<p class="texte">&nbsp;</p> <blockquote> <p class="quotation">&laquo;&nbsp;Le monde commun prend fin lorsqu&rsquo;on ne le voit que sous un seul aspect, lorsqu&rsquo;il n&rsquo;a le droit de se pr&eacute;senter que dans une seule perspective.&nbsp;&raquo; (Arendt, Condition de l&rsquo;homme moderne)</p> </blockquote> <blockquote> <p class="quotation">&laquo;&nbsp;Il nous est m&ecirc;me p&eacute;nible d&rsquo;&ecirc;tre des hommes, des hommes poss&eacute;dant un corps bien &agrave; eux et du sang&nbsp;; nous en avons honte, nous consid&eacute;rons cela comme un opprobre et r&ecirc;vons de devenir des esp&egrave;ces d&rsquo;&ecirc;tres abstraits, universels.&nbsp;&raquo; (Dosto&iuml;ewski, Les carnets du sous-sol)</p> </blockquote> <h2 class="texte" style="font-style:italic;">Introduction</h2> <p class="texte">Les pythagoriciens croyaient que les nombres &eacute;taient le monde et que leur myst&egrave;re r&eacute;v&eacute;lait aux hommes quelques secrets d&rsquo;harmonies et quelques autres en mati&egrave;re d&rsquo;ordonnancement des choses par les r&egrave;gles de l&rsquo;esprit. Cette secte a travers&eacute; les si&egrave;cles comme nous l&rsquo;avons montr&eacute; dans un travail sur la g&eacute;n&eacute;alogie des nombres<sup><a class="footnotecall" href="#ftn1" id="bodyftn1">1</a></sup>. Au premier temps de l&rsquo;histoire de la psychologie moderne, cette m&ecirc;me aspiration &agrave; la repr&eacute;sentation de la pens&eacute;e humaine dans des &eacute;quations qui en r&eacute;v&eacute;leraient les myst&egrave;res fut bien pr&eacute;sente chez l&rsquo;un des fondateurs de la psychologie, le philosophe Christian Wolff. Elle fut la base des travaux des psychologues modernes d&eacute;veloppant des instruments de mesure au service d&rsquo;intentions politiques eug&eacute;nistes.</p> <p class="texte">Cette m&ecirc;me qu&ecirc;te de la repr&eacute;sentation de la conscience et de l&rsquo;activit&eacute; c&eacute;r&eacute;brale se perp&eacute;tue dans les hypoth&egrave;ses m&ecirc;mes des sciences cognitives en ce d&eacute;but de 21<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle. Il s&rsquo;agit de repr&eacute;senter par la mesure et de mod&eacute;liser par des nombres. Mais, ces recherches butent sur quelques contradictions tout en poursuivant un projet qui ne saurait s&rsquo;expliquer sans quelques motivations politiques&nbsp;dont celle de la totale r&eacute;flexivit&eacute; de la pens&eacute;e se pensant elle-m&ecirc;me., soit le fantasme de l&rsquo;actualisation absolue alors que la repr&eacute;sentation de d&eacute;ploie elle-m&ecirc;me dans l&rsquo;histoire et l&rsquo;espace. Cette pens&eacute;e calculante donc calculable passe de l&rsquo;hypoth&egrave;se &agrave; la th&eacute;orie sans aucun fondement scientifique. Ce projet des pseudo-sciences cognitives est alors plus un projet politique avec ses buts d&rsquo;encadrement normatif des comportements et de la pens&eacute;e en vue d&rsquo;un contr&ocirc;le social tr&egrave;s disciplinaire.</p> <p class="texte">En ce sens, nous conclurons sur les champs d&rsquo;investigation de la psychologie politique dont Deutsch puis Dorna<sup><a class="footnotecall" href="#ftn2" id="bodyftn2">2</a></sup> pr&eacute;cis&egrave;rent en leur temps les principales th&eacute;matiques, en sugg&eacute;rant quelques nouvelles, pour une psychologie politique plus engag&eacute;e dans l&rsquo;&eacute;tude des ressorts et principes psychologiques qui animent la plupart des sciences sociales et politiques, dont par exemple l&rsquo;&eacute;conomie, les sciences de l&rsquo;esprit ou encore le droit. Enfin, les aspects historiques et techniques &eacute;tant nombreux mais essentiels, je propose au lecteur de se reporter &agrave; des notes consistantes pour privil&eacute;gier l&rsquo;expos&eacute; du raisonnement qui s&rsquo;en nourrit. J&rsquo;esp&egrave;re ainsi satisfaire une double exigence de clart&eacute; et de pr&eacute;cision au gr&eacute; des attentes des lecteurs.</p> <h2 class="texte" style="font-style:italic;">1. Le projet politico-scientifique de la psychom&eacute;trie de Christian Wolff</h2> <p class="texte">Wolff est un des ma&icirc;tres &agrave; penser des universit&eacute;s germaniques du 18<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle, philosophe, juriste et math&eacute;maticien. Ce rationaliste id&eacute;aliste est une des tr&egrave;s grandes figures de la pens&eacute;e des Lumi&egrave;res, d&rsquo;une clart&eacute; didactique exceptionnelle, il &eacute;labore un syst&egrave;me philosophique complet embrassant toutes les disciplines qui inspirera les encyclop&eacute;distes puis la d&eacute;marche de Hegel dans ses &oelig;uvres totalisantes des savoirs constitu&eacute;s. Auteur capital, proche de Leibniz et ant&eacute;rieur &agrave; Kant, il a eu une influence consid&eacute;rable sur la pens&eacute;e europ&eacute;enne et fut tr&egrave;s largement enseign&eacute;. Il affirme que la connaissance est le r&eacute;sultat de pures d&eacute;ductions logiques et le fondement math&eacute;matique du r&eacute;el oblige &agrave; rendre compte des ph&eacute;nom&egrave;nes par des mesures, d&rsquo;o&ugrave; son invention de la psychom&eacute;trie. La justifiant, il &eacute;crit&nbsp;: &laquo;&nbsp;<em>Dans la double fa&ccedil;on que nous avons de poser le fondement des degr&eacute;s des plaisirs et des peines, la &#39;Psycheometria&#39; vient &agrave; notre secours. En elle on doit apprendre comment on peut mesurer la grandeur de la perfection et de l&#39;imperfection ainsi que le degr&eacute; de certitude d&#39;un jugement, de fa&ccedil;on &agrave; constituer la mesure de la perfection et de l&#39;imperfection, comme le degr&eacute; de certitude des jugements.</em>&nbsp;&raquo; (in <em>Psychologia Empirica</em>, 1738, note du &sect;&nbsp;522).</p> <p class="texte">Le projet philosophique de Wolff pose l&rsquo;hypoth&egrave;se de la g&eacute;om&eacute;trisation du monde qui ne saurait &eacute;chapper &agrave; l&rsquo;ordre de la raison qui l&rsquo;ax, d&rsquo;une mani&egrave;re ou d&rsquo;une autrex, engendr&eacute; et dont il est l&rsquo;expression. La mod&eacute;lisation est donc tout &agrave; la fois une exigence scientifique manifeste, mais du m&ecirc;me coup une position ontologique pr&eacute;sumant de la nature profonde des choses et des &ecirc;tres. Ceux-ci sont calculables et d&eacute;termin&eacute;s parce que le monde est lui-m&ecirc;me en sa profondeur une r&eacute;alit&eacute; math&eacute;matique masqu&eacute;e par des apparences qui brouillent la connaissance de perceptions et d&rsquo;&eacute;motions trompeuses. Wolff a le projet d&rsquo;un syst&egrave;me philosophique englobant puisqu&rsquo;il confond le langage repr&eacute;sentant les choses et les choses elles-m&ecirc;mes dont la science r&eacute;v&egrave;le qu&rsquo;elles sont la manifestation des id&eacute;es math&eacute;matiques. Une telle conception de la science se fait imm&eacute;diatement projet politique puisque la raison gouverne le monde et que celui-ci se soumet &agrave; l&rsquo;ordre dont il ne peut s&rsquo;&eacute;chapper que par quelques ignorances coupables d&rsquo;une humanit&eacute; ignare. L&rsquo;&eacute;cole wolffienne diffusera ainsi dans toutes les universit&eacute;s allemandes une discipline philosophique appliqu&eacute;e &agrave; tous les domaines du savoir &agrave; la fa&ccedil;on d&rsquo;un encyclop&eacute;disme.</p> <p class="texte">Wolff s&rsquo;int&eacute;resse donc &agrave; la symbolique au sens de la valeur des signes abstraits. Sa g&eacute;om&eacute;trisation du monde r&eacute;v&egrave;le les r&eacute;alit&eacute;s des mouvements des corps et des &ecirc;tres dont les comportements et la pens&eacute;e. Cette symbolique signifie qu&rsquo;il est possible d&rsquo;avoir une connaissance math&eacute;matique des pens&eacute;es jusqu&rsquo;&agrave; d&eacute;terminer des r&egrave;gles, voire des lois des ph&eacute;nom&egrave;nes de pens&eacute;e. L&rsquo;influence de Wolff est telle que la d&eacute;finition m&ecirc;me de la psychologie dans l&rsquo;Encyclop&eacute;die reprend cette d&eacute;finition&nbsp;: &laquo;&nbsp;partie de la philosophie qui traite de l&rsquo;&acirc;me humaine, qui en d&eacute;finit l&rsquo;essence et qui rend raison de ses op&eacute;rations.&nbsp;&raquo; Sa psychom&eacute;trie a donc pour objectif de construire une connaissance math&eacute;matique des ph&eacute;nom&egrave;nes psychologiques.</p> <h2 class="texte" style="font-style:italic;">2. L&rsquo;id&eacute;al de la psychom&eacute;trie concr&eacute;tis&eacute; chez ses successeurs</h2> <p class="texte">Cette m&eacute;trique de la pens&eacute;e et des comportements va se d&eacute;velopper dans deux directions. Une <em>premi&egrave;re qualitative et individuelle</em> o&ugrave; la mesure servira &agrave; d&eacute;crire une psychologie humaine particuli&egrave;re en vertu de cat&eacute;gories. Cette &eacute;valuation de la personnalit&eacute; se d&eacute;veloppe essentiellement &agrave; partir du 20<sup>e</sup> si&egrave;cle et quelques auteurs &oelig;uvrent &agrave; une psychom&eacute;trie r&eacute;alisant les v&oelig;ux de Wolff. Sans pr&eacute;tention &agrave; une exhaustivit&eacute; historique, signalons les tests de personnalit&eacute; de Robert Woodworth<sup><a class="footnotecall" href="#ftn3" id="bodyftn3">3</a></sup> dont l&rsquo;objectif est d&rsquo;identifier les fragilit&eacute;s &eacute;motionnelles des hommes au combat, en cherchant &agrave; s&eacute;lectionner des individus stables ou plus tard les tests de Katherine Cook Briggs et sa fille Isabel Briggs Myers<sup><a class="footnotecall" href="#ftn4" id="bodyftn4">4</a></sup> s&rsquo;inspirant des types de Jung dans le but de favoriser la compr&eacute;hension de soi et des autres pour r&eacute;duire les conflits interpersonnels. Le lecteur notera que ces tests ont toujours un objectif en s&rsquo;inscrivant dans une intention sociale et politique plus vaste que la simple mesure, celle-ci &eacute;tant orient&eacute;e &agrave; des fins d&rsquo;&eacute;valuations et de comparaisons.</p> <p class="texte">La <em>seconde direction plus quantitative et sociale</em> est &agrave; cet &eacute;gard encore plus explicite dans ses intentions politiques. En Angleterre, Francis Galton<sup><a class="footnotecall" href="#ftn5" id="bodyftn5">5</a></sup> propose d&rsquo;&eacute;valuer l&rsquo;intelligence des individus relativement &agrave; un groupe par des mesures statistiques que Karl Pearson puis Charles Spearman d&eacute;velopperont. La psychom&eacute;trie se d&eacute;veloppe aussi en Allemagne avec Gustav Theodor Fechner puis Wilhelm Wundt qui dirigera la th&egrave;se d&rsquo;un am&eacute;ricain qui contribuera &agrave; la diffusion de la discipline outre-Atlantique&nbsp;: James McKeen Cattell<sup><a class="footnotecall" href="#ftn6" id="bodyftn6">6</a></sup>. Wundt construit ainsi une psychologie ethnique<sup><a class="footnotecall" href="#ftn7" id="bodyftn7">7</a></sup>. L&rsquo;intention de s&eacute;lectionner les plus performants est explicite. De m&ecirc;me, en France, d&egrave;s le d&eacute;but du 20<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle, Alfred Binet et Th&eacute;odore Simon r&eacute;pondent &agrave; une commande du minist&egrave;re de l&rsquo;Education d&eacute;sireux de rep&eacute;rer les enfants en grandes difficult&eacute;s scolaires, pr&eacute;texte &agrave; une &eacute;chelle de mesure de l&rsquo;intelligence. De m&ecirc;me encore aux Etats-Unis, le test de Robert Yerkes<sup><a class="footnotecall" href="#ftn8" id="bodyftn8">8</a></sup> sera administr&eacute; &agrave; plus d&rsquo;un million de soldats. Les tests se modernisent avec David Weschler<sup><a class="footnotecall" href="#ftn9" id="bodyftn9">9</a></sup> et &eacute;merge une v&eacute;ritable industrie am&eacute;ricaine du test psychologique.