nue &agrave; la marge de la communaut&eacute; politique mais s&rsquo;&eacute;tend progressivement &agrave; chaque individu pris un &agrave; un.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.1pt">On comprend alors mieux la pr&eacute;tention d&rsquo;Agamben d&rsquo;avoir finalement trouv&eacute;, gr&acirc;ce &agrave; l&rsquo;hypoth&egrave;se d&rsquo;une exception biopolitique, le point de jonction que Foucault avait voulu &eacute;tablir entre les &laquo;&nbsp;technologies politiques&nbsp;&raquo; visant la vie dans son ensemble et les &laquo;&nbsp;techniques de soi&nbsp;&raquo; cherchant &agrave; individualiser les sujets. Dans la mesure o&ugrave; &laquo;&nbsp;la vie nue n&rsquo;est plus confin&eacute;e dans un lieu particulier ou dans une cat&eacute;gorie pr&eacute;cise&nbsp;&raquo; mais &laquo;&nbsp;habite dans le corps biopolitique de chaque &ecirc;tre vivant&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref21"></a><a href="#_ftn21"><sup><span style="color:black">[21]</span></sup></a>, l&rsquo;exception biopolitique permet de saisir la fa&ccedil;on dont s&rsquo;articulent les deux principales modalit&eacute;s d&rsquo;exercice du pouvoir en Occident. En d&eacute;finissant &agrave; chaque fois la pertinence politique de la vie dans son ensemble, la biopolitique moderne vient s&rsquo;immiscer dans le corps de chaque individu en particulier.</span></span></span></span></span></p> <h2><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><b><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="text-transform:uppercase">Foucault&nbsp;: biopolitique et gouvernementalit&eacute;</span></span></span></b></span></span></h2> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">Contrairement &agrave; ce que laisserait croire la vaste litt&eacute;rature qu&rsquo;elle a pu susciter depuis quelques ann&eacute;es, la biopolitique constitue un th&egrave;me relativement mineur des recherches de Foucault. On le retrouve pour l&rsquo;essentiel dans la seconde moiti&eacute; des ann&eacute;es 1970, en particulier dans le premier tome de l&rsquo;<i>Histoire de la sexualit&eacute; </i>et dans ses cours donn&eacute;s au Coll&egrave;ge de France entre&nbsp;1976 et&nbsp;1979. La biopolitique sert avant tout d&rsquo;outil heuristique pour d&eacute;gager une s&eacute;rie de th&egrave;ses m&eacute;thodologiques sur le pouvoir et pour mettre au jour un certain nombre de ph&eacute;nom&egrave;nes historiques. On peut ainsi rep&eacute;rer trois contextes sp&eacute;cifiques dans lesquels elle appara&icirc;t<a name="_ftnref22"></a><a href="#_ftn22"><sup><span style="color:black">[22]</span></sup></a>. Premi&egrave;rement, la biopolitique permet &agrave; Foucault d&rsquo;amorcer la critique d&rsquo;une certaine conception du pouvoir qui s&rsquo;en tient uniquement &agrave; ce que le pouvoir peut avoir de r&eacute;pressif et de contraignant. Deuxi&egrave;mement, elle s&rsquo;int&egrave;gre &agrave; une g&eacute;n&eacute;alogie du &laquo;&nbsp;racisme d&rsquo;&Eacute;tat&nbsp;&raquo; au XX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle qui a culmin&eacute; avec le nazisme. Enfin, la biopolitique prend place de mani&egrave;re plus discr&egrave;te dans un large projet d&rsquo;histoire de la &laquo;&nbsp;gouvernementalit&eacute;&nbsp;&raquo; qui remonte jusqu&rsquo;au pastorat chr&eacute;tien pour s&rsquo;acheminer vers le lib&eacute;ralisme en passant par la raison d&rsquo;&Eacute;tat. Nous ne nous int&eacute;resserons ici qu&rsquo;au premier et au dernier de ces moments, dans la mesure o&ugrave; ils sont ceux qui donnent le plus clairement &agrave; voir ce en quoi la biopolitique au sens de Foucault se distingue de l&rsquo;usage qu&rsquo;a pu en faire Agamben dans ses propres travaux. La question que nous nous poserons alors est de savoir si la biopolitique, prise en ce sens-l&agrave;, soutient elle aussi, et si oui de quelle mani&egrave;re, une forme d&rsquo;exceptionnalit&eacute; et de rapport distendu &agrave; la loi et au droit.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.2pt">Le premier tome d&rsquo;<i>Histoire de la sexualit&eacute; </i>se pr&eacute;sente en grande partie comme un trait&eacute; m&eacute;thodologique sur la notion de pouvoir. Foucault y r&eacute;cuse &laquo;&nbsp;l&rsquo;hypoth&egrave;se r&eacute;pressive&nbsp;&raquo; suivant laquelle le pouvoir fonctionne uniquement &agrave; la loi, &agrave; l&rsquo;interdit, &agrave; la censure. Le pouvoir correspondrait dans cette optique &agrave; une sorte de cha&icirc;ne reliant deux p&ocirc;les&nbsp;: d&rsquo;une part, la loi &eacute;dict&eacute;e par le souverain&nbsp;; de l&rsquo;autre, le sujet qui lui ob&eacute;it (ou, le cas &eacute;ch&eacute;ant, lui d&eacute;sob&eacute;it, avec le risque d&rsquo;&ecirc;tre sanctionn&eacute;). Foucault fait remonter cette conception r&eacute;pressive du pouvoir &agrave; l&rsquo;&eacute;closion de l&rsquo;&Eacute;tat monarchique &agrave; la fin de la p&eacute;riode f&eacute;odale. &Agrave; cette &eacute;poque, il s&rsquo;agissait bien pour le pouvoir royal de s&rsquo;imposer face &agrave; la multiplicit&eacute; des foyers de contestation en se pr&eacute;sentant comme un &Eacute;tat de justice en mesure de trancher les litiges, </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">en identifiant la loi &agrave; sa volont&eacute; souveraine et en appliquant &agrave; ses sujets des m&eacute;canismes d&rsquo;interdiction et de sanction. Dans sa strat&eacute;gie de l&eacute;gitimation, le pouvoir monarchique a adopt&eacute; de fa&ccedil;on privil&eacute;gi&eacute;e le langage du droit. Depuis<span style="letter-spacing:-.2pt"> lors, le langage juridique appara&icirc;t comme &laquo;&nbsp;le code selon lequel le pouvoir se pr&eacute;sente et prescrit lui-m&ecirc;me qu&rsquo;on le pense&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref23"></a><a href="#_ftn23"><sup><span style="color:black">[23]</span></sup></a>. Ce que la &laquo;&nbsp;monarchie juridique&nbsp;&raquo; (et avec elle &laquo;&nbsp;l&rsquo;hypoth&egrave;se r&eacute;pressive&nbsp;&raquo; &agrave; propos du pouvoir) n&rsquo;a pas &eacute;t&eacute; en mesure de pleinement saisir et d&rsquo;apercevoir, c&rsquo;est l&rsquo;apparition vers la moiti&eacute; du XVIII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle de &laquo;&nbsp;nouveaux proc&eacute;d&eacute;s de pouvoir qui fonctionnent non pas au droit mais &agrave; la