<p class="texte" dir="ltr">La <span style="color:#000000;">vivacit&eacute;</span> de la psychologie politique se mesure par la profondeur de la crise. Il n&#39;est pas question ici de refaire l&#39;inventaire de malaises et de repr&eacute;sentations qui l&#39;accompagnent&nbsp; (Dorna 1998). En revanche, plusieurs &quot;chantiers&quot; se sont re-ouvert, notamment&nbsp;: la m&eacute;moire collective, le discours politique, le n&eacute;o-populisme, le charisme, le machiav&eacute;lisme et surtout l&#39;&eacute;nergie de fond&nbsp;: la crise de la d&eacute;mocratie repr&eacute;sentative. Il y a bien d&#39;autres chantiers qui se d&eacute;veloppent pas &agrave; pas&nbsp;: la citoyennet&eacute;, la justice, la corruption, les m&eacute;dias, les femmes en politique, la d&eacute;mocratie participative, les strat&eacute;gies identitaires, le nouveau syndicalisme, etc. Ces chantiers concernent des pr&eacute;occupations concr&egrave;tes des nos soci&eacute;t&eacute;s et m&eacute;ritent toute notre attention, afin d&#39;essayer, si cela est possible, de r&eacute;soudre, ou d&rsquo;att&eacute;nuer, certains dysfonctionnements socio-politiques qui menacent l&#39;&eacute;quilibre social.</p> <h1 dir="ltr" id="heading1">1. Comprendre les m&eacute;canismes de crise de la soci&eacute;t&eacute; moderne</h1> <p class="texte" dir="ltr">Voil&agrave; un vaste chantier. Comprendre les changements et les crises fait partie de l&#39;enjeu de la psychologie politique. Il faut insister sur un point&nbsp;: la crise actuelle de la modernit&eacute; est d&#39;autant plus profonde qu&#39;elle r&eacute;sulte d&#39;un t&eacute;lescopage des crises pr&eacute;alables. C&#39;est une des raisons qui expliquent en partie l&#39;impuissance du discours politique contemporain et le r&eacute;tr&eacute;cissement de la conscience citoyenne. Pour ce faire, un diagnostic aussi complet que possible se r&eacute;v&egrave;le indispensable. L&#39;art de l&#39;analyse n&eacute;cessite non seulement de cerner les &eacute;l&eacute;ments en jeu et de d&eacute;limiter les enjeux, mais surtout d&#39;en tirer une vision d&#39;ensemble et de proposer une strat&eacute;gie d&#39;ajustement ou de changement.&nbsp;</p> <p class="texte" dir="ltr">Une telle d&eacute;marche n&#39;a pas &eacute;t&eacute; encore clairement envisag&eacute;e, sauf dans un cas exceptionnel&nbsp;: au moment de la mont&eacute;e du fascisme en Allemagne, avec la cr&eacute;ation de l&#39;Institut des Recherches Sociales &agrave; Francfort.</p> <p class="texte" dir="ltr">Pour m&eacute;moire&nbsp;: l&rsquo;&Eacute;cole de Francfort repr&eacute;sente l&rsquo;apport le plus syst&eacute;matique au d&eacute;veloppement de la psychologie politique dans les ann&eacute;es 30 en Allemagne. C&rsquo;est le groupement dans l&rsquo;urgence d&rsquo;un nombre consid&eacute;rable de penseurs, autour d&rsquo;un projet d&rsquo;explication de l&rsquo;autoritarisme antis&eacute;mite et fasciste.</p> <p class="texte" dir="ltr">Les noyaux durs de la r&eacute;flexion sont:</p> <ul> <li> <p class="puces" dir="ltr">sociologiques-&eacute;conomiques: le nazisme n&rsquo;est pas un accident historique, mais le fruit d&rsquo;une conjoncture pr&eacute;cise au regard du d&eacute;veloppement du capitalisme monopoliste.</p> </li> <li> <p class="puces" dir="ltr">politiques: le capitalisme monopoliste trouve une solution &agrave; ses contradictions dans un r&eacute;gime autoritaire fasciste.</p> </li> <li> <p class="puces" dir="ltr">psychologiques: si la soci&eacute;t&eacute; accepte le nazisme, on en d&eacute;couvre la raison dans la formation psychosociale des pr&eacute;jug&eacute;s et de la culture.</p> </li> </ul> <p class="texte" dir="ltr">C&rsquo;est un travail th&eacute;orique consid&eacute;rable et inachev&eacute;. Fortement marqu&eacute;e par le marxisme, l&#39;originalit&eacute; des penseurs de l&#39;&eacute;cole de Francfort porte sur le d&eacute;placement de l&#39;objet d&#39;&eacute;tude &eacute;conomique et politique vers le politique, le psychologique et le culturel. C&#39;est une tentative de reprendre une approche critique de la soci&eacute;t&eacute; de leur &eacute;poque.</p> <p class="texte" dir="ltr">Faut-il rappeler que l&rsquo;arriv&eacute;e d&rsquo;Hitler au pouvoir, en 1933, oblige l&rsquo;Institut &agrave; prendre le chemin de l&rsquo;exil, d&rsquo;abord &agrave; Gen&egrave;ve, puis &agrave; Paris o&ugrave; est publi&eacute; l&rsquo;ouvrage collectif <em>&laquo;&Eacute;tudes sur l&rsquo;autorit&eacute; et la famille&raquo;</em> en l936, ensuite &agrave; Londres, et finalement &agrave; New York&nbsp;&nbsp; Leurs travaux sont encore des outils puissants pour comprendre les processus de crise de la soci&eacute;t&eacute; et de la culture occidentales.</p> <p class="texte" dir="ltr">Quelques membres de l&rsquo;&Eacute;cole de Francfort ont marqu&eacute; profond&eacute;ment la psychologie sociale dans son approche de la politique. Notamment:</p> <p class="texte" dir="ltr">Max Korkheimer (1895-1973), directeur &agrave; partir de 1930 du groupe des chercheurs, est un analyste des m&eacute;canismes de socialisation. Il d&eacute;veloppe dans <em>&laquo;Autorit&eacute; et famille&raquo;</em> (1935) la th&egrave;se selon laquelle la disproportion entre ce que la soci&eacute;t&eacute; promet &agrave; ses membres et ce qu&rsquo;elle leur accorde, joue un r&ocirc;le tr&egrave;s important dans la formation de la personne. La famille est le ciment et le lien psychologique par lequel la soci&eacute;t&eacute; impr&egrave;gne l&rsquo;enfant de la structure sociale sp&eacute;cifique qui lui correspond ainsi &agrave; l&rsquo;&acirc;ge adulte. C&#39;est le terrain pr&eacute;dispos&eacute; &agrave; la production des pr&eacute;jug&eacute;s sociaux. Le nationalisme (allemand) s&rsquo;explique &agrave; travers ces param&egrave;tres.</p> <p class="texte" dir="ltr">Eric Fromm (1900-1980) est un autre des th&eacute;oriciens dont la formation psychanalytique est h&eacute;t&eacute;rodoxe. Tr&egrave;s t&ocirc;t, il d&eacute;veloppe une interpr&eacute;tation qui s&rsquo;&eacute;carte de la pens&eacute;e dominante m&ecirc;me &agrave; l&#39;int&eacute;rieur du groupe de Francfort. L&rsquo;homme n&rsquo;est pas fig&eacute; dans une nature biologique, dit-il, s&rsquo;opposant &agrave; Freud. La nature de l&rsquo;homme, ses passions et ses angoisses sont un produit de la culture. Il s&rsquo;inscrit ainsi comme l&rsquo;un des fondateurs de la tendance &laquo;culturaliste&raquo; qui conna&icirc;tra un d&eacute;veloppement formidable aux &Eacute;tats-Unis autour de M. Mead et K. Horney.</p> <p class="texte" dir="ltr">L&rsquo;ambition de Fromm est de r&eacute;interpr&eacute;ter Freud selon Marx. La libert&eacute; (dit-il) est un fardeau quand les conditions &eacute;conomiques et politiques la rendent illusoire. Ce sentiment acc&eacute;l&egrave;re le besoin de s&rsquo;int&eacute;grer autrement dans la soci&eacute;t&eacute;. Le sujet, dont la frustration est devenue insupportable, remplace les d&eacute;terminismes de l&rsquo;enfance (famille) par ceux qui &eacute;mergent des structures sociales autoritaires (rassurantes) et des actions d&rsquo;&eacute;vasion. Cela s&rsquo;accompagne d&rsquo;un &eacute;tat psychologique paradoxal&nbsp;: les gens ne sont pas conscients de leurs besoins de conformisme. Ils vivent dans l&rsquo;illusion de leur autonomie. En fait, le consensus leur fournit la preuve de la justesse de leurs croyances. C&rsquo;est la recherche par des millions d&rsquo;hommes d&rsquo;un refuge contre la &laquo;peur de la libert&eacute;&raquo; qui explique l&rsquo;autoritarisme: &laquo;le nazisme est un ph&eacute;nom&egrave;ne &eacute;conomique et politique, &eacute;crit-il, dont les r&eacute;percussions sur l&rsquo;ensemble d&rsquo;un peuple doivent &ecirc;tre expliqu&eacute;es en termes de psychologie&raquo;.</p> <p class="texte" dir="ltr">Theodor Adorno (1903-1970). Philosophe de la culture, musicologue de renomm&eacute;e mondiale, th&eacute;oricien marxiste et psychologue politique, dont l&#39;&oelig;uvre se r&eacute;v&egrave;le &ecirc;tre le vecteur de la r&eacute;union de tendances th&eacute;oriques et m&eacute;thodologiques diverses, et m&ecirc;me contradictoires. Cependant ce sont les recherches sur &laquo;la personnalit&eacute; autoritaire&raquo; qui ont rendu Adorno intens&eacute;ment connu dans le milieu psychologique. Elles ont fait de lui un des piliers de la psychologie politique contemporaine.</p> <p class="texte" dir="ltr">Reprenons le fil central de nos propos. Dans l&#39;histoire collective (autant qu&#39;individuelle), les crises sont des p&eacute;riodes critiques (l&#39;&eacute;tymologie est la m&ecirc;me: discerner, d&eacute;cider, juger) entre deux &eacute;quilibres. C&#39;est le moment d&eacute;cisif pour envisager les formes du passage, et pour &eacute;viter des cons&eacute;quences incontr&ocirc;l&eacute;es. La crise est une conjoncture accoucheuse d&#39;id&eacute;es novatrices et de comportements extr&ecirc;mes. La dynamique et l&#39;&eacute;nergie des crises sont en relation directe avec l&#39;id&eacute;e que les hommes se font des cons&eacute;quences de leurs actions.</p> <p class="texte" dir="ltr">Pour le psychopolitologue, dont le regard est nuanc&eacute;, les effets des crises sont multiples&nbsp;: perturbations &eacute;motionnelles, troubles devant le d&eacute;sordre et l&#39;incertitude. Surtout, il faut ne pas oublier que les changements issus des crises sont associ&eacute;s, dans le v&eacute;cu des sujets, &agrave; des sentiments d&#39;incompr&eacute;hension, d&#39;ins&eacute;curit&eacute;, d&#39;anxi&eacute;t&eacute;, de souffrance, d&#39;espoir et de d&eacute;ception.</p> <p class="texte" dir="ltr">Le sympt&ocirc;me majeur d&#39;une crise sociale profonde, &eacute;crit Ridel (1991), est la d&eacute;structuration de l&#39;identit&eacute; collective et individuelle. L&#39;homme est confront&eacute; dans des situations critiques &agrave; un cadre flou et souvent chaotique, il n&#39;arrive pas &agrave; se faire une id&eacute;e d&#39;ensemble ni &agrave; trouver un fil conducteur. Il &eacute;prouve le sentiment d&#39;&ecirc;tre dans un d&eacute;dale incompr&eacute;hensible o&ugrave; personne ne semble capable de mettre l&#39;ordre du monde &agrave; la port&eacute;e de tous. Observ&eacute; de mani&egrave;re (quasi) clinique, l&#39;homme qui cherche du sens au c&oelig;ur d&#39;une crise sociale profonde est une masse qui s&#39;ignore, une force qui se pense faible, un questionnement multiple dans l&#39;attente d&#39;un &eacute;clairage qui ordonne le monde confus d&#39;une mani&egrave;re simple. Cet &eacute;tat psychologique est un processus social, un mouvement au rythme asynchrone. Une acc&eacute;l&eacute;ration peut se d&eacute;clencher &agrave; tout instant, car les forces politiques et sociales se mettent en marche g&eacute;n&eacute;ralement &agrave; la suite d&#39;&eacute;v&eacute;nements mineurs.</p> <p class="texte" dir="ltr">La crise est le r&eacute;sultat d&#39;une interruption (plus ou moins aigu&euml;) des liens entre le v&eacute;cu imm&eacute;diat et le cumul d&#39;explications acquises par la personne dans son interaction avec le milieu social. L&#39;homme est un animal intersubjectif, qui a besoin, pour se coordonner avec les autres hommes, d&#39;une image coh&eacute;rente du monde. C&#39;est une figure de protection, qui fixe la conscience imm&eacute;diate, la mani&egrave;re d&#39;&ecirc;tre per&ccedil;u par les autres, l&#39;estime de soi et les &eacute;motions. Ici, la crise est un processus de r&eacute;-organisation de l&#39;exp&eacute;rience personnelle. Il n&#39;y a pas un ordre (externe) objectif, normal et salutaire, et universellement explicable. Aussi la crise est-elle une &eacute;mergence, c&#39;est une coupure du sens et de la continuit&eacute; temporelle de l&#39;unicit&eacute;. Le d&eacute;bordement &eacute;motionnel affaiblit la conscience&nbsp;; la personne ne r&eacute;ussit pas &agrave; &eacute;chapper &agrave; l&#39;exp&eacute;rience imm&eacute;diate du danger&nbsp;; le cadre perceptible (le degr&eacute; de conscience) se r&eacute;tr&eacute;cit&nbsp;; le processus d&#39;int&eacute;gration des perceptions (nouvelles) et les m&eacute;canismes de la coh&eacute;rence se font plus rigides. L&#39;&eacute;pisode psychotique repr&eacute;sente un cas extr&ecirc;me, o&ugrave; la s&eacute;paration entre l&#39;exp&eacute;rience imm&eacute;diate et l&#39;explication &eacute;voqu&eacute;e devient brutale.