</p> <p class="texte">Les id&eacute;es de Wolff se concr&eacute;tisent donc. Il faut signaler le r&ocirc;le &eacute;minent du Cavendish Physics Laboratory de Cambridge sous l&rsquo;impulsion de James McKeen Cattell. El&egrave;ve de Wundt &agrave; Leipzig, il combine sa psychophysique et l&rsquo;anthropom&eacute;trie de Galton forte de son approche math&eacute;matique et des mesures diff&eacute;rentielles des individus relativement &agrave; un groupe, avec lequel il entretient une correspondance. Sous l&rsquo;impulsion de Galton, ses travaux visent l&rsquo;estimation quantitative des facult&eacute;s humaines r&eacute;put&eacute;es les moins mesurables, selon les termes de Galton. Les mesures &eacute;l&eacute;mentaires portent sur l&rsquo;acuit&eacute; visuelle, la force, la capacit&eacute; respiratoire, la taille et le poids. Cattell publie son article de r&eacute;f&eacute;rence en 1890&nbsp;: <em>Mental Tests and Measurement</em>. Son analyse est &eacute;difiante parce qu&rsquo;elle met en &eacute;vidence des intentions du fait m&ecirc;me des crit&egrave;res qu&rsquo;elle retient. En effet, pourquoi s&rsquo;int&eacute;resser &agrave; la pression dynamom&eacute;trique, la vitesse du mouvement, les zones sensitives, la pression douloureuse, le seuil diff&eacute;rentiel de poids, les temps de r&eacute;action auditif ou de d&eacute;nomination de couleurs, la bisection d&#39;une ligne de cinquante centim&egrave;tres et le jugement d&#39;une dur&eacute;e de dix secondes ou le nombre de lettres m&eacute;moris&eacute;es apr&egrave;s une &eacute;coute&nbsp;? La plupart mesure des caract&egrave;res plut&ocirc;t physiologiques et quelques-uns des facult&eacute;s plus psychologiques, prenant comme rep&egrave;re l&rsquo;exactitude de la mesure comme r&eacute;f&eacute;rence d&rsquo;une perception humaine. Toutes ces mesures ont un caract&egrave;re m&eacute;caniste en ce sens qu&rsquo;elles v&eacute;rifient la conformit&eacute; du fonctionnement attendu des organes de perception de fa&ccedil;on m&eacute;canique&nbsp;: exactitude, vitesse, comme si ces crit&egrave;res garantissaient l&rsquo;&eacute;valuation d&rsquo;un homme moyen apte, mais apte &agrave; quoi&nbsp;? Que disent ces crit&egrave;res et leurs exercices sur le profil de l&rsquo;homme ainsi &eacute;valu&eacute;&nbsp;?</p> <p class="texte">Ils traduisent cette intention de r&eacute;duire l&rsquo;homme &agrave; des crit&egrave;res d&rsquo;analyse assez peu nombreux. Ceux-ci deviennent la norme. L&rsquo;&ecirc;tre humain se d&eacute;finit alors par ces seuls crit&egrave;res. En cons&eacute;quence, cette mesure &eacute;talonne l&rsquo;homme apte qui correspond aux crit&egrave;res. Mais il faudrait d&rsquo;abord d&eacute;montrer la relation entre une physiologie et une psychologie&nbsp;: <em>mens sane in corpore sano </em>&eacute;tant une devise pour un art de vivre perclus de croyances acceptables, mais pas la preuve que l&rsquo;un produit l&rsquo;autre et r&eacute;ciproquement. Or, cette devise commande ces tests physiologiques ou psychologiques pr&eacute;tendant universellement rendre compte des aptitudes de l&rsquo;homme. Or, les controverses scientifiques<sup><a class="footnotecall" href="#ftn10" id="bodyftn10">10</a></sup> invitent &agrave; la prudence. L&rsquo;homme objectiv&eacute; &agrave; la mani&egrave;re d&rsquo;un cheptel en vue de manier les armes ou d&rsquo;ex&eacute;cuter des t&acirc;ches ouvri&egrave;res peut &ecirc;tre mesur&eacute; dans ce but, mais cette mesure portera bien son intention au service d&rsquo;une utilit&eacute; tr&egrave;s d&eacute;limit&eacute;e qui ne saurait donner lieu imprudemment &agrave; des extrapolations ou g&eacute;n&eacute;ralisations.</p> <h2 class="texte" style="font-style:italic;">3. L&rsquo;intention politique de la psychom&eacute;trie moderne</h2> <p class="texte">L&rsquo;histoire de la psychom&eacute;trie atteste de son lien avec des intentions politiques. Et ce n&rsquo;est donc pas un hasard de l&rsquo;histoire si la psychom&eacute;trie est n&eacute;e avec ses intentions s&eacute;lectives inspir&eacute;es de la compr&eacute;hension du darwinisme sous l&rsquo;angle d&rsquo;une th&eacute;orie de l&rsquo;&eacute;volution-s&eacute;lection visant l&rsquo;am&eacute;lioration de la nature et des esp&egrave;ces qui la composent. Les relations entre ces psychologues sont &eacute;tablies par leurs correspondances, leurs travaux communs, leurs liens acad&eacute;miques de professeur et d&rsquo;&eacute;l&egrave;ve dans une filiation tr&egrave;s nette. En r&eacute;sum&eacute;, Galton, Pearson, Spearman, Fisher, Yerkes et Weschler ont contribu&eacute; &agrave; un usage des math&eacute;matiques en psychologie et ils ont &eacute;t&eacute; des ardents d&eacute;fenseurs d&rsquo;une biopolitique s&eacute;lective, sans oublier le second Cattell (Raymond)<sup><a class="footnotecall" href="#ftn11" id="bodyftn11">11</a></sup> comme nous allons le voir, plus radicale encore dans ses conceptions. Ecart type, r&eacute;gression arithm&eacute;tique, coefficient de corr&eacute;lation, analyse factorielle, variance, estimation du maximum de vraisemblance, etc. ont permis d&rsquo;imposer des normes et r&eacute;f&eacute;rences dont les tests d&rsquo;intelligence &agrave; partir d&rsquo;une d&eacute;finition restrictive aujourd&rsquo;hui tr&egrave;s contest&eacute;e.</p> <p class="texte">Ses fondateurs de la psychom&eacute;trie moderne furent tous des militants eug&eacute;nistes et racialistes. Est-ce un fait du hasard&nbsp;? Quoiqu&rsquo;en disent les scientifiques d&eacute;fenseurs d&rsquo;une neutralit&eacute; axiologique imaginaire<sup><a class="footnotecall" href="#ftn12" id="bodyftn12">12</a></sup>, l&rsquo;esprit m&ecirc;me de mesure est orient&eacute;e du fait m&ecirc;me de l&rsquo;&eacute;chelle qu&rsquo;elle met en &oelig;uvre et elle est une mani&egrave;re parmi d&rsquo;autres de faire acte de connaissance. Elle &eacute;talonne dans le but de situer des objets &agrave; l&rsquo;instar des nombres qui se classent. M&ecirc;me le psychologue &laquo;&nbsp;technicien&nbsp;&raquo; qui voudrait s&rsquo;&eacute;manciper de cette g&eacute;n&eacute;alogie peut-il faire abstraction de l&rsquo;usage de la mesure psychologique&nbsp;? Le crit&egrave;re de l&rsquo;intelligence est d&eacute;j&agrave; constitutif d&rsquo;un choix politique d&rsquo;appr&eacute;cier des populations en vertu de ce crit&egrave;re pour des actions&nbsp;: s&eacute;lection, promotion, &eacute;limination ou soutien. Le motif expos&eacute; pour pr&eacute;senter les tests de A.&nbsp;Binet et T. Simon signifie qu&rsquo;on se donne les moyens de s&eacute;lectionner les &laquo;&nbsp;meilleurs&nbsp;&raquo; en vertu de ces tests. La psychom&eacute;trie a des utilit&eacute;s qui ont d&rsquo;ailleurs renforc&eacute; et l&eacute;gitim&eacute; les recherches en la mati&egrave;re soutenue par les arm&eacute;es et l&rsquo;&eacute;ducation. Nous retrouverons les m&ecirc;mes hypoth&egrave;ses dans les sciences cognitives contemporaines, comme pour cette premi&egrave;re &eacute;poque de la psychom&eacute;trie h&eacute;rit&eacute;e du projet de Wolff. Quant &agrave; l&rsquo;esprit obsessionnel de la mesure, elle r&eacute;v&egrave;le chez ses auteurs, une psychologie particuli&egrave;re, une fascination pour l&rsquo;objectivation, l&rsquo;objectification de l&rsquo;autre, une pratique au r&eacute;sonance schizophr&eacute;nique et d&rsquo;une raison morbide<sup><a class="footnotecall" href="#ftn13" id="bodyftn13">13</a></sup>.</p> <p class="texte">Explicitons ces intentions politiques. La principale motivation a &eacute;t&eacute; de se substituer &agrave; l&rsquo;&oelig;uvre de la nature, &eacute;liminant les faibles alors que paradoxalement la m&eacute;decine permettait de les sauver&nbsp;! Il s&rsquo;agit de d&eacute;cider &agrave; la place de la nature pour une pr&eacute;servation de l&rsquo;esp&egrave;ce par l&rsquo;&eacute;limination des d&eacute;faillants et une am&eacute;lioration par la reproduction des meilleurs. L&rsquo;&eacute;limination ou la st&eacute;rilisation conduisent &agrave; une pratique plus syst&eacute;matique d&egrave;s lors que les traits sont associ&eacute;s &agrave; une population toute enti&egrave;re&nbsp;: le g&eacute;nocide scientifique de peuples d&eacute;valu&eacute;s. Et les propos des scientifiques inspirateurs des politiques eug&eacute;nistes et g&eacute;nocidaires font &eacute;cho &agrave; des projets contemporains qui perp&eacute;tuent encore les m&ecirc;mes intentions d&rsquo;une sant&eacute; collective &agrave; pr&eacute;server et d&eacute;velopper&nbsp;: &laquo;&nbsp;<em>Le diagnostic h&eacute;r&eacute;ditaire, c&rsquo;est-&agrave;-dire la d&eacute;termination du caract&egrave;re h&eacute;r&eacute;ditaire d&rsquo;une maladie, est la condition pr&eacute;alable &agrave; la mise en pratique de notre politique actuelle d&rsquo;entretien de la sant&eacute; h&eacute;r&eacute;ditaire.&nbsp;</em>&raquo;<sup><a class="footnotecall" href="#ftn14" id="bodyftn14">14</a></sup>. L&rsquo;intention s&eacute;lective se justifie par la mesure et la valeur de ces crit&egrave;res dans une politique. Ici, le politique g&egrave;re les populations comme le fermier son cheptel &agrave; l&rsquo;instar des recommandations du biologiste Davenport<sup><a class="footnotecall" href="#ftn15" id="bodyftn15">15</a></sup>.</p> <h2 class="texte" style="font-style:italic;">4. La psychom&eacute;trie s&eacute;lective et eug&eacute;niste des peuples</h2> <p class="texte">Rappelons que les premi&egrave;res psychologies modernes s&rsquo;appuient sur une comparaison des climats induisant celle des peuples jusqu&rsquo;&agrave; fonder la th&eacute;orie des races. A chaque climat est associ&eacute; des effets quasi-m&eacute;caniques sur les comportements des peuples. Cette taxonomie racialiste &eacute;mergea en Europe avec les auteurs des Lumi&egrave;res&nbsp;: Montesquieu, Kant, Locke, Buffon ou Voltaire en particulier<sup><a class="footnotecall" href="#ftn16" id="bodyftn16">16</a></sup>. Elle mesure qualit&eacute;s comportementales et intellectuelles des peuples qui refl&egrave;tent les attributs des climats. Cette psychologie des peuples, hautement scientifique et enseign&eacute;e avec autorit&eacute;, est donc li&eacute;e &agrave; leur environnement qui en d&eacute;termine les caract&egrave;res. Buffon &eacute;voque m&ecirc;me la d&eacute;g&eacute;n&eacute;rescence li&eacute;e au climat. Cette premi&egrave;re psychom&eacute;trie est indirecte mais s&ucirc;re d&rsquo;elle, et les propos des auteurs des Lumi&egrave;res actent unanimement, sans jamais l&rsquo;avoir d&eacute;montr&eacute;, de cette correspondance constante entre des populations-races et leurs r&eacute;sidences g&eacute;ographiques qui les a d&eacute;termin&eacute;s. Cette th&eacute;orie des races des Lumi&egrave;res est une des premi&egrave;res expressions de la science moderne fond&eacute;e sur le m&ecirc;me mat&eacute;rialisme qui associe des &laquo;&nbsp;v&eacute;rit&eacute;s&nbsp;&raquo; physiques &agrave; des &laquo;&nbsp;v&eacute;rit&eacute;s&nbsp;&raquo; psychologiques dans un jeu de correspondances certaines dont il est int&eacute;ressant de noter qu&rsquo;elle provient de l&rsquo;antiquit&eacute;, colport&eacute;e par les penseurs orientaux<sup><a class="footnotecall" href="#ftn17" id="bodyftn17">17</a></sup>.