<p class="texte"><strong>DOSSIER : POLITIQUE DE SANTE</strong></p> <p class="texte">&shy;</p> <p class="texte"><em>Alain Jean est m&eacute;decin g&eacute;n&eacute;raliste &agrave; Vitry sur Seine. G&eacute;riatre et praticien hospitalier au sein du Groupe hospitalier Broca La Rochefoucauld La Coll&eacute;giale &agrave; Paris, il y est responsable de l&rsquo;Unit&eacute; de Soins de Longue dur&eacute;e. Animateur d&rsquo;un groupe de travail sur la douleur (groupe qui a &eacute;tabli une &eacute;chelle d&rsquo;h&eacute;t&eacute;ro&eacute;valuation de la douleur chez le vieillard qui ne communique pas&nbsp;: l&rsquo;&eacute;chelle ECPA), ces travaux ont donn&eacute; lieu &agrave; publication dans la revue am&eacute;ricaine Pain 2007 Dec 15, 133(1-3) 87-98 A scale to measure pain in non-verbally communicating older patients&nbsp;: the EPCA-2 Study of its psychometric properties.&nbsp;Morello R1,&nbsp;Jean A,&nbsp;Alix M,&nbsp;Sellin-Peres D,&nbsp;Fermanian J. Il est co-auteur de&nbsp;La douleur des femmes et des hommes &acirc;g&eacute;s&nbsp;collection Age, sant&eacute; aux &eacute;ditions Masson,&nbsp;La vieillesse n&rsquo;est pas une maladie&nbsp;Editions Albin Michel (2015), Co-auteur de La vieillesse, un autre regard pour une autre relation aux Editions Eres (2018).</em></p> <p class="texte"><strong>SOMMAIRE</strong></p> <p><strong>1. L&rsquo;id&eacute;ologie dominante qui est celle du d&eacute;ni du processus de vieillissement</strong></p> <p><strong>2. L&rsquo;abandon de la clinique</strong></p> <p><strong>3. Une cons&eacute;quence de l&rsquo;abandon de la clinique&nbsp;: la confusion entre constats anatomo-pathologiques et clinique pour d&eacute;signer la maladie</strong></p> <p><strong>4. Des pr&eacute;visions catastrophistes sur une &eacute;pid&eacute;mie annonc&eacute;e de &laquo;&nbsp;Maladie d&rsquo;Alzheimer&nbsp;&raquo; sont, d&rsquo;une part, injustifi&eacute;es, mais d&rsquo;autre part&nbsp;pourquoi sont-elles &eacute;mises&nbsp;?</strong></p> <p><strong>5. Et les m&eacute;dicaments&nbsp;?</strong></p> <p class="texte">Manifestement le diagnostic de &laquo;&nbsp;maladie d&rsquo;Alzheimer&nbsp;&raquo; est port&eacute; de fa&ccedil;on excessive. Cela r&eacute;sulte d&rsquo;au moins deux causes&nbsp;:</p> <h1 class="texte">1. L&rsquo;id&eacute;ologie dominante qui est celle du d&eacute;ni du processus de vieillissement</h1> <p class="texte">Selon cette id&eacute;ologie, soit vous &laquo;&nbsp;bienvieillissez&nbsp;&raquo;<sup><a class="footnotecall" href="#ftn1" id="bodyftn1">1</a></sup> c&rsquo;est-&agrave;-dire que vous ne vieillissez pas, soit vous &ecirc;tes malade. C&rsquo;est une mani&egrave;re de faire fi du processus de vieillissement qui inclut souvent un d&eacute;clin cognitif. Cette id&eacute;ologie envahit par exemple le domaine de la publicit&eacute; et du marketing. Il n&rsquo;est qu&rsquo;&agrave; regarder les publicit&eacute;s pour certaine eau min&eacute;rale, certaines lunettes de soleil ou un moteur de recherche sp&eacute;cialis&eacute; dans le voyage. Sont-ce des vieux qui nous sont pr&eacute;sent&eacute;s&nbsp;? Eu &eacute;gard &agrave; leur &eacute;tat civil, probablement oui, si l&rsquo;on consid&egrave;re leur barbe ou leurs cheveux gris. Pour le reste, dynamiques, en couple, chevauchant all&eacute;grement une grosse moto Harley Davidson. Bref &eacute;ternellement jeunes&nbsp;!</p> <p class="texte">Au vieillissement &laquo;&nbsp;biologique&nbsp;&raquo;, peut se surajouter un &laquo;&nbsp;retrait du monde&nbsp;&raquo; qui est une modalit&eacute; possible du remaniement psychique inh&eacute;rent &agrave; l&rsquo;avanc&eacute;e dans le grand &acirc;ge. Les m&eacute;decins qui ont une exp&eacute;rience clinique avec les vieilles personnes savent bien qu&rsquo;il est des &eacute;v&eacute;nements traumatiques qui pr&eacute;cipitent le vieillard non pas tant vers un d&eacute;clin cognitif acc&eacute;l&eacute;r&eacute; (m&ecirc;me si cela est possible ou concomitant, ou m&ecirc;me favorisant) que vers un&nbsp;&laquo;&nbsp;retrait du monde&nbsp;&raquo;. &laquo;&nbsp;Retrait du monde&nbsp;&raquo; qui se manifeste par un mutisme, un refus de communiquer, un refus de se laver, de s&rsquo;alimenter&hellip; Et les causes de ce &laquo;&nbsp;retrait du monde&nbsp;&raquo; sont