<p align="center" style="text-align:center"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:" times="">LE MYTHE &Eacute;TYMONIAL DU FRAN&Ccedil;AIS IVOIRIEN DANS <i>LES SOLEILS DES IND&Eacute;PENDANCES</i>&nbsp;: </span></span></b></span></span></p> <p align="center" style="text-align:center"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:" times="">LA B&Acirc;TARDISE LINGUISTIQUE ENTRE STYL&Eacute;MATIQUE </span></span></b></span></span><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:" times="">ET TOPICIT&Eacute; LITT&Eacute;RAIRE </span></span></b></span></span></p> <p style="text-align:justify">Dorgel&egrave;s Houessou enseigne &agrave; l&#39;universit&eacute;&nbsp;<span style="font-size:12.0pt"><span style="font-family:" times="">Alassane Ouattara, Bouak&eacute;, C&ocirc;te d&rsquo;Ivoire. Il est</span></span>&nbsp;docteur en stylistique et analyse du discours, dipl&ocirc;m&eacute; de l&rsquo;Universit&eacute; F&eacute;lix Houphou&euml;t Boigny d&rsquo;Abidjan-Cocody &agrave; la suite d&rsquo;une th&egrave;se portant sur la cat&eacute;gorisation g&eacute;n&eacute;rique du discours d&rsquo;investiture, soutenue publiquement le 3 d&eacute;cembre 2013. Il est enseignant de stylistique fran&ccedil;aise au D&eacute;partement de Lettres Modernes et Contemporaines de l&rsquo;UFR Communication, Milieu et Soci&eacute;t&eacute; (CMS) de l&rsquo;Universit&eacute; Alassane Ouattara de Bouak&eacute; (C&ocirc;te d&rsquo;Ivoire). Ses recherches s&rsquo;inscrivent dans une perspective pluridisciplinaire et allient les domaines de la stylistique et de l&rsquo;analyse du discours. Auteur d&rsquo;une trentaine de publications dans des ouvrages collectifs, actes de colloques et revues internationales, il est membre du laboratoire des Sciences du Langage Appliqu&eacute; au Discours d&rsquo;Invention (SLADI), du R&eacute;seau Africain d&rsquo;Analyse du Discours (R2AD) et membre du comit&eacute; ex&eacute;cutif de l&rsquo;Observatoire National de la Vie et du Discours Politiques (ONVDP).&nbsp;</p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <h2 style="text-align: justify;"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span style="font-family:" times="">Introduction</span></b></span></span></h2> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">En s&rsquo;interrogeant sur les raisons de l&rsquo;extension et de la p&eacute;rennisation du nouchi, Kouadio J&eacute;r&eacute;mie estime qu&rsquo;on peut envisager &laquo;&nbsp;<i>le style tr&egrave;s particulier du romancier ivoirien Ahmadou Kourouma qui est pass&eacute; ma&icirc;tre dans l&rsquo;art de &laquo; m&eacute;langer &raquo; le fran&ccedil;ais &agrave; sa convenance</i>&nbsp;&raquo; (Kouadio&nbsp;2006 : 178) comme un point de d&eacute;part significatif. De l&rsquo;aveu m&ecirc;me de l&rsquo;auteur, son style a fait de lui l&rsquo;un des initiateurs du mouvement de l&rsquo;adaptation du fran&ccedil;ais aux r&eacute;alit&eacute;s sociologiques africaines. La naissance de ce style co&iuml;ncide n&eacute;cessairement avec la publication de son premier roman<i> Les Soleils des ind&eacute;pendances, </i>et le refus des &eacute;diteurs classiques de mettre sous presse ce qu&rsquo;ils trouv&egrave;rent convenu d&rsquo;appeler un navet a longtemps pein&eacute; l&rsquo;auteur avant de lui arracher des souvenirs rieurs une fois ces d&eacute;boires pass&eacute;s.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">De nombreux auteurs africains s&rsquo;inscriront dans cette veine iconoclaste, rompant en visi&egrave;re avec l&rsquo;injonction du &laquo;&nbsp;fran&ccedil;ais de France&nbsp;&raquo; dans leurs &eacute;crits. L&rsquo;ex&eacute;g&egrave;se y aff&eacute;rent con&ccedil;oit alors l&eacute;gitime d&rsquo;y traiter la probl&eacute;matique d&rsquo;une qu&ecirc;te identitaire aux nombreuses p&eacute;rip&eacute;ties, ou encore, pour un auteur noir, celle de l&rsquo;appropriation de sa culture, voire de son &laquo;&nbsp;moi&nbsp;&raquo;. Kourouma ne se contente pas seulement d&rsquo;en revendiquer le statut de pr&eacute;curseur&nbsp;; car cette &laquo;&nbsp;<i>hybridation langagi&egrave;re</i>&nbsp;&raquo; (Delbart 2005), il en fait une marque distinctive, donc un style singulier dans toutes ses &oelig;uvres, comme pour maintenir haut ce <i>skeptron</i>, cette marque distinctive l&eacute;gitimant justement sa voix multimodale d&rsquo;&eacute;crivain aux sources d&rsquo;influence multiples.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">Le pr&eacute;sent article interroge les raisons objectives et subjectives de la r&eacute;ception du premier roman de Kourouma comme acte mythog&eacute;n&eacute;tique du parler ivoirien dont le nouchi est une modalit&eacute; fondamentale. Cette probl&eacute;matique prend le parti de mettre en interrelation aussi bien l&rsquo;objectivit&eacute; du discours et de l&rsquo;interdiscours, au sujet de l&rsquo;influence de cette &oelig;uvre, que la subjectivit&eacute; inh&eacute;rente au r&eacute;gime d&rsquo;artistisation co-occurrent &agrave; sa r&eacute;ception. La bi-articulation du corpus implique de proposer une lecture conceptuelle de cette projection mythog&eacute;n&eacute;tique des <i>Soleils des ind&eacute;pendances</i> &agrave; partir la mythocritique, d&rsquo;une part, &agrave; travers l&rsquo;ethos et l&rsquo;argumentation intertextuelle comme <i>myth&egrave;mes</i>, et la stylistique, d&rsquo;autre part, en tenant compte des consid&eacute;rants topiques et d&rsquo;expressivit&eacute; langagi&egrave;re comme <i>styl&egrave;mes</i> constitutifs du langagier litt&eacute;rarisable qu&rsquo;est l&rsquo;ivoirisme. L&rsquo;&eacute;tude s&rsquo;ach&egrave;vera avec une mise en abyme du double mythe Kouroumaien au sujet de son &oelig;uvre g&eacute;n&eacute;siaque et de son style<i>.</i></span></span></span></p> <h2 style="text-align: justify;"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span style="font-family:" times="">1. D&eacute;blayage conceptuel</span></b></span></span></h2> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">Un parcours d&eacute;finitionnel des m&eacute;thodes et outils cl&eacute;s impose de circonscrire la d&eacute;marche conceptuelle de cette &eacute;tude. Il s&rsquo;agit d&rsquo;une part de la mythocritique et de la paratextualit&eacute; et, d&rsquo;autre part, de la stylistique des topiques.</span></span></span></p> <h3 style="text-align: justify;"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span style="font-family:" times="">1.1. Mythocritique et transtextualit&eacute;</span></b></span></span></h3> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">Selon Durand &laquo; <i>la mythocritique s&rsquo;interroge en derni&egrave;re analyse sur le mythe primordial, tout impr&eacute;gn&eacute; d&rsquo;h&eacute;ritages culturels, qui vient int&eacute;grer les obsessions et le mythe personnel lui-m&ecirc;me </i>&raquo; (Durand, 1992b, 169). L&rsquo;objet pr&eacute;&eacute;minent de cette discipline est donc de scruter le mythe non seulement en sa dimension globale, c&rsquo;est-&agrave;-dire dans la structure arch&eacute;typale de l&rsquo;impens&eacute; collectif, mais aussi &agrave; l&rsquo;aune de la psych&eacute; profonde du moi social consid&eacute;r&eacute; dans le processus de son individuation. Objet majeur de l&rsquo;actualisation du mythe, le myth&egrave;me constitue alors &laquo; <i>la plus petite unit&eacute; de discours mythiquement significatif</i> &raquo; (Durand, 1992b, 344). En narratologie, plus sp&eacute;cifiquement, la mythocritique se d&eacute;finit comme l&rsquo;&eacute;tude du m&eacute;canisme des sch&egrave;mes, des symboles et des arch&eacute;types aux origines de la narration. Comme le laissent entendre Vahid &amp; Mathieu-Job (2016 : 114), c&rsquo;est &agrave; partir de l&rsquo;analyse mythocritique que les couches infrastructurelles et s&eacute;miotiques du texte d&eacute;voilent aussi bien la dynamique de l&rsquo;imagination auctoriale que celle pr&eacute;sidant &agrave; l&rsquo;expression des relents doxiques du moi social. La r&eacute;f&eacute;rence au mythe d&eacute;borde donc du palier textuel et induit un recours explicite aux donn&eacute;es transtextuelles. Celles-ci impliquent de consid&eacute;rer le hors-texte et ses strates constitutives dans l&rsquo;&eacute;mergence du sens recherch&eacute;. Une &eacute;tude sur la port&eacute;e sociale (linguistique et litt&eacute;raire) des <i>Soleils </i>et l&rsquo;&eacute;rection de cette &oelig;uvre au statut de mythe implique donc de recourir au dip&ocirc;le mythocritique et transtextualit&eacute;.