<p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">En juin</span></span>&thinsp;<span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">1917, alors que l&rsquo;&eacute;chec de l&rsquo;offensive du Chemin des Dames allonge encore un peu plus la dur&eacute;e de la guerre, <i>Le Crapouillot</i>, journal de tranch&eacute;es dirig&eacute; par le combattant Jean Galtier-Boissi&egrave;re, s&rsquo;int&eacute;resse &agrave; la litt&eacute;rature n&eacute;e de la guerre, non pas &eacute;crite par les t&eacute;moins directs mais par les civils rest&eacute;s &agrave; l&rsquo;arri&egrave;re. Dans un article ironiquement intitul&eacute; &laquo;&nbsp;Les h&eacute;ros de la guerre&nbsp;&raquo;, Galtier-Boissi&egrave;re &eacute;crit&nbsp;: &laquo;&nbsp;Une horde d&rsquo;industriels de la pens&eacute;e et de l&rsquo;image se sont jet&eacute;s sur la grande catastrophe comme des mouches sur une charogne. &Agrave; de rares exceptions pr&egrave;s, ceux qui font la guerre ne sont pas ceux qui la racontent&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref1"></a><a href="#_ftn1"><sup><span style="color:black">[1]</span></sup></a>.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Cet exemple de d&eacute;nonciation de la litt&eacute;rature de guerre montre que les acteurs directs du conflit sont attentifs &agrave; la production litt&eacute;raire et au fait que peu de t&eacute;moins prennent la plume, laissant les auteurs de l&rsquo;arri&egrave;re parler d&rsquo;une guerre qu&rsquo;ils ne connaissent pas. Comme ils ne la connaissent pas, ils ne peuvent la raconter sous son vrai jour&hellip; Les propos de Galtier-Boissi&egrave;re mettent aussi en relief le fait que, pour s&rsquo;exercer, la litt&eacute;rature sur la guerre n&rsquo;a pas besoin d&rsquo;une mise &agrave; distance de l&rsquo;&eacute;v&eacute;nement, quand bien m&ecirc;me celui-ci est per&ccedil;u comme exceptionnel et historique. On voit ainsi s&rsquo;&eacute;panouir les commentaires dans des revues <span style="letter-spacing:-.2pt">litt&eacute;raires comme <i>la Revue bleue</i> qui rend compte en 1916 du r&eacute;cit de Maurice</span> Genevoix, <i>Sous</i> <i>Verdun,</i> ou dans les journaux de tranch&eacute;es. La pr&eacute;sence de rubriques litt&eacute;raires dans ces derniers n&rsquo;est pas exceptionnelle. Cette presse est souvent le fait de journalistes et des intellectuels mobilis&eacute;s. La tenue d&rsquo;un journal au front marque ainsi le retour &agrave; une forme de pratique culturelle ant&eacute;rieure &agrave; 1914, &agrave; une forme de normalit&eacute; comme si la guerre ne pouvait modifier en profondeur les usages li&eacute;s &agrave; l&rsquo;imprim&eacute;. N&eacute;anmoins, ce qui distingue les critiques de ces journaux de ceux de l&rsquo;arri&egrave;re est l&rsquo;int&eacute;gration de l&rsquo;exp&eacute;rience combattante dans la lecture des r&eacute;cits des t&eacute;moins. Ainsi, en octobre</span></span>&thinsp;<span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">1917, <i>Le Cingoli Gazette</i>, journal du 107<sup>e</sup> r&eacute;giment d&rsquo;artillerie lourde, loue <i>P&eacute;p&egrave;re la victoire</i> de Valmy-Ba&iuml;sse et <i>La Grande H&eacute;catombe</i> de Jamet, deux &laquo;&nbsp;saisissants ouvrages &eacute;crits par des soldats&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref2"></a><a href="#_ftn2"><sup><span style="color:black">[2]</span></sup></a>. Les journaux de tranch&eacute;e dressent souvent une critique &eacute;logieuse de cette litt&eacute;rature de t&eacute;moignage, qu&rsquo;ils opposent tout aussi r&eacute;guli&egrave;rement aux textes r&eacute;alis&eacute;s &agrave; l&rsquo;arri&egrave;re.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Au sein de la production &eacute;ditoriale de la Grande Guerre, ces r&eacute;cits de guerre forment un ensemble assez r&eacute;duit face &agrave; la litt&eacute;rature de circonstance, qui utilise la guerre comme trame pour la narration. Entre 1914 et 1918, si nous adoptons les crit&egrave;res de s&eacute;lection des ouvrages &eacute;tablis par Norton Cru pour <i>T&eacute;moins</i>, ce sont pr&egrave;s de 340 r&eacute;cits qui sont publi&eacute;s. Pour arriver &agrave; cette estimation, nous avons d&eacute;pouill&eacute; le fichier &laquo;&nbsp;psychologie du combattant&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref3"></a><a href="#_ftn3"><sup><span style="color:black">[3]</span></sup></a> du catalogue de la Premi&egrave;re Guerre mondiale de la BDIC, la bibliographie nationale, le catalogue collectif des biblioth&egrave;ques de France, le SUDOC et le catalogue de la biblioth&egrave;que municipale de Lyon qui conserve un fonds unique sur le sujet. S&#39;il ne domine pas l&rsquo;&eacute;dition du temps de guerre, ce genre litt&eacute;raire s&rsquo;impose tout de m&ecirc;me d&rsquo;embl&eacute;e dans le paysage culturel. La remise du prix Goncourt est, &agrave; cet &eacute;gard, un tr&egrave;s bon observatoire. En 1915, 1916, 1917 et 1918, tous les prix sont d&eacute;cern&eacute;s &agrave; des combattants, ce qui atteste de l&rsquo;aura du r&eacute;cit de guerre. Les t&eacute;moignages du front sont fr&eacute;quemment l&rsquo;objet de r&eacute;&eacute;ditions et de retirages, preuves de leurs succ&egrave;s, et il n&rsquo;y a pas que <i>Le Feu</i> d&#39;Henri&nbsp;Barbusse qui connaisse pendant les hostilit&eacute;s une forte popularit&eacute;. Les textes de Paul&nbsp;Lintier, <i>Ma pi&egrave;ce </i>et<i> Le Tube 1233, </i>cumulent 53<sup>&nbsp;</sup>&eacute;ditions en 1918. &Agrave; cent ans de distance, cet int&eacute;r&ecirc;t pour les t&eacute;moins ne se d&eacute;ment pas. Le succ&egrave;s rencontr&eacute; par l&rsquo;&eacute;dition des <i>Carnets</i> de Louis Barthas<a name="_ftnref4"></a><a href="#_ftn4"><sup><span style="color:black">[4]</span></sup></a> le montre. En parall&egrave;le, la pr&eacute;sence des r&eacute;cits de Genevoix, de Barbusse, de J&uuml;nger ou de Remarque dans sept manuels scolaires d&rsquo;histoire-g&eacute;ographie de troisi&egrave;me<a name="_ftnref5"></a><a href="#_ftn5"><sup><span style="color:black">[5]</span></sup></a> agit comme une forme de reconnaissance qui vient consacrer la parole du t&eacute;moin dans l&rsquo;apprentissage de l&rsquo;histoire.