</p> <p class="texte">Cette psychom&eacute;trie des peuples des Lumi&egrave;res illumine les universit&eacute;s allemandes et europ&eacute;ennes au 19<sup>e</sup> et 20<sup>e</sup> si&egrave;cle diffus&eacute;e successivement dans la tradition allemande Blumenbach, Kant, Herder ou nordique avec le su&eacute;dois Linn&eacute;<sup><a class="footnotecall" href="#ftn18" id="bodyftn18">18</a></sup> qui, malgr&eacute; des divergences, assument tous une th&eacute;orie des races qui fait l&rsquo;unanimit&eacute; scientifique. Au d&eacute;but du 20<sup>e</sup> si&egrave;cle, Heinrich Poll, g&eacute;n&eacute;ticien eug&eacute;niste sp&eacute;cialiste de la g&eacute;mellit&eacute; atteste d&rsquo;une communaut&eacute; de vue des milieux scientifiques germaniques, en r&eacute;sonance d&rsquo;ailleurs avec les travaux et institutions scientifiques eug&eacute;nistes am&eacute;ricaines et anglaises. Il &eacute;crit&nbsp;: &laquo;&nbsp;<em>Comme l&rsquo;organisme qui sacrifie impitoyablement les cellules d&eacute;g&eacute;n&eacute;r&eacute;es, comme le chirurgien qui fait impitoyablement l&rsquo;ablation d&rsquo;un organe malade, tous deux afin de sauver l&rsquo;ensemble&nbsp;; de la m&ecirc;me fa&ccedil;on, [l&rsquo;&Eacute;tat] ne doit pas, par des craintes exag&eacute;r&eacute;es, reculer devant l&rsquo;empi&eacute;tement sur la libert&eacute; individuelle afin d&rsquo;emp&ecirc;cher les porteurs de traits pathologiques h&eacute;r&eacute;ditaires de continuer &agrave; faire trainer</em> <em>le noyau pathog&egrave;ne de g&eacute;n&eacute;ration en g&eacute;n&eacute;ration.&nbsp;</em>&raquo;<sup><a class="footnotecall" href="#ftn19" id="bodyftn19">19</a></sup>. Ces recommandations en faveur de politiques eug&eacute;nistes favorisent de la cr&eacute;ation de l&rsquo;Institut Kaiser Wilhelm d&rsquo;anthropologie, d&rsquo;h&eacute;r&eacute;dit&eacute; et d&rsquo;eug&eacute;nisme sous l&rsquo;impulsion de scientifiques r&eacute;put&eacute;s d&egrave;s 1922. Sa date de cr&eacute;ation&nbsp;: 1927 atteste de l&rsquo;influence d&rsquo;une soci&eacute;t&eacute; scientifique sur des politiques bien avant l&rsquo;&eacute;poque nazie&nbsp;!<sup><a class="footnotecall" href="#ftn20" id="bodyftn20">20</a></sup> De m&ecirc;me les camps d&rsquo;extermination des Hereros en Namibie d&egrave;s le d&eacute;but du 20<sup>e</sup> si&egrave;cle sont le r&eacute;sultat de choix scientifiques d&ucirc;ment argument&eacute;s.</p> <p class="texte">Nous partageons ici toute l&rsquo;analyse historique tr&egrave;s document&eacute;e et sans concession de Benoit Massin r&eacute;pondant &agrave; la question&nbsp;: &laquo;&nbsp;L&rsquo;id&eacute;e selon laquelle l&rsquo;eug&eacute;nisme et l&rsquo;hygi&egrave;ne raciale se seraient introduits &laquo;&nbsp;subrepticement&nbsp;&raquo; &agrave; partir de 1933 dans la presse m&eacute;dicale allemande, gr&acirc;ce aux id&eacute;ologues du Parti nazi, va dans le sens de ce que l&rsquo;on voudrait croire. Tout ceci n&rsquo;avait rien de scientifique et les universitaires s&eacute;rieux ne pouvaient et ne peuvent y croire &ndash; d&rsquo;autant moins que la m&eacute;decine scientifique allemande tenait alors le premier rang mondial. Cela correspond-il &agrave; une r&eacute;alit&eacute; historique&nbsp;?&nbsp;&raquo;<sup><a class="footnotecall" href="#ftn21" id="bodyftn21">21</a></sup>. Il apporte des preuves indubitables d&rsquo;une science eug&eacute;niste et racialiste fond&eacute;e sur des mesures de toutes sortes qui classent, s&eacute;lectionnent, &eacute;valuent pour agir&nbsp;: st&eacute;riliser, enlever, tuer, etc. Nous ne pouvons que souscrire &agrave; la conclusion de Benoit Massin dans cette tr&egrave;s large &eacute;tude historique que&nbsp;: &laquo;&nbsp;Pendant environ un demi-si&egrave;cle, l&rsquo;eug&eacute;nisme fut consid&eacute;r&eacute; comme un projet &laquo;&nbsp;scientifique&nbsp;&raquo; de gestion biologique et m&eacute;dicale du &laquo;&nbsp;capital humain&nbsp;&raquo; des pays les plus avanc&eacute;s. Face &agrave; la &laquo;&nbsp;menace&nbsp;&raquo; d&rsquo;une &laquo;&nbsp;d&eacute;g&eacute;n&eacute;rescence&nbsp;&raquo; de la qualit&eacute; g&eacute;n&eacute;tique des populations des pays industrialis&eacute;s, en raison de la survie et de la reproduction des individus condamn&eacute;s &agrave; dispara&icirc;tre dans les soci&eacute;t&eacute;s primitives, il convenait de r&eacute;agir &laquo;&nbsp;rationnellement&nbsp;&raquo; par une politique pr&eacute;ventive de planification et de rationalisation de la reproduction humaine.&nbsp;&raquo; (2005, 280). Et ces entreprises auraient &eacute;t&eacute; impossibles sans la collaboration de milliers de m&eacute;decins, de scientifiques et de gestionnaires des &eacute;tablissements de sant&eacute; soutenus par la puissance publique. Apr&egrave;s ce projet de s&eacute;lection des populations constituant un premier contr&ocirc;le, un second vient le renforcer par celui de l&rsquo;esprit dans le projet des sciences cognitives contemporaines.</p> <h2 class="texte" style="font-style:italic;">5. Les hypoth&egrave;ses &eacute;pist&eacute;mologiques et politiques de la psychom&eacute;trie cognitiviste</h2> <p class="texte">Voyons maintenant comment les sciences cognitives contemporaines prolongent ce projet de Wolff d&rsquo;une mesure en vue de la fabrication du nouvel homme moderne. En s&rsquo;int&eacute;ressant &agrave; l&rsquo;activit&eacute; c&eacute;r&eacute;brale, elles posent quelques hypoth&egrave;ses qui fondent leurs recherches et les projets qui s&rsquo;ensuivent. Avant tout d&eacute;bat, il est bon d&rsquo;exposer ces hypoth&egrave;ses parce qu&rsquo;elles sont &agrave; l&rsquo;origine d&rsquo;un investissement scientifique et &eacute;conomique cautionn&eacute; par des institutions internationales et des Etats. Ces derni&egrave;res ont pour ambition d&rsquo;orienter la recherche dans une direction plut&ocirc;t qu&rsquo;une autre&nbsp;; ce qui pourrait manifester le caract&egrave;re tr&egrave;s politique des sciences cognitives.</p> <p class="texte">Les hypoth&egrave;ses cognivistes sont les suivantes. Premi&egrave;rement, celle d&rsquo;une correspondance entre des ph&eacute;nom&egrave;nes physiologiques et psychiques jusqu&rsquo;&agrave; consid&eacute;rer a priori que le psychique se limite &agrave; des productions physiologiques. Cette affirmation d&rsquo;inspiration mat&eacute;rialiste reste l&agrave; encore une hypoth&egrave;se, en aucun cas une d&eacute;monstration av&eacute;r&eacute;e et prouv&eacute;e tandis que d&rsquo;autres hypoth&egrave;ses et recherches sont envisageables. Deuxi&egrave;mement, celle d&rsquo;une localisation o&ugrave; les activit&eacute;s c&eacute;r&eacute;brales suivent des chemins neuronaux en se situant dans des zones pr&eacute;cises corr&eacute;l&eacute;es &agrave; des types de t&acirc;che d&rsquo;o&ugrave; l&rsquo;importance selon les cognitivistes de l&rsquo;imagerie m&eacute;dicale. C&rsquo;est l&agrave; encore une hypoth&egrave;se, int&eacute;ressante certes, mais tr&egrave;s loin d&rsquo;&ecirc;tre attest&eacute;e. Troisi&egrave;mement, celle de la mesurabilit&eacute;-commensurabilit&eacute; des activit&eacute;s c&eacute;r&eacute;brales r&eacute;duites &agrave; une activit&eacute; &eacute;lectrique et chimique dont les variations sont toutes quantifiables et plus encore &agrave; corr&eacute;ler de fa&ccedil;on certaine et explicative &agrave; des ph&eacute;nom&egrave;nes de l&rsquo;esprit. Mais hypoth&egrave;se n&rsquo;est pas th&egrave;se&nbsp;! L&rsquo;hypoth&egrave;se est comme toujours acceptable pour effectuer des travaux mais elle ne l&rsquo;est plus si elle s&rsquo;insinue comme v&eacute;rit&eacute; dogmatique de LA science en refusant toutes les controverses, incertitudes, ind&eacute;cidabilit&eacute;s pourtant nombreuses, sans omettre les recherches aux conclusions plus nuanc&eacute;es, voire contraires.</p> <p class="texte">Or, les cognivistes contemporains font de m&ecirc;me dans leur m&eacute;thode. Nous sommes de nouveau en pr&eacute;sence de cette m&ecirc;me <em>id&eacute;ologie scientifique</em><sup><a class="footnotecall" href="#ftn22" id="bodyftn22">22</a></sup> des Lumi&egrave;res &agrave; l&rsquo;instar des eug&eacute;nistes du d&eacute;but du 20<sup>e</sup> si&egrave;cle. En effet, ces auteurs proc&egrave;dent par les m&ecirc;mes raccourcis en affirmant des relations qui ne sont pas &eacute;tablies, loin de l&agrave;. Dehaene pr&eacute;tend rapprocher les m&eacute;thodes de calcul, d&icirc;tes algorithmiques, mises en &oelig;uvre dans les machines r&eacute;put&eacute;es produire de l&rsquo;intelligence artificielle et l&rsquo;imagerie c&eacute;r&eacute;brale aux enseignements eux-m&ecirc;mes tr&egrave;s confus<sup><a class="footnotecall" href="#ftn23" id="bodyftn23">23</a></sup>. Il induit de l&rsquo;activation c&eacute;r&eacute;brale visualisable et approximativement situ&eacute;e par des sollicitations ext&eacute;rieures que le cerveau agirait selon des algorithmes et que son activit&eacute; serait codifiable de la sorte. Il passe d&rsquo;une localisation imag&eacute;e &agrave; l&rsquo;assertion de l&rsquo;algorithmique sans aucun lien logique ou exp&eacute;rimental. En quoi cette localisation explicite le processus qui ne se manifeste pas dans l&rsquo;exp&eacute;rience&nbsp;? La localisation sert-l&agrave; de pr&eacute;texte. Cette correspondance est tout aussi arbitraire et absurde que celle des climats et la psychologie des peuples des racialistes et eug&eacute;nistes des Lumi&egrave;res. Elle atteste plut&ocirc;t de la continuit&eacute; de la foi pythagoricienne d&rsquo;une pens&eacute;e calculante et calculable parce que la pens&eacute;e serait avant tout math&eacute;maticienne, soit le dogme d&rsquo;une position politique et anthropologique pr&eacute;jugeant toujours de la nature de l&rsquo;esprit, de la conscience avec l&rsquo;autorit&eacute; feinte du savant<sup><a class="footnotecall" href="#ftn24" id="bodyftn24">24</a></sup>. Mais elle manifeste un projet.