</p> <p class="texte" dir="ltr">En cons&eacute;quence, le diagnostic de la soci&eacute;t&eacute; actuelle est un v&eacute;ritable d&eacute;fi &eacute;pist&eacute;mologique sur l&#39;importance des croyances. Les travaux r&eacute;cents de Garzon et Seoane (1996) sur les syst&egrave;mes de croyances &quot;postmodernes&quot; s&#39;inscrivent dans cette perspective. Ils renouvellent l&#39;&eacute;tude des mentalit&eacute;s et de l&#39;historicit&eacute; psychologique. Un mod&egrave;le g&eacute;n&eacute;ral &agrave; partir de trois dimensions (politique, sociale et culturelle) est propos&eacute;. La dimension politique est le reflet de la volont&eacute; et la direction de ce que les hommes veulent &agrave; un moment donn&eacute;&nbsp;; la dimension culturelle correspond &agrave; leurs repr&eacute;sentations du monde et la dimension sociale n&#39;est rien d&#39;autre que l&#39;expression de leurs sentiments.</p> <p class="texte" dir="ltr">Enfin, pour mieux comprendre le sens et l&#39;irruption des crises, il est prioritaire non seulement d&#39;actualiser certains th&egrave;mes (par exemple la soumission &agrave; l&#39;autorit&eacute;, le mod&egrave;le de la personnalit&eacute; d&eacute;mocratique, la personnalit&eacute; machiav&eacute;lique) mais encore d&#39;explorer la psychopathologie des situations, le leadership charismatique, l&#39;exp&eacute;rimentation des comportements de contre-pouvoir, d&#39;examiner les m&eacute;thodes d&#39;&eacute;ducation civique, les tests de coh&eacute;sion sociale, la connaissance du rythme politique, l&#39;int&eacute;grisme sous ses diverses formes.</p> <h1 dir="ltr" id="heading2">2. La m&eacute;moire sociale&nbsp;: un chantier strat&eacute;gique en reconstruction</h1> <p class="texte" dir="ltr">La m&eacute;moire collective est un de plus riches chantiers dont dispose la psychologie politique actuellement. Si les sources sont anciennes, Bartlett, Berr, Blondel, Halbwachs et d&#39;autres, l&#39;actualisation est en cours et tisse une toile tr&egrave;s &eacute;tendue qui englobe d&#39;autres disciples anciennement proches, mais jusqu&#39;&agrave; pr&eacute;sent cloisonn&eacute;es par les structures acad&eacute;miques.</p> <p class="texte" dir="ltr">C&#39;est le cas en France ces derni&egrave;res ann&eacute;es o&ugrave;, dans le cadre de la psychologie sociale et clinique, de nombreuses &eacute;tudes, Jodelet (1992), Rouquette (1994), Hass (1997), Kiss (1999), Laurens et Roussiau (2002) mettent en relief d&#39;une mani&egrave;re tr&egrave;s pertinente le r&ocirc;le et la port&eacute;e de la m&eacute;moire dans les contextes politiques.</p> <p class="texte" dir="ltr">H. Arendt (1972) avait &eacute;voqu&eacute; jadis, &agrave; propos du proc&egrave;s d&#39;Eichmann, la signification psychopolitique et le fonctionnement technocratique de la machine meurtri&egrave;re du nazisme, mais c&#39;est l&#39;analyse de Jodelet (1999) qui met en lumi&egrave;re la signification de la m&eacute;moire dans les conflits entre les propres victimes lors du jugement de Barbie. Par ailleurs, l&#39;&eacute;tude monographique de Hass (1999) articule finement la m&eacute;moire collective avec le processus identitaire, en fonction des traces historiques qui impr&egrave;gnent l&#39;histoire de la ville de Vichy. L&#39;essai de Rouquette sur la psychologie des masses r&eacute;serve une belle place &agrave; la m&eacute;moire sociale, mais sans l&#39;analyser directement. Quant au travail clinico-social de Kiss (1999) sur l&#39;ob&eacute;issance&nbsp; contraire aux droits humains, il &eacute;claire les processus de la m&eacute;moire, &agrave; partir des entretiens, concernant des &quot;collabos&quot;, des tortionnaires, des criminels de guerre et des dictateurs.</p> <p class="texte" dir="ltr">D&#39;autres contributions sont &agrave; retrouver dans les travaux du sociologue Namer (1987) &agrave; la fois sur l&#39;&oelig;uvre d&#39;Halbwachs et les pratiques comm&eacute;moratives en France. Le philosophe Debray (1998) propose une grille de lecture tr&egrave;s &eacute;rudite sur les &quot;monuments&quot; comme m&eacute;diation de la m&eacute;moire collective. Le monument cache une trag&eacute;die&nbsp;: c&#39;est une masse mise en valeur par le vide, &eacute;crit-il. C&#39;est le jeu entre l&#39;oubli et le motif. Le para&icirc;tre qui risque de ne rester qu&#39;un vestige en l&#39;absence d&#39;une &eacute;ducation publique du sens. La m&eacute;moire est une affaire de pouvoir, tel que certains le posent aujourd&#39;hui.&nbsp;</p> <p class="texte" dir="ltr">Par ailleurs, faut-il insister, la m&eacute;moire n&#39;est pas une chose. Elle est changeante, mais ob&eacute;it &agrave; des r&egrave;gles de transformation&nbsp;; elle est &agrave; la fois s&eacute;lective et culturelle&nbsp;; elle incorpore les exp&eacute;riences, afin de fabriquer de nouvelles coh&eacute;rences au fur et &agrave; mesure que les &eacute;v&egrave;nements se passent, se stockent et s&#39;actualisent. Processus historique et social donc. Un &quot;bricolage&quot; de pi&egrave;ces d&#39;origines diff&eacute;rentes dans une coh&eacute;rence culturelle nouvelle.</p> <p class="texte" dir="ltr">Toutefois, la m&eacute;moire travaille &agrave; la fois pour oublier et se souvenir. Il y a l&agrave; une sorte de solidarit&eacute; des termes, puisque les donn&eacute;es de la m&eacute;moire ne sont pas fixes pour toujours. La synergie de la m&eacute;moire se manifeste dans le rapport entre l&#39;affectif et la raison au sein d&#39;une histoire, d&#39;une culture et d&#39;une soci&eacute;t&eacute;. Mais, bien entendu, tout ne se passe pas sans conflits. Quant le pass&eacute; poss&egrave;de une autorit&eacute; transcendante, le pr&eacute;sent se reproduit,&nbsp; c&#39;est la dimension &quot;normative&quot; de la m&eacute;moire sociale&nbsp;; mais le conflit est latent avec ceux qui sont attir&eacute;s par le changement. C&#39;est la dimension &quot;innovatrice&quot;, chacun s&#39;approprie le pass&eacute; selon ses re-lectures et ses inserts. Certes, ce conflit n&#39;est pas inexorable&nbsp;: la tradition peut incorporer les innovations et vice versa.</p> <p class="texte" dir="ltr">La tradition, &eacute;crit Trompson (1995), concerne quatre &eacute;l&eacute;ments&nbsp;:</p> <p class="texte" dir="ltr">L&#39;herm&eacute;neutique&nbsp;: il y a un cadre perceptif avec lequel les individus et les masses s&#39;expliquent la r&eacute;alit&eacute; et donnent sens au pr&eacute;sent en fonction des exp&eacute;riences pass&eacute;es&nbsp;;</p> <ul> <li> <p class="puces" dir="ltr">Le normatif&nbsp;: c&#39;est le <span style="color:#000000;"><em>magistra vit&aelig;.</em></span>&nbsp; La tradition donne la d&eacute;finition de ce qui est licite, tol&eacute;rable, acceptable ou ne l&#39;est pas dans une situation donn&eacute;e,</p> </li> <li> <p class="puces" dir="ltr">L&#39;identitaire&nbsp;: la tradition collabore &agrave; d&eacute;fendre l&#39;identit&eacute; sociale,&nbsp; &agrave; en rendre la sp&eacute;cificit&eacute; et m&ecirc;me &agrave; fournir une &quot;strat&eacute;gie identitaire&quot; (Cuche 1999)&nbsp;;</p> </li> <li> <p class="puces" dir="ltr">La l&eacute;gitimation&nbsp;: la m&eacute;moire des mythes fondateurs est source de la l&eacute;gitimit&eacute; du pouvoir traditionnel.</p> </li> </ul> <p class="texte" dir="ltr">Cette grille s&#39;av&egrave;re utile dans l&#39;analyse des &quot;corr&eacute;lations de forces&quot; entre les dimensions normatives et innovantes. Mais c&#39;est un tort de croire que la seconde remplace clairement la premi&egrave;re. La soci&eacute;t&eacute; a tendance &agrave; consolider une m&eacute;moire officielle dans une n&eacute;buleuse de souvenirs devenus symboles et presque invisibles &agrave; l&#39;&oelig;il nu. Paroles perdues donc&nbsp;? C&#39;est l&agrave; que l&#39;actualisation des m&eacute;moires peut constituer une strat&eacute;gie de r&eacute;sistance. Car l&#39;histoire officielle finit, malgr&eacute; elle ou &agrave; cause d&#39;elle, par devenir une ali&eacute;nante source de domination.</p> <p class="texte" dir="ltr">C&#39;est l&agrave; que la m&eacute;moire peut &ecirc;tre per&ccedil;ue comme un espace strat&eacute;gique de r&eacute;sistance. La pr&eacute;sence d&#39;un ph&eacute;nom&egrave;ne &quot;charismatique&quot; (Dorna 1998 a) au sein d&#39;une soci&eacute;t&eacute; dans un moment de crise, o&ugrave; l&#39;affectif et la logique du politique s&#39;affrontent, est propice &agrave; l&#39;actualisation de la m&eacute;moire innovatrice.</p> <p class="texte" dir="ltr">Pour illustrer, bri&egrave;vement, ces propos, il est utile de faire appel &agrave; une situation actuelle largement m&eacute;diatis&eacute;e de surcro&icirc;t&nbsp;: l&#39;irruption de l&#39;arm&eacute;e zapatiste de lib&eacute;ration nationale (EZLN) au Mexique et l&#39;&eacute;mergence d&#39;un leader charismatique (Marcos), dont la parole, la <span style="color:#000000;">pers&eacute;v&eacute;rance</span> et la strat&eacute;gie m&eacute;diatique marquent un tournant dans l&#39;histoire politique de ce pays. C&#39;est au fond un vrai cas d&#39;&eacute;cole pour l&#39;&eacute;tude de la m&eacute;moire collective politique. Ici, la relation sujet-histoire-m&eacute;moire-politique se montre &agrave; ciel ouvert.</p> <p class="texte" dir="ltr">L&#39;EZLN est porteuse d&#39;une histoire (populaire) et d&#39;un discours (politique) o&ugrave; la m&eacute;moire de la nation indig&egrave;ne repr&eacute;sente le pivot central. C&#39;est un d&eacute;fi &agrave; la culture r&eacute;ifi&eacute;e et &agrave; l&#39;id&eacute;ologie de la fin de l&#39;histoire, qui exprime le besoin de red&eacute;finir les termes de la relation entre d&eacute;mocratie et n&eacute;o-lib&eacute;ralisme, l&#39;id&eacute;e de la soci&eacute;t&eacute; civile comme sujet historique et la question de l&#39;indig&eacute;nisme et du sort des opprim&eacute;s.</p> <p class="texte" dir="ltr">&Eacute;trange m&eacute;lange de tradition et de modernit&eacute;, de culturalisme et de cosmopolitisme, de figures r&eacute;volutionnaires et d&#39;une utilisation &eacute;tonnante des m&eacute;dias. Il y a l&agrave; une vision transversale des enjeux id&eacute;ologiques actuels et une volont&eacute; de d&eacute;passement des impasses de la mondialisation. Ainsi, le discours zapatiste fait-il la critique de la d&eacute;mocratie (repr&eacute;sentative) dominante et d&#39;une politique institutionnelle oligarchique devenue une &quot;cage de fer&quot; pour le peuple. Le zapatisme (r&eacute;)introduit la question de la subjectivit&eacute; dans la politique et le r&ocirc;le (psychologique) de l&#39;histoire dans la politique contingente.</p> <p class="texte" dir="ltr">La m&eacute;moire s&#39;illustre par des images fortes. Voir Marcos &agrave; cheval et les armes en bandouli&egrave;re est une image que la m&eacute;moire collective mexicaine actualise, car c&#39;est le rappel d&#39;un personnage l&eacute;gendaire: Zapata. Si Marcos renvoie &agrave; Zapata, ce dernier renvoie &agrave; la figure du g&eacute;n&eacute;ral Morelos, qui s&#39;enracine &agrave; son tour dans la m&eacute;moire biblique.</p> <p class="texte" dir="ltr">L&#39;histoire est un encha&icirc;nement de souvenirs fait d&#39;images, dont le pouvoir et la politique se servent, soit pour les effacer, soit pour les utiliser comme des drapeaux ou les ritualiser. D&#39;o&ugrave; l&#39;observation classique&nbsp;: l&#39;avenir n&#39;est que le reflet de la mani&egrave;re dont le pass&eacute; est trait&eacute;.