</span></span></span></p> <h3 style="text-align: justify;"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span style="font-family:" times="">1.2. Stylistique, topique et styl&eacute;matique </span></b></span></span></h3> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">La stylistique est entendue, depuis son repli th&eacute;orique dans le champ litt&eacute;raire, comme une praxis scrutant les faits de langage occurrents en situation de litt&eacute;rarit&eacute; textuelle. Ainsi d&eacute;finie, elle a partie li&eacute;e avec tous les proc&eacute;d&eacute;s langagiers propices &agrave; indiquer un &eacute;v&eacute;nement ou encore une saillance expressive. La langue et les jeux de divergence codique, d&rsquo;hybridation, et de variations qui la constitue en situation d&rsquo;&eacute;criture en est un objet privil&eacute;gi&eacute;. Une stylistique des topiques, selon Molini&eacute; (2000), prend pour point de d&eacute;part </span><i>&laquo;&nbsp;une topicit&eacute; principielle&nbsp;&raquo;</i> portant le projet du caract&egrave;re doxique de la litt&eacute;rature comme lieu et pratique codifi&eacute;e, et aboutit &agrave; une topicit&eacute; exp&eacute;rientielle du sujet-lecteur &eacute;valuant la recevabilit&eacute; du fait litt&eacute;raire comme tel dans une acception moins g&eacute;n&eacute;rale que le principe ; c&rsquo;est &agrave; dire dans son ips&eacute;it&eacute;. Entre ces deux ordres, se d&eacute;ploie la topicit&eacute; actantielle qui, elle, rel&egrave;ve de l<span style="font-family:" times="">&rsquo;actualisation d&rsquo;une modalit&eacute; auctoriale. On per&ccedil;oit sans grand peine dans cette triple configuration de la topicit&eacute;, les sources de la tripartition des types de litt&eacute;rarit&eacute; en litt&eacute;rarit&eacute; g&eacute;n&eacute;rale, litt&eacute;rarit&eacute; g&eacute;n&eacute;rique et litt&eacute;rarit&eacute; singuli&egrave;re, comme autant de lieux d&rsquo;o&ugrave; se d&eacute;ploie le litt&eacute;raire. Ainsi envisag&eacute;e, la topicit&eacute; n&rsquo;est perceptible qu&rsquo;&agrave; travers la styl&eacute;matique, c&rsquo;est-&agrave;-dire une possible d&eacute;termination combinatoire de styl&egrave;mes de litt&eacute;rarit&eacute; solidaires du fait expressif et porteurs de l&rsquo;intransitivit&eacute; au sens molini&eacute;en du terme.</span></span></span></p> <h2 style="text-align: justify;"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span style="font-family:" times="">2. Rh&eacute;torique transtextuelle et mythogen&egrave;se de la b&acirc;tardise linguistique</span></b></span></span></h2> <h3 style="text-align: justify;"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span style="font-family:" times="">2.1. L&rsquo;ethos de pr&eacute;curseur</span></b></span></span></h3> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">Le concept de b&acirc;tardise linguistique est revendiqu&eacute; par Kourouma d&egrave;s la publication de son premier roman. Il entreprend alors de se construire une image d&rsquo;auteur iconoclaste en porte &agrave; faux avec la norme langagi&egrave;re relevant du politiquement correct. Il expose en ces termes, dans le m&eacute;tatexte que constitue l&rsquo;article intitul&eacute; &laquo;&nbsp;&Eacute;crire en fran&ccedil;ais, penser dans sa langue maternelle&nbsp;&raquo;, l&rsquo;essence de son projet scripturaire : &laquo; <i>Je cherche &agrave; &eacute;crire le fran&ccedil;ais tout en continuant &agrave; penser dans ma langue maternelle, le malink&eacute;</i> &raquo; (Kourouma, 1997: 117). Ce propos pose d&rsquo;embl&eacute;e l&rsquo;importance de la question de la langue dans la mise en &oelig;uvre du processus de cr&eacute;ation litt&eacute;raire chez Kourouma. D&rsquo;ailleurs &agrave; la question de savoir pourquoi et comment il abordait la langue fran&ccedil;aise, l&rsquo;auteur r&eacute;pondra ceci :</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><i><span style="font-family:" times="">&laquo;&nbsp;Mon probl&egrave;me d&rsquo;&eacute;crivain francophone est de transposer en fran&ccedil;ais des paroles cr&eacute;&eacute;es dans une langue orale n&eacute;groafricaine, des &oelig;uvres qui ont &eacute;t&eacute; pr&eacute;par&eacute;es pour &ecirc;tre produites, pour &ecirc;tre dites oralement. Je me heurte &agrave; des difficult&eacute;s. La langue fran&ccedil;aise m&rsquo;appara&icirc;t lin&eacute;aire. Je m&rsquo;y sens &agrave; l&rsquo;&eacute;troit. Il me manque le lexique, la grammaticalisation, les nuances et m&ecirc;me les proc&eacute;d&eacute;s litt&eacute;raires pour lesquels la fiction avait &eacute;t&eacute; pr&eacute;par&eacute;e. La langue fran&ccedil;aise est planifi&eacute;e, agenc&eacute;e. Les personnages, les sc&egrave;nes cessent d&rsquo;avoir le relief qu&rsquo;ils avaient dans la parole africaine. Leurs interventions ne produisent plus les &eacute;chos qui les suivaient dans la langue originelle&nbsp;&raquo; (Kourouma, 1997 : 116-117).</span></i></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">Cette image autog&eacute;n&eacute;r&eacute;e, m&eacute;liorative en son principe axiologique et de nature &agrave; induire une posture valorisante pour l&rsquo;&eacute;nonciateur, c&rsquo;est l&rsquo;ethos. Celui que revendique Kourouma en ces termes passe par les postures de l&rsquo;authenticit&eacute; culturelle et de la sp&eacute;cificit&eacute; n&eacute;groafricaine dans la cr&eacute;ation artistique en g&eacute;n&eacute;ral et litt&eacute;raire en particulier. Il soutient ainsi :</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><i><span style="font-family:" times="">Je dois repenser, reprendre et reconcevoir la fiction dans le fran&ccedil;ais dans lequel elle doit &ecirc;tre produite, soit &laquo; africaniser &raquo; le fran&ccedil;ais pour que l&#39;&oelig;uvre conserve l&rsquo;essentiel de ses qualit&eacute;s. Beaucoup d&rsquo;&eacute;crivains adoptent la premi&egrave;re m&eacute;thode ; ou disons simplement que beaucoup d&rsquo;Africains renoncent &agrave; penser dans leur langue natale, con&ccedil;oivent leurs &oelig;uvres en fran&ccedil;ais. Ils renoncent &agrave; leur africanit&eacute; et ne connaissent donc que les difficult&eacute;s auxquelles se heurte l&rsquo;&eacute;crivain dont la langue maternelle est le fran&ccedil;ais. Ceux qui en revanche cr&eacute;ent et pensent dans leur langue natale rencontrent d&rsquo;autres difficult&eacute;s &agrave; s&rsquo;exprimer, ils ont recours au processus appel&eacute; &laquo; africanisation &raquo; du fran&ccedil;ais (Kourouma, 1997 : 117).