technique, non pas au ch&acirc;timent mais au contr&ocirc;le, et qui s&rsquo;exercent &agrave; des niveaux et dans des formes qui d&eacute;bordent l&rsquo;&Eacute;tat et ses appareils&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref24"></a><a href="#_ftn24"><sup><span style="color:black">[24]</span></sup></a>. La technique et la strat&eacute;gie plut&ocirc;t que le droit et la loi, le contr&ocirc;le et la r&eacute;gulation plut&ocirc;t que le ch&acirc;timent et la sanction, la multiplicit&eacute; des micro-pouvoirs plut&ocirc;t que l&rsquo;unit&eacute; centralis&eacute;e d&rsquo;un pouvoir &eacute;tatique, tels sont pr&eacute;cis&eacute;ment quelques-uns des &eacute;l&eacute;ments de son analytique du pouvoir que Foucault entend opposer &agrave; la conception </span><span style="letter-spacing:-.1pt">r&eacute;pressive du pouvoir l&eacute;gu&eacute;e par la tradition de la &laquo;&nbsp;monarchie juridique&nbsp;&raquo;. La pr&eacute;caution m&eacute;thodologique de d&eacute;part &agrave; propos</span><span style="letter-spacing:-.2pt"> du pouvoir s&rsquo;av&egrave;re ainsi intimement li&eacute;e &agrave; une analyse historique concr&egrave;te des transformations de ses principales formes. Plus particuli&egrave;rement, les d&eacute;fis que le pouvoir souverain et son langage juridique se montraient incapables de relever &eacute;taient ceux suscit&eacute;s par l&rsquo;explosion d&eacute;mographique, l&rsquo;urbanisation massive et les d&eacute;buts de l&rsquo;industrialisation qu&rsquo;ont connus dans le courant du XVIII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle les soci&eacute;t&eacute;s occidentales. La mani&egrave;re dont ces probl&egrave;mes d&rsquo;ordre d&eacute;mographique, sanitaire, urbain, &eacute;conomique, seront trait&eacute;s ne rel&egrave;vera plus directement de la loi souveraine et du droit mais d&rsquo;une nouvelle &laquo;&nbsp;technologie de pouvoir centr&eacute;e sur la vie&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref25"></a><a href="#_ftn25"><sup><span style="color:black">[25]</span></sup></a> que Foucault baptise alors pour la premi&egrave;re fois &laquo;&nbsp;biopouvoir&nbsp;&raquo;.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.1pt">Dans le dernier chapitre de <i>La volont&eacute; de savoir</i>, Foucault contraste le pouvoir classique du souverain et ce nouveau biopouvoir&nbsp;: l&agrave; o&ugrave; le premier b&eacute;n&eacute;ficie d&rsquo;un droit de vie et de mort sur ses sujets, le second a &laquo;&nbsp;pour fonction de g&eacute;rer la vie&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref26"></a><a href="#_ftn26"><sup><span style="color:black">[26]</span></sup></a>. Le biopouvoir comprend &agrave; son tour deux versants&nbsp;: l&rsquo;un qui consiste en un travail individualisant sur les corps afin de les dresser, les discipliner, les rendre utiles et productifs, &laquo;&nbsp;une <i>anatomo-politique du corps humain</i>&nbsp;&raquo;&nbsp;; l&rsquo;autre qui porte sur la r&eacute;gulation du vivant humain dans son ensemble (sant&eacute; publique, contr&ocirc;le des naissances, conditions d&rsquo;hygi&egrave;ne), &laquo;&nbsp;une <i>bio-politique de la population&nbsp;</i>&raquo;<a name="_ftnref27"></a><a href="#_ftn27"><sup><span style="color:black">[27]</span></sup></a>. Foucault ajoute que l&rsquo;&eacute;mergence du biopouvoir en ses deux versants, disciplinaire et bio-r&eacute;gulateur, marque sinon la fin du r&eacute;gime juridique de la loi et de la sanction, du moins sa mutation en un r&eacute;gime de normalisation et de r&eacute;gulation de la vie. Dor&eacute;navant, &eacute;crit Foucault, &laquo;&nbsp;il ne s&rsquo;agit plus de faire jouer la mort dans le champ de la souverainet&eacute;, mais de distribuer le vivant dans un domaine de valeur et d&rsquo;utilit&eacute;. Un tel pouvoir a &agrave; qualifier, &agrave; mesurer, &agrave; appr&eacute;cier, &agrave; hi&eacute;rarchiser, plut&ocirc;t qu&rsquo;&agrave; se manifester dans son &eacute;clat meurtrier&nbsp;; il n&rsquo;a pas &agrave; tracer la ligne qui s&eacute;pare, des sujets ob&eacute;issants, les ennemis du souverain&nbsp;; il op&egrave;re des distributions autour de la norme&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref28"></a><a href="#_ftn28"><sup><span style="color:black">[28]</span></sup></a>.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">Arr&ecirc;tons-nous sur ce premier moment des r&eacute;flexions de Foucault pour tenter de voir en quoi le concept de biopolitique qui y est mis en place se distingue de la r&eacute;appropriation dont il a fait l&rsquo;objet par Agamben. Tout d&rsquo;abord, alors que Foucault d&eacute;veloppe la notion de biopouvoir en exacte contraposition avec celle de pouvoir souverain, Agamben s&rsquo;int&eacute;resse quant &agrave; lui &agrave; la mani&egrave;re dont le pouvoir souverain s&rsquo;exerce, directement ou indirectement, sur la vie nue. M&ecirc;me si Agamben serait pr&ecirc;t &agrave; conc&eacute;der que le pouvoir n&rsquo;est pas uniquement de l&rsquo;ordre de l&rsquo;interdit, de la peine et de la sanction, son mod&egrave;le de la &laquo;&nbsp;bio-souverainet&eacute;&nbsp;&raquo; en tant que &laquo;&nbsp;relation politique originaire&nbsp;&raquo; semble en d&eacute;finitive rest&eacute; prisonnier de l&rsquo;image classique du pouvoir v&eacute;hicul&eacute; par la &laquo;&nbsp;monarchie juridique&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref29"></a><a href="#_ftn29"><sup><span style="color:black">[29]</span></sup></a>. Ensuite, le probl&egrave;me d&rsquo;une articulation entre &laquo;&nbsp;techniques politiques&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;techniques de soi&nbsp;&raquo; qu&rsquo;Agamben tranche gr&acirc;ce &agrave; son hypoth&egrave;se d&rsquo;une exception biopolitique trouve chez Foucault un tout autre d&eacute;nouement. En distinguant les deux p&ocirc;les du biopouvoir, l&rsquo;un disciplinaire et individualisant (&laquo;&nbsp;une <i>anatomo-politique du corps humain</i>&nbsp;&raquo;), l&rsquo;autre r&eacute;gulateur et massifiant (&laquo;&nbsp;une <i>bio-politique de la population&nbsp;</i>&raquo;), l&rsquo;intention de Foucault est aussi de montrer que ces p&ocirc;les sont en fait &laquo;&nbsp;reli&eacute;s par tout un faisceau interm&eacute;diaire de relations&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref30"></a><a href="#_ftn30"><sup><span style="color:black">[30]</span></sup></a>. &Agrave; la diff&eacute;rence d&rsquo;Agamben qui vise en dernier ressort &agrave; &eacute;tablir une th&eacute;orie unitaire du pouvoir occidental tra&ccedil;ant un continuum entre la &laquo;&nbsp;bio-souverainet&eacute;&nbsp;&raquo; et la biopolitique moderne, Foucault d&eacute;fend pour sa part une conception &eacute;minemment plurielle et historiquement diff&eacute;renci&eacute;e du pouvoir, au sein de laquelle les deux p&ocirc;les individualisant et totalisant du pouvoir ne font pas l&rsquo;objet d&rsquo;une ultime synth&egrave;se mais restent en tension permanente<a name="_ftnref31"></a><a href="#_ftn31"><sup><span style="color:black">[31]</span></sup></a>.