<p class="texte"><strong>DOSSIER : POLITIQUE DE SANTE</strong></p> <p class="texte">&shy;</p> <p class="texte"><em>Alexis Ferrand, ancien professeur de sociologie &agrave; l&rsquo;universit&eacute; de Lille, il a men&eacute; des recherches sur les r&eacute;seaux de relations personnelles depuis le d&eacute;but des ann&eacute;es quatre-vingt, notamment sur leurs mani&egrave;res d&rsquo;encadrer les relations sexuelles. Il &eacute;tudie les effets cognitifs et normatifs des relations d&rsquo;une part sur les conduites de sant&eacute; et d&rsquo;autre part sur les opinions politiques. Il sugg&egrave;re que des appartenances multiples permettent d&rsquo;avoir deux opinions diff&eacute;rentes et sinc&egrave;res. Publications disponibles sur HALSHS.</em></p> <p class="texte"><strong>SOMMAIRE</strong></p> <p class="texte"><strong>Introduction</strong></p> <p><strong>L&rsquo;individu et son r&eacute;seau de relations&nbsp;: une vieille id&eacute;e</strong></p> <p><strong>Discuter pour comprendre la sant&eacute;, la maladie et les soins</strong></p> <p><strong>Quelles relations permettent des discussions sur la sant&eacute;&nbsp;?</strong></p> <p><strong>Ce que des discussions font aux repr&eacute;sentations</strong></p> <p><strong>De l&rsquo;influence au contr&ocirc;le relationnel</strong></p> <p><strong>Conclusion</strong></p> <p class="texte">&nbsp;</p> <h1 class="texte">Introduction</h1> <p class="texte">Il est banal de penser que &laquo;&nbsp;la sant&eacute;&nbsp;&raquo;, et notamment les in&eacute;galit&eacute;s de sant&eacute; entre des cat&eacute;gories sociales, soient des faits sociaux. Mais on peut attribuer deux significations tr&egrave;s diff&eacute;rentes &agrave; ce lieu commun. D&rsquo;un c&ocirc;t&eacute; on con&ccedil;oit une chaine causale&nbsp;: comportements des individus&nbsp;=&gt; facteurs de risques&nbsp;=&gt; fr&eacute;quence d&rsquo;une pathologie, et on s&rsquo;aper&ccedil;oit que ces comportements sont plus fr&eacute;quemment adopt&eacute;s par les membres de certaines cat&eacute;gories sociales. Donc les maladies, et inversement la sant&eacute;, pourraient avoir des origines sociales. Ce mod&egrave;le s&rsquo;apparente &agrave; l&rsquo;individualisme m&eacute;thodologique dans la mesure o&ugrave; les faits constat&eacute;s sur une cat&eacute;gorie de population r&eacute;sulteraient de l&rsquo;accumulation de comportements similaires des membres de cette cat&eacute;gorie. D&rsquo;un autre cot&eacute; on peut concevoir qu&rsquo;il existe des processus proprement collectifs, supra individuels, de production de la sant&eacute;. Ce mod&egrave;le explicatif collectif est n&eacute;cessaire parce que des constats empiriques montrent que le mod&egrave;le individualiste est insuffisant. Ce sont des &eacute;pid&eacute;miologistes qui l&rsquo;affirment&nbsp;: &laquo;&nbsp;<em>On verra&hellip;d&rsquo;autres exemples dans lesquels la prise en compte de facteurs de risque individuels (&laquo;&nbsp;ajustement&nbsp;&raquo;) ne modifie que tr&egrave;s marginalement les diff&eacute;rences sociales de sant&eacute;. Comme l&rsquo;a fait observer Rose dans les ann&eacute;es quatre-vingt, il est essentiel de faire la diff&eacute;rence entre &laquo;&nbsp;the causes of cases&nbsp;&raquo; (les facteurs expliquant la survenue de cas individuels) et &laquo;&nbsp;the causes of incidence&nbsp;&raquo; (les facteurs expliquant la distribution des cas dans les populations) (Rose, 1985).../... Devant la r&eacute;sistance des faits &agrave; expliquer les diff&eacute;rences sociales de sant&eacute; uniquement par la distribution in&eacute;quitable des facteurs de risque individuels (m&ecirc;me si une partie des diff&eacute;rences observ&eacute;es peut relever de tels facteurs), il est apparu qu&rsquo;il doit donc exister d&rsquo;autres m&eacute;canismes, qui rel&egrave;vent de ce qu&rsquo;il est convenu d&rsquo;appeler les &laquo;&nbsp;d&eacute;terminants sociaux de la sant&eacute;&nbsp;&raquo;, mieux &agrave; m&ecirc;me d&rsquo;expliquer les in&eacute;galit&eacute;s sociales de sant&eacute;.&nbsp;</em>&raquo; (Goldberg, 2002). En 2013, la traduction fran&ccedil;aise de l&rsquo;ouvrage de Wilkinson et Pickett (2010) a permis de d&eacute;couvrir que des caract&eacute;ristiques proprement collectives&nbsp;(une forte in&eacute;galit&eacute; socio-&eacute;conomiques, une faible participation associative des citoyens, une absence de confiance dans les rapports aux inconnus, etc.) accompagnent des fr&eacute;quences beaucoup plus fortes de probl&egrave;mes de sant&eacute;. Ils ont &eacute;tudi&eacute; ces effets collectifs &agrave; un niveau macro-social. Nous allons pr&eacute;senter quelques approches qui d&eacute;passent les facteurs individuels de sant&eacute;, mais &agrave; un niveau plus micro-social, celui des effets possibles des r&eacute;seaux de relations personnelles sur la sant&eacute;.</p> <p class="texte">On peut facilement envisager les diff&eacute;rents types de relations sociales et de r&eacute;seaux qui pourraient d&rsquo;une mani&egrave;re ou d&rsquo;une autre contribuer &agrave; la production sociale de la sant&eacute;. Ce domaine est immense&nbsp;: nous n&rsquo;allons pas le parcourir, nous allons nous limiter &agrave; deux cat&eacute;gories d&rsquo;effets&nbsp;: effets cognitifs (informations et repr&eacute;sentations), et les effets normatifs (production de normes et contr&ocirc;le social). Avant de les &eacute;voquer, nous pr&eacute;senterons rapidement comment l&rsquo;analyse des r&eacute;seaux de relations personnelles implique une nouvelle d&eacute;finition de &laquo;&nbsp;l&rsquo;individu&nbsp;&raquo;.