<p class="texte" dir="ltr">Lorsque l&rsquo;on se penche sur les repr&eacute;sentations fran&ccedil;aises de l&rsquo;Allemagne au sortir de la Seconde Guerre mondiale, force est de constater que les analystes d&eacute;terminent tr&egrave;s vite une sp&eacute;cificit&eacute; germanique, une &laquo; germanit&eacute; &raquo; qui place le peuple allemand &agrave; part. Ces &eacute;tudes fran&ccedil;aises s&rsquo;appuient bien &eacute;videmment sur un jugement &eacute;thique, implicite, li&eacute; &agrave; l&rsquo;horreur des camps de concentration et du processus d&rsquo;extermination.</p> <p class="texte" dir="ltr">De 1945 au d&eacute;but des ann&eacute;es 1950, de tr&egrave;s nombreux ouvrages paraissent en France sur l&rsquo;Allemagne et mettent en lumi&egrave;re le caract&egrave;re national allemand qu&rsquo;ils nomment &laquo; l&rsquo;&acirc;me allemande &raquo;. Le choix m&ecirc;me du vocable &laquo; &acirc;me &raquo; r&eacute;v&egrave;le le double aspect de l&rsquo;&eacute;tude men&eacute;e sur l&rsquo;Allemand, entit&eacute; collective, &agrave; la fois principe de sensibilit&eacute;, de pens&eacute;e et principe de conscience morale.</p> <p class="texte" dir="ltr">Mon intervention tentera de relever tout d&rsquo;abord les caract&eacute;ristiques que l&rsquo;on donne en France &agrave; l&rsquo;&acirc;me allemande, en les &eacute;clairant de quelques exemples. Ensuite il faut s&rsquo;interroger sur les enjeux de ces discours identitaires. Il semble que ces discours sont en France, de 1945 au d&eacute;but des ann&eacute;es 1950, le signe d&rsquo;une crise identitaire majeure dont je mettrais en lumi&egrave;re les signes. Enfin, je chercherai &agrave; montrer qu&rsquo;en raison m&ecirc;me de cette crise identitaire en France, &eacute;merge un second discours qui d&eacute;finit par un jeu de miroir &laquo; l&lsquo;&acirc;me fran&ccedil;aise &raquo;.</p> <h1 dir="ltr" id="heading1">&nbsp;&laquo; Une &acirc;me allemande &raquo;</h1> <p class="texte" dir="ltr">Le point de d&eacute;part du regard fran&ccedil;ais sur l&rsquo;Allemagne est la volont&eacute; de comprendre comment l&rsquo;hitl&eacute;risme a &eacute;t&eacute; possible. Les analystes fran&ccedil;ais s&rsquo;appuient dans une premi&egrave;re approche sur l&rsquo;histoire. L&rsquo;histoire allemande est d&eacute;crite comme suite d&eacute;termin&eacute;e et continue qui aboutit, presque logiquement, au nazisme.</p> <p class="texte" dir="ltr">Ce d&eacute;terminisme historique est un &eacute;l&eacute;ment essentiel pour saisir d&egrave;s &agrave; pr&eacute;sent l&rsquo;aspect fantasm&eacute; &nbsp;du discours identitaire. Il est reconstruction de la m&eacute;moire de soi comme de l&rsquo;autre.</p> <p class="texte" dir="ltr">Ainsi Ariel, un auteur qui &eacute;crit sous un pseudonyme en 1945 affirme ainsi que la religiosit&eacute; promue par Luther qu&rsquo;il qualifie d&rsquo;&laquo; irrationnelle &raquo; fonde les th&eacute;ories racistes du III&egrave;me Reich&nbsp;:</p> <blockquote> <p class="citation" dir="ltr">&ldquo; Hitler est le fils adoptif de Luther.&rdquo;<a class="footnotecall" href="#ftn1" id="bodyftn1">1</a></p> </blockquote> <p class="texte" dir="ltr">Comme l&#39;argument historique ne peut, seul, rendre compte et expliquer l&#39;&eacute;mergence du nazisme et de sa barbarie, les auteurs cherchent &agrave; comprendre pourquoi le nazisme est apparu en Allemagne et non ailleurs. La sp&eacute;cificit&eacute; est cette fois psychologique.</p> <p class="texte" dir="ltr">D&egrave;s lors, c&rsquo;est un sorte de crescendo qui appara&icirc;t dans la caract&eacute;risation de l&rsquo;&acirc;me allemande&nbsp;: elle est tour &agrave; tour et &agrave; la fois &eacute;trange, orgueilleuse, diabolique, et finalement fondamentalement dangereuse.</p> <h2 dir="ltr" id="heading2">Etrange Allemagne</h2> <p class="texte" dir="ltr">Ici l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; devient &eacute;tranget&eacute;&nbsp;:</p> <blockquote> <p class="citation" dir="ltr">&ldquo;une &eacute;nigme&rdquo;<a class="footnotecall" href="#ftn2" id="bodyftn2">2</a>, &ldquo;cette secr&egrave;te Allemagne&rdquo;<a class="footnotecall" href="#ftn3" id="bodyftn3">3</a></p> </blockquote> <p class="texte" dir="ltr">constatent l&rsquo;essayiste Henri Berr et l&rsquo;historien J. Droz. Mais pour de tr&egrave;s nombreux auteurs l&rsquo;Allemagne est surtout contradictoire car duale&nbsp;: bonne et mauvaise &agrave; la fois. Tout une r&eacute;flexion a lieu sur l&rsquo;existence simultan&eacute;e ou diachronique de la bonne et de la mauvais Allemagne.