<blockquote> <h1 dir="ltr" id="heading1">Introduction</h1> <p class="citation" dir="ltr">&laquo;&nbsp;Le d&eacute;senchantement du monde, ce n&#39;est pas donc pas seulement la n&eacute;gation de l&#39;interf&eacute;rence du surnaturel dans l&#39;ici-bas, mais aussi la vacance du sens&nbsp;&raquo;,C. Colliot-Th&eacute;l&egrave;ne</p> </blockquote> <p class="texte" dir="ltr">Le retour du religieux est l&agrave;&nbsp;: l&rsquo;islamisme explose depuis plus de 35 ans.</p> <p class="texte" dir="ltr">Le chah d&rsquo;Iran avait entrepris, par r&eacute;f&eacute;rendum, dans les ann&eacute;es soixante, un vaste programme de progr&egrave;s social et de d&eacute;veloppement &eacute;conomique (la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Révolution_blanche">R&eacute;volution blanche</a>). Le chah visait une r&eacute;g&eacute;n&eacute;ration non-violente de la soci&eacute;t&eacute; iranienne &agrave; travers des r&eacute;formes &eacute;conomiques et sociales, avec l&rsquo;objectif &agrave; long terme de transformer l&#39;Iran en une puissance industrielle mondiale &agrave; l&rsquo;occidentale. Or, cette &laquo;&nbsp;r&eacute;volution&nbsp;&raquo; fut associ&eacute;e &agrave; la <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Savak">Savak</a> (police politique) qui s&rsquo;acharna &agrave; r&eacute;primer les mouvements d&rsquo;opposition d&rsquo;inspiration chiite, incarn&eacute;s par les partisans de l&rsquo;ayatollah Khomeiny. Le plus remarquable est la d&eacute;sarticulation entre la tradition et l&rsquo;id&eacute;e de modernit&eacute;. La raison politique &eacute;largit le foss&eacute; &eacute;conomique, social et culturel entre une &eacute;lite fortement occidentalis&eacute;e et une classe populaire sensible au <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Conservatisme">conservatisme</a> religieux. En r&eacute;sum&eacute;, la modernisation propos&eacute;e par le chah est devenue purement technique et nullement une modernit&eacute; au sens occidental du terme. Non sans paradoxe, un islamisme qui lie le fanatisme et la technique sophistique. Plusieurs de ses cadres sont des techniciens en informatique.</p> <p class="texte" dir="ltr">Les dirigeants du parti socialiste fran&ccedil;ais et presque l&rsquo;ensemble de la social-d&eacute;mocratie d&rsquo;Europe font l&rsquo;erreur d&rsquo;appuyer id&eacute;ologiquement le r&eacute;volution iranienne dirig&eacute;e par les religieux et de ne pas &eacute;couter les demandes de l&#39;opposant <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Social-démocrate">social-d&eacute;mocrate</a> <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Shapour_Bakhtiar">Chapour Bakhtiar</a>. La raison est la vieille croyance id&eacute;ologique marxiste que les nationalismes du tiers monde &eacute;taient potentiellement pr&eacute;f&eacute;rables aux r&eacute;formismes sous la d&eacute;pendance des influences am&eacute;ricaines. <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Shapour_Bakhtiar">Chapour Bakhtiar</a> sera assassin&eacute; &agrave; Paris, et le chah mourra en exil. Tout le monde arabe ou presque c&eacute;l&egrave;bre la victoire de la r&eacute;volution iranienne et l&rsquo;islamisme chiite se trouve au milieu d&rsquo;une puissante renaissance de l&rsquo;id&eacute;ologie nationale-islamiste. Et, d&rsquo;une mani&egrave;re certaine, l&rsquo;Iran des ayatollahs jouera un r&ocirc;le incontestable dans le d&eacute;clenchement d&rsquo;un islamisme religieux conqu&eacute;rant et violent, dont le terrorisme islamique actuel est l&rsquo;&eacute;cho manifeste des guerres de religion.</p> <p class="texte" dir="ltr">Toutefois, les religions sont des ordonnateurs sociaux et des axes politiques, en faisant des diff&eacute;rences entre la doctrine, l&rsquo;id&eacute;ologie, la foi et la politique.</p> <p class="texte" dir="ltr">La Bible convoque la foi, voire l&rsquo;id&eacute;ologie catholique, et les encycliques articulent, dans le temps, la n&eacute;cessaire r&eacute;affirmation doctrinaire, afin de construire un mod&egrave;le institutionnel, et faire de l&rsquo;&Eacute;glise un pouvoir terrestre.</p> <p class="texte" dir="ltr">Le Coran et la Torah jouent le m&ecirc;me r&ocirc;le d&rsquo;adaptateurs doctrinaux, dans le temps et le devenir historiques.</p> <h1 dir="ltr" id="heading2">I.- La question br&ucirc;lante du retour du religieux</h1> <p class="texte" dir="ltr">La question religieuse et politique , et les grands ph&eacute;nom&egrave;nes sociaux et religieux, presque en sommeil depuis de nombreuses ann&eacute;es, ont eu du mal &agrave; trouver des explications th&eacute;oriques et &agrave; s&rsquo;int&eacute;grer en termes &laquo;&nbsp;scientifiques&nbsp;&raquo; &agrave; l&rsquo;ensemble des disciplines des Sciences humaines et sociales, probablement d&ucirc; au fait que le noyau explicatif se trouve dans une longue et profonde crise &eacute;pist&eacute;mologique et ses diverses voies d&rsquo;interpr&eacute;tation.</p> <p class="texte" dir="ltr">Pourtant, religion et politique ont longtemps &eacute;t&eacute; pens&eacute;es presque comme indissociables, autant dans l&#39;Antiquit&eacute; gr&eacute;co-romaine qu&rsquo;au Moyen &Acirc;ge chr&eacute;tien&nbsp;: les sph&egrave;res politique et religieuses semblaient inextricablement nou&eacute;es dans des logiques immanentes propos&eacute;es par les religions ou dans un rapport de subordination port&eacute; par les historiens dans une vision de continuit&eacute; et de rupture de paradigmes. Or, la modernit&eacute; change le paradigme et propose, certains pensent &agrave; tort, de s&eacute;parer le religieux du politique au nom de la s&eacute;cularisation de la religion et de l&rsquo;instauration de la la&iuml;cit&eacute;.</p> <p class="texte" dir="ltr">La question br&ucirc;lante que pose au politique le retour du religieux, engage &nbsp;la qu&ecirc;te de sens, la conception de l&rsquo;ordre et de la paix sociale, et relance sous de nouvelles formes le questionnement du pouvoir absolu autant religieux que civil. Bref, le dilemme de la soumission &agrave; l&rsquo;autorit&eacute;. D&rsquo;o&ugrave; le besoin de rappeler les liens historiques et affectifs anciens entre politique et religion.</p> <p class="texte" dir="ltr">Le sociologue Voegelin nous introduit &agrave; la relation entre politique et religion ainsi&nbsp;: &laquo;&nbsp;Qui parle de religion pense &agrave; l&rsquo;institution de l&rsquo;&Eacute;glise&nbsp;, et qui parle de politique pense &agrave; l&rsquo;Etat&nbsp;&raquo;.</p> <p class="texte" dir="ltr">Au d&eacute;part, probablement, la religion &eacute;tait une mani&egrave;re de se repr&eacute;senter le monde et de r&eacute;pondre aux questions philosophiques initiales.&nbsp;Celles qui impliquent la nature de l&rsquo;univers et de l&rsquo;homme.&nbsp;: qui suis-je, d&rsquo;o&ugrave; viens-je, o&ugrave; vais-je, qui domine quoi&nbsp;? Certes, les liens de la culture religieuse et de la politique sont anciens, mais&nbsp;l&#39;emprise religieuse est devenue bien diff&eacute;rente et presque &eacute;vanescente en Occident par rapport &agrave; l&rsquo;Orient. La s&eacute;cularisation que r&eacute;clame la modernit&eacute; a cr&eacute;&eacute; en Europe un monde la&iuml;que et une pens&eacute;e technicienne. Or, en Orient, la mont&eacute;e d&#39;un islamisme politique et la renaissance d&rsquo;un terrorisme jihadiste provoquent des effets mystiques et politiques qui &eacute;mergent comme des champignons, en Occident aussi. Ev&eacute;nement d&rsquo;un grand impact psychologique, et en m&ecirc;me temps r&eacute;v&eacute;lateur d&rsquo;une inqui&eacute;tude croissante. Une r&eacute;flexion s&rsquo;av&egrave;re n&eacute;cessaire.