</p> <h1 class="texte">L&rsquo;individu et son r&eacute;seau de relations&nbsp;: une vieille id&eacute;e</h1> <p class="texte">Ce qu&rsquo;on appelle aujourd&rsquo;hui &laquo;&nbsp;<em>r&eacute;seaux sociaux</em>&nbsp;&raquo; sont des dispositifs num&eacute;riques permettant des connections et des communications tr&egrave;s nombreuses &agrave; travers l&rsquo;&eacute;crit, l&rsquo;image, le son, mais pas la pr&eacute;sence. Dans cet article il sera plut&ocirc;t question de relations&nbsp;&ndash; que nous dirons &laquo;&nbsp;<em>interpersonnelles</em>&nbsp;&raquo;&nbsp;&ndash; entre des individus qui ont aussi l&rsquo;occasion de se rencontrer physiquement, de se voir bouger et sourire, de s&rsquo;offrir &agrave; boire ou de se f&acirc;cher. Chacun admettra volontiers qu&rsquo;il fr&eacute;quente un r&eacute;seau de personnes qui ont pour lui plus d&rsquo;importances que d&rsquo;autres&nbsp;: des membres de sa famille, des amis, un voisin, quelques coll&egrave;gues, etc. L&rsquo;existence de ce petit r&eacute;seau est &eacute;vidente. Curieusement, les enqu&ecirc;tes montrent qu&rsquo;il compte en moyenne entre quinze et vingt relations, que ce soit en France, au Canada ou aux Etats Unis (Grosseti, 2007). De plus certaines caract&eacute;ristiques sont propres &agrave; tels ou tels milieux sociaux. Ces r&eacute;seaux de relations personnelles pourraient donc avoir des types de relations et des organisations de ces relations qui seraient des &laquo;&nbsp;faits sociaux&nbsp;&raquo;. Alors que nous avons l&rsquo;impression de choisir librement nos relations, nous ne ferions que nous conformer &agrave; certaines contraintes sociales&nbsp;?</p> <p class="texte">Cette id&eacute;e un peu d&eacute;rangeante a &eacute;t&eacute; formul&eacute;e d&egrave;s les ann&eacute;es trente par Moreno qui observait de mani&egrave;re syst&eacute;matique des relations interpersonnelles. Il a d&eacute;couvert l&rsquo;existence de relations &laquo;&nbsp;<em>qui franchissent les limites des groupes</em>&nbsp;&raquo; de mani&egrave;re observable car elles d&eacute;pendraient &laquo;&nbsp;<em>de structures plus ou moins permanentes qui r&eacute;unissent les individus en de larges r&eacute;seaux</em>&nbsp;&raquo; (Moreno, 1934). Ses recherches l&rsquo;am&egrave;nent &agrave; formuler une seconde id&eacute;e encore plus d&eacute;rangeante consistant &agrave; consid&eacute;rer que &laquo;&nbsp;<em>l&rsquo;atome social</em>&nbsp;&raquo; ne serait pas l&rsquo;individu, mais l&rsquo;individu et les relations interpersonnelles d&rsquo;attirance et de rejet qui l&rsquo;enserrent et qui, en se connectant de proche en proche, forment des &laquo;&nbsp;<em>r&eacute;seaux sociom&eacute;triques</em>&nbsp;&raquo;. Ces deux id&eacute;es &ndash;&nbsp;les relations interpersonnelles sont organis&eacute;es et elles contribuent &agrave; d&eacute;finir ce qu&rsquo;est l&rsquo;individu&nbsp;&ndash; ont &eacute;t&eacute; reprises par un large courant de recherche particuli&egrave;rement actif depuis les ann&eacute;es dix-neuf cent soixante-dix. C&rsquo;est en puisant dans ces travaux que je souhaite sugg&eacute;rer que l&rsquo;individu &laquo;&nbsp;pense en relation&nbsp;&raquo; autant que dans son seul cerveau et qu&rsquo;il agit sous contr&ocirc;le relationnel autant que par volont&eacute; propre.</p> <h1 class="texte">Discuter pour comprendre la sant&eacute;, la maladie et les soins</h1> <p class="texte">De mani&egrave;re spontan&eacute;e on peut penser que des relations personnelles sont surtout des canaux de circulation de l&rsquo;information. Cette ligne de recherche a &eacute;t&eacute; largement d&eacute;velopp&eacute;e. On a notamment &eacute;tudi&eacute; quelles relations et quels types d&rsquo;organisation des relations entre elles permettaient d&rsquo;acc&eacute;der aux informations les plus pertinentes. Les fameux travaux de Marc Granovetter (1973, 1982) sugg&eacute;rant que ce sont des liens peu intimes et disjoints les uns des autres qui conduisent &agrave; des sources nouvelles d&rsquo;information ont eu une longue post&eacute;rit&eacute;. Pour les probl&egrave;mes de sant&eacute;, Bernice Pescosolido (1992, Canada) a montr&eacute; que les acteurs peuvent mobiliser des relations personnelles et des sources d&rsquo;information&nbsp;vari&eacute;es&nbsp;: &laquo;&nbsp;<em>En g&eacute;n&eacute;ral les gens&hellip; cherchent des conseils et de l&rsquo;aide de mani&egrave;re continue aupr&egrave;s d&rsquo;une grande vari&eacute;t&eacute; de personnes aussi bien des profanes que des professionnels ou des semi-professionnels, jusqu&rsquo;&agrave; ce que le probl&egrave;me soit r&eacute;solu ou bien les possibilit&eacute;s &eacute;puis&eacute;es</em>.