<p class="texte" dir="ltr">La technique suscite l&rsquo;enthousiasme voire l&rsquo;euphorie de ceux qui per&ccedil;oivent son &oelig;uvre de progr&egrave;s et d&rsquo;&eacute;mancipation quand d&rsquo;autres insistent, &agrave; la suite d&rsquo;Ellul et de son &oelig;uvre <span style="text-decoration:underline;">La technique ou l&rsquo;enjeu du si&egrave;cle</span>, sur la menace d&rsquo;ali&eacute;nation et de destruction de l&rsquo;humain, &eacute;cras&eacute; par le pouvoir des robots et une politique cybern&eacute;tique toute puissante. Les techniques lib&egrave;rent-elles en offrant le loisir de s&rsquo;investir dans des activit&eacute;s nouvelles ou construisent-elles un monde de contraintes o&ugrave; le contr&ocirc;le social s&rsquo;empare des institutions politiques jusqu&rsquo;&agrave; se substituer aux pouvoirs exerc&eacute;s par des hommes incapables d&rsquo;organiser efficacement leur environnement&nbsp;?</p> <p class="texte" dir="ltr">Plusieurs auteurs illustrent cette pluralit&eacute; des rapports aux techniques. Ils d&eacute;crivent les refus et les servitudes, les s&eacute;ductions et les renoncements fondant des positions personnelles et des d&eacute;cisions politiques dans un rapport au combien dialectique, &agrave; la fois lib&eacute;rateur mais aussi dominateur et destructeur. La description des positions d&rsquo;Habermas dans son c&eacute;l&egrave;bre <span style="text-decoration:underline;">La technique et la science comme id&eacute;ologie</span>, de Feenberg pour son fameux <span style="text-decoration:underline;">(Re)penser la technique, vers une technologie d&eacute;mocratique</span> interrogeant le pessimisme du philosophe de G&ouml;ttingen et celle d&rsquo;H&ouml;rl pour son article remarquable sur <span style="text-decoration:underline;">Le d&eacute;placement technologique du sens</span> atteste de cette pluralit&eacute; des rapports et des repr&eacute;sentations.</p> <p class="texte" dir="ltr">Mais cette controverse r&eacute;v&egrave;le un conflit o&ugrave; chacun peut choisir d&rsquo;adopter l&rsquo;une de ces positions ou les consid&eacute;rer ind&eacute;cidables. Dans ce cas, une autre r&eacute;flexion est &agrave; mener sur ces philosophies de la technique. C&rsquo;est pourquoi la compr&eacute;hension de cette complexit&eacute; des rapports aux techniques m&eacute;rite cet approfondissement &agrave; propos des r&eacute;volutions &eacute;pist&eacute;mologiques en cours, d&rsquo;o&ugrave; une seconde controverse qui t&eacute;moigne des imaginaires de la technique lorsque des auteurs s&rsquo;accommodent ou d&eacute;noncent les robots. Depuis les pr&eacute;figurations quasi-proph&eacute;tiques des fictions d&rsquo;Azimov&nbsp;; les travaux de Latour, les positions critiques du rationalisme de Skirbekk et la critique &eacute;pist&eacute;mologique radicale de Feyerabend montrent que le rapport &agrave; la technique tient &agrave; la d&eacute;finition d&rsquo;une relation &agrave; la compl&eacute;tude de l&rsquo;humain, jugeant des limites de ses facult&eacute;s. Cette autre controverse montre que la technique est un projet avec des intentions, celles d&rsquo;une transcendance de l&rsquo;homme, d&rsquo;une transfiguration par le progr&egrave;s ou une modeste contribution &agrave; son &eacute;panouissement. Que r&ecirc;vons-nous de nous-m&ecirc;mes dans la technique&nbsp;? Aider, suppl&eacute;er, remplacer, transformer, dominer&nbsp;!</p> <p class="texte" dir="ltr">Comment le politique peut-il alors penser la technique&nbsp;? C&rsquo;est l&agrave; l&rsquo;enjeu de la reconnaissance d&rsquo;une &eacute;pist&eacute;mologie plurielle qui s&rsquo;exprima dans le vif d&eacute;bat entre Wiener, le fondateur de la cybern&eacute;tique r&eacute;pondant au dominicain Dubarle qui l&rsquo;interpella dans un article virulent. A les entendre, y a-t-il une bonne raison de donner raison &agrave; l&rsquo;un d&rsquo;eux, fermant le d&eacute;bat au pr&eacute;texte d&rsquo;un choix qui pr&eacute;tendrait s&rsquo;imposer &agrave; tous&nbsp;? Le politique r&eacute;alisant lui-m&ecirc;me sa r&eacute;volution &eacute;pist&eacute;mologique reste-t-il au service d&rsquo;un projet limitatif ou devient-il le promoteur et le garant de la pluralit&eacute; inaugurant une autre praxis de la raison, de la science et de la technique&nbsp;?</p> <h2 dir="ltr" id="heading1" style="font-style:italic;">La pluralit&eacute; des rapports philosophiques aux techniques</h2> <p class="texte" dir="ltr">La premi&egrave;re controverse tient &agrave; cette pluralit&eacute; des repr&eacute;sentations philosophiques de la technique. A la suite d&rsquo;Ellul, Habermas a marqu&eacute; son &eacute;poque en contestant la conception progressiste et scientifique de la technique fond&eacute;e sur sa neutralit&eacute;, son utilit&eacute; voire sa bienveillance du fait de l&rsquo;optimisme scientiste. L&rsquo;objet est neutre, dit-on, et l&rsquo;usage en sera ce que les hommes en feront. C&rsquo;est ainsi qu&rsquo;on pr&eacute;sente la d&eacute;couverte de Nobel. La dynamite facilite le travail des mineurs mais facilite aussi l&rsquo;&oelig;uvre des militaires. Est-ce sa faute&nbsp;? Habermas examine la technique pour en infirmer la neutralit&eacute; et pour en d&eacute;noncer le caract&egrave;re instrumental dans le prolongement de la recherche scientifique qui ne saurait se soumettre &agrave; une quelconque injonction ou direction. La seule loi du laboratoire est la libert&eacute; de la recherche sans qu&rsquo;aucune limite ne vienne interagir avec une foi en l&rsquo;objectivisme h&eacute;rit&eacute; des anciennes dogmatiques<a class="footnotecall" href="#ftn1" id="bodyftn1">1</a>.</p> <p class="texte" dir="ltr">Non sans ironie, Habermas s&rsquo;&eacute;tonne de cette illusion objectiviste de la science contemporaine visant le contr&ocirc;le par la th&eacute;orie qui atteste de la r&eacute;gularit&eacute; des &eacute;v&eacute;nements&nbsp;et de leur ma&icirc;trise par leur reproduction pr&eacute;visible&nbsp;: la r&eacute;p&eacute;tition. Les techniques sont en capacit&eacute; d&rsquo;accomplir ces r&eacute;plications m&eacute;caniques de t&acirc;ches contr&ocirc;l&eacute;es. Or ce contr&ocirc;le et cette aptitude &agrave; la r&eacute;plication manifeste un projet de domination. Habermas cite <em>in extenso </em>Gehlen en disant de ce dernier qu&rsquo;il &laquo;&nbsp;a fait &agrave; mon avis la preuve qu&rsquo;il y a un lien immanent entre la technique telle que nous la connaissons et la structure de l&rsquo;activit&eacute; rationnelle par rapport &agrave; sa fin&nbsp;&raquo;. Les travaux du c&eacute;l&egrave;bre anthropologue et sociologue allemand portent sur la technique et sa position inspire Habermas jusqu&rsquo;&agrave; emporter son adh&eacute;sion<a class="footnotecall" href="#ftn2" id="bodyftn2">2</a>.