<p align="right" style="text-align:right; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.25pt">&laquo; En effet, aussit&ocirc;t accompli, le moment singulier, &eacute;ph&eacute;m&egrave;re, est interpr&eacute;t&eacute; en fonction d&rsquo;un parall&eacute;lisme artificiel ou d&rsquo;une analogie entre diff&eacute;rents &eacute;v&eacute;nements. Apr&egrave;s disparition de l&rsquo;empreinte de l&rsquo;imm&eacute;diatement visible, on reconstruit les causes &agrave; partir de cons&eacute;quences advenues. La lin&eacute;arit&eacute; de l&rsquo;ensemble est donn&eacute;e &agrave; voir comme une &eacute;vidence, sans plus tenir compte des rapports de force dont elle est issue. On valorise ce qui advient apr&egrave;s coup, au d&eacute;triment des possibles dont les traces se perdent dans le d&eacute;dale des rationalit&eacute;s dominantes. Les historiens, ensuite, se chargeront de classer ce moment de l&rsquo;histoire sur une &eacute;chelle du temps qu&rsquo;ils &eacute;difient selon des crit&egrave;res divers [&hellip;].</span></span></span></span><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.2pt">Ainsi, &agrave; l&rsquo;issue d&rsquo;une fabrique de l&rsquo;histoire par les contemporains, la singularit&eacute; du moment historique qui fa&ccedil;onne le moment de l&rsquo;histoire tombe tr&egrave;s vite dans l&rsquo;oubli. &Agrave; ne retenir qu&rsquo;une forme de rationalit&eacute;, le foisonnement des id&eacute;es et des pratiques conflictuelles, au centre de ce mouvement, perd son intelligibilit&eacute; et &eacute;chappe &agrave; l&rsquo;historien. [&hellip;] Mon projet a donc consist&eacute; &agrave; penser l&rsquo;historicit&eacute; des moments singuliers ayant marqu&eacute; de leur empreinte toute l&rsquo;histoire et fa&ccedil;onn&eacute; son mouvement. Imperceptibles dans la continuit&eacute; historique ainsi construite, ils se d&eacute;robent &agrave; la repr&eacute;sentation lin&eacute;aire, que celle-ci soit conceptuelle, factuelle ou id&eacute;ologique. Une permanence cependant demeure : l&rsquo;id&eacute;e que contient un mot dont le sens &eacute;volue constamment, ind&eacute;finiment&nbsp;[&hellip;]. La rencontre fulgurante du pass&eacute; oubli&eacute; avec l&rsquo;actualit&eacute; repens&eacute;e donne &agrave; comprendre, simultan&eacute;ment, la modernit&eacute; de l&rsquo;id&eacute;e. Au-del&agrave; de toute continuit&eacute; ; contre toute attente, le devenir de l&rsquo;&eacute;v&eacute;nement pass&eacute; devient alors passablement intelligible.&nbsp;&raquo;</span></span></span></span></span></span></p> <p align="right" style="text-align:right; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Mich&egrave;le Riot-Sarcey, <i>Le proc&egrave;s de la libert&eacute;. Une histoire souterraine</i></span></span></span><br /> <i><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">du XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle en France, </span></span></span></i><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Paris, La D&eacute;couverte, 2016, pp. 298-302</span></span></span></span></span></p> <p align="right" style="text-align:right; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">&laquo;&nbsp;La ma&icirc;trise du raisonnement contrefactuel et de ses rouages permet enfin d&rsquo;intervenir dans les d&eacute;bats publics o&ugrave; des devenirs historiques alternatifs sont fr&eacute;quemment mobilis&eacute;s en raison de leur efficacit&eacute; rh&eacute;torique ou de leur capacit&eacute; &agrave; porter des jugements moraux. Elle aide &agrave; d&eacute;jouer plus s&ucirc;rement les pi&egrave;ges d&rsquo;un jugement r&eacute;trospectif nourri des valeurs du pr&eacute;sent. Surtout, en d&eacute;gageant les <span style="letter-spacing:-.1pt">possibles non advenus du pass&eacute;, en nombre limit&eacute;, le chercheur d&eacute;fatalise l&rsquo;histoire. </span>Il se soustrait ainsi &agrave; l&rsquo;enfermement dans des trajectoires pr&eacute;sent&eacute;es comme irr&eacute;sistibles et enrichit la compr&eacute;hension des soci&eacute;t&eacute;s contemporaines en pointant les discontinuit&eacute;s dont elles sont le fruit. Par la mise &agrave; jour d&rsquo;autres issues du pass&eacute;, <span style="letter-spacing:-.1pt">l&rsquo;historien peut offrir des moyens d&rsquo;action dans le pr&eacute;sent. En ce sens, le contrefactuel</span> permet d&rsquo;ouvrir notre perception du pr&eacute;sent historique.