nombreuses et augmentent avec les ann&eacute;es&nbsp;: perte du conjoint, perte d&rsquo;un enfant (m&ecirc;me sexag&eacute;naire ou plus &acirc;g&eacute;), perte des amis &ndash;&nbsp;lorsqu&rsquo;on parvient &agrave; un &acirc;ge tr&egrave;s avanc&eacute;, il y a plus d&rsquo;amis au cimeti&egrave;re que de vivants&nbsp;&ndash;, angoisse devant sa propre mort qui se rapproche un peu plus chaque jour et peut survenir n&rsquo;importe quand. Perception aussi de ce que le monde n&rsquo;est gu&egrave;re accueillant aux vieillards. Quelle place sociale ont-ils, en effet, une fois parvenus au seuil de la retraite hormis celle de consommateurs pour les plus fortun&eacute;s d&rsquo;entre eux&nbsp;? Exclus du tissu social, il est l&eacute;gitime que le vieillard se pose la question du sens qu&rsquo;a sa vie d&eacute;sormais. D&rsquo;autant que sa libert&eacute; se r&eacute;tr&eacute;cit comme peau de chagrin. Il n&rsquo;est qu&rsquo;&agrave; voir comment la sexualit&eacute; des vieillards en EHPAD est l&rsquo;objet de surveillance, r&eacute;pression et r&eacute;probation. Donc, soit le vieillard se retire du monde, soit on le pousse &agrave; se retirer du monde (ipso facto puisqu&rsquo;il est mis hors-jeu), soit les deux ph&eacute;nom&egrave;nes s&rsquo;intriquent.</p> <p class="texte">Or, selon cette id&eacute;ologie, un quelconque d&eacute;clin cognitif chez un vieillard ne peut relever du seul vieillissement ou d&rsquo;un &laquo;&nbsp;retrait du monde&nbsp;&raquo;, mais rel&egrave;ve obligatoirement d&rsquo;un processus pathologique organique. En l&rsquo;occurrence de la maladie d&rsquo;Alzheimer.</p> <h1 class="texte">2. L&rsquo;abandon de la clinique</h1> <p class="texte">Le diagnostic ne repose plus sur un entretien avec le vieillard adress&eacute; &agrave; la consultation sp&eacute;cialis&eacute;e ni sur un examen clinique. Il r&eacute;sulte de la passation de tests dits d&rsquo;&eacute;valuation o&ugrave; le vieillard est plac&eacute; en situation d&rsquo;inf&eacute;riorit&eacute; et d&rsquo;absence de dialogue (bien s&ucirc;r le dialogue peut exister mais dans ce cas il exc&egrave;de la proc&eacute;dure &eacute;valuative elle-m&ecirc;me qui peut tr&egrave;s bien s&rsquo;en passer). On ne les examine plus, on leur fait passer des &eacute;valuations au moyen de tests standardis&eacute;s, on scrute leur IRM c&eacute;r&eacute;bral &agrave; la recherche d&rsquo;une hypotrophie ou atrophie de l&rsquo;hippocampe. Mais ce n&rsquo;est pas parce qu&rsquo;on pr&eacute;sente une hypotrophie de l&rsquo;hippocampe qu&rsquo;on est malade.</p> <p class="texte">Aujourd&rsquo;hui, on a oubli&eacute; le primat de la clinique.</p> <p class="texte">Lorsque j&rsquo;&eacute;tais jeune g&eacute;riatre, &agrave; la fin des ann&eacute;es 80, je proc&eacute;dais comme tous mes coll&egrave;gues&nbsp;: j&rsquo;effectuais des &laquo;&nbsp;&eacute;valuations&nbsp;&raquo; sommaires des fonctions mn&eacute;siques des vieilles personnes qui m&rsquo;&eacute;taient confi&eacute;es. Un jour, je m&rsquo;adresse &agrave; un vieux Monsieur et l&rsquo;interpelle en ces termes&nbsp;: &laquo;&nbsp;Monsieur, pouvez-vous me dire qui est le Pr&eacute;sident de La R&eacute;publique&nbsp;? Celui-ci me r&eacute;pond fort &agrave; propos (mais je n&rsquo;ai compris que plus tard que c&rsquo;&eacute;tait fort &agrave; propos) &laquo;&nbsp;Ecoute, mon p&rsquo;tit gars, j&rsquo;en sais rien et puis je m&rsquo;en fous&nbsp;!&nbsp;&raquo;</p> <p class="texte">Pourquoi &eacute;tait ce fort &agrave; propos&nbsp;? Ce vieil homme me signifiait en un raccourci saisissant que je l&rsquo;importunais. Je l&rsquo;importunais pr&eacute;cis&eacute;ment sur un point&nbsp;: il ne m&rsquo;avait rien demand&eacute; et moi, du haut de mon &acirc;ge qui &eacute;tait environ le tiers du sien, je me mettais en position d&rsquo;&ecirc;tre l&rsquo;examinateur de ce monsieur, je le mettais donc en position d&rsquo;inf&eacute;riorit&eacute; et sinon d&rsquo;accus&eacute;, du moins d&rsquo;examin&eacute;. Au sens de l&rsquo;&eacute;tudiant qui passe un examen. Les r&ocirc;les &eacute;taient pour le moins invers&eacute;s.</p> <p class="texte">On voit par-l&agrave; que faire passer une batterie de test d&rsquo;&eacute;valuation des fonctions mn&eacute;siques &agrave; une vieille personne la met, ipso facto, dans une position inf&eacute;rieure intenable.