</p> <p class="texte">En synth&egrave;se de ces premi&egrave;res parties, nous faisons l&rsquo;hypoth&egrave;se que cette <em>id&eacute;ologie scientifique</em> pr&eacute;figure l&rsquo;enfer de la dystopie. C&rsquo;est la raison d&rsquo;un examen plus approfondi de cette croyance d&rsquo;une pens&eacute;e calculante, donc mesurable, calculable et reproductible ou contr&ocirc;lable, ce qui montrerait que ce que l&rsquo;on pr&eacute;sente comme scientifique ne l&rsquo;est pas, mais participe d&rsquo;un projet politique visant une utopie-dystopie immanquablement. La pens&eacute;e, la conscience, voire m&ecirc;me l&rsquo;intelligence se confondent-elles avec ces supports mat&eacute;riels, ses v&eacute;hicules qui ne disent rient de ce qu&rsquo;ils transportent. A contrario, tout ce qui ne se mesurerait pas n&rsquo;existant pas, la r&eacute;duction m&eacute;thodologique devient vite une amputation anthropologique, niant tout ce qui d&eacute;borderait l&rsquo;exigence de la repr&eacute;sentation. Platon ne condamnait-il pas d&eacute;j&agrave; le po&egrave;te&nbsp;?</p> <h2 class="texte" style="font-style:italic;">6. La dystopie de cette hypoth&egrave;se de la pens&eacute;e calculante-calculable</h2> <p class="texte">Rappelons ici que la dystopie qualifie un genre de fiction romanesque. Celle-ci d&eacute;crit un monde &agrave; venir dont le caract&egrave;re utopique tourne au cauchemar. Quelques dystopies fameuses ont alert&eacute; nos contemporains dont <em>Le meilleur des mondes</em> d&rsquo;Aldous Huxley, <em>1984</em> de Georg Orwell ou encore <em>Farenheit 541</em> de Ray Bradbury sans oublier <em>Les robots</em> d&rsquo;Isaac Asimov. Ces auteurs ne sont pas de simples romanciers de science-fiction. Plusieurs ont en commun une grande culture scientifique et un sens du politique. Huxley est issu d&rsquo;une famille de scientifiques dont le fr&egrave;re Julian Sorell, biologiste, fut un th&eacute;oricien de l&rsquo;eug&eacute;nisme et le grand-p&egrave;re un proche de Darwin. Son engagement politique et ses intuitions sur la manipulation des masses s&rsquo;expriment tout particuli&egrave;rement dans <em>Les magiciens</em>. Dans un discours de 1961 &agrave; la California Medical School, il d&eacute;clare&nbsp;: &laquo;&nbsp;<em>Il y aura d&egrave;s la prochaine g&eacute;n&eacute;ration une m&eacute;thode pharmaceutique pour faire aimer aux gens leur propre servitude, et cr&eacute;er une dictature sans larmes, pour ainsi dire, en r&eacute;alisant des camps de concentration sans douleur pour des soci&eacute;t&eacute;s enti&egrave;res, de sorte que les gens se verront priv&eacute;s de leurs libert&eacute;s, mais en ressentiront plut&ocirc;t du plaisir&nbsp;</em>&raquo;. Asimov est biochimiste et f&eacute;ru de cybern&eacute;tique. Il reprend la notion de psychohistoire &agrave; Nat Schachner qu&rsquo;il d&eacute;veloppe dans le cycle de <em>Fondation</em>, science imagin&eacute;e qui met en &oelig;uvre la psychologie, la statistique et les ph&eacute;nom&egrave;nes sociaux.&nbsp;Orwell est un militant politique engag&eacute; dans le socialisme libertaire puis la guerre d&rsquo;Espagne. Bradbury est le seul &agrave; ne pas avoir une forte culture scientifique.</p> <p class="texte">Ces auteurs de dystopie inventent des perspectives scientifiques par anticipation en m&ecirc;lant plusieurs disciplines&nbsp;: informatique, psychologie, statistique, g&eacute;n&eacute;tique, sciences politiques, droit, etc. &agrave; l&rsquo;instar des projets scientifiques contemporains dont ceux qui associent neuroscience, informatique, biologie dans le seul but de la reproduction de l&rsquo;esprit. A cet &eacute;gard, il y peu de diff&eacute;rence entre l&rsquo;anticipation de ces auteurs combinant des sciences parfois &eacute;mergentes en les projetant du fait des potentialit&eacute;s qu&rsquo;ils devinent dans leurs d&eacute;veloppements futurs et les projets scientifiques actuels qui sont &agrave; cet &eacute;gard semblables. Ils font des hypoth&egrave;ses et promettent de les v&eacute;rifier par des travaux qui justifient un effort, voire des investissements pariant sur les usages politiques et &eacute;conomiques futures de ces r&eacute;sultats. Le projet des NBIC&nbsp;: nanotechnologies, biotechnologies, informatique sous l&rsquo;angle de l&rsquo;intelligence artificielle et de la robotique et cognitivisme travaillent explicitement &agrave; une convergence dont le but est l&rsquo;intelligence infinie sans humanit&eacute;. Du travail sur l&rsquo;infiniment petit en passant par les techniques de production du vivant sans oublier les machines pensantes li&eacute;es &agrave; l&rsquo;&eacute;tude et &agrave; la reproduction du cerveau humain, voil&agrave; bien une science qui avoue son intention technicienne et politique, puisque la plupart des promoteurs de cette initiative participent d&rsquo;un mouvement g&eacute;n&eacute;ral embrass&eacute; par le terme id&eacute;ologique de transhumanisme, qui lui aussi affiche son d&eacute;sir d&rsquo;un remplacement de l&rsquo;humain par son successeur&nbsp;: notre nouveau surhomme<sup><a class="footnotecall" href="#ftn25" id="bodyftn25">25</a></sup>. On y retrouve bien la th&eacute;orie de l&rsquo;&eacute;volution-s&eacute;lection, soit un prolongement du darwinisme social relay&eacute; par un machinisme d&eacute;passant l&rsquo;humain, on y retrouve bien l&rsquo;obsession de la mesurabilit&eacute; pour quantifier et comparer pour d&eacute;classer l&rsquo;humain face aux performances des diff&eacute;rentes solutions technologiques, on y retrouve bien encore la promesse de l&rsquo;am&eacute;lioration de l&rsquo;esp&egrave;ce commune aux projets totalitaires masquant &agrave; peine les cons&eacute;quences g&eacute;nocidaires et plus encore la n&eacute;cessit&eacute; de faire dispara&icirc;tre en grand nombre les sous-dou&eacute;s par la<em> genthanasie </em>de Raymond Cattell<sup><a class="footnotecall" href="#ftn26" id="bodyftn26">26</a></sup>. Ce n&rsquo;est plus le pauvre noir qui est d&eacute;valu&eacute; mais l&rsquo;humanit&eacute; toute enti&egrave;re complex&eacute;e par quelques machines pr&eacute;tendument plus performantes.</p> <p class="texte">La litt&eacute;rature de fiction d&eacute;peint tr&egrave;s bien ces projets contemporains o&ugrave; l&rsquo;intelligence se mesure, faisant de l&rsquo;activit&eacute; c&eacute;r&eacute;brale un processus que l&rsquo;on peut codifier, repr&eacute;senter puis mod&eacute;liser afin de le reproduire et de le d&eacute;velopper en combinant de nouveaux supports plus puissants que l&rsquo;intelligence humaine&nbsp;; sans pour autant la d&eacute;finir mais en comparant sans cesse des performances ponctuelles selon des crit&egrave;res tr&egrave;s sp&eacute;cifiques. L&rsquo;hypoth&egrave;se initiale de la pens&eacute;e calculante devient tr&egrave;s vite l&rsquo;affirmation qu&rsquo;il en est ou en sera ainsi aux termes des recherches, le d&eacute;bat &eacute;tant superf&eacute;tatoire en amont puisque l&rsquo;hypoth&egrave;se vaut d&rsquo;&ecirc;tre pos&eacute;e, mais certainement pas discut&eacute;e<sup><a class="footnotecall" href="#ftn27" id="bodyftn27">27</a></sup>. L&rsquo;entretien du fantasme de la parfaite similitude entre une machine calculante et l&rsquo;intelligence humaine suscite une attention et des investissements qui montrent que le projet politique est l&agrave;.</p> <p class="texte">Ces projets n&rsquo;ont plus rien de scientifique au sens d&rsquo;une connaissance descriptive du monde qui serait &agrave; comprendre. Il n&rsquo;est plus question de compr&eacute;hension mais de construction libre de toute contrainte au simple motif que cela est possible donc &agrave; faire. L&rsquo;assertion de la pens&eacute;e calculante est constructiviste et r&eacute;volutionnaire en ceci qu&rsquo;elle pr&eacute;tend s&rsquo;imposer par la preuve r&eacute;sultant de ses actes. Mais, pour cela, elle se doit de convaincre l&rsquo;humanit&eacute; qu&rsquo;elle est sans conscience jusqu&rsquo;&agrave; persuader les enfants qu&rsquo;ils ne sont qu&rsquo;une machine &agrave; calculer comme nous allons le constater prolongeant leur jeu et manette plus que l&rsquo;inverse. Mais qu&rsquo;en est-il au fond de cette assertion que la pens&eacute;e est calculante-calculable<sup><a class="footnotecall" href="#ftn28" id="bodyftn28">28</a></sup>&nbsp;? En quoi est-elle une dystopie&nbsp;? Elle l&rsquo;est pour deux raisons&nbsp;: l&rsquo;homme n&rsquo;est pas l&rsquo;homme neuronal d&eacute;crit par Jean-Pierre Changeux et l&rsquo;homme n&rsquo;est pas mesurable.</p> <p class="texte">Elle ram&egrave;ne l&rsquo;activit&eacute; humaine &agrave; celle restreinte du c&eacute;r&eacute;bral en oubliant qu&rsquo;elle se nourrit d&rsquo;un syst&egrave;me nerveux qui lui-m&ecirc;me interagit avec des organes procurant des sensations et perceptions&nbsp;: douleur, plaisir, &eacute;motion, etc. L&rsquo;&ecirc;tre humain n&rsquo;est pas son activit&eacute; c&eacute;r&eacute;brale. Il est respiration, app&eacute;tit, tension corporelle, stress, digestion, etc. Or, rien ne permet de pr&eacute;juger d&rsquo;une universelle algorithmie des saveurs et des app&eacute;tits, des odeurs et des inhalations ou des excitations et &eacute;motions sensorielles. Rien d&rsquo;autre que cette calculabilit&eacute; machinique d&eacute;roulant des op&eacute;rations pour adopter un comportement ou prendre une d&eacute;cision n&rsquo;a rien de fid&egrave;le &agrave; la r&eacute;alit&eacute; physiologique du corps humain. C&rsquo;est le sens des travaux de Berthoz<sup><a class="footnotecall" href="#ftn29" id="bodyftn29">29</a></sup>. Par cette seule affirmation d&rsquo;une science monolithique qui saurait dire la stricte et d&eacute;finitive v&eacute;rit&eacute;&nbsp;: attitude plus scientiste que scientifique nous semble-t-il, ne sommes-nous pas priv&eacute;s et donc non-autoris&eacute;s &agrave; pr&eacute;juger que cette repr&eacute;sentation s&rsquo;impose aux autres par une pure propagande politique, persuadant l&rsquo;homme de ce qu&rsquo;il devrait croire. La science cognitive dirait le vrai &agrave; la mani&egrave;re d&rsquo;une religion s&ucirc;r de son fait&nbsp;? Le psychologue politique y verra peut-&ecirc;tre une premi&egrave;re manipulation ancrant que nous sommes machine &agrave; force de nous le r&eacute;p&eacute;ter.</p> <p class="texte">La dystopie commence au moment o&ugrave; les sciences cognitives entreprennent d&rsquo;&eacute;duquer l&rsquo;enfant &agrave; se penser comme une machine dont il doit apprendre &agrave; ma&icirc;triser les productions pour pr&eacute;server sa propre utilit&eacute; sociale dans la soci&eacute;t&eacute; qui le dirige totalement dans son projet de d&eacute;veloppement au service du projet cognitiviste. La neurop&eacute;dagogie semble r&eacute;p&eacute;ter les pires &eacute;garements des psychologues russes et allemands manipulant les enfants dont l&rsquo;Etat est propri&eacute;taire par le droit<sup><a class="footnotecall" href="#ftn30" id="bodyftn30">30</a></sup>.