</p> <p class="texte" dir="ltr">Ceci est , en fait, significatif de la difficult&eacute; de penser l&rsquo;Allemagne apr&egrave;s 1945. Elle est &agrave; la fois l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; culturelle et scientifique que l&rsquo;on admire&nbsp;; elle est aussi cette puissance &eacute;conomique et politique que l&rsquo;on redoute&nbsp;; elle est aussi cette barbare que l&rsquo;on ex&egrave;cre.</p> <h2 dir="ltr" id="heading3">Orgueilleuse Allemagne</h2> <p class="texte" dir="ltr">Deux aspects sont soulign&eacute;s ici &agrave; la fois la d&eacute;mesure germanique et son orgueil &agrave; proprement parler. La d&eacute;mesure affirm&eacute;e donne lieu notamment &agrave; des descriptions de la &laquo; goinfrerie &raquo; germanique (!).</p> <blockquote> <p class="citation" dir="ltr">&ldquo;Dans le programme de la journ&eacute;e, c&ocirc;t&eacute; masculin, la beuverie joue un r&ocirc;le tout &agrave; fait pr&eacute;pond&eacute;rant. &rdquo;<a class="footnotecall" href="#ftn4" id="bodyftn4">4</a></p> </blockquote> <p class="texte" dir="ltr">Mais c&rsquo;est l&rsquo;orgueil qui inqui&egrave;te surtout les essayistes. Ainsi le germaniste Robert d&rsquo;Harcourt note sa permanence historique&nbsp;:</p> <blockquote> <p class="citation" dir="ltr">&ldquo;L&#39;orgueil est le fil rouge conducteur &agrave; travers toute l&#39;histoire moderne de l&#39;Allemagne.&rdquo;<a class="footnotecall" href="#ftn5" id="bodyftn5">5</a></p> </blockquote> <p class="texte" dir="ltr">En outre, l&#39;orgueil allemand donne lieu &agrave; une volont&eacute; d&#39;h&eacute;g&eacute;monie et a pour corollaire un sentiment de sup&eacute;riorit&eacute; constant. On op&egrave;re donc un glissement&nbsp;: d&rsquo;un caract&egrave;re psychologique on arrive &agrave; une analyse politique ou g&eacute;ostrat&eacute;gique.</p> <h2 dir="ltr" id="heading4">Diabolique Allemagne</h2> <p class="texte" dir="ltr">C&rsquo;est le point d&rsquo;orgue de l&rsquo;analyse psychologique de la voisine germanique. On consid&egrave;re, en effet, que ce pays a reni&eacute; la civilisation&nbsp;; c&rsquo;est-&agrave;-dire celle de l&#39;Occident dont la re&shy;pr&eacute;sentante la plus confirm&eacute;e est la France. Andr&eacute; Siegfried, dans un ouvrage au titre caract&eacute;ristique, affirme&nbsp;:</p> <blockquote> <p class="citation" dir="ltr">&ldquo; [...] ce barbare, du reste fier de sa barbarie, ce fils lointain de l&#39;Asie, n&#39;a pas en lui la filiation classique issue de la Gr&egrave;ce et ne saurait en cons&eacute;quence &ecirc;tre consid&eacute;r&eacute; comme un Occidental cent pour cent. &rdquo;<a class="footnotecall" href="#ftn6" id="bodyftn6">6</a></p> </blockquote> <p class="texte" dir="ltr">Les repr&eacute;sentations fran&ccedil;aises, si elles soulignent tout d&#39;abord la complexit&eacute; germanique, condamnent progressivement tout &eacute;l&eacute;ment susceptible de faire partie de la sp&eacute;cificit&eacute; de l&#39;Allemagne. Son histoire est l&#39;expression de son orgueil et de ses exc&egrave;s - qui s&#39;av&egrave;rent dangereux pour les autres. Le jugement de cette voisine s&#39;ach&egrave;ve par son exclusion. Mise au ban de la civilisation au d&eacute;part, du fait de son pass&eacute; nazi, l&#39;Allemagne est finalement rejet&eacute;e pour elle m&ecirc;me, sans plus aucune distinction historique ou morale. Entre les deux peuples, le foss&eacute; semble trop profond et la rupture d&eacute;finitive, apr&egrave;s 1945. C&#39;est exactement ce que souligne Albert Camus&nbsp;:</p> <blockquote> <p class="citation" dir="ltr">&ldquo; Et dans l&#39;horreur que vous nous avez prodigu&eacute;e pendant quatre ans, votre raison a autant de part que votre instinct. C&#39;est pourquoi ma condamnation sera totale, vous &ecirc;tes d&eacute;j&agrave; mort &agrave; mes yeux. [...] Et malgr&eacute; vous-m&ecirc;mes, je vous garderai le nom d&#39;homme. Pour &ecirc;tre fid&egrave;le &agrave; notre foi, nous sommes forc&eacute;s de respecter en vous ce que vous ne respectez pas chez les autres.&rdquo;<a class="footnotecall" href="#ftn7" id="bodyftn7">7</a></p> </blockquote> <h2 dir="ltr" id="heading5">Dangereuse Allemagne</h2> <p class="texte" dir="ltr">Dernier qualificatif de l&rsquo;&acirc;me allemande, il se positionne dans une autre dimension de l&rsquo;analyse. Les trois premiers s&rsquo;appuyaient sur une r&eacute;flexion &eacute;thique, celui-l&agrave; met en lumi&egrave;re les enjeux politiques. Cet argument est de plus instrumentalis&eacute; car il sert d&#39;hypoth&egrave;se &agrave; toute politique &agrave; l&#39;&eacute;gard de l&#39;Allemagne. Les Fran&ccedil;ais insistent de mani&egrave;re tr&egrave;s forte &agrave; la fois sur l&rsquo;Allemagne dangereuse depuis toujours - et on retrouve ici la r&eacute;flexion historique base de l&rsquo;&eacute;tude de l&rsquo;&acirc;me - mais aussi ils insistent sur le danger potentiel qu&rsquo;elle constitue.