</p> <p class="texte">Je discutais tr&egrave;s r&eacute;cemment avec un coll&egrave;gue neurologue autour de ces m&ecirc;mes questions et il me faisait remarquer, &agrave; juste titre, qu&rsquo;on n&rsquo;a pas besoin de toutes ces &eacute;chelles pour faire le diagnostic de maladie d&rsquo;Alzheimer. Il suffit de parler avec celui chez qui on suspecte cette affection et avec son entourage.</p> <p class="texte">Le principe m&ecirc;me d&rsquo;&eacute;valuation syst&eacute;matique des fonctions intellectuelles et mn&eacute;siques des vieilles personnes est critiquable. Car il proc&egrave;de d&rsquo;une fa&ccedil;on de faire qui est le d&eacute;ni de la clinique&nbsp;:</p> <p class="texte">Le m&eacute;decin a en t&ecirc;te, lorsqu&rsquo;il re&ccedil;oit le patient, une id&eacute;e pr&eacute;alable ou pr&eacute;con&ccedil;ue. L&rsquo;&laquo;&nbsp;&eacute;valuer&nbsp;&raquo;, ce n&rsquo;est pas l&rsquo;examiner, car on ne laisse aucune &laquo;&nbsp;porte ouverte&nbsp;&raquo; au patient. L&rsquo;entretien est cadenass&eacute;. Laisser une ou des &laquo;&nbsp;portes ouvertes&nbsp;&raquo; permettrait, &eacute;ventuellement, au malade d&rsquo;&eacute;voquer son histoire (ses angoisses tout sp&eacute;cialement son angoisse de mort, ses deuils, ses peines, le sens qu&rsquo;a sa vie et l&rsquo;amoindrissement de sa libert&eacute;, son d&eacute;sint&eacute;r&ecirc;t pour le monde ou vice versa ou les deux). Dans cette modalit&eacute;, on entrevoit l&rsquo;individu qu&rsquo;on a en face de soi, justement non pas comme un individu, mais comme un &eacute;l&eacute;ment (interchangeable) d&rsquo;une cohorte ou d&rsquo;un ensemble qu&rsquo;on pourrait nommer E&nbsp;=ensemble des vieillards potentiellement en d&eacute;clin cognitif&nbsp;=ensemble de tous les vieillards (en r&eacute;alit&eacute;). On pourrait le dire un peu autrement&nbsp;: une &laquo;&nbsp;consultation&nbsp;&raquo; qui n&rsquo;est qu&rsquo;&eacute;valuation est un simulacre de consultation, de surcroit&nbsp;&agrave; sens unique&nbsp;: c&rsquo;est le point de vue du m&eacute;decin qui pr&eacute;vaut. Davantage m&ecirc;me que pr&eacute;valoir, il occupe toute la place.</p> <p class="texte">Or, le point qui consiste &agrave; autoriser le patient qu&rsquo;on a en face de soi &agrave; se constituer ou non comme sujet (m&ecirc;me si cette constitution comme sujet est minimale) est fondamental. Sinon, comment envisager que s&rsquo;instaure entre le patient et le m&eacute;decin &agrave; qui on l&rsquo;a adress&eacute; une relation m&eacute;decin-malade de qualit&eacute;&nbsp;?</p> <p class="texte">Cette proc&eacute;dure d&rsquo;&eacute;valuation se donne des allures de s&eacute;rieux en se parant des oripeaux de la science. L&rsquo;&eacute;valuation quantifie la d&eacute;gradation cognitive. Elle produit un score&nbsp;: c&rsquo;est imparable. Il n&rsquo;y a plus qu&rsquo;&agrave; obtemp&eacute;rer et le vieillard &agrave; la boucler.</p> <p class="texte">Un autre d&eacute;faut de cette id&eacute;ologie &laquo;&nbsp;&eacute;valuative&nbsp;&raquo; qui d&eacute;coule, en r&eacute;alit&eacute;, d&rsquo;une conception identique &agrave; celle du DSM<sup><a class="footnotecall" href="#ftn2" id="bodyftn2">2</a></sup> (actuellement &agrave; sa version 5 et plus &ccedil;a va pire c&rsquo;est) c&rsquo;est qu&rsquo;elle proc&egrave;de &agrave; une classification et &agrave; l&rsquo;inscription de la personne (je me garderai bien d&rsquo;utiliser ici le mot&nbsp;&laquo;&nbsp;sujet&nbsp;&raquo; car on s&rsquo;en situe aux antipodes) dans une case de la dite classification dont la cons&eacute;quence est la prescription d&rsquo;un traitement m&eacute;dicamenteux. On reviendra ult&eacute;rieurement sur la controverse qui persiste &agrave; propos des m&eacute;dicaments dits &laquo;&nbsp;anti Alzheimer&nbsp;&raquo;.