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.1pt">Dans son cours de 1977-1978 intitul&eacute; <i>S&eacute;curit&eacute;, territoire, population</i>, Foucault </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">introduit pour la premi&egrave;re fois la notion de &laquo;&nbsp;gouvernementalit&eacute;&nbsp;&raquo;. Par l&agrave; il entend, de mani&egrave;re g&eacute;n&eacute;rale, un ensemble de techniques de pouvoir qui, irr&eacute;ductibles &agrave; l&rsquo;acte souverain de r&eacute;gner ou d&rsquo;&eacute;dicter la loi, correspondent &agrave; une rationalit&eacute; politique qui a pour but de diriger, d&rsquo;administrer, d&rsquo;influencer les individus dans leurs conduites et pratiques quotidiennes. Cette notion a l&rsquo;avantage de prendre &agrave; revers l&rsquo;&Eacute;tat, ses appareils et son discours centr&eacute; sur le droit et la loi, et de nous rendre attentifs aux techniques et aux strat&eacute;gies de pouvoir qui se jouent en soubassement<a name="_ftnref32"></a><a href="#_ftn32"><sup><span style="color:black">[32]</span></sup></a>. Foucault ira jusqu&rsquo;&agrave; consid&eacute;rer l&rsquo;&Eacute;tat comme une simple &laquo;&nbsp;p&eacute;rip&eacute;tie de la gouvernementalit&eacute;&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref33"></a><a href="#_ftn33"><sup><span style="color:black">[33]</span></sup></a>. De mani&egrave;re plus sp&eacute;cifique, l&rsquo;apparition des nouvelles techniques de gouvernement est intimement li&eacute;e &agrave; l&rsquo;&eacute;mergence du probl&egrave;me biopolitique soulev&eacute; par la population et sa r&eacute;gulation au XVIII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle. C&rsquo;est &agrave; cette &eacute;poque que la question des arts de gouverner (se gouverner soi-m&ecirc;me, gouverner les &acirc;mes, gouverner la famille) se d&eacute;place vers le champ d&rsquo;intervention de la population pour donner naissance &agrave; une science nouvelle appel&eacute;e &laquo;&nbsp;&eacute;conomie&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref34"></a><a href="#_ftn34"><sup><span style="color:black">[34]</span></sup></a>. <span style="letter-spacing:-.1pt">L&rsquo;histoire de la gouvernementalit&eacute; retrac&eacute;e par Foucault a pour hypoth&egrave;se directrice la lente &laquo;&nbsp;&ldquo;gouvernementalisation&rdquo; de l&rsquo;&Eacute;tat&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref35"></a><a href="#_ftn35"><sup><span style="color:black">[35]</span></sup></a>. De fait, on assiste d&egrave;s la seconde moiti&eacute; du XVIII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle &agrave; une pr&eacute;dominance des probl&eacute;matiques li&eacute;es au gouvernement et &agrave; l&rsquo;administration des populations, &agrave; l&rsquo;&eacute;conomie et &agrave; la s&eacute;curit&eacute;, sur celles port&eacute;es par la souverainet&eacute;, la loi et les disciplines. Foucault &eacute;met ainsi l&rsquo;hypoth&egrave;se qu&rsquo;il y aurait trois types d&rsquo;&Eacute;tat se combinant dans les &laquo;&nbsp;&eacute;conomies de pouvoir en Occident&nbsp;&raquo;&nbsp;: &laquo;&nbsp;l&rsquo;&Eacute;tat de justice&nbsp;&raquo; n&eacute; avec la f&eacute;odalit&eacute; qui correspond &agrave; une &laquo;&nbsp;soci&eacute;t&eacute; de la loi&nbsp;&raquo;&nbsp;; &laquo;&nbsp;l&rsquo;&Eacute;tat administratif&nbsp;&raquo; issu de la bourgeoisie qui repose sur &laquo;&nbsp;une soci&eacute;t&eacute; de r&egrave;glements et de disciplines&nbsp;&raquo;&nbsp;; &laquo;&nbsp;l&rsquo;&Eacute;tat de gouvernement&nbsp;&raquo;, enfin, qui s&rsquo;appuie sur &laquo;&nbsp;une soci&eacute;t&eacute; contr&ocirc;l&eacute;e par les dispositifs de s&eacute;curit&eacute;&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref36"></a><a href="#_ftn36"><sup><span style="color:black">[36]</span></sup></a>. Foucault insiste sur le fait que ces trois types d&rsquo;&Eacute;tat et leurs m&eacute;canismes respectifs de pouvoir (souverainet&eacute; de la loi, r&egrave;glements disciplinaires, dispositifs biopolitiques de s&eacute;curit&eacute;) restent dans une large mesure enchev&ecirc;tr&eacute;s. En ce sens, la &laquo;&nbsp;gouvernementalisation&nbsp;&raquo; de l&rsquo;&Eacute;tat n&rsquo;a pas rendu caducs les probl&egrave;mes li&eacute;s &agrave; la souverainet&eacute; juridico-l&eacute;gale ou aux disciplines&nbsp;; elle les a au contraire accentu&eacute;s en les reformulant au niveau biopolitique de la population.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.2pt">Sans pr&eacute;tendre ici r&eacute;sumer la vaste histoire de la gouvernementalit&eacute; propos&eacute;e par Foucault dans ces le&ccedil;ons, retenons un &eacute;pisode qui devrait nous permettre de cerner les &eacute;ventuels liens entre biopolitique de la population et &eacute;tat d&rsquo;exception. Dans le cours de 1977-1978, Foucault nous livre une analyse des techniques de gouvernement mises en place par la raison d&rsquo;&Eacute;tat. &Agrave; partir du XVI<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle, le champ du politique s&rsquo;est largement autonomis&eacute; par rapport au religieux gr&acirc;ce &agrave; l&rsquo;id&eacute;e selon laquelle la politique repose sur une rationalit&eacute; propre, distincte de la question religieuse du salut des &acirc;mes<a name="_ftnref37"></a><a href="#_ftn37"><sup><span style="color:black">[37]</span></sup></a>. &Agrave; mesure que se rompaient les liens de subordination du politique au religieux, l&rsquo;&Eacute;tat s&rsquo;est donn&eacute; pour unique finalit&eacute; la conservation et le d&eacute;veloppement de ses propres forces tant &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur de ses fronti&egrave;res que vis-&agrave;-vis des autres &Eacute;tats. Afin d&rsquo;atteindre cet objectif, les nouveaux arts de gouverner feront </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.3pt">pr&eacute;valoir l&rsquo;id&eacute;e d&rsquo;une raison d&rsquo;&Eacute;tat en exc&egrave;s</span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.2pt"> par rapport au droit commun&nbsp;: au nom de ses int&eacute;r&ecirc;ts sup&eacute;rieurs l&rsquo;&Eacute;tat pouvait en toute impunit&eacute; d&eacute;roger aux lois civiles. Parmi les techniques de gouvernement gr&acirc;ce auxquelles l&rsquo;&Eacute;tat a tent&eacute; d&rsquo;asseoir sa propre puissance, les technologies &laquo;&nbsp;polici&egrave;res&nbsp;&raquo; m&eacute;ritent une attention particuli&egrave;re. La &laquo;&nbsp;police&nbsp;&raquo; (au sens tr&egrave;s large que ce terme rev&ecirc;t aux XVII<sup>e</sup> et XVIII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cles) a pour objet la bonne administration quotidienne des hommes et des choses en vue de pr&eacute;server et d&rsquo;augmenter les forces de l&rsquo;&Eacute;tat. &laquo;&nbsp;Le but de la police &ndash; &eacute;crit Foucault &ndash; est d&rsquo;accro&icirc;tre en permanence la production de quelque chose de nouveau, cens&eacute; consolider la vie civique et la puissance de l&rsquo;&Eacute;tat. La police gouverne, non par la loi, mais en intervenant de mani&egrave;re sp&eacute;cifique, permanente et positive dans la conduite des individus.&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref38"></a><a href="#_ftn38"><sup><span style="color:black">[38]</span></sup></a> &Agrave; travers son souci de r&eacute;gler jusque dans ses moindres d&eacute;tails la vie mat&eacute;rielle des populations, la police participe de ce nouvel art de gouverner propre &agrave; la raison d&rsquo;&Eacute;tat. En supprimant la m&eacute;diation des appareils de justice et de la loi, elle instaure une &laquo;&nbsp;gouvernementalit&eacute; directe du souverain en tant que souverain&nbsp;&raquo;.&nbsp;Autrement dit, &laquo;&nbsp;la police, c&rsquo;est le coup d&rsquo;&Eacute;tat permanent&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref39"></a><a href="#_ftn39"><sup><span style="color:black">[39]</span></sup></a>, une mani&egrave;re pour l&rsquo;&Eacute;tat de s&rsquo;immiscer dans le tissu &eacute;pais de relations (sanitaires, urbaines, professionnelles, commerciales) form&eacute;es par la population afin d&rsquo;augmenter sa propre puissance.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.3pt">Les analyses foucaldiennes de la raison d&rsquo;&Eacute;tat et de la &laquo;&nbsp;police&nbsp;&raquo; recoupent en partie celles d&eacute;velopp&eacute;es par Agamben</span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.2pt"> &agrave; propos de la biopolitique moderne. M&ecirc;me attention port&eacute;e par le pouvoir policier de l&rsquo;&Eacute;tat au vivre et au mieux-vivre de la population&nbsp;; r&eacute;gime comparable d&rsquo;exception gr&acirc;ce auquel la police contourne la loi et le droit au travers de r&egrave;glements et d&rsquo;ordonnances&nbsp;; identique face-&agrave;-face, en l&rsquo;absence de toute m&eacute;diation juridique, de l&rsquo;&Eacute;tat et de ses sujets. Mais l&rsquo;&Eacute;tat policier ne repr&eacute;sente qu&rsquo;une &eacute;tape dans l&rsquo;histoire de la gouvernementalit&eacute; retrac&eacute;e par Foucault. L&rsquo;av&egrave;nement d&rsquo;une forme de gouvernementalit&eacute; &laquo;&nbsp;lib&eacute;rale&nbsp;&raquo; dans le courant du XVIII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle marque en effet la fin du &laquo;&nbsp;grand r&ecirc;ve disciplinaire&nbsp;&raquo; &agrave; travers lequel l&rsquo;&Eacute;tat de police avait souhait&eacute; r&eacute;gler avec minutie la vie des populations dont il avait la charge. Avec le lib&eacute;ralisme, ce n&rsquo;est plus &agrave; coups d&rsquo;ordonnances et de r&egrave;glements disciplinaires que la population sera administr&eacute;e, mais en branchant le &laquo;&nbsp;gouvernement &eacute;conomique&nbsp;&raquo; sur la &laquo;&nbsp;naturalit&eacute;&nbsp;&raquo; des processus &eacute;conomiques, sur la &laquo;&nbsp;r&eacute;gulation spontan&eacute;e du cours des choses&nbsp;&raquo;</span></span></span>&thinsp;<a name="_ftnref40"></a><a href="#_ftn40"><sup><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.2pt">[40]</span></span></span></sup></a><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.2pt">, sur le libre d&eacute;veloppement des forces du march&eacute;. Du point de vue d&rsquo;une histoire de la gouvernementalit&eacute;, le lib&eacute;ralisme appara&icirc;t surtout comme une technique nouvelle de gouvernement n&eacute;e des critiques adress&eacute;es &agrave; l&rsquo;&Eacute;tat policier et &agrave; ses exc&egrave;s. Alors m&ecirc;me que la population reste au c&oelig;ur des dispositifs de pouvoir, la gouvernementalit&eacute; lib&eacute;rale s&rsquo;appuiera sur une toute autre rationalit&eacute; que celle port&eacute;e par la raison d&rsquo;&Eacute;tat et ses besoins insatiables de puissance&nbsp;: une rationalit&eacute; qui pr&eacute;tend limiter l&rsquo;exercice toujours potentiellement abusif du gouvernement &eacute;tatique afin de laisser libre cours &agrave; la soci&eacute;t&eacute; civile et au march&eacute;. Aux mesures de police se substituent les &laquo;&nbsp;mesures de s&eacute;curit&eacute; (&hellip;) ayant essentiellement pour fonction d&rsquo;assurer la s&eacute;curit&eacute; de ces ph&eacute;nom&egrave;nes naturels qui sont les processus &eacute;conomiques ou qui sont les processus intrins&egrave;ques &agrave; la population&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref41"></a><a href="#_ftn41"><sup><span style="color:black">[41]</span></sup></a>. Comme le souligne Fr&eacute;d&eacute;ric Gros &agrave; propos de cette &laquo;&nbsp;bio-s&eacute;curit&eacute;&nbsp;&raquo; qui na&icirc;t avec le lib&eacute;ralisme, &laquo;&nbsp;si la r&eacute;gulation, c&rsquo;est la s&eacute;curit&eacute;, alors la s&eacute;curit&eacute; c&rsquo;est le march&eacute;, un march&eacute; d&eacute;r&eacute;glement&eacute;&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref42"></a><a href="#_ftn42"><sup><span style="color:black">[42]</span></sup></a>. M&ecirc;me si le lib&eacute;ralisme fera un large usage du langage du droit (droit de propri&eacute;t&eacute; priv&eacute;e, droit des contrats) et de la loi pour contrer l&rsquo;arbitraire de l&rsquo;&Eacute;tat, cet outillage juridico-l&eacute;gal demeurera ultimement au service de la d&eacute;fense de la &laquo;&nbsp;naturalit&eacute;&nbsp;&raquo; du march&eacute;. Un march&eacute; qu&rsquo;il s&rsquo;agit de r&eacute;guler en s&rsquo;adossant &agrave; ses normes immanentes, spontan&eacute;es, &laquo;&nbsp;naturelles&nbsp;&raquo;, et non pas de r&eacute;glementer &agrave; l&rsquo;aide de lois et de directives artificielles &eacute;manant d&rsquo;un pouvoir qui leur reste ext&eacute;rieur.