</span></i></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">Cet ethos d&rsquo;africaniste est au c&oelig;ur de l&rsquo;ambition esth&eacute;tique de Kourouma. &Agrave; l&rsquo;&eacute;chelle de ce passage par exemple, une polyptote distributive l&egrave;ve le coin du voile sur sa stature d&rsquo;africaniste (&laquo;&nbsp;africaniser - africanit&eacute; - africanisation&nbsp;&raquo;). L&rsquo;&eacute;nonciateur m&ecirc;le au d&eacute;but de cet extrait la valeur r&eacute;duplicative du morph&egrave;me pr&eacute;fixal &laquo;&nbsp;re&nbsp;&raquo; &agrave; la port&eacute;e d&rsquo;insistance de l&rsquo;accumulation synonymique en emploi d&rsquo;expolition (&laquo;&nbsp;repenser, reprendre et reconcevoir). La figure de l&rsquo;africaniste se d&eacute;double ainsi de celle de pr&eacute;curseur, de concepteur et d&rsquo;instigateur de la pens&eacute;e africaniste. Cet ethos transparait plus t&ocirc;t et encore beaucoup plus clairement dans le m&eacute;tatexte que constitue l&rsquo;interview publi&eacute;e dans le num&eacute;ro 7 de la revue Diagonales : </span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><i><span style="font-family:" times="">&laquo; les Africains, ayant adopt&eacute; le fran&ccedil;ais doivent maintenant l&rsquo;adapter et le changer pour s&rsquo;y retrouver &agrave; l&rsquo;aise, ils y introduisent des mots, des expressions, une syntaxe, un rythme nouveaux. Quand on a des habits, on s&rsquo;essaie toujours &agrave; les coudre pour qu&rsquo;ils moulent bien, c&rsquo;est ce que vont faire et font d&eacute;j&agrave; les Africains du fran&ccedil;ais. Si on parle de moi, c&rsquo;est parce que je suis l&rsquo;un des initiateurs de ce mouvement &raquo; (Zalessky, 1988 : 4-5)</span></i></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">L&rsquo;argumentation dans cet extrait est riche de combiner la modalit&eacute; d&eacute;ontique cristallis&eacute;e dans le verbe &quot;devoir&quot;, &agrave; la force &eacute;vocative de l&rsquo;&eacute;num&eacute;ration gradationnelle &agrave; inflexion ascendante (&quot;des mots, des expressions, une syntaxe, un rythme nouveaux&quot;) dont le mouvement croissant &eacute;pouse l&rsquo;ampleur du devoir mentionn&eacute; : celui d&rsquo;infl&eacute;chir la langue officielle aux biais culturels de chaque peuple d&rsquo;Afrique ayant le fran&ccedil;ais en h&eacute;ritage colonial. &Agrave; ce double ancrage argumentatif, s&rsquo;ajoute la m&eacute;taphore humoristique du v&ecirc;tement moulant &agrave; travers laquelle Kourouma convoque les s&egrave;mes du besoin de s&rsquo;exprimer (n&eacute;cessit&eacute; vitale du v&ecirc;tement) et du style (&eacute;l&eacute;gance vestimentaire). Au moyen d&rsquo;une double occurrence de l&rsquo;argument par la g&eacute;n&eacute;ralisation (&quot;les Africains&quot;), l&rsquo;&eacute;nonciateur configure un ethos de rassembleur dont la clausule syntagmatique (&quot;je suis l&rsquo;un des initiateurs de ce mouvement&quot;) d&eacute;cuple la port&eacute;e. Kourouma se pose ainsi en chef de file du &quot;mouvement&quot; de l&rsquo;africanisation de l&rsquo;&eacute;criture en langue fran&ccedil;aise.</span></span></span></p> <h3 style="text-align: justify;"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span style="font-family:" times="">2.2. L&rsquo;intertexte</span></b></span></span></h3> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">&laquo;&nbsp;<i>L&rsquo;intertexte est l&rsquo;ensemble des textes que l&rsquo;on peut rapprocher de celui que l&rsquo;on a sous les yeux, l&rsquo;ensemble des textes que l&rsquo;on retrouve dans sa mémoire à la lecture d&rsquo;un passage donné. L&rsquo;intertexte est donc un corpus indéfini</i>&nbsp;&raquo; (Riffaterre, 1981 : 4). Comme consid&eacute;rant de la transtextualit&eacute;, l&rsquo;intertexte des <i>Soleils</i> prend en compte l&rsquo;immense ex&eacute;g&egrave;se qu&rsquo;a g&eacute;n&eacute;r&eacute; cette &oelig;uvre. Celle-ci reconnait quasi unanimement le statut de pr&eacute;curseur de Kourouma en mati&egrave;re de r&eacute;appropriation et de d&eacute;structuration linguistique. De l&rsquo;avis de Maurice Houis par exemple, le fran&ccedil;ais, &laquo; <i>se singularise &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur de l&rsquo;&oelig;uvre de Kourouma par une tentative de rupture d&rsquo;avec le fran&ccedil;ais classique. Une cr&eacute;ation linguistique par laquelle Kourouma parvient &agrave; restituer toute une atmosph&egrave;re propre &agrave; la culture malink&eacute;</i> &raquo; (Houis 1977 : 68). Si de telles r&eacute;flexions abondent de la part de divers sp&eacute;cialistes, ils s&rsquo;enrichissent souvent d&rsquo;une confluence qui leur garantit une cr&eacute;dibilit&eacute; qui soit gage de recevabilit&eacute;. Dans une interview &agrave; Jean Ou&eacute;draogo, Kourouma, laisse ainsi entendre que : &laquo;&nbsp;[l]es libert&eacute;s linguistiques prononc&eacute;es et le caract&egrave;re &eacute;minemment politique du r&eacute;cit, quelque peu expurg&eacute; des r&eacute;f&eacute;rences les plus acerbes comme le texte l&rsquo;&eacute;tait &agrave; sa premi&egrave;re parution, avait choqu&eacute; maints &eacute;diteurs parisiens et membres de l&rsquo;intelligentsia politico-litt&eacute;raire africaine&nbsp;&raquo; (Ou&eacute;draogo &amp; Kourouma, 2001 : 774). Il ressort de ce constat que le choc occasionn&eacute; alors est inh&eacute;rent au caract&egrave;re in&eacute;dit et au style sans pr&eacute;c&eacute;dent des <i>Soleils</i> &agrave; leur parution. D&rsquo;o&ugrave; la mise en &eacute;vidence de la figure de pr&eacute;curseur de Kourouma qui, par cette &oelig;uvre, innova en renouvelant la perception que les &eacute;diteurs devaient avoir du parler ivoirien.</span></span></span></p> <h2 style="text-align: justify;"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span style="font-family:" times="">3. <i>Les soleils&hellip;</i> Aux origines textuelles de l&rsquo;ivoirisme</span></b></span></span></h2> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">Cette &eacute;tude prend le parti de distinguer entre le fran&ccedil;ais ivoirien, ensemble d&rsquo;expressions idiomatiques r&eacute;sultant du parler populaire en C&ocirc;te d&rsquo;Ivoire et le nouchi qui, comme version singuli&egrave;re du fran&ccedil;ais ivoirien, est un parler plus complexe et cryptique n&eacute; en C&ocirc;te d&rsquo;Ivoire mais dont le champ d&rsquo;influence d&eacute;passe de loin les fronti&egrave;res ivoiriennes.</span></span></span></p> <h3 style="text-align: justify;"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span style="font-family:" times="">3.1. Le fran&ccedil;ais ivoirien dans <i>Les soleils&hellip;</i></span></b></span></span></h3> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">Certains ivoirismes ont &eacute;t&eacute; retranscrits pour la premi&egrave;re fois dans <i>Les Soleils</i>. Ils se sont ainsi vulgaris&eacute;s &agrave; partir de leur usage artistis&eacute;. D&rsquo;autres y ont trouv&eacute; leur &eacute;tymon et se sont constitu&eacute;s au fil des usages.&nbsp; L&rsquo;analyse qui suit part de certains extraits du corpus mettant en exergue des emplois primitifs ou &eacute;tymons de quelques expressions consacr&eacute;es dans le parler ivoirien et concurremment, lesdites expressions d&rsquo;origine ou d&eacute;riv&eacute;e.