&nbsp;&raquo;</span></span></span></span></span></p> <p align="right" style="text-align:right; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.1pt">Quentin Deluermoz et Pierre Singarav&eacute;lou, <i>Pour une histoire des possibles, </i></span></span></span></span><br /> <span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.1pt">Paris, Seuil, 2016, p. 348. </span></span></span></span></span></span></p> <p>&nbsp;</p> <p align="right" style="text-align:right; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.25pt">&laquo; Le colloque de Rennes avait pour ambition d&rsquo;&eacute;tudier les constructions m&eacute;morielles et les repr&eacute;sentations des comportements collectifs en pays occup&eacute; entre 1940 et 1945. Cet objectif visait principalement le &rdquo;cas fran&ccedil;ais&rdquo;, puisque s&rsquo;y sont impos&eacute;s, &agrave; divers niveaux, dans le domaine historique, dans les m&eacute;dias, dans l&rsquo;enseignement, des affirmations inlassablement r&eacute;p&eacute;t&eacute;es, trop facilement admises comme des &eacute;vidences et qui nous paraissaient donc devoir &ecirc;tre r&eacute;examin&eacute;es. Ambition mesur&eacute;e, en pleine conscience des obstacles : les comportements collectifs sont un objet difficile &agrave; cerner, a fortiori quand il s&rsquo;agit de ceux du pass&eacute;. Leurs repr&eacute;sentations sont floues, grossi&egrave;res, changeantes, fragiles, elles sont particuli&egrave;rement mall&eacute;ables et, donc, facilement sous influence. Autant de traits qui rendent leur transmission d&rsquo;autant plus malais&eacute;e que, pour une p&eacute;riode aussi controvers&eacute;e, la tentation est grande d&rsquo;abord de les juger, et ensuite de les d&eacute;crire &agrave; partir d&rsquo;une grille de lecture anachronique. D&egrave;s lors, pour essayer de d&eacute;passer les id&eacute;es re&ccedil;ues par une analyse critique respectueuse des exigences de l&rsquo;histoire, il faut revenir &agrave; la chronologie et &agrave; des sources solidement contextualis&eacute;es. [&hellip;]</span></span></span></span><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.25pt">On con&ccedil;oit que, sur des sujets aussi complexes et aussi id&eacute;ologiques que les comportements collectifs pendant la guerre, la transmission des savoirs en milieu scolaire ne soit pas simple. Elle se r&eacute;v&egrave;le parfois contradictoire [&hellip;]. Que la transmission des savoirs ne soit pas statique, mais qu&rsquo;elle soit ins&eacute;r&eacute;e dans son temps, n&rsquo;est en rien &eacute;tonnant et rel&egrave;ve de l&rsquo;&eacute;volution des questionnements et des savoirs. Ou plut&ocirc;t ne devrait qu&rsquo;en relever et non reproduire les croyances du moment.&nbsp;&raquo;</span></span></span></span></span></span></p> <p align="right" style="text-align:right; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.25pt">Jean-Marie Guillon, Pierre Laborie et Jacqueline Sainclivier, <i>Images<br /> des comportements collectifs sous l&rsquo;Occupation. M&eacute;moires, transmission, id&eacute;es re&ccedil;ues,</i> Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2016, pp. 243, 247.