</p> <p class="texte" dir="ltr">Parmi ceux qui se font les chantres de la dangerosit&eacute; allemande on ne peut pas ne pas citer le G&eacute;n&eacute;ral de Gaulle qui utilise cette th&egrave;se comme un leitmotiv&nbsp;:</p> <blockquote> <p class="citation" dir="ltr">&ldquo;Depuis 145 ans, la France a &eacute;t&eacute; envahie &agrave; sept reprises diff&eacute;rentes. Paris fut quatre fois occup&eacute; par l&#39;ennemi.&rdquo;<a class="footnotecall" href="#ftn8" id="bodyftn8">8</a></p> </blockquote> <p class="texte" dir="ltr">La continuit&eacute; historique est maintes fois soulign&eacute;e, aussi la nature &laquo; &eacute;ternelle &raquo; de l&#39;&acirc;me allemande commande-t-elle la plus grande prudence. Ces analyses sont en corr&eacute;lation avec l&#39;image d&#39;une Allemagne impr&eacute;visible, &agrave; l&#39;histoire marqu&eacute;e par la permanence des &laquo; d&eacute;bordements &raquo; guerriers et par la volont&eacute; de domination. Il s&#39;agit, pour beaucoup d&#39;auteurs, de ne pas rel&acirc;cher l&#39;attention et la m&eacute;fiance en France. C&#39;est bien le sens que l&#39;on peut donner au titre de l&#39;ouvrage d&#39;Andr&eacute; Monnier-Zwingelstein en 1945&nbsp;: La Prusse &eacute;ternelle.<a class="footnotecall" href="#ftn9" id="bodyftn9">9</a></p> <p class="texte" dir="ltr">Les auteurs n&#39;h&eacute;sitent pas &agrave; employer la dramatisation pour valoriser leurs positions et leurs descriptions apocalyptiques sont pl&eacute;thores. Le titre m&ecirc;me de l&#39;ouvrage de l&rsquo;homme de lettre de droite, Jean Bardanne en est tout &agrave; fait symptomatique&nbsp;: La guerre pour 1948&nbsp;?<a class="footnotecall" href="#ftn10" id="bodyftn10">10</a></p> <p class="texte" dir="ltr">Avec l&#39;apparition des tensions entre anciens alli&eacute;s, beaucoup d&#39;&eacute;crits stigmatisent un nouveau danger allemand. On se rend bien compte - sans toutefois toujours le dire - que l&#39;Allemagne a &eacute;t&eacute; tr&egrave;s affaiblie par le second conflit mondial. Elle ne peut reconstituer sa puissance qu&#39;aid&eacute;e. Aussi beaucoup redoutent-ils qu&#39;elle utilise sa situation g&eacute;ographique m&eacute;diane en Europe et sa position d&#39;enjeu entre alli&eacute;s pour reconqu&eacute;rir une place de choix en Europe &agrave; l&#39;aide d&#39;une des deux superpuissances.</p> <p class="texte" dir="ltr">Cette analyse du danger allemand concerne les ann&eacute;es 1945-1948. La prise de conscience de l&#39;impossible entente entre alli&eacute;s d&#39;hier y est sans doute pour beaucoup. Ceci explique l&rsquo;&eacute;mergence de l&rsquo;id&eacute;e qu&rsquo;il pourrait y avoir collusion germano-sovi&eacute;tique ce qui constituerait le &laquo; nouveau &raquo; danger allemand.</p> <p class="texte" dir="ltr">Au del&agrave; de la d&eacute;finition d&rsquo;une &laquo; germanit&eacute; &raquo;, c&rsquo;est par un jeu de miroir que se d&eacute;finit la &laquo; francit&eacute; &raquo;. Tr&egrave;s souvent, au cours d&rsquo;analyses de cette &laquo; &acirc;me &raquo; allemande, se dessinent les contours du caract&egrave;re hexagonal</p> <h1 dir="ltr" id="heading6">Le &laquo; caract&egrave;re national allemand &raquo; catharsis de la crise identitaire fran&ccedil;aise</h1> <p class="texte" dir="ltr">Le terme &laquo; Autre &raquo; est ambigu&nbsp;; il est &agrave; la fois ce qui est diff&eacute;rent du &laquo; moi &raquo; mais aussi ce qui lui est semblable. Autrement dit, le terme recouvre une double acception&nbsp;: celle de l&rsquo;opposition et de la similitude. Pour qu&rsquo;une identit&eacute; se construise, elle doit saisir cette double dimension de l&rsquo;autre, comme le soulignent les &eacute;tudes de psychologie sociale.</p> <p class="texte" dir="ltr">Aussi, l&rsquo;identit&eacute; collective fran&ccedil;aise, telle qu&rsquo;elle appara&icirc;t au travers de notre &eacute;tude, laisse-t-elle percevoir cette tension entre les deux sens de &laquo; l&rsquo;Autre &raquo;.</p> <p class="texte" dir="ltr">Si la prise en compte de l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; est une composante essentielle de l&rsquo;&eacute;laboration du discours identitaire, cette &eacute;laboration se fait, parfois, au d&eacute;triment d&rsquo;une des deux significations. Or, ce qui est frappant dans la repr&eacute;sentation fran&ccedil;aise c&rsquo;est l&rsquo;univocit&eacute; de l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; prise comme consubstantiellement diff&eacute;rente. En effet, ce sont les traits distinctifs qui sont survaloris&eacute;s, au d&eacute;triment de ceux qui souligneraient la similitude. Ceci explique le leitmotiv de l&rsquo;opposition absolue entre les deux voisines, leitmotiv qui tourne parfois &agrave; la caricature.