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <table class="MsoTableGrid" style="border-collapse:collapse; border:none"> <tbody> <tr> <td style="border-bottom:1px solid black; width:305px; padding:0cm 7px 0cm 7px; border-top:1px solid black; border-right:1px solid black; border-left:1px solid black" valign="top"> <p align="center" style="text-align:center">&nbsp;</p> <p align="center" style="text-align:center"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Extrait des Soleils</span></span></p> </td> <td style="border-bottom:1px solid black; width:305px; padding:0cm 7px 0cm 7px; border-top:1px solid black; border-right:1px solid black; border-left:none" valign="top"> <p align="center" style="text-align:center">&nbsp;</p> <p align="center" style="text-align:center"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Ivoirismes <span style="font-family:" times="">d&rsquo;origine ou d&eacute;riv&eacute;</span></span></span></p> <p align="center" style="text-align:center"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">et sens ou usage</span></span></p> <p align="center" style="text-align:center">&nbsp;</p> </td> </tr> <tr> <td style="border-bottom:1px solid black; width:305px; padding:0cm 7px 0cm 7px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:1px solid black" valign="top"> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><u><span style="font-family:" times="">Extrait 1:</span></u></b> </span></span></p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">&laquo; Non ! c&rsquo;est <b><i>un harmattan malingre, fam&eacute;lique, un avorton d&rsquo;harmattan</i></b>. Les grands harmattans, <b><i>les vrais harmattans</i></b> ont &eacute;t&eacute; d&eacute;finitivement enterr&eacute;s avec les grandes chasses&nbsp;&raquo;. (p. 83)</span></span></span></p> </td> <td style="border-bottom:1px solid black; width:305px; padding:0cm 7px 0cm 7px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:none" valign="top"> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><i><span style="font-family:" times="">&Ecirc;tre mince ou &ecirc;tre un b&eacute;b&eacute;&nbsp;:</span></i></b></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">S&rsquo;emploie pour d&eacute;signer un &ecirc;tre, une chose ou un ph&eacute;nom&egrave;ne de moindre importance.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><i><span style="font-family:" times="">D&eacute;terminant + Vrai + substantif&nbsp;:</span></i></b></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">pour d&eacute;signer un &ecirc;tre, une chose ou un ph&eacute;nom&egrave;ne de grande qualit&eacute; (ex: une vraie chaussure, un vrai gar&ccedil;on, de vrais v&ecirc;tements etc&hellip;)</span></span></span></p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> </td> </tr> <tr> <td style="border-bottom:1px solid black; width:305px; padding:0cm 7px 0cm 7px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:1px solid black" valign="top"> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><u style="text-underline:black"><span style="font-family:" times="">Extrait 2:</span></u></b><b> </b></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">&laquo;&nbsp;Et &ccedil;a continuera. Une atmosph&egrave;re irrespirable. La querelle, la col&egrave;re, le m&eacute;nage <b><i>m&eacute;lang&eacute;</i></b>. Des injures aujourd&rsquo;hui, des baffes demain : impossible de tenir, comme sur une bande de magnas&nbsp;&raquo;. Un jour <b><i>il faudra couper</i></b>&nbsp;&raquo;. (p. 64) </span></span></span></p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> </td> <td style="border-bottom:1px solid black; width:305px; padding:0cm 7px 0cm 7px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:none" valign="top"> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><i><span style="font-family:" times="">M&eacute;langer qqch&nbsp;:</span></i></b><span style="font-family:" times=""> Expression issue du Malink&eacute; <i>Gnangami</i> = saccager / bouleverser / d&eacute;truire ou mettre sens dessus-dessous. </span></span></span></p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><i><span style="font-family:" times="">Couper&nbsp;:</span></i></b><span style="font-family:" times=""> alt&eacute;ration &eacute;lid&eacute;e de l&rsquo;expression &laquo;&nbsp;couper igname&nbsp;&raquo; = se s&eacute;parer / rompre (en parlant des relations amicales, amoureuses ou familiales en cas de reniement).</span></span></span></p> </td> </tr> <tr> <td style="border-bottom:1px solid black; width:305px; padding:0cm 7px 0cm 7px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:1px solid black" valign="top"> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><u style="text-underline:black"><span style="font-family:" times="">Extrait 3:</span></u></b><b> </b></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">&laquo;&nbsp;Parce que Fama se r&eacute;signa &agrave; la st&eacute;rilit&eacute; sans rem&egrave;de de Salimata. Il alla chercher des f&eacute;condes et essaya <b><i>(&ocirc; honte !)</i></b> des femmes sans honneur de la capitale&nbsp;&raquo;. (p. 39) </span></span></p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> </td> <td style="border-bottom:1px solid black; width:305px; padding:0cm 7px 0cm 7px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:none" valign="top"> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">L&rsquo;expression &laquo;&nbsp;&ocirc; honte !&nbsp;&raquo; et sa variante &laquo;&nbsp;n&eacute;(e) avant la honte&nbsp;&raquo; sont en usage dans le parler ivoirien pour discr&eacute;diter un tiers. Son &eacute;rection au rang d&rsquo;expression sociolectale rel&egrave;ve de son emploi par l&rsquo;ex-premi&egrave;re dame ivoirienne Simone Gbagbo dans un discours o&ugrave; elle fustigeait l&rsquo;opposition d&rsquo;alors.</span></span></p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> </td> </tr> <tr> <td style="border-bottom:1px solid black; width:305px; padding:0cm 7px 0cm 7px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:1px solid black" valign="top"> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><u style="text-underline:black"><span style="font-family:" times="">Extrait 4:</span></u></b><b> </b>&laquo;&nbsp;Et apr&egrave;s chaque nuit les douleurs qui circulent dans les reins et les c&ocirc;tes&hellip; Ensuite parce que c&rsquo;&eacute;tait &agrave; l&rsquo;&eacute;poque o&ugrave; les affaires p&eacute;riclitaient, o&ugrave; la politique l&rsquo;accaparait. Bref, Fama avait refus&eacute; Mariam parce qu&rsquo;<b><i>il n&rsquo;avait ni les reins ni l&rsquo;argent&nbsp;&raquo;</i></b> (p. 62). </span></span></p> </td> <td style="border-bottom:1px solid black; width:305px; padding:0cm 7px 0cm 7px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:none" valign="top"> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">L&rsquo;expression &laquo;&nbsp;avoir les reins&nbsp;&raquo; est un usage &eacute;lid&eacute; de la locution &laquo;&nbsp;avoir les reins&nbsp;solides &raquo;. Cette derni&egrave;re locution attest&eacute;e en fran&ccedil;ais signifie avoir suffisamment de ressources soit financi&egrave;res, soit physiques ou mentales pour surmonter une &eacute;preuve ou mener &agrave; bien un projet difficile. En tant qu&rsquo;ivoirisme, comme le montre l&rsquo;extrait des <i>Soleils</i>, l&rsquo;expression est r&eacute;duite &agrave; d&eacute;signer la performance &eacute;rectile masculine.