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.1pt">S&rsquo;ils occupent une place aussi centrale dans l&rsquo;&eacute;criture et la m&eacute;diatisation de l&rsquo;histoire de la guerre, c&rsquo;est en partie parce qu&rsquo;ils donnent &agrave; la guerre une figure et une &eacute;chelle &eacute;mi</span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">nemment humaines. C&rsquo;est pour cette raison en particulier qu&rsquo;ils retiennent l&rsquo;attention des critiques qui s&rsquo;int&eacute;ressent au t&eacute;moignage combattant. Le tournant des ann&eacute;es 1930 avec la publication de <i>T&eacute;moins</i> de Jean Norton Cru en 1929 et de <i>Paroles de combattants</i> en 1932 par Andr&eacute; Ducasse constitue une &eacute;tape cruciale dans la r&eacute;flexion sur la litt&eacute;rature de guerre. Nous sommes dix ans apr&egrave;s la fin des hostilit&eacute;s et c&rsquo;est &agrave; ce moment-l&agrave; que s&rsquo;op&egrave;re le premier retour m&eacute;moriel. L&rsquo;accent mis sur ce premier retour ne doit pas laisser penser &agrave; l&rsquo;existence d&rsquo;un d&eacute;sint&eacute;r&ecirc;t total pour la litt&eacute;rature de guerre entre 1918 et l&rsquo;&eacute;dition du travail de Jean Norton Cru. Il est vrai toutefois que c&rsquo;est surtout au tout d&eacute;but des ann&eacute;es 1920 puis tr&egrave;s peu ensuite que se concentrent les r&eacute;flexions sur la production litt&eacute;raire de 14-18. L&rsquo;entreprise de Jean Vic de r&eacute;pertorier la globalit&eacute; de la litt&eacute;rature de guerre s&rsquo;&eacute;tale ainsi de 1922 &agrave; 1924, celle &agrave; port&eacute;e plus apolog&eacute;tique de l&rsquo;association des &eacute;crivains combattants est r&eacute;alis&eacute;e entre 1922 et 1925. Il n&rsquo;y a plus de travaux d&rsquo;une telle ampleur durant les cinq ann&eacute;es qui suivent. Ces entreprises laissent la place &agrave; des analyses tr&egrave;s construites qui vont &ecirc;tre d&eacute;cisives dans la d&eacute;finition et l&rsquo;&eacute;laboration de la litt&eacute;rature de t&eacute;moignage. Dans ce contexte, deux r&eacute;flexions se singularisent particuli&egrave;rement, celle de Georges Duhamel et celle d&rsquo;Albert Schinz, car elles vont alimenter plusieurs travaux ult&eacute;rieurs majeurs, dont <i>T&eacute;moins</i>. Pourquoi retenir ces deux analyses toutes deux publi&eacute;es en 1920&nbsp;? Quel r&ocirc;le jouent-elles dans ce qui est depuis 1930 l&rsquo;entreprise majeure de la critique du r&eacute;cit de guerre, <i>T&eacute;moins&nbsp;</i>? Ce questionnement invite &agrave; distinguer trois moments dans l&rsquo;&eacute;laboration de la critique de la litt&eacute;rature testimoniale, celui d&rsquo;abord de la d&eacute;finition d&rsquo;un genre, puis de construction d&rsquo;une m&eacute;thode de lecture et, enfin, celui d&rsquo;une approche o&ugrave; se m&ecirc;lent science et exp&eacute;rience.</span></span></span></span></p> <h2><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><b><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="text-transform:uppercase">Au commencement, la d&eacute;finition d&rsquo;un genre&nbsp;: Georges Duhamel</span></span></span></b></span></span></h2> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Les nombreuses recensions dans les journaux de tranch&eacute;es et dans les revues litt&eacute;raires et culturelles de livres &eacute;crits par les combattants d&eacute;montrent qu&rsquo;entre 1914 et 1918 la critique s&rsquo;est int&eacute;ress&eacute;e de pr&egrave;s aux t&eacute;moignages. Mais si elle a montr&eacute; une attention particuli&egrave;re, elle n&rsquo;a, en revanche, pas cherch&eacute; &agrave; d&eacute;finir ce qu&rsquo;est la narration de la guerre et encore moins &agrave; la th&eacute;oriser. Le contexte de sortie de guerre va alors &ecirc;tre d&eacute;cisif parce que se pose d&eacute;sormais la question de la place des anciens combattants dans la soci&eacute;t&eacute; et de la transmission de leur exp&eacute;rience<a name="_ftnref6"></a><a href="#_ftn6"><sup><span style="color:black">[6]</span></sup></a>. La cr&eacute;ation de l&rsquo;association des &eacute;crivains combattants en 1919 constitue l&rsquo;exemple le plus paradigmatique, peut-&ecirc;tre, de ce retour<a name="_ftnref7"></a><a href="#_ftn7"><sup><span style="color:black">[7]</span></sup></a>. Pour nombre de soldats, il y a en effet urgence &agrave; affirmer leur pr&eacute;sence et leur m&eacute;moire dans une p&eacute;riode marqu&eacute;e par un processus de d&eacute;mobilisation culturelle. Si l&rsquo;on regarde l&rsquo;&eacute;volution de l&rsquo;&eacute;dition de r&eacute;cits de t&eacute;moins et leur place dans le paysage culturel &agrave; la sortie de la guerre, les craintes de certains combattants paraissent fond&eacute;es. En 1918, 92 r&eacute;cits sont ainsi publi&eacute;s. Ils sont plus nombreux l&rsquo;ann&eacute;e suivante, avec 105 &eacute;ditions nouvelles. Mais 1919 constitue un basculement&nbsp;: le prix Goncourt est attribu&eacute; &agrave; Marcel Proust et le candidat malheureux est une figure combattante, Roland Dorgel&egrave;s. En 1920, avec 66 t&eacute;moignages &eacute;dit&eacute;s, la p&eacute;riode de reflux du genre s&rsquo;amorce, signe d&rsquo;un d&eacute;sint&eacute;r&ecirc;t &eacute;ditorial et culturel croissant qui ne sera invers&eacute; qu&rsquo;apr&egrave;s 1930, et ce que pour une courte p&eacute;riode<a name="_ftnref8"></a><a href="#_ftn8"><sup><span style="color:black">[8]</span></sup></a>.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">C&rsquo;est dans cette situation d&rsquo;apr&egrave;s guerre que l&rsquo;ancien m&eacute;decin militaire Georges Duhamel, prix Goncourt en 1917 pour <i>Vie des Martyrs</i>, prononce en janvier 1920 une conf&eacute;rence &agrave; la Maison des amis des livres<a name="_ftnref9"></a><a href="#_ftn9"><sup><span style="color:black">[9]</span></sup></a>. Il consacre la premi&egrave;re partie de son intervention &agrave; la question de la r&eacute;g&eacute;n&eacute;ration de la litt&eacute;rature par la guerre. Donnant une r&eacute;ponse n&eacute;gative &agrave; cette interrogation,il s&rsquo;int&eacute;resse ensuite &agrave; l&rsquo;influence de la guerre dans la production litt&eacute;raire. Si l&rsquo;on observe le paysage &eacute;ditorial entre 1914 et 1918, force est de constater que le conflit a cr&eacute;&eacute;, pour beaucoup d&rsquo;&eacute;diteurs, un environnement probablement pesant mais aussi ind&eacute;passable pour des raisons id&eacute;ologiques &ndash; la litt&eacute;rature a &eacute;t&eacute; une forme d&rsquo;engagement dans la guerre &ndash; et &eacute;conomiques &eacute;videntes<a name="_ftnref10"></a><a href="#_ftn10"><sup><span style="color:black">[10]</span></sup></a>. Cette probl&eacute;matique pr&eacute;occupe peu Georges Duhamel, qui pr&eacute;f&egrave;re &eacute;tudier le rapport entre la litt&eacute;rature et la guerre sous un autre angle, celui de la transformation dans le processus d&rsquo;&eacute;criture. Pour l&rsquo;auteur, la guerre constitue un <span style="letter-spacing:.1pt">moment exceptionnel car &laquo;&nbsp;elle multiplie et aggrave toute exp&eacute;rience de la vie, de la souffrance, de la mort&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref11"></a><a href="#_ftn11"><sup><span style="color:black">[11]</span></sup></a>. Face &agrave; une telle dimension extraordinaire, &agrave; une telle exacerbation de la nature humaine, toute la question pour Georges Duhamel se centre autour de la capacit&eacute; ou non des r&eacute;cits n&eacute;s pendant la Grande Guerre &agrave; dire vrai. Ce sch&eacute;ma dual le conduit alors &agrave; distinguer la &laquo;&nbsp;litt&eacute;rature de convention&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref12"></a><a href="#_ftn12"><sup><span style="color:black">[12]</span></sup></a>, produite par des &eacute;crivains professionnels inspir&eacute;s par le contexte de la guerre, de la &laquo;&nbsp;litt&eacute;rature de t&eacute;moignage&nbsp;&raquo; r&eacute;alis&eacute;e par des soldats qui ont v&eacute;cu la guerre et qui ont su restituer &laquo;&nbsp;l&rsquo;expression exacte des hommes avec leurs sentiments, leurs passions (&hellip;), leur grande douleur&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref13"></a><a href="#_ftn13"><sup><span style="color:black">[13]</span></sup></a>. Georges Duhamel est le premier, &agrave; notre connaissance, &agrave; employer l&rsquo;expression de litt&eacute;rature de t&eacute;moignage et &agrave; lui donner cette d&eacute;finition qui fait du t&eacute;moin un peintre du r&eacute;el, cherchant &agrave; donner &agrave; lire la v&eacute;rit&eacute;, laquelle se trouverait mortellement contamin&eacute;e et pervertie si un discours id&eacute;ologique l&rsquo;accompagnait. On voit poindre ici la d&eacute;nonciation des r&eacute;cits marqu&eacute;s par une forte coloration patriotique ou pacifiste. Comme la critique qui est adress&eacute;e par certains anciens combattants comme Norton Cru ou encore &Eacute;douard C&oelig;urdevey<a name="_ftnref14"></a><a href="#_ftn14"><sup><span style="color:black">[14]</span></sup></a> au <i>Feu</i> d&rsquo;Henri Barbusse, cette litt&eacute;rature d&eacute;nature la r&eacute;alit&eacute; des impressions</span>.