</p> <p class="texte" dir="ltr">Dans la conjoncture pr&eacute;sente, le wahhabisme, cette vision <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Puritanisme">puritaine</a> et <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Rigorisme">rigoriste</a><sup>[ ]</sup> issue de l&#39;<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Islam">islam</a> <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Sunnite">sunnite</a>, selon laquelle l&#39;islam devrait &ecirc;tre ramen&eacute; &agrave; sa forme originelle d&eacute;finie selon une interpr&eacute;tation orthodoxe et conservatrice du Coran. Le Jihad&nbsp;extr&eacute;miste politico-religieux, dont la branche arm&eacute;e est l&rsquo;&Eacute;tat Islamique autoproclam&eacute;, tire toutes les ficelles. Son objectif est de r&eacute;pandre l&rsquo;islam fondamentaliste par le fer et le feu en profitant de la d&eacute;sorganisation que les Occidentaux ont introduite dans la plupart des pays musulmans par la suppression des chefs d&rsquo;&Eacute;tats la&iuml;ques qui tenaient les populations et les religieux musulmans d&rsquo;une main de fer.</p> <p class="texte" dir="ltr">Il y a dans l&rsquo;actualit&eacute; une s&eacute;rie de faits dont l&#39;amalgame est f&acirc;cheux, mais qu&rsquo;il est indispensable de tenir en compte pour r&eacute;interroger le ph&eacute;nom&egrave;ne religieux dans sa remarquable actualit&eacute;. Sans se rallier aux conclusions h&acirc;tives de certains politologues, <a id="idx0"></a>poser la question d&#39;un retour du religieux comme d&rsquo;un refoul&eacute; psychologique n&rsquo;est pas une attitude candide. Faut-il insister sur le fait que la crise contemporaine est plut&ocirc;t une qu&ecirc;te de &laquo;&nbsp;sens&nbsp;&raquo;, qu&rsquo;un probl&egrave;me de recherche de solutions &eacute;conomiques. De ce point de vue, c&rsquo;est un vaste terrain vide, jadis occup&eacute; tant bien que mal par la question des rapports moraux de l&#39;homme avec le cosmos et d&rsquo;une harmonie gouvernementale.</p> <h1 dir="ltr" id="heading3">II.-Le processus rationnel de s&eacute;cularisation en Europe</h1> <p class="texte" dir="ltr">C&#39;est pourtant ce lien &eacute;troit que la philosophie moderne a petit &agrave; petit d&eacute;fait, en commen&ccedil;ant par jeter les bases th&eacute;oriques d&#39;un &Eacute;tat souverain d&eacute;barrass&eacute; de toute tutelle th&eacute;ologique. Machiavel, Hobbes et Spinoza, chacun &agrave; sa mani&egrave;re, ont contribu&eacute; &agrave; ce mouvement.Or, contrairement &agrave; une opinion assez r&eacute;pandue, il n&rsquo;existe pas encore de th&eacute;orie de la religion qui s&rsquo;articule de mani&egrave;re int&eacute;grale avec l&rsquo;&acirc;me de la cit&eacute; et l&rsquo;ensemble des donn&eacute;es empiriques des SHS, seulement une foule de travaux sur l&rsquo;exp&eacute;rience religieuse, qui campent sur des positions r&eacute;volues du c&ocirc;t&eacute; de la philosophie et de la sociologie classiques et des &eacute;tudes en sciences politiques qui recherchent les traces d&#39;une si longue histoire. La rentr&eacute;e th&eacute;matique de l&rsquo;int&eacute;grisme religieux est si peu attendue en Occident, malgr&eacute; des signes existant depuis fort longtemps, que la r&eacute;flexion politique se trouve en d&eacute;calage avec l&rsquo;&eacute;v&eacute;nement.</p> <p class="texte" dir="ltr">La croyance en Dieu peut r&eacute;sulter d&rsquo;une adh&eacute;sion &agrave; l&rsquo;ordre naturel des choses ou aux exigences de la raison. C&rsquo;est une union dans la croyance g&eacute;n&eacute;rale. Car certains auteurs pensent que la religion correspondrait &agrave; un besoin, chez l&rsquo;homme, de donner sens &agrave; l&rsquo;existence, et &agrave; sa pr&eacute;sence dans le monde. Elle permettrait de donner des rep&egrave;res, une sorte de grille de lecture pour comprendre l&rsquo;environnement au sens large. Elle structure les communaut&eacute;s puisque la religion prescrit et interdit &agrave; travers des r&egrave;gles et des valeurs.</p> <p class="texte" dir="ltr">Par ailleurs, le fait religieux est ancestral au point de constituer le premier cadre d&rsquo;interpr&eacute;tation du monde. Certes, la rationalit&eacute; et l&rsquo;approche scientifique ont d&eacute;plac&eacute; le probl&egrave;me spirituel, mais la vitalit&eacute; du fait religieux reste toujours source de pol&eacute;miques, et des r&eacute;actions politiques.</p> <p class="texte" dir="ltr">Si nous prenons l&rsquo;&eacute;tymologie de la notion de religion&nbsp;(religare) se pose la question du sujet social et du sens qu&rsquo;il donne &agrave; la vie en fonction de la communaut&eacute; d&rsquo;appartenance, et de la culture o&ugrave; les croyances nichent.</p> <p class="texte" dir="ltr">Ainsi, ce dossier se trouve &agrave; la crois&eacute;e de plusieurs grands champs d&rsquo;&eacute;tude, en particulier de la psychologie sociale et politique, sans pr&eacute;tendre &agrave; aucune exhaustivit&eacute;. Il s&rsquo;agit d&rsquo;un regard ouvert et sans fronti&egrave;res. Mais dans une perspective de compr&eacute;hension et d&rsquo;observation de l&rsquo;ensemble de la transmission et de ses formes diverses.</p> <p class="texte" dir="ltr">Le retour du religieux (version islamiste) pose au politique une confuse qu&ecirc;te de sens, d&rsquo;ordre et de paix sociale, sous la forme de questionnement du pouvoir et de soumission au pouvoir. D&rsquo;o&ugrave; le besoin de rappeler les liens anciens entre politique et religion.</p> <p class="texte" dir="ltr">Au d&eacute;part, probablement, la religion est une mani&egrave;re de se repr&eacute;senter le monde et de r&eacute;pondre aux questions philosophiques fondamentales&nbsp;que l&rsquo;homme se pose de tout temps&nbsp;: qui suis-je, d&rsquo;o&ugrave; viens-je, o&ugrave; vais-je&nbsp;? La croyance en Dieu peut r&eacute;sulter d&rsquo;une adh&eacute;sion &agrave; l&rsquo;ordre naturel des choses ou aux exigences de la raison. Il faut incarner des principes et de les reconna&icirc;tre chez les autres. C&rsquo;est une union de la croyance g&eacute;n&eacute;rale et de la conviction personnelle. En croyant en dieu ou aux dieux, les hommes rendent la vie &eacute;ternelle plus supportable. Polyth&eacute;iste ou monoth&eacute;iste, la religion est le ressort logique ultime qui peut &ecirc;tre fond&eacute; sur la raison dont l&rsquo;ordre se fige tout en donnant un sens &agrave; la vie, &agrave; la distance et &agrave; l&rsquo;univers.</p> <p class="texte" dir="ltr">K. Marx fait la critique de mani&egrave;re presque po&eacute;tique&nbsp;: &laquo;&nbsp;Consolation face &agrave; la souffrance et la mort, la religion est le soupir de la cr&eacute;ature opprim&eacute;e, l&rsquo;&acirc;me d&rsquo;un monde sans c&oelig;ur, c&rsquo;est l&rsquo;esprit d&rsquo;une &eacute;poque sans raison&nbsp;&raquo;.</p> <p class="texte" dir="ltr">Comme disait Gracian&nbsp;: en mati&egrave;re de religion, gardons les yeux grand ouverts. Car les rapports entre le politique et le religieux se trouvent entrem&ecirc;l&eacute;s depuis des temps imm&eacute;moriaux. D&rsquo;o&ugrave; le poids du respect de l&rsquo;ordre &eacute;tabli par la croyance au sacr&eacute; et l&rsquo;ob&eacute;issance au pouvoir, soit par les commandements religieux, aux dires d&rsquo;Alain&nbsp;: &laquo;&nbsp;C&rsquo;est par l&rsquo;ob&eacute;issance que le citoyen assure l&rsquo;ordre, par la r&eacute;sistance , il assume la libert&eacute;&nbsp;&raquo;.</p> <h1 dir="ltr" id="heading4">III.- La force du retour du religieux</h1> <p class="texte" dir="ltr">Le discours politique, dans ce d&eacute;but du XXIe si&egrave;cle, se tourne vers le religieuxavec un<strong>e</strong> sinistre &eacute;vidence, car <strong>la </strong>mont&eacute;e du sentiment religieux implique une grille delecture id&eacute;ologique, et une qu&ecirc;te de sens.Les attentats au nom de Dieu en t&eacute;moignent. Les conflits interreligieux sont &agrave; nouveau &agrave; l&rsquo;ordre du jour. L&rsquo;int&eacute;grisme islamique s&rsquo;est propag&eacute; dans le monde sur fond de crise sociale et politique. Le massacre des journalistes de &laquo;&nbsp;Charlie&nbsp;Hebdo&nbsp;&raquo; illustre de mani&egrave;re frappante le ph&eacute;nom&egrave;ne d&rsquo;une religion qui se fait politique. La formation d&rsquo;un Califat islamique attire les jeunes musulmans et les convertis. En France, malgr&eacute; la manifestation du 11 janvier &laquo;&nbsp;nous sommes tous Charlie&nbsp;&raquo;, la r&eacute;surgence de l&rsquo;antis&eacute;mitisme et l&rsquo;&eacute;mergence d&rsquo;un islamo-fascisme fascinent &agrave; nouveau.