&nbsp;&raquo;. Parmi l&rsquo;ensemble des sources auxquelles les gens font appel, les discussions avec des proches sont plus ou moins prioritaires, importantes et dignes de confiance. Ainsi une enqu&ecirc;te r&eacute;alis&eacute;e en Allemagne aupr&egrave;s d&rsquo;un &eacute;chantillon national repr&eacute;sentatif nous apprend que 36&nbsp;% des gens disposant d&rsquo;une connexion, ont utilis&eacute; internet au moins une fois au cours du dernier mois pour chercher des informations sur des questions de sant&eacute;. Puis les interview&eacute;s devaient <em>noter </em>(sur une &eacute;chelle allant de 1 &agrave; 5) <em>l&rsquo;importance </em>accord&eacute;e aux diff&eacute;rentes sources d&rsquo;information. Les chercheurs constatent alors qu&rsquo;internet est tr&egrave;s mal appr&eacute;ci&eacute; (avec une note de 2.86 sur 5), alors que les contacts avec des professionnels de sant&eacute; ont &eacute;t&eacute; class&eacute;s en t&ecirc;te (moyenne 4.28), suivis par la famille, les amis et coll&egrave;gues (3.57), les pharmacies (3.50), etc (Dumitru, 2007). Ainsi, quand on cherche &agrave; &eacute;valuer le r&ocirc;le particulier des proches parmi les autres sources d&rsquo;information sur la sant&eacute;, il faut clairement distinguer l&rsquo;importance que leur accordent les enqu&ecirc;t&eacute;s de la fr&eacute;quence avec laquelle ils les sollicitent.</p> <p class="texte">Les relations de discussion ne sont pas seulement des tuyaux dans lesquels circuleraient m&eacute;caniquement des contenus fig&eacute;s allant d&rsquo;une source vers un r&eacute;cepteur. Une fonction cognitive plus importante est en jeu&nbsp;: la discussion permet la construction d&rsquo;un nouveau contenu de pens&eacute;e, l&rsquo;&eacute;laboration d&rsquo;une conception profane ou d&rsquo;une repr&eacute;sentation particuli&egrave;re d&rsquo;un &eacute;tat de sant&eacute; et de ses conditions. Le courant sociologique intitul&eacute; &laquo;&nbsp;interactionnisme symbolique&nbsp;&raquo; a ainsi envisag&eacute; que des discussions, particuli&egrave;rement lorsque les partenaires sont en situation d&rsquo;incertitude, permettent l&rsquo;&eacute;laboration d&rsquo;une r&eacute;ponse nouvelles aux questions que se posent les partenaires.</p> <h2 class="texte">Quelles relations permettent des discussions sur la sant&eacute;&nbsp;?</h2> <p class="texte">Parler de la sant&eacute; en g&eacute;n&eacute;ral ne pose pas trop de probl&egrave;me. Par contre, pour l&rsquo;individu parler de sa sant&eacute; ou de sa maladie n&rsquo;est pas anodin. Ces questions rel&egrave;vent principalement de la sph&egrave;re priv&eacute;e et seules certaines relations sont habilit&eacute;es &agrave; recevoir des nouvelles ou des demandes de conseils. Et il peut &ecirc;tre d&eacute;licat de parler de son m&eacute;decin.</p> <p class="texte">Deux types de contraintes p&egrave;sent sur les choix des partenaires potentiels. D&rsquo;une part des normes sociales.&nbsp;Certaines maladies sont avouables, l&eacute;gitimes car r&eacute;sultant d&rsquo;un coup du sort, d&rsquo;autres sont honteuses car elles peuvent &ecirc;tre imput&eacute;es &agrave; des comportements coupables, des d&eacute;viances sexuelles, des addictions diverses, etc. Enfin certaines maladies sont terrifiantes et stigmatis&eacute;es. Corr&eacute;lativement, seules des relations comportant une norme puissante de confidentialit&eacute; et de confiance interpersonnelle peuvent entendre des propos qui sont couverts par le droit &agrave; la vie priv&eacute;e<sup><a class="footnotecall" href="#ftn1" id="bodyftn1">1</a></sup>. Une contrainte compl&eacute;mentaire r&eacute;sulte de la mani&egrave;re dont une relation est connect&eacute;e &agrave; d&rsquo;autres relations de l&rsquo;individu (ce que nous nommons la position de la relation dans la structure du r&eacute;seau personnel)&nbsp;: tel partenaire est-il lui-m&ecirc;me en contact avec d&rsquo;autres connaissances de l&rsquo;individu qui n&rsquo;ont pas &agrave; conna&icirc;tre ses difficult&eacute;s. Par exemple, il vaut mieux &ecirc;tre r&eacute;serv&eacute; vis-&agrave;-vis d&rsquo;un ami-coll&egrave;gue, alors qu&rsquo;un ami de jeunesse, isol&eacute; de toutes les autres relations ne risque pas des indiscr&eacute;tions dangereuses.</p> <p class="texte">On sait depuis tr&egrave;s longtemps que des relations personnelles diff&eacute;rentes sont mobilis&eacute;es par l&rsquo;individu pour l&rsquo;aider &agrave; r&eacute;pondre &agrave; des probl&egrave;mes de diff&eacute;rentes natures (Fischer, 1982&nbsp;; Wellman, 1989). Dans le domaine de la sant&eacute;, on a notamment constat&eacute; que seul un nombre tr&egrave;s limit&eacute; de relations sont mentionn&eacute;es par des enqu&ecirc;t&eacute;s. Beverly Wellman (2000) a interrog&eacute; 300 habitants de Toronto et d&eacute;couvert que les discussions sur sa propre sant&eacute; mobilisent 2 personnes alors que les discussions sur &laquo;&nbsp;<em>la sant&eacute; en g&eacute;n&eacute;ral</em>&nbsp;&raquo; mobilisent en moyenne 1,3 personnes. Et ces relations sont en partie sp&eacute;cifiques par rapport aux relations personnelles les plus proches qui permettent de parler &laquo;&nbsp;<em>des probl&egrave;mes importants pour vous</em>&nbsp;&raquo; (Perry &amp; Pescosolido, 2010).</p> <p class="texte">Une enqu&ecirc;te r&eacute;alis&eacute;e aupr&egrave;s de 500 habitants de deux villes des Hauts de France a voulu observer ces diff&eacute;rences (Ferrand, 2001). Au risque de lasser je mentionne la formulation des questions pour indiquer comment on observe des r&eacute;seaux personnels. On demandait ainsi&nbsp;:</p> <blockquote> <p class="quotation">&laquo;&nbsp;Il peut vous arriver de discuter de votre propre sant&eacute; avec des connaissances personnelles, famille, coll&egrave;gues, amis... Par exemple de discuter d&rsquo;une maladie que vous venez d&rsquo;avoir, de m&eacute;dicaments que vous prenez, ou d&rsquo;un r&eacute;gime que vous suivez avec des gens qui ne sont pas vos soignants.... Au cours des six derniers mois, vous est-il arriv&eacute; de discuter avec quelqu&rsquo;un de votre propre sant&eacute;&nbsp;?