<p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Le r&ocirc;le du langage et des manipulations s&eacute;mantiques dans la perp&eacute;tration des crimes de masse est l&rsquo;objet d&rsquo;une attention accrue depuis quelques ann&eacute;es. Si tout le monde a en t&ecirc;te l&rsquo;exemple de la <i>novlangue</i> pr&eacute;sente dans le roman <i>1984</i> de George Orwell<span style="letter-spacing:-.2pt"> (&laquo;&nbsp;La guerre c&rsquo;est la paix&nbsp;; la libert&eacute; c&rsquo;est l&rsquo;esclavage&nbsp;; l&rsquo;ignorance c&rsquo;est la force&nbsp;&raquo;),</span> il ne faut pas oublier que la r&eacute;p&eacute;tition persistante de ces formules ou de l&rsquo;usage de certains mots finit par agir sur les comportements collectifs. Un travail de d&eacute;construction et de mise en garde &agrave; ce propos a &eacute;t&eacute; initi&eacute; en amont des horreurs de la criminalit&eacute; du national-socialisme par Karl Kraus autour de la Premi&egrave;re Guerre mondiale et apr&egrave;s<a name="_ftnref1"></a><a href="#_ftn1"><sup><span style="color:black">[1]</span></sup></a>. Il a &eacute;t&eacute; men&eacute; aussi par Victor Klemperer au c&oelig;ur et tout au long de l&rsquo;exp&eacute;rience du nazisme<a name="_ftnref2"></a><a href="#_ftn2"><sup><span style="color:black">[2]</span></sup></a>. Bien plus tard, il a &eacute;galement &eacute;t&eacute; prolong&eacute; et approfondi dans des termes renouvel&eacute;s par Pierre Bourdieu<a name="_ftnref3"></a><a href="#_ftn3"><sup><span style="color:black">[3]</span></sup></a>.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">Ce dossier sur les probl&eacute;matiques des mots du mal entend par cons&eacute;quent interroger en particulier les mani&egrave;res de d&eacute;signer et de qualifier les maux les plus extr&ecirc;mes du XX<sup>e</sup></span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">&nbsp;<span style="letter-spacing:.1pt">si&egrave;cle, soit aussi bien le concept de &laquo;&nbsp;totalitarisme&nbsp;&raquo; et ses diff&eacute;rents usages plus ou moins &eacute;largis, </span>plus ou moins circonscrits, que les notions de &laquo;&nbsp;crimes contre l&rsquo;humanit&eacute;&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;g&eacute;nocides&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;holocauste&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;Shoah&nbsp;&raquo;, etc. Les usages et m&eacute;susages de ces termes se trouvent pris dans une tension constante entre une volont&eacute; de bien distinguer les situations dans leurs sp&eacute;cificit&eacute;s et leurs diff&eacute;rences et une qu&ecirc;te d&rsquo;&eacute;l&eacute;ments communs permettant d&rsquo;associer, voire d&rsquo;assimiler, certaines d&rsquo;entre elles. Ils sont donc concern&eacute;s par le double &eacute;cueil de la sacralisation et, au contraire, de la banalisation de toutes ces formes de criminalit&eacute;. Leur examen est au c&oelig;ur d&rsquo;un travail d&rsquo;histoire pratiquant <span style="letter-spacing:.2pt">une comparaison qui m&egrave;ne au double inventaire des diff&eacute;rences<a name="_ftnref4"></a><a href="#_ftn4"><sup><span style="color:black">[4]</span></sup></a> et des &eacute;l&eacute;ments </span>de continuit&eacute;</span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:red">.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.25pt">Les termes en question rel&egrave;vent pour certains de cat&eacute;gories morales emprunt&eacute;es aux religions et, pour d&rsquo;autres, d&rsquo;une intention de rationalit&eacute; scientifique. Toutefois, au-del&agrave; de cette premi&egrave;re apparence, ils trouvent leurs sources dans des confrontations sociales et politiques, ce qui rend cette cat&eacute;gorisation d&rsquo;autant plus probl&eacute;matique.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">Il convient ici de bien distinguer, mais de prendre aussi en consid&eacute;ration, la pr&eacute;sence de ces termes &agrave; la fois dans la litt&eacute;rature savante, dans les usages du pass&eacute; qui sont observables dans l&rsquo;espace public, mais aussi dans les ressources et les contenus de l&rsquo;histoire scolaire. La question se pose ainsi de savoir dans </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.1pt">quelle mesure ces termes font l&rsquo;objet d&rsquo;usages diff&eacute;rents dans chacun de</span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt"> ces contextes et si, par exemple, une notion utilis&eacute;e avec prudence et nuances dans une litt&eacute;rature savante insistant sur son caract&egrave;re probl&eacute;matique ne se transforme pas en une sorte de donn&eacute;e naturalis&eacute;e et r&eacute;ifi&eacute;e dans les pratiques scolaires. Les mots du curriculum scolaire sont en effet le fruit parfois de choix d&ucirc;ment soupes&eacute;s, parfois de coutumes insuffisamment interrog&eacute;es. Programmes ou manuels v&eacute;hiculent ainsi des mani&egrave;res de &laquo;&nbsp;dire le mal&nbsp;&raquo; qui leur sont propres et qui t&eacute;moignent d&rsquo;une patrimonialisation de certains concepts rendus parfois d&eacute;suets dans le champ acad&eacute;mique sans qu&rsquo;ils soient emp&ecirc;ch&eacute;s pour autant de persister dans le champ scolaire. Il para&icirc;t donc int&eacute;ressant d&rsquo;interroger les enjeux qui sont identifiables derri&egrave;re ces arbitrages et ces pratiques.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">Dans le champ des sciences sociales, nous pouvons prendre l&rsquo;exemple du concept de totalitarisme, qui est fond&eacute; sur une comparaison entre fascisme, nazisme et communisme stalinien, et qui peut passablement brouiller notre repr&eacute;sentation du pass&eacute; s&rsquo;il aboutit &agrave; une simple assimilation de ces trois exp&eacute;riences politiques. Il permet par contre une comparaison utile qui peut produire du sens si elle est &eacute;tablie de mani&egrave;re scientifique, en consid&eacute;rant &agrave; la fois les &eacute;l&eacute;ments qui sont communs et les distinctions qui sont n&eacute;cessaires. Malheureusement, l&rsquo;air du temps ne favorise gu&egrave;re cette posture critique, tout ce qui s&rsquo;oppose au lib&eacute;ralisme dominant tendant d&eacute;sormais &agrave; &ecirc;tre regroup&eacute; dans cette m&ecirc;me cat&eacute;gorie n&eacute;gative<a name="_ftnref5"></a><a href="#_ftn5"><sup><span style="color:black">[5]</span></sup></a>.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">La d&eacute;signation de la destruction des Juifs d&rsquo;Europe pose &eacute;galement des probl&egrave;mes complexes<a name="_ftnref6"></a><a href="#_ftn6"><sup><span style="color:black">[6]</span></sup></a>. Il s&rsquo;agit assur&eacute;ment d&rsquo;un g&eacute;nocide, mais ce n&rsquo;est pas le seul. La criminalit&eacute; nazie </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.2pt">n&rsquo;a pas non plus produit seulement un g&eacute;nocide des Juifs, puisqu&rsquo;elle a aussi perp&eacute;tr&eacute; un g&eacute;nocide des Tsiganes, </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">m&ecirc;me si l&rsquo;un et l&rsquo;autre rel&egrave;vent d&rsquo;espaces, de temporalit&eacute;s et d&rsquo;un nombre de victimes qui sont tr&egrave;s diff&eacute;rents. Le terme de Shoah s&rsquo;est impos&eacute; dans le monde francophone apr&egrave;s le film du m&ecirc;me nom, mais </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.1pt">sa pertinence dans l&rsquo;espace public et scolaire peut toutefois &ecirc;tre discut&eacute;e </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">puisqu&rsquo;il s&rsquo;agit d&rsquo;un terme &eacute;troitement reli&eacute; &agrave; la culture de la communaut&eacute; des victimes de ce crime de masse. Le mot &laquo;&nbsp;holocauste &raquo;,</span></span></span>&nbsp;<span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">totalement dominant dans le monde anglo-saxon, est</span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"> <span style="letter-spacing:.1pt">&eacute;galement utilis&eacute;</span> <span style="letter-spacing:.1pt">en fran&ccedil;ais. Or, c&rsquo;est un terme biblique dont l&rsquo;usage est encore plus probl&eacute;matique</span></span></span><span dir="RTL" new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">.