</span></span></p> </td> </tr> </tbody> </table> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <table class="MsoTableGrid" style="border-collapse:collapse; border:none"> <tbody> <tr> <td style="border-bottom:1px solid black; width:262px; padding:0cm 7px 0cm 7px; border-top:1px solid black; border-right:1px solid black; border-left:1px solid black" valign="top"> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><u style="text-underline:black"><span style="font-family:" times="">Extrait 5:</span></u></b><b> </b></span></span></p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">&laquo;&nbsp;Le Coran dit qu&rsquo;un d&eacute;c&eacute;d&eacute; est un appel&eacute; par Allah, <b>un fini</b>&nbsp;&raquo;. (p. 72) </span></span></p> </td> <td style="border-bottom:1px solid black; width:348px; padding:0cm 7px 0cm 7px; border-top:1px solid black; border-right:1px solid black; border-left:none" valign="top"> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">L&rsquo;emploi nominal de&nbsp;&laquo;&nbsp;fini&nbsp;&raquo; est aussi attest&eacute; en usage &eacute;pith&eacute;tique (un homme fini) ou attributif (cet homme est fini) pour d&eacute;signer, en fran&ccedil;ais populaire ivoirien quelqu&rsquo;un de d&eacute;s&oelig;uvr&eacute; ou une personne d&eacute;c&eacute;d&eacute;e ou encore celui qui jouissant d&rsquo;une fortune et d&rsquo;un prestige social admir&eacute;, se retrouve ruin&eacute; et sans la moindre influence.</span></span></p> </td> </tr> <tr> <td style="border-bottom:1px solid black; width:262px; padding:0cm 7px 0cm 7px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:1px solid black" valign="top"> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><u style="text-underline:black"><span style="font-family:" times="">Extrait 6:</span></u></b><b> </b></span></span></p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">&laquo;&nbsp;&mdash; <b><i>C&rsquo;est &ccedil;a ! c&rsquo;est &ccedil;a la v&eacute;rit&eacute; !</i></b> s&rsquo;&eacute;cria-t-il, et il d&eacute;balla les feuillets jaunis, lut quelques lignes et enjoignit &agrave; Salimata : Mire-toi, mire-toi dans la calebasse d&rsquo;eau !<b><i> mire, mire !</i></b> (&hellip;)</span></span></p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">&mdash; Dis-moi, que vois-tu dans la calebasse d&rsquo;eau ? <b><i>regarde fort ! fort !</i></b> que vois-tu ?&nbsp;&raquo; (p. 48)</span></span></p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> </td> <td style="border-bottom:1px solid black; width:348px; padding:0cm 7px 0cm 7px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:none" valign="top"> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Le verbe mirer, en sa seconde occurrence &eacute;panaleptique est, selon Boutin, &agrave; mettre au compte des &laquo;&nbsp;emplois absolus consid&eacute;r&eacute;s ici, c&rsquo;est-&agrave;-dire avec une interpr&eacute;tation &laquo; g&eacute;n&eacute;rique &raquo; du proc&egrave;s, ils sont attest&eacute;s dans la vari&eacute;t&eacute; de langue qui se pr&eacute;sente comme le mod&egrave;le de langue en C&ocirc;te d&rsquo;Ivoire&nbsp;&raquo; (Boutin, 170). De m&ecirc;me, l&rsquo;adjectif en emploi r&eacute;duplicatif &laquo;&nbsp;fort&nbsp;&raquo;, traduit une expression intensive par la double occurrence et le glissement connotatif du mot. Dans le parler ivoirien, il traduit ainsi l&rsquo;intensit&eacute; d&rsquo;une action qu&rsquo;elle soit active ou passive (&eacute;couter/regarder etc. fort).</span></span></p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> </td> </tr> <tr> <td style="border-bottom:1px solid black; width:262px; padding:0cm 7px 0cm 7px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:1px solid black" valign="top"> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><u style="text-underline:black"><span style="font-family:" times="">Extrait 7:</span></u></b><b> </b>&laquo;&nbsp;Ton mari, je te le dis <b><i>d&rsquo;un int&eacute;rieur et d&rsquo;une bouche clairs</i></b>, ne f&eacute;condera pas les femmes. Il est st&eacute;rile comme le roc, comme la poussi&egrave;re et l&rsquo;harmattan. <b>Voil&agrave; la v&eacute;rit&eacute;, la seule&nbsp;</b>&raquo;. (p. 53)</span></span></p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> </td> <td style="border-bottom:1px solid black; width:348px; padding:0cm 7px 0cm 7px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:none" valign="top"> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">L&rsquo;expression &laquo;&nbsp;bouche claire&nbsp;&raquo; qui traduit par d&eacute;rivation m&eacute;tonymique l&rsquo;effet (parole) pour la cause (bouche), est en usage dans les habitus langagiers en C&ocirc;te d&rsquo;Ivoire. Sa variante antinomique &laquo;&nbsp;bouche sale&nbsp;&raquo; traduit, par le m&ecirc;me m&eacute;canisme, l&rsquo;incongruit&eacute; morale et la nature outrageante des propos d&rsquo;un tiers d&eacute;sign&eacute;. Quant &agrave; la locution &laquo;&nbsp;Voil&agrave; la v&eacute;rit&eacute;&nbsp;&raquo; dont la variante est &laquo;&nbsp;c&rsquo;est &ccedil;a la v&eacute;rit&eacute;&nbsp;&raquo;/&laquo;&nbsp;c&rsquo;est &ccedil;a qui est la v&eacute;rit&eacute;&nbsp;&raquo;, elle est en usage dans le parler ivoirien pour marquer l&rsquo;insistance argumentative du locuteur sur un sujet donn&eacute;. Elle a, comme l&rsquo;expression plus haut (&ocirc; honte), longtemps anim&eacute; les joutes verbales du d&eacute;bat politique en C&ocirc;te d&rsquo;Ivoire avec notamment le leader d&rsquo;opinion Charles Bl&eacute; Goud&eacute; qui en a fait un usage r&eacute;gulier durant les campagnes qu&rsquo;il a men&eacute;es entre 2004 et 2010.</span></span></p> </td> </tr> </tbody> </table> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <h3 style="text-align: justify;"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span style="font-family:" times="">3.2. Le nouchi dans <i>Les soleils&hellip;</i></span></b></span></span></h3> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">Selon Kouadio (1992 :178), le nouchi est n&eacute; au d&eacute;but des ann&eacute;es 80. Le premier endroit de pr&eacute;dilection de ce parler populaire est la rue et ses usagers sont principalement les jeunes d&eacute;scolaris&eacute;s en manque de rep&egrave;re identitaire. Cependant, loin de cette configuration initiale, &laquo; aujourd&rsquo;hui le nouchi n&rsquo;est plus l&rsquo;apanage des jeunes de la rue, il est aussi pr&eacute;sent dans les lyc&eacute;es et coll&egrave;ges et m&ecirc;me &agrave; l&rsquo;universit&eacute; (&hellip;) D&eacute;sormais, on parle le nouchi dans les rues d&rsquo;Abidjan, mais aussi les murs en portent t&eacute;moignage &raquo; (Kouadio, 2006 : 178-179). Au nombre des raisons qui ont favoris&eacute; ce fulgurant essaimage du nouchi, le r&ocirc;le des artistes est relev&eacute; par l&rsquo;ex&eacute;g&egrave;se. On d&eacute;couvre ainsi que &laquo; ce sont surtout les textes des musiques regg&aelig;, notamment ceux d&rsquo;Ismael Isaac, Serges Kassy, et du Zouglou avec Yod&eacute; et Siro, Magic System, Petit Denis, etc. et ceux du rap avec Nash22 qui finiront par restaurer le nouchi et l&rsquo;imposer finalement comme un outil f&eacute;d&eacute;rateur des populations ivoiriennes&nbsp;&raquo; (Ouattara, 2014 : 220). L&rsquo;hypoth&egrave;se ici formul&eacute;e est de consid&eacute;rer que l&rsquo;art musical a certes promu officiellement le nouchi et l&rsquo;a popularis&eacute;, mais l&rsquo;artistisation litt&eacute;raire n&rsquo;est pas en reste quant &agrave; cette vulgarisation du nouchi. <i>Les Soleils</i> constituent &agrave; cet effet une source importante de mots et d&rsquo;expressions r&eacute;investis en nouchi par les &eacute;l&egrave;ves (car l&rsquo;&oelig;uvre jouit d&rsquo;une long&eacute;vit&eacute; in&eacute;gal&eacute;e au programme de fran&ccedil;ais des lyc&eacute;es en C&ocirc;te d&rsquo;Ivoire), s&eacute;duits par la cr&eacute;ativit&eacute; lexicale de Kourouma; et dont bon nombre embrassera d&rsquo;ailleurs une carri&egrave;re d&rsquo;artiste-chanteur. L&rsquo;analyse des quelques extraits ci-dessous montrera que <i>Les Soleils</i> ont certainement influenc&eacute; des artistes zouglous et, au-del&agrave;, la cr&eacute;ativit&eacute; langagi&egrave;re en contexte ivoirien.