</p> <p class="texte" dir="ltr">Finalement, il semble utile, afin de d&eacute;montrer encore le besoin de revenir sur la question de fond de la m&eacute;moire politique que pose la psychologie politique: re-construire un regard d&#39;ensemble. Non seulement au sens de la r&eacute;-introduction du sujet, dont tous conviennent, mais de d&eacute;battre avec ceux qui tendent &agrave; fragmenter l&#39;histoire-sujet elle-m&ecirc;me.</p> <p class="texte" dir="ltr">L&#39;important travail des historiens sur la m&eacute;moire des lieux l&#39;illustre parfaitement&nbsp;: Pour ce faire, ils fragmentent l&#39;unit&eacute; nationale et proposent implicitement une politique d&eacute;centralis&eacute;e. C&#39;est de la micro-histoire&nbsp;:&nbsp;l&rsquo;histoire &eacute;v&eacute;nementielle, qui s&#39;oppose &agrave; l&#39;histoire comme processus.</p> <p class="texte" dir="ltr">En somme&nbsp;: il n&#39;y a plus une histoire g&eacute;n&eacute;rale&hellip; ni une identit&eacute; commune, mais une parcellisation. C&#39;est l&agrave; une mani&egrave;re subtile de gommer une histoire pass&eacute;e pour nouer des liens<em> in&eacute;dits </em>avec le pass&eacute; au service d&#39;un pr&eacute;sent. Les r&eacute;sonances de la m&eacute;moire ne sont pas innocentes ni sans perversions possibles.</p> <h1 dir="ltr" id="heading3">3. Le discours politique&nbsp;: un chantier en permanente reconstruction</h1> <p class="texte" dir="ltr">Le plus classique des moyens politiques est le discours. C&#39;est un chantier in&eacute;puis&eacute; et in&eacute;puisable. La recherche en France est riche, immense et p&eacute;riodiquement r&eacute;examin&eacute;e, avec&nbsp; des r&eacute;sultats encore fort limit&eacute;s.</p> <p class="texte" dir="ltr">Les travaux sur les discours politiques se sont multipli&eacute;s ces derni&egrave;res ann&eacute;es, les r&eacute;f&eacute;rences universitaires en t&eacute;moignent (Cotteret 1973, Guespin 1984, Bellenger 1992, Brechon 1994, Breton 1996). Mais c&#39;est dans le cadre de la &quot;communication contractuelle&quot; (Ghiglione <em>et al</em>. 1986, Ghiglione <em>et al</em> 1989, Dorna et Ghiglione 1990, Dorna 1995, Ghiglione et Bromberg 1998), qu&#39;on peut constater les&nbsp; avanc&eacute;es les plus significatives. Le discours est un processus dialectique de co-construction de la r&eacute;alit&eacute;&nbsp;; la r&eacute;alit&eacute; sociale n&#39;est pas une donn&eacute;e que le langage ne ferait que traduire, copier, v&eacute;hiculer, mais une r&eacute;alit&eacute; qui se construit (se renouvelle) par des transactions s&eacute;mantiques que les personnes actualisent dans leurs interactions sociales. Le postulat de base se r&eacute;sume ainsi: toute parole est &agrave; vis&eacute;e persuasive. D&#39;autres &eacute;tudes (Argentin, Ghiglione et Dorna (1990), Dorna (1991), proposent comme compl&eacute;ment&nbsp; une grille d&#39;analyse gestuelle du discours, afin d&#39;identifier l&#39;impact persuasif des gestes dans une situation politique r&eacute;elle et directe.</p> <p class="texte" dir="ltr">Ces recherches de laboratoire ont permis de d&eacute;gager quelques postulats th&eacute;oriques&nbsp;:</p> <ul> <li> <p class="puces" dir="ltr">la parole politique fait partie du paradigme de l&#39;influence et de la persuasion sociale&nbsp;;</p> </li> <li> <p class="puces" dir="ltr">le discours politique vise un but: faire agir l&#39;autre dans le sens souhait&eacute; par la source&nbsp;;</p> </li> <li> <p class="puces" dir="ltr">il y a toujours dans le processus de persuasion discursive un enjeu quelle que soit l&#39;importance de celui-ci&nbsp;;</p> </li> <li> <p class="puces" dir="ltr">il y a des patterns strat&eacute;giques et des logiques persuasives&nbsp;;</p> </li> <li> <p class="puces" dir="ltr">la persuasion discursive, sp&eacute;cialement en politique, est articul&eacute;e, &agrave; la fois, par une logique du vraisemblable et des contrats de communication dans des situations &agrave; des moments donn&eacute;s.</p> </li> </ul> <p class="texte" dir="ltr">Trognon et Larrue (1994) participent &agrave; la recherche sur le discours politique avec un autre outil m&eacute;thodologique: l&#39;analyse conversationnelle dans le cadre de la linguistique pragmatique. C&#39;est la parole d&#39;affrontement dans un d&eacute;bat public ou lors d&#39;&eacute;changes de points de vue entre militants. Dans un cas comme dans l&#39;autre s&#39;op&egrave;re une co-construction du r&eacute;f&eacute;rent, dont on d&eacute;c&egrave;le les &eacute;changes successifs. Tout se passe dans le cadre des r&egrave;gles conversationnelles et c&#39;est la r&egrave;gle d&#39;alternance qui se r&eacute;v&egrave;le une pi&egrave;ce-clef de la strat&eacute;gie discursive.</p> <p class="texte" dir="ltr">Les discours politiques, analys&eacute;s par divers m&eacute;thodes, montrent tous le poids s&eacute;mantique des mots et la force persuasive de la retordre dans le cadre des strat&eacute;gies argumentatives. C&#39;est ainsi que les grands d&eacute;bats &agrave; la t&eacute;l&eacute;vision offrent les moments les plus frappants de la manipulation par les mots. L&#39;affrontement entre Mitterand et Giscard (Labb&eacute; 1963) reste un classique&nbsp;: le vocabulaire de Mitterrand ne se diff&eacute;rencie pas - malgr&eacute; sa richesse lexicale - de celui des autres hommes politiques de son &eacute;poque. Or,&nbsp; c&#39;est son caract&egrave;re aristocratique qui le rendait redoutable et lui permettait, &agrave; travers un choix des figures, de garder une distance &agrave; la fois polie et fascinante. Aussi la machine rh&eacute;torique de J. Chirac est redoutable&nbsp;: les &eacute;changes vifs du d&eacute;bat Chirac-Fabius (Ghiglione et al 1989) est un des exemples &agrave; retenir dans les anthologies de l&#39;analyse du discours politique. C&#39;est l&agrave; que la ma&icirc;trise et la lourdeur de la technique rh&eacute;torique de Chirac l&#39;a emport&eacute; sur le discours lise et technocratique de Fabius.&nbsp;&nbsp;</p> <p class="texte" dir="ltr">Force est de constater que l&#39;ensemble de ces travaux fait du discours seulement le lieu d&#39;articulation entre la langue et les conditions (sociologiques) de la production discursive. Ainsi, le discours politique est-il vid&eacute; de ses autres composants, notamment de l&#39;&eacute;motion. Certes, la reconnaissance d&#39;une intentionnalit&eacute; demeure, mais son traitement purement cognitif ne prend pas en compte&nbsp; la partie affective. La t&acirc;che reste donc inachev&eacute;e. Il y a l&agrave;, de toute &eacute;vidence, une nouvelle piste pour un travail empirique. Question &agrave; v&eacute;rifier.</p> <h1 dir="ltr" id="heading4">4. La crise politique actuelle&nbsp;: d&eacute;mocratie repr&eacute;sentative et r&eacute;publique</h1> <p class="texte" dir="ltr">Certains redoutent l&#39;&eacute;tude de la crise politique moderne&nbsp;; loin d&#39;&ecirc;tre un probl&egrave;me th&eacute;orique, c&#39;est une question&nbsp; &eacute;minemment pratique. C&#39;est l&#39;acceptation passive d&#39;un consensus mou qui renforce le statu quo et le glissement vers un mode d&#39;existence o&ugrave; la volont&eacute; citoyenne est remplac&eacute;e par la volont&eacute; d&#39;une nouvelle caste d&#39;experts et de technocrates solidement incrust&eacute;s dans toutes les sph&egrave;res d&eacute;cisionnelles, marquant ainsi la subordination du politique (l&#39;int&eacute;r&ecirc;t g&eacute;n&eacute;ral) au corporatisme des int&eacute;r&ecirc;ts particuliers. Les institutions politiques sont touch&eacute;es de plein fouet. Quelques-unes (la justice, le Parlement, le gouvernement, l&#39;&eacute;ducation, la R&eacute;publique) ne sont plus en accord, dans leur fonctionnement, ni avec les principes fondateurs ni avec la demande actuelle. N&#39;est-il pas &eacute;vident que l&#39;actuelle Constitution fran&ccedil;aise fige encore davantage l&#39;action politique. La d&eacute;rive est devenue visible y compris dans un domaine o&ugrave; la r&eacute;flexion semblait bien arr&ecirc;t&eacute;e&nbsp;: l&#39;&Eacute;tat de droit. Car force est de constater (Gueraine 1998) que l&#39;influence croissante du pouvoir constitutionnel sur la soci&eacute;t&eacute; s&#39;accompagne d&#39;un malaise intense. Le consensus l&eacute;gal d&eacute;mocratique ronge de l&#39;int&eacute;rieur le r&eacute;gime d&eacute;mocratique lui-m&ecirc;me. Faut-il rappeler que le d&eacute;clin de la volont&eacute; politique marque la fin de l&#39;int&eacute;gration des hommes dans la soci&eacute;t&eacute; politiqu&nbsp;? Le trop de droit risque de tuer le droit &agrave; faire de la politique sans interm&eacute;diaires. C&#39;est dans ce contexte que divers travaux, dans des domaines tr&egrave;s varies (travail, prisons, h&ocirc;pitaux, &eacute;coles, municipalit&eacute;s), profilent une recherche sur les remparts de la d&eacute;mocratie participative o&ugrave; se m&ecirc;lent &agrave; la fois les questions des droits humains et les principes du contre-pouvoir. L&#39;&eacute;l&eacute;ment clef de ce mouvement de ressourcement social reste, dans la tradition fran&ccedil;aise (Duchesne 1998) la notion de citoyen.</p> <p class="texte" dir="ltr">Le syst&egrave;me d&eacute;mocratique repr&eacute;sentatif moderne (Manin 1995) est une savante alchimie de r&eacute;gimes politiques contradictoires. Un compromis entre l&#39;autoritarisme monarchique et le lib&eacute;ralisme utopique. Et, si la d&eacute;marche moderne reste incertaine, l&#39;ancienne est encore enracin&eacute;e. La raison en est simple et la forme complexe. A la diff&eacute;rence de celui d&#39;hier, le monde d&#39;aujourd&#39;hui se pr&eacute;cipite vers l&#39;avenir sans se donner le temps de saisir le pr&eacute;sent ni de se souvenir du pass&eacute;. Les points de rep&egrave;re &agrave; l&#39;&eacute;chelle individuelle diff&egrave;rent de ceux de l&#39;&eacute;chelle collective. La perception en est proche, mais virtuelle. Vouloir percevoir le monde dans sa globalit&eacute; contradictoire est une charge psychologique trop lourde. D&#39;o&ugrave; son caract&egrave;re s&eacute;lectif, dont une des cons&eacute;quences est l&#39;effritement des valeurs communes. Ainsi, morale et politique se cherchent dans un jeu de cache-cache pol&eacute;mique qui conduit &agrave; des impasses. Ce sont des impasses o&ugrave; l&#39;id&eacute;al grec de <em>virtus</em> s&#39;est transform&eacute; en simple repr&eacute;sentation au sens sc&eacute;nique du terme&nbsp;et la volont&eacute; en r&eacute;signation. Myopie ou d&eacute;mission&nbsp;? Ce n&#39;est pas l&#39;absence de lucidit&eacute; qui caract&eacute;rise les hommes politiques dans les situations critiques, mais l&#39;absence de courage.</p> <p class="texte" dir="ltr">L&#39;affaiblissement des valeurs r&eacute;publicaines et l&#39;affaissement des institutions d&eacute;mocratiques rend de plus en plus l&eacute;gitimes les pratiques de manipulation et la d&eacute;magogie. Aussi l&#39;ambigu&iuml;t&eacute; est-elle de retour en d&eacute;mocratie, mais avec un &eacute;l&eacute;ment suppl&eacute;mentaire et auto-mutilatoire&nbsp;: la stagnation. C&#39;est une telle d&eacute;mocratie qui est en train de produire une R&eacute;publique sans r&eacute;publicains et une &eacute;lite machiav&eacute;lique et technicienne.</p> <h1 dir="ltr" id="heading5">5. L&#39;ambigu&iuml;t&eacute; de la post-modernit&eacute;&nbsp;: l&#39;homme d&eacute;mocratique est-il machiav&eacute;lique&nbsp;?</h1> <p class="texte" dir="ltr">La question des &eacute;lites est toujours au c&oelig;ur des impasses et le machiav&eacute;lisme dans les raisonnements des hommes de pouvoir. Le Bon n&#39;a-il pas d&eacute;sign&eacute; Machiavel comme le premier des psychologues de la politique&nbsp;? Mosca et Pareto n&#39;ont-ils montr&eacute; les m&eacute;canismes de la circulation des &eacute;lites et leurs pratiques suicidaires&nbsp;?</p> <p class="texte" dir="ltr">Bien entendu, la r&eacute;flexion th&eacute;orique sur le machiav&eacute;lisme a gagn&eacute; en ampleur&nbsp;: cinq si&egrave;cles de pol&eacute;miques se sont t&eacute;lescop&eacute;s. La psychologie politique retrouve avec le machiav&eacute;lisme (Dorna 2001) un ancien chantier cognitif qui fait le lien avec la crise du politique.