</p> <p class="texte" dir="ltr">Ce sont, certes, la diff&eacute;rence et l&rsquo;opposition qui permettent de justifier l&rsquo;existence. &nbsp;Ariane Chebel d&rsquo;Appollonia &nbsp;insiste sur la n&eacute;cessit&eacute; existentielle, au sens propre, de l&rsquo;opposition entre collectivit&eacute;s, au moins sur le mode du discours et de la repr&eacute;sentation&nbsp;:</p> <blockquote> <p class="citation" dir="ltr">&ldquo;Le moi et, par extension le nous se construisent par opposition &agrave; l&#39;Autre, aux autres.&rdquo;<a class="footnotecall" href="#ftn11" id="bodyftn11">11</a></p> </blockquote> <p class="texte" dir="ltr">Or, l&rsquo;objectif premier de ce discours du &laquo; sp&eacute;cifique &raquo; du national est une sorte de d&eacute;finition minimale de ce qui est commun au groupe. Il s&rsquo;agit de cr&eacute;er ou de souligner une solidarit&eacute;.</p> <p class="texte" dir="ltr">La repr&eacute;sentation de l&rsquo;Autre a, par cons&eacute;quent, une fonction fondamentale&nbsp;; elle permet &agrave; la communaut&eacute; nationale de se d&eacute;finir, par la diff&eacute;rence et ainsi de cr&eacute;er un sentiment, commun&eacute;ment partag&eacute;, d&rsquo;appartenance, par l&rsquo;exclusion.</p> <p class="texte" dir="ltr">Cependant, ces d&eacute;finitions qui s&rsquo;appuient sur l&rsquo;exclusion n&rsquo;apparaissent jamais aussi pr&eacute;gnantes que lorsque l&rsquo;identit&eacute; pose probl&egrave;me, pr&eacute;cis&eacute;ment.</p> <p class="texte" dir="ltr">Ici, nous arrivons &agrave; un point central de notre r&eacute;flexion, &agrave; savoir que toute l&rsquo;analyse fran&ccedil;aise sur la germanit&eacute; est probablement le signe d&rsquo;une crise identitaire fran&ccedil;aise majeure, &agrave; l&rsquo;instar de celle que l&rsquo;Hexagone avait connu apr&egrave;s 1870, mais sur des questionnements peut-&ecirc;tre plus d&eacute;stabilisants encore. L&rsquo;&eacute;mergence d&rsquo;un discours &laquo; mythologique &raquo; dans les &eacute;crits fran&ccedil;ais serait en r&eacute;alit&eacute; l&rsquo;expression m&ecirc;me de cette crise.</p> <p class="texte" dir="ltr">Pour Robert Frank, cette crise est li&eacute;e &agrave; la fois &agrave; la d&eacute;couverte d&rsquo;une faiblesse militaire qui fragilise l&rsquo;univers mental des Fran&ccedil;ais, mais aussi &agrave; la &laquo; d&eacute;sunion &raquo; nationale qui est apparue. En effet, seule des grandes puissances d&rsquo;avant la Seconde Guerre mondiale &agrave; avoir connu pareille humiliation militaire en 1940, son univers de repr&eacute;sentations s&rsquo;effondre - &nbsp;fond&eacute;, notamment, sur l&rsquo;id&eacute;e de grandeur - car sa politique a &eacute;t&eacute; rien moins qu&rsquo;ambigu&euml; pendant la guerre&nbsp;:</p> <blockquote> <p class="citation" dir="ltr">&ldquo;En France, il y a bien eu des h&eacute;ros, des bourreaux, des martyrs, mais aucun des ces qualificatifs ne peut &ecirc;tre retenu par la m&eacute;moire collective pour caract&eacute;riser le peuple fran&ccedil;ais pendant ces ann&eacute;es tragiques. &rdquo;<a class="footnotecall" href="#ftn12" id="bodyftn12">12</a></p> </blockquote> <p class="texte" dir="ltr">Etudiant l&rsquo;opinion publique en France, Pierre Laborie note lui aussi une crise identitaire et, ce d&egrave;s la fin des ann&eacute;es 1930. Selon son &eacute;tude c&rsquo;est &agrave; partir de 1941 que l&rsquo;on voit &eacute;merger un sentiment de rejet de l&rsquo;Allemagne. D&egrave;s lors le point de convergence de l&rsquo;identit&eacute; fran&ccedil;aise en reconstruction sera avant tout l&rsquo;opposition &agrave; l&rsquo;occupant allemand, position que l&rsquo;on retrouve, sous une autre forme, apr&egrave;s le conflit. L&rsquo;insistance avec laquelle les diff&eacute;rents discours fran&ccedil;ais sur l&rsquo;Allemagne rappellent l&rsquo;opposition franco-allemande est, par ailleurs, un moyen d&rsquo;occulter les ressemblances. En effet, les collusions qui ont exist&eacute; entre une minorit&eacute; active fran&ccedil;aise et l&rsquo;Occupant , mais aussi l&rsquo;attentisme de la majorit&eacute; - m&ecirc;me s&rsquo;il est n&eacute;cessaire de le nuancer - que l&rsquo;on constate au cours des &laquo; ann&eacute;es noires &raquo; cr&eacute;e au sortir de ce conflit &laquo; une conscience trouble et troubl&eacute;e &raquo;<a class="footnotecall" href="#ftn13" id="bodyftn13">13</a> La reconstruction de l&rsquo;identit&eacute; nationale en France passe donc par ces deux contraintes&nbsp;: la focalisation sur les dissemblances entre France et Allemagne et le silence sur Vichy.