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><u style="text-underline:black"><span style="font-family:" times="">Extrait 1:</span></u></b><b> </b><span style="font-family:" times="">Dans <i>Les Soleils,</i> la phrase &laquo;&nbsp;Toutes les mamans Doumbouya <b><i>versaient des libations</i></b>&nbsp;&raquo; (p. 61), introduit le verbe &laquo;&nbsp;verser&nbsp;&raquo; dans une suspension connotative o&ugrave; il acquiert le signifi&eacute; de d&eacute;notation des verbes &laquo;&nbsp;donner&nbsp;&raquo; +&nbsp; &laquo;&nbsp;abonder&nbsp;&raquo;. Les expressions nouchi &laquo;&nbsp;verser les douhahous&nbsp;&raquo; pour &laquo; b&eacute;nir abondamment&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;c&rsquo;est vers&eacute;&nbsp;&raquo; pour &laquo;&nbsp;cela coule &agrave; flots&nbsp;&raquo; ou encore &laquo;&nbsp;je suis vers&eacute;(e)&nbsp;&raquo; pour &laquo;&nbsp;je suis mort(e) de rire&nbsp;&raquo;, pourraient &ecirc;tre inspir&eacute;es de ce passage o&ugrave; le verbe &laquo;&nbsp;verser&nbsp;&raquo; est porteur du s&egrave;me de /quantit&eacute; excessive/.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><u style="text-underline:black"><span style="font-family:" times="">Extrait 2:</span></u></b><b> </b>Dans la phrase suivante : &laquo;&nbsp;Oui, le march&eacute; a &eacute;t&eacute; favorable. Et toi ? Dis-moi ! Resteras-tu tout le long de ce grand soleil <b><i>dispers&eacute; comme &ccedil;a sur la chaise</i></b> ?&nbsp;&raquo; (p. 39) on remarquera que l&rsquo;adjectif-attribut &laquo;&nbsp;dispers&eacute;&nbsp;&raquo; connote le m&ecirc;me rendement s&eacute;mantique que le verbe &laquo;&nbsp;verser&nbsp;&raquo; c&rsquo;est &agrave; dire flasque et oisif, sans la moindre consistance et dans un &eacute;tat o&ugrave; le sujet ne peut rien contr&ocirc;ler. En nouchi, &laquo;&nbsp;&ecirc;tre vers&eacute;&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;se verser&nbsp;&raquo; etc. signifient aussi &ecirc;tre saoul, &eacute;tendu, &eacute;vanoui ou se coucher, s&rsquo;endormir&nbsp;; toute chose qui renvoie &agrave; un &eacute;tat d&rsquo;impuissance et d&rsquo;asth&eacute;nie</span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><u style="text-underline:black"><span style="font-family:" times="">Extrait 3:</span></u></b><b> </b>&laquo;&nbsp;<b><i>Que tombent sur vous</i></b> les grandes b&eacute;n&eacute;dictions d&rsquo;Allah !&nbsp;&raquo; (p. 75). La locution verbale &laquo;&nbsp;tomber sur quelqu&rsquo;un&nbsp;&raquo; est attest&eacute;e en nouchi pour signifier soit le fait de surprendre une personne, soit celui de la dominer physiquement au cours d&rsquo;une rixe. Dans les deux cas de figure, on retrouve le s&egrave;me de la quantit&eacute; diff&eacute;rentielle (d&eacute;bordement d&rsquo;&eacute;tonnement ou force physique). C&rsquo;est cependant ce s&egrave;me qui transparait dans l&rsquo;extrait des <i>Soleils</i> o&ugrave; il rend compte de la promptitude exacerb&eacute;e des b&eacute;n&eacute;dictions annonc&eacute;es.</span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><u style="text-underline:black"><span style="font-family:" times="">Extrait 4:</span></u></b><b> </b>Soit le passage suivant : &laquo;&nbsp;Bamba ! (ainsi se nommait celui qui d&eacute;fiait) Bamba ! s&rsquo;&eacute;gosillait-il ; <b><i>refroidissez le c&oelig;ur !</i></b>&nbsp;&raquo; (p. 13). Cette expression finale est en usage en nouchi avec pour variantes &laquo;&nbsp;glacer le c&oelig;ur&nbsp;&raquo; ou encore &laquo;&nbsp;verser de l&rsquo;eau sur le c&oelig;ur&nbsp;&raquo;. Elle signifie calmer ou encore apaiser quelqu&rsquo;un qui est en col&egrave;re. Les expressions contraires sont construites &agrave; partir de la m&ecirc;me configuration s&eacute;mantique. Ce sont &laquo;&nbsp;chauffer le c&oelig;ur&nbsp;&raquo; ou encore &laquo;&nbsp;chauffer le rognon&nbsp;&raquo; qui signifient &laquo;&nbsp;&eacute;nerver&nbsp;&raquo;. </span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><u style="text-underline:black"><span style="font-family:" times="">Extrait 5:</span></u></b><b> </b>Dans l&rsquo;extrait suivant des <i>Soleils</i>, apparait une variante s&eacute;mantiquement divergente de l&rsquo;expression &laquo;&nbsp;refroidissez le c&oelig;ur&nbsp;&raquo;, &eacute;galement attest&eacute;e en nouchi : &laquo;&nbsp;Des mains tremblantes se tendaient mais les chants nasillards, les moignons, les yeux puants, les oreilles et nez coup&eacute;s, sans parler des odeurs particuli&egrave;res, <b><i>refroidissaient le c&oelig;ur de Fama</i></b>&nbsp;&raquo; (p. 20). </span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">L&rsquo;&eacute;num&eacute;ration de termes d&eacute;pr&eacute;ciatifs, longue d&rsquo;une quintuple occurrence concat&eacute;n&eacute;e &agrave; l&rsquo;adversatif &laquo;&nbsp;mais&nbsp;&raquo;, oriente la r&eacute;ception de la locution. Il s&rsquo;agit d&rsquo;exprimer le d&eacute;couragement et l&rsquo;abattement ; la d&eacute;motivation de celui qui, sur le point d&rsquo;accomplir une action pour laquelle il se trouvait bien dispos&eacute;, en est d&eacute;tourn&eacute; par un motif quelconque. Une variante de cette expression est le syntagme locutif &laquo; glacer quelqu&#39;un&nbsp;&raquo; qui signifie aussi selon le contexte &laquo;&nbsp;amadouer&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;flatter&nbsp;&raquo; etc.</span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><u style="text-underline:black"><span style="font-family:" times="">Extrait 6:</span></u></b><b> </b>L&rsquo;expression &laquo;&nbsp;<b><i>Le matin &eacute;tait patate douce</i></b>&nbsp;&raquo; (p. 108) que l&rsquo;on retrouve dans <i>Les Soleils</i> pour d&eacute;signer la douceur matinale est le myth&egrave;me &eacute;tymonial de l&rsquo;expression nouchi &laquo;&nbsp;c&rsquo;est ma&iuml;s&nbsp;&raquo; qui traduit l&rsquo;inoffensivit&eacute; d&rsquo;une personne ou d&rsquo;un animal pr&eacute;tendument &agrave; craindre ou encore la vanit&eacute; d&rsquo;une situation pr&eacute;sent&eacute;e comme p&eacute;rilleuse. La comestibilit&eacute; et la succulence de l&rsquo;une ou de l&rsquo;autre prenant le contrepoids du p&eacute;ril annonc&eacute;, la substitution m&eacute;taphorique visant &agrave; minimiser le danger n&rsquo;en est que plus radicale. Cette expression a aussi fait sensation dans les joutes &eacute;lectorales en C&ocirc;te d&rsquo;Ivoire o&ugrave; elle avait pour fonction argumentative de minimiser voire ridiculiser les adversaires du r&eacute;gime de Laurent Gbagbo.</span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><u style="text-underline:black"><span style="font-family:" times="">Extrait 7:</span></u></b><b> </b>On retrouve dans <i>Les Soleils</i> l&rsquo;extrait-ci : &laquo;&nbsp;Menteries. <b><i>Aiu ! Aiu !</i></b>&nbsp;&raquo; (p. 76). &laquo;&nbsp;Aiu&nbsp;&raquo; y est l&rsquo;alt&eacute;ration orthographique de l&rsquo;interjection &laquo;&nbsp;A&iuml;e&nbsp;&raquo;, qui traduit la douleur en fran&ccedil;ais, et a donn&eacute; dans le parler ivoirien le syntagme interjectif &laquo;&nbsp;Ahii&nbsp;&raquo; qui exprime non plus la douleur mais l&rsquo;&eacute;tonnement du locuteur. La graphie &laquo;&nbsp;Ayuu&nbsp;&raquo;, souvent utilis&eacute;e pour retranscrire cette derni&egrave;re interjection en nouchi, doit &agrave; cet extrait des <i>Soleils</i> son originalit&eacute; nouvelle. S&eacute;mantiquement, il s&rsquo;agit, avec cette derni&egrave;re graphie, de marquer une intensit&eacute; plus grande, dans l&rsquo;&eacute;tonnement exprim&eacute;, qu&rsquo;avec la graphie classique &laquo;&nbsp;Ahii&nbsp;&raquo;.