</span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt"> Le grand livre homonyme de Raul Hilberg a consacr&eacute; le </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.2pt">terme de &laquo;&nbsp;destruction des Juifs d&rsquo;Europe&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref7"></a><a href="#_ftn7"><sup><span style="color:black">[7]</span></sup></a>, </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">q</span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.1pt">ui a l&rsquo;avantage de la clart&eacute; dans la d&eacute;signation des faits. Saul Friedl&auml;nder, pour sa part, a uti</span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">lis&eacute; le terme d&rsquo;extermination<a name="_ftnref8"></a><a href="#_ftn8"><sup><span style="color:black">[8]</span></sup></a>. Dans ces deux cas, ces formules rel&egrave;vent de la description et de l&rsquo;analyse des faits. Quant &agrave; l&rsquo;id&eacute;e de g&eacute;nocide, qui </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.1pt">a sa propre histoire avec Rafa&euml;l Lemkin<a name="_ftnref9"></a><a href="#_ftn9"><sup><span style="color:black">[9]</span></sup></a></span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt"> et qui rev&ecirc;t une dimension juridique qui la porte &agrave; &ecirc;tre normative, elle n&eacute;cessite tout un travail de comparaison </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.3pt">qui ne pose pas de probl&egrave;me pour les g&eacute;nocides les plus largement reconnus comme tels (le g&eacute;nocide des </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Arm&eacute;niens<span style="letter-spacing:.1pt"> d&rsquo;Anatolie, le g&eacute;nocide des Juifs et des Tsiganes, le g&eacute;nocide des Tutsis du Rwanda), mais qui en suscite dans </span><span style="letter-spacing:-.2pt">les autres cas (comme par exemple pour les Hereros et Namas de Namibie, </span><span style="letter-spacing:.1pt">le Cambodge des Khmers rouges, le massacre de Srebrenica, voire des crimes de masse plus anciens), en soulignant d&rsquo;embl&eacute;e que l&rsquo;&eacute;ventuel questionnement sur leur qualification comme g&eacute;nocide ne devrait en aucun cas consister &agrave; minimiser l&rsquo;ampleur et la gravit&eacute; de ces crimes de masse qui ne font aucun doute, comme va de soi la n&eacute;cessit&eacute; d&rsquo;une reconnaissance </span><span style="letter-spacing:-.1pt">pleine et enti&egrave;re de la souffrance subie</span><span style="letter-spacing:.1pt"> par leurs victimes.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Ces usages et m&eacute;susages des mots du mal ont donc &agrave; &ecirc;tre examin&eacute;s pour envisager les mani&egrave;res possibles de r&eacute;soudre les dilemmes qui peuvent appara&icirc;tre, notamment entre la n&eacute;cessit&eacute; de distinguer les faits traumatiques du pass&eacute; en fonction de leurs caract&eacute;ristiques les plus vari&eacute;es et celle de vraiment promouvoir une reconnaissance de la souffrance des victimes de tous les crimes de masse. Que faut-il faire quand des formes de concurrence des victimes opposent des groupes particuliers dans une lutte de reconnaissance de la gravit&eacute; des souffrances de chacun d&rsquo;entre eux</span></span><span dir="RTL" new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">&nbsp;? </span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Quand, comme &agrave; Srebrenica, des qualifications de justice r&egrave;glent d&rsquo;une mani&egrave;re tranch&eacute;e des nuances propres aux travaux historiens pour la d&eacute;signation de la nature de tel ou tel crime</span></span><span dir="RTL" new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">&nbsp;? </span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Que faire face &agrave; des surench&egrave;res consistant &agrave;</span></span><span dir="RTL" new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black"> &laquo;&nbsp;</span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">labelliser</span></span><span dir="RTL" new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">&nbsp;&raquo; </span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">le crime dont son propre groupe a &eacute;t&eacute; victime par le terme de g&eacute;nocide, ressenti comme le plus fort, comme le seul qui soit vraiment susceptible de faire reconna&icirc;tre les souffrances endur&eacute;es&nbsp;? Face aussi &agrave; d&rsquo;autres manipulations qui s&rsquo;inscrivent parfois dans des logiques n&eacute;gationnistes&nbsp;? Faut-il en fin de compte faire en sorte que le langage public s&rsquo;adapte aux crit&egrave;res scientifiques de l&rsquo;histoire&nbsp;? Ou accepter au contraire de s&rsquo;adapter aux usages s&eacute;mantiques dominants dans la soci&eacute;t&eacute;, quitte &agrave; en &eacute;tablir ult&eacute;rieurement la critique&nbsp;?</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Le pr&eacute;sent dossier n&rsquo;a pas de caract&egrave;re exhaustif et n&rsquo;aborde que quelques cas parmi ceux, bien plus nombreux, qui se posent au c&oelig;ur de cette probl&eacute;matique. Cette introduction entend toutefois poser les premiers jalons d&rsquo;une r&eacute;flexion autour de la qualification d&rsquo;un th&egrave;me majeur et central de la criminalit&eacute; de masse, et des crimes contre l&rsquo;humanit&eacute;, entre massacres et g&eacute;nocides.</span></span></span></span></p> <h2><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><b><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="text-transform:uppercase">Les apports et les incertitudes de la recherche</span></span></span></b></span></span></h2> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Alors que, dans son acception juridique, le concept de g&eacute;nocide devrait &ecirc;tre pr&eacute;cis&eacute;ment circonscrit &agrave; une d&eacute;finition lisible et applicable aux situations de violence extr&ecirc;me, force est de constater qu&rsquo;il donne lieu &agrave; des usages vari&eacute;s parmi les chercheurs de sciences sociales. Certes, il est normal en histoire que des interpr&eacute;tations diverses coexistent parmi les chercheurs. Mais dans ce cas, ces enjeux de qualification et ces usages s&eacute;mantiques sont largement d&eacute;termin&eacute;s par des n&eacute;cessit&eacute;s de reconnaissance brouillant les d&eacute;bats scientifiques qui produisent habituellement les savoirs.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.1pt">L&agrave; encore, nous ne pourrons pas proposer une vision d&rsquo;ensemble tant est vaste la litt&eacute;rature scientifique et testimoniale en la mati&egrave;re. Nous prendrons donc seulement quelques exemples r&eacute;cents de l&rsquo;espace francophone pour poser le probl&egrave;me et pr&eacute;senter les tendances g&eacute;n&eacute;rales qui sont observables.