</p> <p class="texte" dir="ltr">Il s&rsquo;av&egrave;re d&rsquo;&eacute;vidence que la crise politique&nbsp;et les in&eacute;galit&eacute;s &eacute;conomiques engendr&eacute;es par le syst&egrave;me capitaliste mondial r&eacute;v&egrave;lent une col&egrave;re et une peur longtemps oubli&eacute;s. D&rsquo;o&ugrave; une situation devenue confuse. La violence se lie &agrave; une nouvelle th&eacute;ologie politique.</p> <p class="texte" dir="ltr">L&rsquo;explication des fanatismes religieux&nbsp;est psychologique&nbsp;: recherche de certitude devant le sentiment d&rsquo;impuissance.</p> <p class="texte" dir="ltr">L&rsquo;inqui&eacute;tude et le dogmatisme ont tendance a se renforcer. Faut-il oublier le lourd pass&eacute; de l&rsquo;identification du politique et du religieux.</p> <p class="texte" dir="ltr">La contre-r&eacute;volution d&eacute;mocratique au nom du sacr&eacute; s&rsquo;enfonce dans la postmodernit&eacute;&nbsp;: m&eacute;langes &eacute;tranges des dieux mythiques et des hommes transhumanistes.</p> <p class="texte" dir="ltr">La g&eacute;opolitique mondiale serait travers&eacute;e par le &laquo;&nbsp;retour du religieux&nbsp;&raquo;, devenu la principale cl&eacute; de compr&eacute;hension des bouleversements du monde postmoderne. Sans tomber dans le discours id&eacute;ologique du &laquo;&nbsp;choc des civilisations&nbsp;&raquo;,en ce d&eacute;but de XXI<sup>e</sup> si&egrave;cle, Il est incontestable que les conflits de religion construisent un mod&egrave;le&nbsp;d&eacute;figur&eacute;, voire criminel&nbsp;? C&rsquo;est un rappel des guerres de religion en Europe. Force est de constater que la question du religieux se place souvent au centre de leurs r&eacute;flexions politiques.</p> <p class="texte" dir="ltr">Fin du politique ou mainmise du religieux sur le politique&nbsp;? Retour du religieux sous une forme n&eacute;oconservatrice&nbsp;? La question religieuse est-elle une forme d&rsquo;id&eacute;ologie&nbsp;?</p> <p class="texte" dir="ltr">L&rsquo;arch&eacute;ologie des violences modernes est &agrave; rechercher dans la R&eacute;volution fran&ccedil;aise et les longs si&egrave;cles des guerres de religion en Europe.</p> <p class="texte" dir="ltr">Rien d&rsquo;&eacute;tonnant que les n&eacute;o-libertariens (variante d&rsquo; ex-r&eacute;publicains conservateurs) red&eacute;couvrent l&rsquo;&oelig;uvre de Leo Strauss (1899-1973), philosophe allemand &eacute;migr&eacute; aux &Eacute;tats-Unis en 1937, dont la r&eacute;flexion sur l&rsquo;opposition moderne entre l&rsquo;humanisme des Lumi&egrave;res et la logique religieuse de la R&eacute;v&eacute;lation est la clef pour comprendre la politique. Leo Strauss&nbsp;d&eacute;veloppe ce dilemme, insurmontable &agrave; ses yeux, en r&eacute;fl&eacute;chissant sur la condition juive et le probl&egrave;me de l&rsquo;&eacute;mancipation des Juifs europ&eacute;ens, que le lib&eacute;ralisme politique issu des Lumi&egrave;res n&rsquo;a pas r&eacute;ussi &agrave; r&eacute;soudre. Il oppose le mod&egrave;le d&rsquo;Ath&egrave;nes, la logique platonicienne et le scandale de la mort de Socrate au mod&egrave;le de la J&eacute;rusalem du proph&eacute;tisme. Le premier &eacute;tant en d&eacute;finitive incapable, selon lui, de prouver sa sup&eacute;riorit&eacute; sur le second. Optimisme de l&rsquo;intelligence, ou domination de la volont&eacute; du mal .</p> <p class="texte" dir="ltr">Le phantasme de la quatri&egrave;me guerre mondiale, les gentils contre les barbares, plane. Ce serait le retour selon Leo Strauss de ce qu&rsquo;il est le dernier appel au &laquo;&nbsp;nihilisme allemand&nbsp;&raquo; comme r&eacute;action au danger per&ccedil;u d&rsquo;une fin de civilisation. Selon Strauss, c&rsquo;est &laquo;&nbsp;un amour de la morale, un sentiment de responsabilit&eacute; envers une morale en p&eacute;ril &raquo; qui m&egrave;ne, paradoxalement, les id&eacute;ologues du nazisme &agrave; se lib&eacute;rer des lois et de la morale conventionnelle et &agrave; pr&ocirc;ner un nouvel ordre rationnel de la violence, visant &agrave; exterminer tous les symboles suppos&eacute;s &ecirc;tre les symboles de la d&eacute;g&eacute;n&eacute;rescence, jug&eacute;e intol&eacute;rable. C&rsquo;est l&agrave; un m&eacute;canisme intellectuel du m&ecirc;me type qui semble animer aujourd&rsquo;hui les id&eacute;ologues du terrorisme anti-terroriste&nbsp;: un &laquo;&nbsp;hubris exterminateur&nbsp;&raquo;, &eacute;videmment&nbsp;, &agrave; l&rsquo;ordre du jour, mais qui, au nom de la d&eacute;fense de la &laquo;&nbsp;civilisation&nbsp;&raquo; jud&eacute;o-chr&eacute;tienne, au c&oelig;ur des tenants du nouveau discours id&eacute;ologique am&eacute;ricain. Conservateurs et d&eacute;mocrates partagent une vision religieuse du r&ocirc;le de la nation am&eacute;ricaine. On conna&icirc;t aujourd&rsquo;hui la force id&eacute;ologique de ce mythe, et sa puissance coh&eacute;sive qui fait de l&rsquo;Am&eacute;rique le plus grand d&eacute;fenseur du pluralisme id&eacute;ologique.</p> <h1 dir="ltr" id="heading5">IV.- L&rsquo;id&eacute;ologie&nbsp;religieuse&nbsp;: un&nbsp;hubris exterminateur</h1> <p class="texte" dir="ltr">L&rsquo;id&eacute;ologie est un syst&egrave;me plus ou moins coh&eacute;rent d&rsquo;id&eacute;es et de valeurs que les hommes, &agrave; des &eacute;poques diff&eacute;rentes, se font de la r&eacute;alit&eacute; sociale.</p> <p class="texte" dir="ltr">Ce sont des opinions &eacute;rig&eacute;es en principes non susceptibles de se mettre en question, sous peine de d&eacute;truire les constructions interpr&eacute;tatives qu&rsquo;on se fait du monde. Les id&eacute;ologies peuvent prendre l&rsquo;allure de&nbsp;constructions&nbsp;: politiques, religieuses, &eacute;conomiques, morales et m&ecirc;me scientifiques.</p> <p class="texte" dir="ltr">En outre, ce sont des repr&eacute;sentations psychologiques <em>ad hoc</em> au sens subjectif du terme qui s&rsquo;appuient sur des raisonnements logiques. C&rsquo;est un terme qui s&rsquo;est impos&eacute; au d&eacute;but du XIXe si&egrave;cle (Dusttut de Tracy) et incorpor&eacute; au discours. Les marxistes d&eacute;signent ce concept comme c&oelig;ur des id&eacute;es fausses du syst&egrave;me politique dominant&nbsp;(capitalisme), chez Pareto la connotation est presque la m&ecirc;me avec le mot &laquo;&nbsp;d&eacute;rivations&nbsp;&raquo;</p> <p class="texte" dir="ltr">Aujourd&rsquo;hui le mot id&eacute;ologie est souvent utilis&eacute; par les sociologue et les politicologues en un sens large sans pr&eacute;juger de leur validit&eacute;, sous la forme de syst&egrave;mes d&rsquo;id&eacute;es que l&rsquo;on peut juger comme des religions s&eacute;culi&egrave;res. La notion d&rsquo;id&eacute;ologie a un caract&egrave;re flottant et trop commode. L&rsquo;id&eacute;ologie <em>per se</em> a des r&eacute;ponses &agrave; tout. C&rsquo;est la circulation fiduciaire d&rsquo;un num&eacute;raire mental sans valeur fixe. Ce sont des croyances syst&eacute;matis&eacute;es qui peuvent &ecirc;tre logiques (rationnelles ou irrationnelles), avec la pr&eacute;tention d&rsquo;&ecirc;tre vraies en fonction d&rsquo;int&eacute;r&ecirc;ts, de sentiments ou de raisons d&eacute;pendant du positionnement social ou &eacute;conomique des acteurs politiques, au point de traduire une psychologie de groupe (&eacute;lites) ou des institutions.</p> <p class="texte" dir="ltr">Les id&eacute;ologies sont des &laquo;&nbsp;machines &agrave; faire des dieux&nbsp;&raquo; selon la formule utilis&eacute;e par Monnerot et Moscovici.