</span></span></span></span></span></span></p> <p>&nbsp;</p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">L<span style="letter-spacing:.1pt">&#39;enseignement de l&rsquo;histoire, ses contenus et sa forme se distinguent de l&rsquo;histoire acad&eacute;mique par un processus de d&eacute;construction, reconstruction et insertion dans un r&eacute;cit scolaire qui m&egrave;ne</span> <span style="letter-spacing:.1pt">&agrave;</span> <span style="letter-spacing:.1pt">transformer les savoirs scientifiques en des savoirs</span> <span style="letter-spacing:.1pt">&agrave;</span> <span style="letter-spacing:.1pt">enseigner. Ce postulat, qui constitue un fondement de la r&eacute;flexion sur l&rsquo;histoire scolaire, est g&eacute;n&eacute;ralement qualifi&eacute; de transposition didactique. Il d&eacute;crit une interaction dynamique, et non pas une relation surplombante, entre une discipline relevant des sciences sociales et sa scolarisation. Cette interaction &eacute;volue en fonction des transformations de l&rsquo;enseignement de l&rsquo;histoire depuis plus d&rsquo;un si&egrave;cle</span></span></span><span dir="RTL" lang="AR-YE" style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">. </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">C&rsquo;est donc &agrave; la fois en termes de diachronie et de synchronie que se pose la question du rapport entre l&rsquo;histoire et son enseignement, celle de savoir dans quelle mesure, dans quel d&eacute;lai et comment des r&eacute;f&eacute;rences scientifiques interviennent ou non dans la fabrication de ce que les &eacute;l&egrave;ves sont invit&eacute;s &agrave; apprendre. </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Combien de temps faut-il, et selon quelles modalit&eacute;s, pour qu&rsquo;une nouvelle connaissance scientifique devienne un objet d&rsquo;enseignement&nbsp;? La question est complexe car d&eacute;pendante de nombreux facteurs. Certes, il nous arrive &agrave; nous, historiennes et historiens, d&rsquo;esp&eacute;rer que la prise en compte des renouvellements historiographiques soit rapide, d&rsquo;autant que les contenus scolaires sont volontiers soumis &agrave; des r&eacute;sistances, &agrave; des conservatismes, qui les cantonnent &agrave; des visions st&eacute;r&eacute;otyp&eacute;es, y compris &agrave; des &laquo;&nbsp;st&eacute;r&eacute;otypes savants&nbsp;&raquo; forg&eacute;s il y a tr&egrave;s longtemps dans le monde acad&eacute;mique<a name="_ftnref1"></a><a href="#_ftn1"><sup><span style="color:black">[1]</span></sup></a>. Mais il faut aussi se m&eacute;fier de l&rsquo;entr&eacute;e tr&egrave;s/trop rapide dans les contenus scolaires de th&egrave;ses novatrices et tr&egrave;s en vogue, qui, alors qu&rsquo;elles sont d&eacute;battues de mani&egrave;re contradictoire parmi les chercheurs, en viennent &agrave; &ecirc;tre trop rapidement pr&eacute;sent&eacute;es comme des faits bien &eacute;tablis dans les classes<a name="_ftnref2"></a><a href="#_ftn2"><sup><span style="color:black">[2]</span></sup></a>.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">Les enseignants et les didacticiens d&rsquo;histoire s&rsquo;int&eacute;ressent aux travaux d&rsquo;histoire en se demandant lesquels, et dans quelle mesure, sont susceptibles d&rsquo;offrir les meilleures pistes pour renouveler et am&eacute;liorer les contenus scolaires d&rsquo;histoire, et surtout nourrir la conception de l&rsquo;histoire et de l&rsquo;enseignement qui les anime. De ce point de vue, et dans ce but, ils sont un peu amen&eacute;s &agrave; faire leur march&eacute; dans l&rsquo;actualit&eacute; &eacute;ditoriale de l&rsquo;historiographie.