</span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><u style="text-underline:black"><span style="font-family:" times="">Extrait 8:</span></u></b><b> </b>Dans l&rsquo;extrait suivant, transpire aussi l&rsquo;&eacute;tymon styl&eacute;matique d&rsquo;une expression nouchi :</span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">&laquo;&nbsp;<i>Que n&rsquo;a-t-il pas fait pour &ecirc;tre coopt&eacute; ? Prier Allah nuit et jour, tuer des sacrifices de toutes sortes, m&ecirc;me un chat noir dans un puits ; et &ccedil;a se justifiait ! <b>Les deux plus viand&eacute;s et gras morceaux</b> des Ind&eacute;pendances sont s&ucirc;rement le secr&eacute;tariat g&eacute;n&eacute;ral et la direction d&rsquo;une coop&eacute;rative&hellip;</i>&nbsp;&raquo; (p. 19).</span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">L&rsquo;adjectif &laquo;&nbsp;viand&eacute;&nbsp;&raquo; attest&eacute; en fran&ccedil;ais s&rsquo;applique &agrave; d&eacute;signer un individu &laquo;&nbsp;bien en chair ; gras, gros&nbsp;&raquo;. En emploi contextuel, Kourouma lui conserve le m&ecirc;me rendu s&eacute;mantique mais l&rsquo;applique m&eacute;tonymiquement &agrave; un emploi, un poste ou une fonction administrative dont les avantages mat&eacute;riels subs&eacute;quents sont consid&eacute;rables. R&eacute;orient&eacute; en nouchi, l&rsquo;&eacute;pith&egrave;te s&rsquo;est nominalis&eacute;e et le substantif &laquo;&nbsp;viande&nbsp;&raquo; d&eacute;signe un individu de sexe f&eacute;minin au charme irr&eacute;sistible ou un homme d&eacute;sirable. D&rsquo;une valence axiologique n&eacute;gative en fran&ccedil;ais, l&rsquo;&eacute;pith&egrave;te a fini par d&eacute;signer une situation de profit et la d&eacute;sid&eacute;rabilit&eacute; d&rsquo;un(e) partenaire &eacute;rotique potentiel(le) voire de l&rsquo;appareil g&eacute;nital f&eacute;minin plus sp&eacute;cifiquement. Ainsi le groupe zouglou &laquo;&nbsp;Les Garagistes&nbsp;&raquo; rel&egrave;ve cet &eacute;tat de fait dans la chanson intitul&eacute;e <i>Sanouman</i>. Celle-ci met en sc&egrave;ne les protagonistes que sont une fille de joie et son client. Ce dernier s&rsquo;av&eacute;rant insatiable, la courtisane lui r&eacute;torque dans un parler mimant celui des ressortissants du Ghana en C&ocirc;te d&rsquo;Ivoire : &laquo;&nbsp;missi&eacute; mince l&agrave; c&eacute; travailler comme machine ! je dis c&rsquo;est mon la viande!&nbsp;&raquo;. Ce disant, la d&eacute;nomm&eacute;e&nbsp;Affiba attire l&rsquo;attention du client ind&eacute;licat sur le fait que son appareil g&eacute;nital n&rsquo;est pas fait d&rsquo;acier (m&eacute;taphore de la machine) mais de chair. Ce d&eacute;tour, par l&rsquo;ironie de son occurrence en chanson, vient attester de l&rsquo;&eacute;volution du lex&egrave;me &laquo;&nbsp;viande&nbsp;&raquo; dans le parler ivoirien depuis son usage &eacute;pith&eacute;tique par Kourouma dans <i>Les Soleils</i>.</span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><u style="text-underline:black"><span style="font-family:" times="">Extrait 9:</span></u></b><b> </b>Dans ce passage-ci l&rsquo;emploi d&rsquo;un terme malink&eacute;, caract&eacute;ristique des variations et alternance codiques chez Kourouma, interpelle le lecteur : &laquo;&nbsp;Une danse, un<b><i> n&rsquo;goni</i></b> de chasseurs sans sang, disons-le, c&rsquo;&eacute;tait d&eacute;cevant. D&eacute;cevants aussi les boum-boum des fusils de traite&nbsp;&raquo; (p. 98). </span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Le substantif &laquo;&nbsp;n&rsquo;goni&nbsp;&raquo; d&eacute;signe en malink&eacute; la guitare traditionnelle. Cet instrument &agrave; cordes pinc&eacute;es est aussi appel&eacute; &laquo;&nbsp;dozo n&rsquo;goni&nbsp;&raquo; ou &laquo;&nbsp;doussou n&rsquo;goni&nbsp;&raquo; qui signifie &laquo; instrument des chasseurs &raquo;. Le substantif &laquo;&nbsp;danse&nbsp;&raquo; qui le pr&eacute;c&egrave;de dans le propos de Kourouma est un indicateur de lecture visant &agrave; consid&eacute;rer non pas l&rsquo;instrument en soi, mais plut&ocirc;t, par g&eacute;n&eacute;ralisation m&eacute;tonymique, les festivit&eacute;s au cours desquelles il est ex&eacute;cut&eacute; par une assembl&eacute;e, un groupe de chasseurs traditionnels. De ce s&egrave;me de l&rsquo;agr&eacute;gation, dans l&rsquo;emploi que Kourouma a ainsi fait du terme, d&eacute;coule le terme nouchi &laquo;&nbsp;gbonhi&nbsp;&raquo; qui signifie groupe d&rsquo;individus, bande d&rsquo;ami(e)s et de complices ou encore une foule compacte.</span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Les extraits &eacute;tudi&eacute;s montrent le va et vient entre le fran&ccedil;ais ivoirien d&rsquo;une part, dont le nouchi est une modalit&eacute; fondamentale, et, d&rsquo;autre part, l&rsquo;&oelig;uvre culte de Kourouma. Si l&rsquo;auteur a consid&eacute;rablement enrichi son livre de mots et d&rsquo;expressions emprunt&eacute;s au parler de l&rsquo;ivoirien lambda, l&rsquo;&oelig;uvre a fini, elle-m&ecirc;me, par s&rsquo;&eacute;riger en macrocontexte &eacute;tymonial du parler ivoirien. Le nouchi notamment, &agrave; mesure qu&rsquo;il s&rsquo;infiltrait dans les habitus langagiers des jeunes, &eacute;l&egrave;ves des lyc&eacute;es et coll&egrave;ges, et &eacute;tudiants, a &eacute;t&eacute; fortement influenc&eacute; par ces derniers qui avaient obligatoirement lu Kourouma et avaient retenu, frapp&eacute;s par le style et la langue des <i>Soleils</i>, le processus de cr&eacute;ation lexicale utilis&eacute; dans ce texte. Il y aurait fort &agrave; parier qu&rsquo;ils ont alors, n&eacute;cessairement, r&eacute;solu d&rsquo;en &ecirc;tre les imitateurs dans le proc&eacute;d&eacute; n&eacute;ologique du nouchi. En cela, la styl&eacute;matique mise en &oelig;uvre dans <i>Les Soleils</i> s&rsquo;av&egrave;re de grande port&eacute;e litt&eacute;raire. Si tant est que la r&eacute;ception d&rsquo;un texte en d&eacute;termine la litt&eacute;rarit&eacute;, celui de Kourouma peut se f&eacute;liciter de combiner les styl&egrave;mes de la cr&eacute;ation lexicale, faits d&rsquo;emprunts, d&rsquo;allusions et de glissements tropiques, &agrave; la forme sous laquelle la di&eacute;g&egrave;se se d&eacute;ploie. D&rsquo;o&ugrave; le questionnement de cette topique litt&eacute;raire dans la singularit&eacute; du <span style="font-family:" times="">style d&rsquo;auteur et du style g&eacute;n&eacute;rique.</span></span></span></p> <h2 style="text-align: justify;"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span style="font-family:" times="">4. Entre style d&rsquo;auteur et style g&eacute;n&eacute;rique&nbsp;: le mythe Kourouma</span></b></span></span></h2> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">L&rsquo;&oelig;uvre de Kourouma est riche de traits stylistiques qui en configurent la singularit&eacute; et introduisent sa r&eacute;ception comme livre mythique. De l&agrave;, la singularit&eacute; esth&eacute;tique de Kourouma s&rsquo;est substantiellement ouverte &agrave; la critique comme un canon esth&eacute;tique du genre romanesque dont les traits majeurs sont d&rsquo;une part r&eacute;duplication, obsc&eacute;nit&eacute; et africanisation du fran&ccedil;ais, et, d&rsquo;autre part, libert&eacute; scripturaire et oralit&eacute;.