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Mais d&rsquo;abord, il nous faut souligner combien ces questions de la langue et des mots de l&rsquo;exp&eacute;rience traumatique se sont pos&eacute;es en premier lieu pour les rescap&eacute;s et les t&eacute;moins, &agrave; l&rsquo;image de ce qu&rsquo;en a &eacute;crit Charlotte Delbo dans ses r&eacute;flexions sur la m&eacute;moire&nbsp;:</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.1pt">&laquo; Parce que, lorsque je vous parle d&rsquo;Auschwitz, ce n&rsquo;est pas de la </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">m&eacute;moire profonde que viennent mes paroles. Les paroles viennent de la m&eacute;moire externe, si je puis dire, la m&eacute;moire intellectuelle, la m&eacute;moire de la pens&eacute;e. La m&eacute;moire profonde garde les sensations, les empreintes physiques. C&rsquo;est la m&eacute;moire des sens. Car ce ne sont pas les mots qui sont gonfl&eacute;s de charge &eacute;motionnelle. Sinon, quelqu&rsquo;un qui a &eacute;t&eacute; tortur&eacute; par la soif pendant des semaines ne pourrait plus jamais dire&nbsp;: &quot;J&rsquo;ai soif. Faisons une tasse de th&eacute;.&quot; Le mot aussi s&rsquo;est d&eacute;doubl&eacute;. Soif est redevenu un mot d&rsquo;usage courant. Par contre, si je r&ecirc;ve de la soif dont j&rsquo;ai souffert &agrave; Birkenau, je revois celle que j&rsquo;&eacute;tais, hagarde, perdant la raison, titubante&nbsp;; je ressens physiquement cette vraie soif et c&rsquo;est un cauchemar atroce. Mais, si vous voulez que je vous en parle&hellip;</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.1pt">C&rsquo;est pourquoi je dis aujourd&rsquo;hui que, tout en sachant tr&egrave;s bien que c&rsquo;est v&eacute;ridique, je ne sais plus si c&rsquo;est vrai.&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref10"></a><a href="#_ftn10"><sup><span style="color:black">[10]</span></sup></a></span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">S&rsquo;il est difficile de trouver les mots pour dire vraiment la souffrance, c&rsquo;est aussi parce que les m&eacute;susages de la langue sont directement partie prenante des crimes contre l&rsquo;humanit&eacute; et de la criminalit&eacute; de masse. Ainsi, pour R&eacute;gine Waintrater, &laquo;</span></span>&nbsp;<span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">un g&eacute;nocide se<i> </i>pr&eacute;pare d&rsquo;abord dans la langue &raquo;</span></span>&nbsp;<span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">:</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">&laquo;&nbsp;Entreprise massive de d&eacute;symbolisation de l&rsquo;humain, le g&eacute;nocide attaque les mots, les d&eacute;tourne, les d&eacute;nature. Mais cette entreprise ne cesse pas avec le massacre. Elle continue longtemps apr&egrave;s, pour les victimes et leurs descendants mais aussi pour les bourreaux tant qu&rsquo;ils n&rsquo;ont pas op&eacute;r&eacute; le retour au langage d&rsquo;avant, celui dont ils se sont empar&eacute;s pour commettre leur crime.&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref11"></a><a href="#_ftn11"><sup><span style="color:black">[11]</span></sup></a></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Nous allons toutefois nous centrer ici non pas sur des mots de victimes ou de bourreaux, mais sur ceux par lesquels la recherche s&rsquo;efforce de d&eacute;signer les faits les plus terribles du pass&eacute; de l&rsquo;humanit&eacute; pour en souligner l&rsquo;horreur comme pour en rendre possible une approche interpr&eacute;tative et critique. Pour cela, partons tout d&rsquo;abord du point de vue tr&egrave;s g&eacute;n&eacute;ral de l&rsquo;ouvrage du sociologue Abram de Swaan, dont le sous-titre &eacute;voque des &laquo;&nbsp;r&eacute;gimes g&eacute;nocidaires &raquo;<a name="_ftnref12"></a><a href="#_ftn12"><sup><span style="color:black">[12]</span></sup></a>. Il interroge d&rsquo;un point de vue aussi macrohistorique que possible les conditions de l&rsquo;&eacute;mergence de la fr&eacute;n&eacute;sie meurtri&egrave;re en mettant en &eacute;vidence la pr&eacute;paration qui est pr&eacute;alablement n&eacute;cessaire pour qu&rsquo;un crime de masse soit possible et en associant cette possibilit&eacute; &agrave; une n&eacute;cessaire asym&eacute;trie et &agrave; des c<span style="letter-spacing:-.1pt">onditions d&rsquo;organisation d&rsquo;une envergure suffisante. Il &eacute;voque &agrave;</span> <span style="letter-spacing:-.1pt">ce propos</span> <span style="letter-spacing:-.1pt">quatre modes d&rsquo;extermination de masse&nbsp;: celui qui est caract&eacute;ris&eacute; par la fr&eacute;n&eacute;sie de vainqueurs, celui qui l&rsquo;est par une domination par la terreur, celui du triomphe contre les vaincus et celui dit </span><span style="letter-spacing:.1pt">des m&eacute;ga-pogromes. Sa typologie englobe ainsi un grand nombre de </span><span style="letter-spacing:-.3pt">massacres ou de crimes de masse, en r&eacute;alit&eacute; l&rsquo;ensemble des exterminations</span> de masse du XX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle, dans le concept de r&eacute;gime g&eacute;nocidaire.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Partie prenante du courant des <i>Genocide Studies</i>, l&rsquo;auteur argentin Daniel Feierstein, lui aussi sociologue, va encore plus loin dans cette extension du champ d&rsquo;application de la notion de g&eacute;nocide. Dans un ouvrage qui associe le nazisme &agrave; l&rsquo;exp&eacute;rience argentine<a name="_ftnref13"></a><a href="#_ftn13"><sup><span style="color:black">[13]</span></sup></a>, il rompt la distinction, qui peut certes &ecirc;tre discut&eacute;e, mais qui n&rsquo;est pas d&eacute;nu&eacute;e pour autant de toute pertinence, entre le fait d&rsquo;&ecirc;tre tu&eacute; pour ce que l&rsquo;on est et le fait de l&rsquo;&ecirc;tre pour ce que l&rsquo;on est accus&eacute; d&rsquo;avoir fait. Certes, le r&eacute;gime de terreur et les disparitions forc&eacute;es qui ont touch&eacute; des enfants enlev&eacute;s &agrave; leurs parents en Argentine montrent bien que les distinctions sont relativement poreuses, remarque qui vaut de m&ecirc;me pour la criminalit&eacute; franquiste, marqu&eacute;e elle aussi par des enl&egrave;vements d&rsquo;enfants. La r&eacute;cente traduction du grand livre de Paul Preston, <i>The Spanish Holocaust<a name="_ftnref14"></a><a href="#_ftn14"><b><sup><span style="color:black">[14]</span></sup></b></a></i>, montre bien &agrave; nouveau cette difficult&eacute; de vocabulaire, le terme d&rsquo;Holocauste n&rsquo;ayant pas &eacute;t&eacute; repris dans le titre de la version fran&ccedil;aise, o&ugrave; il est question de guerre d&rsquo;extermination.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.1pt">Dans son dernier ouvrage, <i>Un si&egrave;cle de g&eacute;nocides. Des Hereros au Darfour (1904-2004)<a name="_ftnref15"></a><a href="#_ftn15"><b><sup><span style="color:black">[15]</span></sup></b></a></i>, Bernard Bruneteau</span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"> ne va pas tout &agrave; fait aussi loin dans l&rsquo;extension de l&rsquo;usage du terme de g&eacute;nocide. Il pose d&rsquo;int&eacute;ressantes questions dans une solide introduction qui &eacute;voque notamment les conditions du consentement au massacre et d&eacute;bouche sur la question de l&rsquo;origine de cette posture g&eacute;nocidaire qui a caract&eacute;ris&eacute; le XX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle. La mention des Hereros et du Darfour dans son sous-titre illustre toutefois une extension qui pose encore une fois la question des sp&eacute;cificit&eacute;s et des diff&eacute;rences</span></span><span dir="RTL" new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">&nbsp;; </span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">et celle de la mesure dans laquelle cette posture englobante permet de construire une intelligibilit&eacute; de l&rsquo;histoire de ces situations d&rsquo;extermination dans une perspective comparatiste. On retrouve l&agrave; le probl&egrave;me pos&eacute; par un certain usage du concept de totalitarisme&nbsp;: la comparaison sans distinction, et sans prise en compte des diff&eacute;rences, ne nous aide pas forc&eacute;ment &agrave; comprendre les dynamiques propres aux <span style="letter-spacing:-.2pt">processus &eacute;tudi&eacute;s&nbsp;; m&ecirc;me si elle n&rsquo;en demeure pas moins utile pour examiner les ressemblances et les continuit&eacute;s </span>&eacute;ventuelles.