</p> <p class="texte" dir="ltr">Enfin, la religion est un produit immat&eacute;riel de la soci&eacute;t&eacute; et conditionn&eacute;e par les conceptions morales d&rsquo;une &eacute;poque , et la politique d&rsquo;un temps historique. Elle exprime l&rsquo;effet de d&eacute;tresse des hommes face aux myst&egrave;res du monde et doit &ecirc;tre soumise &agrave; une critique dans sa signification d&rsquo;illusion collective. Toute religion est impr&eacute;gn&eacute;e des images de consolation et d&rsquo;int&eacute;r&ecirc;ts sociaux.</p> <p class="texte" dir="ltr">Enfin, selon le mot latin <em>religare</em> (relier), les religions sont cens&eacute;es unir les hommes. Or, si elles unissent g&eacute;n&eacute;ralement les fid&egrave;les d&rsquo;une m&ecirc;me religion, elles se divisent parfois en interne, mais surtout entre elles. Rappelons le Moyen-Orient, des guerres d&eacute;termin&eacute;es par un contexte g&eacute;opolitique et &eacute;conomique deviennent des guerres proprement interreligieuses ou intra-religieuses. La religion n&rsquo;est pas la paix qu&rsquo;elle pr&eacute;tend &ecirc;tre. Au nom d&rsquo;un monde id&eacute;al, elle d&eacute;valorise la vie terrestre. Chez Marx, la religion se nourrit non seulement de la d&eacute;tresse sociale, mais elle contribue &agrave; l&rsquo;alimenter. Pour Nietzsche, la religion chr&eacute;tienne est hostile &agrave; la vie.</p> <h1 dir="ltr" id="heading6">V.- Les guerres de religions en Europe&nbsp;: sources de conflits politiques</h1> <p class="texte" dir="ltr">Pour se rendre compte de la nature et du r&ocirc;le politique de l&rsquo;institution religieuse, il est n&eacute;cessaire de revisiter le contexte et l&rsquo;&eacute;tendue des troubles religieux et la formule politique <em>in statu nascendi</em> dans l&rsquo;Europe des XVIe, XVIIe, XVIIIe et XIXe si&egrave;cles.</p> <p class="texte" dir="ltr">C&#39;est au c&oelig;ur du Saint-Empire romain germanique que naissent les guerres religieuses qui m&egrave;nent aux affrontements entre le protestantisme (<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Réforme_protestante">r&eacute;forme</a>), et le catholicisme (traditionnel). C&rsquo;est un mouvement dont la naissance est la protestation qui se d&eacute;cline en R&eacute;forme. Voil&agrave; la religion propos&eacute;e en nouvelle conception id&eacute;ologique .</p> <p class="texte" dir="ltr">Une rapide synth&egrave;se donnera un aper&ccedil;u pour &eacute;tayer l&#39;hypoth&egrave;se du caract&egrave;re &eacute;minemment politique de la fondation de la ma&ccedil;onnerie et de son expansion dans le monde.</p> <p class="texte" dir="ltr">La <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_des_paysans_allemands">guerre des paysans allemands</a> qui se d&eacute;roule de 1524 &agrave; 1526, m&ecirc;le &agrave; la fois les causes sociales et les disputes religieuses. Elle s&rsquo;actualise au <span style="font-variant:small-caps;">XVII</span><sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle avec la <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_de_Trente_ans">guerre de Trente Ans</a> qui opposa de 1618 &agrave; 1648, les princes et souverains protestants et catholiques. Par extension g&eacute;opolitique, l&rsquo;enjeu implique plusieurs pays voisins, comme la France, le Danemark, la Su&egrave;de et la Hongrie.</p> <p class="texte" dir="ltr">En France, les guerres de religion m&egrave;nent &agrave; une s&eacute;rie de conflits entre <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/1562">1562</a> et <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/1598">1598</a>.Elles s&#39;amorcent sous le r&egrave;gne de <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/François_II_de_France">Fran&ccedil;ois II</a> avec la <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Conjuration_d'Amboise">conjuration d&#39;Amboise</a> (1560) et trouvent leur paroxysme avec le <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Massacre_de_la_Saint-Barthélemy">massacre de la Saint-Barth&eacute;lemy</a> (1572). Elles se terminent par la signature de l&#39;<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Édit_de_Nantes">&eacute;dit de Nantes</a> en 1598. Or, &agrave; la fin du <span style="font-variant:small-caps;">XVII</span><sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle et au d&eacute;but du <span style="font-variant:small-caps;">XVIII</span><sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle, la <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Révocation_de_l'édit_de_Nantes">r&eacute;vocation de l&#39;&eacute;dit de Nantes</a> (1685) amena le roi de France <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Louis_XIV_de_France">Louis XIV</a> &agrave; lancer une s&eacute;rie de campagnes de <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Persécutions_religieuses">pers&eacute;cutions religieuses</a> &mdash; connues notamment sous le nom de &laquo;&nbsp;<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Dragonnades">dragonnades</a>&nbsp;&raquo; &mdash; contre les populations protestantes &agrave; l&#39;int&eacute;rieur m&ecirc;me du royaume de France, celles-ci aboutissant finalement &agrave; la <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_des_Cévennes">guerre des C&eacute;vennes</a> men&eacute;e contre les <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Camisards">Camisards</a>.</p> <p class="texte" dir="ltr">En Angleterre, en 1549, l&#39;introduction du <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Livre_de_la_prière_commune">Livre de la pri&egrave;re commune</a>, pr&eacute;sentant la th&eacute;ologie de la R&eacute;forme anglaise, provoque une r&eacute;volte. Cette reforme est tr&egrave;s impopulaire, en particulier dans les r&eacute;gions qui restent encore catholiques dans l&#39;ouest de l&#39;Angleterre. S&#39;ajoutant aux mauvaises conditions &eacute;conomiques, l&#39;attaque contre l&#39;&Eacute;glise catholique conduit &agrave; une explosion de col&egrave;re insurrectionnelle. Le roi envoie une arm&eacute;e compos&eacute;e en partie de mercenaires allemands et italiens pour la r&eacute;primer. Cette r&eacute;pression est jug&eacute;e actuellement par les autorit&eacute;s religieuses anglicanes comme une &laquo;&nbsp;erreur &eacute;norme&nbsp;&raquo;. De nombreux autres conflits noircissent les relations entre les deux religions pendant tout les XVIe et XVIIe si&egrave;cles. Notamment, les guerres dites des Trois Royaumes qui se d&eacute;roul&egrave;rent en <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Angleterre">Angleterre</a>, en <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Écosse">&Eacute;cosse</a> et en <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Irlande_(île)">Irlande</a> entre <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/1639">1639</a> et <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/1651">1651</a>, alors que ces trois pays avaient le m&ecirc;me <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Monarchie">monarq</a>ue. A cela s&rsquo;ajouta un mouvement nationaliste de l&#39;<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Irlande_(île)">Irlande</a> et de l&#39;<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Écosse">&Eacute;cosse</a> qui se rebell&egrave;rent contre l&#39;<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Angleterre">Angleterre</a>. Au <span style="font-variant:small-caps;">XVI</span><sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle, le roi <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Henri_VIII_d'Angleterre">Henri VIII </a>&nbsp;s&#39;&eacute;tait proclam&eacute; chef de l&#39;<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Anglicanisme">&Eacute;glise d&#39;Angleterre</a> et le <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Catholicisme">catholicisme</a> avait &eacute;t&eacute; interdit en Angleterre, m&ecirc;me si il restait cependant la religion de la majorit&eacute; de la population irlandaise, et d&rsquo;une grande partie de