<p class="texte" dir="ltr">La vie intellectuelle&nbsp;en France elle demeure, mais d&rsquo;une faible p&eacute;rennit&eacute;. Elle reste, mais d&eacute;form&eacute;e car elle n&rsquo;est plus la m&ecirc;me que celle qui &eacute;tait hier, ainsi elle est devenue une sorte de mythologie encore vivante, bien que le pragmatisme et la modernit&eacute; l&rsquo;&eacute;touffe lentement. La vie intellectuelle persiste et tout se m&eacute;lange&nbsp;: l&rsquo;esprit et les bonnes mani&egrave;res, le divertissement et les &eacute;changes sur les plateaux de t&eacute;l&eacute;vision, Ainsi, l&rsquo;imaginaire et la p&eacute;tillante l&eacute;g&egrave;ret&eacute; de l&rsquo;&ecirc;tre des intellectuels passe pour une r&eacute;alit&eacute; r&ecirc;v&eacute;e et v&eacute;cue. L&rsquo;exemple r&eacute;cent est Michel Houellebecq, notamment Soumission. Soumission est un roman d&#39;anticipation, de type politique-fiction, paru le 7 janvier 2015 aux &eacute;ditions Flammarion. Le livre d&eacute;crit un futur proche en France dans lequel est &eacute;lu un pr&eacute;sident de la R&eacute;publique issu d&#39;un parti politique musulman en 2022. Le roman faisant pol&eacute;mique se pr&ecirc;t &agrave; d&eacute;bat. L&#39;histoire se d&eacute;roule dans un futur proche&nbsp;: un professeur de litt&eacute;rature parisien sp&eacute;cialiste de Huysmans, sent venir la vacuit&eacute; et la solitude. Le pays para&icirc;t &ecirc;tre au bord de la guerre civile comme seule perspective</p> <p class="texte" dir="ltr">Le livre d&eacute;crit un futur proche en France dans lequel est &eacute;lu un pr&eacute;sident de la R&eacute;publique un leader intelligent et charismatique d&#39;un nouveau parti politiquea&nbsp;; lequelfut parvenu de justesse &agrave; se hisser au second tour de l&#39;&eacute;lection pr&eacute;sidentielle, Mohammed Ben Abbes, pr&eacute;sident de ce nouveau parti nomm&eacute; &laquo;&nbsp;La Fraternit&eacute; musulmane&nbsp;&raquo;, r&eacute;ussit, gr&acirc;ce au soutien au second tour de tous les anciens partis politiques traditionnels face au Front national lui aussi pr&eacute;sent au deuxi&egrave;me tour, &agrave; &ecirc;tre &eacute;lu. Le d&eacute;cadentisme est pr&eacute;sent tout au long du roman, &agrave; travers la figure de Huysmans. Une grande pol&eacute;mique se d&eacute;clenche, &eacute;clips&eacute;e par les attentats terroristes de novembre 2015. Pourtant quelques &eacute;crivains voient dans Soumission une anticipation dans la tradition de 1984 de George Orwell et Le Meilleur des mondes d&#39;Aldous Huxley.</p> <p class="texte" dir="ltr">Un journaliste fait penser &agrave; une nouvelle Cassandre litt&eacute;raire&nbsp;: Houellebecq est quelqu&#39;un pour qui la litt&eacute;rature ne fournit pas des r&eacute;ponses mais excelle &agrave; formuler les questions que pose &laquo;&nbsp;l&#39;&eacute;poque&nbsp;&raquo; et qui pense avec talent et efficacit&eacute;,</p> <p class="texte" dir="ltr">Le regrett&eacute; Bernard Maris nie que le livre critique l&#39;islam et conclut par qu&rsquo;il s&rsquo;agit d&rsquo;un magnifique roman. Voire un coup de ma&icirc;tre.</p> <p class="texte" dir="ltr">Certes, la vie intellectuelle (parisienne) on le voit conserve une certaine fascination pour les anciennes &eacute;lites litt&eacute;raires, les salons, les manifestations des arts et des lettres, les soci&eacute;t&eacute;s savantes, les caf&eacute;s l&eacute;gendaires, les beau discours de politiques r&eacute;publicains et aussi traditionalistes. Ce sont les plateaux de t&eacute;l&eacute;vision qui s&rsquo;en chargent d&rsquo;entretenir la l&eacute;gende. Un monde o&ugrave; le g&eacute;nie se manifestait en jeux de langage, en mots d&rsquo;esprit (parfois sanglants et ridicules) d&rsquo;une noblesse de robe