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Malgr&eacute; ses qualit&eacute;s, la litt&eacute;rature testimoniale ne r&eacute;sistera pas, pour l&rsquo;auteur de <i>Vie des Martyrs</i>, &agrave; l&rsquo;&eacute;preuve du temps. Seule la litt&eacute;rature de convention passera &agrave; la post&eacute;rit&eacute; car c&rsquo;est la plus &laquo;&nbsp;claire, ais&eacute;e&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref15"></a><a href="#_ftn15"><sup><span style="color:black">[15]</span></sup></a>, c&rsquo;est-&agrave;-dire la seule &agrave; expliquer la guerre et &agrave; lui donner sens. Et ce, malgr&eacute; le fait que cette litt&eacute;rature continue &agrave; colporter une fausse image de la guerre o&ugrave; l&rsquo;h&eacute;ro&iuml;sme, le sacrifice et la belle mort dominent. Face &agrave; ces textes qui mythifient l&rsquo;exp&eacute;rience v&eacute;cue au front par des millions d&rsquo;hommes, Duhamel est tr&egrave;s pessimiste sur la capacit&eacute; de faire conna&icirc;tre la v&eacute;rit&eacute; de la guerre, non seulement parce que les livres de t&eacute;moins ne parviennent pas toujours &agrave; faire comprendre ce qu&rsquo;a &eacute;t&eacute; le front, mais aussi parce que &laquo;&nbsp;la v&eacute;rit&eacute; sommeille &agrave; jamais dans les dix millions de cr&acirc;nes enfouis sous les champs de bataille&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref16"></a><a href="#_ftn16"><sup><span style="color:black">[16]</span></sup></a>. C&rsquo;est admettre que <span style="letter-spacing:-.1pt">l&rsquo;exp&eacute;rience combattante est en partie</span> indicible et que ceux &ndash;&nbsp;les combattants, seuls l&eacute;gitimes &agrave; le faire car ils ont vu et v&eacute;cu le front&nbsp;&ndash; qui tentent de la transmettre &agrave; travers l&rsquo;&eacute;criture n&rsquo;y parviennent que partiellement. La crainte de Duhamel d&rsquo;un effacement progressif de la litt&eacute;rature combattante se v&eacute;rifie dans les ann&eacute;es 1920. &Agrave; l&rsquo;exception de quelques succ&egrave;s, elle dispara&icirc;t pratiquement des librairies.</span></span></span></span></p> <h2><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><b><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="text-transform:uppercase">L&rsquo;esquisse d&rsquo;un bon t&eacute;moignage&nbsp;: Albert Schinz</span></span></span></b></span></span></h2> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Au m&ecirc;me moment o&ugrave; Georges Duhamel s&rsquo;interroge sur la litt&eacute;rature n&eacute;e de la guerre et la place du t&eacute;moignage combattant, un professeur de litt&eacute;rature d&rsquo;origine suisse &agrave; Smith College, situ&eacute; dans l&rsquo;&Eacute;tat du Massachussets, Albert Schinz, termine un travail sur la litt&eacute;rature de guerre fran&ccedil;aise. Son &eacute;tude est probablement influenc&eacute;e par un de ses ma&icirc;tres lorsqu&rsquo;il &eacute;tudia &agrave; la Sorbonne, Bruneti&egrave;re. On retrouve dans <i>French Literature of the Great War<a name="_ftnref17"></a><a href="#_ftn17"><b><sup><span style="color:black">[17]</span></sup></b></a></i> l&rsquo;h&eacute;ritage de la critique litt&eacute;raire fran&ccedil;aise de la fin du XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle qui se traduit par une mise en ordre de la litt&eacute;rature de guerre en fonction du genre, par le fait de p&eacute;riodiser la production et de classer les &oelig;uvres. Publi&eacute; en 1920, son livre ne re&ccedil;oit aucun &eacute;cho en France dans les milieux acad&eacute;miques. Parmi les hypoth&egrave;ses que l&rsquo;on peut avancer pour expliquer le fait qu&rsquo;il soit pass&eacute; inaper&ccedil;u, on peut penser que tous les professeurs et les critiques litt&eacute;raires ne ma&icirc;trisent pas la langue anglaise, que le livre arrive trop t&ocirc;t &ndash; c&rsquo;est-&agrave;-dire avant la vague m&eacute;morielle des ann&eacute;es 1930 &ndash; ou trop tard (apr&egrave;s la guerre) pour trouver un lectorat. Le co&ucirc;t du livre peut aussi &ecirc;tre une explication, son prix en dollar constituant tr&egrave;s probablement un achat fort on&eacute;reux pour les biblioth&egrave;ques universitaires fran&ccedil;aises dot&eacute;es, au sortir de la Grande Guerre, de faibles budgets. Les diff&eacute;rentes hypoth&egrave;ses ne s&rsquo;excluent bien s&ucirc;r pas l&rsquo;une l&rsquo;autre. L<span style="letter-spacing:.15pt">&rsquo;ouvrage n&rsquo;&eacute;chappe n&eacute;anmoins pas &agrave; tout le monde et Norton Cru, qui enseigne &eacute;galement aux <span style="text-transform:uppercase">&eacute;</span>tats-Unis, &agrave; Williams College, le lit et entame en f&eacute;vrier</span></span></span>&thinsp;<span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.15pt">1924 une correspondance avec son auteur. &Agrave; la m&ecirc;me p&eacute;riode, Cru &eacute;crit &agrave; Maurice Genevoix pour lui expliciter son projet et contacte &eacute;galement James Shotwell, le responsable du d&eacute;partement des affaires &eacute;conomiques de la Dotation Carnegie. La prise de contact simultan&eacute;e avec un &eacute;diteur, un auteur cl&eacute; de Norton Cru et un professeur qui a</span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"> men&eacute; <span style="letter-spacing:.1pt">un travail comparable au sien laisse &agrave; penser que le projet de <i>T&eacute;moins</i> d&eacute;marre v&eacute;ritablement &agrave; cette &eacute;poque. Hypoth&egrave;se plus vraisemblable qu&rsquo;une naissance dans les tranch&eacute;es, comme </span><span style="letter-spacing:.15pt">le propose M</span>arie-Fran&ccedil;oise&nbsp;Attard-Maraninchi<a name="_ftnref18"></a><a href="#_ftn18"><sup><span style="color:black">[18]</span></sup></a>, parce que<span style="letter-spacing:.15pt">, en particulier, aucune source venant de Norton Cru ne fait allusion entre</span></span></span>&thinsp;<span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.15pt">1918 et</span></span></span>&thinsp;<span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.15pt">1924 &agrave; la pr&eacute;paration d&rsquo;une &eacute;tude sur le t&eacute;moignage.