&nbsp;&raquo;</p> </blockquote> <p class="texte">L&rsquo;enqu&ecirc;teur ajoute &laquo;&nbsp;<em>Je vous demande de mettre sur cette feuille les initiales ou le pr&eacute;nom de chaque personne avec laquelle vous avez discut&eacute; de votre sant&eacute; pour qu&rsquo;on se souvienne bien par la suite de qui vous parlez.</em>&nbsp;&raquo; Il agira de m&ecirc;me pour les deux autres questions&nbsp;:</p> <blockquote> <p class="quotation">&laquo;&nbsp;Il peut aussi vous arriver de discuter d&rsquo;un m&eacute;decin, des traitements qu&rsquo;il prescrit ou des soins qu&rsquo;il donne... Au cours des six derniers mois, vous est-il arriv&eacute; de discuter avec quelqu&rsquo;un d&rsquo;un m&eacute;decin, des traitements qu&rsquo;il prescrit, de ses consultations&nbsp;?&nbsp;&raquo;<br /> &laquo;&nbsp;Enfin je vais vous demander s&rsquo;il vous arrive de discuter de maladies particuli&egrave;res&hellip; Au cours des six derniers mois, vous est-il arriv&eacute; de discuter avec quelqu&rsquo;un d&rsquo;une des trois maladies suivantes, 1) le cancer 2) les maladies cardiaques 3) la d&eacute;pression nerveuse&nbsp;?&nbsp;&raquo;</p> </blockquote> <p class="texte">Les nombres de personnes cit&eacute;es sont faibles&nbsp;: on discute de sa propre sant&eacute; avec 1.3 personnes, d&rsquo;un m&eacute;decin avec 0.7 personnes et des trois maladies avec 0.8 personnes. Plus d&rsquo;un-e enqu&ecirc;t&eacute;-e sur deux ne parle &agrave; personne de son m&eacute;decin, alors que ces m&ecirc;mes enqu&ecirc;t&eacute;s ont d&eacute;clar&eacute; un nombre respectable de parents (6) et d&rsquo;amis (9). Les relations de parent&eacute; repr&eacute;sentent 53,5&nbsp;% des relations de discussion qui ont &eacute;t&eacute; cit&eacute;es, et les relations amicales 30&nbsp;%. Comment expliquer ces choix&nbsp;? On a pu montrer que &laquo;&nbsp;<em>S&rsquo;il y a plus de confidents-parents ce n&rsquo;est pas parce qu&rsquo;il y a plus de parents disponibles dans le r&eacute;seau mais parce que la parent&eacute; est normativement mobilisable&hellip;. tous les parents peuvent devenir parents-confidents. A l&rsquo;inverse seuls certains amis peuvent devenir amis-confidents.&nbsp;&raquo;</em>. L&rsquo;existence de deux types de contraintes diff&eacute;rentes &ndash;&nbsp;normatives et structurales&nbsp;&ndash; qui conditionneraient l&rsquo;appel &agrave; tel partenaire plut&ocirc;t qu&rsquo;&agrave; tel autre peuvent interagir de mani&egrave;res vari&eacute;es&nbsp;: le choix de la parent&eacute; est sans doute surtout normatif, mais celui d&rsquo;un ami peut impliquer aussi sa position dans le r&eacute;seau personnel de l&rsquo;individu.</p> <h2 class="texte">Ce que des discussions font aux repr&eacute;sentations</h2> <p class="texte">Ce faible nombre de partenaires entra&icirc;ne-t-il une faible influence de ces relations&nbsp;? Il ne semble pas. On a pu illustrer la fonction cognitive de ces discussions en demandant d&rsquo;&eacute;valuer l&rsquo;offre de soin locale en r&eacute;ponse aux trois pathologies typiques (cancer, probl&egrave;mes cardiaques, d&eacute;pressions nerveuses). Pour l&rsquo;habitant, juger l&rsquo;offre de soin n&rsquo;est pas facile &agrave; cause d&rsquo;une incertitude sur les crit&egrave;res &agrave; adopter et d&rsquo;un sentiment d&rsquo;incomp&eacute;tence ou d&rsquo;ill&eacute;gitimit&eacute; pour faire une telle &eacute;valuation. Or, on a constat&eacute; qu&rsquo;avoir cit&eacute; <em>deux</em> partenaires de discussion diminue massivement la proportion de ceux qui sont incapables de se prononcer (sans qu&rsquo;on puisse imputer cette capacit&eacute; &agrave; un effet d&rsquo;appartenance sociale). Les discussions contribuent donc &agrave; la formation d&rsquo;une opinion, vraisemblablement partag&eacute;e entre les trois interlocuteurs.</p> <p class="texte">Le proverbe dit &laquo;&nbsp;il n&rsquo;est pire sourd que celui qui ne veut pas entendre&nbsp;&raquo;, et une id&eacute;e courante lui fait &eacute;cho&nbsp;: les gens discuteraient principalement ou exclusivement avec des personnes qui partagent les m&ecirc;mes opinions, les m&ecirc;mes visions du monde. De sorte que ces interactions consensuelles ne pourraient produire que le renforcement d&rsquo;id&eacute;es d&eacute;j&agrave; admises et jamais d&rsquo;innovation ou de changement. Quand on y regarde de pr&egrave;s, cette cl&ocirc;ture relationnelle n&rsquo;est pas &eacute;vidente.