cultiv&eacute;e, raffin&eacute;e et mondaine&nbsp;; plus tard, chez les bourgeois arrivistes et p&eacute;dants. Ce sont l&agrave; des lieux et des voix qui ont donn&eacute; &agrave; la conversation sa brillance et sa l&eacute;g&egrave;ret&eacute; et forg&eacute; une pens&eacute;e de chambre. Le d&eacute;clin de la monarchie a rendu la conversation savante inutile et languide. La bourgeoisie a finalement r&eacute;pandu des clubs de toute sorte regroupant des membres partageant des int&eacute;r&ecirc;ts communs, sportifs, politiques, &eacute;conomiques, au point que certains ordres ma&ccedil;onniques d&rsquo;inspiration anglaise ont eux-m&ecirc;mes adopt&eacute; le style et la forme de ces clubs dont la mondanit&eacute; savante reste bien vivante. Il est certain qu&rsquo;avant la R&eacute;volution fran&ccedil;aise les clubs politiques ont jou&eacute; un r&ocirc;le dans la diffusion des aspirations et des dol&eacute;ances de leur &eacute;poque. Ces clubs &eacute;taient des &eacute;chos de l&rsquo;agora grecque et du forum romain avec la pl&egrave;be en moins. Ils ont servi de mod&egrave;le aux partis politiques dont les &eacute;changes via les medias cristallisent les id&eacute;es du moment et canalisent les r&eacute;ceptions publiques.</p> <h1 dir="ltr" id="heading1">L&rsquo;intellectuel&nbsp;: une mission impossible</h1> <p class="texte" dir="ltr">La fonction d&rsquo;intellectuel trouve une mission h&eacute;ro&iuml;que chez Victor Hugo lorsqu&rsquo;il assigne &agrave; l&rsquo;homme de g&eacute;nie un r&ocirc;le social&nbsp;: &laquo;&nbsp;Agrandir les esprits, amoindrir les mis&egrave;res&nbsp;&raquo;. Le g&eacute;nie, v&eacute;ritable &laquo;&nbsp;phare&nbsp;&raquo;, gr&acirc;ce &agrave; sa pens&eacute;e sup&eacute;rieure, est celui qui peut apporter la lumi&egrave;re, par sa connaissance et son engagement, et contribuer modestement &agrave; l&rsquo;av&egrave;nement d&rsquo;une plus grande justice sociale. Honneur &agrave; ceux qui souffrent&nbsp;! D&eacute;fense des faibles&nbsp;!</p> <p class="texte" dir="ltr">Ainsi, depuis l&#39;<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Affaire_Dreyfus"><span style="color:#000000; text-decoration:none;">affaire Dreyfus</span></a>, le terme d&#39;intellectuel s&rsquo;utilise pour d&eacute;signer quelqu&#39;un qui s&#39;engage dans la sph&egrave;re publique pour d&eacute;fendre des valeurs. Il fut incarn&eacute; par &Eacute;mile Zola, l&rsquo;&eacute;crivain, et Georges Clemenceau, le politique et le journaliste. De cette alliance d&eacute;coulera la notion d&rsquo;intellectuel engag&eacute; qui trouvera chez Sartre un mentor &laquo;&nbsp;des mains sales&nbsp;&raquo;. L&rsquo;intellectuel serait une personne qui dispose d&#39;une <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Autorité"><span style="color:#000000; text-decoration:none;">autorit&eacute;</span></a> reposant sur un savoir et une connaissance litt&eacute;raire,, qui participe et s&rsquo;engage dans la sph&egrave;re publique avec ses analyses, et ses points de vue aiguis&eacute;s pour d&eacute;fendre des <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Valeur_(personnelle_et_culturelle)"><span style="color:#000000; text-decoration:none;">valeurs</span></a>, mais qui n&#39;assume gu&egrave;re de responsabilit&eacute; directe dans les affaires politiques. Un intellectuel est ainsi un homme de culture, en tant que cr&eacute;ateur ou m&eacute;diateur d&rsquo;<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Idéologie"><span style="color:#000000; text-decoration:none;">id&eacute;ologie</span></a>. Ainsi, <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Albert_Camus"><span style="color:#000000; text-decoration:none;">Albert Camus</span></a>, dira&nbsp;: &laquo;&nbsp;Notre justification, s&rsquo;il en est une, est de parler, dans la mesure de nos moyens, pour ceux qui ne peuvent le faire.