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><i><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">French Literature</span></span></i><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"> se structure en deux parties, la premi&egrave;re proposant une scansion de la litt&eacute;rature dans la Grande Guerre. Albert Schinz distingue trois p&eacute;riodes&nbsp;: la r&eacute;action &eacute;motionnelle, celle de l&rsquo;indignation face &agrave; l&rsquo;invasion et la barbarie allemande, correspond aux ann&eacute;es 1914-1915. &Agrave; ce premier temps succ&egrave;de une p&eacute;riode de documentation qui court sur les ann&eacute;es 1915-1916 et qui se caract&eacute;rise par un abandon du style &eacute;pique et lyrique au profit d&rsquo;un int&eacute;r&ecirc;t pour les combattants. Avec la prise de conscience d&rsquo;une guerre interminable s&rsquo;ouvre une troisi&egrave;me p&eacute;riode o&ugrave; domine dans la litt&eacute;rature la r&eacute;flexion philosophique et politique. La seconde partie de l&rsquo;ouvrage est une &eacute;tude par genre. L&rsquo;auteur analyse la po&eacute;sie, la fiction et le th&eacute;&acirc;tre du temps de guerre. M&ecirc;me s&rsquo;il proc&egrave;de &agrave; une s&eacute;lection des ouvrages en fonction de leur originalit&eacute; et de leur excellence et ne traite pas toute la production litt&eacute;raire, le fait d&rsquo;&eacute;tudier les diff&eacute;rents types de textes constitue une originalit&eacute; et reste m&ecirc;me encore aujourd&rsquo;hui in&eacute;dit. Le seul exemple comparable au travail de Schinz est l&rsquo;ouvrage de Jean Vic sur la litt&eacute;rature de guerre publi&eacute; en 1923<a name="_ftnref19"></a><a href="#_ftn19"><sup><span style="color:black">[19]</span></sup></a>. Il d&eacute;veloppe toutefois beaucoup moins d&rsquo;analyse et ne s&rsquo;attarde pas comme le fait Schinz sur les r&eacute;cits de guerre. Ce dernier en donne une d&eacute;finition tr&egrave;s pr&eacute;cise&nbsp;: il s&rsquo;agit d&rsquo;&oelig;uvres dont &laquo;&nbsp;les auteurs travaillent &agrave; partir de documents ou &agrave; partir de leur exp&eacute;rience personnelle pour nous montrer la signification la plus profonde de la guerre&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref20"></a><a href="#_ftn20"><sup><span style="color:black">[20]</span></sup></a>.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Le professeur de Smith College d&eacute;veloppe un propos original sur cette litt&eacute;rature et son rapport &agrave; la v&eacute;rit&eacute; qui prend, par certains aspects, le contre-pied de Georges Duhamel. La plupart des r&eacute;cits des t&eacute;moins n&rsquo;ont en effet pas vocation pour Schinz &agrave; donner &agrave; lire la r&eacute;alit&eacute; de la guerre, mais arrangent &laquo;&nbsp;les faits pour les rendre plus exacts peut-&ecirc;tre que la r&eacute;alit&eacute;, mais plus coh&eacute;rents dans l&rsquo;ordre interne des choses et dans l&rsquo;optique de donner plus de conviction&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref21"></a><a href="#_ftn21"><sup><span style="color:black">[21]</span></sup></a>. Aucun &eacute;v&eacute;nement rapport&eacute; par les t&eacute;moins ne permet d&rsquo;affirmer qu&rsquo;il est vrai. Pour appuyer cet argument, Albert Schinz prend l&rsquo;exemple de la source qui est consid&eacute;r&eacute;e la plus fiable car &eacute;crite au plus pr&egrave;s de l&rsquo;&eacute;v&eacute;nement v&eacute;cu, le journal personnel. Il d&eacute;veloppe l&rsquo;id&eacute;e que la mise par &eacute;crit des souvenirs et des impressions imm&eacute;diates s&rsquo;inscrit dans un processus de s&eacute;lection. Le diariste ne consigne donc pas tout et le fait d&rsquo;adopter un point de vue personnel conduit &agrave; porter un regard subjectif sur les &eacute;v&eacute;nements. Dans ce contexte, la qualit&eacute; d&rsquo;un r&eacute;cit r&eacute;side moins dans son exactitude et sa valeur documentaire que dans son esth&eacute;tique. Celle-ci, &eacute;crit Schinz, a &eacute;volu&eacute; au cours de la guerre et explique les succ&egrave;s successifs de textes tr&egrave;s diff&eacute;rents, depuis <i>Gaspard</i> de Ren&eacute; Benjamin, en 1915, en passant par <i>Le Feu</i> de Barbusse, en 1916, ou <i>Les Croix de bois</i> de Dorgel&egrave;s, en 1919. Cette &eacute;volution constitue une tr&egrave;s belle illustration des th&egrave;ses de Hans-Robert Jauss sur la construction des horizons d&rsquo;attente des lecteurs<a name="_ftnref22"></a><a href="#_ftn22"><sup><span style="color:black">[22]</span></sup></a> et de l&rsquo;id&eacute;e, en particulier, qu&rsquo;une &oelig;uvre est re&ccedil;ue et jug&eacute;e par rapport &agrave; l&rsquo;arri&egrave;re-plan de l&rsquo;exp&eacute;rience de la vie quotidienne du lecteur<a name="_ftnref23"></a><a href="#_ftn23"><sup><span style="color:black">[23]</span></sup></a>. Chacun des trois succ&egrave;s s&rsquo;inscrit en effet dans une temporalit&eacute; et une perception propres de la guerre, laquelle se reconfigure sans cesse entre</span></span>&thinsp;<span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">1915 et</span></span>&thinsp;<span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">1918.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Si l&rsquo;on peut donc reprocher aux <span style="letter-spacing:-.1pt">t&eacute;moignages leur faible valeur esth&eacute;tique, tous ont toutefois la volont&eacute; d&rsquo;enregistrer l&rsquo;exp&eacute;rience de la </span>guerre. Pour Albert Schinz, ils n&rsquo;apparaissent pas en 1914 mais s&rsquo;ins&egrave;rent dans une g&eacute;n&eacute;alogie qui d&eacute;bute avec <i>Servitude et Grandeur militaires</i> d&rsquo;Alfred de Vigny. L&rsquo;analyse de la gen&egrave;se du genre dans la dur&eacute;e et de ses &eacute;volutions &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur de la guerre emprunte aux enseignements de Bruneti&egrave;re et &agrave; sa m&eacute;thode critique. Elle lui permet de reconna&icirc;tre une grande valeur aux textes de Paul Lintier, lou&eacute; pour la fra&icirc;cheur de ses impressions, de Maurice Genevoix, d&rsquo;Eug&egrave;ne Lermercier, de Marcel Et&eacute;v&eacute; ou encore de Georges Duhamel, dont la grande qualit&eacute; est d&rsquo;avoir su montrer la souffrance morale des hommes. Son appr&eacute;ciation et son jugement des r&eacute;cits sont repris &agrave; la fin de l&rsquo;ouvrage dans une annexe intitul&eacute;e &laquo;&nbsp;Some best war&nbsp;&raquo;. Cette section compte 90&nbsp;livres destin&eacute;s &agrave; aider le lecteur &agrave; discerner les bons ouvrages des mauvais, &agrave; ne retirer de la litt&eacute;rature de guerre que ce qui m&eacute;rite d&rsquo;&ecirc;tre lu et, finalement, de passer &agrave; la post&eacute;rit&eacute;. Cette pratique du classement n&rsquo;appara&icirc;t pas seulement &agrave; la fin de l&rsquo;&eacute;tude, mais structure tout le contenu. Comme nous l&rsquo;avons indiqu&eacute; plus haut, Schinz distingue les genres (roman, journal, r&eacute;flexion, th&eacute;&acirc;tre, po&eacute;sie) et essaie de caract&eacute;riser la fonction des diff&eacute;rents t&eacute;moignages, depuis le r&eacute;cit politique comme <i>Le Feu</i> de Barbusse, en passant par les &oelig;uvres &agrave; vocation religieuse (<i>Histoire d&rsquo;un soldat</i> d&rsquo;Andr&eacute; Fribourg, par exemple) et sociales (<i>La flamme au poing</i> d&rsquo;Henri Malherbe). Les analyses de l&rsquo;auteur de <i>French Literature</i>, attach&eacute;es &agrave; la dimension esth&eacute;tique et documentaire du t&eacute;moignage, s&rsquo;adossent &agrave; une m&eacute;thodologie qui associe critique interne des &oelig;uvres et s&eacute;lection. Elles combinent ainsi plusieurs niveaux d&rsquo;approche et proposent un classement.