</p> <p class="texte" dir="ltr">Le dessein de la technique serait la pure domination soit l&rsquo;extension du contr&ocirc;le social. A cet &eacute;gard, Habermas envisage des hypoth&egrave;ses o&ugrave; la biologie, la g&eacute;n&eacute;tique et la cybern&eacute;tique produisent l&rsquo;homme<a class="footnotecall" href="#ftn3" id="bodyftn3">3</a>. Critique de l&rsquo;objectivisme et de la conscience scientiste &oelig;uvrant &agrave; la domination politique par la technique, Habermas fait sienne la constatation de Schelsky qu&rsquo;il cite longuement pour mettre en perspective l&rsquo;ali&eacute;nation et l&rsquo;objectivation<a class="footnotecall" href="#ftn4" id="bodyftn4">4</a>.&nbsp;La technique r&eacute;alise alors le projet prom&eacute;th&eacute;en de la construction d&rsquo;une humanit&eacute; par elle-m&ecirc;me, &eacute;mancip&eacute;e de la nature et lib&eacute;r&eacute;e de sa condition. En cela Habermas exprime une philosophie tragique de la technique, commune &agrave; celle de Lukacs, ce dernier d&eacute;crivant magistralement le processus de r&eacute;ification &agrave; propos du travail humain, craignant la trag&eacute;die d&rsquo;une science destructrice de l&rsquo;homme<a class="footnotecall" href="#ftn5" id="bodyftn5">5</a>.</p> <p class="texte" dir="ltr">Ces auteurs ont en commun de reproduire une figure de pens&eacute;e d&rsquo;inspiration h&eacute;g&eacute;lienne o&ugrave; l&rsquo;histoire accomplit un mouvement d&rsquo;objectivation. Lukacs, Habermas et Marcuse, ce dernier &eacute;tant cit&eacute; abondamment par Habermas, partagent l&rsquo;h&eacute;ritage dialectique et historique marxiste. La technique est l&rsquo;expression d&rsquo;une pens&eacute;e scientifique se r&eacute;alisant dans l&rsquo;histoire jusqu&rsquo;&agrave; sacrifier une certaine conception de l&rsquo;humanit&eacute; au profit de sa transmutation techniciste. La technique n&rsquo;est pas neutre, elle est ali&eacute;nation et domination. La distance critique induit ici la question sociale d&rsquo;o&ugrave; les &eacute;tudes d&rsquo;Habermas sur les institutions de la recherche, l&rsquo;organisation de la technique, la rationalisation du pouvoir, la technocratie&nbsp;; mais la question est aussi historique, voire ontologique car la science accomplit un dessein. En cela, la philosophie critique d&rsquo;Habermas rejoint l&rsquo;inqui&eacute;tude de Marcuse o&ugrave; le d&eacute;veloppement de la technique devient un th&egrave;me politique majeur puisqu&rsquo;elle d&eacute;termine le fonctionnement des institutions et les rapports humains&nbsp;; voire la condition m&ecirc;me de l&rsquo;homme<a class="footnotecall" href="#ftn6" id="bodyftn6">6</a>. Quoique leur philosophie critique cherche une issue par le d&eacute;bat chez l&rsquo;un et par l&rsquo;exp&eacute;rimentation d&rsquo;alternatives chez l&rsquo;autre, elle conclut &agrave; l&rsquo;arrangement, sans pouvoir opposer au cours de l&rsquo;histoire une capacit&eacute; &agrave; faire qui en infl&eacute;chirait la marche. C&rsquo;est ce que Feenberg leur reproche.</p> <p class="texte" dir="ltr">Dans <span style="text-decoration:underline;">(Re)penser la technique, vers une technologie d&eacute;mocratique</span>, ce dernier expose une autre th&egrave;se quant &agrave; la technique et au pouvoir scientifique. Repenser suppose de travailler &agrave; la conqu&ecirc;te d&eacute;mocratique sans s&rsquo;abandonner &agrave; la fatalit&eacute; du destin historique o&ugrave; &agrave; la domination dont certains seraient tout &agrave; la fois les acteurs et les jouets. Il &eacute;voque un constructivisme technique cherchant &agrave; proposer des alternatives au mod&egrave;le dominant, comme ses a&icirc;n&eacute;s de l&rsquo;&eacute;cole de Francfort. Toutefois, il rep&egrave;re cet &laquo;&nbsp;essentialisme&nbsp;&raquo; de la technique qu&rsquo;il r&eacute;prouve chez ses pr&eacute;d&eacute;cesseurs. En effet, d&egrave;s lors que l&rsquo;on consid&egrave;re des lois de nature qui s&rsquo;imposent &agrave; la mani&egrave;re d&rsquo;un syst&egrave;me inspirant la soumission plus que la libert&eacute;, des dimensions de la soci&eacute;t&eacute; &eacute;chappent &agrave; l&rsquo;exercice du pouvoir des populations. Feenberg l&rsquo;illustre des croyances en des lois naturelles du march&eacute; en &eacute;conomie et le prolonge en consid&eacute;rant que ses a&icirc;n&eacute;s ont admis des lois immanentes &agrave; la technique jusqu&rsquo;&agrave; juger leur posture morale, tragique, voire fataliste. Lui, conteste l&rsquo;existence de ces lois naturelles ou de ces destins historiques si d&eacute;termin&eacute;s qu&rsquo;ils ne seraient pas l&rsquo;objet d&rsquo;un d&eacute;bat d&eacute;mocratique et de l&rsquo;exercice d&rsquo;une souverainet&eacute;<a class="footnotecall" href="#ftn7" id="bodyftn7">7</a>.</p> <p class="texte" dir="ltr">Sa r&eacute;futation de leur essentialisme<a class="footnotecall" href="#ftn8" id="bodyftn8">8</a> l&rsquo;oblige &agrave; adopter une critique plus fondamentale de la science elle-m&ecirc;me, puisque la technique tirant ses formes et ses objets d&rsquo;une application des mod&egrave;les, son affirmation ne tient que si la science elle-m&ecirc;me est consid&eacute;r&eacute;e telle une production sociale, soit une construction o&ugrave; l&rsquo;action laisse le choix et non telle une norme ou une v&eacute;rit&eacute;. Un tel basculement &eacute;pist&eacute;mologique s&rsquo;appuie sur une critique plus r&eacute;volutionnaire du statut de la connaissance scientifique et de la l&eacute;gitimit&eacute; des sciences &laquo;&nbsp;dures&nbsp;&raquo;. Feenberg d&eacute;veloppe l&agrave; une position audacieuse en &eacute;voquant les rationalisations d&eacute;mocratiques. Or, cette participation &agrave; l&rsquo;&eacute;laboration des techniques satisfait une partie seulement de la critique des &laquo;&nbsp;essentialistes&nbsp;&raquo;. En effet, le citoyen n&rsquo;est plus le consommateur passif d&rsquo;une technique construite pour le contr&ocirc;ler, le dominer, voire l&rsquo;ali&eacute;ner. Il a les moyens de cr&eacute;er, de produire et d&rsquo;interagir