&nbsp;&raquo;. Disons avec lui qu&rsquo;il ne faudrait pas pour autant attendre de l&rsquo;intellectuel des solutions toutes faites et de belles le&ccedil;ons morales.</p> <p class="texte" dir="ltr">La v&eacute;rit&eacute; est fuyante, on le sait, et toujours &agrave; conqu&eacute;rir dans sa nudit&eacute; toute particuli&egrave;re. Autant que la libert&eacute; est ambigu&euml; et plus facile &agrave; obtenir pour certains que pour d&rsquo;autres. Seule l&rsquo;&eacute;galit&eacute; se frotte &agrave; la fraternit&eacute; dans les &eacute;lans de solidarit&eacute;. C&rsquo;est pourquoi l&#39;intellectuel doit rester forc&eacute;ment &laquo;&nbsp;engag&eacute;&nbsp;&raquo; pour la cause de la justice, et doit donc &ecirc;tre en rupture avec toutes les institutions jug&eacute;es oppressives, lesquelles actuellement (y compris les partis politiques) forment le cordon de protection du syst&egrave;me oligarchique qui (nous) domine.</p> <p class="texte" dir="ltr">Raymond Aron, un autre fin connaisseur du monde philosophique-politico-litt&eacute;raire, disait de mani&egrave;re &eacute;quivoque que l&#39;intellectuel est un savant un &laquo;&nbsp;spectateur engag&eacute;&nbsp;&raquo;. Un &laquo;&nbsp;cr&eacute;ateur d&#39;id&eacute;es&nbsp;&raquo;&nbsp;: Gramsci, le th&eacute;oricien mal aim&eacute; du parti (communiste italien) introduira le concept de l&rsquo;&laquo;&nbsp;&nbsp;intellectuel organique&nbsp;&raquo; pour mieux pr&eacute;ciser non seulement le statut, mais le r&ocirc;le et la mission de l&rsquo;intellectuel en politique. Le socle &eacute;tant la culture, le pouvoir se gagne par les id&eacute;es. La lutte des classes, disait Gramsci, doit d&eacute;sormais, inclure une dimension p&eacute;dagogique.</p> <p class="texte" dir="ltr">Pourtant, d&rsquo;autres parleront de la trahison des intellectuels, qui vont de d&eacute;sengagement en d&eacute;senchantement, dans les versions contemporains des avatars intellectuels&nbsp;: hommes de science, experts et techniciens, voire technocrates.</p> <p class="texte" dir="ltr">Ainsi d&eacute;j&agrave; <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Julien_Benda"><span style="color:#000000; text-decoration:none;">Julien Benda</span></a>, au d&eacute;but des ann&eacute;es 30, avait reproch&eacute; aux intellectuels, dans son ouvrage &laquo;&nbsp;La Trahison des clercs&nbsp;&raquo;, le fait que, depuis la guerre, ils aient cess&eacute; de jouer leur r&ocirc;le de gardiens des grandes valeurs (<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Vérité"><span style="color:#000000; text-decoration:none;">v&eacute;rit&eacute;</span></a>, <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Justice"><span style="color:#000000; text-decoration:none;">justice</span></a> et <a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Raison"><span style="color:#000000; text-decoration:none;">raison</span></a>), en les d&eacute;laissant au profit d&rsquo;un r&eacute;alisme politico-pragmatique et attentiste, avec tout ce que cette attitude comporte de concessions, de compromis, voire de compromissions, de l&acirc;chet&eacute;s et d&rsquo;hypocrisies. Or l&rsquo;intellectuel, ayant des fonctions hautement morales, &agrave; la diff&eacute;rence du simple citoyen, se doit d&rsquo;&ecirc;tre une conscience critique au lieu de se contenter d&rsquo;un engagement stricto sensu.</p> <p class="texte" dir="ltr">Ainsi, que reste-t-il de la vie intellectuelle fran&ccedil;aise et de ses pol&eacute;miques exemplaires&nbsp;? Certains parleront du silence ahurissant des intellectuels. D&rsquo;aujourd&rsquo;hui. Cette question, au demeurant trop ambig&uuml;e et glauque, peut bien se transformer en une autre plus concr&egrave;te et incisive&nbsp;: reste-il des intellectuels au sens classique et politique du terme, aujourd&rsquo;hui&nbsp;?