</p> <p class="texte">Je voudrais ajouter quelques mots &agrave; propos du DSM. Que signifie cet acronyme&nbsp;? Il signifie&nbsp;: &laquo;&nbsp;Diagnostic and statistical Manuel&nbsp;&raquo;. Sous couvert de pr&eacute;tention &agrave; l&rsquo;objectivit&eacute;, il a la volont&eacute; d&rsquo;occuper toute la place dans la clinique des maladies mentales et dans son &laquo;&nbsp;enseignement&nbsp;&raquo;. A l&rsquo;exclusion de toute autre approche&nbsp;: ainsi la psychiatrie clinique traditionnelle fran&ccedil;aise et la psychanalyse sont &eacute;cart&eacute;es sans autre forme de proc&egrave;s. Actuellement, les &eacute;tudiants en m&eacute;decine en France se voient &laquo;&nbsp;enseigner&nbsp;&raquo; tr&egrave;s majoritairement la clinique des maladies mentales selon le DSM.</p> <p class="texte">Le DSM, c&rsquo;est en r&eacute;alit&eacute; une &eacute;manation de la psychiatrie acad&eacute;mique d&rsquo;inspiration behavioriste, dont la proximit&eacute; aux laboratoires pharmaceutiques n&rsquo;est pas contestable. Il s&rsquo;agit de placer le malade dans une &laquo;&nbsp;case&nbsp;&raquo; correspondant au m&eacute;dicament ad&eacute;quat. Prenons un exemple&nbsp;: que dit le DSM du processus du deuil&nbsp;? La premi&egrave;re version du DSM en 1968 disait&nbsp;: &laquo;&nbsp;Pas de notion de dur&eacute;e de deuil&nbsp;&raquo;, la quatri&egrave;me fixait deux mois comme dur&eacute;e raisonnable du deuil, la derni&egrave;re version DSM 5 publi&eacute;e en 2013 fixe un d&eacute;lai de quinze jours. Pr&eacute;cisant ainsi chaque fois davantage son caract&egrave;re productiviste. Car apr&egrave;s quinze jours et la prescription d&rsquo;un antid&eacute;presseur, &laquo;&nbsp;allez, au boulot&nbsp;&raquo;&nbsp;!</p> <p class="texte">Concernant le d&eacute;clin cognitif des vieillards, vu l&rsquo;ampleur du march&eacute; que cela constitue, le DSM ne pouvait que s&rsquo;y int&eacute;resser. Il a invent&eacute; deux cat&eacute;gories, l&rsquo;une &eacute;tant &laquo;&nbsp;l&rsquo;antichambre de l&rsquo;autre&nbsp;&raquo; (ce qui n&rsquo;a pas re&ccedil;u l&rsquo;ombre du commencement de la moindre preuve)&nbsp;: &laquo;&nbsp;Troubles neurocognitifs mineurs&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;troubles neurocognitifs majeurs&nbsp;&raquo;. Point n&rsquo;est besoin d&rsquo;&ecirc;tre grand clerc pour imm&eacute;diatement comprendre que c&rsquo;est tous les vieux qu&rsquo;il faut traiter.</p> <p class="texte">Pour conclure sur ce point, je voudrais citer Maurice Corcos<sup><a class="footnotecall" href="#ftn3" id="bodyftn3">3</a></sup>, p&eacute;dopsychiatre qui a consacr&eacute; un ouvrage au DSM&nbsp;: &laquo;&nbsp;Le DSM, un dictionnaire pour psychiatres commis voyageurs, &eacute;dict&eacute; par quelques &eacute;vang&eacute;listes, un guide bleu religieux pour les &eacute;gar&eacute;s avides de normalit&eacute;, dressant une typologie des paysages mentaux aussi faux que les bords de mer sur les cartes postales, installant une &eacute;valuation de la psych&eacute; &eacute;ludant la fiction, l&rsquo;inconscient et le fantasme, la pulsion et le sexuel.&nbsp;&raquo;</p> <h1 class="texte">3. Une cons&eacute;quence de l&rsquo;abandon de la clinique&nbsp;: la confusion entre constats anatomo-pathologiques et clinique pour d&eacute;signer la maladie</h1> <p class="texte">Est-on malade parce qu&rsquo;on a un cerveau de petit poids, des l&eacute;sions microscopiques &agrave; type de d&eacute;g&eacute;n&eacute;rescence neuro-fibrillaire (l&eacute;sion associ&eacute;e &agrave; la prot&eacute;ine <em>tau </em>phosphoryl&eacute;e) ou des plaques dites &laquo;&nbsp;s&eacute;niles&nbsp;&raquo; (encore appel&eacute;es d&eacute;p&ocirc;ts amylo&iuml;des associ&eacute;s quant &agrave; eux &agrave; la prot&eacute;ine peptide <em>beta</em> amylo&iuml;de) sp&eacute;cialement dans telle ou telle r&eacute;gion du cerveau comme le cortex hippocampique&nbsp;?</p> <p class="texte">Ou bien est-on malade parce qu&rsquo;on ne reconna&icirc;t plus les membres de sa famille, on se perd dans la rue, on n&rsquo;est plus &agrave; m&ecirc;me de mener &agrave; terme un projet tr&egrave;s simple comme se pr&eacute;parer un caf&eacute;&nbsp;?</p> <p class="texte">La r&eacute;ponse semble &eacute;vidente. Car on peut avoir un cerveau de petit poids avec des l&eacute;sions comme celles qui viennent d&rsquo;&ecirc;tre d&eacute;crites et avoir un fonctionnement parfait de la m&eacute;moire et de l&rsquo;intelligence<sup><a class="footnotecall" href="#ftn4" id="bodyftn4">4</a></sup>.