</p> <p class="texte" dir="ltr">La repr&eacute;sentation que se font les hommes ordinaires de la situation de crise actuelle &eacute;voque un parfum de puissance machiav&eacute;lique. Le pouvoir politique r&eacute;publicain (issu des valeurs de la modernit&eacute;) est de plus en plus per&ccedil;u comme une oligarchie technocratique, paradoxalement &agrave; l&#39;aide des st&eacute;r&eacute;otypes anciens avec lesquels le machiav&eacute;lisme vulgaire est jug&eacute;&nbsp;: cynisme, manipulation, fourberie, arrogance, froideur, m&eacute;pris, langue de bois, et surtout raison d&#39;&Eacute;tat. D&#39;o&ugrave; quelques questions (im)pertinentes &agrave; l&#39;&eacute;gard des &eacute;lites modernes: Et si le progr&egrave;s n&#39;en &eacute;tait pas u&nbsp;? Et si l&#39;&eacute;vocation des droits n&#39;&eacute;tait qu&#39;une grande mascarade bien orchestr&eacute;e par une &eacute;lite machiav&eacute;liqu&nbsp;? Et si l&#39;absence de morale politique des gouvernants &eacute;tait directement responsable d&#39;un &eacute;touffement juridique qui semble vider de sens l&#39;action politique au profit des <em>condottieri&nbsp;?</em></p> <p class="texte" dir="ltr">Questions qui renvoient au pr&eacute;tendu amoralisme de la pens&eacute;e machiav&eacute;lique. L&#39;ambigu&iuml;t&eacute; des situations de crise rend la morale insaisissable. N&#39;est-ce pas dans de tels moments, o&ugrave; tout se vaut, que des personnages bariol&eacute;s et volontaristes &eacute;mergent de partou&nbsp;? Cette pens&eacute;e n&#39;est-elle pas l&#39;expression d&#39;un sentiment profond de vide collectif dans des p&eacute;riodes charni&egrave;res et des grandes mutations&nbsp;? N&#39;est-elle pas l&#39;int&eacute;riorisation de l&#39;&eacute;clatement d&#39;individualit&eacute;s dont la volont&eacute; de puissance semble sans mesure&nbsp;?&nbsp; Le m&eacute;rite de Machiavel consiste probablement &agrave; avoir observ&eacute; avec acuit&eacute;, dans un contexte boulevers&eacute;, les rapports des hommes politiques avec le pouvoir, de ces m&ecirc;mes hommes avec d&#39;autres hommes, et &eacute;clair&eacute; ainsi la zone d&#39;ombre qui couvre les passions humaines et rend (trop) subtils les raisonnements rationnels. Enfin, la soci&eacute;t&eacute; est-elle en train de vivre une transformation de la morale au sein de la crise de la d&eacute;mocratie repr&eacute;sentative moderne&nbsp;?</p> <p class="texte" dir="ltr">La recherche empirique fournit des informations capables d&#39;approfondir la recrudescence g&eacute;n&eacute;rale. Christie et Geis (1979) sont les premiers &agrave; &eacute;tudier le machiav&eacute;lisme d&#39;un point de vue exp&eacute;rimental. Leurs recherches s&#39;&eacute;tendent sur une longue p&eacute;riode qui commence aux ann&eacute;es60. Au d&eacute;part, Christie s&#39;int&eacute;resse particuli&egrave;rement au sujet manipulateur, dont le comportement se r&eacute;v&egrave;le assez diff&eacute;rent du comportement des individus ordinaires. Son profil est assez clair&nbsp;: un grand d&eacute;tachement &agrave; l&#39;&eacute;gard des conventions sociales, ainsi qu&#39;une relation peu affective avec autrui. D&#39;o&ugrave; l&#39;hypoth&egrave;se que l&#39;individu manipulateur tire un maximum de b&eacute;n&eacute;fice d&#39;un comportement rationnel strat&eacute;gique. Apr&egrave;s un programme d&#39;exp&eacute;riences, l&#39;&eacute;laboration d&#39;une &eacute;chelle permet d&#39;identifier le type machiav&eacute;lique et les situations dans lesquelles son influence est la plus performante.</p> <p class="texte" dir="ltr">Quelques exp&eacute;riences dans le cadre du groupe de recherches psychosociales et politiques &agrave; l&#39;Universit&eacute; de Caen ont corrobor&eacute; les r&eacute;sultats obtenus par les exp&eacute;rimentalistes am&eacute;ricains, bien qu&#39;il ne s&#39;agisse pas de r&eacute;plications &agrave; l&#39;identique. Certaines ont d&eacute;j&agrave; fait l&#39;objet d&#39;autres publications (Dorna 1996, Desmezi&egrave;res et Lehodey 1994, Reboul 1994, Dorna 2001), mais leurs objectifs portent sur de nouvelles situations. Par exemple, l&#39;&eacute;tude de la relation entre le positionnement politique des sujets et leur degr&eacute; de machiav&eacute;lisme s&#39;av&egrave;re statistiquement significative. Sch&eacute;matiquement les r&eacute;sultats indiquent que le machiav&eacute;lisme politique s&#39;&eacute;tablit ainsi&nbsp;:</p> <p class="texte" dir="ltr"><img alt="Image1" src="https://numerev.com/images/cpp/docannexe/image/1401/img-1.jpg" style="width:3.8382inch;height:0.3752inch;margin-left:0.0in;margin-right:0.0in;margin-top:0mm;margin-bottom:0mm;padding-top:0.0602in;padding-bottom:0.0602in;padding-left:0.1102in;padding-right:0.1102in;border:none" /></p> <p class="texte" dir="ltr"><a id="Image17Cgraphics"></a>Certes, les diff&eacute;rences sont minimes, mais elles existent. Il y a l&agrave; des pistes &agrave; explorer plus en d&eacute;tail. Une autre enqu&ecirc;te cherche &agrave; pr&eacute;ciser la capacit&eacute; persuasive de sujets machiav&eacute;liques et non machiav&eacute;liques. Bien que les r&eacute;sultats ne permettent pas de conclure, les donn&eacute;es brutes indiquent que, &quot;dans la situation explor&eacute;e&quot; (r&eacute;diger un texte sur la semaine de 32 heures, puis le d&eacute;fendre devant quelqu&#39;un), contrairement &agrave; l&#39;attente, ce sont les non-machiav&eacute;liques qui semblent plus convaincants que les machiav&eacute;liques. C&#39;est une situation o&ugrave; les grands machiav&eacute;liques sont moins motiv&eacute;s, mais la question n&#39;est pas tranch&eacute;e. En revanche, d&#39;autres &eacute;l&eacute;ments s&#39;y ajoutent&nbsp;: si la richesse de vocabulaire dans les divers textes &eacute;tait assez semblable, le nombre de mots des non-machiav&eacute;liques &eacute;tait plus important. D&#39;ailleurs, il y a quelques diff&eacute;rences dans la structure de leurs discours&nbsp;: les machiav&eacute;liques ont une structure plus marqu&eacute;e par les verbes factifs que par les verbes d&eacute;claratifs, ils personnalisent davantage leurs discours, utilisent plus de mod&eacute;lisations.&nbsp; Plus originales sont deux observations qualitatives&nbsp;: d&#39;une part, on convainc mieux ses pairs, d&#39;autre part, on est plus convaincant quand on part d&#39;une position critique.</p> <p class="texte" dir="ltr">Par ailleurs, si l&#39;ensemble des r&eacute;sultats visent l&#39;existence d&#39;un syst&egrave;me de pens&eacute;e, c&#39;est la mise en &eacute;vidence du poids de l&#39;ambigu&iuml;t&eacute; des situations qui le rend plus performant. L&#39;homme machiav&eacute;lique n&#39;est pas un froid ordinateur rus&eacute; et sans scrupules, ce sont certaines situations d&#39;interaction qui renforcent ces comportements. A savoir&nbsp;: les relations face &agrave; face, peu structur&eacute;es (l&#39;ambigu&iuml;t&eacute; r&egrave;gne), et lorsque les r&egrave;gles et les moyens ne sont pas d&eacute;finis pr&eacute;alablement. Encore davantage quand les situations sont d&#39;une grande intensit&eacute; affective, la performance des non-machiav&eacute;liques se d&eacute;t&eacute;riore.</p> <p class="texte" dir="ltr">Le profil de la personnalit&eacute; machiav&eacute;lique semble confirm&eacute;. Ce qui le rend redoutable est la neutralit&eacute; &eacute;motionnelle et le go&ucirc;t pour les rapports de force. Il sait mesurer la puissance des situations avec une grande ma&icirc;trise de soi. De fait, le grand machiav&eacute;lique ne se laisse pas arr&ecirc;ter par les contraintes, les conventions morales ou culturelles de son propre milieu. La capacit&eacute; de percer les points faibles d&#39;autrui, le calme et le manque d&#39;engagements id&eacute;ologiques lui sont autant d&#39;atouts. D&#39;o&ugrave; l&#39;aura de cynisme et la logique froide qui l&#39;entoure dans son pouvoir. L&#39;action des machiav&eacute;liques s&#39;inscrit dans l&#39;ordre &eacute;tabli des choses.</p> <p class="texte" dir="ltr">En somme, le machiav&eacute;lisme hante les situations de crise. Comme personne n&#39;arrive &agrave; cerner l&#39;avenir, il y est comme un poisson dans l&#39;eau. Un sentiment de non-sens s&#39;empare de l&#39;action citoyenne. La peur de la libert&eacute;, selon la fameuse formule de Fromm, reste le syndrome de notre temps. Il y a l&agrave; une situation que l&#39;ambigu&iuml;t&eacute;&nbsp; transforme en un vivier de machiav&eacute;lisme, dans lequel les grands mangent les petits dans le silence et l&#39;impuissance des masses orphelines d&#39;un projet de soci&eacute;t&eacute; autre.</p> <p class="texte" dir="ltr">Enfin, le machiav&eacute;lisme des &eacute;lites est un sympt&ocirc;me. Quand la d&eacute;mocratie ne r&eacute;pond pas aux aspirations profondes des masses qui l&#39;ont pl&eacute;biscit&eacute;e, alors la d&eacute;ception est grave. C&#39;est une glaciation subite.</p> <p class="texte" dir="ltr">Le &quot;r&egrave;gne&quot; de F. Mitterrand peut se pr&ecirc;ter &agrave; une interpr&eacute;tation de ce type, mais ce n&#39;est pas ici le lieu pour d&eacute;velopper le caract&egrave;re d&eacute;mocratico-machiav&eacute;lique du personnage ni d&#39;analyser, en amont ou en aval, le processus politique qui lui est propre. Il suffit de poser une telle hypoth&egrave;se.</p> <p class="texte" dir="ltr">En v&eacute;rit&eacute;, les crises d&eacute;mocratiques sont de v&eacute;ritables &quot;bo&icirc;tes de Pandore&quot;. Le spectre de la r&eacute;volte peut se lire &agrave; travers les indices socio-&eacute;conomiques, mais encore mieux&nbsp; dans l&#39;anxi&eacute;t&eacute; sociale, la violence latente, l&#39;apathie, l&#39;individualisme effr&eacute;n&eacute;, la fascination de l&#39;&eacute;ph&eacute;m&egrave;re. Il y a l&agrave; encore &nbsp;une qu&ecirc;te mythique de certitudes et de v&eacute;rit&eacute;s palpables.</p> <p class="texte" dir="ltr">Parmi les issues, le populisme offre dans ces cas une porte de sortie chaleureuse, et un &eacute;lan pour d&eacute;bloquer les situations devenues coinc&eacute;es.</p> <h1 dir="ltr" id="heading6">6. Le leadership politique&nbsp;: charisme et populisme</h1> <p class="texte" dir="ltr">Formidable vieux chantier en pleine expansion, le leadership est une notion capitale qui traverse toute la probl&eacute;matique de l&#39;homme et de la cit&eacute;. C&#39;est le vecteur psychologique fondateur de toutes les organisations qui composent la structure sociale. Ce n&#39;est pas un hasard que la question du leadership se trouve dans l&#39;&oelig;il du cyclone de la crise globale de la modernit&eacute;. L&#39;id&eacute;al d&#39;autonomie de l&#39;homme moderne se d&eacute;compose ainsi que le syst&egrave;me qui lui donne sens. Le conformisme a &eacute;pous&eacute; l&#39;individualisme et le statu quo rend la situation tendue entre une masse dans l&#39;attente d&#39;un sauveur et une &eacute;lite de moins en moins en phase avec la r&eacute;alit&eacute; concr&egrave;te. L&agrave;, le charisme rejoint le populisme toujours latent dans les syst&egrave;mes d&eacute;mocratiques.</p> <p class="texte" dir="ltr">Comment reconna&icirc;tre le syndrome populiste&nbsp;?</p> <p class="texte" dir="ltr">L&#39;attitude populiste (Dorna 1999) est la constituante de toute politique d&eacute;mocratique&nbsp;: il n&#39;y a pas de discours politique sans r&eacute;f&eacute;rence au peuple. C&#39;est un ph&eacute;nom&egrave;ne de transition &eacute;ruptif et presque &eacute;ph&eacute;m&egrave;re, qui se d&eacute;veloppe sous la pression d&#39;une crise g&eacute;n&eacute;ralis&eacute;e devenue chronique. C&#39;est le d&eacute;sarroi des masses populaires devant l&#39;immobilisme d&#39;une aristocratie d&#39;<span style="text-transform:uppercase;">&eacute;</span>tat au pouvoir, qui se consid&egrave;re comp&eacute;tente et propri&eacute;taire des lieux.