</p> <p class="texte">La mesurabilit&eacute;-math&eacute;matisation est-elle la seule mani&egrave;re de construire un savoir sans qu&rsquo;aucune autre sorte de relation aux mondes et &agrave; soi ne puisse produire une connaissance&nbsp;? A cet &eacute;gard la science cognitive d&eacute;crit la connaissance sans examiner la contradiction dans les termes de sa pratique. En effet, ces savants usent d&rsquo;affirmation verbale de la calculabilit&eacute;. Si la pens&eacute;e &eacute;tait calcul, ces savants ne parleraient ni n&rsquo;argumenteraient, ils compteraient. Or, ils passent leur temps &agrave; vouloir nous convaincre. Leur pratique n&rsquo;est donc pas conforme avec leur affirmation. La g&eacute;n&eacute;ralisation de la mesure pr&eacute;tendant s&rsquo;appliquer &agrave; l&rsquo;esprit, la conscience, l&rsquo;intelligence reste un travail de codification de ph&eacute;nom&egrave;nes du vivant. Mais c&rsquo;est un d&eacute;bat philosophique et &eacute;pist&eacute;mologique o&ugrave; la math&eacute;matisation du monde n&rsquo;a pas d&rsquo;autre fondement qu&rsquo;un simple acte de foi initial. Toute g&eacute;n&eacute;ralisation comme celle de Dehaene<sup><a class="footnotecall" href="#ftn31" id="bodyftn31">31</a></sup> transforme la mesure en culte, donc en id&eacute;ologie de la quantit&eacute; vertueuse puisqu&rsquo;il ass&egrave;ne en m&ecirc;me temps qu&rsquo;elle est possible pour ces ph&eacute;nom&egrave;nes et intentionnelles pour guider une politique orient&eacute;e vers toujours plus d&rsquo;intelligence ou de connaissance. Voil&agrave; pourquoi, le psychologue ne peut mesurer na&iuml;vement sans devenir l&rsquo;instrument d&rsquo;un projet politique de contr&ocirc;le des populations.</p> <h2 class="texte" style="font-style:italic;">7. La psychom&eacute;trie comme id&eacute;ologie scientifique</h2> <p class="texte">Force est de constater que la psychom&eacute;trie des sciences cognitives participe d&rsquo;un projet politique in&eacute;dit de prise de contr&ocirc;le des populations par une normalisation des comportements et une codification des pens&eacute;es jusqu&rsquo;&agrave; nier les ph&eacute;nom&egrave;nes de conscience et toute sorte de libert&eacute; de conscience, celle-ci &eacute;tant d&rsquo;ailleurs promise &agrave; la r&eacute;probation &laquo;&nbsp;scientifique&nbsp;&raquo; comme &agrave; une autre &eacute;poque l&rsquo;existence des &acirc;mes, au nom d&rsquo;une pseudo-d&eacute;monstration de son inexistence du fait de la r&eacute;duction des pens&eacute;es &agrave; des algorithmes. Or ce projet rev&ecirc;t plusieurs traits d&rsquo;une pseudo-science, soit une id&eacute;ologie scientifique qui sera profess&eacute; avec autant de violence et d&rsquo;autorit&eacute; que le furent les th&eacute;ories eug&eacute;nistes ou raciales par une large part de la communaut&eacute; scientifique occidentale au 19<sup>e</sup> et 20<sup>e</sup> si&egrave;cle.</p> <p class="texte">Le cognitivisme est messianique en pr&eacute;tendant faire ici ce que les religions promettent ailleurs&nbsp;: l&rsquo;immortalit&eacute; par des techniques de conservation dont la cryog&eacute;nisation, le transfert de la conscience sur des supports physiques, des progr&egrave;s technologiques produisant une intelligence sup&eacute;rieure et augment&eacute;e et une disparition du vieillissement biologique. Tout cela rappelle la migration des &acirc;mes, la r&eacute;incarnation, la promesse d&rsquo;&eacute;ternit&eacute; paradisiaque en soi. Ce ne sont plus des connaissances mais des promesses, voire des programmes consommateurs de capitaux consid&eacute;rables dont les investisseurs partagent les vues. Il y a donc une <em>id&eacute;ologie scientifique</em> tout &agrave; fait comparable &agrave; celle de l&rsquo;&eacute;poque des th&eacute;ories eug&eacute;nistes qui motiv&egrave;rent toutes les pratiques g&eacute;nocidaires du 20<sup>e</sup> si&egrave;cle.</p> <h2 class="texte" style="font-style:italic;">8. Le projet d&rsquo;une pens&eacute;e automatique sans conscience</h2> <p class="texte">Nous sommes &agrave; ce n&oelig;ud gordien de l&rsquo;insinuation de la mesure comme seule source de connaissance devenant la norme implicite de la pens&eacute;e vraie. La fausse piste tient &agrave; cette foi en la seule quantification dont nous avons montr&eacute; dans un pr&eacute;c&eacute;dent article toutes les limites<sup><a class="footnotecall" href="#ftn32" id="bodyftn32">32</a></sup>. Faire acte de connaissance suppose autre chose que de mesurer. Pour cela, il faut consid&eacute;rer la pens&eacute;e et la conscience comme un autre objet qu&rsquo;un instrument mesurable en se d&eacute;tournant de l&rsquo;hypoth&egrave;se initiale de Wolff. Il faut se d&eacute;tourner de cette obsession de la quantification consid&eacute;rant qu&rsquo;elle serait la seule mani&egrave;re de faire science. Mais surtout, la calculabilit&eacute; des fins politiques comme en son temps le d&eacute;nombrement des populations soutenues par Leibniz aupr&egrave;s des princes allemands afin de ma&icirc;triser des &ecirc;tres sur son territoire. Cette fascination pour les nombres &eacute;loigne de la compr&eacute;hension et de la signification au profit de la domination et de la reproduction possible des &eacute;v&eacute;nements ainsi mesur&eacute;s pour &ecirc;tre r&eacute;p&eacute;tables. Si la science devait &ecirc;tre un unique projet de calculabilit&eacute;, alors elle ne serait plus la recherche de la connaissance, mais la d&eacute;mesure d&rsquo;un projet politique, soit cette dystopie que nous critiquons ici. La prise de pouvoir sur l&rsquo;esprit de l&rsquo;autre en est &eacute;videmment la finalit&eacute; avec les ruses et les astuces de circonstances qui font de chacun l&rsquo;esclave consentant de cette domination quand l&rsquo;ali&eacute;nation devient d&eacute;sirable &agrave; la mani&egrave;re d&rsquo;une pens&eacute;e automatique<sup><a class="footnotecall" href="#ftn33" id="bodyftn33">33</a></sup>.</p> <p class="texte">La calculabilit&eacute; traduit une aspiration &agrave; ne pas penser. Ce r&ecirc;ve-cauchemar de cette pens&eacute;e automatique lib&egrave;re de l&rsquo;&eacute;tat de conscience et de ses multiples entraves &agrave; l&rsquo;exercice du pouvoir contr&ocirc;lant des ex&eacute;cutants. A cet &eacute;gard, il faut noter une convergence surprenante entre les deux acceptions de la pens&eacute;e automatique. L&rsquo;une r&eacute;sulte de la succession des op&eacute;rations calculables en vertu d&rsquo;un d&eacute;veloppement pr&eacute;visible des &eacute;tapes successives d&rsquo;un raisonnement par des d&eacute;ductions oblig&eacute;es, l&rsquo;autre r&eacute;sulte d&rsquo;une expression imm&eacute;diate sans interf&eacute;rence des censures de la conscience o&ugrave; des parties de l&rsquo;esprit d&eacute;nomm&eacute;es Moi ou &Ccedil;a dans les topiques freudiennes par exemple. L&rsquo;&eacute;criture automatique s&rsquo;abstrait des interf&eacute;rences de la volont&eacute; et de la conscience lib&eacute;rant une expression de l&rsquo;inconscient. De m&ecirc;me les spirites y voient la mani&egrave;re de communiquer et d&rsquo;exprimer les pens&eacute;es d&rsquo;esprits: la psychographie. Dans toutes ces acceptions, un m&ecirc;me processus de purification est mis en avant. Le d&eacute;roul&eacute; du raisonnement formel est tout aussi automatique, d&rsquo;ailleurs reproductible dans la machine de Turing, l&rsquo;&eacute;criture spirite dissocie l&rsquo;auteur de lui-m&ecirc;me au profit de l&rsquo;expression d&rsquo;un autre esprit qui se substitue &agrave; soi et l&rsquo;&eacute;criture po&eacute;tique automatique fait s&rsquo;exprimer un &laquo;&nbsp;autre moi&nbsp;&raquo; plus profond par-del&agrave; la conscience et la volont&eacute;. Notons qu&rsquo;il est &agrave; chaque fois question d&rsquo;une dissociation mentale, d&rsquo;une n&eacute;gation de la conscience.</p> <p class="texte">La promesse de cette robotisation de la pens&eacute;e n&rsquo;est pas sans rappeler ces enfants se r&ecirc;vant un instant en locomotive ou en grue, saccadant les mouvements de leurs bras et en soufflant comme une machine, r&ecirc;ve machinique d&eacute;j&agrave; pr&eacute;sent dans l&rsquo;antiquit&eacute;. Devenir un automate, devenir l&rsquo;instrument d&rsquo;un esprit autre, devenir le po&egrave;te libre de ses obstacles psychologiques, devenir la machine qui ne pense pas, sorte de libert&eacute; ali&eacute;nante pour &ecirc;tre l&rsquo;ex&eacute;cutant libre car inconscient. Mais c&rsquo;est le jeu d&rsquo;un instant o&ugrave; la conscience se joue et se d&eacute;joue conf&eacute;rant &agrave; ces instants le charme propre d&rsquo;une &eacute;vasion temporaire. Jouer &agrave; l&rsquo;automate n&rsquo;est pas le devenir. L&rsquo;&ecirc;tre serait la n&eacute;gation m&ecirc;me de se savoir dessaisi de sa conscience d&rsquo;&ecirc;tre. C&rsquo;est bien l&agrave; une manipulation sectaire o&ugrave; l&rsquo;homme perdrait sa libert&eacute; dans un voyage sans retour, comme dans une promesse prom&eacute;th&eacute;enne devenant un fatal pi&egrave;ge faustien.</p> <p class="texte">Cette pr&eacute;tendue objectivit&eacute; scientifique dont nous avons montr&eacute; qu&rsquo;elle est tout enti&egrave;re habit&eacute;e par le principe d&rsquo;apathie<sup><a class="footnotecall" href="#ftn34" id="bodyftn34">34</a></sup> dont Sade est l&rsquo;illustre repr&eacute;sentant nous conduit &agrave; cette promesse tr&egrave;s nietzsch&eacute;enne d&rsquo;un par-del&agrave; le bien et le mal conduisant &agrave; la disparition de la conscience. Ce grand retour au paganisme romain peut-il conduire &agrave; autre chose qu&rsquo;aux m&ecirc;mes violences imp&eacute;riales? L&rsquo;empire est &agrave; lui-m&ecirc;me sa raison d&rsquo;&ecirc;tre mais il sera barbare, puisque sans conscience, tous les crimes seront prescrits, comme Sade accomplit ces forfaits en homme de science. Et dans ce monde-l&agrave;, le vrai fauteur de trouble sera celui qui aurait conscience, bonne ou mauvaise. Celui-l&agrave; sera &agrave; faire taire comme d&eacute;j&agrave; les cognivistes pr&eacute;tendent enseigner que la conscience n&rsquo;est rien que quelques calculs. L&rsquo;humaniste ne peut viser sans se contredire cette ali&eacute;nation de l&rsquo;homme.</p> <p class="texte">C&rsquo;est pourquoi la psychologie politique doit &eacute;tendre ses horizons comme nous le proposions d&egrave;s l&rsquo;introduction. Il faut prendre une distance tr&egrave;s critique avec le discours scientifique et technique, il faut approfondir l&rsquo;aspect clinique de ces attitudes obsessionnelles qui d&eacute;naturent l&rsquo;homme au pr&eacute;texte m&ecirc;me de le d&eacute;finir &agrave; sa mani&egrave;re. Mais la psychologie politique peut-elle devenir une connaissance d&rsquo;avant-garde, une autre fa&ccedil;on de contribuer au savoir humain en refusant de s&rsquo;assujettir &agrave; des conventions interrogeables dont le fanatisme aveugle de la mesure qui instrumentalise tout ce qu&rsquo;il repr&eacute;sente? Si la science ne peut d&eacute;river en une unique technique de ce que l&rsquo;on ma&icirc;trise par sa reproduction, elle a d&rsquo;autres dimensions de la connaissance &agrave; satisfaire. Ce sera l&rsquo;objet d&rsquo;un prochain travail, entre psychologie, &eacute;pist&eacute;mologie et l&rsquo;enseignement d&rsquo;un si&egrave;cle de ph&eacute;nom&eacute;nologie.</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn1" id="ftn1">1</a> Consulter <em>G&eacute;n&eacute;alogie et limite de la rh&eacute;torique des nombres</em> in Argumentum, 2019, volume 17.2, p.