</p> <p class="texte" dir="ltr">&Agrave; premi&egrave;re vue, la r&eacute;ponse ne peut que se solder par l&rsquo;affirmative. Or, si les intellectuels sont l&agrave; pour rompre avec des cadres structurels et id&eacute;ologiques injustes, qu&rsquo;ils soient consensuels ou conflictuels, afin d&rsquo;apporter quelques &eacute;l&eacute;ments de r&eacute;ponse au d&eacute;bat politique collectif,&nbsp;la r&eacute;ponse est &eacute;videment n&eacute;gative.</p> <h1 dir="ltr" id="heading2">L&rsquo;intellectuel se minimise et le politique s&rsquo;assujettit au syst&egrave;me</h1> <p class="texte" dir="ltr">Pour aller &agrave; l&rsquo;essentiel&nbsp;: le monde est en mutation, donc comprendre les enjeux devient un enjeu en soi. Cet enjeu est celui de l&rsquo;intelligence. Or l&rsquo;intellectuel d&rsquo;aujourd&rsquo;hui est r&eacute;duit &agrave; la portion congrue. Les intellectuels sont d&eacute;consid&eacute;r&eacute;s par les minist&egrave;res charg&eacute;s de l&rsquo;&eacute;ducation nationale, de la recherche et de la culture, depuis des lustres. Leur statut, source a la fois de reconnaissance et assise de leur autorit&eacute;, s&rsquo;est progressivement amoindri. &nbsp;Si bien que certains parlent de d&eacute;clin culturel. D&rsquo;autres ne pensent pas d&rsquo;une mani&egrave;re aussi radicale. Pourtant, le ressenti est r&eacute;el et g&eacute;n&eacute;ralis&eacute;. Les &eacute;changes d&rsquo;id&eacute;es et la conversation quotidienne semblent le montrer. Sans utiliser volontiers l&rsquo;argument ad&nbsp;hominem, il suffit d&rsquo;entendre le Premier ministre, M. Valls, faire usage d&rsquo;une rh&eacute;torique dramatique et cynique pour justifier ses inqui&eacute;tudes devant la mont&eacute;e du FN, interpeller et apostropher les intellectuels&nbsp;: &quot;O&ugrave; sont les intellectuels, o&ugrave; sont les grandes consciences de ce pays, les hommes, les femmes de culture, qui doivent monter, eux aussi, au cr&eacute;neau&nbsp;?&nbsp;&raquo; Et, d&rsquo;une mani&egrave;re paradoxale, il se demande&nbsp;plus path&eacute;tiquement&nbsp;: &laquo;&nbsp;O&ugrave; est la gauche&nbsp;?&quot; (sic)</p> <p class="texte" dir="ltr">Curieuses interrogations de M. Valls, &agrave; propos de l&rsquo;absence dans l&rsquo;ar&egrave;ne politique &lsquo; la sienne&nbsp;?) de ceux qui depuis fort longtemps sont les oubli&eacute;s des de la politique et des pouvoirs de la politique. &Eacute;trange appel &agrave; la rescousse in extremis, lorsque son parti et son pouvoir politique sont accul&eacute;s par dans les &eacute;lections.</p> <p class="texte" dir="ltr">Faut-il rappeler que la classe politique montre un m&eacute;pris souverain pour tous ceux qui sont d&rsquo;une culture g&eacute;n&eacute;rale sup&eacute;rieure. Depuis des lustres, les dirigeants politiques ne s&rsquo;int&eacute;ressent plus aux id&eacute;es pour faire du politique un art de gouvernement, sauf pour manipuler, quand il s&rsquo;agit de technocrates et/ou de conseilleurs qui proposent des techniques pour faire de la communication et de la propagande. Car la d&eacute;connection qu&rsquo;ils ont de la r&eacute;alit&eacute; est directement proportionnelle &agrave; la rigidit&eacute; de leurs comportements et de leurs vues id&eacute;ologiques. Les politiciens, disait M. Crozier, se croient responsables de tout, il leur faut tout savoir et avoir r&eacute;ponse &agrave; tout. Voil&agrave; leur m&eacute;pris des intellectuels. Le silence de ceux-ci est donc une mani&egrave;re de se&nbsp;mettre &agrave; l&rsquo;abri de l&rsquo;irrationalit&eacute; du pouvoir et du d&eacute;dain, surtout quand il est froid et autoritaire.