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">Yves Ternon, pour sa part, &eacute;tudie depuis longtemps les g&eacute;nocides dans une perspective comparatiste en principe limit&eacute;e aux g&eacute;nocides des Arm&eacute;niens, des Juifs d&rsquo;Europe et des Tutsis du Rwanda. Il se fonde pour cela sur une d&eacute;finition qui tient certes compte des donn&eacute;es juridiques, mais qui demeure historienne&nbsp;:</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">&laquo;&nbsp;Un g&eacute;nocide est la destruction physique d&rsquo;une part substantielle d&rsquo;un <span style="letter-spacing:-.1pt">groupe humain dont les membres sont tu&eacute;s en raison de leur appartenance &agrave; ce groupe, destruction perp&eacute;tr&eacute;e selon</span> un plan concert&eacute;.&nbsp;&raquo;</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.2pt">Il ajoute plus loin que cinq crit&egrave;res encore permettent d&rsquo;identifier un g&eacute;nocide&nbsp;:</span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"> la destruction est physique&nbsp;; il s&rsquo;agit d&rsquo;un groupe humain&nbsp;; l&rsquo;&eacute;tendue de la destruction est significative&nbsp;; les victimes le sont &laquo;&nbsp;comme telles&nbsp;&raquo;, pour ce qu&rsquo;elles sont&nbsp;; enfin, il y a eu intention criminelle et plan concert&eacute;<a name="_ftnref16"></a><a href="#_ftn16"><sup><span style="color:black">[16]</span></sup></a>.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Dans le fond, parmi tout ce qui distingue les postures respectives du juge et de l&rsquo;historien, qui ont &eacute;t&eacute; fort bien mises en &eacute;vidence par Carlo Ginzburg &agrave; propos d&rsquo;un tout autre sujet<a name="_ftnref17"></a><a href="#_ftn17"><sup><span style="color:black">[17]</span></sup></a>, il y a, au-del&agrave; d&rsquo;une recherche commune de la v&eacute;rit&eacute;, cette libert&eacute; de la recherche en sciences sociales de ne pas devoir trancher et de ne pas devoir mesurer <span style="letter-spacing:-.1pt">sur une improbable &eacute;chelle le degr&eacute; de responsabilit&eacute; de chacun des acteurs. </span>Il y a surtout cette possibilit&eacute; de r&eacute;pondre aux questions pos&eacute;es par de nouvelles questions, ou d&rsquo;y r&eacute;pondre avec des pr&eacute;cautions d&rsquo;usage et des avertissements multiples.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">Cependant, cette situation apparemment confortable ne l&rsquo;est pas compl&egrave;tement sous l&rsquo;effet de toutes </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">sortes d&rsquo;usages politiques de l&rsquo;histoire et compte tenu du fait que les qualifications que nous avons &eacute;voqu&eacute;es, en particulier celle de g&eacute;nocide, <span style="letter-spacing:.1pt">sont intens&eacute;ment pr&eacute;sentes dans l&rsquo;espace public. Ainsi, quand des mots se r&eacute;pandent et s&rsquo;imposent, il est certes toujours possible de les interroger et de les d&eacute;construire, mais il n&rsquo;est pas possible de les &eacute;viter dans le langage courant. Aussi le recours &agrave; un concept comme celui de</span> <span style="letter-spacing:.1pt">g&eacute;nocide m&eacute;rite-t-il d&rsquo;&ecirc;tre mis &agrave; distance et suscite-t-il deux types d&rsquo;approche assur&eacute;ment contradictoires&nbsp;:</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">&ndash; d&rsquo;un c&ocirc;t&eacute;, pour aller dans le sens d&rsquo;une reconnaissance de toutes les victimes, se garder de faire trop de hi&eacute;rarchies (et surtout de hi&eacute;rarchies des souffrances) et en accepter par cons&eacute;quent un usage plut&ocirc;t &eacute;largi</span></span><span dir="RTL" new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">&nbsp;;</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.2pt">&ndash; de l&rsquo;autre, pour ne pas &eacute;craser le sens du travail d&rsquo;histoire et ne pas tout mettre sur un m&ecirc;me plan, restreindre cet usage aux quelques situations auxquelles il correspond pleinement afin de ne pas perdre de vue les sp&eacute;cificit&eacute;s des crimes de masse du pass&eacute;, en particulier du point de vue de leur nature et de celle de l&rsquo;action effective des bourreaux.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.3pt">Ces deux perspectives, qui sont aussi</span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"> deux &eacute;cueils chaque fois que l&rsquo;une s&rsquo;impose trop fortement &agrave; l&rsquo;autre</span></span><span dir="RTL" new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">,</span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"> correspondent au dilemme g&eacute;n&eacute;ral qui caract&eacute;rise toute comparaison en histoire, avec son double lot de ressemblances et de diff&eacute;rences, de continuit&eacute;s et de changements. Nous en tirons alors, provisoirement, deux cons&eacute;quences&nbsp;:</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">&ndash; tout d&rsquo;abord, de ne pas oublier la le&ccedil;on de Marc Bloch qui a d&eacute;fini l&rsquo;histoire, avec une grande efficacit&eacute;, comme &laquo;&nbsp;la science d&rsquo;un changement, une science des diff&eacute;rences&nbsp;&raquo;<a name="_ftnref18"></a><a href="#_ftn18"><sup><span style="color:black">[18]</span></sup></a>, ce qui incite &agrave; r&eacute;fl&eacute;chir &agrave; deux fois avant d&rsquo;associer trop vite deux ph&eacute;nom&egrave;nes du pass&eacute;, ou du pr&eacute;sent, dans une m&ecirc;me cat&eacute;gorie fig&eacute;e</span></span><span dir="RTL" new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">&nbsp;;</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">&ndash; mais aussi de tendre, dans la mesure du possible, &agrave; toujours expliciter les probl&egrave;mes pos&eacute;s par cette cat&eacute;</span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">gorisation, et les difficult&eacute;s qui lui in<span style="letter-spacing:.1pt">combent, en montrant qu&rsquo;ils ne sont peut-&ecirc;tre pas compl&egrave;tement r&eacute;solus et que les h&eacute;sitations qui persistent rendent compte de la complexit&eacute; des faits et contribuent aussi bien &agrave; la n&eacute;cessaire reconnaissance de ce qu&rsquo;ont subi les victimes qu&rsquo;&agrave;</span> <span style="letter-spacing:.1pt">la possibilit&eacute;</span> <span style="letter-spacing:.1pt">d&rsquo;une intelligibilit&eacute; du pass&eacute; et du pr&eacute;sent.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">En examinant tous ces probl&egrave;mes, il <span style="letter-spacing:-.3pt">est &eacute;videmment</span> <span style="letter-spacing:-.3pt">tentant de se demander</span> dans quelle mesure l&rsquo;usage du concept de g&eacute;nocide est vraiment pertinent pour la recherche en histoire. Mais il para&icirc;t pourtant difficile de s&rsquo;en passer compte tenu de son importance dans les usages et m&eacute;susages publics du pass&eacute;.