dans le r&eacute;seau des techniques dont il est un acteur<a class="footnotecall" href="#ftn9" id="bodyftn9">9</a>. La libert&eacute; s&rsquo;exerce dans les modes de production, les modes de vie et d&rsquo;appropriation de la technique. Certes, cette prise de pouvoir dans la cr&eacute;ation et l&rsquo;organisation du syst&egrave;me des techniques exprime une solution dans la lign&eacute;e de l&rsquo;intention de Marcuse ou Habermas&nbsp;; mais elle peut para&icirc;tre illusoire en ceci que la transmutation de la soci&eacute;t&eacute; se r&eacute;alise malgr&eacute; tout dans sa technicisation, quel qu&rsquo;en soit les acteurs&nbsp;: les Etats, les firmes ou les individus. Feenberg en revient &agrave; Heidegger pour admettre avec lui la subversion du sens par la technique qui arraisonne l&rsquo;homme et le soumet &agrave; l&rsquo;empire des fonctions o&ugrave; la nature est promise &agrave; sa d&eacute;vastation du fait de son total assujettissement &agrave; des usages inconsid&eacute;r&eacute;s<a class="footnotecall" href="#ftn10" id="bodyftn10">10</a>.</p> <p class="texte" dir="ltr">D&rsquo;o&ugrave; la controverse sur le sens de la technique qui se poursuit &agrave; la lecture de H&ouml;rl dont la contribution porte sur la m&eacute;tamorphose du sens. Sa critique du processus de cybern&eacute;tisation de l&rsquo;existence s&rsquo;appuie sur une connaissance des techniques et des m&eacute;dias avec un projet d&rsquo;&eacute;cologie g&eacute;n&eacute;rale des techniques. Son approche diff&egrave;re sensiblement du projet de Feenberg qui a foi en l&rsquo;action sociale et politique. En effet, H&ouml;rl rappelle la port&eacute;e de l&rsquo;&oelig;uvre d&rsquo;Husserl &eacute;clairant la signification du sens, avant m&ecirc;me Heidegger&nbsp;; soit la place de la science dans la constitution du sens en Occident. Or, cette transformation du processus de formation du sens ne tient pas &agrave; la position d&rsquo;acteurs ou de consommateurs subissant les techniques produites par certains. H&ouml;rl doute de la pertinence de ce d&eacute;bat politique ou sociologique car l&rsquo;histoire de l&rsquo;&eacute;laboration du sens en r&eacute;v&egrave;le la transformation<a class="footnotecall" href="#ftn11" id="bodyftn11">11</a>. Elle est in&eacute;luctable car l&rsquo;homme est entour&eacute; de techniques. De toute part, les machines sont devenues des partenaires du fait des interactions qu&rsquo;elles occasionnent, dirigeant et guidant des s&eacute;quences de vie et des pratiques jusqu&rsquo;&agrave; envahir le quotidien et d&eacute;terminer son organisation, voire le sens de tr&egrave;s nombreuses actions obligeant &agrave; des comportements adapt&eacute;s.</p> <p class="texte" dir="ltr">Si pr&eacute;c&eacute;demment, le sens &eacute;mergeait de l&rsquo;int&eacute;riorit&eacute; de la conscience et orientait l&rsquo;action selon des finalit&eacute;s qui donnent un sens &agrave; la vie, &agrave; la connaissance ou &agrave; l&rsquo;action politique&nbsp;; cette d&eacute;finition classique ne r&eacute;siste pas &agrave; ce renversement o&ugrave; la technique devient elle-m&ecirc;me une finalit&eacute; puisque sa performance propre devient le projet m&ecirc;me de la science et du politique. L&rsquo;objet exerce alors une fascination fatale au sens &eacute;manant pr&eacute;c&eacute;demment de l&rsquo;int&eacute;riorit&eacute;, au profit d&rsquo;un sens r&eacute;sultant de l&rsquo;injonction de cette ext&eacute;riorit&eacute;, soit la technique comme fin<a class="footnotecall" href="#ftn12" id="bodyftn12">12</a>. Or, ce renversement de la production du sens par l&rsquo;ext&eacute;riorit&eacute; induit une inversion du rapport de la technique &agrave; l&rsquo;humain. H&ouml;rl pr&eacute;cise que cette inversion d&eacute;finit alors en creux, la part psychologique r&eacute;siduelle d&rsquo;une conscience dont l&rsquo;existence est remise en cause alors que l&rsquo;homme pouvait imaginer l&rsquo;avoir en propre. Il convoque G&uuml;nther et son &oelig;uvre magistrale <span style="text-decoration:underline;">La conscience des machines, une m&eacute;taphysique de la cybern&eacute;tique</span> pour rappeler la d&eacute;mythologisation de la subjectivit&eacute; allant jusqu&rsquo;&agrave; promettre que la technique serait proth&egrave;se du corps puis proth&egrave;se de la pens&eacute;e<a class="footnotecall" href="#ftn13" id="bodyftn13">13</a>. La machine op&egrave;re-pense plus vite, commet moins d&rsquo;erreur, jusqu&rsquo;&agrave; pr&eacute;f&eacute;rer la laisser gouverner et commander des t&acirc;ches, des objets, des machines, des processus complexes, la ville, l&rsquo;Etat, l&rsquo;homme.</p> <p class="texte" dir="ltr">Et H&ouml;rl ne s&rsquo;arr&ecirc;te pas &agrave; cette description du pouvoir de l&rsquo;ext&eacute;riorit&eacute;. Il cherche &agrave; en percer l&rsquo;origine dans le processus m&ecirc;me de la pens&eacute;e o&ugrave; les antiques ont distingu&eacute; l&rsquo;<em>&eacute;pist&eacute;m&egrave;</em> de la <em>tekhn&egrave;</em> induisant la qu&ecirc;te des id&eacute;alit&eacute;s et l&rsquo;oubli de la vie concr&egrave;te par son recouvrement. La subtilit&eacute; de son article tient &agrave; son attention port&eacute;e &agrave; la pens&eacute;e qui s&rsquo;objective dans l&rsquo;&eacute;criture, soit cette ancestrale technique d&rsquo;objectivation qui peut dicter le pens&eacute;. L&rsquo;&eacute;criture est elle-m&ecirc;me un objet qui peut se substituer au monde en exer&ccedil;ant cette m&ecirc;me fascination, ce m&ecirc;me pouvoir r&eacute;cursif de l&rsquo;ext&eacute;riorit&eacute; sur l&rsquo;homme, ce dernier devenant le mot qu&rsquo;il &eacute;nonce plus que l&rsquo;&ecirc;tre qui le prononce, s&rsquo;identifiant au mot lu plus qu&rsquo;aux sens qu&rsquo;il en fait. Mais cela d&eacute;pendrait encore de lui, soit d&rsquo;un exercice ultime de soumission ou de lib&eacute;ration<a class="footnotecall" href="#ftn14" id="bodyftn14">14</a>.