</p> <p class="texte">C&rsquo;est ce que d&eacute;crit tr&egrave;s bien David Snowdon dans l&rsquo;&eacute;tude des Nonnes, avec le cas d&rsquo;une religieuse d&eacute;c&eacute;d&eacute;e &agrave; 101 ans, S&oelig;ur Mary, qui l&rsquo;a beaucoup intrigu&eacute;.</p> <p class="texte">&laquo;&nbsp;C&rsquo;&eacute;tait une femme remarquable qui a obtenu des scores &eacute;lev&eacute;s aux tests cognitifs, et ce jusqu&rsquo;&agrave; sa mort qui est survenue &agrave; l&rsquo;&acirc;ge de 101 ans. Ce qui est d&rsquo;autant plus &eacute;tonnant, c&rsquo;est qu&rsquo;elle a maintenu un haut score cognitif bien qu&rsquo;elle ait pr&eacute;sent&eacute; en abondance des l&eacute;sions de d&eacute;g&eacute;n&eacute;rescence neurofibrillaire et des d&eacute;p&ocirc;ts amylo&iuml;des, l&eacute;sions classiques de la Maladie d&rsquo;Alzheimer&nbsp;&raquo;. En effet, S&oelig;ur Mary, pr&eacute;sentait dans son cortex hippocampique, zone strat&eacute;gique du cerveau, 57 l&eacute;sions de d&eacute;g&eacute;n&eacute;rescence neurofibrillaire et 179 d&eacute;p&ocirc;ts amylo&iuml;des. Son cerveau pesait 870 grammes, la moiti&eacute; du poids d&rsquo;un cerveau dit &laquo;&nbsp;normal&nbsp;&raquo;.</p> <p class="texte">Le fait qu&rsquo;il y ait une h&eacute;sitation sur ce qui pr&eacute;vaut&nbsp;: l&rsquo;observation sous microscope des l&eacute;sions histopathologiques ou bien la clinique indique bien que le primat de la clinique a &eacute;t&eacute; rel&eacute;gu&eacute; &agrave; l&rsquo;arri&egrave;re-plan.</p> <p class="texte">Dans un rapport sur la &laquo;&nbsp;maladie d&rsquo;Alzheimer&nbsp;&raquo; publi&eacute; d&eacute;but 2019, l&rsquo;INSERM indique qu&rsquo;&laquo;&nbsp;examin&eacute; apr&egrave;s leur d&eacute;c&egrave;s le cerveau des patients atteints de maladie d&rsquo;Alzheimer pr&eacute;sente deux types de l&eacute;sions de d&eacute;g&eacute;n&eacute;rescence neurofibrillaire et des d&eacute;p&ocirc;ts amylo&iuml;des&nbsp;&raquo; (comme d&eacute;crit plus haut).</p> <p class="texte">Le rapport souligne que les malades pr&eacute;sentent ces l&eacute;sions mais que la pr&eacute;sence de ces l&eacute;sions ne signifie pas automatiquement que celui qui en est porteur soit atteint de maladie d&rsquo;Alzheimer.</p> <p class="texte">Pourquoi, dans ce rapport de l&rsquo;INSERM, laisse-t-on sous-entendre que ces l&eacute;sions seraient sp&eacute;cifiques de la maladie d&rsquo;Alzheimer alors que la pr&eacute;sence de ce type de l&eacute;sions dans le cerveau d&rsquo;un vieillard n&rsquo;a pas pour corr&eacute;lat oblig&eacute; la pr&eacute;sence de la maladie d&rsquo;Alzheimer chez cette m&ecirc;me personne&nbsp;? Il n&rsquo;y a donc pas r&eacute;ciprocit&eacute; entre le tableau clinique et les l&eacute;sions observ&eacute;es dans le cerveau. En ne mettant pas l&rsquo;accent sur ce point capital, l&rsquo;INSERM entretient le doute et le flou.</p> <h1 class="texte">4. Des pr&eacute;visions catastrophistes sur une &eacute;pid&eacute;mie annonc&eacute;e de &laquo;&nbsp;Maladie d&rsquo;Alzheimer&nbsp;&raquo; sont, d&rsquo;une part, injustifi&eacute;es, mais d&rsquo;autre part<strong> </strong>pourquoi sont-elles &eacute;mises&nbsp;?</h1> <p class="texte">On lit partout qu&rsquo;en l&rsquo;an 2050, il y aura tant de millions de personnes atteintes de &laquo;&nbsp;maladie d&rsquo;Alzheimer&nbsp;&raquo; &agrave; travers le monde. L&rsquo;argument principal en est que la part de la population &acirc;g&eacute;e de plus de 75 ans, ou de plus de 80 ans&nbsp;ou m&ecirc;me davantage ne cessant de cro&icirc;tre le nombre de personnes malades ne peut qu&rsquo;augmenter. Or c&rsquo;est faux.</p> <p class="texte">En 2016, les suites d&rsquo;une prestigieuse &eacute;tude &eacute;pid&eacute;miologique men&eacute;e aux USA, dite &laquo;&nbsp;&eacute;tude de Framingham&nbsp;&raquo;, sont publi&eacute;es<sup><a class="footnotecall" href="#ftn5" id="bodyftn5">5</a></sup>&nbsp;: elles mettent en &eacute;vidence la baisse de l&rsquo;incidence<sup><a class="footnotecall" href="#ftn6" id="bodyftn6">6</a></sup> de la &laquo;&nbsp;maladie d&rsquo;Alzheimer&nbsp;&raquo;.