</span></span></span></span></span></p> <h2><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><b><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="text-transform:uppercase">Deux r&eacute;gimes d&rsquo;exception</span></span></span></b></span></span></h2> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.3pt">En somme, derri&egrave;re le m&ecirc;me terme de &laquo;&nbsp;biopolitique&nbsp;&raquo;, Agamben et Foucault nous offrent deux conceptions tr&egrave;s diff&eacute;rentes de la mani&egrave;re dont le pouvoir en Occident a pris pour cible la vie humaine. Chez Agamben, la biopolitique correspond &agrave; un projet de &laquo;&nbsp;politisation totale&nbsp;&raquo; de la vie qui trouve &agrave; se mat&eacute;rialiser dans l&rsquo;espace du camp. Elle est ce qui, souverainement, d&eacute;cide de la valeur d&rsquo;une vie humaine. Chez Foucault, elle d&eacute;signe en revanche un ensemble de techniques de contr&ocirc;le et de r&eacute;gulation de la vie dont le &laquo;&nbsp;gouvernement &eacute;conomique&nbsp;&raquo; fournit </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.1pt">l&rsquo;exemple paradigmatique. En ce sens-l&agrave;, la biopolitique ne d&eacute;cide pas de la valeur ultime d&rsquo;une vie, mais s&rsquo;appuie sur la &laquo;&nbsp;naturalit&eacute;&nbsp;&raquo; des ph&eacute;nom&egrave;nes li&eacute;s &agrave; la vie (l&rsquo;&eacute;conomie, la d&eacute;mographie, la sant&eacute;) pour critiquer la d&eacute;mesure du pouvoir souverain de l&rsquo;&Eacute;tat. On pourrait baptiser ces deux formes de biopouvoir qui &eacute;mergent des analyses respectives d&rsquo;Agamben et de Foucault &laquo;&nbsp;biopolitique souveraine&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;biopolitique gouvernementale&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref43"></a><a href="#_ftn43"><sup><span style="color:black">[43]</span></sup></a>.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.1pt">Dans quelle mesure la biopolitique souveraine et la biopolitique gouvernementale dessinent-elles deux r&eacute;gimes distincts d&rsquo;exception&nbsp;? Dans le cas de la premi&egrave;re, l&rsquo;&eacute;tat d&rsquo;exception provient de la mani&egrave;re dont la biopolitique tend &agrave; effacer par pure d&eacute;cision souveraine tout &eacute;cart entre la norme et le fait, entre le droit et le non-droit, et ainsi &agrave; &laquo;&nbsp;politiser&nbsp;&raquo; de part en part la vie des individus. Dans le cas de la seconde, l&rsquo;exception est li&eacute;e au caract&egrave;re non juridique, spontan&eacute;, &laquo;&nbsp;naturel&nbsp;&raquo;, des ph&eacute;nom&egrave;nes que la biopolitique gouvernementale a pour t&acirc;che de r&eacute;guler et de contr&ocirc;ler au lieu de les encadrer par des lois ou des ordonnances &eacute;manant d&rsquo;un pouvoir souverain. Ces deux biopolitiques et leurs r&eacute;gimes respectifs d&rsquo;exceptionnalit&eacute; r&eacute;pondent &agrave; des logiques de pouvoir oppos&eacute;es. L&rsquo;une cr&eacute;e par pure d&eacute;cision du pouvoir souverain un &eacute;tat d&rsquo;exception g&eacute;n&eacute;ralis&eacute;&nbsp;; l&rsquo;autre tente au contraire &agrave; tout prix de supprimer l&rsquo;arbitraire du pouvoir d&rsquo;&Eacute;tat au nom du caract&egrave;re naturel et spontan&eacute; des ph&eacute;nom&egrave;nes &eacute;conomiques, sanitaires, d&eacute;mographiques.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.1pt">Entre ces deux formes oppos&eacute;es de biopolitique demeure cependant un point commun&nbsp;qui r&eacute;side dans leur exceptionnalit&eacute; par rapport &agrave; l&rsquo;&Eacute;tat de droit. Toutes deux mettent en suspens, instrumentalisent, voire suppriment carr&eacute;ment leur rapport aux lois et au droit, tant&ocirc;t par d&eacute;cision souveraine, tant&ocirc;t au nom de la naturalit&eacute; des ph&eacute;nom&egrave;nes. Par d&eacute;mocratie, on entend le plus souvent depuis Rousseau l&rsquo;id&eacute;e d&rsquo;une autonomie politique sous un r&eacute;gime de loi universelle&nbsp;: l&rsquo;autonomie politique des citoyens d&rsquo;une d&eacute;mocratie d&eacute;pend de leur ob&eacute;issance &agrave; un r&eacute;gime de lois qui vaut sans exception pour tous. L&rsquo;universalit&eacute; de la loi d&eacute;mocratique est ce que la biopolitique souveraine et la biopolitique gouvernementale et leurs r&eacute;gimes correspondants d&rsquo;exception mettent &agrave; mal, bien que leurs contournements de la loi r&eacute;pondent chaque fois &agrave; des strat&eacute;gies de pouvoir diff&eacute;rentes. On pourrait citer aujourd&rsquo;hui comme exemple de biopolitique souveraine les politiques migratoires qui refluent les migrants devant les murs de la citadelle europ&eacute;enne. Ici, la biopolitique d&eacute;cide souverainement, au travers d&rsquo;un flou juridique assum&eacute;, de ce qui fait (ou non) la valeur d&rsquo;une vie humaine. Du c&ocirc;t&eacute; de la biopolitique gouvernementale, on trouverait les politiques d&rsquo;aust&eacute;rit&eacute; impos&eacute;es aux populations en vertu de &laquo;&nbsp;lois&nbsp;&raquo; dont la nature n&rsquo;est pas juridique (c&rsquo;est-&agrave;-dire susceptible d&rsquo;&ecirc;tre d&eacute;battue publiquement) mais &eacute;conomique (c&rsquo;est-&agrave;-dire condamn&eacute;e &agrave; rester entre les mains d&rsquo;experts avis&eacute;s). L&agrave;, la biopolitique tire sa justification de ph&eacute;nom&egrave;nes pr&eacute;tendument &laquo;&nbsp;naturels&nbsp;&raquo; (la &laquo;&nbsp;croissance&nbsp;&raquo;), en sacrifiant au passage plusieurs g&eacute;n&eacute;rations sur l&rsquo;autel de l&rsquo;&eacute;conomie.