</p> <h2 dir="ltr" id="heading2" style="font-style:italic;">L&rsquo;ind&eacute;cidabilit&eacute; de la controverse</h2> <p class="texte" dir="ltr">Ce dernier aspect de l&rsquo;article d&rsquo;H&ouml;rl invite &agrave; admettre une ind&eacute;cidabilit&eacute; car le rapport &agrave; la technique ne se d&eacute;cr&egrave;te pas, il s&rsquo;exerce. La controverse traduirait en fait cette pratique de la libert&eacute; o&ugrave; chacun d&eacute;cide de se faire esclave de l&rsquo;objet technique, de s&rsquo;assujettir &agrave; ces injonctions ou de mettre l&rsquo;objet &agrave; sa place, de le cantonner &agrave; son service et d&rsquo;user des objets dont l&rsquo;&eacute;criture elle-m&ecirc;me sans s&rsquo;y perdre, parce qu&rsquo;elle est un v&eacute;hicule. Heidegger appelait d&eacute;j&agrave; de ses v&oelig;ux cette libert&eacute;, Habermas pr&eacute;serve et d&eacute;fend le monde v&eacute;cu se faisant l&rsquo;&eacute;l&egrave;ve d&rsquo;Husserl affirmant l&rsquo;ind&eacute;fectible valeur de la vie s&rsquo;&eacute;prouvant dans son quotidien. Il existe alors une controverse &agrave; propos de cette position de l&rsquo;homme face &agrave; la technique. G&uuml;nther &ndash; le philosophe de la cybern&eacute;tique &ndash; use du terme de polyvalence au sens d&rsquo;une vari&eacute;t&eacute; des positions entre l&rsquo;humain et la machine, actant que la seule distinction entre le sujet et l&rsquo;objet est incompl&egrave;te, puisqu&rsquo;elle omet la pluralit&eacute; de la subjectivit&eacute; qui adopte des positions ontologiques porteuses d&rsquo;un rapport anthropologique d&eacute;terminant la place relative conc&eacute;d&eacute;e &agrave; l&rsquo;objet. Plus que le monde v&eacute;cu, c&rsquo;est le choix du vivre le monde &agrave; sa fa&ccedil;on qui rend les rapports &agrave; la technique irr&eacute;ductibles et incommensurables. Alors que la technique devait faire abstraction du sujet et de la psychologie, ce dernier appara&icirc;t de nouveau et G&uuml;nther de consacrer un texte &agrave; <span style="text-decoration:underline;">Cognition et Volition</span><a class="footnotecall" href="#ftn15" id="bodyftn15">15</a>.</p> <p class="texte" dir="ltr">La controverse est bien jusque-l&agrave; ind&eacute;cidable ou du moins laisse-t-elle chacun se positionner, parce que la d&eacute;monstration dans les termes n&rsquo;est pas acquise, et le serait-elle, que l&rsquo;observation la d&eacute;mentirait aussit&ocirc;t pour une part. Les rapports &agrave; la technique tiennent donc &agrave; la mani&egrave;re dont chaque auteur se pense ou se r&ecirc;ve, imaginant l&rsquo;avenir selon des fins qui ont sa faveur. Cette pr&eacute;f&eacute;rence, voire cet imaginaire vaut certitude pour chacun sans s&rsquo;imposer en vertu d&rsquo;une pr&eacute;tention au statut de certitudes et de v&eacute;rit&eacute;s de science, aujourd&rsquo;hui r&eacute;volue. Il est temps de tirer enseignement de l&rsquo;av&egrave;nement d&rsquo;une &eacute;poque fa&icirc;tes d&rsquo;ind&eacute;cidables, car les r&eacute;volutions &eacute;pist&eacute;mologiques font passer le futur du singulier au pluriel.</p> <h2 dir="ltr" id="heading3" style="font-style:italic;">Les r&eacute;volutions &eacute;pist&eacute;mologiques en cours</h2> <p class="texte" dir="ltr">En effet, la place de la technique dans la soci&eacute;t&eacute; contemporaine tient &agrave; l&rsquo;insinuation des techniques dans le quotidien de chacun et dans la place grandissante des robots et des algorithmes dans l&rsquo;organisation cybern&eacute;tique des soci&eacute;t&eacute;s. Il faut rendre &agrave; Latour d&rsquo;avoir pressenti que les techniques allaient conqu&eacute;rir un statut social et juridique, l&rsquo;homme s&rsquo;accommodant de cette pr&eacute;sence qui l&rsquo;assiste et le contr&ocirc;le tout &agrave; la fois. Le pouvoir des robots d&eacute;crit par Latour constitue bien une r&eacute;volution dans l&rsquo;influence r&eacute;ciproque des hommes et des machines. Mais cette premi&egrave;re r&eacute;volution en cache une autre qui interroge la raison et une derni&egrave;re plus radicale qui questionne la mani&egrave;re de produire de la connaissance et des objets.</p> <p class="texte" dir="ltr">Latour &eacute;tudie les r&eacute;seaux dont les d&eacute;l&eacute;gations successives de l&rsquo;humain vers les machines. Il expose un mod&egrave;le d&rsquo;objets en relations dans un r&eacute;seau o&ugrave; s&rsquo;op&egrave;rent des traductions en vertu de controverses. Les relations primant sur les agents, les machines interagissent avec d&rsquo;autres machines et des humains, leur distinction n&rsquo;ayant l&agrave; plus beaucoup d&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t dans cette m&eacute;thode. L&rsquo;int&eacute;gration des humains et des machines dans ce syst&egrave;me commun revient &agrave; consid&eacute;rer l&rsquo;homme tel un objet, un instrument voire une fonction. Elle induit alors la confusion des genres, ce qu&rsquo;elle revendique, puisqu&rsquo;elle accorde une humanit&eacute; au robot et assimile l&rsquo;humain au monde des machines. Dans un tel r&eacute;seau, l&rsquo;humanisation des machines leur conf&egrave;rera des droits et des responsabilit&eacute;s. L&rsquo;actualit&eacute; justifie l&rsquo;hypoth&egrave;se de Latour lorsqu&rsquo;un &eacute;diteur de logiciel obtient r&eacute;cemment du l&eacute;gislateur am&eacute;ricain que l&rsquo;automobile command&eacute;e par son logiciel soit jug&eacute; responsable, soit <em>in fine</em> que la personne morale de l&rsquo;&eacute;diteur se substitue &agrave; chacun des conducteurs. En effet, la convention de Vienne de 1968 rend obligatoire la pr&eacute;sence d&rsquo;un humain pour piloter, or la National Highway Traffic Safety Administration vient de conc&eacute;der que l&rsquo;algorithme &eacute;tait un conducteur en vertu d&rsquo;une formule &eacute;difiante&nbsp;: &laquo;&nbsp;il est plus raisonnable d&rsquo;appeler &laquo;&nbsp;&thinsp;conducteur&thinsp;&nbsp;&raquo; ce qui conduit la voiture&nbsp;&raquo;.</p> <p class="texte" dir="ltr">Ce pilotage automatique s&rsquo;applique de t&acirc;ches &eacute;l&eacute;mentaires &agrave; des syst&egrave;mes complexes. L&rsquo;automate accomplit quelques t&acirc;ches rudimentaires, le robot en coordonne avec des capacit&eacute;s d&rsquo;adaptation, les syst&egrave;mes de pilotage commandent des machines et dirigent des v&eacute;hicules quand des ordinateurs d&eacute;cident, investissent, ach&egrave;tent et vendent sur les march&eacute;s financiers. R&eacute;cemment une entreprise de capital risque nommait un algorithme &agrave; son conseil d&rsquo;administration donnant raison aux utopies du sculpteur Nicolas Sch&ouml;ffer, pr&eacute;curseur de l&rsquo;art cybern&eacute;tique et des arts &eacute;lectroniques qui r&ecirc;vait d&rsquo;une ville gouvern&eacute;e par les ordinateurs dans son livre <span style="text-decoration:underline;">La ville cybern&eacute;tique</span><a class="footnotecall" href="#ftn16" id="bodyftn16">16</a>.