&nbsp;36-56</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn2" id="ftn2">2</a> Voir l&rsquo;article <em>Esquisse d&rsquo;une psycho-sociologie cognitive du politique</em> in Cahiers de psychologie politique, 2017 n&deg;&nbsp;31 et plus particuli&egrave;rement la partie qui pr&eacute;sente les th&egrave;mes de la psychologie politique selon Deutsch&nbsp;: <em>Les fondateurs de la psychologie politique nous ont ouvert des voies</em> qui reprend son expos&eacute;. Les th&egrave;mes sont&nbsp;: l&rsquo;individu acteur politique, les mouvements politiques, les politiciens et dirigeants, les adh&eacute;sions et structures politiques, les relations politiques entre les groupes, les processus politiques.</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn3" id="ftn3">3</a> Robert Woodworth (1869-1962), psychologue am&eacute;ricain, &eacute;l&egrave;ve de William James fondateur de la psychologie en Am&eacute;rique et auteur de&nbsp;: <em>Les principes de psychologie</em>. Il formalise des notions de psychom&eacute;trie dont l&rsquo;&eacute;quation comportementale et cr&eacute;e le premier test de personnalit&eacute;&nbsp;: Woodworth Personal Data Sheet (WPDS) utilis&eacute; lors de la premi&egrave;re guerre mondiale.</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn4" id="ftn4">4</a> Katherine Cook Briggs (1875-1968) et sa fille Isabel Briggs Myers (1897-1980) cr&eacute;ent le MBTI qui s&rsquo;appuie sur les oppositions jungiennes des caract&egrave;res humains&nbsp;: extraversion/introversion, bon sens/intuition, et pens&eacute;e/sentiment y ajoutant jugement/perception.</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn5" id="ftn5">5</a> Francis Galton (1829-1911) fait le lien entre les th&eacute;ories de l&rsquo;&eacute;volution de son cousin Darwin avec le calcul statistique qui aboutit &agrave; ses th&eacute;ories sur la s&eacute;lection naturelle puis sur l&rsquo;eug&eacute;nisme dont il est l&rsquo;initiateur. Il formalise des m&eacute;thodes statistiques appliqu&eacute;es en psychologie, fonde la revue Biometrika avec Karl Pearson et d&eacute;fend la th&egrave;se de l&rsquo;h&eacute;ritage g&eacute;n&eacute;tique, la pr&eacute;&eacute;minence des caract&egrave;res h&eacute;r&eacute;ditaires autorisant la s&eacute;lection des individus par la mesure de leur facult&eacute;. Il inspire les politiques d&rsquo;hygi&egrave;ne raciale en Su&egrave;de d&eacute;fendant la st&eacute;rilisation ou l&rsquo;&eacute;limination des &laquo;&nbsp;d&eacute;viants&nbsp;&raquo; dont les caract&egrave;res psychologiques sont jug&eacute;s insatisfaisants pour une soci&eacute;t&eacute; performante&nbsp;: alcooliques, schizophr&egrave;nes, handicap&eacute;s mentaux, etc. au nom de leur caract&egrave;re h&eacute;r&eacute;ditaire. Karl Pearson (1857-1936) contribue &agrave; cr&eacute;er la biom&eacute;trie et d&eacute;veloppe des th&egrave;ses eug&eacute;nistes motiv&eacute;es par des travaux statistiques aux conclusions hasardeuses.</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn6" id="ftn6">6</a> James McKeen Cattell (1860-1944) se consacre &agrave; la mesure dans le but de rationaliser les travaux de psychologie. Dans son fameux article <em>La mesure de l&rsquo;intelligence</em>, il pr&eacute;cise sa relation et loyaut&eacute; aux travaux de Galton&nbsp;: &laquo;&nbsp;<em>Mr Francis Galton, dans son laboratoire anthropom&eacute;trique au mus&eacute;e de Kensington sud, utilise d&eacute;j&agrave; certains de ces tests et j&#39;esp&egrave;re que les s&eacute;ries propos&eacute;es ici rencontreront son approbation. Il est commode de suivre Mr Galton en combinant des tests physiques comme le poids, la taille, la couleur des yeux etc., avec des &eacute;valuations psychophysiques et mentales, mais ce sont ces derni&egrave;res qui font l&#39;objet de la pr&eacute;sente discussion.</em>&nbsp;&raquo; note 1 (2003, 262)</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn7" id="ftn7">7</a> WilhelmWundt (1832-1920) est un des fondateurs de la psychologie exp&eacute;rimentale moderne, formateur des principaux psychologues occidentaux dans son laboratoire de Leipzig fond&eacute; en 1879. Penseur syst&eacute;mique dans la tradition de la philosophie allemande h&eacute;rit&eacute;e de Wolff, il est l&rsquo;auteur d&rsquo;une psychologie des peuples publi&eacute;e en 1904 appel&eacute;e psychologie ethnique. Wundt fait l&rsquo;hypoth&egrave;se de comportements homog&egrave;nes au sein des groupes ethniques et nationaux. Cette classification des caract&egrave;res ethniques conduit ensuite &agrave; leur hi&eacute;rarchisation en vertu de leur rationalit&eacute; au titre m&ecirc;me de leur mesure scientifique.</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn8" id="ftn8">8</a> Robert Yerkes (1876-1956) d&eacute;veloppe des tests. Il soutiendra des restrictions &agrave; l&rsquo;immigration et des th&egrave;ses eug&eacute;nistes participant aux institutions eug&eacute;nistes dont celle du biologiste Charles Davenport (1866-1944), influenc&eacute; par Galton. I il fonde un laboratoire dont le but est d&rsquo;am&eacute;liorer l&rsquo;esp&egrave;ce humaine par la s&eacute;lection h&eacute;r&eacute;ditaire. Il est un des inspirateurs de la &laquo;&nbsp;science politique&nbsp;&raquo; mise en &oelig;uvre par le national-socialisme allemand.</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn9" id="ftn9">9</a> David Weschler (1896-1981) d&eacute;veloppe des tests d&rsquo;intelligence tr&egrave;s largement utilis&eacute;s dont le Wechsler Adult Intelligence Scale (WAIS), le Wechsler Intelligence Scale for Children (WISC), le Wechsler Preschool and Primary Scale of Intelligence (WPPSI). Il collabore avec Karl Pearson et s&rsquo;inspire des tests fran&ccedil;ais d&rsquo;Alfred Binet et Th&eacute;odore Simon. Il est form&eacute; par Robert Woodworth et James McKeen Cattell &agrave; l&rsquo;universit&eacute; de Columbia.</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn10" id="ftn10">10</a> La pleine correspondance entre physiologie et psychologie renvoie &agrave; un naturalisme o&ugrave; la mat&eacute;rialit&eacute; du vivant expliquerait la totalit&eacute; des ph&eacute;nom&egrave;nes du vivant. Cette position philosophique n&rsquo;a pas plus de cr&eacute;dit a priori qu&rsquo;une autre qui les dissocierait en affirmant que les ph&eacute;nom&egrave;nes de la conscience sont support&eacute;s sans &ecirc;tre totalement d&eacute;pendant de la physiologie. Et la n&eacute;gation de l&rsquo;esprit ou de la conscience en est le r&eacute;sultat imm&eacute;diat comme l&rsquo;affirme Jean-Pierre Changeux dans l&rsquo;homme neuronal&nbsp;:&nbsp;&laquo;&nbsp;<em>L&rsquo;identit&eacute; entre les &eacute;tats mentaux et les &eacute;tats physiologiques du cerveau s&rsquo;impose en toute l&eacute;gitimit&eacute;. Il n&rsquo;y a plus que deux aspects d&rsquo;un seul et m&ecirc;me &eacute;v&eacute;nement que l&rsquo;on pourra d&eacute;crire avec des termes emprunt&eacute;s, soit au langage de la psychologie, soit &agrave; celui de la neurobiologie. A quoi bon d&eacute;sormais parler d&rsquo;esprit&nbsp;?&nbsp;</em>&raquo; (1983, 334). A l&rsquo;inverse, il faut lire l&rsquo;&oelig;uvre de David Chalmers s&rsquo;attachant &agrave; montrer l&rsquo;extr&ecirc;me complexit&eacute; de la question de la conscience et de l&rsquo;esprit contredisant la th&egrave;se mat&eacute;rialiste jusqu&rsquo;&agrave; la discr&eacute;diter tr&egrave;s largement&nbsp;: <em>L&rsquo;esprit conscient</em> (2010) chez Ithaque ou celles &eacute;rudites de Jaegwon Kim dont <em>Philosophie de l&rsquo;esprit</em> (2010). Ils attestent d&rsquo;une situation &agrave; ce jour ind&eacute;cidable pleine d&rsquo;hypoth&egrave;ses qui ne sauraient s&rsquo;exposer comme des v&eacute;rit&eacute;s acquises.</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn11" id="ftn11">11</a> Raymond Cattell (1905-1988) d&eacute;veloppe des tests de mesure de l&rsquo;intelligence en distinguant les processus d&rsquo;apprentissage de l&rsquo;intelligence fluide et les connaissances m&eacute;moris&eacute;es de l&rsquo;intelligence cristallis&eacute;e. Il d&eacute;veloppe des th&egrave;ses eug&eacute;nistes inspir&eacute;es de Galton et motiv&eacute;es par la s&eacute;lection des populations puis invente une religion&nbsp;: le beyondism, fond&eacute; sur l&rsquo;autorit&eacute; des r&eacute;sultats scientifiques en publiant&nbsp;: <em>Religion from science</em> chez Praeger en 1987.</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn12" id="ftn12">12</a> Consulter l&rsquo;ouvrage dirig&eacute;e par Florence Piron&nbsp;: <em>Et si la recherche scientifique ne pouvait pas &ecirc;tre neutre&nbsp;? </em>publi&eacute; en 2019 aux Editions Science et Bien Commun (Qu&eacute;bec) dont notre contribution&nbsp;: <em>De l&#39;impossible neutralit&eacute; axiologique &agrave; la pluralit&eacute; des pratiques</em>, p.&nbsp;39-54.</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn13" id="ftn13">13</a> Consulter nos deux articles sur <em>La psychologie de la quantit&eacute; et l&rsquo;avenir de la pens&eacute;e occidentale </em>et <em>La raison totalitaire et morbide</em> dans le n&deg;&nbsp;33 des cahiers de psychologie politique</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn14" id="ftn14">14</a> Otmar von Verschuer, &laquo;&nbsp;<em>Woran erkennt man die Erblichkeit k&ouml;rperlicher Missbildungen&nbsp;?</em>&nbsp;&raquo;, <em>Archiv f&uuml;r klinische Chirurgie</em>, 1938, cit&eacute; p.&nbsp;185.</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn15" id="ftn15">15</a> Charles Davenport (1866-1944) est un biologiste am&eacute;ricain connu pour ses positions eug&eacute;nistes o&ugrave; la population humaine est compar&eacute;e un cheptel &agrave; faire &eacute;voluer selon des lois d&rsquo;h&eacute;r&eacute;dit&eacute;s et de s&eacute;lection. Il rencontre Galton et participe au congr&egrave;s international d&rsquo;eug&eacute;nisme de Londres en 1912. Le lecteur peut se reporter &agrave; la tr&egrave;s brillante synth&egrave;se de Jacque L&eacute;onard&nbsp;: <em>Le premier Congr&egrave;s international d&#39;eug&eacute;nique (Londres, 1912) et ses cons&eacute;quences fran&ccedil;aises, </em>communication pr&eacute;sent&eacute;e &agrave; la s&eacute;ance du 19 mars 1983 de la Soci&eacute;t&eacute; fran&ccedil;aise d&#39;histoire de la M&eacute;decine.</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn16" id="ftn16">16</a> Georges-Louis Leclerc de Buffon (1707-1788) d&eacute;veloppe la th&eacute;orie de la d&eacute;g&eacute;n&eacute;rescence li&eacute;e au climat. Voltaire a des positions qu&rsquo;il faut rappeler&nbsp;: <em>&laquo;&nbsp;Nous n&#39;achetons des esclaves domestiques que chez les N&egrave;gres&nbsp;; on nous reproche ce commerce. Un peuple qui trafique de ses enfants est encore plus condamnable que l&#39;acheteur. Ce n&eacute;goce d&eacute;montre notre sup&eacute;riorit&eacute;&nbsp;; celui qui se donne un ma&icirc;tre &eacute;tait n&eacute; pour en avoir.