</p> <h1 dir="ltr" id="heading7">L&rsquo;&eacute;laboration identitaire et ses r&eacute;f&eacute;rents</h1> <p class="texte" dir="ltr">L&#39;oubli volontaire de la Collaboration nous semble tout &agrave; fait parall&egrave;le aux descriptions pl&eacute;thoriques d&#39;une Allemagne consubstantiellement &laquo; nazie &raquo;, dans un syst&egrave;me de repr&eacute;sentations fond&eacute; sur les oppositions binaires. De m&ecirc;me, le silence sur la R&eacute;sistance allemande, qui a pourtant bel et bien exist&eacute;, permet de donner une importance &agrave; la R&eacute;sistance en France que d&eacute;mentent les &eacute;tudes. C&#39;est donc une France r&eacute;sistante qui &eacute;merge des descriptions fran&ccedil;aises de l&#39;apr&egrave;s-guerre. L&#39;acte fondateur de cette imagerie, pour le moins d&eacute;form&eacute;e, semble &ecirc;tre le discours de Charles de Gaulle du 7 ao&ucirc;t 1944, amplifi&eacute; par celui du 25 ao&ucirc;t 1944&nbsp;; le fil conducteur est ici celui de l&#39;unit&eacute; dans la lutte et la victoire. C&#39;est &agrave; la France, la France &ldquo;&eacute;ternelle&rdquo; que s&#39;adresse de Gaulle&nbsp;:</p> <blockquote> <p class="citation" dir="ltr">&ldquo;Paris&nbsp;! Paris outrag&eacute;&nbsp;! Paris bris&eacute;&nbsp;! Paris martyris&eacute;&nbsp;! mais Paris lib&eacute;r&eacute;&nbsp;! Lib&eacute;r&eacute; par lui-m&ecirc;me[...], avec l&#39;appui et le concours de la France toute enti&egrave;re, de la France qui se bat, de la seule France, de la vraie France, de la France &eacute;ternelle.&rdquo;<a class="footnotecall" href="#ftn14" id="bodyftn14">14</a></p> </blockquote> <p class="texte" dir="ltr">Si donc, on accepte l&rsquo;hypoth&egrave;se d&rsquo;une crise de l&rsquo;identit&eacute; fran&ccedil;aise, toute une relecture des discours fran&ccedil;ais sur l&rsquo;Allemagne peut &ecirc;tre men&eacute;e. Il va s&rsquo;agir, pendant quelques cinq ann&eacute;es environ, de se r&eacute;approprier des rep&egrave;res. Tous les rep&egrave;res r&eacute;actualis&eacute;s ne rel&egrave;vent pas du caract&egrave;re national mais participent &agrave; l&rsquo;identit&eacute; en particulier la g&eacute;ographie et l&rsquo;histoire nationale.</p> <p class="texte" dir="ltr">Ainsi l&rsquo;identit&eacute; g&eacute;ographique ne pose au d&eacute;part que peu d&rsquo;interrogations car les fronti&egrave;res sont dites &laquo; naturelles &raquo;. Pourtant, la France va conna&icirc;tre une transformation radicale de son rapport &agrave; l&rsquo;espace entre 1944 et 1963.</p> <p class="texte" dir="ltr">En effet, en 1944, la France est une des puissances imp&eacute;riales qui compte dans le monde&nbsp;; son empire est vaste. Tout au long de notre p&eacute;riode d&rsquo;&eacute;tude la France va voir son empire s&rsquo;amenuiser pour, finalement, dispara&icirc;tre totalement.</p> <p class="texte" dir="ltr">Parall&egrave;lement, elle s&rsquo;inscrit plus avant, au fil des ann&eacute;es, dans la construction europ&eacute;enne qui rend l&rsquo;espace hexagonal moins signifiant. Une translation s&rsquo;op&egrave;re donc dans le contenu donn&eacute; &agrave; &laquo; la plus grande France &raquo; qui passe d&rsquo;une d&eacute;finition imp&eacute;riale et coloniale &agrave; une d&eacute;finition europ&eacute;enne, avec la voisine allemande. Le nouveau rapport &agrave; l&rsquo;espace permet sans aucun doute d&rsquo;accepter davantage les Allemands. Au terme de cette &eacute;volution se situe le trait&eacute; de l&rsquo;Elys&eacute;e de janvier 1963.</p> <p class="texte" dir="ltr">L&rsquo;identit&eacute; historique participe de la d&eacute;finition identitaire m&ecirc;me si elle ne rel&egrave;ve pas directement du caract&egrave;re national&nbsp;; elle l&rsquo;&eacute;claire par le regard qu&rsquo;on lui porte.