l&rsquo;&Eacute;cosse qui m&egrave;nent la r&eacute;sistance aux<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Reconquête_de_l'Irlande_par_les_Tudor"> Tudor</a>. En &Eacute;cosse, la situation est semblable. D&rsquo;o&ugrave; la Guerre des &eacute;v&ecirc;ques &mdash; <em>Bellum Episcopale</em> &mdash; qui pr&eacute;pare la future <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Première_Révolution_anglaise">guerre civile anglaise</a>. Depuis les <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Années_1580">ann&eacute;es 1580</a>, deux fractions de la population sont apparues&nbsp;: les <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Presbytériens">Presbyt&eacute;riens</a>, partisans de l&#39;autorit&eacute; de <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Pasteur_protestant">pasteurs</a> et d&#39;anciens. Et les <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Église_épiscopale_écossaise">&Eacute;piscopaliens</a>, favorables &agrave; l&#39;autorit&eacute; des <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Évêque">&eacute;v&ecirc;ques</a>. La mont&eacute;e des &eacute;v&ecirc;ques inqui&egrave;te les <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Presbytériens">Presbyt&eacute;riens</a>, en particulier la noblesse &eacute;cossaise, pr&eacute;occup&eacute;e de sa perte de pouvoir et d&#39;influence. L&#39;introduction dans l&#39;&Eacute;glise &eacute;cossaise d&rsquo;un <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Livre_de_la_prière_commune">nouveau livre de pri&egrave;res</a>, de style <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Anglicanisme">anglican</a>, contre l&#39;avis des principaux &eacute;v&ecirc;ques et sans concertation, provoque la col&egrave;re des <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Presbytériens">Presbyt&eacute;riens</a>. L&#39;&Eacute;cosse devient ainsi officiellement presbyt&eacute;rienne. La guerre semble le seul moyen de sortir de l&#39;impasse. Le contrecoup est la guerre civile anglaise qui &eacute;clate en <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/1642">1642</a>. En cons&eacute;quence, Cromwell se lance dans la conqu&ecirc;te de l&#39;&Eacute;cosse en 1650-51. &Agrave; la fin de ces guerres, les trois royaumes forment un <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/État_unitaire">&Eacute;tat unitaire</a>, (<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Commonwealth_de_l'Angleterre">Commonwealth)</a>, sous la forme d&#39;une <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/République">r&eacute;publique</a>, qui prit rapidement les caract&eacute;ristiques d&#39;une <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Dictature">dictature</a> militaire. En pratique, le pouvoir &eacute;tait exerc&eacute; par <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Oliver_Cromwell">Oliver Cromwell</a> lui-m&ecirc;me. Les puritains calvinistes triomphent et prennent le pouvoir sous le protectorat de Cromwell. On peut y rep&eacute;rer plusieurs tendances&nbsp;: les presbyt&eacute;riens qui forment le groupe majoritaire&nbsp;; les ind&eacute;pendants&nbsp;; les baptistes&nbsp;; les mill&eacute;naristes qui pr&ecirc;chent l&rsquo;<a href="http://www.museeprotestant.org/glossary/apocalypse/">Apocalypse</a> pour l&rsquo;ann&eacute;e 1666 (car 666 est le chiffre de la b&ecirc;te dans l&rsquo;Apocalypse), les Quakers (ou trembleurs) se rattachant aux mill&eacute;naristes. Pour eux, la lumi&egrave;re int&eacute;rieure est plus importante que l&rsquo;&Eacute;criture accessible &agrave; tous. Le fondateur, George Fox, est un la&iuml;c inspir&eacute;. Il rejette tout culte, toute hi&eacute;rarchie, et proclame la fraternit&eacute; et l&rsquo;&eacute;galit&eacute; entre ceux qu&rsquo;on appelle les puritains. Olivier Cromwell, qui n&rsquo;&eacute;tait pas presbyt&eacute;rien, favorise la cr&eacute;ation de communaut&eacute;s &laquo;&nbsp;ind&eacute;pendantes&nbsp;&raquo; et pratique une certaine tol&eacute;rance religieuse, sauf &agrave; l&rsquo;&eacute;gard des catholiques.</p> <p class="texte" dir="ltr">&Agrave; la mort de Cromwell, en 1658, les Anglais font appel &agrave; Charles II, qui, apr&egrave;s avoir promis une amnistie g&eacute;n&eacute;rale et la libert&eacute; de conscience, devient roi en 1660. Or, Charles II restaure l&rsquo;&Eacute;glise d&rsquo;Angleterre et l&rsquo;&eacute;piscopat. Les puritains (ou dissidents) sont pers&eacute;cut&eacute;s&nbsp;: interdiction des r&eacute;unions, exclusion des charges municipales, emprisonnement. Et, post&eacute;rieurement, Jacques II (1685-1688), fr&egrave;re de Charles II, entre-temps converti au catholicisme, devient roi en pr&ecirc;tant serment de d&eacute;fendre l&rsquo;&Eacute;glise d&rsquo;Angleterre. Pourtant il s&rsquo;entoure de j&eacute;suites et unit contre lui les anglicans et les dissidents. Son successeur, Guillaume d&rsquo;Orange, apr&egrave;s la fuite de Jacques en France, d&eacute;sign&eacute; r&eacute;gent du royaume, puis roi avec son &eacute;pouse Marie sous les noms de Guillaume III (1689-1702) et de Marie II. Le nouveau souverain fait entrer l&rsquo;Angleterre et les Provinces-Unies dans la guerre de la <a href="http://www.museeprotestant.org/glossary/ligue/">Ligue</a> d&rsquo;Augsbourg contre Louis XIV, ce qui suscite des espoirs du c&ocirc;t&eacute; des protestants pers&eacute;cut&eacute;s en France et favorables &agrave; Jacques II. Or les partisans de Jacques II, les jacobites, et les partisans des Stuarts r&eacute;fugi&eacute;s en France, s&rsquo;opposent aux propositions de r&eacute;forme religieuse de Guillaume III qui leur demande de pr&ecirc;ter all&eacute;geance (Acte de tol&eacute;rance). L&rsquo;Acte de succession de 1701 exclut du tr&ocirc;ne d&rsquo;Angleterre tout monarque catholique et assure la succession de la protestante Anne, et assure le pouvoir &agrave; la maison de Hanovre au d&eacute;triment des Stuarts et des catholiques partisans de la contre-r&eacute;forme et des jacobites r&eacute;sidant en France.</p> <p class="texte" dir="ltr">Pourtant, un vent nouveau souffle en Angleterre. Les id&eacute;es de rationalisme et de tol&eacute;rance gagnent progressivement les esprits. Les conceptions scientifiques gagnent en influence et se plient &agrave; la m&eacute;thodologie de la science exp&eacute;rimentale propos&eacute;e par F. Bacon. La critique du dogmatisme religieux gagne du terrain. La Royal Society of London est fond&eacute;e en <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/1660_en_science">1660</a>. C&rsquo;est une institution destin&eacute;e &agrave; la promotion des sciences. La figure la plus importante, Isaac Newton, est entour&eacute;e de certains francs-ma&ccedil;ons, notamment Desaguliers, r&eacute;unis dans La Royal Society, Newton et la science ne sont pas encore enti&egrave;rement d&eacute;barrass&eacute;s des sp&eacute;culations inspir&eacute;es de la magie, de l&rsquo;astrologie et de l&rsquo;alchimie.</p> <h1 dir="ltr" id="heading7">VI.-La s&eacute;paration symbolique entre le politique et la religion&nbsp;: la revendication de tol&eacute;rance et de la&iuml;cit&eacute;</h1> <p class="texte" dir="ltr">La &laquo;&nbsp;sc&egrave;ne&nbsp;&raquo; publique se manifeste d&egrave;s lors comme un lieu de rencontre, mais aussi de <em>dissensus</em>, car, au-del&agrave; de l&rsquo;&eacute;lan de s&eacute;cularisation que repr&eacute;sente la modernit&eacute;, le mouvement de la la&iuml;cit&eacute; suppose un d&eacute;chirement, un &eacute;cartement de l&rsquo;ancien et du nouveau, qui est un travail de la culture sur elle-m&ecirc;me pour prendre ses distances vis-&agrave;-vis des croyances et des pratiques et admettre de les relativiser. En portant ses convictions (religieuses, agnostiques ou ath&eacute;es) dans un espace public ouvert au d&eacute;bat, chaque citoyen accepte de les remettre en question&nbsp;; il accepte aussi de reconna&icirc;tre celles des autres.