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.05pt">Il n&rsquo;est pas s&ucirc;r toutefois qu&rsquo;une r&eacute;ponse satisfaisante &agrave; ces deux types de biopolitique et aux d&eacute;fis qu&rsquo;ils posent aux d&eacute;mocraties contemporaines </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.2pt">puisse venir d&rsquo;un sursaut juridique ou d&rsquo;un plus de lois. En introduisant la notion de &laquo;&nbsp;gouvernementalit&eacute;&nbsp;&raquo;, Foucault</span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.05pt"> souhaitait montrer que, face &agrave; des techniques de gouvernement dont les ressorts se situent ailleurs que sur le terrain juridique des r&egrave;gles &eacute;dict&eacute;es par un pouvoir centralis&eacute; (m&ecirc;me d&eacute;mocratique), la loi et le droit ne suffisent pas &agrave; provoquer des transformations suffisamment profondes. La r&eacute;ponse aux deux r&eacute;gimes d&rsquo;exception qu&rsquo;instaurent aujourd&rsquo;hui la </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.3pt">biopolitique souveraine et la biopolitique gouvernementale serait peut-&ecirc;tre &agrave; chercher</span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.05pt"> du c&ocirc;t&eacute; de ce &laquo;&nbsp;droit des gouvern&eacute;s&nbsp;&raquo; &agrave; propos duquel Foucault estimait qu&rsquo;il est &laquo;&nbsp;plus pr&eacute;cis, plus historiquement d&eacute;termin&eacute; que les droits de l&rsquo;homme&nbsp;: il est plus large que celui des administr&eacute;s et des citoyens&nbsp;; on n&rsquo;en a gu&egrave;re formul&eacute; la th&eacute;orie. Notre histoire r&eacute;cente en a fait une r&eacute;alit&eacute; encore fragile mais pr&eacute;cieuse pour un avenir qui porte partout la menace d&rsquo;un &Eacute;tat o&ugrave; les fonctions de gouvernement seraient hypertrophi&eacute;es jusqu&rsquo;&agrave; la gestion quotidienne des individus&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref44"></a><a href="#_ftn44"><sup><span style="color:black">[44]</span></sup></a>.</span></span></span></span></span></p> <p>&nbsp;</p> <p>&nbsp;</p> <div> <hr align="left" size="1" width="33%" /></div> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn1"></a><a href="#_ftnref1"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[1]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Giorgio Agamben, <i>Homo sacer. Le pouvoir souverain et la vie nue</i>, Paris, Seuil, 1997, p. 27.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn2"></a><a href="#_ftnref2"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[2]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Voir Giorgio Agamben, <i>&Eacute;tat d&rsquo;exception. Homo sacer, II, 1</i>, Paris, Seuil, 2003, pp. 89-109.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn3"></a><a href="#_ftnref3"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[3]</span></span></span></sup></a> <span lang="EN-US" style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">Giorgio Agamben, <i>Homo sacer</i>, <i>op. cit.,</i> p. 13.&nbsp; </span></span><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">Voir Michel Foucault, &laquo;&nbsp;&ldquo;Omnes et singulatim&rdquo;&nbsp;: vers une critique de la raison politique&nbsp;&raquo;, in <i>Dits et &eacute;crits II (1976-1988)</i>, Paris, Quarto-Gallimard, 2001, pp. 953-980.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn4"></a><a href="#_ftnref4"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[4]</span></span></span></sup></a> <span lang="EN-US" style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">Giorgio Agamben, <i>Homo sacer</i>, <i>op. cit., </i>p. 14.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn5"></a><a href="#_ftnref5"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[5]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <i>Ibid</i>.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn6"></a><a href="#_ftnref6"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[6]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Voir Giorgio Agamben, <i>&Eacute;tat d&rsquo;exception</i>, <i>op. cit., </i>pp. 13-14.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn7"></a><a href="#_ftnref7"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[7]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Michel Foucault, <i>Histoire de la sexualit&eacute; 1. La volont&eacute; de savoir</i>, Paris, Gallimard, 1976, p. 188.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn8"></a><a href="#_ftnref8"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[8]</span></span></span></sup></a> <span lang="EN-US" style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">Giorgio Agamben, <i>Homo sacer</i>, <i>op. cit.,</i> p. 17.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn9"></a><a href="#_ftnref9"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[9]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Voir &agrave; ce propos Katia Genel, &laquo;&nbsp;Le biopouvoir chez Foucault et Agamben&nbsp;&raquo;,&nbsp; <i>Methodos</i>, n&deg; 4, 2004, consult&eacute; en ligne le 10 mars 2015. </span></span><span lang="EN-US" style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">URL&nbsp;: </span></span><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><a href="http://methodos.revues.org/131"><span lang="EN-US" style="color:#0563c1">http://methodos.revues.org/131</span></a></span></span><span lang="EN-US" style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn10"></a><a href="#_ftnref10"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[10]</span></span></span></sup></a> <span lang="EN-US" style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">Giorgio Agamben, <i>Homo sacer</i>, <i>op. cit., </i>p. 33.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn11"></a><a href="#_ftnref11"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[11]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <i>Ibid</i>., p. 120. Agamben s&rsquo;appuie ici sur les r&eacute;flexions de Jean-Luc Nancy (in <i>L&rsquo;Imp&eacute;ratif cat&eacute;gorique</i>, Paris, Flammarion, 1992).</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn12"></a><a href="#_ftnref12"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[12]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <i>Ibid</i>., p. 93&nbsp;: &laquo;&nbsp;On dira souveraine la sph&egrave;re dans laquelle on peut tuer sans commettre d&rsquo;homicide et sans c&eacute;l&eacute;brer un sacrifice&nbsp;; et sacr&eacute;e, c&rsquo;est-&agrave;-dire expos&eacute;e au meurtre et insacrifiable, la vie qui a &eacute;t&eacute; captur&eacute;e dans cette sph&egrave;re.