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.2pt">Il se d&eacute;marque en cela de la neutralit&eacute; du travail d&rsquo;un Jean Vic, par exemple, par des prises de position tr&egrave;s marqu&eacute;es. <i>Le Feu</i> d&rsquo;Henri Barbusse </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">est ainsi un des r&eacute;cits les plus s&eacute;v&egrave;rement critiqu&eacute;, notamment pour son caract&egrave;re gratuitement morbide. Par parenth&egrave;se, c&rsquo;est la m&ecirc;me critique que fera Norton Cru. Il est d&rsquo;ailleurs frappant de constater, &agrave; la lumi&egrave;re de l&rsquo;examen de l&rsquo;ouvrage de Schinz, combien celui-ci pr&eacute;pare, au niveau m&eacute;thodologique, <i>T&eacute;moins</i>. Ce n&rsquo;est pas par hasard si Norton Cru se tourne d&egrave;s 1924 vers Schinz pour l&rsquo;informer de son projet et lui demander conseil. Il est, en effet, anim&eacute; de la m&ecirc;me intention de recherche d&rsquo;authenticit&eacute; des r&eacute;cits de guerre que le professeur de litt&eacute;rature de Smith College. Les pratiques m&eacute;thodologiques des deux &oelig;uvres &ndash; typologie des &oelig;uvres, classement &ndash; sont trop proches pour ne pas penser que Norton Cru s&rsquo;inspire de Schinz, au moins partiellement car tous deux sont aussi h&eacute;ritiers des m&eacute;thodes de la critique litt&eacute;raire fran&ccedil;aise de la fin du XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle. S&rsquo;il n&rsquo;est peut-&ecirc;tre pas d&eacute;cisif, l&rsquo;apport de <i>French Literature</i> dans la gen&egrave;se de <i>T&eacute;moins</i> m&eacute;ritait tr&egrave;s probablement plus qu&rsquo;une simple note de bas de page dans la pr&eacute;face<a name="_ftnref24"></a><a href="#_ftn24"><sup><span style="color:black">[24]</span></sup></a>. Les analogies tr&egrave;s fortes entre les travaux des deux professeurs ne doit pas pour autant masquer une diff&eacute;rence majeure entre eux. Un a &eacute;t&eacute; combattant pendant la guerre et lit donc les t&eacute;moignages avec un regard d&rsquo;acteur, Norton Cru. L&rsquo;autre, Albert Schinz, est suisse, trop &acirc;g&eacute; pour s&rsquo;engager. Cette diff&eacute;rence explique toute la singularit&eacute; de <i>T&eacute;moins</i>.</span></span></span></span></span></p> <h2><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><b><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="text-transform:uppercase">La lecture des r&eacute;cits de guerre au prisme de l&rsquo;exp&eacute;rience du t&eacute;moin&nbsp;: Jean Norton Cru</span></span></span></b></span></span></h2> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Le statut d&rsquo;ancien combattant de Norton Cru est d&rsquo;embl&eacute;e vu comme une qualit&eacute; par les personnes avec lesquelles il rentre en contact entre la fin de l&rsquo;ann&eacute;e 1923 et le d&eacute;but 1924. Albert Schinz, dans la r&eacute;ponse qu&rsquo;il donne au premier courrier de Norton Cru, estime que le fait d&rsquo;avoir &eacute;t&eacute; soldat dans les tranch&eacute;es et d&rsquo;&ecirc;tre professeur est un atout consid&eacute;rable<a name="_ftnref25"></a><a href="#_ftn25"><sup><span style="color:black">[25]</span></sup></a>. En effet, au jugement du t&eacute;moin se superpose l&rsquo;analyse du sp&eacute;cialiste de litt&eacute;rature. R&eacute;pondant &agrave; la demande de conseils m&eacute;thodologiques de Norton Cru, Schinz recommande ainsi de r&eacute;diger un article sur <i>Le Feu</i> et <i>Gaspard</i> &agrave; la fois pour &eacute;prouver la m&eacute;thode critique et pour montrer &agrave; l&rsquo;opinion publique am&eacute;ricaine, qui s&rsquo;est entich&eacute;e de ces deux &oelig;uvres, qu&rsquo;elles sont truff&eacute;es d&rsquo;erreurs et de mensonges. Au moment o&ugrave; le projet de Norton Cru d&eacute;marre, c&rsquo;est donc vers les lecteurs am&eacute;ricains que son entreprise est d&rsquo;abord tourn&eacute;e. Depuis 1918, comme le montre sa correspondance et ses archives, la guerre semble rester chez lui au centre de son existence. D&eacute;mobilis&eacute; en 1919, Norton Cru revient en France en 1921 pour effectuer notamment un p&egrave;lerinage &agrave; Verdun, lieu o&ugrave; il a combattu en juin</span></span>&thinsp;<span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">1916 et a manqu&eacute; d&rsquo;&ecirc;tre enseveli. Ce retour provoque en lui une tr&egrave;s forte r&eacute;miniscence de la guerre. Un an plus tard, il donne devant une assembl&eacute;e de professeurs et d&rsquo;habitants de Williamstown une conf&eacute;rence sur le courage et la peur dans la guerre<a name="_ftnref26"></a><a href="#_ftn26"><sup><span style="color:black">[26]</span></sup></a>. Son exp&eacute;rience du front sert de trame &agrave; son propos&nbsp;: il y &eacute;voque les sentiments et les impressions des combattants et d&eacute;livre ses analyses sur leur comportement, principalement &agrave; partir de son exp&eacute;rience. Aussi curieux que cela puisse para&icirc;tre de prime abord, son propos ne s&rsquo;appuie pas sur la litt&eacute;rature de guerre, Norton Cru encourageant seulement son auditoire &agrave; lire des livres de guerre fran&ccedil;ais et am&eacute;ricains pour approcher ce qu&rsquo;a &eacute;t&eacute; la r&eacute;alit&eacute; du champ de bataille.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Depuis la fin des hostilit&eacute;s, NortonCru n&rsquo;a jamais cess&eacute; de lire des t&eacute;moignages de soldats. Les dates d&rsquo;achat port&eacute;es en marge des notices du volume de Jean Vic conserv&eacute; dans sa biblioth&egrave;que indiquent qu&rsquo;il a au moins enrichi sa collection de 55&nbsp;titres entre</span></span>&thinsp;<span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">1922 et</span></span>&thinsp;<span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">1923. Il y a donc fort &agrave; penser, encore une fois, que son travail ne prenne v&eacute;ritablement la direction de ce qui sera <i>T&eacute;moins</i> que dans cette p&eacute;riode. Au regard du tr&egrave;s faible nombre d&rsquo;allusions aux r&eacute;cits de t&eacute;moins, il y a m&ecirc;me fort &agrave; penser que son projet ne se d&eacute;cide qu&rsquo;apr&egrave;s cette date. C&rsquo;est dans cette p&eacute;riode charni&egrave;re que s&rsquo;&eacute;labore son processus de lecture des r&eacute;cits caract&eacute;ris&eacute; par une tr&egrave;s forte intertextualit&eacute; et dimension comparative. Les notes que prend Cru au fil des pages et la synth&egrave;se qu&rsquo;il en fait au d&eacute;but de chaque volume montrent toute l&rsquo;importance des lectures ant&eacute;rieures sur la lecture pr&eacute;sente. Celle-ci ne se lit pas seule, isol&eacute;e, mais est syst&eacute;matiquement consid&eacute;r&eacute;e &agrave; l&rsquo;aune du corpus d&eacute;j&agrave; analys&eacute; et, en particulier, des &oelig;uvres appr&eacute;ci&eacute;es par Norton Cru. Cette approche des textes produit un effet cumulatif, comme si les lectures participaient &agrave; la constitution d&rsquo;une sorte de &laquo;&nbsp;m&eacute;ta-t&eacute;moignage&nbsp;&raquo;, construit sur la propre exp&eacute;rience de Cru et sur les bons r&eacute;cits. D&rsquo;ailleurs, les meilleurs livres sont lus parmi les premiers, ce qui ne manque pas d&rsquo;influencer le regard port&eacute; sur les &oelig;uvres suivantes. Sur les vingt-neuf auteurs de la classe&nbsp;I regroupant les meilleurs ouvrages, la moiti&eacute; est lue avant 1925. Le r&ocirc;le des bons t&eacute;moins est d&rsquo;autant plus fort que la correspondance entretenue r&eacute;guli&egrave;rement avec ces auteurs (Genevoix, Deauville, P&eacute;zard, Cazin) participe &agrave; valider sa m&eacute;thodologie et sa grille de lecture et conforte ses analyses et critiques<a name="_ftnref27"></a><a href="#_ftn27"><sup><span style="color:black">[27]</span></sup></a>.