</p> <p class="texte" dir="ltr">Mais la raison est-elle cette forme de production de propositions universelles plut&ocirc;t qu&rsquo;une discipline permettant l&rsquo;&eacute;nonc&eacute; d&rsquo;argumentations, voire un exercice critique de r&eacute;futation ou de n&eacute;gation&nbsp;? Le projet cybern&eacute;tique semble faire trop vite l&rsquo;&eacute;conomie de la pluralit&eacute; des repr&eacute;sentations alors que la fonction de la raison a fait l&rsquo;objet d&rsquo;une r&eacute;volution &eacute;pist&eacute;mologique modifiant le rapport au pens&eacute;. Le philosophe norv&eacute;gien Skirbekk, auteur d&rsquo;une histoire de la philosophie occidentale remarquable, &eacute;tudie la pratique de la raison en distinguant l&rsquo;universalit&eacute; d&rsquo;une intention de la raison de sa pluralit&eacute; concr&egrave;te dans un article original&nbsp;: <span style="text-decoration:underline;">Le d&eacute;bat sur la modernit&eacute;&nbsp;: la rationalit&eacute; &ndash; universelle et plurielle&nbsp;?</span> Il d&eacute;veloppe cette th&egrave;se d&rsquo;une raison en mouvement dont l&rsquo;entreprise est universelle<a class="footnotecall" href="#ftn17" id="bodyftn17">17</a>. Mais il rappelle que son expression est toujours inaboutie puisque situ&eacute;e dans les limites faillibles de ceux qui s&rsquo;expriment<a class="footnotecall" href="#ftn18" id="bodyftn18">18</a>. Adepte du m&eacute;liorisme, il con&ccedil;oit l&rsquo;aventure de la raison &agrave; la mani&egrave;re d&rsquo;une histoire ouverte et ind&eacute;cise dont les arguments successifs font progresser, du moins cheminer, sans jamais s&rsquo;imposer de mani&egrave;re d&eacute;finitive<a class="footnotecall" href="#ftn19" id="bodyftn19">19</a>. Le calcul ou la technique y sont des pratiques et des arguments qui &eacute;voluent, et dont l&rsquo;autorit&eacute; n&rsquo;a rien de d&eacute;finitif ou d&rsquo;universel.</p> <p class="texte" dir="ltr">Plus contestataire encore, Feyerabend interpelle la l&eacute;gitimit&eacute; de la science qui a perdu de sa superbe et de son exclusive autorit&eacute; depuis la crise des fondements et de l&rsquo;&eacute;chec de toute axiomatique auto-r&eacute;f&eacute;rente qui ferait de la science logique ou math&eacute;matique une v&eacute;rit&eacute; aussi certaine que pouvaient le pr&eacute;tendre la th&eacute;ologie rationnelle en son temps. L&rsquo;humanit&eacute; n&rsquo;aurait donc toujours pas entendu le grec nous disant&nbsp;; je sais que je ne sais rien. Feyerabend d&eacute;veloppe sa critique radicale dans <span style="text-decoration:underline;">Contre la m&eacute;thode</span> puis dans <span style="text-decoration:underline;">Adieu la raison</span> o&ugrave; il poursuit un raisonnement qui &eacute;branle les certitudes de la conscience occidentale, &agrave; ses yeux incapable de saisir la limite de la science. Feyerabend y voit la faillite de l&rsquo;Occident, aveugl&eacute; de ses certitudes, &agrave; la mani&egrave;re d&rsquo;une dogmatique ignor&eacute;e de ses adeptes, se soumettant &agrave; cette injonction factice d&rsquo;une science qui n&rsquo;en est pas<a class="footnotecall" href="#ftn20" id="bodyftn20">20</a>. La science exerce une fascination &agrave; la mani&egrave;re d&rsquo;un conte de f&eacute;e du fait des prodiges techniques qu&rsquo;elles proposent bien plus que pour les v&eacute;rit&eacute;s qu&rsquo;elles produits. Comment dans ce contexte d&rsquo;anarchisme &eacute;pist&eacute;mologique comprendre la promesse du projet cybern&eacute;tique&nbsp;?</p> <h2 dir="ltr" id="heading4" style="font-style:italic;">Les significations de la promesse cybern&eacute;tique</h2> <p class="texte" dir="ltr">D&egrave;s l&rsquo;&eacute;mergence du projet cybern&eacute;tique, une querelle opposa les d&eacute;fenseurs de la libert&eacute; humaine sentant la menace d&rsquo;une politique scientifique o&ugrave; la technique offrirait les instruments du contr&ocirc;le social dans le but de construire une soci&eacute;t&eacute; rationnelle quelque peu orwellienne aux promoteurs de la soci&eacute;t&eacute; cybern&eacute;tique. Deux personnalit&eacute;s s&rsquo;exprim&egrave;rent alors avec vigueur. Wiener, le fondateur de la cybern&eacute;tique r&eacute;pondit &agrave; ses d&eacute;tracteurs dans son ouvrage <span style="text-decoration:underline;">Cybern&eacute;tique et soci&eacute;t&eacute;</span>. Son principal critique &eacute;tait un dominicain, Dubarle auteur de <span style="text-decoration:underline;">Humanisme scientifique et raison chr&eacute;tienne&nbsp;</span>qui publia un article tr&egrave;s s&eacute;v&egrave;re dans Le Monde auquel Wiener jugea n&eacute;cessaire de r&eacute;pondre par son livre, au regard des arguments<a class="footnotecall" href="#ftn21" id="bodyftn21">21</a>.</p> <p class="texte" dir="ltr">Dubarle d&eacute;veloppe plusieurs critiques concernant les id&eacute;es scientifiques motiv&eacute;es par la domination des faits humains. Il d&eacute;crit les recherches de la cybern&eacute;tique et des th&eacute;oriciens de l&rsquo;information comme une tentative de math&eacute;matisation de ces faits humains. Il s&rsquo;interroge sur la relation de la science et du politique qui assouvissent ensemble un r&ecirc;ve de domination dans des termes tr&egrave;s proches de ceux ult&eacute;rieurs de Feyerabend, s&rsquo;&eacute;tonnant des relations de l&rsquo;Etat et de la Science<a class="footnotecall" href="#ftn22" id="bodyftn22">22</a>. Cette tentation l&rsquo;incite &agrave; l&rsquo;esp&eacute;rance dans une raison inspir&eacute;e quand Feyerabend plaidera plus tard pour une raison lib&eacute;r&eacute;e. Dubarle interpelle Wiener sur l&rsquo;intention du projet techniciste, sur sons sens politique et sur ses fins. La seule raison, folle du logis, ne serait pas bonne conseill&egrave;re pour gouverner les hommes, et la multiplication des techniques seraient comme autant d&rsquo;instruments de torture si l&rsquo;homme venait &agrave; les subir, chacune &eacute;tant construite pour dicter des comportements adapt&eacute;s, exiger leur ex&eacute;cution, soumettre &agrave; l&rsquo;usage que l&rsquo;ext&eacute;riorit&eacute; enjoindrait de faire pour obtenir quelques contrepartie, Dubarle rejoint Lukacs.