&nbsp;</em>&raquo; dans <em>Essai sur les m&oelig;urs et l&rsquo;esprit des nations</em> publi&eacute; en 1753 ou bien encore &laquo;&nbsp;<em>Les Blancs sont sup&eacute;rieurs &agrave; ces N&egrave;gres, comme les N&egrave;gres le sont aux singes, et comme les singes le sont aux hu&icirc;tres.</em>&nbsp;&raquo; dans son <em>Trait&eacute; de m&eacute;taphysique</em>, voire&nbsp;:&nbsp;&laquo;&nbsp;<em>C&#39;est &agrave; regret que je parle des juifs&nbsp;: cette nation est, &agrave; bien des &eacute;gards, la plus d&eacute;testable qui ait jamais souill&eacute; la terre.&nbsp;</em>&raquo; dans <em>Le dictionnaire philosophique</em> publi&eacute; en 1769. Son racisme av&eacute;r&eacute; le conduit &agrave; consid&eacute;rer comme un principe les origines distinctes de plusieurs races humaines. Kant colporte la th&eacute;orie des climats comme Montesquieu et d&eacute;nigre les n&egrave;gres dans une anthropologie dont les mesures scientifiques sont confondantes dans <em>Observations sur le sentiment du beau et du sublime</em>. Lire l&rsquo;&oelig;uvre de Xavier Martin&nbsp;: <em>Naissance du sous-homme au c&oelig;ur des Lumi&egrave;res</em>, publi&eacute; chez Dominique Martin Morin en 2014 ou <em>R&eacute;g&eacute;n&eacute;rer l&#39;esp&egrave;ce humaine&nbsp;: Utopie m&eacute;dicale et Lumi&egrave;res </em>publi&eacute; en 2008 o&ugrave; le juriste fait un travail sans concession ou <em>Le code noir ou le calvaire de Canaan</em> de Louis Sala-Molins publi&eacute; en 2018 aux PUF qui retrace la g&eacute;n&eacute;alogie philosophique du Code Noir ou l&rsquo;&eacute;tude philosophique de Philippe Huneman&nbsp;: <em>H&eacute;r&eacute;dit&eacute; et adaptation&nbsp;: la conception kantienne des races et des esp&egrave;ces</em>.</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn17" id="ftn17">17</a> La th&eacute;orie des climats date de Ptol&eacute;m&eacute;e et a &eacute;t&eacute; enrichie par les astrologues et g&eacute;ographes orientaux dont Al-Idrisi (vers 1100-vers 1170). La g&eacute;n&eacute;alogie va de sa traduction par le m&eacute;decin Hunayn ibn Ishaq (808-873) connue sous le nom d&rsquo;Almageste. Leurs propos annoncent ceux de Montesquieu ci-apr&egrave;s fid&egrave;les &agrave; ceux de l&rsquo;historien Sa&iuml;d ibn Ahmad Al-Andalusi (1029-1070) qui d&eacute;crit sept grandes familles de peuples par rapport &agrave; chaque climat&nbsp;: &laquo;&nbsp;<em>L&rsquo;air est br&ucirc;lant et le climat ext&eacute;rieur subtil. Ainsi le temp&eacute;rament des S&ucirc;dans devient-il ardent et leurs humeurs s&rsquo;&eacute;chauffent&nbsp;; c&rsquo;est pourquoi ils sont noirs de couleur et leur cheveux cr&eacute;pus. Pour cette raison sont an&eacute;antis tout &eacute;quilibre des jugements et toute s&ucirc;ret&eacute; d&rsquo;appr&eacute;ciation. En eux c&rsquo;est la l&eacute;g&egrave;ret&eacute; qui l&rsquo;emporte et la stupidit&eacute; et l&rsquo;ignorance qui dominent</em>&nbsp;&raquo;. Elle affirme le lien des caract&egrave;res humains selon les climats et latitudes en vertu des temp&eacute;ratures, positions des astres et dur&eacute;e des saisons et des r&eacute;gimes diurnes et nocturnes. Montesquieu reprend cette th&eacute;orie dans son &oelig;uvre majeure&nbsp;: <em>L&rsquo;esprit des lois</em>. En hi&eacute;rarchisant les climats, il hi&eacute;rarchise par induction les races qui les habitent et justifient toutes les mesures qui promeuvent des climats et leurs occupants&nbsp;: &laquo;&nbsp;<em>&laquo;&nbsp;Les peuples des pays chauds sont timides comme les vieillards le sont&nbsp;; ceux des pays froids sont courageux comme le sont les jeunes gens.&nbsp;(...) nous sentons bien que les peuples du nord, transport&eacute;s dans les pays du midi, n&#39;y ont pas fait d&#39;aussi belles actions que leurs compatriotes qui, combattant dans leur propre climat, y jouissent de tout leur courage.&nbsp;(...) Vous trouverez dans les climats du nord des peuples qui ont peu de vices, assez de vertus, beaucoup de sinc&eacute;rit&eacute; et de franchise. Approchez des pays du midi vous croirez vous &eacute;loigner de la morale m&ecirc;me&nbsp;; des passions plus vives multiplient les crimes&nbsp;(...) La chaleur du climat peut &ecirc;tre si excessive que le corps y sera absolument sans force. Pour lors l&#39;abattement passera &agrave; l&#39;esprit m&ecirc;me&nbsp;: aucune curiosit&eacute;, aucune noble entreprise, aucun sentiment g&eacute;n&eacute;reux&nbsp;; les inclinations y seront toutes passives&nbsp;; la paresse y sera le bonheur&nbsp;&raquo;. </em>(Livre XIV, chap.&nbsp;II). Montesquieu fonde la th&eacute;orie des races par l&rsquo;interd&eacute;pendance des climats et de la psychologie des ethnies que Wundt reprendra formellement plus tard. Concernant Sa&iuml;d ibn Ahmad Al-Andalusi, lire&nbsp;: <em>Sā&#39;Id Ibn Ahmad Al-Andalusī, La Science dans le monde m&eacute;di&eacute;val&nbsp;: Livre des cat&eacute;gories de nations</em>, traduit et &eacute;dit&eacute; par Sema&#39;an I. Salem et Alok Kumar. Austin aux Presses de l&#39;Universit&eacute; du Texas en 1992.</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn18" id="ftn18">18</a> Johan Friedrich Blumenbach (1752-1840) m&eacute;decin et biologiste publie en 1775 son essai sur la vari&eacute;t&eacute; des races humaines&nbsp;: <em>De generis humani variatione nativa</em>, promoteur d&rsquo;une histoire de l&rsquo;humanit&eacute; o&ugrave; la d&eacute;g&eacute;n&eacute;rescence r&eacute;sulte de l&rsquo;exposition &agrave; des climats qui maintiennent ou affecte l&rsquo;esp&egrave;ce.</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn19" id="ftn19">19</a> <span lang="en" xml:lang="en">Heinrich Poll (1877-1939), &laquo;&nbsp;&Uuml;ber Vererung beim Menschen&nbsp;&raquo;, Die Grenzboten, 73, 1914, p.&nbsp;247-259, cit. p.&nbsp;308. </span></p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn20" id="ftn20">20</a> Quelques figures scientifiques obtiennent de la R&eacute;publique de Weimar la cr&eacute;ation de cet institut dont&nbsp;: Eugen Fischer (1874-1967) th&eacute;oricien de l&rsquo;hygi&egrave;ne raciale et premier directeur de l&rsquo;institut Wilhelm concluant &agrave; la dangerosit&eacute; de la mixit&eacute; entre les allemands et les Hereros de Namibie, l&eacute;gitimant une politique de st&eacute;rilisation des femmes Hereros puis le g&eacute;nocide dans les camps d&rsquo;extermination namibiens d&egrave;s 1904 o&ugrave; environ 80.000 personnes seront ex&eacute;cut&eacute;es par les soldats du IIe Reich.</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn21" id="ftn21">21</a> Benoit Massin, <em>Apprendre &agrave; classer et &agrave; s&eacute;lectionner. L&rsquo;enseignement de l&rsquo;eug&eacute;nisme, de l&rsquo;hygi&egrave;ne raciale et de la raciologie dans les universit&eacute;s allemandes (1930-1945)</em>, 2005, in Revue d&rsquo;Histoire de la Shoah, n&deg;&nbsp;183, p. p.&nbsp;268</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn22" id="ftn22">22</a> Georges Canguilhem (1904-1995) philosophe et m&eacute;decin, historien des sciences est connu pour&nbsp;: <em>Le normal et le pathologique</em> publi&eacute; en 1966. Nous nous r&eacute;f&eacute;rons ici &agrave; un texte moins connu o&ugrave; il invente l&rsquo;expression d&rsquo;<em>id&eacute;ologie</em> <em>scientifique </em>qu&rsquo;il analyse pour en tirer quelques enseignements majeurs. <em>Id&eacute;ologie et rationalit&eacute; dans l&#39;histoire des sciences de la vie</em> publi&eacute; en 1977. &laquo;&nbsp;<em><strong>a</strong></em><em>/ Les id&eacute;ologies scientifiques sont des syst&egrave;mes explicatifs dont l&rsquo;objet est hyperbolique, relativement &agrave; la norme de scientificit&eacute; qui lui est appliqu&eacute;e par emprunt. </em><em><strong>b</strong></em><em>/ Il y a toujours une id&eacute;ologie scientifique avant une science dans le champ o&ugrave; la science viendra s&rsquo;instituer&nbsp;; il y a toujours une science avant une id&eacute;ologie, dans un champ lat&eacute;ral que cette id&eacute;ologie vise obliquement. </em><em><strong>c</strong></em><em>/ L&rsquo;id&eacute;ologie scientifique ne doit pas &ecirc;tre confondue avec les fausses sciences, ni avec la magie, ni avec la religion. Elle est bien, comme elles, mue par un besoin inconscient d&rsquo;acc&egrave;s &agrave; la totalit&eacute;, mais elle est une croyance qui louche du c&ocirc;t&eacute; d&rsquo;une science d&eacute;j&agrave; institu&eacute;e, dont elle reconna&icirc;t le prestige et dont elle cherche &agrave; imiter le style.</em>&nbsp;&raquo; (1977, 44) Le point <strong>a</strong>/ suffit &agrave; caract&eacute;riser l&rsquo;ambition hyperbolique des pythagoriciens et leur succ&eacute;dan&eacute;s cognitivistes contemporains.</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn23" id="ftn23">23</a> Lire les articles de Giulia Anichini&nbsp;montrant les approximations des m&eacute;thodes d&rsquo;imagerie c&eacute;r&eacute;brale&nbsp;: les bricolages, dans le but de respecter scrupuleusement l&rsquo;hypoth&egrave;se de la localisation par des techniques d&rsquo;occultation des r&eacute;sultats d&eacute;viants&nbsp;: <em>La neutralit&eacute; en question dans la production du savoir sur le cerveau</em> publi&eacute; dans <em>Et si la recherche scientifique ne pouvait pas &ecirc;tre neutre&nbsp;? </em>(2019, p.&nbsp;67-79). Elle a publi&eacute; <em>Quand c&rsquo;est la science qui bricole, c&rsquo;est du s&eacute;rieux</em>‪<em>. Bricolage d&rsquo;objets et d&rsquo;images dans le domaine des neurosciences</em> dans Techniques &amp; Culture 2013/2, n&deg;&nbsp;61, p.&nbsp;212-235. ‬‬‬‬‬‬‬‬</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn24" id="ftn24">24</a> Michel Blay et Christian Laval ont r&eacute;cemment publi&eacute; <em>Neurop&eacute;dagogie. Le cerveau au centre de l&rsquo;&eacute;cole</em> dans lequel ils analysent les erreurs de raisonnement et de m&eacute;thode de Dehaene et de nombreux cogniticiens avec leurs effets sur la psychologie enfantine entretenant le mythe d&rsquo;une d&eacute;sincarnation o&ugrave; l&rsquo;enfant n&rsquo;est plus que son cerveau et ce dernier un algorithme en marche.</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn25" id="ftn25">25</a> Gilbert Hottois le r&eacute;sume clairement en ces termes&nbsp;: &laquo;&nbsp;&laquo;&nbsp;<em>Un mouvement philosophique de transition vers un stade sup&eacute;rieur d&rsquo;&eacute;volution de l&rsquo;esp&egrave;ce humaine, d&eacute;lib&eacute;r&eacute;ment poursuivi. Ce courant d&rsquo;id&eacute;es r&eacute;cup&egrave;re l&rsquo;Humanisme traditionnel afin de lui adjoindre les techniques &laquo;&nbsp;d&rsquo;am&eacute;lioration&nbsp;&raquo; des capacit&eacute;s physiques et cognitives dans un but de d&eacute;passement des limites &ndash; naturelles, biologiques &ndash; et d&rsquo;adaptation perp&eacute;tuelle au monde.