</span></span></span></span></p> <h2><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><b><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="text-transform:uppercase">Les certitudes induites par et dans les pratiques scolaires</span></span></span></b></span></span></h2> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.15pt">Toutes ces questions, malheureusement, se posent d&rsquo;une mani&egrave;re encore accentu&eacute;e dans et pour le contexte scolaire. En effet, au sein de la classe, ce qui correspond &eacute;ventuellement &agrave; une hypoth&egrave;se de recherche, utile &agrave; la r&eacute;flexion pour les sciences </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">sociales, a de bonnes chances de se transformer au contraire, et rapidement, en une affirmation forte et difficilement<span style="letter-spacing:.15pt"> discutable.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.2pt">Ainsi en va-t-il par exemple du concept de g&eacute;nocide dans une documentation </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">p&eacute;dagogique publi&eacute;e il y a quelques ann&eacute;es par le M&eacute;morial de la Shoah&nbsp;:</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">&laquo; G&eacute;nocide&nbsp;: mot forg&eacute; en 1944 par Rapha&euml;l Lemkin, un juriste am&eacute;ricain d&rsquo;origine polonaise, &agrave; partir du grec <i>genos</i></span></span></span> <span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">(&quot;race&quot;) et du suffixe latin</span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"> <i><span style="letter-spacing:.1pt">cidere</span></i><span style="letter-spacing:.1pt"> (tuer). Ce terme d&eacute;finit la d&eacute;cision d&rsquo;un &Eacute;tat de d&eacute;truire de mani&egrave;re m&eacute;thodique et syst&eacute;matique un groupe-cible. L&rsquo;histoire du XX<sup>e</sup></span>&nbsp;<span style="letter-spacing:.1pt">si&egrave;cle retient le g&eacute;nocide des Hereros en Namibie (1904), des Arm&eacute;niens (1915), des Juifs (1942) et des Tutsis du Rwanda (1994). &raquo;</span></span></span><span dir="RTL" new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">&nbsp;<a name="_ftnref19"></a><a href="#_ftn19"><sup><span style="color:black">[19]</span></sup></a></span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.2pt">Bien s&ucirc;r, la forme scolaire et les imp&eacute;ratifs r&eacute;dactionnels d&rsquo;un mat&eacute;riau destin&eacute; aux enseignants ou aux &eacute;l&egrave;ves exigent de la clart&eacute; et sans doute une part de simplification. Mais ils n&rsquo;interdisent pas pour autant de la nuance et de la transparence sur les incertitudes du savoir historien. Ainsi, cette r&eacute;f&eacute;rence &agrave; quatre g&eacute;nocides ne manque certes pas de pertinence. Mais elle pose quand m&ecirc;me des probl&egrave;mes. Comme dans toute comparaison historienne, des &eacute;l&eacute;ments de diff&eacute;renciation pourraient en effet &ecirc;tre mis en &eacute;vidence, en relation par exemple avec les sp&eacute;cificit&eacute;s d&rsquo;un contexte colonial ou post-colonial, ou par rapport &agrave; l&rsquo;usage post&eacute;rieur d&rsquo;un concept n&eacute; &agrave; partir d&rsquo;une comparaison entre ce </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.1pt">qu&rsquo;ont subi les Arm&eacute;niens d&rsquo;Anatolie</span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.2pt"> et les Juifs d&rsquo;Europe, etc. Et bien s&ucirc;r, et surtout, les crimes de masse et contre l&rsquo;humanit&eacute; qui ne sont pas inclus dans cette liste de g&eacute;nocides m&egrave;nent &agrave; d&rsquo;autres questions encore, notamment sur la pertinence de ne pas les avoir consid&eacute;r&eacute;s et, de facto, sur les diff&eacute;rences et les sp&eacute;cificit&eacute;s qui pourraient le justifier. Nous n&rsquo;allons pas dresser ici une liste de tous les massacres qui pourraient &ecirc;tre &eacute;voqu&eacute;s &agrave; ce propos, mais rappeler simplement deux &eacute;l&eacute;ments parmi d&rsquo;autres</span></span></span><span dir="RTL" new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.2pt">&nbsp;: </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.2pt">tout d&rsquo;abord, la force et l&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t de l&rsquo;&oelig;uvre poignante d&rsquo;un </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">Rithy Panh sur son Cambodge natal qui interroge fortement un m&eacute;canisme de destruction de masse, un processus d&rsquo;&eacute;limination auquel il a lui-m&ecirc;me &eacute;chapp&eacute; et dont le caract&egrave;re g&eacute;nocidaire peut au moins &ecirc;tre interrog&eacute;<a name="_ftnref20"></a><a href="#_ftn20"><sup><span style="color:black">[20]</span></sup></a></span></span></span><span dir="RTL" new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">&nbsp;; </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">mais aussi la juridiction du Tribunal p&eacute;nal international pour l&rsquo;ex-Yougoslavie (TPIY) qui, d&egrave;s 2004, a qualifi&eacute; de &laquo;&nbsp;g&eacute;nocide&nbsp;&raquo; les crimes contre l&rsquo;humanit&eacute; commis &agrave; Srebrenica contre des milliers de musulmans, ce qui peut poser question, mais sans doute pas &ecirc;tre pass&eacute; sous silence<a name="_ftnref21"></a><a href="#_ftn21"><sup><span style="color:black">[21]</span></sup></a>.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.2pt">Il n&rsquo;est pas souhaitable que ce qui fait d&eacute;bat, ou controverse, dans les sciences sociales se retrouve compl&egrave;tement </span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.1pt">occult&eacute; dans les contenus scolaires, &eacute;cras&eacute; par un r&eacute;cit rendu apparemment</span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.2pt"> limpide par des silences. Mais il ne serait pas non plus acceptable de ne pas proposer des d&eacute;finitions, et des qualifications, en disant leur imperfection et en explicitant de quels choix elles d&eacute;coulent. En effet, il n&rsquo;y a pas lieu d&rsquo;ouvrir une bo&icirc;te de Pandore et d&rsquo;associer la version scolaire de la probl&eacute;matique des g&eacute;nocides &agrave; tous les discours possibles. Les m&ecirc;mes tensions et les m&ecirc;mes &eacute;cueils, entre sacralisation et b</span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">analisation, entre mise en exergue des sp&eacute;cificit&eacute;s et associations abusives d&rsquo;&eacute;v&eacute;nements du pass&eacute; &agrave; distinguer, s&rsquo;y retrouvent en effet et peuvent m&ecirc;me se trouver amplifi&eacute;s. Cependant, il ne s&rsquo;agit pas non plus que des usages de mots se laissent figer dans le contexte scolaire<a name="_ftnref22"></a><a href="#_ftn22"><sup><span style="color:black">[22]</span></sup></a>. Enfin, et surtout, de nombreuses th&eacute;matiques exigent de garantir le caract&egrave;re scientifique des contenus scolaires. <span style="letter-spacing:.1pt">Par exemple, l&rsquo;affirmation caricaturale et douteuse de la pr&eacute;tendue existence d&rsquo;un g&eacute;nocide vend&eacute;en a &eacute;t&eacute; tr&egrave;s clairement d&eacute;mentie par l&rsquo;historiographie<a name="_ftnref23"></a><a href="#_ftn23"><sup><span style="color:black">[23]</span></sup></a>. Aussi l&rsquo;institution scolaire devrait-elle demeurer pr&eacute;serv&eacute;e de cette l&eacute;gende qui rel&egrave;ve d&rsquo;une manipulation id&eacute;ologique.