</p> <p class="texte" dir="ltr">Or Wiener s&rsquo;efforce de r&eacute;duire la pol&eacute;mique et il adopte pour se d&eacute;fendre une position tr&egrave;s voisine de la neutralit&eacute; scientifique, renvoyant aux politiques la responsabilit&eacute; de l&rsquo;usage que ces derniers feront des machines qu&rsquo;il propose de d&eacute;velopper. Force est de constater qu&rsquo;il &eacute;vince l&rsquo;expression des causes de cette orientation technique et de cette foi en un pouvoir de la calculabilit&eacute;. L&rsquo;automatisation, la robotisation, l&rsquo;organisation cybern&eacute;tique de la ville voire de l&rsquo;Etat ou de la production des biens le conduisent &agrave; quelques avertissements &agrave; l&rsquo;attention des politiques<a class="footnotecall" href="#ftn23" id="bodyftn23">23</a>. La technique permettra d&rsquo;indiff&eacute;rencier et de massifier mais il faut s&rsquo;en pr&eacute;munir. Wiener reste optimiste et incite &agrave; la cr&eacute;ation, &agrave; la r&eacute;volution des sciences. Selon lui, la cybern&eacute;tique ruine les mod&egrave;les et les th&eacute;ories scientifiques ant&eacute;rieures dont la th&eacute;orie &eacute;conomique. Deux aspects de ses avertissements retiennent l&rsquo;attention. Ceux qui portent sur la transformation fondamentale de la soci&eacute;t&eacute; et des valeurs qui en fondent l&rsquo;organisation dont le travail. Ceux qui portent sur l&rsquo;occupation de l&rsquo;homme dans une soci&eacute;t&eacute; capable de r&eacute;pondre &agrave; la plupart de ses besoins<a class="footnotecall" href="#ftn24" id="bodyftn24">24</a>.</p> <p class="texte" dir="ltr">L&rsquo;enseignement majeur de ces rapports aux techniques et aux r&eacute;volutions &eacute;pist&eacute;mologiques tient &agrave; l&rsquo;invitation et aux avertissements de Wiener. Une autre &egrave;re est l&agrave;, mais il faut la penser car le cadre &eacute;pist&eacute;mologique des cinq derniers si&egrave;cles s&rsquo;est effondr&eacute;. Outre la science &eacute;conomique et ses concepts &eacute;branl&eacute;s et la science politique et ses pr&eacute;suppos&eacute;s des Lumi&egrave;res d&eacute;faits, c&rsquo;est la raison qui d&rsquo;univoque devient plurielle et ouverte, les rapports &agrave; la technique ouvrant d&rsquo;autres horizons. Alors, la science politique change de m&eacute;thode et endosse une psychologie du politique o&ugrave; ce dernier, homme politique et homme de science politique se d&eacute;tachent du r&egrave;gne des certitudes. La pluralit&eacute; ne se r&eacute;sorbe pas, elle s&rsquo;entretient et elle demeure.</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn1" id="ftn1">1</a> &nbsp;&laquo;&nbsp;Les sciences ont conserv&eacute; quelque chose de la philosophie,&nbsp;l&rsquo;illusion de la th&eacute;orie pure&hellip; &hellip; Dans la mesure o&ugrave; les sciences ne savent pas ce qu&rsquo;elles font, elles sont d&rsquo;autant plus certaines de leur discipline.&nbsp;&raquo; (p.158).</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn2" id="ftn2">2</a> &nbsp;&laquo;&nbsp;La loi qu&rsquo;on vient d&rsquo;&eacute;noncer d&eacute;signe un processus interne de la technique, c&rsquo;est quelque chose qui se produit sans que dans son ensemble l&rsquo;homme l&rsquo;ait voulu&nbsp;; au contraire, cette loi porte sur toute l&rsquo;histoire de la civilisation de humaine, pour ainsi dire derri&egrave;re son dos ou comme un instinct.&nbsp;&raquo; (p.13).</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn3" id="ftn3">3</a> &nbsp;&laquo;&nbsp;Des interventions au niveau de la transmission g&eacute;n&eacute;tique des informations h&eacute;r&eacute;ditaires pourraient permettre demain un contr&ocirc;le encore plus profond du comportement.&nbsp;&raquo; (p.66).</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn4" id="ftn4">4</a> &nbsp;&laquo;&nbsp;Cette nouvelle auto-ali&eacute;nation de l&rsquo;homme, qui est susceptible de lui &ocirc;ter sa propre identit&eacute; et l&rsquo;identit&eacute; d&rsquo;autrui&hellip;, c&rsquo;est le danger que le cr&eacute;ateur ne se perde dans son &oelig;uvre, le constructeur dans sa construction. L&rsquo;homme fr&eacute;mit &agrave; l&rsquo;id&eacute;e de se transcender int&eacute;gralement lui-m&ecirc;me dans l&rsquo;objectivit&eacute; qu&rsquo;il a lui-m&ecirc;me produite, dans un &ecirc;tre construit, et cependant il travaille sans cesse &agrave; faire avance ce processus d&rsquo;auto-objectivation scientifique.&nbsp;&raquo; (p.161).</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn5" id="ftn5">5</a> &nbsp;&laquo;&nbsp;Il ne s&rsquo;agit pas seulement du mode de travail enti&egrave;rement m&eacute;canis&eacute; et &laquo;&nbsp;vide d&rsquo;esprit&nbsp;&raquo; de la bureaucratie subalterne, qui est extraordinairement proche du simple service de la machine, qui le d&eacute;passe m&ecirc;me souvent en vacuit&eacute; et en monotonie. D&rsquo;une part, il s&rsquo;agit d&rsquo;une fa&ccedil;on de traiter les questions du point de vue objectif, qui devient de plus en plus fortement, formellement rationnelle, d&rsquo;un m&eacute;pris sans cesse croissant de l&rsquo;essence qualitative mat&eacute;rielle des &laquo;&nbsp;choses&nbsp;&raquo; auxquelles se rapporte la fa&ccedil;on bureaucratique de les traiter. Il s&rsquo;agit, d&rsquo;autre part, d&rsquo;une intensification encore plus monstrueuse de la sp&eacute;cialisation unilat&eacute;rale, et violant l&rsquo;essence humaine de l&rsquo;homme, dans la division du travail.&nbsp;&raquo; (p.103).</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn6" id="ftn6">6</a> &nbsp;&laquo;&nbsp;La rationalit&eacute; technologique ne met pas en cause la l&eacute;gitimit&eacute; de la domination, elle la d&eacute;fend plut&ocirc;t, et l&rsquo;horizon instrumentaliste de la raison s&rsquo;ouvre sur une soci&eacute;t&eacute; rationnellement totalitaire.&nbsp;&raquo; (p.181).</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn7" id="ftn7">7</a> &nbsp;&laquo;&nbsp;On consid&eacute;rait l&rsquo;&eacute;conomie comme un syst&egrave;me quasi naturel ob&eacute;issant &agrave; des lois aussi rigides que celles qui r&eacute;gissent le mouvement des plan&egrave;tes. Il fallut vaincre une r&eacute;sistance id&eacute;ologique consid&eacute;rable pour d&eacute;couvrir la nature sociale de l&rsquo;&eacute;change. Aujourd&rsquo;hui, il semble absurde que les soci&eacute;t&eacute;s modernes aient abandonn&eacute; la ma&icirc;trise de leur propre vie &eacute;conomique &agrave; cette seconde nature qu&rsquo;elles ont elles-m&ecirc;mes cr&eacute;&eacute;e. Cependant, s&rsquo;agissant de la technique, nous restons dans un asservissement volontaire &agrave; une seconde nature qui ne d&eacute;pend pourtant pas moins de l&rsquo;action humaine que l&rsquo;&eacute;conomie. L&rsquo;&eacute;mancipation du f&eacute;tichisme technologique suivra le m&ecirc;me cours que l&rsquo;&eacute;mancipation du f&eacute;tichisme &eacute;conomique.