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.2pt">Cette ann&eacute;e 2016 a ainsi &eacute;t&eacute; notamment marqu&eacute;e, dans l&rsquo;espace francophone, par trois ouvrages dont de longues citations ouvrent cette chronique. Nous n&rsquo;en proposons pas ici une recension, mais nous les &eacute;voquons pour les quelques id&eacute;es-forces qui nous paraissent pouvoir inspirer avec profit l&rsquo;histoire scolaire et son renouvellement. Mich&egrave;le Riot-Sarcey, dans son <i>Proc&egrave;s de la libert&eacute;</i>, revisite ainsi le XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle politique et social en France dans ses expressions les plus profondes pour remettre en cause les continuit&eacute;s et les successions ult&eacute;rieurement liss&eacute;es qui caract&eacute;risent le regard dominant sur cette p&eacute;riode. Elle appelle d&egrave;s lors &agrave; retrouver des discontinuit&eacute;s qui mettent &agrave; jour des possibles non advenus et &agrave; singulariser les moments historiques. C&rsquo;est la m&ecirc;me perspective qui motive <i>L&rsquo;histoire des possibles</i> de Quentin Deluermoz et Pierre Singarav&eacute;lou en montrant l&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t d&rsquo;un recours &agrave; une histoire contrefactuelle, une histoire avec des &laquo; si &raquo; qui s&rsquo;interroge sur ce qui aurait pu arriver si des &eacute;v&eacute;nements ant&eacute;rieurs ne s&rsquo;&eacute;taient pas produits. Ce qui n&rsquo;est pas advenu, mais qui aurait pu l&rsquo;&ecirc;tre, nous permet ainsi, en fin de compte, de mieux saisir le caract&egrave;re singulier et non anodin de ce qui a eu lieu. Il y a un int&eacute;r&ecirc;t commun qui se d&eacute;gage de ces deux ouvrages, celui de nous inciter, de nous aider, &agrave; d&eacute;fataliser l&rsquo;histoire, &agrave; montrer aux &eacute;l&egrave;ves combien elle est le fruit de constructions humaines, de prises d&rsquo;initiative et d&rsquo;actions au sein des collectivit&eacute;s humaines et non un encha&icirc;nement ou ench&acirc;ssement de faits unis par une causalit&eacute; artificielle.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.3pt">Une autre question est au c&oelig;ur de la complexit&eacute; du pass&eacute;&nbsp;: celle de l&rsquo;opinion publique, qui nous contraint d&rsquo;int&eacute;grer des facteurs de diff&eacute;renciation g&eacute;ographiques, sociaux, genr&eacute;s ou chronologiques au sein des p&eacute;riodes examin&eacute;es. Le dernier des ouvrages cit&eacute;s en ouverture de cette chronique porte ainsi sur le th&egrave;me de l&rsquo;image des comportements collectifs sous l&rsquo;Occupation en France<a name="_ftnref3"></a><a href="#_ftn3"><sup><span style="color:black">[3]</span></sup></a>. Il est le seul des trois qui concerne une th&eacute;matique directement reli&eacute;e aux pr&eacute;occupations d&rsquo;<i>En Jeu. Histoire et m&eacute;moires vivantes</i>. Mais il sugg&egrave;re, comme les autres, des r&eacute;flexions g&eacute;n&eacute;rales sur les mani&egrave;res de construire l&rsquo;histoire et d&rsquo;en transmettre une connaissance qui donne acc&egrave;s &agrave; une intelligibilit&eacute; du pass&eacute;. </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Autour de ces repr&eacute;sentations des comportements collectifs, la probl&eacute;matique des m&eacute;moires et de leur histoire provoque, pour une p&eacute;riode du pass&eacute; qui demeure sensible, une contradiction entre les savoirs critiques et les id&eacute;es re&ccedil;ues. Elle s&rsquo;exprime notamment par la persistance d&rsquo;une vulgate &laquo;&nbsp;r&eacute;sistancialiste&nbsp;&raquo; dominante non seulement dans l&rsquo;espace public, malgr&eacute; le d&eacute;menti des travaux d&rsquo;historiens dont plusieurs ont contribu&eacute; &agrave; cet ouvrage sur les images des comportements collectifs, mais tout autant dans le contexte scolaire. Cette vulgate a notamment &eacute;t&eacute; d&eacute;crite avec pr&eacute;cision par Pierre Laborie, qui l&rsquo;associe &agrave; l&rsquo;affirmation de l&rsquo;id&eacute;e d&rsquo;une &laquo;&nbsp;repr&eacute;sentation rassurante des ann&eacute;es noires&nbsp;: minoration de l&rsquo;emprise de Vichy sur la soci&eacute;t&eacute; et vision complaisante de la r&eacute;sistance, assimil&eacute;e &agrave; la nation, alors