</p> <h1 dir="ltr" id="heading3">L&rsquo;illusion et la d&eacute;perdition de la politique&nbsp;: le d&eacute;bat de fond est recel&eacute;</h1> <p class="texte" dir="ltr">&Agrave; ce propos, il faut rappeler que les intellectuels n&rsquo;ont jamais d&eacute;clar&eacute; comme M. Valls leur amour aux entreprises. Un cri du c&oelig;ur contrari&eacute;. Car le patronat n&rsquo;aime ni les socialistes ni les intellectuels.</p> <p class="texte" dir="ltr">C&rsquo;est l&rsquo;&eacute;tat d&rsquo;esprit d&rsquo;une &eacute;poque. L&rsquo;illusion de l&rsquo;&eacute;conomique et la d&eacute;perdition de la politique qui enterrent le d&eacute;bat de fond. Les intellectuels ont raison&nbsp;de s&rsquo;&eacute;nerver. La boucle de l&rsquo;inculture est boucl&eacute;e. En revanche, les experts en chiffres et en statistiques sont gagnants. La modernit&eacute; actuelle est le miroir des politiques o&ugrave; les mots se gonflent et perdent tout leur sens.</p> <p class="texte" dir="ltr">L&rsquo;&eacute;cole la&iuml;que, dans sa version sociale lib&eacute;rale, est devenue le mot de passe des business schools , justifiant tous les abandons et la paralyse de la r&eacute;flexion de la gauche. L&#39;obligation de s&#39;adapter s&rsquo;impose&nbsp;: or si s&#39;adapter, en 1940, c&#39;&eacute;tait collaborer, aujourd&rsquo;hui s&rsquo;adapter est une autre forme, plus sibylline, de collaboration avec la &laquo;&nbsp;transformation des Lumi&egrave;res en un march&eacute; commercial mondialis&eacute;&nbsp;&raquo;. Faut-il rappeler que la finance, si d&eacute;test&eacute;e en 2012 par M. Hollande, n&rsquo;a pas de patrie et n&rsquo;a pas de d&eacute;cence, car son unique objectif est le gain,&nbsp;comme disait en subtil connaisseur&nbsp;Napol&eacute;on 1<sup>er</sup>.</p> <p class="texte" dir="ltr">Alors o&ugrave; sont les intellectuels&nbsp;? Si l&rsquo;ordre politique veut le savoir, c&rsquo;est une chose simple&nbsp;: m&ecirc;me si ils sont devenus des chats &eacute;chaud&eacute;s bien craintifs et coinc&eacute;s, il sont confin&eacute;s (sans habeas corpus) dans leurs v&eacute;tustes universit&eacute;s, paup&eacute;ris&eacute;es, sans moyens, et vou&eacute;s &agrave; la course aux projets pour r&eacute;colter de l&#39;argent afin d&rsquo;alimenter leurs recherches et leurs &eacute;tudiants, avec des salaires qu&#39;un assistant au Parlement refuserait de percevoir.</p> <p class="texte" dir="ltr">L&rsquo;Universit&eacute; &eacute;tait jadis, la matrice de la vie intellectuelle. Aujourd&rsquo;hui ne c&eacute;l&egrave;bre pas les id&eacute;es universalistes. Le d&eacute;labrement intellectuel de l&rsquo;Universit&eacute; fait d&rsquo;elle une &eacute;norme et couteux &laquo;&nbsp;lyc&eacute;e technique&nbsp;&raquo; o&ugrave; la science est un paravent qui cach&eacute; les affaires. L&rsquo;enjeu dramatique de l&rsquo;Universit&eacute; fran&ccedil;aise m&eacute;rite mieux&nbsp;: sa transformation en simple courroie de transmission des entreprises et le divorce entre les sciences naturelles (dominantes) et les sciences humaines (en d&eacute;sint&eacute;gration) sont en train de transformer &laquo;&nbsp;l&rsquo;Alma mater&nbsp;&raquo; en simple boutique &agrave; l&rsquo;image d&rsquo;un coll&egrave;ge am&eacute;ricain.</p> <p class="texte" dir="ltr">Par ailleurs, les intellectuels, vrais d&eacute;positaires d&rsquo;une culture scientifique et humaniste, ceux qui ne sont pas &agrave; la t&eacute;l&eacute; ni en qu&ecirc;te de notori&eacute;t&eacute; pour des commissions &laquo;&nbsp;scientifiques&nbsp;&raquo; europ&eacute;ennes, n&rsquo;ont plus de journaux pour cultiver leurs egos narcissiques sans se plier aux marottes dominantes.