</p> <p class="texte" dir="ltr">Cette r&eacute;volution symbolique n&#39;aurait pas &eacute;t&eacute; possible sans la s&eacute;paration du th&eacute;ologique et du politique, &agrave; laquelle Machiavel, Hobbes et Spinoza ont contribu&eacute; d&egrave;s l&#39;aube de la modernit&eacute;.</p> <h2 dir="ltr" id="heading8">A) <em>Le Prince</em> de Machiavel</h2> <p class="texte" dir="ltr"><em>Le Prince</em>, &eacute;crit en 1513, marque une profonde rupture avec la tradition ant&eacute;rieure des manuels &agrave; l&#39;usage des princes, par l&#39;anticonformisme radical qu&#39;il manifeste vis-&agrave;-vis de la morale chr&eacute;tienne. Les vertus habituellement pr&ocirc;n&eacute;es par les conseillers des princes (sagesse, patience, mod&eacute;ration, bonne foi, cl&eacute;mence...) sont toutes battues en br&egrave;che par le philosophe florentin qui leur pr&eacute;f&egrave;re un ensemble de qualit&eacute;s variant en fonction des circonstances et r&eacute;pondant uniquement &agrave; un imp&eacute;ratif d&#39;efficacit&eacute;. Le prince vertueux se mue en prince habile dont le but premier est d&#39;acqu&eacute;rir et de pr&eacute;server l&#39;&Eacute;tat (<em>mantenere lo stato</em>). En faisant fi de la morale chr&eacute;tienne, l&#39;&oelig;uvre de Machiavel manifeste l&#39;ind&eacute;pendance de la pens&eacute;e politique &agrave; l&#39;&eacute;gard de toute tutelle id&eacute;ologique, la politique devenant un domaine de savoir autonome.</p> <p class="texte" dir="ltr">Mais la religion n&#39;est pas pour autant n&eacute;glig&eacute;e par Machiavel&nbsp;: elle fait enti&egrave;rement partie de l&#39;imaginaire des hommes et constitue de ce fait&nbsp;une des cl&eacute;s de vo&ucirc;te de la vie politique. Le r&eacute;alisme machiav&eacute;lien veut en effet que l&#39;on tienne compte de la &laquo;&nbsp;v&eacute;rit&eacute; effective de la chose&nbsp;&raquo;, c&#39;est-&agrave;-dire de l&#39;exp&eacute;rience plut&ocirc;t que d&#39;un id&eacute;al illusoire. Or cette exp&eacute;rience nous apprend que le peuple vit dans l&#39;opinion et l&#39;imagination. La religion rel&egrave;ve de ce r&egrave;gne de l&#39;apparence qui fa&ccedil;onne les rapports de pouvoir entre les hommes. C&#39;est bien la religion qui, dans <em>Les Discours sur la premi&egrave;re d&eacute;cade de Tite-Live</em>, participe au succ&egrave;s de la r&eacute;publique romaine en favorisant un &eacute;tat d&#39;esprit fier, libre et courageux. Et c&#39;est encore la religion, chr&eacute;tienne cette fois, qui, du temps de Machiavel, mobilise les foules. L&#39;atteste le succ&egrave;s du moine dominicain Savonarole, qui canalisa la ferveur populaire et parvint m&ecirc;me &agrave; instaurer une r&eacute;publique puritaine &agrave; Florence durant quatre ann&eacute;es &agrave; la fin du XV<sup>e</sup> si&egrave;cle.&nbsp;M&ecirc;me si Machiavel n&#39;a que m&eacute;pris pour la religion chr&eacute;tienne (elle a, selon lui, entretenu la division de l&#39;Italie et favoris&eacute; des m&oelig;urs dissolues), le prince doit n&eacute;anmoins pouvoir s&#39;adapter &agrave; cette donne et feindre autant que possible&nbsp;la religiosit&eacute; pour para&icirc;tre pieux aux yeux du peuple. Ce qui ne doit nullement l&#39;emp&ecirc;cher d&#39;&laquo;&nbsp;entrer dans le mal&nbsp;&raquo; si la n&eacute;cessit&eacute; l&#39;exige, c&#39;est-&agrave;-dire si la pr&eacute;servation de l&#39;&Eacute;tat l&#39;impose. Avec Machiavel, la religion devient donc un instrument de ruse aux mains du prince. Cette subordination du religieux &agrave; des fins politiques lui vaudra une r&eacute;putation sulfureuse durant plusieurs si&egrave;cles.</p> <h2 dir="ltr" id="heading9">B) Hobbes et le <em>L&eacute;viathan</em></h2> <p class="texte" dir="ltr">Dans le c&eacute;l&egrave;bre <em>L&eacute;viathan</em> (1651), Hobbes sera le premier &agrave; proposer une th&eacute;orie de l&#39;&Eacute;tat souverain comme artifice purement humain issu d&#39;un &laquo;&nbsp;contrat social&nbsp;&raquo;. &Agrave; une &eacute;poque o&ugrave; partout le pouvoir du Roi se pense en terme de droit divin et o&ugrave; &laquo;&nbsp;toute autorit&eacute; vient de Dieu&nbsp;&raquo;, fonder la l&eacute;gitimit&eacute; du pouvoir non plus sur des principes th&eacute;ologiques mais sur une pure convention est proprement r&eacute;volutionnaire. Si Hobbes est encore aujourd&#39;hui consid&eacute;r&eacute; comme le fondateur de l&#39;&Eacute;tat moderne, c&#39;est bien parce qu&#39;il a pu penser l&#39;&Eacute;tat comme la production des hommes, qui se donnent &agrave; eux-m&ecirc;mes leurs propres lois et institutions ind&eacute;pendamment de toute intervention divine.</p> <p class="texte" dir="ltr">Mais si le <em>L&eacute;viathan</em> a fait scandale, c&#39;est aussi pour son interpr&eacute;tation de la Bible et pour la critique de l&#39;&Eacute;glise qui en d&eacute;coule. En effet, Hobbes est parfaitement conscient de l&#39;impact de l&#39;imaginaire religieux sur les conceptions politiques de ses concitoyens&nbsp;: ceux-ci pr&eacute;f&egrave;rent encore mourir plut&ocirc;t que risquer de d&eacute;sob&eacute;ir &agrave; Dieu&nbsp;; aucun souverain humain ne fait le poids face &agrave; un commandement suppos&eacute; divin. Il vise &agrave; convaincre ses lecteurs que le message biblique n&#39;exige d&#39;eux rien d&#39;autre&nbsp;que l&#39;ob&eacute;issance au souverain et la foi dans quelques dogmes tr&egrave;s simples. L&#39;&Eacute;glise romaine est accus&eacute;e d&#39;avoir abus&eacute; durant des si&egrave;cles de la cr&eacute;dulit&eacute; du peuple en inventant sans cesse des dogmes nouveaux sans lien avec la religion &laquo;&nbsp;vraie&nbsp;&raquo; (en particulier la croyance dans les enfers et l&#39;id&eacute;e que l&#39;&Eacute;glise incarne le royaume de Dieu sur terre) dans le seul but d&#39;en tirer le maximum de profit personnel.</p> <p class="texte" dir="ltr">En contestant ces dogmes largement partag&eacute;s par la communaut&eacute; chr&eacute;tienne, Hobbes se met &eacute;videmment en danger. Mais cette r&eacute;forme de l&#39;imaginaire religieux est indispensable &agrave; la transformation de la culture populaire qu&#39;il appelle de ses v&oelig;ux&nbsp;: il faut d&eacute;barrasser les hommes des peurs irrationnelles gr&acirc;ce auxquelles l&#39;&Eacute;glise romaine prosp&egrave;re, r&eacute;tablir les peurs rationnelles et utiles comme celles de la mort ou des sanctions inflig&eacute;es par le souverain, et permettre une meilleure compr&eacute;hension de l&#39;essence du pouvoir civil. On le voit, l&#39;&eacute;ducation du peuple ne se r&eacute;duit pas &agrave; une critique de la religion &laquo;&nbsp;corrompue&nbsp;&raquo;, mais consiste aussi &agrave; pr&eacute;parer les esprits &agrave; l&#39;av&egrave;nement d&#39;une politique rationnelle et d&eacute;th&eacute;ologis&eacute;e.</p> <h2 dir="ltr" id="heading10">C) Baruch Spinoza</h2> <p class="texte" dir="ltr">Spinoza (1632-1677) pr&eacute;sente de nombreux points communs avec Hobbes, mais fait un pas de plus vers la la&iuml;cisation de l&#39;&Eacute;tat. Comme lui, il rompt avec la pens&eacute;e th&eacute;ologico-politique m&eacute;di&eacute;vale en effectuant un travail critique sur la Bible et sur la religion pour montrer comment th&eacute;ologie et politique (mais aussi th&eacute;ologie et philosophie) doivent absolument &ecirc;tre distingu&eacute;es. Comme lui, il d&eacute;fend farouchement le pouvoir politique de toute emprise religieuse et pr&ocirc;ne une totale autonomie de l&#39;&Eacute;tat, dont la l&eacute;gitimit&eacute; ne se fonde plus sur aucun dogme th&eacute;ologique, mais uniquement sur des principes rationnels. N&eacute;anmoins, chez Hobbes, cette autonomie de la sph&egrave;re politique n&#39;entra&icirc;ne pas pour autant la libert&eacute; d&#39;expression dans l&#39;espace public&nbsp;: certes, &laquo;&nbsp;la pens&eacute;e est libre&nbsp;&raquo;, nous dit Hobbes - c&#39;est-&agrave;-dire que nul ne peut la contraindre par la force - mais les convictions personnelles rel&egrave;vent du &laquo;&nbsp;for int&eacute;rieur&nbsp;&raquo; de chacun et ne peuvent faire l&#39;objet d&#39;une manifestation publique qu&#39;&agrave; condition d&#39;&ecirc;tre autoris&eacute;e par l&#39;&Eacute;tat. Si le souverain le souhaite, il peut m&ecirc;me imposer un culte particulier. Ce qui importe c&#39;est que l&#39;espace public soit enti&egrave;rement sous la coupe du pouvoir civil et ne laisse entrevoir aucun dissensus qui ferait craindre un retour &agrave; l&#39;&laquo;&nbsp;&eacute;tat de nature&nbsp;&raquo; des guerres de religions.