</p> <p class="texte">Alexandra Thierry a pu constituer un &eacute;chantillon m&eacute;dicalement homog&egrave;ne de 100 patientes soign&eacute;es pour un cancer du sein, en d&eacute;but de traitement, au Centre anticanc&eacute;reux de Lille. Je ne retiendrai qu&rsquo;un des r&eacute;sultats int&eacute;ressants de cette recherche (Thierry, 2007). Ces patientes ont &eacute;t&eacute; interrog&eacute;es sur les personnes avec lesquelles elles ont pu parler de leur maladie et sur les contenus des conversations dont elles se souvenaient. Elles ont ainsi &eacute;voqu&eacute; une dizaine de th&egrave;mes qui se combinent en quatre grands types&nbsp;: 1) des paroles tr&egrave;s positives sur les perspectives de gu&eacute;rison et les traitements&nbsp;: <em>&laquo;&nbsp;L&rsquo;optimisme argument&eacute;&nbsp;&raquo;</em>&nbsp;; 2) des opinions qui soulignent de mani&egrave;re moins cat&eacute;gorique les chances de gu&eacute;rison mais qui n&rsquo;en demeurent pas moins encourageantes&nbsp;: <em>&laquo;&nbsp;L&rsquo;optimisme nuanc&eacute;&nbsp;&raquo;</em>&nbsp;; 3) des positions tr&egrave;s n&eacute;gatives et plut&ocirc;t fatalistes&nbsp;: <em>&laquo;&nbsp;Le pessimisme&nbsp;&raquo;</em>&nbsp;; 4) enfin des opinions ambivalentes qui ne se positionnent pas clairement sur les perspectives de gu&eacute;rison&nbsp;: <em>&laquo;&nbsp;Le doute</em>&nbsp;&raquo;. Les patientes entendent des contenus tr&egrave;s vari&eacute;s, &agrave; travers des propos qui ont des statuts &eacute;galement vari&eacute;s&nbsp;: des exp&eacute;riences des personnes proches (ou de proches de proches), des croyances, des peurs, des informations m&eacute;diatiques, des &laquo;&nbsp;v&eacute;rit&eacute;s scientifiques&nbsp;&raquo; etc. Il y a donc de vraies paroles qui d&eacute;bordent largement le cadre &eacute;troit des politesses compassionnelles et le respect du tabou sur un pronostic vital incertain. Ce ne sont pas des banalit&eacute;s. De plus, pour une m&ecirc;me patiente, ces paroles ne sont pas homog&egrave;nes. Seule neuf enqu&ecirc;t&eacute;es ont mentionn&eacute; des discussions appartenant toutes au m&ecirc;me type, chacune des autres a cit&eacute; des discussions de diff&eacute;rents types. C&rsquo;est dire que ces patientes sont en quelque sorte au centre d&rsquo;une controverse potentielle, et que, dans ces conversations priv&eacute;es, sont d&eacute;finies et red&eacute;finies en permanence des contenus cognitifs qui, pour certains interlocuteurs, deviennent des savoirs et des opinions partag&eacute;s.</p> <p class="texte">Le fait qu&rsquo;un individu ait des partenaires de discussion qui professent des opinions diff&eacute;rentes peut le mettre dans l&rsquo;embarras s&rsquo;il doit se former son propre jugement &agrave; partir de ces informations et de ces positions dissonantes. Le plus souvent il se ralliera &agrave; l&rsquo;un des points de vue. Mais au lieu de tendre vers une pens&eacute;e unique et unifi&eacute;e, l&rsquo;individu peut endosser deux opinions diff&eacute;rentes &agrave; la condition qu&rsquo;elles soient soutenues par deux partenaires de discussion qui appartiennent &agrave; des contextes de sociabilit&eacute; s&eacute;par&eacute;s et n&rsquo;interagissent pas entre eux (Ferrand, 2011).</p> <p class="texte">Cette hypoth&egrave;se a &eacute;t&eacute; examin&eacute;e par Sophie Taz&eacute; dont la recherche a d&ucirc; adopter une m&eacute;thodologie originale (Taz&eacute;, 2008). Des &eacute;tudiants ont &eacute;t&eacute; invit&eacute;s &agrave; r&eacute;pondre &agrave; un questionnaire en m&ecirc;me temps qu&rsquo;un ami qu&rsquo;ils choisissaient librement. Puis, quinze jours plus tard, ils &eacute;taient invit&eacute;s &agrave; documenter le m&ecirc;me questionnaire, mais avec &laquo;&nbsp;<em>la personne de votre entourage qui vous semble la plus diff&eacute;rente de l&rsquo;ami(e) avec le(la)quel(le) vous avez r&eacute;pondu la premi&egrave;re fois</em>&nbsp;&raquo;. Face &agrave; face, l&rsquo;&eacute;tudiant et l&rsquo;ami (puis la personne choisie) pouvaient voir les r&eacute;ponses de l&rsquo;autre. Dans un cas sur deux ils en ont discut&eacute;, et on peut penser qu&rsquo;ils en ont tenu compte plus ou moins. Il &eacute;tait ainsi possible d&rsquo;observer dans quelle mesure l&rsquo;&eacute;tudiant qui sollicitait des proches allait modifier ses positions entre les deux discussions. Il y avait 16 positions relatives au SIDA qui, dans une p&eacute;riode marqu&eacute;e par l&rsquo;efficacit&eacute; des trith&eacute;rapies et par un affaiblissement des pratiques pr&eacute;ventives, restait un objet entour&eacute; d&rsquo;un vaste halo d&rsquo;incertitudes sur ce qu&rsquo;il convenait d&rsquo;en penser et ce qu&rsquo;il convenait de faire.</p> <p class="texte">Un des r&eacute;sultats importants est qu&rsquo;un enqu&ecirc;t&eacute; sur deux a modifi&eacute; ses r&eacute;ponses sur au moins trois items (le plus souvent sur trois &agrave; cinq items) entre les deux passations interactives du questionnaire. Les opinions endoss&eacute;es, et transcrites comme opinions personnelles, peuvent donc varier selon les deux contextes d&rsquo;interaction. De plus, elle montre que 7 &eacute;tudiants sur 10 changent ainsi d&rsquo;avis lorsqu&rsquo;ils ont pass&eacute; le questionnaire avec des partenaires qui n&rsquo;appartiennent pas au m&ecirc;me groupe, alors que 4 sur 10 changent d&rsquo;avis si les partenaires appartiennent au m&ecirc;me groupe. C&rsquo;est &agrave; dire qu&rsquo;il serait d&rsquo;autant plus fr&eacute;quent, donc facile, d&rsquo;endosser des opinions diff&eacute;rentes s&rsquo;il s&rsquo;agit de les formuler face &agrave; deux partenaires dont on suppose qu&rsquo;ils n&rsquo;ont pas d&rsquo;occasion de se rencontrer.