</p> <p class="texte" dir="ltr">Une constatation s&#39;impose: le populisme est associ&eacute; soit &agrave; l&#39;&eacute;chec des r&eacute;gimes autocratiques, soit &agrave; l&#39;&eacute;chec des r&eacute;gimes d&eacute;mocratiques corrompus. C&#39;est le manque de libert&eacute; autant que la d&eacute;sillusion de l&#39;&eacute;galit&eacute; qui poussent les masses vers d&#39;autres issues.</p> <p class="texte" dir="ltr">Le plus poignant et, &agrave; la fois, le plus insondable de la r&eacute;alit&eacute; populiste est le fond &eacute;motionnel qui l&#39;anime. Le ciment n&#39;est pas sociologique, mais psychologique. V&eacute;ritable socle sur lequel tous les autres composants (sociologiques et &eacute;conomiques) s&#39;installent. L&#39;&eacute;tonnante vitalit&eacute; que d&eacute;gage le populisme est, en ultime analyse, plus une sonnette d&#39;alarme qu&#39;une explosion violente capable de tout emporter sur son passage. Mais, c&#39;est une lame de fond: une r&eacute;action de col&egrave;re et de m&eacute;fiance &agrave; l&#39;&eacute;gard des institutions.</p> <p class="texte" dir="ltr">Le populisme contemporain, <em>mutatis mutandis</em>, a trouv&eacute; un nouvel &eacute;lan dans la soci&eacute;t&eacute; de consommation et les moyens modernes de communication. Or, c&#39;est l&agrave; une perversion remarquable des attitudes populistes de nagu&egrave;re. Il faut donc se m&eacute;fier des contrefa&ccedil;ons&nbsp;: le n&eacute;o-populisme peut s&#39;apparenter au n&eacute;o-fascisme. Mais, c&#39;est une erreur strat&eacute;gique de les confondre. Les m&eacute;dias, notamment la t&eacute;l&eacute;vision, d&eacute;multiplient en images la port&eacute;e des discours&nbsp;; la forme &eacute;motionnelle l&#39;emporte sur la parole r&eacute;fl&eacute;chie.</p> <p class="texte" dir="ltr">Il y a un appel au peuple. L&#39;homme populiste s&#39;adresse &agrave; tout le peuple, mais surtout &agrave; ceux qui n&#39;ont pas de pouvoir, ceux qui subissent en silence l&#39;impasse et la mis&egrave;re. Il y a dans cet appel l&#39;&eacute;vocation des grands mythes fondateurs. C&#39;est l&agrave; sa&nbsp; force et sa raison d&#39;&ecirc;tre. Les symboles jouent un r&ocirc;le de reconnaissance, formidablement acc&eacute;l&eacute;r&eacute; par l&#39;esp&eacute;rance d&#39;un retour &agrave; l&#39;&eacute;quilibre d&#39;antan.</p> <p class="texte" dir="ltr">Pour mieux comprendre, le mouvement populiste s&#39;incarne toujours dans une des figures les plus classiques du ma&icirc;tre&nbsp;: l&#39;homme providentiel charismatique. Le style du leader compte pour beaucoup&nbsp;: la forme entra&icirc;ne le fond. C&#39;est le jeu de la s&eacute;duction et du savoir-faire, la finesse dans l&#39;esquive, le contact direct et chaleureux. La dimension anti-d&eacute;pressive n&#39;est pas absente. Le leader charismatique &eacute;pouse la rh&eacute;torique, mais rarement la d&eacute;magogie. Si l&#39;imposture guette le chef d&eacute;magogue, la d&eacute;mesure accompagne le leader populiste.</p> <p class="texte" dir="ltr">Le leader populiste &eacute;merge d&#39;une mani&egrave;re abrupte, apparemment de nulle part, sans appareil structur&eacute; ni doctrine &eacute;labor&eacute;e. <strong>Un self-made man.</strong>Populaire par sa d&eacute;marche autant que par son langage, il incarne la tradition de la terre et l&#39;innovation technique, avec une farouche volont&eacute; de contestation.&nbsp; Ce n&#39;est pas un proph&egrave;te, encore moins un C&eacute;sar, mais quelqu&#39;un qui traverse le firmament social et politique comme un m&eacute;t&eacute;ore avec beaucoup de prestance et une parole fracassante.</p> <p class="texte" dir="ltr">Le leader populiste se distingue d&#39;autres types charismatiques (Dorna 1998) par la plasticit&eacute; pragmatique et l&#39;habilet&eacute; &eacute;motionnelle exub&eacute;rante avec laquelle il f&eacute;conde le temps du changement. L&#39;attitude de base est celle du grand fr&egrave;re proche qui cherche le contact direct et le dialogue avec tous. La communication est horizontale et chaleureuse. Les &eacute;changes sont ouverts, vivaces, directs. C&#39;est l&#39;image vivante de l&#39;homme disponible, simple, qui appara&icirc;t sans affectation ni calcul.</p> <p class="texte" dir="ltr">Quelques chercheurs pensent (House 1992, Rondeau 1986, Barbuto 1997) que le leader charismatique assume un r&ocirc;le de transformation. Quatre points sont ainsi &eacute;voqu&eacute;s&nbsp;:</p> <ul> <li> <p class="puces" dir="ltr">l&#39;inspiration&nbsp;: le leader incite les membres du groupe &agrave; se d&eacute;passer eux-m&ecirc;mes pour la r&eacute;ussite de l&#39;ensemble&nbsp;;</p> </li> <li> <p class="puces" dir="ltr">la consid&eacute;ration&nbsp;: le leader agit comme un mentor aupr&egrave;s de ceux qui ont besoin d&#39;aide pour se d&eacute;velopper&nbsp;;.</p> </li> <li> <p class="puces" dir="ltr">l&#39;encouragement&nbsp;: le leader stimule de nouvelles mani&egrave;res d&#39;envisager le changement de croyances et de valeurs&nbsp;;</p> </li> <li> <p class="puces" dir="ltr">l&#39;identification&nbsp;: le leader repr&eacute;sente, &agrave; la fois, l&#39;incarnation d&#39;un projet collectif et l&#39;adh&eacute;sion du plus grand nombre.</p> </li> </ul> <p class="texte" dir="ltr">Par ailleurs, le leadership charismatique est d&eacute;finissable essentiellement &agrave; partir de ses rapports avec l&#39;&eacute;motion par la parole. Il poss&egrave;de la ma&icirc;trise des &eacute;motions en m&ecirc;me temps qu&#39;il d&eacute;gage des &eacute;motions fortes. Ce n&#39;est pas un trait de caract&egrave;re, mais une forme de savoir, savoir qui s&#39;apprend et se d&eacute;veloppe m&ecirc;me tardivement. (Goleman, 1995). Il faut rappeler que la logique du syndrome n&eacute;o-populiste est de nature affective. Aussi le discours explicatif purement rationnel ne suffit-il pas. Encore pis&nbsp;: il induit des erreurs de diagnostic et n&eacute;glige, par m&eacute;connaissance, les donn&eacute;es subjectives, c&#39;est-&agrave;-dire les vraies questions d&#39;une soci&eacute;t&eacute; en crise.</p> <p class="texte" dir="ltr">Rien ne remplace dans une argumentation l&#39;appel &agrave; l&#39;exemple vivant. Si nous avions &eacute;voqu&eacute; en introduction la figure de Berlusconi, d&#39;autres sont tout aussi identifiables. Les traiter en &eacute;piph&eacute;nom&egrave;ne serait une erreur issue de la m&eacute;connaissance de la lame de fond n&eacute;o-populiste qui traverse le monde. Il y en a bien d&#39;autres, et la figure de Berlusconi n&#39;est pas qu&rsquo;un des exemples europ&eacute;ens. Jeter un regard ailleurs peut s&#39;av&eacute;rer fort utile: Que penser du n&eacute;o-populisme charismatique d&#39;Hugo Chavez et de la r&eacute;cente tentative de coup d&#39;&eacute;tat dont il fut l&#39;obje&nbsp;?</p> <p class="texte" dir="ltr">Toutes les conditions d&#39;un n&eacute;o-populisme &eacute;taient r&eacute;unies lors de l&#39;arriv&eacute;e tumultueuse de Hugo Chavez &agrave; la pr&eacute;sidence du Venezuela en 1998. La r&eacute;cente tentative de l&#39;&eacute;vincer du pouvoir&nbsp; et la riposte populaire qui le r&eacute;tablit dans son fauteuil sont une preuve suppl&eacute;mentaire du caract&egrave;re charismatique de son leadership.</p> <p class="texte" dir="ltr">La volte-face de la situation v&eacute;n&eacute;zu&eacute;lienne re-pose la question des causes et des formes du populisme, dont l&#39;histoire est longue et complexe. Encore davantage lorsque les transgressions et les d&eacute;fis &agrave; la &quot;main invisible&quot; se r&eacute;pandent comme une tache d&#39;huile dans un contexte de r&eacute;chauffement de la plan&egrave;te.</p> <p class="texte" dir="ltr">Chavez incarne dans son pays, de mani&egrave;re paradigmatique, le renouveau et la renaissance m&eacute;diatique du n&eacute;o-populisme. Jeune colonel en 1992, &agrave; l&#39;issue d&#39;un putsch avort&eacute;, il est devenu le symbole de la cause &quot;bolivarienne&quot; (mythe t&ecirc;tu d&#39;une Am&eacute;rique latine autonome et unifi&eacute;e) et le porte-parole d&#39;un discours lib&eacute;rateur. Il ne faut pas oublier qu&#39;il est aussi un dipl&ocirc;m&eacute; de la prestigieuse Universit&eacute; Simon Bolivar en sciences politiques. Rien d&#39;&eacute;tonnant alors d&#39;observer que ses premiers actes politiques t&eacute;moignent d&#39;une lutte ouverte contre l&rsquo;establishment et la corruption, associ&eacute;s &agrave; la crise structurelle du pays. Enfin, une fois pr&eacute;sident, son programme le conduit &agrave; faire voter plusieurs lois sur l&#39;expropriation des terres improductives et le contr&ocirc;le de l&rsquo;industrie p&eacute;troli&egrave;re.</p> <p class="texte" dir="ltr">R&eacute;capitulons&nbsp;: cet exemple, face &agrave; l&rsquo;embarras conceptuel, permet de d&eacute;gager quelques signes de reconnaissance, afin de mieux saisir les caract&eacute;ristiques de la question populiste et ses manifestations charismatiques. On peut en tirer trois constats:</p> <p class="texte" dir="ltr">Premier constat&nbsp;: le populisme n&#39;est pas un simple mouvement de masse, mais la r&eacute;ponse des masses &agrave; l&#39;action (jug&eacute;e courageuse) d&#39;un homme charismatique. Le style du leader compte pour beaucoup, car la forme entra&icirc;ne le fond. C&rsquo;est le jeu de la s&eacute;duction et du savoir-faire, de la finesse dans l&rsquo;esquive, du contact direct et chaleureux. L&#39;&eacute;nergie &eacute;tant contagieuse, la dimension anti-d&eacute;pressive du charisme n&rsquo;est pas absente. Le leader charismatique &eacute;pouse la rh&eacute;torique, mais rarement la d&eacute;magogie et, si l&rsquo;imposture guette le chef d&eacute;magogue, la d&eacute;mesure accompagne le leadership populiste.</p> <p class="texte" dir="ltr">Deuxi&egrave;me constat&nbsp;: l&rsquo;effervescence sociale n&rsquo;est pas la caract&eacute;ristique principale du populisme, mais la volont&eacute; farouche de rupture. Le ciment qui le fonde n&rsquo;est pas sociologique, mais psychologique. V&eacute;ritable socle sur lequel tous les autres composants (sociologiques et &eacute;conomiques) se mettent en place pour former un nouveau monde imaginaire.</p> <p class="texte" dir="ltr">Enfin, troisi&egrave;me constat&nbsp;: l&rsquo;appel populiste s&#39;adresse &agrave; tout le peuple, &agrave; tous ceux qui subissent en silence l&rsquo;impasse et la mis&egrave;re. Il y a dans cet appel l&rsquo;&eacute;vocation des grands mythes fondateurs, c&rsquo;est l&agrave; sa puissance et sa raison d&rsquo;&ecirc;tre. Les symboles jouent ici un formidable r&ocirc;le de reconnaissance.</p> <p class="texte" dir="ltr">Par ailleurs, il faut insister sur le contexte&nbsp;: le populisme &eacute;merge toujours associ&eacute; &agrave; une situation de crise soci&eacute;tale. Sa signification se trouve en amont lorsque le fonctionnement de l&#39;<span style="text-transform:uppercase;">&eacute;</span>tat s&#39;est rendu herm&eacute;tique au peuple et la classe politique coupable d&#39;une confiscation sournoise du pouvoir. Cela s&#39;accompagne d&#39;un &eacute;puisement culturel et id&eacute;ologique, d&#39;un manque de confiance&nbsp; dans l&rsquo;avenir et d&rsquo;une dose l&eacute;tale de conformisme. La coh&eacute;sion sociale (nationale) cesse d&rsquo;&ecirc;tre un rempart contre le processus de d&eacute;sint&eacute;gration et l&rsquo;action corrosive de l&rsquo;immobilisme des institutions. D&#39;o&ugrave; la sensation de vieillissement. En r&eacute;alit&eacute;, il y a une absence de projet commun. C&#39;est l&#39;encha&icirc;nement de trois facteurs&nbsp;: la d&eacute;ception, la frustration et l&rsquo;attente. La croyance dans le gouvernement se fissure et l&rsquo;avenir fait peur. Le doute se transforme en silence politique complice et en individualisme &eacute;troit. Il y a un sentiment diffus et contradictoire d&rsquo;ordre et de changement.