&nbsp;&raquo; (p.12).</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn8" id="ftn8">8</a> &nbsp;&laquo;&nbsp;Le d&eacute;terminisme pr&eacute;tend que les techniques ob&eacute;issent &agrave; une logique fonctionnelle autonome qui s&rsquo;explique sans r&eacute;f&eacute;rence &agrave; la soci&eacute;t&eacute;&hellip; &hellip; La technique ressemblerait ainsi &agrave; la science et aux math&eacute;matiques par son ind&eacute;pendance intrins&egrave;que vis-&agrave;-vis du monde social.&nbsp;&raquo; (p.48).</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn9" id="ftn9">9</a> &nbsp;&laquo;&nbsp;Le constructivisme affirme, et &agrave; juste titre je crois, que le choix entre les diff&eacute;rentes alternatives ne d&eacute;pend en fin de compte pas de l&rsquo;efficacit&eacute; technique ou &eacute;conomique, mais de la correspondance entre les objets et les int&eacute;r&ecirc;ts des divers groupes sociaux qui influencent le processus de conception. Ce qui caract&eacute;rise un artefact, c&rsquo;est son rapport &agrave; l&rsquo;environnement social et non pas une certaine propri&eacute;t&eacute; intrins&egrave;que.&nbsp;&raquo; (p.50).</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn10" id="ftn10">10</a> &nbsp;&laquo;&nbsp;&Agrave; cette culture du contr&ocirc;le correspond une inflation de la subjectivit&eacute; de celui qui exerce ce contr&ocirc;le, une d&eacute;g&eacute;n&eacute;ration narcissique de l&rsquo;humanit&eacute;. Cette techno-culture ne laisse rien intact.&nbsp;&raquo; (p.172).</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn11" id="ftn11">11</a> &nbsp;&laquo;&nbsp;Apr&egrave;s la premi&egrave;re culture du sens pr&eacute;-alphab&eacute;tique, et la deuxi&egrave;me culture du sens, alphab&eacute;tique, il s&rsquo;agit l&agrave; d&rsquo;une troisi&egrave;me culture du sens, post-alphab&eacute;tique et post-instrumentale, qui est la culture du sens de l&rsquo;&egrave;re technologique.&nbsp;&raquo; (65).</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn12" id="ftn12">12</a> &nbsp;&laquo;&nbsp;Ce sens qui auparavant &eacute;tait une production originelle de la subjectivit&eacute; constituante et d&rsquo;une transcendance immanente &agrave; la conscience, s&rsquo;est vu transform&eacute; lors du vaste tournant de l&rsquo;histoire des machines en un paradigme d&rsquo;ext&eacute;riorit&eacute; originelle.&nbsp;&raquo; (p.57).</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn13" id="ftn13">13</a> &nbsp;&laquo;&nbsp;Fichte &ndash; par d&eacute;duction &ndash; a prouv&eacute; le premier d&#39;une fa&ccedil;on convaincante que, si l&#39;on veut vraiment comprendre la conscience, on doit la comprendre comme une activit&eacute; de l&#39;homme. Il en r&eacute;sulte donc une exigence &eacute;vidente&nbsp;: si l&#39;homme veut comprendre sa propre conscience et son processus, il lui faut r&eacute;p&eacute;ter celle-ci sous forme d&#39;action, c&#39;est-&agrave;-dire sous forme d&#39;une m&eacute;thode de production dans le monde ext&eacute;rieur.&nbsp;&raquo; (p.223).</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn14" id="ftn14">14</a> &nbsp;&laquo;&nbsp;C&rsquo;est le lecteur qui permet d&rsquo;&eacute;viter la funeste m&eacute;tamorphose du sens dans laquelle le mouvement d&rsquo;id&eacute;alisation et le sens id&eacute;al se retrouvent toujours d&eacute;j&agrave; pris, car lui seul peut retransformer l&rsquo;&eacute;difice de sens inanim&eacute; que contient l&rsquo;&eacute;crit en le sens vivant de l&rsquo;&eacute;vidence qui y a &eacute;t&eacute; d&eacute;pos&eacute;, lui seul peut extraire le sens vivant de l&rsquo;&eacute;difice de sens inanim&eacute;.&nbsp;&raquo; (p.64).</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn15" id="ftn15">15</a> &nbsp;&laquo;&nbsp;Notre th&egrave;se sera&nbsp;: volont&eacute; et raison sont l&#39;expression d&#39;une seule et m&ecirc;me activit&eacute; de l&#39;esprit consid&eacute;r&eacute;e sous deux points de vue diff&eacute;rents. Ou &ndash; pour le dire diff&eacute;remment &ndash; volont&eacute; et raison ou r&eacute;flexion th&eacute;orique d&#39;un c&ocirc;t&eacute; et d&eacute;cision contingente de l&#39;autre ne sont que des manifestations r&eacute;ciproques d&#39;une seule et m&ecirc;me configuration ontologique, produites par le fait qu&#39;un syst&egrave;me vivant passe par des attitudes constamment changeantes envers son environnement. Il n&#39;y a pas de pens&eacute;e qui ne soit constamment support&eacute;e par une volont&eacute; de penser. Et il n&#39;y a pas d&#39;acte de volont&eacute; sans perception th&eacute;orique de quelque chose qui serve de motivation &agrave; la volont&eacute;.&nbsp;&raquo; (p.235).</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn16" id="ftn16">16</a> &nbsp;&laquo;&nbsp;Un processus irr&eacute;versible vient de se d&eacute;clencher, qui ne s&rsquo;arr&ecirc;tera pas en chemin&nbsp;: il suivra le d&eacute;roulement de plus en plus acc&eacute;l&eacute;r&eacute; du progr&egrave;s scientifique jusqu&rsquo;&agrave; ce qu&rsquo;il atteigne des r&eacute;sultats permettant d&rsquo;envisager des modifications, des mutations profondes de l&rsquo;homme et, par cons&eacute;quent, des structures des groupes sociaux eux-m&ecirc;mes.&nbsp;&raquo; (p.52).</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn17" id="ftn17">17</a> &nbsp;&laquo;&nbsp;La position d&eacute;fendue est une position tierce, entre les modernes universalistes et les postmodernes contextualistes, c&rsquo;est-&agrave;-dire une id&eacute;e de la raison discursive moderne comme valide et contraignante universellement, et situ&eacute;e de mani&egrave;re plurielle et contextuelle.&nbsp;&raquo; (p.27).</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn18" id="ftn18">18</a> &nbsp;&laquo;&nbsp;Ce caract&egrave;re situ&eacute;e est une part de notre faillibilit&eacute; et du fait que nous ne puissions voir le monde que selon un registre de perspectives assez restreint. Il ne faudrait pas le n&eacute;gliger.&nbsp;&raquo; (p.33).