qu&rsquo;elle [n&rsquo;aurait &eacute;t&eacute;] qu&rsquo;un ph&eacute;nom&egrave;ne tr&egrave;s minoritaire&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref4"></a><a href="#_ftn4"><sup><span style="color:black">[4]</span></sup></a>. Ce &agrave; quoi il ajoute que&nbsp;:</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span dir="RTL" lang="AR-YE" style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;"><span style="color:black">&laquo;&nbsp;</span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Sans chercher &agrave; nier les l&acirc;chet&eacute;s et les complicit&eacute;s du temps de l&rsquo;Occupation, on peut s&rsquo;interroger sur les raisons qui ont fait d&rsquo;une hypoth&egrave;se plausible, mais discutable, une vulgate inlassablement reprise comme une certitude et, antienne inusable, le miroir d&rsquo;une nation qui serait incapable d&rsquo;affronter lucidement son histoire&nbsp;? Faut-il &agrave; ce point charger de signification le seul d&eacute;sir suppos&eacute; de masquer la part d&rsquo;ombre du pass&eacute;&nbsp;?</span></span><span dir="RTL" lang="AR-YE" style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;"><span style="color:black">&nbsp;&raquo;</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Ici, la vulgate fait l&rsquo;&eacute;conomie de la complexit&eacute; des situations, mais surtout de celle des mani&egrave;res dont tous les protagonistes du pass&eacute;, dans un pr&eacute;sent, leur pr&eacute;sent, qui se situe dans notre pass&eacute;, ont &eacute;t&eacute; amen&eacute;s &agrave; effectuer des choix, parfois successivement contradictoires, parfois contradictoires dans le m&ecirc;me temps, dans un contexte d&rsquo;extr&ecirc;me tension et d&rsquo;extr&ecirc;me danger. Ces id&eacute;es re&ccedil;ues m&egrave;nent aussi et surtout &agrave; une minorisation du r&ocirc;le, &agrave; cette &eacute;poque, de la R&eacute;sistance, au double sens de la R&eacute;sistance-organisation et de la R&eacute;sistance-mouvement social tel que le d&eacute;crit Fran&ccedil;ois Marcot<a name="_ftnref5"></a><a href="#_ftn5"><sup><span style="color:black">[5]</span></sup></a>, et rel&egrave;vent de ce que Pierre Laborie a qualifi&eacute; de &laquo;&nbsp;doxa de la France glauque&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref6"></a><a href="#_ftn6"><sup><span style="color:black">[6]</span></sup></a>. </span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="letter-spacing:-.1pt">Retrouver les discontinuit&eacute;s du pass&eacute;, d&eacute;fataliser l&rsquo;histoire, d&eacute;passer les allants de soi en int&eacute;grant des questions non consensuelles</span></span><span dir="RTL" lang="AR-YE" style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;"><span style="letter-spacing:-.1pt">&nbsp;: </span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="letter-spacing:-.1pt">ce sont bien l&agrave;</span></span><span style="font-family:Helvetica"> <span style="letter-spacing:-.1pt">trois objectifs d</span></span><span dir="RTL" lang="AR-YE" style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;"><span style="letter-spacing:-.1pt">&rsquo;</span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="letter-spacing:-.1pt">une grande importance qui peuvent orienter les r&eacute;flexions d</span></span><span dir="RTL" lang="AR-YE" style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;"><span style="letter-spacing:-.1pt">&rsquo;</span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="letter-spacing:-.1pt">aujourd</span></span><span dir="RTL" lang="AR-YE" style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;"><span style="letter-spacing:-.1pt">&rsquo;</span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="letter-spacing:-.1pt">hui pour un renouvellement souhaitable de l</span></span><span dir="RTL" lang="AR-YE" style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;"><span style="letter-spacing:-.1pt">&rsquo;</span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="letter-spacing:-.1pt">enseignement et apprentissage de l</span></span><span dir="RTL" lang="AR-YE" style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;"><span style="letter-spacing:-.1pt">&rsquo;</span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="letter-spacing:-.1pt">histoire</span></span><span dir="RTL" lang="AR-YE" style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;"><span style="letter-spacing:-.1pt">.