</p> <p class="texte" dir="ltr">En somme, le n&eacute;o-populisme n&#39;annonce pas la fin d&rsquo;un syst&egrave;me, ni le commencement d&rsquo;un autre, mais l&#39;&eacute;tat de d&eacute;labrement de la gouvernance d&eacute;mocratique. D&#39;o&ugrave; la n&eacute;cessit&eacute; de le (re)conna&icirc;tre, l&#39;utilit&eacute; de le comprendre et l&#39;int&eacute;r&ecirc;t de le canaliser autant que possible.</p> <p class="texte" dir="ltr">Pour revenir au cas de Chavez, nous nous trouvons devant une des multiples exp&eacute;riences actuelles de recomposition des forces politiques institutionnelles dans le monde. Si les partis de gauche et de droite se d&eacute;composent dans un lib&eacute;ralisme gestionnaire, des mouvements de r&eacute;sistance s&#39;incarnent sous la forme de <em>remakes</em> populistes inattendus. La question n&eacute;o-populiste est devenue, aujourd&#39;hui, le sympt&ocirc;me politique de la crise de la d&eacute;mocratie repr&eacute;sentative.</p> <p class="texte" dir="ltr">Il peut para&icirc;tre na&iuml;f de remonter &agrave; Pascal pour rappeler que la logique de la raison d&eacute;rape sans l&#39;aper&ccedil;u de la logique du c&oelig;ur. Mais, incontestablement, c&#39;est l&agrave; que se situe le talon d&#39;Achille de la science politique classique, et encore davantage des &eacute;lites tristes au pouvoir, trop prises dans le carcan technocratique et la m&eacute;canique calculatrice de la pens&eacute;e unique. La psychologie politique retrouve l&agrave; une de ses raisons d&#39;&ecirc;tre.</p> <h1 dir="ltr" id="heading7">7.Le chantier du discours s&eacute;curitaire&nbsp;: la ville et l&#39;ins&eacute;curit&eacute;</h1> <p class="texte" dir="ltr">La ville est g&eacute;n&eacute;ralement le centre de nombreuses repr&eacute;sentations associ&eacute;es &agrave; la politique, ainsi l&#39;&eacute;tude de ce ph&eacute;nom&egrave;ne est devenue un chantier pour la psychologie politique. Pour les responsables de la fameuse &eacute;cole de Chicago, la ville est un &quot;&eacute;tat de l&#39;&acirc;me&quot; ( R. Park), d&#39;autant que la matrice psychologique urbaine marque profonde mente les mentalit&eacute;s et les comportements de ses habitants.&nbsp;</p> <p class="texte" dir="ltr">Chacun sait que la politique est le r&eacute;sultat de l&#39;urbanisation. La racine &eacute;tymologique de ville, cit&eacute;, politique est la m&ecirc;me&nbsp;: polis. Ainsi toutes les villes ont une histoire politique, c&ocirc;t&eacute; rue, des journ&eacute;es herboriseurs, et c&ocirc;t&eacute; jardin, les officines de corruption. L&#39;urbain engendre des repr&eacute;sentations affectives, comportements strat&eacute;giques, personnalit&eacute;s &quot;citadines&quot;, &eacute;motions qui terrorisent ou charment. La ville attire et elle r&eacute;pugne. Et elle d&eacute;gage des styles de vie contradictoires.</p> <p class="texte" dir="ltr">Faut-il rappeler l&#39;importance - d&egrave;s tous les temps - octroy&eacute; par le pouvoir politique &agrave; l&#39;am&eacute;nagement de l&#39;espace public de la ville&nbsp;? Cela fait partie de la legitimisation de l&#39;&Eacute;tat&nbsp;: la m&eacute;moire collective de masses s&#39;en nourrie en permanence. Il y a l&agrave;, au milieu des jardins et &agrave; l&#39;ombre des monuments, une v&eacute;ritable agenda historique de l&#39;identit&eacute; politique des peuples, de ses h&eacute;ros et martyrs, de ses batailles, de l&#39;id&eacute;alisation des grands projets, et rarement le souvenir des grands &eacute;checs.</p> <p class="texte" dir="ltr">Par ailleurs, comme &agrave; la fin du XIXe si&egrave;cle, la ville (les m&eacute;gapoles et plus particuli&egrave;rement leurs banlieues) est per&ccedil;ue sous l&#39;optique du danger et l&#39;ins&eacute;curit&eacute;&nbsp;: le sentiment de menace permanente se traduit par une demande de plus en plus forte de mesures r&eacute;pressives. La litt&eacute;rature psychologique sur le syndrome des &quot;foules d&eacute;linquantes&quot; est &agrave; la base des interpr&eacute;tations politiques &agrave; la fin du XIX si&egrave;cle. Aujourd&#39;hui la question de la s&eacute;curit&eacute; est devenue le centre et la pierre d&#39;achoppement des discours politiques.</p> <p class="texte" dir="ltr">L&#39;id&eacute;ologie politique puise dans les sc&egrave;nes de la vie quotidienne des villes: le bruit, la promiscuit&eacute;, la salet&eacute;, les maladies, le vice, le d&eacute;sordre, le melting-pot culturel, l&#39;anonymat, la marginalit&eacute;, mais &eacute;galement se d&eacute;gagent d&#39;autres arguments plus positifs: le changement, la vitesse, l&#39;&eacute;change, l&#39;animation, la technologie, les divertissements, les &eacute;quipements sportifs et culturels. Nul n&rsquo;ignore que le gigantisme des villes est devenu le symbole &agrave; la fois de la gestion politique et la vitrine de l&#39;ambigu&iuml;t&eacute; intrins&egrave;que de la modernit&eacute;. Singapour, Mexico, Sao Paulo, New York, sont l&agrave; pour rappeler la puissance et l&#39;arrogance du pouvoir.</p> <p class="texte" dir="ltr" style="margin-top:0.19450001in; margin-bottom:0.19450001in; text-align:justify;">L&#39;attentat terroriste du 11 Septembre 2001 aux tours jumelles de New York m&ecirc;le dans un m&ecirc;me acte politique les multiples repr&eacute;sentations contradictoires de l&#39;urbanisation, l&#39;id&eacute;ologie et le sentiment d&#39;ins&eacute;curit&eacute;.</p> <h1 dir="ltr" id="heading8">8. L&#39;&Eacute;tat et la solidarit&eacute;</h1> <p class="texte" dir="ltr">Rarement les rapports entre l&#39;<strong>Etat, la solidarit&eacute; humaine et l&#39;auto estime sont analys</strong><strong>&eacute;s</strong><strong> comme un chantier psychopolitique. Pourtant, le principe de solidarit&eacute; est un trait d&#39;union qui traverse le temps</strong><span style="font-size:14.0pt;">.</span> En effet, l&#39;id&eacute;e solidariste est rest&eacute;e latente depuis saint Paul et Marc-Aurele, sans oublier les actualisations social-chretiennes,&nbsp; au cour de la premi&egrave;re moiti&eacute; du XIX&eacute;me si&egrave;cle de Pierre Leroux. C&#39;est chez lui que le mot trouve une acception politique, pour devenir &agrave; la fin du si&egrave;cle un grand th&egrave;me donnant lieu &agrave; de nombreux d&eacute;bats avec la participation de plusieurs universitaires (H. Marion, F. Passy, C. Janet, Ch. Gide, H. La Fontaine, F. Buisson, E. Boutroux, E. Durkheim, C. Bougl&eacute; et bien d&#39;autres, dont les contributions montrent la richesse.</p> <p class="texte" dir="ltr">Plus politique que philosophe, <strong>Leon Bourgeois (1912)</strong>est le catalyseur intellectuel de l&#39;ensemble bigarr&eacute; de positions solidaristes, afin de r&eacute;affirmer une &eacute;vidence th&eacute;orique&nbsp;: l&#39;organisation politique de la soci&eacute;t&eacute; est la condition premi&egrave;re de l&#39;&eacute;volution vers une soci&eacute;t&eacute; plus juste. D&#39;autant que l&#39;id&eacute;al social d&eacute;mocratique ne peut se r&eacute;aliser en dehors d&#39;une R&eacute;publique au sens de la &quot;politeia&quot; grecque. C&#39;est l&agrave; que la pratique humaine qui concerne l&#39;ensemble de citoyens. Car la s&eacute;curit&eacute; et le bien-&ecirc;tre, l&#39;instruction et la justice, l&#39;assurance contre les risques pr&eacute;visibles, et les garanties de la libert&eacute; individuelle, passent par la structuration du &quot;bien commun&quot;, dont le lien n&#39;est autre que la solidarit&eacute; r&eacute;ciproque. Le solidarisme se caract&eacute;rise par des interventions sp&eacute;cifiques du politique sur les structures sociales, donc l&#39;Etat.</p> <p class="texte" dir="ltr">Parce que l&#39;id&eacute;e de solidarit&eacute; exprime, selon Bourgeois, une valeur politique, il faut lui proposer un cadre juridique et sociologique dont la justification est &agrave; la fois morale et scientifique. C&#39;est le propre du raisonnement pouss&eacute; jusqu&#39;aux limites par le positivisme politique. Ainsi, il &eacute;crit&nbsp;: &quot;La nature n&#39;est ni juste ni injuste, c&#39;est l&#39;homme qui d&eacute;termine la valeur de choses et des comportements&quot;. Et ajoute&nbsp;: &quot; Le propre de l&#39;homme c&#39;est non pas de se r&eacute;volter contre les lois de la nature mais de s&#39;en servir, de les plier &agrave; son usage, de choisir parmi les moyens ceux qui le m&egrave;nent &agrave; ses fins. Il asservit les lois, la nature, et par l&agrave; conquiert sa propre libert&eacute;&quot;.</p> <p class="texte" dir="ltr">Quel est l&#39;argumentaire explicatif du solidarisme. Un point de d&eacute;part&nbsp;: la vie humaine est individuelle et sociale. C&#39;est un truisme de dire qu&#39;elle est faite d&#39;interd&eacute;pendance, de r&eacute;ciprocit&eacute;, d&#39;association et d&#39;&eacute;quilibre. A y r&eacute;fl&eacute;chir l&#39;humanit&eacute; est une solidarit&eacute; de fait: l&#39;homme est un animal social, voire politique. C&#39;est &agrave; cause de la rupture du trait d&#39;union que l&#39;injustice montre sa laideur et les antagonismes d&#39;int&eacute;r&ecirc;ts effacent l&#39;essentiel commun des hommes. D&#39;o&ugrave; la recherche d&#39;une issue politique capable de d&eacute;samorcer la spirale de la violence et la reproduction de l&#39;injustice. C&#39;est un imp&eacute;ratif moral, mais d&eacute;munis des vieux d&eacute;mons m&eacute;taphysiques. L&#39;esprit de justice n&#39;est pas une simple id&eacute;e sortie de la t&ecirc;te des quelques sages, mais l&#39;issue rationnelle &agrave; la violence et au d&eacute;sir de domination que la &quot;lutte pour la survie&quot; avaient impos&eacute; aux hommes la satisfaction des besoins primaires &agrave; l&#39;aube de l&#39;humanit&eacute;.</p> <p class="texte" dir="ltr">Par cons&eacute;quent, la th&eacute;orie solidariste de Bourgeois s&#39;interroge et souhaite r&eacute;pondre &agrave; la question de la valeur sociale de devoir. C&#39;est par l&#39;exp&eacute;rience r&eacute;currente des g&eacute;n&eacute;rations, l&#39;&eacute;ducation et le raffinement progressif et cumul&eacute;e des cultures aussi diverses que compl&eacute;mentaires. Mais, si le m&eacute;canisme est simple, &agrave; premi&egrave;re vue, il op&egrave;re d&#39;une mani&egrave;re complexe. D&#39;abord, c&#39;est la reconnaissance des &quot;cr&eacute;ances&quot; et des &quot;dettes&quot;, autant que la pr&eacute;sence des &quot;quasi-contrats&quot; de r&eacute;ciprocit&eacute;.</p> <p class="texte" dir="ltr">Il y a ainsi un m&ecirc;me m&eacute;canisme qui fonctionne dans deux temps:</p> <p class="texte" dir="ltr">Premier temps&nbsp;: la reconnaissance de la dette envers l&#39;humanit&eacute;. L&#39;homme est le produit d&#39;une culture et des connaissances cumul&eacute;es par l&#39;humanit&eacute; de g&eacute;n&eacute;ration en g&eacute;n&eacute;ration. De fait, il est d&eacute;biteur et par cons&eacute;quent l&#39;homme doit s&#39;acquitter de sa dette envers ses anc&ecirc;tres, et ses coassoci&eacute;s (ici et maintenant); de plus, il faut qu&#39;il s&#39;occupe de ceux qui viendront apr&egrave;s lui. C&#39;est l&agrave; o&ugrave; l&#39;&eacute;conomie est un acte politique et moral, individuel et collectif.</p> <p class="texte" dir="ltr">Deuxi&egrave;me temps&nbsp;: le quasi-contrat. Contrairement &agrave; Rousseau qui propose un mythe pour expliquer les origines de l&#39;humanit&eacute;, sous la forme d&#39;un contrat-social, Bourgeois parle d&#39;un quasi-contrat, r&eacute;troactivement consenti, en tant que&nbsp; reconnaissance de la dette de chacun avec autrui. C&#39;est le prix &agrave; payer &agrave; la nation pour la libert&eacute;; sa juste part&nbsp; - &eacute;crit Bourgeois - &quot; selon une progression qui imposera nettement &agrave; chacun une charge v&eacute;ritable correspondante aux b&eacute;n&eacute;fices qu&#39;il tire de la soci&eacute;t&eacute;&quot;.</p> <p class="texte" dir="ltr">La question psychologique pousse la r&eacute;ponse politique dans une unit&eacute; dialectique&nbsp;: Comment r&eacute;parer la cassure de la solidarit&eacute; sociale qui engendre l&#39;injuste, donc le sentiment de perte de lien&nbsp;?