</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn19" id="ftn19">19</a> &nbsp;&laquo;&nbsp;Je suppose en quelque sorte que la raison, con&ccedil;ue pragmatiquement, est une et universellement contraignante, qu&#39;elle est commune &agrave; tous et in&eacute;vitable pour tous. Mais ses voies sont faillibles, et il y a pluralit&eacute; de perspectives et peu de synth&egrave;se, et toujours une attraction vers le meilleur, ou du moins une force qui nous pousse &agrave; &eacute;viter ce que l&#39;on peut montrer &ecirc;tre moins bien &eacute;tabli. En ce sens, notre raison commune et contraignante semble indiquer un &laquo;&nbsp;m&eacute;liorisme&nbsp;&raquo; dynamique, nourri par la &laquo;&nbsp;puissance du n&eacute;gatif&nbsp;&raquo;, le d&eacute;passement des faiblesses et des manques &eacute;pist&eacute;miques, plut&ocirc;t que par un id&eacute;al de la r&eacute;ponse finale unique.&nbsp;&raquo; (p.56).</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn20" id="ftn20">20</a> &nbsp;&laquo;&nbsp;L&rsquo;id&eacute;e que la science peut, et doit, &ecirc;tre organis&eacute;e selon des r&egrave;gles fixes et universelles est &agrave; la fois utopique et pernicieuse. Elle est utopique, car elle implique une conception trop simple des aptitudes de l&rsquo;homme et des circonstances qui encouragent, ou causent, leur d&eacute;veloppement.&nbsp;&raquo; (p.332).<br /> Nous conseillons au lecteur de se reporter &agrave; l&rsquo;article publi&eacute; dans le n&deg;&nbsp;28 de la revue intitul&eacute;&nbsp;: <span style="text-decoration:underline;">Paul Feyerabend o&ugrave; les chemins de la libert&eacute;.</span></p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn21" id="ftn21">21</a> &nbsp;&laquo;&nbsp;Dans le Monde du 28 d&eacute;cembre 1948, un dominicain, le P&egrave;re Dubarle, a &eacute;crit une critique fort p&eacute;n&eacute;trante de mon livre&nbsp;: &laquo;&nbsp;Dure le&ccedil;on des froides math&eacute;matiques, mais qui &eacute;claire de quelque mani&egrave;re l&rsquo;aventure de notre si&egrave;cle, h&eacute;sitant entre une turbulence ind&eacute;finie des affaires humaines et le surgissement d&rsquo;un prodigieux L&eacute;viathan politique.../ &hellip;Nous risquons aujourd&rsquo;hui une &eacute;norme cit&eacute; mondiale o&ugrave; l&rsquo;injustice primitive d&eacute;lib&eacute;r&eacute;e et consciente d&rsquo;elle-m&ecirc;me serait la seule condition possible d&rsquo;un bonheur statistique des masses, monde se rendant pire que l&rsquo;enfer &agrave; toute &acirc;me lucide. Il ne serait peut-&ecirc;tre pas mauvais que les &eacute;quipes pr&eacute;sentement cr&eacute;atrices de la cybern&eacute;tique adjoignent &agrave; leurs techniciens venus de tous les horizons de la science quelques anthropologues s&eacute;rieux et peut-&ecirc;tre un philosophe curieux de ces mati&egrave;res.&nbsp;&raquo;&nbsp;&raquo; (p.225-228).</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn22" id="ftn22">22</a> &nbsp;&laquo;&nbsp;La tentation sera d&egrave;s lors toujours plus grande de r&eacute;duire l&rsquo;homme &agrave; ces solutions efficacement rationnelles &hellip;/&hellip; Une soci&eacute;t&eacute; d&rsquo;hommes patiemment d&eacute;shumanis&eacute;s afin d&rsquo;en simplifier les probl&egrave;mes, une existence aux gestes m&eacute;thodiquement conditionn&eacute;s, un pouvoir de critique et de r&eacute;action savamment inhib&eacute;s ne sont pas choses absolument chim&eacute;riques et nous nous demandons si le monde moderne n&rsquo;offre pas comme des r&eacute;alisations sporadiques de cette d&eacute;gradation de l&rsquo;humain.&nbsp;&raquo; (p.121).</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn23" id="ftn23">23</a> &nbsp;&laquo;&nbsp;La domination de la machine pr&eacute;suppose une soci&eacute;t&eacute; aux derniers stades de l&rsquo;entropie croissante, o&ugrave; la probabilit&eacute; est n&eacute;gligeable et o&ugrave; les diff&eacute;rences statistiques entre individus sont nulles.&nbsp;&raquo; (p.229).</p> <p class="notebaspage" dir="ltr"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn24" id="ftn24">24</a> &nbsp;&laquo;&nbsp;Nombreux sont ceux ayant compris que les nouvelles modalit&eacute;s doivent &ecirc;tre utilis&eacute;es au b&eacute;n&eacute;fice de l&rsquo;homme, pour l&rsquo;accroissement de son loisir et l&rsquo;enrichissement de sa vie spirituelle, plut&ocirc;t qu&rsquo;en vue de purs profits et pour l&rsquo;adoration de la machine comme un nouveau veau d&rsquo;airain.&nbsp;&raquo; (p.203).</p> <p class="bibliographie" dir="ltr">Dubarle, Dominique, (1953), Humanisme scientifique et raison chr&eacute;tienne, Editions Descl&eacute;e de Brouwer</p> <p class="bibliographie" dir="ltr">Dubarle, Dominique, (1948), La manipulation m&eacute;canique des r&eacute;actions humaines cr&eacute;era-t-elle un jour le &laquo;&nbsp;meilleur des mondes&nbsp;&raquo;&nbsp;? (article du 28 d&eacute;cembre 1948, journal Le Monde)</p> <p class="bibliographie" dir="ltr">Ellul, Jacques, (1954), La technique ou l&rsquo;enjeu du si&egrave;cle, Edition Armand Colin</p> <p class="bibliographie" dir="ltr">Feenberg, Andrew, (2004), (Re) penser la technique, Editions la d&eacute;couverte</p> <p class="bibliographie" dir="ltr">Feyerabend, Paul, (1979), Contre la m&eacute;thode, Editions du Seuil</p> <p class="bibliographie" dir="ltr">G&uuml;nther, Gotthard, (2008), La conscience des machines, une m&eacute;taphysique de la cybern&eacute;tique, Editions l&rsquo;Harmattan</p> <p class="bibliographie" dir="ltr">Habermas, J&uuml;rgen, (1989), La technique et la science comme id&eacute;ologie, Editions Deno&euml;l</p> <p class="bibliographie" dir="ltr">H&ouml;rl, Erich, (2009), Du d&eacute;placement technologique du sens, Rue Descartes 2, n&deg;&nbsp;64, Coll&egrave;ge international de Philosophie</p> <p class="bibliographie" dir="ltr">Latour, Bruno, (1996), Petites le&ccedil;ons de sociologie des sciences, Edition la d&eacute;couverte</p> <p class="bibliographie" dir="ltr">Lukacs, Georg, (1960), Histoire et conscience de classe, Edition de Minuit</p> <p class="bibliographie" dir="ltr">Sch&ouml;ffer, Nicolas, (1972), La ville cybern&eacute;tique, Edition Deno&euml;l</p> <p class="bibliographie" dir="ltr">Skirbekk, Gunnar, (2003), Le d&eacute;bat sur la modernit&eacute;&nbsp;: la rationalit&eacute; &ndash; universelle et plurielle&nbsp;? Revue Noesis n&deg;&nbsp;5</p> <p class="bibliographie" dir="ltr">Wiener, Norbert, (1950) Cybern&eacute;tique et soci&eacute;t&eacute;, Union G&eacute;n&eacute;rale d&lsquo;Editions<a id="PictureBullets"></a><a id="bkmPictureBullets"></a></p>