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">La r&eacute;flexion critique sur les usages et m&eacute;susages des mots du mal est manifestement porteuse d&rsquo;enjeux d&rsquo;intelligibilit&eacute; et de d&eacute;ontologie qui touchent particuli&egrave;rement les contenus <span style="letter-spacing:.1pt">scolaires et leurs effets sur la formation des nouvelles g&eacute;n&eacute;rations en termes de citoyennet&eacute; et de responsabilit&eacute; </span>sociale. C&rsquo;est une raison de plus pour y r&eacute;fl&eacute;chir.</span></span></span></span></p> <h2><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><b><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="text-transform:uppercase">Un premier dossier</span></span></span></b></span></span></h2> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:-.1pt">Le dossier que nous pr&eacute;sentons dans ce num&eacute;ro d&rsquo;<i>En Jeu. Histoire et m&eacute;moires vivantes </i>ne traite que quelques aspects partiels de la probl&eacute;matique des mots du mal et de leurs usages. Il constitue sans doute une premi&egrave;re &eacute;tape. Par exemple, il ne d&eacute;veloppe pas la question complexe de la qualification des crimes contre l&rsquo;humanit&eacute;, en particulier les g&eacute;nocides, telle qu&rsquo;elle est bri&egrave;vement esquiss&eacute;e ci-dessus. Il n&rsquo;examine pas non plus des termes qui &eacute;voquent tous le domaine des crimes de masse, et des crimes contre l&rsquo;humanit&eacute;, comme &laquo;&nbsp;massacre&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;an&eacute;antissement&nbsp;&raquo; ou &laquo;&nbsp;extermination&nbsp;&raquo;. Il propose toutefois un premier aper&ccedil;u de la question, une premi&egrave;re s&eacute;rie de ces mots, en reprenant certains des probl&egrave;mes &eacute;voqu&eacute;s pr&eacute;c&eacute;demment comme le totalitarisme, ou en abordant d&rsquo;autres termes qui posent &agrave; leur mani&egrave;re des probl&egrave;mes singuliers autour de ces mots du mal et de leurs usages.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">Dans la contribution qui ouvre ce dossier, Laurent Broche &eacute;voque les recours r&eacute;currents aux formules &laquo;&nbsp;nouveau Moyen</span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"> <span style="letter-spacing:.1pt">&Acirc;ge &raquo;</span></span></span>&nbsp;<span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">et</span></span></span> <span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">&laquo; retour au/du Moyen</span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">&nbsp;<span style="letter-spacing:.1pt">&Acirc;ge &raquo;</span></span></span>&nbsp;<span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">qui tendent g&eacute;n&eacute;ralement &agrave; d&eacute;pr&eacute;cier cette p&eacute;riode du pas</span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">s&eacute;, qui servent parfois &agrave; nier les droits de ceux qui en sont la cible dans le pr&eacute;sent et qui rel&egrave;vent de ces mythes historiques qui finissent par s&rsquo;imposer ind&eacute;pendamment des f<span style="letter-spacing:-.2pt">aits. L&rsquo;usage du terme &laquo;&nbsp;devoir de m&eacute;moire&nbsp;&raquo;, &eacute;tudi&eacute; par S&eacute;bastien Ledoux, </span>fonctionne quant &agrave; lui comme un rem&egrave;de et comme un poison. Il s&rsquo;est m&ecirc;me r&eacute;v&eacute;l&eacute;, petit &agrave; petit, comme un obstacle dans la relation complexe qui se joue entre un pass&eacute; traumatique et le pr&eacute;sent, avec des crimes de masse dont il s&rsquo;agit d&rsquo;emp&ecirc;cher le retour.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">S&rsquo;agissant des mots de la souffrance, Genevi&egrave;ve Dreyfus-Armand examine le cas des vaincus de la guerre civile espagnole et les conditions de leur exil en France, autour de la qualification des camps d&rsquo;internement fran&ccedil;ais qui, du c&ocirc;t&eacute; espagnol, sont toujours appel&eacute;s des camps de concentration, le terme officiel de l&rsquo;&eacute;poque, m&ecirc;me par ceux qui ont ensuite connu les camps nazis. Elle plaide pour que ces usages s&eacute;mantiques diff&eacute;rents d&rsquo;une culture &agrave; l&rsquo;autre soient inscrits dans l&rsquo;histoire des m&eacute;moires de l&rsquo;exil et bien expliqu&eacute;s par les historiens.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.1pt">Le concept d&rsquo;Hannah Arendt de</span></span></span><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"> &laquo;&nbsp;banalit&eacute; du mal&nbsp;&raquo; a &eacute;t&eacute; forg&eacute; au moment du proc&egrave;s d&rsquo;Adolf Eichmann. R&eacute;mi Baudou&iuml; montre toutefois que cette formule a &eacute;t&eacute; &agrave; la fois mal comprise dans l&rsquo;espace public et pas suffisamment approfondie par son auteure. Il constate qu&rsquo;&agrave; l&rsquo;instar de la notion de &laquo;&nbsp;totalitarisme&nbsp;&raquo;, fond&eacute;e pour sa part sur l&rsquo;id&eacute;e de radicalit&eacute; du mal, cette notion ne fait plus partie des id&eacute;es qui attirent le plus l&rsquo;attention dans l&rsquo;&oelig;uvre arendtienne. De son c&ocirc;t&eacute;, Carol-Ann Bellefeuille examine l&rsquo;usage r&eacute;cemment r&eacute;affirm&eacute; du concept de totalitarisme dans le contexte de la r&eacute;unification allemande. Elle montre qu&rsquo;il n&rsquo;a gu&egrave;re rendu possible une appr&eacute;hension compl&egrave;te de ce qu&rsquo;ont &eacute;t&eacute; la soci&eacute;t&eacute; est-allemande et son histoire.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black"><span style="letter-spacing:.2pt">Enfin, partant du paradoxe entre d&rsquo;une part la qu&ecirc;te d&rsquo;une compr&eacute;hension des m&eacute;canismes du mal des ann&eacute;es 1940 qui a caract&eacute;ris&eacute; Germaine Tillion et Genevi&egrave;ve De Gaulle, d&rsquo;autre part la mani&egrave;re dont elles ont &eacute;t&eacute; c&eacute;l&eacute;br&eacute;es par Fran&ccedil;ois Hollande au moment de leur entr&eacute;e au Panth&eacute;on, C&eacute;cile Vast s&rsquo;interroge sur les effets contre-productifs de la sid&eacute;ration et de la sacralisation des maux du pass&eacute;, en particulier de la Shoah.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Au-del&agrave; de ces contributions, au-del&agrave; de la question des g&eacute;nocides et <span style="letter-spacing:-.1pt">des crimes contre l&rsquo;humanit&eacute; qui m&eacute;riterait</span> bien des approfondissements, d&rsquo;autres questions encore, d&rsquo;autres mots du mal, ne sont pas trait&eacute;s dans ce dossier. Et pourraient l&rsquo;&ecirc;tre dans un prochain prolongement.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">C&rsquo;est le cas par exemple de la notion de &laquo;&nbsp;populisme&nbsp;&raquo;, qui se donne constamment &agrave; lire et &agrave; entendre dans le monde contemporain, mais qui d&eacute;signe des ph&eacute;nom&egrave;nes tellement diff&eacute;rents les uns des autres qu&rsquo;elle finit peut-&ecirc;tre par engendrer plus de confusions que d&rsquo;&eacute;claircissements<a name="_ftnref24"></a><a href="#_ftn24"><sup><span style="color:black">[24]</span></sup></a>.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Le &laquo;&nbsp;communautarisme&nbsp;&raquo; correspond aussi &agrave; un terme r&eacute;cemment forg&eacute; pour d&eacute;signer un &laquo;&nbsp;mal&nbsp;&raquo; d&rsquo;une autre nature, c&rsquo;est-&agrave;-dire discutable, voire chim&eacute;rique, utilis&eacute; en tout cas dans un sens bien pr&eacute;cis, et tout sauf neutre, dans l&rsquo;espace public fran&ccedil;ais<a name="_ftnref25"></a><a href="#_ftn25"><sup><span style="color:black">[25]</span></sup></a>.