</p> <p class="texte" dir="ltr">Il suffit de se souvenir et de comparer la quantit&eacute;, et la qualit&eacute;, des articles de presse d&rsquo;hier avec l&rsquo;actuelle pour y reconna&icirc;tre une perte de substance. La quantit&eacute; et la qualit&eacute; laissent &agrave; d&eacute;sirer. Sans oublier que la lecture des journaux n&rsquo;a jamais consolid&eacute; une bonne culture. Pourtant, il y a quelques ann&eacute;es, les intellectuels &eacute;taient en premi&egrave;re ligne et dans les grandes pages des journaux et des magazines. Sans parler des &eacute;missions culturelles de la t&eacute;l&eacute;vision, malgr&eacute; la d&eacute;formation de la pens&eacute;e qu&rsquo;elle introduit avec le diktat du temps d&rsquo;antenne et de l&rsquo;audimat. Et du nombre de signes de la presse &eacute;crite.</p> <p class="texte" dir="ltr">Tout est fait pour r&eacute;duire la transmission de la connaissance et rendre une caricature de culture, avec la complicit&eacute; des pouvoirs, Pire encore&nbsp;: de cr&eacute;tiniser et de diffuser la pens&eacute;e devenue entre-temps unique.</p> <p class="texte" dir="ltr">En politique, le d&eacute;ficit culturel et conceptuel est &agrave; son comble. Il suffit d&rsquo;entendre les interventions des parlementaires dans les s&eacute;ances diffus&eacute;es par la cha&icirc;ne parlementaire et les comparer &agrave; celles de la Troisi&egrave;me R&eacute;publique o&ugrave; l&rsquo;art oratoire n&rsquo;avait pas peur de la culture ni de l&rsquo;&eacute;change d&rsquo;id&eacute;es.</p> <p class="texte" dir="ltr">Rappelons que les contributions universitaires enrichissaient l&rsquo;information et &eacute;largissaient les horizons, en ajoutant du contenu et du sens aux analyses ordinaires. Il n&rsquo;y avait ni concurrence ni rivalit&eacute; de sources mais compl&eacute;mentarit&eacute;.</p> <p class="texte" dir="ltr">De m&ecirc;me les journaux traitaient les questions de fond des sciences humaines et naturelles en facilitant les d&eacute;bats tout en portant l&rsquo;information au niveau de la connaissance fondamentale.</p> <h1 dir="ltr" id="heading4">La m&eacute;diocrit&eacute; des certain(e)s ministres</h1> <p class="texte" dir="ltr">Il suffit d&rsquo;une carte de presse et d&rsquo;un entregent politique pour se hisser sur les plateaux des commentateurs politiques. Certains agitent des cartes de charg&eacute;s de l&rsquo;enseignement sup&eacute;rieur pour vendre leur &laquo;&nbsp;blablatage&nbsp;&raquo;. Des noms&nbsp;? Sans faire une longue liste ni impliquer toute l&rsquo;honorable profession, il suffit de mentionner&nbsp;parmi eux&nbsp;: l&rsquo;infatigable et us&eacute; Alain Minc, le pontifiant et pr&eacute;tentieux Pascal Perrineau, l&rsquo;ineffable Dominique Reynie, qui se lance en politique, toujours &agrave; droite, sous les couleurs de l&rsquo;UMP. Sans oublier le maniable F. Taddei, bien connu par son &eacute;mission politico-culturelle &laquo;&nbsp;<a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Ce_soir_(ou_jamais_!)"><span style="color:#000000; text-decoration:none;">Ce soir (ou jamais&nbsp;!)</span></a>&nbsp;&raquo;, o&ugrave; se m&ecirc;lent, dans une sorte de salon mondain et sympathique, des repr&eacute;sentants de la soci&eacute;t&eacute; civile (en vue), des artistes, et des vedettes m&eacute;diatiques de tout bord. En fait, certains intellocrates m&eacute;diatiques (avant on disait les salonards) se sont transform&eacute; en para-journalistes s&rsquo;adaptant au moule des medias&nbsp;et ses r&egrave;gles&nbsp;: bri&egrave;vet&eacute;, superficialit&eacute;, frivolit&eacute;, l&eacute;g&egrave;ret&eacute; et inculture vernie.