&nbsp; La seule prise de conscience ne suffit guerre. Il n&#39;y a plus de place &agrave; une &quot;utopie&quot; quelconque. C&#39;est l&agrave; que l&#39;&Eacute;tat (r&eacute;publicain) peut jouer un r&ocirc;le central et devenir une force de proposition. Certes, &agrave; condition que les principes de l&#39;int&eacute;r&ecirc;t g&eacute;n&eacute;ral soient respect&eacute;s et la justice sociale puisse retrouver un point d&#39;&eacute;quilibre. La d&eacute;mocratie, &eacute;tant une m&eacute;thode pour gouverner, peut le permettre dans un espace public ouvert au dialogue, afin de ne pas escamoter les contradictions. Car, il serait une erreur de ne pas reconna&icirc;tre que derri&egrave;re toute solidarit&eacute;, des conflits existent en puissance, m&ecirc;me si la concertation les adouci. De fait, le moteur du changement n&#39;est pas ici la &quot;lutte de classes&quot;, mais l&#39;effort pour l&#39;harmonisation de forces en tension gr&acirc;ce &agrave; la parole et la d&eacute;lib&eacute;ration collective.</p> <p class="texte" dir="ltr">Ici, l&#39;&Eacute;tat joue son r&ocirc;le d&#39;arbitre et selon Bourgeois&nbsp;: &quot;L&#39;&Eacute;tat, dont la raison d&#39;&ecirc;tre est d&#39;&eacute;tablir la justice entre les hommes, &agrave; donc le droit et, par cons&eacute;quent, le devoir d&#39;intervenir pour &eacute;tablir l&#39;&eacute;quilibre&quot;. Or, l&#39;exp&eacute;rience montre la distance consid&eacute;rable entre la th&eacute;orie abstraite de juristes et la pratique concr&egrave;te de la citoyennet&eacute;. Car, l&#39;&Eacute;tat prend corps avec son appareil administratifs et s&#39;oppose parfois aux citoyens, c&#39;est &agrave; dire &agrave; la Nation qu&#39;il est cens&eacute;e de repr&eacute;senter. Le pouvoir de l&#39;&Eacute;tat est ainsi ressenti comme une contrainte, voire une anti-libert&eacute;. Telle d&eacute;rive bureaucratique n&#39;&eacute;chappe pas &agrave; la r&eacute;flexion de Bourgeois. L&#39;Etat-R&eacute;publicain doit se garder non seulement de ses propres perversions, mais des effets de la pression de l&#39;oligarchie financi&egrave;re qui p&eacute;n&egrave;tre et corrompe de fa&ccedil;on insidieuse l&#39;appareil administratif.</p> <p class="texte" dir="ltr">C&#39;est l&agrave; l&#39;appel &agrave; la citoyennet&eacute;, profond&eacute;ment encr&eacute; dans la d&eacute;marche solidariste, afin de d&eacute;noncer les abus, et de plaider pour l&#39;instauration des contre-pouvoirs. Car, le pouvoir tend &agrave; faire croire &agrave; des r&eacute;formes illusoires, d&eacute;naturer&nbsp; et d&eacute;former l&#39;information, ou encore &agrave; distribuer le chaud et le froid en fonction des directives qui &eacute;chappent au contr&ocirc;le de la Nation.</p> <p class="texte" dir="ltr">Voil&agrave; pourquoi, Bourgeois pose le probl&egrave;me de la libert&eacute;, de la &quot;propri&eacute;t&eacute;&quot; et du couple &quot;capital-travail&quot; dans le droit fil de l&#39;approche de l&#39;Etat-R&eacute;publicain, sous le contr&ocirc;le de la Nation, afin de ne pas tomber dans les exc&egrave;s d&#39;une vision collectiviste ni l&#39;&eacute;go&iuml;sme d&#39;une pratique purement individualiste. Ainsi, il n&#39;est pas question de transf&eacute;rer dans les mains de l&#39;&Eacute;tat les moyens de production, mais d&#39;&eacute;quilibrer les secteurs o&ugrave; les exc&egrave;s sont flagrants. Car, l&#39;analyse de la soci&eacute;t&eacute; r&eacute;duite &agrave; l&#39;ordre &eacute;conomique est &agrave; la fois incompl&egrave;te et trompeuse. La loi est une ressource puissante pour contraire l&#39;emprise de corporatismes sans avoir recours &agrave; la violence.</p> <p class="texte" dir="ltr">La th&eacute;orie solidariste peut se retrouver dans les r&eacute;flexions de R. Lane (1982), dont l&#39;approche psychopolitique r&eacute;affirme l&#39;id&eacute;e que la justice et l&rsquo;&eacute;quilibre n&#39;existent spontan&eacute;ment dans la nature, en m&ecirc;me temps qu&#39;il s&#39;agit des valeurs qui d&eacute;coulent de l&#39;exp&eacute;rience collective et se canalisent &agrave; travers l&#39;intervention de l&#39;Etat. Ainsi, l&#39;estime de soi est devenue une affaire d&#39;Etat. Dans ses travaux Lane met en &eacute;vidence les rapports &eacute;troits entre l&#39;estime de soi et le pouvoir public. Car, c&#39;est l&#39;Etat, &agrave; travers ses agents, qui conf&egrave;re des r&eacute;compenses psychologiques puissantes&nbsp;: des honneurs et de la reconnaissance sociale, le statut et la renomm&eacute;e.</p> <p class="texte" dir="ltr">Par cons&eacute;quent, explique Lane, l&#39;Etat peut favoriser (ou pas !) les comportements sociaux et l&#39;equilibre psychologique collectif, lorsque le respect &agrave; soi m&ecirc;me et autrui sont renforc&eacute;s, la dignit&eacute; de chacun est garantie, et l&#39;importance de l&#39;argent et du pouvoir trouvent une juste place dans l&#39;echelle des valeurs communes.</p> <p class="texte" dir="ltr">L&#39;Etat n&#39;est pas un simple appareil administratif, mais une communaut&eacute; d&#39;inserts collectifs, dont le r&ocirc;le est d&#39;assurer la distribution de richesses mat&eacute;rielles, mais le garant de l&#39;&eacute;quilibre et des valeurs communes. D&#39;o&ugrave; son caract&egrave;re politique. Certes, hors du cadre r&eacute;publicain, l&#39;Etat peut se transformer en tyrannie ouverte ou d&eacute;guis&eacute;e.</p> <h1 dir="ltr" id="heading9">9. Le chantier de l&#39;&eacute;conomie politique et de ses rapports avec la psychologie</h1> <p class="texte" dir="ltr">Faut dire que ce chantier est en pleine &eacute;volution, voire en qu&ecirc;te d&#39;autonomie fontionnelle. Si, la vieille question du pouvoir politique, est repr&eacute;sent&eacute; par un triptyque fort ancien, dont les &eacute;l&eacute;ments sont symbolisables par une figure triangulaire en mouvement rotatif, l&#39;&eacute;conomie politique r&eacute;introduit le psychologique, mais d&#39;une mani&egrave;re &eacute;quivoque&nbsp; avec la formule&nbsp;: &quot;l&#39;homo economicus&quot;. Car, ici la question psychologique est autour du leadership &agrave; un moment donn&eacute;. Rappel&nbsp;: tout pouvoir (commandement) &agrave; un visage</p> <p class="texte" dir="ltr">L&#39;histoire des processus politiques et de ses r&eacute;gimes illustre &agrave; merveille la complexit&eacute; de l&#39;interaction de leurs composants. Certains auteurs classiques ont&nbsp; postul&eacute; une &eacute;ternelle circularit&eacute; de la structure du pouvoir. Pourtant, sans revenir aux querelles id&eacute;ologiques, il semble utile de re-situer un quatri&egrave;me composant du pouvoir qui progressivement surd&eacute;termine l&#39;ensemble, et dont la particularit&eacute; est de toujours rester &agrave; l&#39;ombre, bien que de nos jours sa pr&eacute;sence est devenue d&#39;une grossi&egrave;re &eacute;vidence&nbsp;: le syst&egrave;me &eacute;conomique.</p> <p class="texte" dir="ltr"><img alt="Image2" src="https://numerev.com/images/cpp/docannexe/image/1401/img-2.jpg" style="width:5.9071inch;height:3.6661inch;margin-left:0.0in;margin-right:0.0in;margin-top:0mm;margin-bottom:0mm;padding-top:0.0602in;padding-bottom:0.0602in;padding-left:0.1102in;padding-right:0.1102in;border:none" /></p> <p class="texte" dir="ltr"><a id="Image27Cgraphics"></a>Si, dans ces dernieres d&eacute;cennies, il y a eu plusieurs tentatives pour d&eacute;velopper une psychologie &eacute;conomique (Katona 1963, Albou 1884, Lassare 1995) pratiquement personne s&#39;est occup&eacute; de ses liens avec les r&eacute;gimes politiques. Certains on voulu introduire un rapprochement avec le concept de &quot;besoin&quot;. Or, telle initiative s&#39;est transform&eacute;e en v&oelig;u pieux. Ni les &eacute;conomistes ni les psychologues ne sont arriv&eacute;s &agrave; en faire une notion commune. L&#39;effort est &eacute;pist&eacute;mologique. Il faudrait revenir au dialogue (subjectif-objectif) propos&eacute; par H. Berr et certains de ses disciples, notamment Simiand, dans le cadre d&#39;une th&eacute;orie synth&eacute;tique. Et surtout sans oublier l&#39;&oelig;uvre de G. Tarde (1902) qui porte d&eacute;j&agrave; justement le titre de &quot;psychologie &eacute;conomique&quot;. Il d&eacute;nonce dans ce cours au Coll&egrave;ge de France l&#39;erreur de m&eacute;conna&icirc;tre la nature &quot; <span style="text-decoration:underline;">&eacute;minemment psychologique des sciences sociales , dont l&#39;&eacute;conomie politique n&#39;est qu&#39;une branche&quot; ( soulign&eacute; par nous). </span>Or, contrairement &agrave; ce v&oelig;u la &eacute;conomie politique s&#39;est situ&eacute; hors du champs des sciences humaines et sociales pour devenir une technique<span style="text-decoration:underline;">.</span></p> <p class="texte" dir="ltr">C&#39;est pourquoi le &quot;vide&quot; persiste encore. Or ce &quot;vide&quot; la psychologie politique est en mesure de le combler, &agrave; condition d&eacute;passer la simple utilisation des m&eacute;thodes psychosociologiques pour &eacute;tudier les comportements de &quot;consommation&quot;.</p> <p class="texte" dir="ltr">Pour y parvenir il faudrait la re-ouverture des vieux chantiers &eacute;pist&eacute;mologiques qui renforcent le cloisonnement de chaque discipline. Car le manque de dialogue et d&#39;inter-communication entre les disciplines humanistes et sociales a fortement contribu&eacute; &agrave; leur propre &eacute;puisement sous la forme des micro-th&eacute;ories autonomes.</p> <h1 dir="ltr" id="heading10">1O. Un chantier sorti de la nuit des temps&nbsp;: religion, psychologie et politique</h1> <p class="texte" dir="ltr">La question de la relation omnipr&eacute;sente de la religion avec l&#39;ensemble des ph&eacute;nom&egrave;nes sociaux, politiques et psychologiques est un truisme. Tous les auteurs classiques en conviennent. L&#39;histoire en t&eacute;moigne. Or, le poser dans le cadre actuel, quand l&#39;emprise religieuse est &eacute;vanescente en occident, rel&egrave;ve d&#39;une r&eacute;flexion plus r&eacute;cente. La mont&eacute;e de l&#39;islamisme dans le monde et son caract&egrave;re terroriste (l&#39;attentat du 11 septembre 2001 &agrave; N. York) sont des faits, dont l&#39;amalgame est f&acirc;cheux, mais non moins pertinent.</p> <p class="texte" dir="ltr">Sans vouloir &eacute;voquer les clich&eacute;s, largement vulgaris&eacute;s par la presse, les r&eacute;flexions des quelques sociologues et politologues tels Kepel (1991), Barber (1997), puis Huntington (1996) montrent l&#39;importance contingente de la question religieuse de nos jours. L&#39;islam n&#39;&eacute;tant que le sommet d&#39;un iceberg, le renouveau religieux se trouve au c&oelig;ur de la transmutation culturelle, du malaise de soci&eacute;t&eacute; moderne et de la crise politique de la d&eacute;mocratie repr&eacute;sentative.</p> <p class="texte" dir="ltr">Faut-il rappeler l&#39;hypoth&egrave;se du r&ocirc;le la religion dans l&#39;organisation sociale, &agrave; l&#39;aube de l&#39;humanit&eacute;, et dans les p&eacute;riodes de crises profondes (le moyen &acirc;ge en occident reste un paradigme), pour comprendre son poids aujourd&#39;hui&nbsp;? Ainsi la figure que nous avons utilis&eacute;e (ci-haut) pour montrer l&#39;interaction des grandes repr&eacute;sentations du pouvoir nous permet de reposer la question de la religion comme le sommet historique de la pyramide de la notion d&#39;autorit&eacute;. C&#39;est l&#39;ordre religieux au sens th&eacute;ocratique qui reste dans l&#39;ombre, encore aujourd&#39;hui, de ordre &quot;politique&quot; .