</p> <p class="texte" dir="ltr">L&rsquo;histoire est largement reconstruite, voire fantasm&eacute;e. L&rsquo;image premi&egrave;re qui en est donn&eacute;e est la lin&eacute;arit&eacute;, la continuit&eacute;. Si l&rsquo;Allemagne est caract&eacute;ris&eacute;e par une histoire d&eacute;termin&eacute;e, continue, c&rsquo;est aussi le cas pour la France. Ce qui distingue les deux voisines c&rsquo;est le terme de cette d&eacute;termination&nbsp;: pour la premi&egrave;re c&rsquo;est l&rsquo;abomination et la destruction, pour la seconde, le progr&egrave;s et l&rsquo;harmonie. Dans cette logique identitaire &eacute;mergent des &eacute;v&eacute;nements &laquo; fondateurs &raquo;. Ils ont une fonction d&rsquo;explicitation de ce que l&rsquo;on croire &ecirc;tre l&rsquo;identit&eacute; nationale&nbsp;; ils sont donc une re-construction de la m&eacute;moire, enjeu de discours social et politique. On retrouve donc un certain nombre de sch&egrave;mes &laquo; fondateurs &raquo; qui structurent la ligne continue de l&rsquo;&eacute;volution nationale&nbsp;: la Gaule, parfois qualifi&eacute;e de &laquo; romaine &raquo;, Charlemagne, Jeanne d&rsquo;Arc, Louis XIV, la R&eacute;volution fran&ccedil;aise, que d&rsquo;aucuns saisissent dans une perspective de rupture.</p> <p class="texte" dir="ltr">Le portrait psychologique de la France tel qu&rsquo;il se fait jour dans les &eacute;crits s&rsquo;articule autour de trois termes qui s&rsquo;av&egrave;rent &ecirc;tre autant de qualit&eacute;s. Ce portrait hexagonal va pousser les auteurs &agrave; r&eacute;interpr&eacute;ter le caract&egrave;re national allemand en lui ajoutant un contenu qui n&rsquo;apparaissait pas au premier abord.</p> <p class="texte" dir="ltr">Trois caract&egrave;res sont donc d&eacute;finis comme expression de la francit&eacute;&nbsp;: l&rsquo;individualisme, l&rsquo;intelligence, assortie du culte de la raison, et la mod&eacute;ration. A ceux-ci s&rsquo;opposent le &laquo; caporalisme &raquo; dont Maurice Constantin-Weyer se plaisait &agrave; qualifier la nature allemande<a class="footnotecall" href="#ftn15" id="bodyftn15">15</a>, l&rsquo;inconstance, le flou et le fanatisme allemands signes d&rsquo;une &eacute;vidente &laquo; irrationalit&eacute; &raquo; germanique &nbsp;et enfin la d&eacute;mesure et l&rsquo;instabilit&eacute; de la voisine d&rsquo;outre-Rhin.</p> <p class="texte" dir="ltr">Ainsi, le Fran&ccedil;ais n&#39;est d&eacute;crit que comme une personne sp&eacute;cifique et particuli&egrave;re, dont les liens avec le groupe sont extr&ecirc;mement l&acirc;ches et tout &agrave; fait secondaires. En effet, ce qui distingue le Fran&ccedil;ais de l&#39;Allemand c&#39;est bien la richesse de sa vie int&eacute;rieure.</p> <p class="texte" dir="ltr">Seconds caract&egrave;res de &laquo; l&lsquo;&acirc;me fran&ccedil;aise &raquo;, intelligence et raison jouent le r&ocirc;le de r&eacute;f&eacute;rents tr&egrave;s importants, d&rsquo;autant qu&rsquo;ils permettent de cr&eacute;er l&rsquo;image d&rsquo;une France polic&eacute;e. Dans l&rsquo;imagerie g&eacute;n&eacute;ralement admise, la France est la patrie de Descartes qui fait de la rationalit&eacute; une idole nationale.</p> <p class="texte" dir="ltr">Le troisi&egrave;me p&ocirc;le de l&rsquo;&acirc;me fran&ccedil;aise sera explicit&eacute; &agrave; travers deux s&eacute;ries de caract&eacute;ristiques&nbsp;; d&rsquo;une part, il s&rsquo;agira de &laquo; d&eacute;montrer &raquo; la mod&eacute;ration fran&ccedil;aise - et a contrario la d&eacute;mesure allemande - et d&rsquo;autre part, cette &laquo; mesure &raquo; s&rsquo;appuiera sur un sens de l&rsquo;organisation et un ordre caract&eacute;ris&eacute;s de fran&ccedil;ais.<a class="footnotecall" href="#ftn16" id="bodyftn16">16</a></p> <p class="texte" dir="ltr">Toute la r&eacute;appropriation des r&eacute;f&eacute;rents identitaires aboutit &agrave; une vision syncr&eacute;tique de la France&nbsp;; celle de la &laquo; Civilisation &raquo;. Celle-ci incarn&eacute;e la France est en fait li&eacute;e &agrave; l&rsquo;essence m&ecirc;me des valeurs d&eacute;fendues qu&rsquo;elle d&eacute;fend&nbsp;; &agrave; savoir l&rsquo;humanisme, assortie parfois du christianisme, la d&eacute;mocratie et les droits de l&rsquo;homme, mais aussi la culture fran&ccedil;aise.</p> <p class="texte" dir="ltr">Mais le contenu tant philosophique que culturel donn&eacute; &agrave; la &laquo; Civilisation &raquo; fran&ccedil;aise lui donne une identit&eacute; sup&eacute;rieure, celle de l&rsquo;universel car ce que promeut la France concerne l&rsquo;homme et n&rsquo;a, selon les auteurs, pas de contenu national. On remarquera ici au passage la tension contradictoire du raisonnement identitaire, appuyant ses arguments &agrave; la fois sur une signification sp&eacute;cifiquement hexagonale et sur une aspiration &agrave; un espace de l&eacute;gitimit&eacute; &eacute;largi.</p> <p class="texte" dir="ltr">Le th&egrave;me de la Civilisation fran&ccedil;aise est instrumentalis&eacute;&nbsp;: puisque celle-ci incarne des valeurs universelles, toute injustice commise &agrave; son &eacute;gard l&#39;est &agrave; l&#39;&eacute;gard de l&#39;humanit&eacute; toute enti&egrave;re. Un discours messianique appara&icirc;t tr&egrave;s r&eacute;guli&egrave;rement dans les r&eacute;flexions fran&ccedil;aises dont la probl&eacute;matique r&eacute;currente affirme que le sort de la France rejoint celui du monde.