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.1pt">Le lien privil&eacute;gi&eacute; avec ces anciens combattants, fond&eacute; au d&eacute;part sur l&rsquo;appartenance &agrave; une sociabilit&eacute; commune et &agrave; une exp&eacute;rience partag&eacute;e, am&egrave;ne Norton Cru &agrave; questionner les modalit&eacute;s de cr&eacute;ation du r&eacute;cit de guerre en se demandant en particulier ce qui fait que certains se d&eacute;tachent par la justesse et la v&eacute;rit&eacute; de leur contenu. Dans ce cadre, il s&rsquo;int&eacute;resse &agrave; la mani&egrave;re dont ces t&eacute;moins ont mis par &eacute;crit leurs impressions et leurs souvenirs. Pour y parvenir, sa premi&egrave;re pr&eacute;occupation est de r&eacute;tablir l&rsquo;int&eacute;grit&eacute; des &oelig;uvres mutil&eacute;es par la censure. Il demande ainsi aux auteurs de lui communiquer les passages &eacute;chopp&eacute;s. Une fois le texte restitu&eacute;, Norton Cru peut </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">interroger le t&eacute;moin sur certains passages qu&rsquo;il n&rsquo;est pas parvenu &agrave; resituer dans le temps ou dans l&rsquo;espace, ou sur les identit&eacute;s, demandant ainsi &agrave; Maurice</span></span><br /> <span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.1pt">Genevoix si les initiales de noms utilis&eacute;s sont bien r&eacute;elles<a name="_ftnref28"></a><a href="#_ftn28"><sup><span style="color:black">[28]</span></sup></a>. La qu&ecirc;te d&rsquo;exactitude des t&eacute;moignages &ndash;&nbsp;rappelons que Cru acquiert des cartes d&rsquo;&eacute;tat-major pour v&eacute;rifier les lieux &eacute;voqu&eacute;s dans les livres de son corpus<a name="_ftnref29"></a><a href="#_ftn29"><sup><span style="color:black">[29]</span></sup></a>&nbsp;&ndash; le conduit en outre &agrave; envoyer des questionnaires biographiques &agrave; une cinquantaine d&rsquo;auteurs. Il se renseigne sur la profession de chacun, la carri&egrave;re militaire entre</span></span></span>&thinsp;<span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.1pt">1914 et</span></span></span>&thinsp;<span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.1pt">1918 (r&eacute;giments, lieux sur le front), les blessures et les distinctions militaires. Cette connaissance approfondie du t&eacute;moin emprunte &agrave; la critique historique et litt&eacute;raire en vogue &agrave; la fin du XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle. On retrouve dans cette critique externe, qui consiste &agrave; v&eacute;rifier l&rsquo;authenticit&eacute; des faits pr&eacute;sent&eacute;s par l&rsquo;auteur, l&rsquo;influence directe des m&eacute;thodes de Bruneti&egrave;re et de Langlois et Seignobos. Elle permet ainsi &agrave; Norton Cru de croiser les t&eacute;moignages et de s&rsquo;appuyer sur les r&eacute;cits des t&eacute;moins les plus fiables pour confirmer l&rsquo;authenticit&eacute; des autres auteurs, pass&eacute;s par les m&ecirc;mes lieux au m&ecirc;me moment. En d&rsquo;autres termes, un auteur sert de confirmation aux &eacute;crits d&rsquo;un second.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.05pt">Ce mode de lecture qui m&ecirc;le exp&eacute;rience personnelle de la guerre, critique externe et interne et appui sur le r&eacute;seau personnel de bons t&eacute;moins forge une m&eacute;thodologie tr&egrave;s originale&nbsp;; </span></span></span><span lang="FR-CH" style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.05pt">elle ne manque cependant&nbsp;pas de susciter des remarques, et ce m&ecirc;me avant la publication de <i>T&eacute;moins</i>. La Dotation Carnegie est la premi&egrave;re, en 1927, par la voix de son repr&eacute;sentant James Shotwell, &agrave; pointer la trop grande personnalisation des critiques &eacute;mises par Cru. Certaines, estime le directeur am&eacute;ricain, sont tr&egrave;s &acirc;pres &ndash;&nbsp;notamment celles &agrave; l&rsquo;&eacute;gard </span></span></span><span lang="FR-CH" style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.2pt">des grandes figures de la litt&eacute;rature </span></span></span><span lang="FR-CH" style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.3pt">combattantes&nbsp;&ndash; et, surtout, elles donnent</span></span></span><span lang="FR-CH" style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.05pt"> le sentiment qu&rsquo;un t&eacute;moin s&rsquo;&eacute;rige en juge des autres t&eacute;moins<a name="_ftnref30"></a><a href="#_ftn30"><sup><span style="color:black">[30]</span></sup></a></span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.05pt">. Le sentiment que le criterium d&eacute;cisif d&rsquo;appr&eacute;ciation des ouvrages de Norton Cru repose trop largement sur son exp&eacute;rience combattante est partag&eacute;<s>e</s> par Albert Schinz. Celui-ci formule ses critiques, tr&egrave;s vives, quelques semaines seulement apr&egrave;s la parution de <i>T&eacute;moins</i>. Le ton de sa critique est donn&eacute; d&rsquo;embl&eacute;e&nbsp;: &laquo;&nbsp;l&rsquo;inflexibilit&eacute; de jugement envers les autres en appelle une autre pareille &agrave; votre </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">&eacute;gard&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref31"></a><a href="#_ftn31"><sup><span style="color:black">[31]</span></sup></a>. Deux pages de remarques <span style="letter-spacing:.1pt">suivent cette entr&eacute;e en mati&egrave;re qui contestent la m&eacute;thodologie de Norton</span><span style="letter-spacing:.2pt"> Cru, trop centr&eacute;e sur la recherche </span><span style="letter-spacing:.05pt">d&rsquo;authenticit&eacute; et ignorant l&rsquo;esth&eacute;tique des &oelig;uvres, s&rsquo;en prennent au contenu de ses jugements et condamnent sans appel le prisme de lecture choisi <i>in fine</i>, celui de l&rsquo;exp&eacute;rience de Cru. La charge de Schinz annonce, sur le fond, les critiques qui vont &ecirc;tre adress&eacute;es &agrave; <i>T&eacute;moins</i> en France quelques mois plus tard<a name="_ftnref32"></a><a href="#_ftn32"><sup><span style="color:black">[32]</span></sup></a>.