</p> <p class="texte">Ainsi, lorsque l&rsquo;individu s&rsquo;interroge sur des questions de sant&eacute;, cherche &agrave; comprendre, &agrave; savoir, &agrave; se faire une opinion, on ne peut le concevoir ni comme un cogito solipsiste &eacute;valuant rationnellement les informations qui lui parviennent, ni comme le membre d&rsquo;un cadre social unique dont il refl&eacute;terait passivement les id&eacute;es communes. Les individus appartiennent simultan&eacute;ment &agrave; des cadres sociaux vari&eacute;s, porteurs de savoirs h&eacute;t&eacute;rog&egrave;nes et de visions du monde diff&eacute;rentes les unes des autres. Et les interactions entre les individus ne se r&eacute;duisent pas &agrave; des transferts d&rsquo;information, elles op&egrave;rent un travail cognitif de re-production ou production des savoirs et des repr&eacute;sentations.</p> <h1 class="texte">De l&rsquo;influence au contr&ocirc;le relationnel</h1> <p class="texte">Lorsqu&rsquo;un jeune prend des risques pour sa sant&eacute; on en imputera volontiers la raison &agrave; de mauvaises fr&eacute;quentations, c&rsquo;est-&agrave;-dire &agrave; l&rsquo;influence n&eacute;faste de ses relations. Un grand nombre de travaux ont tent&eacute; de montrer comment des relations personnelles peuvent &laquo;&nbsp;influencer&nbsp;&raquo; l&rsquo;individu et l&rsquo;amener &agrave; adopter un comportement n&eacute;faste, ou, au contraire, &agrave; adopter une conduite b&eacute;n&eacute;fique. Les mod&egrave;les th&eacute;oriques propos&eacute;s dans ces travaux pour expliquer comment fonctionne l&rsquo;influence sont aussi tr&egrave;s vari&eacute;s. Les plus pertinents semblent bien &ecirc;tre ceux qui con&ccedil;oivent l&rsquo;influence comme un processus complexe et h&eacute;t&eacute;rog&egrave;ne, comportant des &eacute;tapes qui mobilisent chacune des ressources et des relations diff&eacute;rentes (connaissance, persuasion, d&eacute;cision, r&eacute;invention, confirmation&nbsp;: Valente, 1995). Par exemple, &agrave; propos des r&eacute;ponses au risque de transmission du sida, Catania et ses coll&egrave;gues (1990) ont sugg&eacute;r&eacute; l&rsquo;existence de trois &eacute;tapes au cours desquelles les relations produisent des effets distincts&nbsp;: apr&egrave;s avoir re&ccedil;u des informations, apr&egrave;s avoir pu penser qu&rsquo;elles le concernent bien, l&rsquo;individu doit prendre &laquo;&nbsp;<em>la d&eacute;cision de changer</em>&nbsp;&raquo;, et, &agrave; ce moment, &laquo;&nbsp;<em>des facteurs sociaux comme le soutien social et les normes d&rsquo;un groupe de r&eacute;f&eacute;rence peuvent aussi avoir une influence consid&eacute;rable sur l&rsquo;&eacute;valuation des co&ucirc;ts et avantages et sur la croyance en sa propre capacit&eacute; de changer</em>&nbsp;&raquo;. Sur la balance co&ucirc;ts-avantages, on peut penser que le plateau des co&ucirc;ts serait exclusivement charg&eacute; des risques sanitaires li&eacute;s au Sida. Ce serait une vision r&eacute;ductrice et il faut y ajouter &eacute;videmment les handicaps r&eacute;sultant de la stigmatisation sociale g&eacute;n&eacute;rale li&eacute;e &agrave; cette maladie, mais surtout la r&eacute;probation sp&eacute;cifique de son &laquo;&nbsp;<em>groupe de r&eacute;f&eacute;rence</em>&nbsp;&raquo; pour n&rsquo;avoir pas respect&eacute; ses normes de pr&eacute;caution face &agrave; la transmission. Ainsi, une des composantes de l&rsquo;influence est la r&eacute;probation par le groupe, c&rsquo;est-&agrave;-dire une &laquo;&nbsp;sanction sociale&nbsp;n&eacute;gative&nbsp;&raquo;, dont la face positive pourrait, &agrave; l&rsquo;inverse, comporter des encouragements, des marques de sympathie et de camaraderie qui sont des formes du &laquo;&nbsp;soutien social&nbsp;&raquo;. L&rsquo;id&eacute;e importante est que des relations peuvent exercer, selon les cas, des sanctions positives ou des sanctions n&eacute;gatives.</p> <p class="texte">Un nouveau cadre d&rsquo;analyse peut alors &ecirc;tre envisag&eacute;&nbsp;: celui du <em>contr&ocirc;le social</em>, qui, dans les cas qui nous int&eacute;ressent ici, prend la forme du contr&ocirc;le par un r&eacute;seau de relations. L&rsquo;avantage de ce cadre th&eacute;orique est de rendre compatibles la prise en compte des propri&eacute;t&eacute;s collectives d&rsquo;un contexte social ou d&rsquo;un r&eacute;seau (capables, ou non, de sanctionner ou d&rsquo;encourager un comportement), et les &eacute;valuations plus ou moins rationnelles des individus (qui anticipent les sanctions n&eacute;gatives et positives de ce r&eacute;seau). Cependant une difficult&eacute; apparait&nbsp;: on doit consid&eacute;rer &agrave; la fois les normes propres &agrave; un cadre social et les relations interpersonnelles qui vont les renforcer plus ou moins. Andr&eacute;e Demers et ses coll&egrave;gues (2002) ont ainsi montr&eacute; que les normes propres &agrave; certains contextes ont plus d&rsquo;effet sur la mani&egrave;re de boire des jeunes alors que, dans d&rsquo;autres contextes, ce sont les relations interpersonnelles qui influencent le plus.