</p> <p class="texte" dir="ltr">Finalement, la France acquiert un r&ocirc;le universel fondamental face &agrave; sa voisine germanique&nbsp;: celui de monter la garde pour prot&eacute;ger les valeurs dont elle est porteuse&nbsp;; c&#39;est l&#39;exacte position de Georges Weill<a class="footnotecall" href="#ftn17" id="bodyftn17">17</a>. Ce glissement de la r&eacute;flexion en direction d&#39;une mission sp&eacute;cifiquement fran&ccedil;aise met en lumi&egrave;re un moyen trouv&eacute; par les auteurs, pour l&eacute;gitimer par d&#39;autres arguments, les revendications fran&ccedil;aises dans l&#39;imm&eacute;diate apr&egrave;s-guerre.</p> <p class="texte" dir="ltr">Autrement dit, la francit&eacute;, par essence sp&eacute;cifique, acquiert par un glissement de sens un contenu universel.</p> <p class="texte" dir="ltr">La r&eacute;appropriation fran&ccedil;aise des r&eacute;f&eacute;rents identitaires, par le double mouvement de d&eacute;finition et d&rsquo;opposition, peut finalement &ecirc;tre synth&eacute;tis&eacute;e&nbsp;; d&rsquo;o&ugrave; &eacute;merge une image en inverse des deux voisines d&rsquo;en de&ccedil;&agrave; et d&rsquo;outre-Rhin&nbsp;:</p> <p class="texte" dir="ltr"><img alt="Image1" src="https://numerev.com/images/cpp/docannexe/image/680/img-1.png" style="margin: 0mm 0in; padding: 0.0602in 0.1102in; border: medium none; height: 75%; width: 100%;" /></p> <p class="texte" dir="ltr"><a id="Image17Cgraphics"></a>Ce travail de &laquo; d&eacute;finition &raquo; &agrave; la Fran&ccedil;aise est sans nul doute significatif de la difficult&eacute; &agrave; comprendre et tout simplement &agrave; penser l&rsquo;Allemagne en France. Cette difficult&eacute;, d&rsquo;ailleurs, perdure au fil des ann&eacute;es. L&rsquo;objet Allemagne est en outre, et sans que cela soit contradictoire, un objet empreint d&rsquo;affect ce qui explique aussi la difficult&eacute; &agrave; constituer un discours &laquo; distanci&eacute; &raquo;.</p> <p class="texte" dir="ltr">Cependant, force est de constater que les interrogations fran&ccedil;aises sur &laquo; l&rsquo;&acirc;me &raquo; allemande sont chronologiquement rep&eacute;rables et qu&rsquo;elles sont le signe d&rsquo;une difficult&eacute; &agrave; penser la francit&eacute; au sortir de la p&eacute;riode trouble et troubl&eacute;e de la guerre. Les r&eacute;f&eacute;rents identitaires refond&eacute;s, au d&eacute;but des ann&eacute;es 1950, le questionnement sur le caract&egrave;re national des deux voisines dispara&icirc;t peu &agrave; peu. D&egrave;s lors, l&rsquo;acceptation de l&rsquo;Autre comme autre mais aussi identique &agrave; soi-m&ecirc;me est rendue possible. De grandes &eacute;tapes vont marquer cette &eacute;volution du regard fran&ccedil;ais. Dans cette perspective je me dois d&rsquo;&eacute;voquer le projet europ&eacute;en au c&oelig;ur duquel on retrouve un &laquo; axe &raquo; franco-allemand d&egrave;s le d&eacute;but des ann&eacute;es 1950, association &eacute;conomique dans les ann&eacute;es 1950, c&rsquo;est un projet bien plus large dans lequel s&rsquo;investissent les deux voisines&nbsp;: la r&eacute;conciliation. Au terme de cette &eacute;volution se situe le Trait&eacute; d&rsquo;amiti&eacute; franco-allemand en janvier 1963. Ecoutons, pour finir, un de ses artisans d&eacute;crire la transformation des rapports politiques , expression m&ecirc;me d&rsquo;une lente mais v&eacute;ritable transformation de leurs repr&eacute;sentations respectives au sein desquelles la d&eacute;finition du caract&egrave;re national servait &agrave; appr&eacute;hender l&rsquo;autre&nbsp;:</p> <blockquote> <p class="citation" dir="ltr">&ldquo;Sans doute, l&#39;histoire tiendra-t-elle pour l&#39;un des faits principaux de la vie de l&#39;humanit&eacute; l&#39;extraordinaire changement qui, au cours des deux derni&egrave;res d&eacute;cennies, amena le peuple allemand et le peuple fran&ccedil;ais, d&#39;abord &agrave; renoncer &agrave; leur inimit&eacute; d&#39;antan, ensuite &agrave; faire partie, c&ocirc;te &agrave; c&ocirc;te, d&#39;organisations internationales destin&eacute;es, soit &agrave; la s&eacute;curit&eacute; comme l&#39;alliance atlantique, soit au progr&egrave;s &eacute;conomique comme le March&eacute; Commun europ&eacute;en, enfin &agrave; pratiquer entre eux une coop&eacute;ration r&eacute;guli&egrave;re et particuli&egrave;re en vue de l&#39;action commune en tous domaines.