</p> <p class="texte">L&rsquo;&eacute;tude Paquid<sup><a class="footnotecall" href="#ftn7" id="bodyftn7">7</a></sup> dans ses d&eacute;veloppements r&eacute;cents semble aller dans le m&ecirc;me sens. Elle montre que la progression quantitative du nombre de cas de &laquo;&nbsp;maladies d&rsquo;Alzheimer&nbsp;&raquo; sur des p&eacute;riodes de dix ans, par exemple, n&rsquo;&eacute;pouse pas l&rsquo;augmentation du nombre et du pourcentage de vieilles personnes dans la soci&eacute;t&eacute; mais qu&rsquo;elle commence &agrave; conna&icirc;tre une inflexion.</p> <p class="texte">Quelles hypoth&egrave;ses peut-on &eacute;mettre pour rendre compte de ce fl&eacute;chissement&nbsp;? Deux hypoth&egrave;ses s&rsquo;imposent&nbsp;: en premier lieu, l&rsquo;augmentation g&eacute;n&eacute;rale du niveau socio-&eacute;ducatif. La deuxi&egrave;me hypoth&egrave;se est plus controvers&eacute;e&nbsp;: celle d&rsquo;une meilleure prise en charge du risque cardio-vasculaire. Quoi qu&rsquo;il en soit, plusieurs &eacute;tudes s&rsquo;accordent sur le point de la baisse de l&rsquo;incidence.</p> <p class="texte">Alors, pourquoi&nbsp;ce battage alarmiste porteur de l&rsquo;id&eacute;e d&rsquo;une catastrophe annonc&eacute;e&nbsp;? Quand on s&rsquo;appuie avec obstination sur des arguments faux, c&rsquo;est qu&rsquo;on a une id&eacute;e en t&ecirc;te. Il n&rsquo;est pas impossible que le discours qui pr&eacute;dit une quasi apocalypse &laquo;&nbsp;Alzheimer&nbsp;&raquo; vise &agrave; pr&eacute;parer dans l&rsquo;opinion publique l&rsquo;id&eacute;e que les soins accord&eacute;s aux vieillards, et &agrave; juste titre, au nom de la Solidarit&eacute; nationale constituent un poids financier tellement consid&eacute;rable qu&rsquo;il ne doit plus incomber &agrave; la Communaut&eacute; nationale.</p> <p class="texte">Alain Minc, ancien conseiller de Nicolas Sarkozy et expert &eacute;conomique auto proclam&eacute;, avance ses pions dans cette direction.</p> <p class="texte">Je le cite&nbsp;: &laquo;&nbsp;Nous avons 4 sujets de d&eacute;rapage&nbsp;: les retraites, le d&eacute;ficit de l&rsquo;Etat&nbsp;(&hellip;) les collectivit&eacute;s locales&nbsp;(&hellip;) et puis il y a un 4<sup>&egrave;me</sup> probl&egrave;me dont on ne parle jamais c&rsquo;est l&rsquo;effet du vieillissement sur les hausses des d&eacute;penses d&rsquo;assurance maladie et la fa&ccedil;on dont on va le financer.&nbsp;&raquo;</p> <p class="texte">&laquo;&nbsp;Je vais vous l&rsquo;illustrer &agrave; travers un exemple qui me fascine. Moi, j&rsquo;ai un p&egrave;re qui a 102&nbsp;ans. Il a &eacute;t&eacute; hospitalis&eacute; 15&nbsp;jours en service de pointe. Il en est sorti. La collectivit&eacute; fran&ccedil;aise a d&eacute;pens&eacute; 100&nbsp;000&nbsp;euros pour soigner un homme de 102&nbsp;ans. C&rsquo;est un luxe immense, extraordinaire. Pour lui donner quelques mois, ou j&rsquo;esp&egrave;re, quelques ann&eacute;es de vie. Je trouve aberrant que quand le b&eacute;n&eacute;ficiaire a un patrimoine ou quand ses ayant-droits ont des moyens, que l&rsquo;Etat m&rsquo;ait fait ce cadeau &agrave; l&rsquo;&oelig;il. Et donc je pense qu&rsquo;il va bien falloir s&rsquo;interroger sur le fait de savoir comment on r&eacute;cup&egrave;re les d&eacute;penses m&eacute;dicales sur les tr&egrave;s vieux en mettant &agrave; contribution ou leur patrimoine quand ils en ont un ou le patrimoine de leurs ayant-droits.&nbsp;&raquo;</p> <p class="texte">Bref, payer cent mille &euro;, pour un vieux qui va vivre &agrave; peine quelques mois, ce n&rsquo;est pas rentable, c&rsquo;est m&ecirc;me du g&acirc;chis. J&rsquo;esp&egrave;re que le papa de Monsieur Minc n&rsquo;est pas au courant, sinon il lui est permis d&rsquo;avoir de s&eacute;rieux doutes sur l&rsquo;amour filial du fiston. Plus s&eacute;rieusement, voil&agrave; un coin que Mr Minc enfonce dans le principe, selon moi intangible, de la Solidarit&eacute; nationale. Cela ouvre la porte &agrave; toutes les d&eacute;rives d&rsquo;exclusion&nbsp;: apr&egrave;s les vieux, &agrave; qui le tour&nbsp;?</p> <h1 class="texte">5. Et les m&eacute;dicaments&nbsp;?