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica">Un regard rapide sur le t&eacute;moignage combattant, de la conf&eacute;rence de Georges Duhamel de 1920 &agrave; la publication de <i>T&eacute;moins</i> en 1929, conduirait &agrave; &eacute;crire que la r&eacute;flexion sur le genre des r&eacute;cits de guerre a peu &eacute;volu&eacute;. Ces deux auteurs, anciens combattants, partagent en effet l&rsquo;id&eacute;e que seuls ceux qui ont v&eacute;cu la guerre et l&rsquo;ont &eacute;prouv&eacute;e dans leur chair sont en mesure d&rsquo;en parler. Derri&egrave;re ce constat commun, ce ne sont toutefois pas les m&ecirc;mes intentions qui guident les deux hommes. Si la crainte de voir les r&eacute;cits de guerre dispara&icirc;tre au profit de la litt&eacute;rature de convention anime le propos de Duhamel, Norton Cru entend plut&ocirc;t remettre l&rsquo;exp&eacute;rience combattante au centre de l&rsquo;histoire de la Grande Guerre. Dix ans apr&egrave;s la conf&eacute;rence de Duhamel, la m&eacute;moire du conflit n&rsquo;occupe plus la m&ecirc;me place dans le paysage social et culturel. La soci&eacute;t&eacute; fran&ccedil;aise est en effet pass&eacute;e de la volont&eacute; de passer &agrave; autre chose &agrave; un rejeu m&eacute;moriel fort. Ce temps a permis au genre narratif qu&rsquo;est le t&eacute;moignage de guerre de se d&eacute;finir, de b&eacute;n&eacute;ficier des apports m&eacute;thodologiques de la critique litt&eacute;raire, ainsi que le montre l&rsquo;&eacute;tude d&rsquo;Albert Schinz, pour finalement, avec Cru, combiner la science litt&eacute;raire et historique et l&rsquo;exp&eacute;rience combattante. Cette double lecture, si elle donne lieu &agrave; une vive pol&eacute;mique au d&eacute;but des ann&eacute;es 1930, va quand m&ecirc;me s&rsquo;imposer dans la mani&egrave;re d&rsquo;&eacute;crire l&rsquo;histoire. De <i>Vie et Mort des Fran&ccedil;ais</i> d&rsquo;Andr&eacute; Ducasse publi&eacute; en 1959 &agrave; <i>Une histoire europ&eacute;enne des combattants</i> r&eacute;dig&eacute;e quarante ans plus tard par Fr&eacute;d&eacute;ric Rousseau<a name="_ftnref33"></a><a href="#_ftn33"><sup><span style="color:blue">[33]</span></sup></a>, c&rsquo;est bien la m&eacute;thodologie d&eacute;ploy&eacute;e par Norton Cru qui sert de grille de lecture et de compr&eacute;hension &agrave; l&rsquo;exp&eacute;rience combattante de la Grande Guerre. Est-ce, pour reprendre St&eacute;phane Audoin-Rouzeau et Annette Becker, les signes d&rsquo;une influence trop grande de <i>T&eacute;moins</i> dans l&rsquo;&eacute;criture de l&rsquo;histoire de la Premi&egrave;re Guerre<a name="_ftnref34"></a><a href="#_ftn34"><sup><span style="color:blue">[34]</span></sup></a> ou un passage incontournable pour comprendre le t&eacute;moignage de guerre&nbsp;?</span></span></span></p> <p>&nbsp;</p> <div> <hr align="left" size="1" width="33%" /></div> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn1"></a><a href="#_ftnref1"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[1]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Jean Galtier-Boissi&egrave;re, &laquo;&nbsp;Les h&eacute;ros de l&rsquo;arri&egrave;re&nbsp;&raquo;, <i>Le Crapouillot</i>, juin 1917.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn2"></a><a href="#_ftnref2"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[2]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <i>Cingoli Gazette</i>, n&deg;&nbsp;14, octobre 1917, p.&nbsp;3.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn3"></a><a href="#_ftnref3"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[3]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Benjamin Gilles, &laquo;&nbsp;L&rsquo;exp&eacute;rience de guerre dans ses interstices&nbsp;: Pierre Renouvin et le fichier Psychologie du combattant &agrave; la BDIC&nbsp;&raquo;, <i>Mat&eacute;riaux pour l&rsquo;histoire de notre temps</i>, vol. 4, n&deg;&nbsp;100, 2010, pp.&nbsp;14-20.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn4"></a><a href="#_ftnref4"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[4]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <span style="letter-spacing:-.15pt">Louis Barthas<i>, Les Carnets de guerre de Louis Barthas, tonnelier, 1914-1918</i>, Paris, &Eacute;d. Fran&ccedil;ois Masp&eacute;ro, 1978.</span></span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn5"></a><a href="#_ftnref5"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[5]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Nathan, Hachette,<i> Le livre scolaire,</i> Hatier, Belin, Bordas, Magnard.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn6"></a><a href="#_ftnref6"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[6]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Nous renvoyons ici aux travaux d&rsquo;Antoine Prost, <i>Les Anciens Combattants et la soci&eacute;t&eacute; fran&ccedil;aise, 1914-1939</i>, Paris, Presses de la Fondation nationale des sciences politiques, 3&nbsp;volumes, 1977.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn7"></a><a href="#_ftnref7"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[7]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Nicolas Beaupr&eacute;, <i>Les Ecrivains combattants fran&ccedil;ais et allemands de la Grande Guerre (1914-1918). Essai d&rsquo;histoire compar&eacute;e</i>. Th&egrave;se d&rsquo;histoire, Universit&eacute; de Paris X Nanterre, 2002, pp.&nbsp;604-619.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn8"></a><a href="#_ftnref8"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[8]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Voir Benjamin Gilles, &laquo;&nbsp;J&rsquo;ai tu&eacute; de Blaise Cendrars &agrave; la BDIC&nbsp;: quelques r&eacute;flexions sur le fonds des r&eacute;cits de 1914-1918 et sur le t&eacute;moignage combattant&nbsp;&raquo;, <i>Mat&eacute;riaux pour l&rsquo;histoire de notre temps</i>, 2011, n&deg;&nbsp;3, n&deg;&nbsp;103, pp.&nbsp;47-50.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn9"></a><a href="#_ftnref9"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[9]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Georges Duhamel, <i>Guerre et litt&eacute;rature&nbsp;: conf&eacute;rence faite le 13 janvier 1920 &agrave; la Maison des amis des livres</i>, Paris, A. Monnier, 1920.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn10"></a><a href="#_ftnref10"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[10]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Nous renvoyons &agrave; notre analyse dans <i>Lectures de poilus. Livres et journaux dans les tranch&eacute;es, 1914-1918</i>, Paris, Autrement, 2013, pp. 112-150.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn11"></a><a href="#_ftnref11"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[11]</span></span></span></sup></a> <span lang="EN-US" style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">Georges Duhamel, <i>op. cit</i>., p.&nbsp;17.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn12"></a><a href="#_ftnref12"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[12]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <i>Ibid</i>., p.&nbsp;40.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn13"></a><a href="#_ftnref13"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[13]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <i>Ibid</i>., p.&nbsp;29.