</em>&nbsp;&raquo; (2015, 163)</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn26" id="ftn26">26</a> La <em>genthanasie</em> fait l&rsquo;apologie de la bonne mort qu&rsquo;on donne scientifiquement pour des motifs s&eacute;rieux et acceptables et qui s&rsquo;applique de nouveau dans nos soci&eacute;t&eacute;s sur des individus dont il s&rsquo;agit de montrer qu&rsquo;ils en sont les premiers demandeurs annon&ccedil;ant bien la strat&eacute;gie de Cattel qui transmute le g&eacute;nocide en consid&eacute;rant que des groups humains se donneront la mort, conscient de leur limite &eacute;volutive. Signalons que Cattell &eacute;tait oppos&eacute; &agrave; toute forme d&rsquo;aide aux pays sous-d&eacute;velopp&eacute; pour cette raison.</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn27" id="ftn27">27</a> Michel Blay r&eacute;sume tr&egrave;s bien cette circularit&eacute; du raisonnement&nbsp;: &laquo;&nbsp;<em>Les errements que nous venons de d&eacute;crire et que chantent les h&eacute;rauts des neurosciences computationnelles r&eacute;sultent d&rsquo;une grave faute de raisonnement sur laquelle nous devons revenir une derni&egrave;re fois en conclusion, faute nourrie par l&rsquo;orgueil et la suffisance scientiste, si ce n&rsquo;est par une ambition totalitaire neuro-politique&nbsp;: cette faute appara&icirc;t lorsqu&rsquo;une hypoth&egrave;se est prise comme une v&eacute;rit&eacute; &agrave; pr&eacute;tention normative disant le r&eacute;el. La &laquo;&nbsp;science&nbsp;&raquo; devient alors une id&eacute;ologie pouvant servir &agrave; toutes les manipulations.</em>&nbsp;&raquo; (2019, 81)</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn28" id="ftn28">28</a> Stanislas Dehaene est cat&eacute;gorique sur ce point&nbsp;: &laquo;&nbsp;<em>Les forces [des sciences cognitives] c&rsquo;est d&rsquo;&ecirc;tre capable de d&eacute;terminer l&rsquo;organisation des algorithmes du cerveau</em>&nbsp;&raquo;. in entretien du 10 janvier 2018 au Figaro Premium</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn29" id="ftn29">29</a> A. Berthoz &eacute;crit dans <em>La d&eacute;cision</em>&nbsp;: &laquo;&nbsp;<em>Si la d&eacute;cision est le fait de quelques structures sp&eacute;cialis&eacute;es du cerveau, alors nous devons faire une phr&eacute;nologie de la d&eacute;cision. Si, au contraire, chaque d&eacute;cision implique un grand nombre de centre et la prise de d&eacute;cision est induite par un certain &eacute;tat des relations entre ces diff&eacute;rents centre, la physiologie de la d&eacute;cision devient plus complexe.&nbsp;[&hellip;] Une des th&egrave;ses de ce livre est que l&rsquo;&eacute;motion joue un r&ocirc;le privil&eacute;gi&eacute; dans la constitution du caract&egrave;re global des d&eacute;cisions.</em>&nbsp;&raquo;&nbsp;(2003, 88). Le lecteur comprend que l&rsquo;enjeu de la localisation est une simplification excessive que Berthoz conteste au profit d&rsquo;une science ouverte &agrave; d&rsquo;autres repr&eacute;sentations que l&rsquo;arithm&eacute;tisation des objets &eacute;tudi&eacute;s.</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn30" id="ftn30">30</a> Christian Laval et Michel Blay en font une critique utile dans leur dernier ouvrage op.cit.</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn31" id="ftn31">31</a> Dans l&rsquo;introduction de sa conf&eacute;rence, Les grands principes de l&#39;apprentissage de 2012, il affirme&nbsp;: <em>&laquo;&nbsp;Nous devons essayer de r&eacute;fl&eacute;chir ensemble aux connaissances qui sont indispensables pour qu&#39;un enseignant puisse concevoir le programme &eacute;ducatif dans un contexte qui va maximiser les modifications mentales, c&eacute;r&eacute;brales, et maximiser la vitesse aussi, la quantit&eacute; d&#39;apprentissage qu&#39;un enfant peut avoir.&nbsp;&raquo;</em></p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn32" id="ftn32">32</a> <em>La psychologie de la quantit&eacute;</em>, 2018, dans le n&deg;&nbsp;33 des cahiers de psychologie politique</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn33" id="ftn33">33</a> Michel Blay le r&eacute;sume tr&egrave;s bien&nbsp;: &laquo;&nbsp;En fonctionnant comme des logiciels et avec la plasticit&eacute; neuronale reconfigur&eacute;e par dressage en algorithmes, c&rsquo;est-&agrave;-dire en ayant &eacute;limin&eacute; toutes les autres possibilit&eacute;s d&rsquo;interpr&eacute;tation de cette plasticit&eacute; neuronale, les enfants de l&rsquo;avenir ont peu de chance d&rsquo;&ecirc;tre dans l&rsquo;infinit&eacute; de la pens&eacute;e et dans la pr&eacute;sence des choses et des &ecirc;tres du monde&nbsp;!&nbsp;&raquo; (2019, 80)</p> <p class="notesbaspage"><a class="FootnoteSymbol" href="#bodyftn34" id="ftn34">34</a> Lire notre article <em>La perversion du principe d&rsquo;apathie </em>dans le n&deg;&nbsp;34 des cahiers de psychologie politique</p> <p class="bibliographie">Berthoz, Alain, <em>La d&eacute;cision</em>, 2003, Paris, &eacute;ditions Odile Jacob</p> <p class="bibliographie">Berthoz, Alain, <em>Le sens du mouvement</em>, 1997, Paris, Editions Odile Jacob</p> <p class="bibliographie">Besnier, Jean-Michel, <em>Demain, les post-humains, le futur a-t-il encore besoin de nous&nbsp;?</em>, 2009, Paris, Editions Hachette</p> <p class="bibliographie">Besnier, Jean-Michel, Brunelle, Francis et Gazeau Florence, <em>Un cerveau tr&egrave;s prometteur&nbsp;: conversation autour des neurosciences</em>, 2015, Paris, Editions Le Pommier</p> <p class="bibliographie">Blay, Michel et LAVAL, Christian, <em>Neurop&eacute;dagogie&nbsp;- Le cerveau au centre de l&rsquo;&eacute;cole</em>, 2019, Paris, Editions Tschann &amp; Cie</p> <p class="bibliographie">Deutsch, Morton, <em>Qu&rsquo;est-ce que la &laquo;&nbsp;psychologie politique&nbsp;?</em>, 1983, Paris, Revue internationale des sciences sociales, n&deg;&nbsp;96, Les dimensions politiques de la psychologie, p.&nbsp;245 &agrave; 261.</p> <p class="bibliographie">Canguilhem, Georges, <em>Id&eacute;ologie et rationalit&eacute; dans l&rsquo;histoire des sciences de la vie</em>, 1977, Paris, Librairie Vrin</p> <p class="bibliographie">Cattel Mckeen, James, <em>La mesure de l&rsquo;intelligence</em>, 2003, in La psychologie moderne, p.&nbsp;253-264</p> <p class="bibliographie">Carrel, Alexis, <em>L&rsquo;homme, cet inconnu</em>, 1935, Paris, Editions Plon</p> <p class="bibliographie">Changeux, Jean-Pierre, <em>L&rsquo;homme neuronal</em>, 1983, Paris, Editions Fayard</p> <p class="bibliographie">Chalmers, David, <em>L&rsquo;esprit conscient</em>, 2010, Paris, Les &eacute;ditions d&rsquo;Ithaque</p> <p class="bibliographie">Damasio, Antonio, <em>L&rsquo;erreur de Descartes</em>, 1995, Paris, Editions Odile Jacob</p> <p class="bibliographie">Dorna, Alexandre, <em>Fondements de la psychologie politique</em>, 1998, Paris, PUF</p> <p class="bibliographie">Ecole, Jean, <em>La m&eacute;taphysique de Christian Wolff</em>, 1990, Hildesheim, Editions Georg Olms Verlag</p> <p class="bibliographie">Espagne, Michel,<em> Wilhelm Wundt. La &laquo;&nbsp;psychologie des peuples&nbsp;&raquo; et l&rsquo;histoire culturelle</em>, 1998, in Revue germanique internationale 10, p.&nbsp;70-91</p> <p class="bibliographie">Feuerhahn, Wolf, <em>Entre m&eacute;taphysique, math&eacute;matique, optique et physiologie: la psychom&eacute;trie au XVIIIe si&egrave;cle</em>, 2003, Paris, in Revue philosophique de la France et de l&rsquo;&eacute;tranger, tome 128, p.&nbsp;279-292, PUF</p> <p class="bibliographie">Guez, Olivier, <em>Le si&egrave;cle des dictateurs</em>, 2019, Paris, Editions Perrin</p> <p class="bibliographie">Hottois, Gilbert, Encyclop&eacute;die du trans/posthumanisme; l&rsquo;humain et ses pr&eacute;fixes, 2015, Paris, Librairie Vrin</p> <p class="bibliographie">Kim, Jaegwon, <em>Philosophie de l&rsquo;esprit</em>, 2010, Paris, Editions de l&rsquo;Ithaque</p> <p class="bibliographie">Kim, Jaegwon, <em>La Survenance et l&rsquo;Esprit</em>, 2012, Paris, Editions de l&rsquo;Ithaque</p> <p class="bibliographie">Laplane, Dominique, <em>Penser, c&rsquo;est-&agrave;-dire? Enqu&ecirc;te neurophilosophique</em>, 2005, Paris, Editions A. Colin</p> <p class="bibliographie">Martin, Xavier, <em>Naissance du sous-homme au c&oelig;ur des Lumi&egrave;res</em>, 2014, Paris, Editions Dominique Martin Morin</p> <p class="bibliographie">Martin, Xavier, R&eacute;g&eacute;n&eacute;rer l&#39;esp&egrave;ce humaine&nbsp;: Utopie m&eacute;dicale et Lumi&egrave;res (1750-1850), 2008, Paris, &Eacute;ditions Dominique Martin Morin</p> <p class="bibliographie">Massin, Benoit, Apprendre &agrave; classer et &agrave; s&eacute;lectionner. L&rsquo;enseignement de l&#39;eug&eacute;nisme, de l&#39;hygi&egrave;ne raciale et de la raciologie dans les universit&eacute;s allemandes (1930-1945), 2005, in Revue d&rsquo;Histoire de la Shoah, n&deg;&nbsp;183, p.&nbsp;265-388</p> <p class="bibliographie">Mengal, Paul, Isel, Fr&eacute;d&eacute;ric, Marchal, Anne, Nicolas, Serge, Vidal, Fernando, <em>Les origines de la psychologie europ&eacute;enne (16</em><sup><em>e</em></sup><em> &ndash; 19</em><sup><em>e</em></sup><em> si&egrave;cles)</em>, 2000, Villeneuve d&rsquo;Ascq, Presses Universitaires du Septentrion</p> <p class="bibliographie">Nicolas, Serge, <em>Wundt et la fondation en 1879 de son laboratoire</em>, 2005,<em> </em>in: L&#39;ann&eacute;e psychologique, vol.&nbsp;105, n&deg;&nbsp;1. p.&nbsp;133-170</p> <p class="bibliographie">Onfray, Michel, <em>Th&eacute;orie de la dictature</em>, 2019, Paris, Editions Robert Laffont</p> <p class="bibliographie">Paccioni, Jean-Paul, Cet esprit de profondeur. Christian Wolff, l&rsquo;ontologie et la m&eacute;taphysique, 2006, Paris, Librairie Vrin</p> <p class="bibliographie">Pichot, Andr&eacute;, <em>La soci&eacute;t&eacute; pure, de Darwin &agrave; Hitler</em>, 2000, Paris, Editions Flammarion</p> <p class="bibliographie">Rust, John, <em>La naissance de la psychom&eacute;trie &agrave; Cambridge, 1886&nbsp;&ndash; 1889</em>, 2008, Cambridge, Centre de psychom&eacute;trie&nbsp;: <a href="https://www.psychometrics.cam.ac.uk/about-us/our-history/first-psychometric-laboratory">https://www.psychometrics.cam.ac.uk/about-us/our-history/first-psychometric-laboratory</a></p> <p class="bibliographie">Sala-Molins, Louis, <em>Le Code Noir ou le calvaire de Canaan</em>, 2018, Paris, PUF</p> <p class="bibliographie">Turbiaux, Marcel, <em>Charles Darwin et la psychologie</em>, 2009, in Bulletin de psychologie n&deg;&nbsp;4, p.&nbsp;389-395</p> <p class="bibliographie">Vermes, Genevi&egrave;ve, <em>Quelques &eacute;tapes de la psychologie des peuples (de la fin du XIXe si&egrave;cle aux ann&eacute;es 1950). Esquisse pour une histoire de la psychologie interculturelle</em>, 2008, in L&#39;Homme &amp; la Soci&eacute;t&eacute; 2008/1, n&deg;&nbsp;167-168-169, p.&nbsp;149 &agrave; 161</p> <p class="bibliographie">Vittadello, Anna Maria, <em>Exp&eacute;rience et raison dans la psychologie de Christian Wolff</em>, 1973, Louvain, in Revue Philosophique de Louvain, Quatri&egrave;me s&eacute;rie, tome 71, n&deg;&nbsp;11, p.&nbsp;488-511</p> <p class="bibliographie">Wolff, Christian, <em>Psychologia Empirica</em>, 1738, Francfort</p> <p class="bibliographie">Wundt, Wilhelm, <em>Principes de psychologie physiologique</em>,<em> </em>1874, Leipzig</p> <p class="bibliographie">Wundt, Wilhelm, <em>Probl&egrave;mes de psychologie des peuples</em>, 1911, Leipzig</p>