</h1> <p class="texte">Les traitements m&eacute;dicamenteux de la &laquo;&nbsp;maladie d&rsquo;Alzheimer&nbsp;&raquo; sont inefficaces. En m&ecirc;me temps que leur existence est indispensable. Car que deviendrait une maladie qui n&rsquo;aurait pas les m&eacute;dicaments pour en venir &agrave; bout&nbsp;? L&rsquo;existence de ces m&eacute;dicaments, m&ecirc;me inefficaces, conforte le statut de maladie &agrave; la &laquo;&nbsp;maladie d&rsquo;Alzheimer&nbsp;&raquo;. C&rsquo;est pourquoi ses partisans sont si acharn&eacute;s &agrave; les d&eacute;fendre. L&rsquo;inefficacit&eacute; des m&eacute;dicaments &laquo;&nbsp;anti Alzheimer&nbsp;&raquo; est connue depuis longtemps. En cons&eacute;quence, on a du mal &agrave; comprendre l&rsquo;&eacute;norme temps de latence qui s&rsquo;est d&eacute;roul&eacute; entre l&rsquo;&eacute;tablissement de cette inefficacit&eacute; et le moment (justifi&eacute;) du d&eacute;remboursement. Certains osent d&eacute;fendre leur opposition au d&eacute;remboursement par l&rsquo;argument sp&eacute;cieux selon lequel &laquo;&nbsp;il ne faut pas d&eacute;sesp&eacute;rer les familles et entourages&nbsp;&raquo;. Propos qui en dit long sur leur conception du soin.</p> <p class="texte">Ou encore dans une synth&egrave;se produite par l&rsquo;Inserm en Janvier 2019&nbsp;: &laquo;&nbsp;ces m&eacute;dicaments souffrent d&rsquo;un handicap &agrave; l&rsquo;origine de leur r&eacute;cent d&eacute;remboursement (lequel fait encore d&eacute;bat)&nbsp;: leur b&eacute;n&eacute;fice n&rsquo;est pas flagrant pour le patient et son entourage. En effet, ils n&rsquo;am&eacute;liorent pas l&rsquo;&eacute;tat du malade&nbsp;: en g&eacute;n&eacute;ral, ils ralentissent sa d&eacute;gradation ou, au mieux, ils le stabilisent. Face &agrave; cela, certains effets secondaires d&eacute;sagr&eacute;ables, et le simple fait de prescrire une pilule suppl&eacute;mentaire &agrave; des personnes &acirc;g&eacute;es souvent sous traitement pour d&rsquo;autres pathologies, peuvent faire reculer les proches et certains soignants. Des &eacute;tudes &agrave; grande &eacute;chelle prouvent pourtant sans conteste que l&rsquo;arr&ecirc;t de ces traitements diminue la dur&eacute;e de vie autonome de ces patients&nbsp;: se d&eacute;gradant plus vite, ils entrent plus t&ocirc;t en institution. Autrement dit, ces m&eacute;dicaments apportent un b&eacute;n&eacute;fice social et individuel bien r&eacute;el m&ecirc;me s&rsquo;il est difficile &agrave; percevoir imm&eacute;diatement pour l&rsquo;entourage du malade. M&ecirc;me s&rsquo;ils ne sont plus rembours&eacute;s, ces m&eacute;dicaments restent abordables.&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;La recherche s&rsquo;oriente vers un traitement tr&egrave;s pr&eacute;coce, avant les sympt&ocirc;mes de la maladie pour &eacute;viter qu&rsquo;elle ne se d&eacute;clare, les l&eacute;sions pr&eacute;c&eacute;dant de plusieurs ann&eacute;es les sympt&ocirc;mes&nbsp;&raquo;.</p> <p class="texte">Deux remarques&nbsp;: il n&rsquo;aura pas &eacute;chapp&eacute; &agrave; tout lecteur attentif du paragraphe cit&eacute; juste auparavant son caract&egrave;re extr&ecirc;mement tortueux et alambiqu&eacute;. Soit un m&eacute;dicament est efficace, soit-il ne l&rsquo;est pas. Ou dit en des termes plus m&eacute;dicaux&nbsp;: qu&rsquo;en est-il, &agrave; propos de ce type de m&eacute;dicament, de la balance b&eacute;n&eacute;fice-risque&nbsp;? Or tous les articles un tant soit peu s&eacute;rieux comme ceux publi&eacute;s dans la revue ind&eacute;pendante Prescrire d&eacute;montrent que cette balance b&eacute;n&eacute;fices-risques est tr&egrave;s d&eacute;favorable.</p> <p class="texte">Deuxi&egrave;me remarque concernant le &laquo;&nbsp;traitement tr&egrave;s pr&eacute;coce&nbsp;&raquo;. Dans cette hypoth&egrave;se, on ne traite plus un malade mais un suppos&eacute; facteur de risque. A savoir les l&eacute;sions anatomo-pathologiques&nbsp;: d&eacute;g&eacute;n&eacute;rescence neuro-fibrillaire et d&eacute;p&ocirc;ts amylo&iuml;des, suppos&eacute;es pr&eacute;c&eacute;der l&rsquo;apparition de la maladie au stade clinique. Resterait &agrave; prouver que la pr&eacute;sence de l&eacute;sions pr&eacute;c&egrave;de la maladie. En revanche ces l&eacute;sions qu&rsquo;on nous pr&eacute;sente comme sp&eacute;cifiques sont en r&eacute;alit&eacute; des manifestations histologiques du vieillissement, donc pr&eacute;sentes chez tous les vieillards. On est en droit de se demander si c&rsquo;est une agence publique qui parle (l&rsquo;INSERM en l&rsquo;occurrence) ou le syndicat des industries pharmaceutiques. En effet quelle aubaine ce serait de traiter tous les vieillards avec des m&eacute;dicaments non seulement inutiles mais pr&eacute;sentant des effets secondaires non n&eacute;gligeables.