</span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify; text-indent:8.5pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:black">Enfin, dernier exemple, et sans doute pas le moins complexe, le concept de &laquo;&nbsp;fascisme&nbsp;&raquo; donne lieu depuis longtemps &agrave; des usages multiples postulant des associations entre des situations qui sont &agrave; la fois diverses et marqu&eacute;es par des &eacute;l&eacute;ments communs. L&rsquo;usage r&eacute;current de ce terme est sans doute sugg&eacute;r&eacute;, et &agrave; juste titre, par la fameuse formule de Bertolt Brecht comme quoi &laquo;&nbsp;Le ventre est encore f&eacute;cond, d&#39;o&ugrave; a surgi la b&ecirc;te immonde. &raquo;<a name="_ftnref26"></a><a href="#_ftn26"><sup><span style="color:black">[26]</span></sup></a>&nbsp;Il exprime en quelque sorte le sentiment de la menace constante d&rsquo;un retour possible de la barbarie. Dans l&rsquo;actualit&eacute; fran&ccedil;aise la plus r&eacute;cente, c&rsquo;est pr&eacute;cis&eacute;ment le propos d&rsquo;un auteur, G&eacute;rard Mordillat, <span style="letter-spacing:-.2pt">qui vient de r&eacute;&eacute;diter un texte de Benito</span> Mussolini d&eacute;finissant le fascisme en 1933 et de le commenter dans un livre portant comme sous-titre &laquo;&nbsp;Le retour du fascisme dans la France contemporaine &raquo;<a name="_ftnref27"></a><a href="#_ftn27"><sup><span style="color:black">[27]</span></sup></a>&nbsp;. La question se pose en effet, m&ecirc;me si elle n&rsquo;appelle pas pour autant des r&eacute;ponses simples et d&eacute;finitives, de la nature des menaces qui p&egrave;sent aujourd&rsquo;hui sur les droits de tous et de chacun. Mais sans nous dispenser non plus de cette qu&ecirc;te du changement et des diff&eacute;rences qui caract&eacute;rise le travail d&rsquo;histoire.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><span style="font-family:Helvetica">Entre les crimes de masse du pass&eacute; et les atteintes aux droits humains du pr&eacute;sent, entre les &eacute;tats d&rsquo;exception et les manifestations contemporaines de l&rsquo;autoritarisme, entre la mont&eacute;e et la banalisation de l&rsquo;extr&ecirc;me droite, se profilent en tout cas une interrogation et une pr&eacute;occupation centrales pour <i>En Jeu. Histoire et m&eacute;moires vivantes</i>.</span></span></span></p> <p>&nbsp;</p> <div> <hr align="left" size="1" width="33%" /></div> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn1"></a><a href="#_ftnref1"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[1]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Voir &agrave; ce propos Jacques Bouveresse, <i>Satire et proph&eacute;tie&nbsp;: les voix de Karl Kraus</i>, Marseille, Agone, 2007.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn2"></a><a href="#_ftnref2"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[2]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <i>LTI, la langue du III<sup>e</sup> Reich</i>, Paris, Pocket, 2003 (1947).</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn3"></a><a href="#_ftnref3"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[3]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <i>Langage et pouvoir symbolique</i>, Paris, Points-Seuil, 2001.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn4"></a><a href="#_ftnref4"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[4]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Selon l&rsquo;heureuse expression de Paul Veyne, <i>L&rsquo;inventaire des diff&eacute;rences</i>, Paris, Seuil, 1976 (le&ccedil;on inaugurale au Coll&egrave;ge de France).</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn5"></a><a href="#_ftnref5"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[5]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Voir &agrave; ce propos Enzo Traverso (dir.), Le totalitarisme. Le XX<sup>e</sup> si&egrave;cle en d&eacute;bat, Paris, Seuil, 2001&nbsp;; St&eacute;fanie Prezioso &amp; al. (dir.), <i>Le totalitarisme en question</i>, Paris, L&rsquo;Harmattan, 2008.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn6"></a><a href="#_ftnref6"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[6]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Ce qui est discut&eacute; dans Monique Eckmann et Charles Heimberg, <i>M&eacute;moire et p&eacute;dagogie. Autour de la transmission de la destruction des Juifs d&rsquo;Europe</i>, pp. 25-27, o&ugrave; il est notamment expliqu&eacute; pourquoi le terme &laquo;&nbsp;Holocauste&nbsp;&raquo; n&rsquo;est pas utilis&eacute;.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn7"></a><a href="#_ftnref7"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[7]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Publi&eacute; en trois volumes&nbsp;: Paris, Gallimard-FolioHistoire, 2006 (1961).</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn8"></a><a href="#_ftnref8"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[8]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Saul Friedl&auml;nder, <i>Les ann&eacute;es d&rsquo;extermination. L&rsquo;Allemagne nazie et les Juifs. 1939-1945</i>, Paris, Seuil, 2008 (2007). Voir aussi Ivan Jablonka, &laquo;&nbsp;Langue des bourreaux, langue des victimes. Rencontre avec Saul Friedl&auml;nder et Pierre-Emmanuel Dauzat</span></span><span dir="RTL" lang="AR-YE" style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">&nbsp;&raquo;, </span></span><i><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">La vie des id&eacute;es</span></span></i><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">, 2008&nbsp;http://www.laviedesidees.fr/Langue-des-bourreaux-langue-des.html (consult&eacute; le 30&nbsp;d&eacute;cembre 2016).</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn9"></a><a href="#_ftnref9"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[9]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Rafa&euml;l Lemkin, <i>Qu&rsquo;est-ce qu&rsquo;un g&eacute;nocide&nbsp;?</i>, Paris, &Eacute;ditions du Rocher, 2008 (1944).</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn10"></a><a href="#_ftnref10"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[10]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Charlotte Delbo<i>, La m&eacute;moire et les jours</i>, Paris, Berg International, 1985, r&eacute;&eacute;d. 2013, pp. 11-14.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn11"></a><a href="#_ftnref11"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[11]</span></span></span></sup></a> <span dir="RTL" lang="AR-YE" style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">&laquo;&nbsp;</span></span><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">Sur les ruines de la langue</span></span><span dir="RTL" lang="AR-YE" style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">&nbsp;&raquo;, </span></span><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">in David Collin et R&eacute;gine Waintrater (dir</span></span><span dir="RTL" lang="AR-YE" style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">.), </span></span><i><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">Les mots du g&eacute;nocide</span></span></i><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">, Gen&egrave;ve, M&eacute;tisPresses, 2011, p.&nbsp;153.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn12"></a><a href="#_ftnref12"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[12]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <i>Diviser pour tuer. Les r&eacute;gimes g&eacute;nocidaires et leurs hommes de main</i>, Paris, Seuil, 2016 (2014).