</p> <p class="texte" dir="ltr">Enfin, c&rsquo;est une &eacute;vidence que la place et la pr&eacute;sence des intellectuels d&rsquo;haute classe est remplac&eacute;e par des journalistes soit disant sp&eacute;cialis&eacute;s, et un certain nombre de personnalit&eacute;s soi-disant acad&eacute;miques qui monopolisent le paysage m&eacute;diatique avec la connivence entretenue des journalistes politiques et des &laquo;&nbsp;spin doctors&nbsp;&raquo; &agrave; la mode, ces technocrates m&eacute;diatiques mi-cr&egrave;ves-mi- mercenaires.</p> <p class="texte" dir="ltr">Toutefois, L&#39;&egrave;re des &eacute;narques et des conseilleurs de cabinets rend la politique inaudible sans d&eacute;bat ni pol&eacute;mique de fond. La haute intelligentsia a &eacute;t&eacute; remplac&eacute;e par une basse intelligence des techniciens et des intellocrates. Ainsi, il ne reste que les petites phrases assassines ou les mauvaises blagues des bistrots. Et un public de lecteurs et de t&eacute;l&eacute;spectateurs qui, de moins en moins int&eacute;ress&eacute;, se r&eacute;fugie dans d&rsquo;autres m&eacute;dias, faute de vraie vie intellectuelle.</p> <p class="texte" dir="ltr">Dans cette atmosph&egrave;re d&rsquo;inculture et d&rsquo;inconsistance id&eacute;ologique o&ugrave; certain(e)s ministres d&eacute;clarent sans complexe qu&rsquo;ils ne lisent que des rapports et des notes parce qu&rsquo;ils n&rsquo;ont pas le temps. Ou d&rsquo;autres qui se f&eacute;licitent de l&eacute;galiser l&rsquo;utilisation de l&rsquo;anglais dans les cours universitaires, sous pr&eacute;texte que les &eacute;tudiants &eacute;trangers seraient ainsi plus attir&eacute;s par nos universit&eacute;s.&nbsp;Il y a aussi ceux qui confondent Zadig et Voltaire. Sans oublier la gaffe de celui qui se demandait &agrave; quoi pouvait bien servir la lecture de La Princesse de Cl&egrave;ves.</p> <h1 dir="ltr" id="heading5">Et les partis politiques&nbsp;dans tout cela&nbsp;?</h1> <p class="texte" dir="ltr">Les partis politiques se sont transform&eacute;s eux aussi en agences de communication et de marketing. Sonar d&rsquo;opinion. Les s&eacute;ances de formation sont un pot-pourri de techniques et de recettes commerciales qui font appel &agrave; l&rsquo;id&eacute;ologie politique. Il ne s&rsquo;agit que de proposer des contenus programmatiques pr&ecirc;ts &agrave; porter. Peu de place aux &eacute;changes d&rsquo;id&eacute;es donc. L&rsquo;utilit&eacute; remplace la qualit&eacute;. Nuls d&eacute;bats internes o&ugrave; la vie intellectuelle de jadis trouvait un &eacute;cho. Les militants sont &laquo;&nbsp;format&eacute;s&nbsp;&raquo; selon la propagande ambiante et &agrave; partir des fiches des conseillers en communication. Nous sommes ici tr&egrave;s loin des anciennes &laquo;&nbsp;&eacute;coles&nbsp;&raquo; de cadres des partis politiques.</p> <p class="texte" dir="ltr">Les responsables politiques ne s&rsquo;occupent pas de nourrir intellectuellement ni leurs militants, ni leurs &eacute;lecteurs, ni eux-m&ecirc;mes. &Agrave; quoi bon&nbsp;? Au point que les colloques ne sont que des vitrines o&ugrave; ils font appel &agrave; des vedettes en vogue ou &agrave; des professionnels de l&rsquo;information. Le m&eacute;pris de la culture et de la pens&eacute;e nous a rabaiss&eacute;s au niveau z&eacute;ro de celles-ci. Et les rares personnes qui souhaitent l&rsquo;am&eacute;liorer sont marginalis&eacute;es. Est-ce l&rsquo;envie &agrave; l&rsquo;encontre des intellectuels ou la peur des id&eacute;es&nbsp;? Probablement les deux.</p> <p class="texte" dir="ltr">Une telle m&eacute;diocrit&eacute; gagne toute la classe politique, les associations et les soci&eacute;t&eacute;s dites savantes, et m&ecirc;me les ob&eacute;diences ma&ccedil;onniques.