</p> <p class="texte">Pour ce qui concerne le &laquo;&nbsp;gain&nbsp;&raquo; en termes de retard &agrave; l&rsquo;institutionnalisation resterait &agrave; d&eacute;terminer quelle en est sa dur&eacute;e. Si l&rsquo;institutionnalisation est retard&eacute;e de trois mois (ce qui est approximativement ce que d&eacute;montrent les &laquo;&nbsp;&eacute;tudes&nbsp;&raquo; les plus favorables), le jeu en vaut-il la chandelle&nbsp;?</p> <p class="texte">Certains brandissent l&rsquo;argument suivant&nbsp;: &laquo;&nbsp;Le d&eacute;remboursement a rompu le lien th&eacute;rapeutique&nbsp;&raquo;. Propos qui soutient de mani&egrave;re implicite que le lien th&eacute;rapeutique passe de fa&ccedil;on oblig&eacute;e par la prescription d&rsquo;un m&eacute;dicament. Eh bien non, la th&eacute;rapeutique ne se r&eacute;sume pas au m&eacute;dicament. Loin de l&agrave;. Car les th&eacute;rapeutiques non m&eacute;dicamenteuses ont le grand int&eacute;r&ecirc;t, particuli&egrave;rement dans les maladies chroniques telles que le diab&egrave;te de type 2, de solliciter davantage le patient et de le rendre plus actif vis-&agrave;-vis de sa maladie. Ainsi dans le diab&egrave;te, observer les recommandations di&eacute;t&eacute;tiques et avoir une activit&eacute; physique soutenue, est certainement au moins aussi important que la prescription de m&eacute;dicaments.</p> <p class="texte">A supposer que la &laquo;&nbsp;maladie d&rsquo;Alzheimer&nbsp;&raquo; soit une maladie et non un effet du vieillissement c&eacute;r&eacute;bral ou d&rsquo;un &laquo;&nbsp;retrait du monde&nbsp;&raquo; &eacute;voqu&eacute; plus haut, mais en r&eacute;alit&eacute; peu importe, on peut entrevoir ici l&rsquo;immense int&eacute;r&ecirc;t des th&eacute;rapeutiques non m&eacute;dicamenteuses. Que ce soit la sollicitation cognitive, l&rsquo;&eacute;vocation de souvenirs, la confrontation au beau (visite de mus&eacute;es ou concerts de musique)&nbsp;: la mise en place de ce genre d&rsquo;occurrence permet que se constitue un lieu social o&ugrave; tout un chacun peut s&rsquo;impliquer et o&ugrave; le vieillard peut r&eacute;int&eacute;grer la communaut&eacute; humaine&hellip;</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn1" id="ftn1">1</a> Ce n&eacute;ologisme est utilis&eacute; sciemment et renvoie &agrave; l&rsquo;article de Michel Bill&eacute; et Didier Martz sur&nbsp;: La tyrannie du &laquo;&nbsp;bienvieillir&nbsp;&raquo;</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn2" id="ftn2">2</a> Le DSM (Diagnostic and Statistical Manuel) issu de la psychiatrie acad&eacute;mique am&eacute;ricaine tout ce qu&rsquo;il y a de plus r&eacute;actionnaire s&rsquo;int&eacute;resse de pr&egrave;s au d&eacute;clin cognitif des vieux puisqu&rsquo;il a instaur&eacute; le d&eacute;clin cognitif majeur (DCM) et le mineur (DCm) avec comme sous-entendu que le DCm est le stade qui pr&eacute;c&egrave;de le DCM</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn3" id="ftn3">3</a> Maurice Corcos <em>L&rsquo;homme selon le DSM</em> Albin Michel 2011</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn4" id="ftn4">4</a> <span lang="en" xml:lang="en">D.&nbsp;Snowdon Aging and Alzheimer&rsquo;s disease: lessons from the Nun study The Gerontologist volume 37 N&deg;&nbsp;2&nbsp;1997&nbsp;p.150-156</span></p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn5" id="ftn5">5</a> <span lang="en" xml:lang="en">Satizabal&nbsp;C. Beiser&nbsp;AS Seshadri&nbsp;S. Dementia over three decades in the Framingham Heart Study N Engl J Med 2016&nbsp;375 (1) 93-4</span></p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn6" id="ftn6">6</a> Incidence nombre de nouveaux cas par an et Pr&eacute;valence nombre total de cas.</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn7" id="ftn7">7</a> L&rsquo;Etude Paquid (Personnes &acirc;g&eacute;es Quid&nbsp;?) est une &eacute;tude prospective dirig&eacute;e par JF&nbsp;Dartigues neurologue et &eacute;pid&eacute;miologiste &agrave; l&rsquo;Universit&eacute; de Bordeaux. Elle a inclus en 1988, pr&egrave;s de 3800 personnes &acirc;g&eacute;es de plus de 65 ans. Depuis 30 ans, elle suit le devenir de cette population.</p>