</p> <p class="texte">Une autre difficult&eacute; est que des enqu&ecirc;tes qui observent &agrave; moment donn&eacute; la similitude de comportements d&rsquo;individus en relation les uns avec les autres ne peuvent d&eacute;duire que cette similitude serait un effet de leurs relations. Certes, on peut supposer que des individus ont &eacute;t&eacute; pouss&eacute;s &agrave; adopter ce comportement similaire parce qu&rsquo;ils &eacute;taient en relation, ce qui indiquerait un processus &laquo;&nbsp;d&rsquo;influence&nbsp;&raquo;, mais on peut aussi penser que ces individus ont pu se choisir les uns les autres et entrer en relation parce qu&rsquo;ils avaient d&eacute;j&agrave; adopt&eacute; le m&ecirc;me comportement que l&rsquo;autre, selon le principe &laquo;&nbsp;d&rsquo;homophilie&nbsp;&raquo; bien illustr&eacute; par le proverbe &laquo;&nbsp;Qui se ressemble s&rsquo;assemble&nbsp;&raquo;. Or des enqu&ecirc;tes instantan&eacute;es ne peuvent d&eacute;partager formellement ces deux hypoth&egrave;ses&nbsp;: il faut disposer &agrave; la fois de donn&eacute;es diachroniques, donc r&eacute;interroger les m&ecirc;mes individus, et de logiciels permettant une mod&eacute;lisation statistique de ces deux processus (Snijders, 2017). Ces conditions tr&egrave;s exigeantes expliquent pourquoi la majorit&eacute; des analyses empiriques de l&rsquo;influence sont men&eacute;es par des psycho-sociologues utilisant des exp&eacute;riences de laboratoires rassemblant des &eacute;tudiants. Concernant les pratiques li&eacute;es &agrave; la sant&eacute; cependant quelques panels existent. Ainsi 126 jeunes &eacute;l&egrave;ves (13 ans) ont &eacute;t&eacute; suivis entre 1995 et 1997 dans une &eacute;cole &eacute;cossaise. L&rsquo;analyse de ces donn&eacute;es propose des r&eacute;sultats d&eacute;taill&eacute;s sur les processus qui articulent les changements dans les usages du tabac, de l&rsquo;alcool, du cannabis, et les changements dans les relations (Pearson, 2006). Les r&eacute;sultats sont surprenants car ils indiquent que ces processus sont distincts selon les addictions. Le choix pr&eacute;f&eacute;rentiel pour un ami ayant un comportement semblable (homophilie) fonctionne fortement pour l&rsquo;usage d&rsquo;alcool, et l&rsquo;influence relationnelle, donc le fait qu&rsquo;un individu adopte le m&ecirc;me comportement que celui d&rsquo;un autre avec lequel il &eacute;tait auparavant en relation, fonctionne pour le cannabis et aussi pour l&rsquo;alcool, mais pas du tout pour le tabagisme. Les auteurs n&rsquo;approfondissent pas les explications th&eacute;oriques qui pourraient &ecirc;tre donn&eacute;es &agrave; ces variations, mais en d&eacute;duisent des recommandations dont certaines consisteraient, dans une campagne de pr&eacute;vention, &agrave; cibler des relations plut&ocirc;t que des individus. Seule une analyse diachronique, qui permet d&rsquo;identifier le&nbsp;<em>modus operandi</em> de l&rsquo;influence, permet ainsi de sugg&eacute;rer comment un changement relationnel peut modifier un comportement de sant&eacute;. Nous &eacute;voquerons ce point en conclusion.</p> <p class="texte">Enfin, une approche en termes de contr&ocirc;le social positif et n&eacute;gatif devrait d&eacute;finir comment une norme &eacute;merge dans un r&eacute;seau et est appliqu&eacute;e. Cette question est souvent contourn&eacute;e d&rsquo;une mani&egrave;re commode en postulant que c&rsquo;est parce que les membres appartiennent &agrave; telle cat&eacute;gorie sociale ou &agrave; telle organisation englobante qu&rsquo;ils respectent une norme. Il est plus pertinent de penser que le contr&ocirc;le relationnel des comportements suppose certaines conditions dans l&rsquo;organisation des relations entre elles, dans leurs formes d&rsquo;interd&eacute;pendance. Notamment, on peut faire l&rsquo;hypoth&egrave;se que ce contr&ocirc;le ne tend &agrave; exister que si le comportement d&rsquo;un individu peut affecter les int&eacute;r&ecirc;ts des gens avec lesquels il en relation proche, ou indirectement comme dans un groupe. Un exemple assez &eacute;vident est celui des risques sanitaires qui r&eacute;sultent de pathologies transmissibles comme le sida&nbsp;: dans un r&eacute;seau d&rsquo;interconnaissance o&ugrave; se nouent et se d&eacute;nouent des relations sexuelles, tout le monde a int&eacute;r&ecirc;t &agrave; ce que chacun se conduise bien<sup><a class="footnotecall" href="#ftn2" id="bodyftn2">2</a></sup>. Le contr&ocirc;le suppose &eacute;videmment que les comportements imprudents soient connus (&agrave; travers quelle relation&nbsp;?) et que cette information puisse circuler entre les membres du r&eacute;seau (&agrave; travers quels enchainements de relations&nbsp;?) si elle implique une r&eacute;probation collective<sup><a class="footnotecall" href="#ftn3" id="bodyftn3">3</a></sup>. Mais la sanction peut aussi venir d&rsquo;un proche particulier du fautif et il faut alors que d&rsquo;autres membres du r&eacute;seau concern&eacute;s par cette intervention soutiennent celui qui va endosser la charge, parfois lourde (par exemple se f&acirc;cher avec un ami), de sanctionner (Ferrand Snijders, 1997). Le contr&ocirc;le relationnel n&rsquo;a donc pas seulement pour fonction de d&eacute;courager ceux qui seraient pr&ecirc;ts &agrave; faire passer leur int&eacute;r&ecirc;t personnel avant le bien commun (&laquo;&nbsp;<em>celui qui joue cavalier seul&nbsp;</em>&raquo;), il suppose aussi que les gardiens des normes soient r&eacute;compens&eacute;s par le r&eacute;seau (ce qu&rsquo;on appelle &laquo;&nbsp;<em>le probl&egrave;me du bien commun d&rsquo;ordre deux</em>&nbsp;&raquo;).