</p> <p class="texte" dir="ltr">Rien d&rsquo;&eacute;tonnant que les intellectuels soient d&eacute;&ccedil;us, d&eacute;courag&eacute;s, bafoues, r&eacute;duits &agrave; l&rsquo;impuissance et au silence programm&eacute;s par les bureaucrates de toujours et les technocrates de service. La vie intellectuelle de la R&eacute;publique est morte comme la R&eacute;publique des professeurs et des lettres. Les oligarques et leurs sbires politiciens l&rsquo;on tu&eacute;e et le pouvoir politique a fait le lit de la mis&egrave;re intellectuelle du politique et de la politique.</p> <h1 dir="ltr" id="heading6">Le changement, maintenant&nbsp;! C&rsquo;est la petite blague&nbsp;de Hollande&nbsp;!</h1> <p class="texte" dir="ltr">Nous sommes au contraire en face d&rsquo;un refoulement dialectique d&rsquo;ampleur historique, conduisant au renouvellement complet des r&egrave;gles du jeu politique et, en particulier, &agrave; une renaissance tr&egrave;s originale de l&rsquo;id&eacute;e d&rsquo;imposer le moindre mal au plus grand nombre.</p> <p class="texte" dir="ltr">L&rsquo;histoire occidentale se laisse interpr&eacute;ter classiquement comme une comique dialectique de lib&eacute;ration comique. Or, le temps des transgressions vides de sens est venu et nous y sommes. C&rsquo;est le cas de la petite blague de F. Hollande lorsqu&rsquo;&agrave; la campagne pr&eacute;sidentielle de 2012 impose la formule&nbsp;: le changement maintenant&nbsp;! Les id&eacute;ologies n&rsquo;ont plus de culture authentique et sont incapables de produire de l&rsquo;&eacute;thique et de l&rsquo;esp&eacute;rance. Elles sont&nbsp;des parasites, des sous-cultures qui travaillent &agrave; d&eacute;truire l&rsquo;essence de la raison et &agrave; construire des mythes de la vie intellectuelle. L&rsquo;&eacute;puisement et le silence des intellectuels en politique correspond, dans l&rsquo;esprit, &agrave; un prodigieux retournement de l&rsquo;opinion. La libert&eacute;, l&rsquo;&eacute;galit&eacute; et la fraternit&eacute; sont r&eacute;duites &agrave; l&rsquo;arbitraire et &agrave; la volont&eacute; de puissance. Confront&eacute;e &agrave; l&rsquo;&eacute;vidence de la transgression cynique et t&eacute;n&eacute;breuse du pouvoir, la nouvelle libert&eacute; lib&eacute;rale sait bien qu&rsquo;il n&rsquo;y a pas de convergence naturelle des &eacute;go&iuml;smes et que la concurrence bien r&eacute;gl&eacute;e de ces &eacute;go&iuml;smes ne saurait assurer ni la paix perp&eacute;tuelle, ni la prosp&eacute;rit&eacute;, ni un id&eacute;al maximal lib&eacute;ral, c&#39;est-&agrave;-dire le plus grand bonheur au plus grand nombre et la d&eacute;mocratie.</p> <h1 dir="ltr" id="heading7">En mode de conclusion</h1> <p class="texte" dir="ltr">En somme, si la vie de l&rsquo;intellelle est morte, vive l&rsquo;intellectualit&eacute;&nbsp;! La France intellectuelle du futur se pr&eacute;pare dans la nuit. Elle s&rsquo;appuie sur le rejet m&eacute;thodique de la libert&eacute; nihiliste. Elle fait un retour pensif sur le point de non-retour moderne, celui qui a rendu possible une bifurcation catastrophique. Elle vise ce qu&rsquo;il aurait fallu inventer jadis pour changer autrement un mode de vie. Elle sent que les torts historiques furent partag&eacute;s, qu&rsquo;elle n&rsquo;a pas, face &agrave; son pass&eacute;, de responsabilit&eacute; exclusive, et que m&ecirc;me les modernes et les post-modernes ont sans doute leurs propres excuses. Une nouvelle intellectualit&eacute; vise &agrave; retrouver enfin ce chemin social qui monte vers la fraternit&eacute;, sans tomber dans l&rsquo;id&eacute;ologie froide de la libert&eacute; ou dans les d&eacute;lires de l&rsquo;utopie. Ainsi, l&rsquo;avenir se passionnera pour la personne, m&ecirc;me l&rsquo;individu, mais aussi la vie et la soci&eacute;t&eacute;, la raison et la morale, l&rsquo;amiti&eacute; et la nature, afin de viser l&rsquo;Homme, tous les hommes, d&rsquo;une mani&egrave;re moins abstraite et plus humaine. Sapientia et humanitas, donc.</p>