</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn13"></a><a href="#_ftnref13"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[13]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <i>Le g&eacute;nocide comme pratique sociale. Du nazisme &agrave; l&rsquo;exp&eacute;rience argentine</i>, Gen&egrave;ve, M&eacute;tisPresses, 2013 (2011).</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn14"></a><a href="#_ftnref14"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[14]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Paul Preston, <i>Une guerre d&rsquo;extermination. Espagne 1936-1945</i>, Paris, Belin, 2016 (2012).</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn15"></a><a href="#_ftnref15"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[15]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Paris, Armand Colin, 2016.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn16"></a><a href="#_ftnref16"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[16]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Yves Ternon, <i>G&eacute;nocide. Autonomie d&rsquo;un crime</i>, Paris, Armand Colin, 2016, pp. 95 et 98.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn17"></a><a href="#_ftnref17"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[17]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <span style="letter-spacing:-.15pt">Carlo Ginzburg, <i>Le juge et l&rsquo;historien</i>. <i>Consid&eacute;rations en marge du proc&egrave;s Sofri</i>, Lagrasse, Verdier, 1997 (1991).</span></span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn18"></a><a href="#_ftnref18"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[18]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Marc Bloch, &laquo;&nbsp;Que demander &agrave; l&rsquo;histoire&nbsp;?&nbsp;&raquo; (1937), in <i>L&rsquo;Histoire, la Guerre, la R&eacute;sistance</i>, Paris, Gallimard, 2006, p 475.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn19"></a><a href="#_ftnref19"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[19]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <span style="letter-spacing:-.05pt">Tir&eacute; du glossaire du &laquo;&nbsp;Livret du professeur&nbsp;&raquo; in Jo&euml;l Kotek &amp; Iannis Roder, <i>Enseigner la Shoah au coll&egrave;ge et au lyc&eacute;e. De la parole antis&eacute;mite &agrave; la destruction des Juifs d&rsquo;Europe</i>, Paris, M&eacute;morial de la Shoah, 2009, p.</span>&nbsp;<span style="letter-spacing:-.05pt">59.</span></span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn20"></a><a href="#_ftnref20"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[20]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Voir en particulier ses films <i>S21, la machine de mort khm&egrave;re rouge</i> (2002) et <i>Duch, le Ma&icirc;tre des forges de l&rsquo;enfer</i> (2011)&nbsp;; ainsi que son livre, &eacute;crit avec Christophe Bataille, <i>L&rsquo;&eacute;limination</i>, Paris, Grasset. 2011.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn21"></a><a href="#_ftnref21"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[21]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Voir notamment cette d&eacute;claration comm&eacute;morative du TPIY&nbsp;: http://www.icty.org/specials/srebrenica20/index-fr.html, ainsi que cette liste de ses jugements&nbsp;: http://www.icty.org/fr/cases/liste-des-jugements (consult&eacute; le 30&nbsp;d&eacute;cembre 2016)&nbsp;; voir aussi les arguments de Louise L. Lambrichs dans &laquo;&nbsp;Comment parler de ce qui s&rsquo;est pass&eacute; en Bosnie&nbsp;? Ou de l&rsquo;emploi, juste ou abusif, du mot &laquo;&nbsp;g&eacute;nocide&nbsp;&raquo;, in David Collin et R&eacute;gine Waintrater (dir.), <i>Les mots du g&eacute;nocide, op. cit.</i>, pp. 99-115.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn22"></a><a href="#_ftnref22"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[22]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Voir par exemple une tribune au <i>Monde</i> de Claude Lanzmann, le 30 ao&ucirc;t 2011, intitul&eacute;e &laquo;&nbsp;Contre le bannissement du mot &ldquo;Shoah&rdquo; des manuels scolaires&nbsp;&raquo;.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn23"></a><a href="#_ftnref23"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[23]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Notamment par Jean-Cl&eacute;ment Martin dans &laquo;&nbsp;&Agrave; propos du &ldquo;g&eacute;nocide vend&eacute;en&rdquo;. Du recours &agrave; la l&eacute;gitimit&eacute; de l&rsquo;historien&nbsp;&raquo;, <i>Soci&eacute;t&eacute;s contemporaines</i>, vol. 39, n&deg;&nbsp;1, 2000, pp. 23-38. Voir aussi cette recension critique&nbsp;: </span></span><span dir="RTL" lang="AR-YE" style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">&laquo;&nbsp;</span></span><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">Reynald Secher</span></span><span dir="RTL" lang="AR-YE" style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">, </span></span><i><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">Vend&eacute;e. Du G&eacute;nocide au m&eacute;moricide. M&eacute;canique d</span></span></i><i><span dir="RTL" lang="AR-YE" style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">&rsquo;</span></span></i><i><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">un crime l&eacute;gal</span></span></i><span dir="RTL" lang="AR-YE" style="font-size:9.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">&nbsp;&raquo;, </span></span><i><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">Annales historiques de la R&eacute;volution fran&ccedil;aise</span></span></i><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica">, n&deg;&nbsp;368, 2012, pp. 194-196.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn24"></a><a href="#_ftnref24"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[24]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> &Agrave; ce propos, voir par exemple Ernesto Laclau, <i>La raison populiste</i>, Paris, Seuil, 2008 (2005)&nbsp;; Catherine Colliot-Th&eacute;l&egrave;ne et Florent Gu&eacute;nard (dir.), <i>Peuples et populisme</i>, Paris, Presses universitaires de France, Coll. La vie des id&eacute;es, 2014&nbsp;; Jan-Werner M&uuml;ller, <i>Qu&rsquo;est-ce que le populisme&nbsp;? D&eacute;finir enfin la menace</i>, Paris, Premier Parall&egrave;le, 2016.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn25"></a><a href="#_ftnref25"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[25]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Voir Fabrice Dhume-Sonzogni, <i>Communautarisme. Enqu&ecirc;te sur une chim&egrave;re du nationalisme fran&ccedil;ais</i>, Paris, Demopolis, 2016.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn26"></a><a href="#_ftnref26"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[26]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> Elle se trouve dans l&rsquo;&eacute;pilogue de <i>L&rsquo;irr&eacute;sistible ascension d&rsquo;Arturo Ui</i>, une pi&egrave;ce &eacute;crite en 1941.</span></span></span></span></p> <p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Calibri"><a name="_ftn27"></a><a href="#_ftnref27"><sup><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"><span style="color:blue">[27]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:9.0pt"><span style="font-family:Helvetica"> <i>G&eacute;rard Mordillat pr&eacute;sente Le fascisme de Mussolini</i>, Paris, Demopolis, 2016.</span></span></span></span></p>