</p> <p class="texte" dir="ltr"><img alt="Image3" src="https://numerev.com/images/cpp/docannexe/image/1401/img-3.jpg" style="width:6.3957inch;height:3.5835inch;margin-left:0.0in;margin-right:0.0in;margin-top:0mm;margin-bottom:0mm;padding-top:0.0602in;padding-bottom:0.0602in;padding-left:0.1102in;padding-right:0.1102in;border:none" /></p> <p class="texte" dir="ltr"><a id="Image37Cgraphics"></a>Sans rallier les conclusions de l&#39;essai de<em> S. </em>Huntington (1996) faire attention &agrave; l&#39;&eacute;ventualit&eacute; d&#39;un retour du refoul&eacute; religieux est une attitude candide. La soci&eacute;t&eacute; occidentale est sortie depuis un moment des guerres de religion, quoique la virulence et la dur&eacute;e du conflit d&#39;Irlande du Nord devrait (nous) faire r&eacute;fl&eacute;chir davantage. D&#39;ailleurs, la s&eacute;paration de l&#39;&Eacute;tat et l&#39;&eacute;glise reste un v&oelig;u pieux dans un occident profond&eacute;ment marqu&eacute; par la tradition jud&eacute;o-chr&eacute;tienne.</p> <p class="texte" dir="ltr">Le r&eacute;veil muscl&eacute; de l&#39;Islam fait partie d&#39;une longue s&eacute;rie d&#39;&eacute;v&egrave;nements qui montre la fragilit&eacute; des valeurs la&iuml;ques et le retrait des positions mat&eacute;rialistes, scientifiques et rationalistes.</p> <p class="texte" dir="ltr">Le retour du religieux en politique - sous diverses formes - s&#39;inscrit dans la crise qui traverse depuis plus d&#39;un si&egrave;cle la culture dite occidentale.&nbsp; Faut-il insister sur le fait qu&#39;il s&#39;agit d&#39;une crise de &quot;sens&quot; plut&ocirc;t que de &quot;v&eacute;rit&eacute;&quot;&nbsp;? Il y a l&agrave; un vaste terrain vide, jadis occup&eacute; tant bien que mal par ce que certains appellent encore le &quot;sacr&eacute;&quot;, c&#39;est &agrave; dire le rapport psychologique de l&#39;homme avec le cosmos. Question ancienne, mais jamais vraiment d&eacute;pass&eacute;e, qui retrouve une place dans les nouveaux rapports &agrave; ciel ouvert que la religion tisse avec la politique &agrave; travers la reconversion religieuse des anciens pays communistes, la vision providentielle de l&#39;id&eacute;ologie lib&eacute;rale de G.W. Bush ou l&#39;engagement des islamistes dans le terrorisme politique.</p> <p class="texte" dir="ltr">Comment expliquer cette renaissance religieuse&nbsp;? Les r&eacute;ponses sont multiples,&nbsp; Spengler n&#39;a-t-il pas d&eacute;j&agrave; parl&eacute; au d&eacute;but du XX si&egrave;cle de la &quot;d&eacute;cadence d&#39;occident&quot;, l&#39;impact de la modernisation et la technologie sur les structures traditionnelles, les traumatismes affectifs et sociaux,&nbsp; la fragmentation de l&#39;homme moderne, et les besoins qui en d&eacute;coulent autour de la recherche d&#39;une nouvelle identit&eacute; dans un monde sans rep&egrave;res. En somme&nbsp;: c&#39;est une r&eacute;action en cha&icirc;ne &agrave; la la&iuml;cisation de la soci&eacute;t&eacute;, au relativisme culturel et moral, &agrave; l&#39;individualisme et la solitude des masses. Les cons&eacute;quences sont une r&eacute;affirmation des valeurs canoniques d&#39;ordre, de discipline, de solidarit&eacute; de groupe et de coh&eacute;rence psychologique.&nbsp;</p> <p class="texte" dir="ltr">En quelque sorte la religion prend la place de l&#39;id&eacute;ologie de l&#39;&eacute;mancipation politique, et, le nationalisme confessionnel celle du cosmopolitisme r&eacute;volutionnaire issu des r&eacute;volutions modernes. La force de la transfiguration du religieux nous r&eacute;v&egrave;le un fait &eacute;tonnant&nbsp;: le retour de la religion touche toutes les couches sociales, notamment dans les pays occidentaux&nbsp;: les secteurs urbains, les immigr&eacute;s, les jeunes et certains intellectuels d&eacute;&ccedil;us de la modernit&eacute;.</p> <p class="texte" dir="ltr">Impossible donc de faire comme si ce chantier n&#39;existait pas. Or, les psychosociologues exp&eacute;rimentalistes campent sur des positions r&eacute;volues en mati&egrave;re de religion, sauf quelques rares exceptions. Il faut se tourner du c&ocirc;t&eacute; de la sociologie classique et des &eacute;tudes en sciences politiques pour reprendre les traces d&#39;une si longue histoire et d&#39;une rentr&eacute;e si peu attendue, malgr&eacute; les signes existants depuis fort longtemps.</p> <h1 dir="ltr" id="heading11">11. Le besoin d&#39;une r&eacute;flexion inattendue&nbsp;: les rapports entre l&#39;&eacute;tat de la science et la pratique politique.</h1> <p class="texte" dir="ltr">L&#39;emprise du mod&egrave;le de sciences dures sur les SHS s&#39;est effrit&eacute;e. Nombreux sont les voix qui se prononcent pour une r&eacute;vision de l&#39;&eacute;tat de la question. L&#39;&eacute;cart entre l&#39;&eacute;motion et la raison est en train d&#39;&ecirc;tre d&eacute;pass&eacute;.</p> <p class="texte" dir="ltr">La fragmentation des sciences humaines et sociales (SHS) dont nous avons d&eacute;cel&eacute; une de raisons du retour de la psychologie politique et de la tache de se doter d&#39;une nouvelle transdisciplinarit&eacute; pose un probl&egrave;me encore majeur&nbsp;: la crise de l&#39;approche scientifique et des mod&egrave;les issus de la modernit&eacute; est-elle responsable de l&#39;absence d&#39;un projet alternatif de soci&eacute;t&eacute;&nbsp;?</p> <p class="texte" dir="ltr">La crise de la modernit&eacute; frappe tous les domaines. C&#39;est une d&eacute;flagration, dont les cons&eacute;quences sont politiques. Le marasme d&eacute;mocratique r&eacute;ponde - &agrave; notre avis- &agrave; l&#39;essoufflement du projet humaniste et rationaliste des lumi&egrave;res. De fait, les SHS esse trouvent dans l&#39;&oelig;il du cyclone. Comment ne pas s&#39;apercevoir que la fragmentation du savoir en SHS et la multiplication de micro-th&eacute;ories laissent sans r&eacute;ponse les grandes questions de soci&eacute;t&eacute; de ces deux derniers si&egrave;cles.</p> <p class="texte" dir="ltr">En r&eacute;alit&eacute;, l&#39;&eacute;poque contemporaine traverse une crise aigu&euml; de manque de synth&egrave;ses, dont le sympt&ocirc;me est la perte du sens collectif et d&#39;un horizon th&eacute;orique. L&#39;avenir est envisag&eacute; subjectivement d&#39;une mani&egrave;re incertaine et ind&eacute;chiffrable. L&#39;ambigu&iuml;t&eacute; brouille les pistes, renverse les perspectives et fragmente la vision du monde introduite par la modernit&eacute;. Le si&egrave;cle des lumi&egrave;res s&#39;obscurcit. La perception de ses grands principes fondateurs (la rationalit&eacute;, l&#39;universalisme, l&#39;humanisme et la la&iuml;cit&eacute;) se trouble et la r&eacute;alit&eacute; se fait &eacute;vanescente.</p> <p class="texte" dir="ltr">La soci&eacute;t&eacute; actuelle est per&ccedil;ue en cons&eacute;quence comme plus complexe et son processus d&#39;&eacute;volution fort peu ma&icirc;trisable. Les cadres de compr&eacute;hension de ses racines, la relation entre soci&eacute;t&eacute; et individu, culture et politique, se trouvent profond&eacute;ment alt&eacute;r&eacute;s et m&eacute;connus de surcro&icirc;t. D&#39;ailleurs, si la soci&eacute;t&eacute; moderne retrouve une nouvelle phase de globalisation, la transformation des rapports humains et des rapports de production modifie les mentalit&eacute;s autant que les contours de la civilisation. De fait, dans ce contexte, le mod&egrave;le d&eacute;mocratique montre ses limites, curieusement, au moment m&ecirc;me o&ugrave; il s&#39;impose &agrave; l&#39;&eacute;chelle de la plan&egrave;te.&nbsp;</p> <p class="texte" dir="ltr">Certes, la soci&eacute;t&eacute; est devenue r&eacute;flexive, autocritique et globale, mais la sociologie de la modernisation est en train de d&eacute;velopper un fatalisme n&eacute;gatif et des comportements &agrave; la fois plus comp&eacute;titifs et davantage individualistes. Les rapports sociaux et les expectatives psychologiques ont chang&eacute; de nature. En cons&eacute;quence, l&#39;approche des SHS n&#39;&eacute;chappe gu&egrave;re &agrave; cette &eacute;volution g&eacute;n&eacute;rale.&nbsp;</p> <p class="texte" dir="ltr">Si une telle incertitude touche &agrave; la fois le domaine de l&#39;exp&eacute;rience individuelle et celui des institutions collectives, c&#39;est la pertinence, non seulement des gouvernements, mais &eacute;galement des sciences, autant les &quot;naturelles&quot; que les &quot;sociales&quot;, qui sont en cause. Certes, la question n&#39;est pas nouvelle en ce qui concerne les sciences sociales, mais elle pose &agrave; nouveau deux probl&egrave;mes, l&#39;un &eacute;voqu&eacute; dans les ann&eacute;es 60 par Snow, sur la s&eacute;paration progressive de la culture scientifique (dure) et de la culture litt&eacute;raire&nbsp; (molle), l&#39;autre un bilan paradoxal de la production de la connaissance en sciences sociales&nbsp;: le syndrome des &quot;micro-th&eacute;ories&quot;. Plus elles se multiplient (via les exp&eacute;riences de laboratoire ou les travaux purement empiriques), moins on dispose d&#39;une th&eacute;orie sociale explicative compatible avec l&#39;&eacute;volution vertigineuse du monde. En cons&eacute;quence, la connaissance s&#39;&eacute;miette, se fragmente et finit par se transformer en connaissance de rien. Il existe deux politiques du savoir que les politiques eux-m&ecirc;mes sont en train d&#39;&eacute;carteler&nbsp;: l&#39;attitude de l&#39;expert, de plus en plus l&eacute;gitim&eacute; par les pouvoirs, est trop partielle, car munie de la sensibilit&eacute; de l&#39;histoire. En revanche, l&#39;attitude du g&eacute;n&eacute;raliste correspond mieux &agrave; l&#39;urgence de tenir compte de l&#39;ensemble. Il s&#39;agit de renverser ou plut&ocirc;t re-&eacute;quilibrer la tendance &agrave; la micro-specialisation et l&#39;in communication du savoir qu&#39;en r&eacute;sulte. Une mani&egrave;re d&#39;envisager une telle d&eacute;marche consiste en r&eacute;concilier &agrave; la fois la raison et l&#39;&eacute;motion, la subjectivit&eacute; et l&#39;objectivit&eacute;, ainsi que la volont&eacute; de r&eacute;duire la distance entre les approches qualitatives et quantitatives. A fin d&#39;illustrer la t&acirc;che, voici un sch&eacute;ma (provisoire) de las variables &agrave; consid&eacute;rant en el analyses de las perceptions de l&#39;interaction sociale et politique.</p> <p class="texte" dir="ltr"><img alt="Image4" src="https://numerev.com/images/cpp/docannexe/image/1401/img-4.jpg" style="width:5.928inch;height:5.8528inch;margin-left:0.0in;margin-right:0.0in;margin-top:0mm;margin-bottom:0mm;padding-top:0.0602in;padding-bottom:0.0602in;padding-left:0.1102in;padding-right:0.1102in;border:none" /></p> <p class="texte" dir="ltr"><a id="Image47Cgraphics"></a>Ce sch&eacute;ma (simple &eacute;chafaudage &agrave; revisiter) re-introduit trois dimensions, &agrave; notre avis n&eacute;glig&eacute;es par la psychologie sociale et les SHS lorsqu&#39;elles se penchent dans la recherche d&#39;explication de la r&eacute;alit&eacute; construite par les hommes. A savoir&nbsp;: la culture, l&#39;historie et le temps. Les &eacute;l&eacute;ments que nous appelons &quot;ant&eacute;c&eacute;dents&quot; sont le levier de la situation hic nunc, autant que les variables dites d&#39;expectatives (cons&eacute;quences per&ccedil;us par les individus) permettent d&#39;envisager le cadre large dans lequel se situe le processus psychologique des changements politiques.</p> <p class="texte" dir="ltr">En r&eacute;alit&eacute;, notre d&eacute;marche appel la coop&eacute;ration transversale des connaissances, au lieu de chercher le paradigme perdu ou le retour &agrave; la matrice originale Voil&agrave; la question d&#39;une heuristique psychopolitique&nbsp;: simplement observer les ph&eacute;nom&egrave;nes en mouvement, et l&#39;interaction des comportements humains dans un devenir historique (avec continuit&eacute; et ruptures), dont les cons&eacute;quences peuvent &ecirc;tre per&ccedil;ues, sans faire de la rationalit&eacute; un syst&egrave;me ferm&eacute;, ni postuler une connaissance unique et ind&eacute;passable, en dehors de la exp&eacute;rience, &agrave; la fois objective et subjective.&nbsp;</p> <p class="bibliographie" dir="ltr">Albou P. 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