&rdquo;<a class="footnotecall" href="#ftn18" id="bodyftn18">18</a></p> </blockquote> <p class="texte" dir="ltr"><img alt="Image2" src="https://numerev.com/images/cpp/docannexe/image/680/img-2.png" style="width:6.2972inch;height:2.4583inch;margin-left:0.0in;margin-right:0.0in;margin-top:0mm;margin-bottom:0mm;padding-top:0.0602in;padding-bottom:0.0602in;padding-left:0.1102in;padding-right:0.1102in;border:none" /></p> <p class="titreillustration" dir="ltr"><a id="Image27Cgraphics"></a>L&rsquo;&acirc;me allemande apr&egrave;s 1945</p> <p class="texte" dir="ltr">&nbsp;&nbsp;&nbsp;</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn1" id="ftn1">1</a> &nbsp;Ariel <em>R&eacute;&eacute;duquer les Allemands</em>, Paris, Editions M&eacute;dicis, 1945, 143 p., p. 29.</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn2" id="ftn2">2</a> &nbsp;Henri Berr <em>Allemagne le pour et le contre</em>, Paris, Albin Michel &ldquo;Publications de la Revue Synth&egrave;se&rdquo;, 1950, 112 p., p. 1.</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn3" id="ftn3">3</a> &nbsp;Jacques Droz &ldquo;Les historiens fran&ccedil;ais devant l&#39;histoire allemande&rdquo; in <em>Internationaler Gelehrkongress Mainz</em>, Weisbaden, 1956, p. 249.</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn4" id="ftn4">4</a> &nbsp;Jeanne et Fr&eacute;d&eacute;ric Regamey, <em>L&#39;Allemagne ennemie</em>, Paris, Seuil, 1945, 300 p., p. 59.</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn5" id="ftn5">5</a> &nbsp;Robert d&#39;Harcourt, <em>Comment traiter l&#39;Allemagne&nbsp;?</em>, Paris, J. Tallandier, 1946, 80 p., p. 54.</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn6" id="ftn6">6</a> &nbsp;Andr&eacute; Siegfried<em> L&#39;&acirc;me des peuples</em>, Paris, Hachette, 1950, 221 p., p. 135.</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn7" id="ftn7">7</a> &nbsp;Albert Camus, Lettres &agrave; un ami allemand, Paris, Gallimard, NRF, 1945, 80 p., pp. 76-77. Quatri&egrave;me Lettre.</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn8" id="ftn8">8</a> &nbsp;Charles De Gaulle <em>Discours et Messages</em>, Tome 1 &ldquo;Pendant la guerre&rdquo;, Paris, Plon, 1946, 677 p., Discours radiodiffus&eacute; le 10 d&eacute;cembre 1945.</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn9" id="ftn9">9</a> &nbsp;Andr&eacute; Monnier-Zwingelstein, <em>La Prusse &eacute;ternelle</em>, Toulouse, La nouvelle &eacute;dition fran&ccedil;aise, 1945, 162 p.</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn10" id="ftn10">10</a> &nbsp;Jean Bardanne, <em>La guerre pour 1948&nbsp;?</em>, Paris, Editions Siboney, 1946, 221 p.</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn11" id="ftn11">11</a> &nbsp;Ariane Chebel d&#39;Appollonia, &laquo;&nbsp;Les morales de l&#39;autre, les identit&eacute;s nationales&nbsp;&raquo; in <em>L&#39;Autre. Etudes r&eacute;unies pour Alfred Grosser</em>, Paris, Fondation nationale des sciences politiques, 1996, 318 p., p. 138.</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn12" id="ftn12">12</a> &nbsp;Robert Frank, <em>La hantise du d&eacute;clin. La France 1920-1960&nbsp;: finances, d&eacute;fense et identit&eacute; nationale.</em>, Paris, Belin, Temps pr&eacute;sents, 1994, 316 p., p. 226.</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn13" id="ftn13">13</a> &nbsp;Pierre Laborie, <em>L&#39;opinion fran&ccedil;aise sous Vichy. Les Fran&ccedil;ais et la crise d&#39;identit&eacute; nationale 1936-1944</em>, Paris, Seuil, Points histoire, 2001, 406 p., p. 335.</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn14" id="ftn14">14</a> &nbsp;Charles de Gaulle, <em>Discours et Messages</em>, Tome I, op. cit., p. 440. Discours prononc&eacute; &agrave; l&#39;H&ocirc;tel de ville de Paris, le 25 ao&ucirc;t 1944.</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn15" id="ftn15">15</a> &nbsp;Maurice Constantin-Weyer, <em>L&#39;&acirc;me allemande</em>, Paris, Grasset, 1945, 147 p., pp. 104 et 105.</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn16" id="ftn16">16</a> &nbsp;Ces m&ecirc;mes &laquo;&nbsp;caract&egrave;res&nbsp;&raquo; ont &eacute;t&eacute; aussi utilis&eacute;s pour d&eacute;crire et condamner l&rsquo;ordre nazi et son expression concentrationnaire.</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn17" id="ftn17">17</a> &nbsp;Georges Weill, Le probl&egrave;me allemand, Paris, Charlot, 1945, 62 p.</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn18" id="ftn18">18</a> &nbsp;Allocution &agrave; Tr&egrave;ves, &agrave; l&#39;occasion de l&#39;inauguration du canal de Moselle, le 26 mai 1964.</p>