</p> <h1 class="texte">Conclusion</h1> <p class="texte">Cet article n&rsquo;a &eacute;videmment pas envisag&eacute; toutes les analyses qui concernent les effets des r&eacute;seaux sur la sant&eacute;. Nous n&rsquo;avons pas &eacute;voqu&eacute; les usages d&rsquo;internet &ndash;&nbsp;qui sont tr&egrave;s divers (Convert &amp; Demailly, 2003)&nbsp;&ndash; par diff&eacute;rentes populations pour acqu&eacute;rir des informations sur les maladies, les soins, les praticiens, ni la possibilit&eacute; que certains de ces usages puissent cr&eacute;er des &laquo;&nbsp;<em>communaut&eacute;s &eacute;pist&eacute;miques&nbsp;</em>&raquo; (Akrich, 2010), favoriser l&rsquo;&eacute;mergence de savoirs partag&eacute;s. C&rsquo;est un domaine important, m&ecirc;me si internet n&rsquo;est jamais la seule source d&rsquo;information, ou de mise en relation des individus. Une recherche originale a ainsi pu &eacute;tudier comment des personnes ayant des troubles alimentaires combinent des relations majoritairement face &agrave; face et un petit nombre de contacts via internet, et mobilisent pr&eacute;f&eacute;rentiellement certains d&rsquo;entre eux pour r&eacute;pondre &agrave; diff&eacute;rents soucis (Tubaro, 2014, Casilli, 2016). De plus il faudrait mentionner tous les travaux qui, depuis longtemps (Cresson, 1991) &eacute;tudient comment des relations apportent des aides pratiques quotidiennes, souvent lourdes, et des soins qui, pour &ecirc;tre d&eacute;finis comme &laquo;&nbsp;profanes&nbsp;&raquo;, n&rsquo;en sont pas moins de plus en plus sp&eacute;cialis&eacute;s et presque professionnalis&eacute;s (Giraud &amp; Al. 2019). Une question moins explor&eacute;e, &eacute;voqu&eacute;e d&egrave;s 1960 par Eliott Freidson, concerne la mani&egrave;re dont des r&eacute;seaux de relations contribuent au jugement d&rsquo;un patient qui &laquo;&nbsp;<em>peut &eacute;changer ses impressions avec d&rsquo;autres&hellip; et utilise la structure r&eacute;f&eacute;rentielle</em><sup><em><a class="footnotecall" href="#ftn4" id="bodyftn4">4</a></em></sup><em> non seulement avant de se rendre chez le m&eacute;decin mais aussi &agrave; son retour, en discutant le comportement du m&eacute;decin, son diagnostic et son ordonnance avec ses amis&nbsp;; ceci ayant pour cons&eacute;quence possible qu&rsquo;il ne retourne jamais le voir</em>.&nbsp;&raquo;. Ces jugement contribuent &agrave; la r&eacute;putation d&rsquo;un praticien et pourraient participer &agrave; une r&eacute;gulation &laquo;&nbsp;par en bas&nbsp;&raquo; du syst&egrave;me de soins.</p> <p class="texte">De ce bref aper&ccedil;u, deux id&eacute;es peuvent &ecirc;tre retenues. On admet facilement que des relations soient des tuyaux dans lesquels circulent des informations sur la sant&eacute;. Il faut admettre aussi que des relations comportent des interactions qui produisent des contenus cognitifs nouveaux et fa&ccedil;onnent des repr&eacute;sentations, parfois unifi&eacute;es, parfois diversifi&eacute;es. Une seconde id&eacute;e est qu&rsquo;une des dimensions du processus qu&rsquo;on appelle &laquo;&nbsp;influence&nbsp;&raquo; interpersonnelle, n&rsquo;est autre que l&rsquo;exercice d&rsquo;un contr&ocirc;le relationnel qui suppose des possibilit&eacute;s de surveillance et de sanction positives et n&eacute;gatives.</p> <p class="texte">Finalement, abandonner une approche strictement individualiste des comportements de sant&eacute; au profit d&rsquo;une conception qui tient compte des effets des r&eacute;seaux personnels peut conduire, comme le sugg&egrave;rent Ruth Hunter et ses coll&egrave;gues &agrave; d&eacute;placer la cible des interventions publiques de la sensibilisation des individus &agrave; la manipulation des r&eacute;seaux de relations personnelles (Hunter &amp; AL., 2019)&nbsp;: &ldquo;<em>We recommend that the scientific community should move beyond individual-level approaches to design and test interventions that use the largely untapped potential of social networks to improve health behaviours and outcomes</em>.&rdquo;</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn1" id="ftn1">1</a> Sauf si un mal est contagieux car l&rsquo;individu peut &ecirc;tre l&eacute;galement contraint &agrave; la publicisation. Et il est invit&eacute; &agrave; avertir les proches concern&eacute;s pour un mal transmissible.</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn2" id="ftn2">2</a> Mais on peut g&eacute;n&eacute;raliser&nbsp;: des gens dont l&rsquo;activit&eacute; ou le bien &ecirc;tre d&eacute;pendent d&rsquo;autres individu ont int&eacute;r&ecirc;t &agrave; ce que ceux-ci prennent soin de leur sant&eacute; (famille, &eacute;quipe de travail, groupe volontaire, etc).</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn3" id="ftn3">3</a> H.S. Becker examine &agrave; peu pr&egrave;s les m&ecirc;mes conditions dans <em>Outsiders,</em> p.145 et sq. (1963).</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn4" id="ftn4">4</a> Le r&eacute;seau des proches avec lesquels il peut discuter des probl&egrave;mes de sant&eacute;.</p> <p class="bibliographie">Akrich M., (2010), &ldquo;From communities of practice to epistemic communities: health mobilizations on the internet&rdquo;, <em>Sociological Research Online</em>, 15 (2) 10. <a href="http://www.socresonline.org.uk/15/2/10.html">http://www.socresonline.org.uk/15/2/10.html</a></p> <p class="bibliographie">Becker H.S., (1963), <em>Outsiders, Etudes de sociologie de la d&eacute;viance,</em> Trd. 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