&nbsp;&raquo;</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn13"></a><a href="#_ftnref13"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[13]</span></span></span></sup></a> <span lang="EN-US" style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">Giorgio Agamben, <i>Homo sacer, op. cit., </i>p. 195.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn14"></a><a href="#_ftnref14"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[14]</span></span></span></sup></a> <span lang="EN-US" style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">L&rsquo;expression est emprunt&eacute;e &agrave; Andreas Kalyvas, &laquo;&nbsp;The Sovereign Weaver: Beyond the Camp&nbsp;&raquo;, in Andrew Norris (dir.), <i>Politics, Metaphysics, and Death. Essays on Giorgio Agamben&rsquo;s Homo Sacer</i>, Durham et Londres, Duke University Press, 2005, p. 109.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn15"></a><a href="#_ftnref15"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[15]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <i>Ibid</i>., p. 122&nbsp;: &laquo;&nbsp;Si, dans la modernit&eacute;, la vie se situe de plus en plus clairement au c&oelig;ur de la politique &eacute;tatique (devenue, dans les termes de Foucault, biopolitique), si &agrave; notre &eacute;poque, en un sens assez particulier mais parfaitement r&eacute;el, tous les citoyens se pr&eacute;sentent virtuellement comme <i>homines sacri</i>, cela tient au seul fait que, d&egrave;s l&rsquo;origine, la relation de ban constitue la structure propre du pouvoir souverain.&nbsp;&raquo;</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn16"></a><a href="#_ftnref16"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[16]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Voir Hannah Arendt, &laquo;&nbsp;Le d&eacute;clin de l&rsquo;&Eacute;tat-nation et la fin des droits de l&rsquo;homme&nbsp;&raquo;, <i>Les Origines du totalitarisme</i>, Paris, Quarto/Gallimard, 2002, pp. 561-607.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn17"></a><a href="#_ftnref17"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[17]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Giorgio Agamben, <i>Homo sacer, op. cit.,</i> p. 138&nbsp;: &laquo;&nbsp;Cette vie nue naturelle qui &eacute;tait dans l&rsquo;Ancien R&eacute;gime politiquement insignifiante et appartenait &agrave; Dieu comme vie de la cr&eacute;ature, et qui, dans le monde classique, se distinguait clairement (du moins en apparence), en tant que <i>zo&eacute;</i>, de la vie politique (<i>bios</i>), &eacute;merge d&eacute;sormais au premier plan dans la structure de l&rsquo;&Eacute;tat, et devient le fondement terrestre de sa l&eacute;gitimit&eacute; et de sa souverainet&eacute;.&nbsp;&raquo;</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn18"></a><a href="#_ftnref18"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[18]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <i>Ibid</i>., p. 153.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn19"></a><a href="#_ftnref19"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[19]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Giorgio Agamben, &laquo;&nbsp;Qu&rsquo;est-ce qu&rsquo;un camp&nbsp;?&nbsp;&raquo;, in <i>Moyens sans fins. Notes sur la politique</i>, Paris, Payot &amp; Rivages, 2002, p. 51. Les analyses d&rsquo;Agamben sont ici &agrave; nouveau redevables des r&eacute;flexions d&rsquo;Arendt, pour qui les camps incarnent le projet politique d&rsquo;une &laquo;&nbsp;domination totale&nbsp;&raquo; de la vie humaine au moyen de la &laquo;&nbsp;terreur&nbsp;&raquo;. Voir notamment Hannah Arendt, &laquo;&nbsp;Projet de recherche sur les camps de concentration&nbsp;&raquo;, in <i>La Nature du totalitarisme</i>, Paris, Payot, 1990, pp. 171-178.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn20"></a><a href="#_ftnref20"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[20]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Voir &agrave; ce sujet Giorgio Agamben, <i>Ce qui reste d&rsquo;Auschwitz. L&rsquo;archive et le t&eacute;moin. Homo sacer III</i>, Paris, Payot &amp; Rivages, 2003.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn21"></a><a href="#_ftnref21"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[21]</span></span></span></sup></a> <span lang="EN-US" style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">Giorgio Agamben, <i>Homo sacer, op. cit., </i>p. 150.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn22"></a><a href="#_ftnref22"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[22]</span></span></span></sup></a> <span lang="EN-US" style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">Voir Andreas Folkers, Thomas Lemke (dir.), <i>Biopolitik. Ein Reader</i>, Francfort</span></span><span lang="DE" style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">, </span></span><span lang="EN-US" style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">Suhrkamp, </span></span><span lang="DE" style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">2014, p. 9.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn23"></a><a href="#_ftnref23"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">[23]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"> Michel Foucault, <i>Histoire de la sexualit&eacute; 1. La volont&eacute; de savoir, op. cit., </i>p. 116.</span></span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn24"></a><a href="#_ftnref24"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[24]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <i>Ibid</i>., p. 118.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn25"></a><a href="#_ftnref25"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[25]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Michel Foucault, <i>Histoire de la sexualit&eacute; 1. La volont&eacute; de savoir, op. cit</i>., p. 190.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn26"></a><a href="#_ftnref26"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[26]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <i>Ibid</i>., p. 181. On notera que la gestion de la vie n&rsquo;exclut pas de devoir g&eacute;rer la mort. Pour Foucault, la thanatopolitique n&rsquo;est que l&rsquo;envers imm&eacute;diat de la biopolitique.