</span></span></span></span></p> <p>&nbsp;</p> <div> <hr align="left" size="1" width="33%" /></div> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn1"></a><a href="#_ftnref1"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[1]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> La notion de st&eacute;r&eacute;otypes savants a &eacute;t&eacute; propos&eacute;e par Antonio Brusa, par exemple &agrave; propos du Moyen &Acirc;ge (&laquo; Un recueil de st&eacute;r&eacute;otypes autour du Moyen &Acirc;ge &raquo;,<i> Le cartable de Clio,</i> Le Mont-sur-Lausanne, LEP, 2004, n&deg; 4, pp. 119-129, &agrave; propos notamment des repr&eacute;sentations de la soci&eacute;t&eacute; f&eacute;odale par des pyramides) ou de la Pr&eacute;histoire (&laquo; David et l&rsquo;Homme de N&eacute;andertal. Les st&eacute;r&eacute;otypes savants sur la Pr&eacute;histoire, <i>Le cartable de Clio,</i> Lausanne, Antipodes, n&deg; 10, 2010, pp. 103-112).</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn2"></a><a href="#_ftnref2"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[2]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <span style="letter-spacing:-.15pt">Par exemple, &agrave; propos de l&rsquo;histoire de la Grande Guerre, lorsque les concepts de &laquo; culture de guerre &raquo; ou de &laquo; brutalisation &raquo;, sont apparus tr&egrave;s vite dans les contenus scolaires alors qu&rsquo;ils &eacute;taient discutables et discut&eacute;s par les historiens. Voir notamment R&eacute;my Cazals, &laquo; 1914-1918 : oser penser, oser &eacute;crire&nbsp;&raquo;, Gen&egrave;ses, Paris, Belin, 1/2002 (no46), pp. 26-43 ;&nbsp; Fran&ccedil;ois Buton &amp; al., &laquo; 1914-1918 : retrouver la controverse &raquo;, <i>La Vie des id&eacute;es, </i>2008, http://www.laviedesidees.fr/1914-1918-retrouver-la-controverse.html, consult&eacute; le 30 d&eacute;cembre 2016.</span></span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn3"></a><a href="#_ftnref3"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[3]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> C&eacute;cile Vast, qui a contribu&eacute; &agrave; cet ouvrage, en a propos&eacute; une tr&egrave;s bonne synth&egrave;se in https://ecoleclio.hypotheses.org/652, consult&eacute; le 30 d&eacute;cembre 2016.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn4"></a><a href="#_ftnref4"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[4]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Pierre Laborie, <i>Les mots de 39-45, </i>Toulouse, Presses universitaires du Mirail, 2006, p. 103.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn5"></a><a href="#_ftnref5"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[5]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Fran&ccedil;ois Marcot, &laquo; Comment &eacute;crire l&rsquo;histoire de la R&eacute;sistance ? &raquo;, <i>Le D&eacute;bat, </i>Paris, Gallimard, n&deg; 177, 2013, pp. 173-185.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn6"></a><a href="#_ftnref6"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[6]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <i>Le chagrin et le venin, Occupations. R&eacute;sistance. Id&eacute;es re&ccedil;ues, </i>Paris, Bayard, 2011, p. 53 de la r&eacute;&eacute;dition Folio Histoire, 2014.</span></span></span></span></p>