</p> <p class="texte" dir="ltr">Spinoza peut &ecirc;tre consid&eacute;r&eacute; comme un pr&eacute;curseur de la la&iuml;cit&eacute;, parce qu&#39;au-del&agrave; de la s&eacute;cularisation du pouvoir politique, il a d&eacute;fendu la libert&eacute; de conscience (chacun est libre d&#39;exprimer ses opinions et de les d&eacute;fendre publiquement), fond&eacute;e sur la distinction principielle du droit public et du droit priv&eacute;. L&#39;&Eacute;tat ne doit &laquo;&nbsp;prendre&nbsp;parti&nbsp;&raquo; pour aucune option religieuse ou philosophique&nbsp;; toute loi qui criminaliserait une opinion serait automatiquement source de violence. L&#39;&Eacute;tat devient ainsi instance de pacification qui ouvre un espace public lib&eacute;r&eacute; de toute tutelle, y compris &eacute;tatique.</p> <p class="texte" dir="ltr">Enfin la la&iuml;cisation des soci&eacute;t&eacute;s europ&eacute;ennes est la cons&eacute;quence du processus d&eacute;mocratique et l&#39;acceptation d&#39;une soci&eacute;t&eacute; irr&eacute;m&eacute;diablement divis&eacute;e, dont les valeurs sont soumises sans cesse &agrave; un d&eacute;bat. L&#39;origine de la la&iuml;cit&eacute; passe, dit-on, par la lente &eacute;volution de la tol&eacute;rance religieuse. Ainsi, pour certains, l&#39;&eacute;veil de la tol&eacute;rance est la toile de fond de l&#39;attitude la&iuml;que, issue des guerres religieuses et qui trouve en France une r&eacute;sonance politique &agrave; la fin de la monarchie.</p> <p class="texte" dir="ltr">Ainsi, plusieurs th&eacute;oriciens modernes ont connu un grand retentissement, par le pronostic de &laquo;&nbsp;l&rsquo;&eacute;clipse du sacr&eacute;&nbsp;&raquo;. Or, plus la modernit&eacute; s&rsquo;enfonce dans un mat&eacute;rialisme extr&ecirc;me, plus le &laquo;&nbsp;retour du religieux&nbsp;&raquo; se fait sentir sous des formes diverses.</p> <h1 dir="ltr" id="heading11">VII.- Derniers questionnements</h1> <p class="texte" dir="ltr">Les nombreux affrontements violents, avec lynchages et incendies, ces derni&egrave;res semaines, montrent que les conflits prennent une tournure proche-orientale. L&agrave;, l&rsquo;hostilit&eacute; contre la messe, pesons bien les mots, peut &ecirc;tre le fait &laquo;&nbsp;d&rsquo;adeptes de la la&iuml;cit&eacute;&nbsp;&raquo;. Qu&rsquo;entend-on donc par l&agrave;&nbsp;? La la&iuml;cit&eacute; serait-elle devenue un la&iuml;cisme n&eacute;gateur de la libert&eacute; religieuse, telle qu&rsquo;elle a pu&nbsp;aboutir dans tous les r&eacute;gimes c&eacute;saristes, totalitaires, jacobins, nazis, communistes.</p> <p class="texte" dir="ltr">La la&iuml;cit&eacute; et la politique, &agrave; notre avis, demandent de r&eacute;pondre a trois autres questions&nbsp;: faut-il encore m&eacute;diter sur la religion,&nbsp;faut-il &eacute;tablir un bilan des religions, faut-il revenir sur la la&iuml;cit&eacute; comme moyen de dialogue&nbsp;?</p> <h2 dir="ltr" id="heading12">A) Faut-il m&eacute;diter encore sur la religion&nbsp;?</h2> <p class="texte" dir="ltr">Certainement, le spirituel compte &eacute;norm&eacute;ment dans l&rsquo;&eacute;volution de la culture et de la psychologie des hommes, mais a la mani&egrave;re des anciens qui utilisaient le beau mot grec de <em>kosmos</em><strong>, </strong>carrappelons que,<strong> c</strong>hez les <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Grèce_antique">Grecs</a>, on ne parle pas d&#39;univers mais de &kappa;ό&sigma;&mu;&omicron;&sigmaf; (<em>k&oacute;smos,</em> &laquo;&nbsp;monde ordonn&eacute;&nbsp;&raquo; en <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Grec_ancien">grec</a>)&nbsp;: un monde clos qui a un ordre (par opposition au <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Chaos_(mythologie)">chaos</a>). Ainsi pour <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Socrate">Socrate</a>&nbsp;: &laquo;&nbsp;&Agrave; ce qu&rsquo;assurent les doctes <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/École_pythagoricienne">pythagoriciens</a>, <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Calliclès">Callicl&egrave;s</a>, le ciel et la terre, les Dieux et les hommes sont li&eacute;s entre eux par une communaut&eacute;, faite d&rsquo;amiti&eacute; et de bon arrangement, de sagesse et d&rsquo;esprit de justice, et c&rsquo;est la raison pour laquelle, &agrave; cet univers, ils donnent, mon camarade, le nom de cosmos, d&rsquo;arrangement, et non celui de d&eacute;rangement non plus que de d&eacute;r&egrave;glement.&nbsp;&raquo;&nbsp;<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Platon">Platon</a>, <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Gorgias_(Platon)">Gorgias</a>, 507e - 508a</p> <h2 dir="ltr" id="heading13">B) Faut il &eacute;tablir un bilan des religions&nbsp;?</h2> <p class="texte" dir="ltr">Sans vouloir choquer, il s&rsquo;agit de hi&eacute;rarchiser les religions par rapport aux valeurs universelles de la raison humaine. Kant critiquait la religion juda&iuml;que en &eacute;tant celle d&rsquo;un peuple &eacute;lu. En revanche, il mettait en avant le christianisme comme religion universaliste. Par ailleurs, l&rsquo;hindouisme et le bouddhisme ne sont pas des religions au m&ecirc;me sens que les trois monoth&eacute;ismes. La dimension d&rsquo;&Eacute;glise et de conformisme id&eacute;ologique y est moindre. Ces mouvements sont peut-&ecirc;tre davantage spirituels que religieux. Leur fonds doctrinal est plus difficile &agrave; critiquer intellectuellement, moralement ou politiquement. Il faut cependant rester m&eacute;fiants&nbsp;: ces religions sont aussi concern&eacute;es par des mouvements de fanatisme et d&rsquo;intol&eacute;rance. Dans l&rsquo;histoire, les religions ont parfois pris des orientations politiques progressistes, comme la Th&eacute;ologie de la lib&eacute;ration. Mais g&eacute;n&eacute;ralement, les religions ont &eacute;t&eacute; du c&ocirc;t&eacute; du pouvoir dominant. Or ,dans les r&eacute;gimes fascistes du XXe si&egrave;cle &ndash; l&rsquo;Italie de Mussolini, l&rsquo;Espagne de Franco, le Portugal de Salazar et le Chili de Pinochet, le catholicisme se voulait neutre.</p> <p class="texte" dir="ltr">S&rsquo;opposer &agrave; la religion exige un ath&eacute;isme militant, c&rsquo;est revenir aux guerres originaires &agrave; la fois du pouvoir et des religions. Or une autre mani&egrave;re d&rsquo;&eacute;tablir les relations entre la religion et la politique se r&eacute;sume au principe de la la&iuml;cit&eacute;&nbsp;: non seulement comme s&eacute;paration de l&rsquo;&Eacute;tat et des &eacute;glises, mais &agrave; une attitude d&rsquo;accompagnement. Car, &nbsp;se dire contre la religion ne veut pas dire s&rsquo;opposer aux croyances, mais simplement marcher &agrave; c&ocirc;t&eacute; en toute ind&eacute;pendante. Voil&agrave; le sens &agrave; donner &agrave; la la&iuml;cit&eacute;.</p> <h2 dir="ltr" id="heading14">C) Une grille de lecture de la la&iuml;cit&eacute;</h2> <p class="texte" dir="ltr">Enfin, il faut &eacute;noncer dans une grille de lecture de la la&iuml;cit&eacute; quelques opinions qui la structurent sans la r&eacute;duire&nbsp;:</p> <p class="texte" dir="ltr">1 - Le c&oelig;ur du discours la&iuml;que est rattach&eacute; &agrave; la notion ancienne de peuple (<em>laos</em>) au sens d&#39;humanit&eacute; tout enti&egrave;re. Le <em>laos</em> suppose une certaine id&eacute;e &eacute;galitaire de la justice et une indivisibilit&eacute; dont la R&eacute;publique est l&#39;h&eacute;riti&egrave;re politique. Personne n&#39;est habilit&eacute; &agrave; s&#39;imposer &agrave; autrui. Libert&eacute; et &eacute;galit&eacute; se situent au m&ecirc;me niveau, et sont unies par les liens de la fraternit&eacute; qui fondent l&#39;identit&eacute; politique de la nation.