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn27"></a><a href="#_ftnref27"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[27]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <i>Ibid</i>., p. 183.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn28"></a><a href="#_ftnref28"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[28]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <i>Ibid</i>., pp. 189-190.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn29"></a><a href="#_ftnref29"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[29]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Voir en ce sens Thomas Lemke, &laquo;&nbsp;&ldquo;A Zone of Indistinction&rdquo;. </span></span><span lang="EN-US" style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">A Critique of Giorgio Agamben&rsquo;s Concept of Biopolitics&nbsp;&raquo;, <i>Outlines</i>, n&deg;&nbsp;1, 2005, pp. 3-13.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn30"></a><a href="#_ftnref30"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[30]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Michel Foucault, <i>Histoire de la sexualit&eacute; 1. La volont&eacute; de savoir, op. cit., </i>p. 183.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn31"></a><a href="#_ftnref31"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[31]</span></span></span></sup></a> <span lang="EN-US" style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">Voir &agrave; ce sujet Johanna Oksala, &laquo;&nbsp;Violence and the Biopolitics of Modernity&nbsp;&raquo;, <i>Foucault Studies</i>, n&deg;&nbsp;10, 2010, pp. 23-43.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn32"></a><a href="#_ftnref32"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[32]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <span style="letter-spacing:.1pt">Voir &agrave; ce propos Pierre Lascoumes, &laquo;&nbsp;La gouvernementalit&eacute;&nbsp;: de la critique de l&rsquo;<span style="text-transform:uppercase">&eacute;</span>tat aux technologies de pouvoir&nbsp;&raquo;, <i>Le Portique</i>, n&deg;13-14, 2004, consult&eacute; en ligne le 10 mars 2015&nbsp;; http://leportique.revues.org/625.</span></span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn33"></a><a href="#_ftnref33"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[33]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Michel Foucault, <i>S&eacute;curit&eacute;, territoire, population. Cours au Coll&egrave;ge de France. 1977-1978</i>, Paris, Gallimard/Seuil, 2004, p. 235.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn34"></a><a href="#_ftnref34"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[34]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <span style="letter-spacing:-.15pt">Michel Foucault, <i>S&eacute;curit&eacute;, territoire, population</i>, <i>op. cit.</i>, p. 109&nbsp;: &laquo;&nbsp;La constitution d&rsquo;un savoir de gouvernement est absolument indissociable de la constitution d&rsquo;un savoir de tous les processus qui tournent autour de la population au sens large, ce qu&rsquo;on appelle pr&eacute;cis&eacute;ment &ldquo;l&rsquo;&eacute;conomie&rdquo;.&nbsp;&raquo;</span></span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn35"></a><a href="#_ftnref35"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[35]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <i>Ibid</i>., p. 112.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn36"></a><a href="#_ftnref36"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[36]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <i>Ibid</i>., p. 113.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn37"></a><a href="#_ftnref37"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[37]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Voir &agrave; ce sujet Michel Senellart, <i>Machiav&eacute;lisme et raison d&rsquo;&Eacute;tat</i>, Paris, PUF, 1989.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn38"></a><a href="#_ftnref38"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[38]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Michel Foucault, &laquo;&nbsp;Les technologies politiques des individus&nbsp;&raquo;<i>,</i> <i>art. cit.,</i> p. 1&thinsp;644.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn39"></a><a href="#_ftnref39"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[39]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Michel Foucault, <i>S&eacute;curit&eacute;, territoire, population, op. cit.,</i> p. 347.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn40"></a><a href="#_ftnref40"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[40]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <i>Ibid</i>., p. 352.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn41"></a><a href="#_ftnref41"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[41]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Michel Foucault, <i>S&eacute;curit&eacute;, territoire, population, op. cit.</i>, p. 361.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn42"></a><a href="#_ftnref42"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[42]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Fr&eacute;d&eacute;ric Gros, <i>Le Principe S&eacute;curit&eacute;</i>, Paris, Gallimard, 2012, p. 218.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn43"></a><a href="#_ftnref43"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[43]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Sur fond de critique des mesures anti-terroristes promulgu&eacute;es sous l&rsquo;administration Bush, Judith Butler a propos&eacute; une int&eacute;ressante discussion du couple souverainet&eacute;/gouvernementalit&eacute; &agrave; partir de Foucault et d&rsquo;Agamben (voir Judith Butler, &laquo;&nbsp;Indefinite Detention&nbsp;&raquo;, <i>Precarious life&nbsp;: the Power of Mourning and Violence</i>, Londres et New-York, Verso, 2004, pp. 50-100).</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn44"></a><a href="#_ftnref44"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:#0563c1">[44]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Michel Foucault, &laquo;&nbsp;Va-t-on extrader Klaus Croissant&nbsp;?&nbsp;&raquo;, in <i>Dits et &eacute;crits II (1976-1988), op. cit.,</i> p. 362.</span></span></span></span></p> <p>&nbsp;</p>