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn14"></a><a href="#_ftnref14"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[14]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <span style="text-transform:uppercase">&eacute;</span>douard C&oelig;urdevey<i>, Carnets de guerre, 1914-1918. Un t&eacute;moin lucide</i>, Paris, Plon, 2008, p.&nbsp;870.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn15"></a><a href="#_ftnref15"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[15]</span></span></span></sup></a> <span lang="EN-US" style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">Georges Duhamel, <i>op. cit.</i>, p.&nbsp;41.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn16"></a><a href="#_ftnref16"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[16]</span></span></span></sup></a> <i><span lang="EN-US" style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">Ibid</span></span></i><span lang="EN-US" style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">., p.&nbsp;45.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn17"></a><a href="#_ftnref17"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[17]</span></span></span></sup></a> <span lang="EN-US" style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">Albert Schinz, <i>French Literature of the Great War</i>, New York, Appleton, 1920.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn18"></a><a href="#_ftnref18"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[18]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Jean Norton Cru, <i>Lettres du front et d&rsquo;Am&eacute;rique, 1914-1919</i>, Aix-en-Provence, Publications de l&rsquo;Universit&eacute; de Provence, 2007, Pr&eacute;face de Marie-Fran&ccedil;oise Attard-Maraninchi et de Roland Caty, p. 64.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn19"></a><a href="#_ftnref19"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[19]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Jean Vic, <i>La Litt&eacute;rature de guerre. Manuel m&eacute;thodique et critique des publications fran&ccedil;aises</i>, Paris, Les Presses fran&ccedil;aises, 1923.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn20"></a><a href="#_ftnref20"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[20]</span></span></span></sup></a> <span lang="DE" style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">Albert Schinz, <i>op. cit</i>, p.&nbsp;28. </span></span><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">Traduction de l&rsquo;auteur.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn21"></a><a href="#_ftnref21"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[21]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <i>Ibid</i>., p.&nbsp;28.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn22"></a><a href="#_ftnref22"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[22]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Hans-Robert Jauss, <i>Pour une esth&eacute;tique de la r&eacute;ception</i>, Paris, Gallimard, 1978.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn23"></a><a href="#_ftnref23"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[23]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <i>Ibid</i>., p.&nbsp;54.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn24"></a><a href="#_ftnref24"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[24]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Jean Norton Cru, <i>T&eacute;moins</i>, Nancy, Presses universitaires de Nancy, 2006 (1929 et 1993), pr&eacute;face et postface de Fr&eacute;d&eacute;ric Rousseau, p.&nbsp;77.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn25"></a><a href="#_ftnref25"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[25]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Archives municipales de Marseille, Fonds Vogel-Cru, 46 II 3, lettre du 9 f&eacute;vrier 1924.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn26"></a><a href="#_ftnref26"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[26]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Jean Norton Cru, <i>Courage and fear in the battle according to tradition and in the Great War</i> (f&eacute;vrier 1922), tapuscrit, Biblioth&egrave;que universitaire de Lettres d&rsquo;Aix-en-Provence, MS 75.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn27"></a><a href="#_ftnref27"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[27]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <span style="letter-spacing:.1pt">Pour les liens avec ces auteurs, nous renvoyons &agrave; Benjamin Gilles, &laquo;&nbsp;Interroger les t&eacute;moins&nbsp;: Norton Cru et la pr&eacute;paration de <i>T&eacute;moins</i>&nbsp;&raquo;, <i>Ecrire en guerre, archives publiques, usages publics</i> (actes du colloque tenu aux Archives nationales les 22 et 23 janvier 2015), Rennes, Presses universitaires de Rennes, &agrave; para&icirc;tre.</span></span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn28"></a><a href="#_ftnref28"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[28]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> AMM, 46 III 3, lettre de Maurice Genevoix du 30 mars 1927.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn29"></a><a href="#_ftnref29"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[29]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Jean Norton Cru, <i>T&eacute;moins. Essai d&rsquo;analyse et de critique des souvenirs de combattants &eacute;dit&eacute;s en fran&ccedil;ais de 1915 &agrave; 1928</i>, Paris, Les <span style="text-transform:uppercase">&eacute;</span>tincelles, 1929, p.4.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn30"></a><a href="#_ftnref30"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[30]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Archives de la Dotation Carnegie, James Shotwell Papers, Lettre de J. Shotwell du 21 d&eacute;cembre 1927.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn31"></a><a href="#_ftnref31"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[31]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> AMM, 46 II 3, Correspondance Albert Schinz, Lettre du 19 novembre 1929.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn32"></a><a href="#_ftnref32"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[32]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Fr&eacute;d&eacute;ric Rousseau, <i>T&eacute;moins, Le proc&egrave;s des t&eacute;moins de la Grande Guerre. L&rsquo;affaire Norton Cru</i>, Paris, Seuil, 2003, pp.&nbsp;137-177.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn33"></a><a href="#_ftnref33"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[33]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Fr&eacute;d&eacute;ric Rousseau, <i>La Guerre censur&eacute;e. Une histoire des combattants europ&eacute;ens</i>, Paris, Seuil, 2014 (1999 et 2003), postface in&eacute;dite &laquo;&nbsp;R&eacute;visions. La Guerre censur&eacute;e 1999-2014&nbsp;&raquo;.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn34"></a><a href="#_ftnref34"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[34]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> St&eacute;phane Audoin-Rouzeau, Annette Becker, <i>14-18. Retrouver la Guerre</i>, Paris, Gallimard, 2000, p.&nbsp;52.</span></span></span></span></p>