</p> <p class="texte" dir="ltr">2 - Il y a l&agrave; un imp&eacute;ratif d&#39;appartenance qui suppose une union de tous sans contraintes individuelles. Une reconnaissance dans une id&eacute;e commune de respect et de solidarit&eacute; r&eacute;ciproques sur la base de la souverainet&eacute; du peuple et de chacun.</p> <p class="texte" dir="ltr">3 - Un principe juridique de rattachement &agrave; la puissance publique. C&#39;est une union qui d&eacute;lie pour renforcer la pratique de la libert&eacute; individuelle sous la tutelle de la loi commune &agrave; tous.</p> <p class="texte" dir="ltr">4 - La libert&eacute; la&iuml;que de conscience est le refus d&#39;accepter une v&eacute;rit&eacute; sans falsification. C&#39;est la posture a-dogmatique des citoyens libres. Car le citoyen la&iuml;que aspire &agrave; la libert&eacute; de conscience sans dogme. La v&eacute;rit&eacute; n<sup>&#39;&rsquo;</sup>est jamais une v&eacute;rit&eacute; r&eacute;v&eacute;l&eacute;e, mais relative et exp&eacute;rimentale. Il y a l&agrave; une d&eacute;marche d&#39;&eacute;valuation et de rigueur dans la m&eacute;thode.</p> <p class="texte" dir="ltr">5 - Il n&#39;y a pas de veto &agrave; la religion ou aux croyances, mais refus de donner un statut &agrave; la domination spirituelle et mat&eacute;rielle. Une red&eacute;finition juridique des rapports entre religion et cit&eacute;&nbsp;: s&eacute;paration, non-antagonisme.</p> <p class="texte" dir="ltr">6 - L&#39;&eacute;mancipation la&iuml;que ne se r&eacute;duit pas &agrave; la s&eacute;cularisation des institutions, c&#39;est la lutte contre les pouvoirs impos&eacute;s par la force ou la pression des oligarchies.</p> <p class="texte" dir="ltr">7 - La la&iuml;cit&eacute; n&#39;est pas un courant de pens&eacute;e parmi d&#39;autres, elle reste le refus d&rsquo;<sup>&#39;</sup>abriter dans l&#39;espace public des v&eacute;rit&eacute;s r&eacute;v&eacute;l&eacute;es ou des dogmes id&eacute;ologiques. C&#39;est une philosophie au sens d&#39;un savoir-vivre autant qu&#39;une culture des relations humaines.</p> <p class="texte" dir="ltr">8 - L&#39;&eacute;cole est au c&oelig;ur du dispositif r&eacute;publicain. Ce n&rsquo;<sup>&#39;</sup>est ni le ma&icirc;tre ni l&#39;&eacute;l&egrave;ve qui doivent &ecirc;tre au centre du dispositif scolaire, mais la transmission et la v&eacute;rification de la connaissance. Car son but est moins d&#39;adapter les &eacute;l&egrave;ves &agrave; la soci&eacute;t&eacute; telle qu&#39;elle est, que de leur fournir les outils pour leur propre &eacute;mancipation et celle des autres, afin qu&#39;ils restent lucides devant les dogmes et les menaces d<sup>&#39;&rsquo;</sup>ali&eacute;nation de leurs droits. -</p> <p class="texte" dir="ltr">9 - La R&eacute;publique n&#39;est ni religieuse ni ath&eacute;e, mais le garant politique de l&#39;espace public et de la vie priv&eacute;e, la s&eacute;paration de l&#39;&Eacute;tat et de l&#39;&Eacute;glise n&#39;&eacute;tant qu&#39;un de ses moyens. Les fondateurs de la R&eacute;publique se sont battus contre toute tentative d&#39;assujettissement des esprits et pour garantir le choix personnel dans le cadre de l&#39;int&eacute;r&ecirc;t g&eacute;n&eacute;ral.</p> <p class="texte" dir="ltr">10 - La la&iuml;cit&eacute; est un anticl&eacute;ricalisme (au sens d<sup>&#39;&rsquo;</sup>un refus des oligarchies de toute sorte) luttant contre les institutions et les organisations qui visent &agrave; monopoliser le pouvoir, le savoir et la conscience. L&#39;&Eacute;tat r&eacute;publicain et la&iuml;c doit se porter garant, afin de r&eacute;duire la concentration des pouvoirs dans toutes les organisations d&#39;ordre&nbsp;: l&#39;arm&eacute;e, les partis politiques, la justice, l&#39;&eacute;ducation et l<sup>&#39;&rsquo;</sup>&eacute;conomie, partout o&ugrave; se trouvent des centres de pouvoir sous l&#39;emprise de groupes oligarchiques qui imposent une certaine vision au d&eacute;triment d&#39;autres. Il ne faut pas oublier que la tentation de tout pouvoir est de devenir monopoliste.</p> <p class="texte" dir="ltr">11 - La la&iuml;cit&eacute;, enfin, n&#39;est pas une attitude neutre, mais une attitude impartiale, car l&#39;&Eacute;tat r&eacute;publicain devrait garantir la d&eacute;fense des droits individuels et des lois communes.</p> <p class="texte" dir="ltr">12 - La religion est un fait social total. Mais l&#39;histoire montre le danger de placer la religion avant le politique. C&#39;est l&agrave; un retour &agrave; tous les absolutismes.</p> <h1 dir="ltr" id="heading15">VIII.- Conclusion derni&egrave;re</h1> <p class="texte" dir="ltr">Voil&agrave; une discussion qui nous m&egrave;ne &agrave; r&eacute;pondre &agrave; la question pos&eacute;e au commencement de cet expos&eacute;. La religion n&rsquo;est pas un fait religieux, mais un fait social global, et seule la la&iuml;cit&eacute; permet d&rsquo;&eacute;chapper a son emprise.</p> <p class="texte" dir="ltr">Notre si&egrave;cle justifie l&rsquo;id&eacute;e que les id&eacute;es sont devenues folles. En revanche, la la&iuml;cit&eacute; est une notion juridique largement inscrite dans l&#39;histoire et la constitution de la nation fran&ccedil;aise et qui t&eacute;moigne des valeurs qui fondent la R&eacute;publique moderne. Comme un espace d&#39;ouverture, de dialogue, de d&eacute;bat contradictoire et de d&eacute;lib&eacute;ration citoyenne, sans dogmes ou v&eacute;rit&eacute;s r&eacute;v&eacute;l&eacute;es. C&#39;est un trait culturel et un formidable m&eacute;canisme d&#39;int&eacute;gration par-del&agrave; les dogmes.</p> <p class="texte" dir="ltr">Pourtant, l&rsquo;attitude ultra-la&iuml;que ne comprenant pas ce que la religion veut dire dans des soci&eacute;t&eacute;s o&ugrave; elle garde une force tr&egrave;s structurante, m&egrave;ne &agrave; une impasse tragique .. Les Occidentaux ont oubli&eacute; leur propre pass&eacute;. Car la religion est devenue un syst&egrave;me de croyances individuelles et priv&eacute;es. Or, la plus grande partie du monde ne fonctionne pas de la sorte. Et leur revanche religieuse s&#39;acc&eacute;l&egrave;re avec la mondialisation. Car l&#39;&eacute;conomisme de type occidental, le raisonnement lib&eacute;ral, l&#39;efficacit&eacute; technique et la consommation, cohabitent avec l&#39;aspiration &agrave; retrouver une tradition.</p> <p class="texte" dir="ltr">Il faut terminer, mais auparavant disons avec la lucidit&eacute; de J.C. Carri&egrave;re que pense &agrave; la r&eacute;surgence et la nouvelle alliance de la foi et la violence&nbsp;et le retour du gout de donner la mort par une croyance sans preuve.</p> <p class="bibliographie" dir="ltr"><a href="http://www.psychologie-sociale.com/index.php?option=com_content&amp;task=view&amp;id=300&amp;Itemid=121"><em>Psychologie sociale de la religion</em></a><a href="http://www.psychologie-sociale.com/index.php?option=com_content&amp;task=view&amp;id=300&amp;Itemid=121"> </a>sous la direction de Nicolas Roussiau. P.U.R.</p> <p class="bibliographie" dir="ltr"><em>Les Formes &eacute;l&eacute;mentaires de la vie religieuse</em>, de E. Durkheim. 1912</p> <p class="bibliographie" dir="ltr"><em>L&#39;Esprit des Lumi&egrave;res</em>, de Tzvetan Todorov. Paris, R. Laffont, 2006.</p> <p class="bibliographie" dir="ltr"><em>Les Religions politiques</em> d&rsquo;Eric Voegelin. Paris,Cerf. 1994</p> <p class="bibliographie" dir="ltr"><em>Sociologie des religions, </em>de M. Weber<em>.</em> Paris, Gallimard, 1996.</p> <p class="bibliographie" dir="ltr"><em>Croyances</em> de J.C. Carri&egrave;res. O. Jacob 2015.</p>