</span></span></span></p> <h3 style="text-align: justify;"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span style="font-family:" times="">4.1. R&eacute;duplication, obsc&eacute;nit&eacute; et b&acirc;tardise linguistique&nbsp;: mythogen&egrave;se du style d&rsquo;auteur</span></b></span></span></h3> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Le style de Kourouma en tant que style d&rsquo;auteur marqueur de singularit&eacute; dans <i>Les Soleils</i> est le fait de certaines particularit&eacute;s dont il assume le statut de pr&eacute;curseur. Soit l&rsquo;extrait ci-dessous : </span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><i>Lui Balla n&rsquo;&eacute;tait pas un salueur, un &eacute;tranger, mais un de la famille Doumbouya, un affranchi qui &eacute;tait rest&eacute; attach&eacute; &agrave; ses ma&icirc;tres, &agrave; la lib&eacute;ration. On lui reprocha le retard. Il n&rsquo;entendait rien. On cria plus fort. Il happa les mots, les rumina, tira les pommettes (c&rsquo;&eacute;tait le sourire) et parla d&rsquo;abord lentement et calmement, puis de plus en plus vite, de plus en plus haut, jusqu&rsquo;&agrave; s&rsquo;&eacute;touffer. Le retard&hellip; Euh ! le retard, c&rsquo;est que Balla avait &oelig;uvr&eacute;, consult&eacute; et ador&eacute; les f&eacute;tiches, et puis tu&eacute;, tu&eacute; les sacrifices pour Fama</i> (p. 78).</span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Ce passage est caract&eacute;ristique du style de Kourouma avec un fort accent r&eacute;duplicatif. Ainsi, dans la premi&egrave;re phrase, la r&eacute;duplication du poste fonctionnel du COD est quadri-occurrente (1- un salueur, 2- un &eacute;tranger, 3-un de la famille Doumbouya, 4- un affranchi) et donne suite &agrave; une double occurrence du poste fonctionnel du COI (1-attach&eacute; &agrave; ses ma&icirc;tres, 2-&agrave; la lib&eacute;ration). Suite &agrave; cette phrase d&rsquo;ampleur consid&eacute;rable &eacute;tant donn&eacute; la segmentation relative &agrave; la sextuple r&eacute;duplication et la subordination d&rsquo;une relative &agrave; la phrase nucl&eacute;aire, le rythme chute brutalement avec trois phrases simples, li&eacute;es et br&egrave;ves (1-On lui reprocha le retard. 2-Il n&rsquo;entendait rien. 3-On cria plus fort.) Ces trois phrases induisent un rythme ternaire qui aboutit &agrave; une autre phrase r&eacute;duplicative et de grande ampleur. On y retrouve une quadruple r&eacute;duplication du verbe (1-happa, 2-rumina, 3-tira, 4-parla) et une quintuple occurrence du compl&eacute;ment de mani&egrave;re (1-lentement, 2-calmement, 3-de plus en plus vite, 4-de plus en plus haut, 5-jusqu&rsquo;&agrave; s&rsquo;&eacute;touffer). </span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Soit cet autre extrait : &laquo;&nbsp;Cela ne se r&eacute;alisa pas. D&rsquo;abord &agrave; cause des sarcasmes de Salimata. &laquo; Fama, Fama, disait-elle, r&eacute;fl&eacute;chis, regarde-toi. Te sens-tu capable d&rsquo;en chevaucher deux ? Avec moi, c&rsquo;est aussi difficile que tirer l&rsquo;eau d&rsquo;une montagne&nbsp;&raquo; (p. 62). </span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Cette derni&egrave;re comparaison a sans doute donn&eacute;, par alt&eacute;ration, la locution nouchi &laquo;&nbsp;tirer dans l&rsquo;eau&nbsp;&raquo; dont la variante est &laquo;&nbsp;tirer &agrave; terre&nbsp;&raquo;. Cette locution implique l&rsquo;&eacute;chec annonc&eacute; d&rsquo;une action en raison d&rsquo;une impossibilit&eacute; consubstantielle &agrave; son d&eacute;ploiement. La m&eacute;taphore du chevauchement pour la consommation nuptiale est un classique de l&rsquo;obsc&egrave;ne Kourouma&iuml;en. Les jurons, l&rsquo;injure directe ou encore l&rsquo;allusion injurieuse comme dans l&rsquo;extrait suivant y participent aussi fortement : &laquo;&nbsp;Fama s&rsquo;&eacute;tait d&eacute;barrass&eacute; de tout : n&eacute;goces, amiti&eacute;s, femmes pour user les nuits, les jours, l&rsquo;argent et la col&egrave;re &agrave; injurier la France, le p&egrave;re, la m&egrave;re de la France. Il avait &agrave; venger cinquante ans de domination et une spoliation&nbsp;&raquo; (p. 18). L&rsquo;allusion aux injures faites au p&egrave;re et &agrave; la m&egrave;re de la France constitue une modalit&eacute; de l&rsquo;obsc&egrave;ne chez Kourouma qui aborde avec l&eacute;g&egrave;ret&eacute; une th&eacute;matique aussi s&eacute;rieuse dans la soci&eacute;t&eacute; Malink&eacute; que peut l&rsquo;&ecirc;tre la profanation parentale. Si cette injure s&rsquo;applique en propre &agrave; des humains, son usage m&eacute;tonymique pour un pays est hyperbolique et constitue un marqueur intensif.</span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">L&rsquo;extrait suivant est r&eacute;v&eacute;lateur de l&rsquo;aisance de Kourouma &agrave; jouer avec les paliers de la tonalit&eacute; : </span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">&laquo;&nbsp;<i>Un b&acirc;tard, un vrai, un d&eacute;hont&eacute; de rejeton de la for&ecirc;t et d&rsquo;une maman qui n&rsquo;a s&ucirc;rement connu ni la moindre bande de tissu, ni la dignit&eacute; du mariage, osa, debout sur ses deux testicules, sortir de sa bouche que Fama &eacute;tranger ne pouvait pas traverser sans carte d&rsquo;identit&eacute;</i>&nbsp;&raquo; (p. 69). </span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Dans ce passage, on remarquera l&rsquo;emploi altern&eacute; des registres obsc&egrave;nes et d&eacute;cent. Ainsi, une accumulation d&rsquo;injures (&laquo;&nbsp;&nbsp;Un b&acirc;tard, un vrai, un d&eacute;hont&eacute; de rejeton de la for&ecirc;t&nbsp;&raquo;) laisse suite &agrave; une m&eacute;tonymie euph&eacute;mique (&laquo;&nbsp;une maman qui n&rsquo;a s&ucirc;rement connu la moindre bande de tissu&nbsp;&raquo;) pour d&eacute;signer l&rsquo;absence de dot et, par ricochet, le d&eacute;vergondage de cette m&egrave;re indigne de s&rsquo;&ecirc;tre prostitu&eacute;e ; ce passage s&rsquo;ach&egrave;ve par le retour &agrave; l&rsquo;obsc&egrave;ne &agrave; travers l&rsquo;expression &laquo;&nbsp;debout sur ses deux testicules&nbsp;&raquo; o&ugrave; le noyau syntagmatique est aussi bien m&eacute;tonymiquement que m&eacute;taphoriquement associ&eacute; aux jambes. D&rsquo;une part, m&eacute;tonymiquement s&rsquo;entend, l&rsquo;aisance de la station debout est fortement compromise en cas de troubles et douleurs li&eacute;es aux gonades ; et d&rsquo;autre part, m&eacute;taphoriquement cette fois, dans l&rsquo;imaginaire collectif, le s&egrave;me de la sant&eacute; sexuelle transpire dans la validit&eacute; de l&rsquo;homme dont la position verticale atteste de l&rsquo;effectivit&eacute;. De l&agrave; d&eacute;coule par exemple la symbolique spatiale de l&rsquo;esclavage (couch&eacute;) et de la libert&eacute; (debout).</span></span></p> <h3 style="text-align: justify;"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span style="font-family:" times="">4.2. Libert&eacute; scripturaire et oralit&eacute;&nbsp;: mythogen&egrave;se du style g&eacute;n&eacute;rique</span></b></span></span></h3> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">Le style truculent de Kourouma n&rsquo;est pas sans rappeler celui des conteurs traditionnels. D&rsquo;ailleurs, il finira par identifier son &oelig;uvre &agrave; ceux relevant du genre pratiqu&eacute; par les chasseurs Dozo du nord de la C&ocirc;te d&rsquo;Ivoire, le &laquo;&nbsp;donsoya&nbsp;&raquo;. Dans cet extrait par exemple, on en retrouve les ingr&eacute;dients fondamentaux :</span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">&laquo;&nbsp;<i>Avant les soleils des Ind&eacute;pendances et les soleils des colonisations, le quaranti&egrave;me jour d&rsquo;un grand Malink&eacute; faisait d&eacute;ferler des marigots de sang. Mais maintenant avec le parti unique, l&rsquo;ind&eacute;pendance, le manque, les famines et les &eacute;pid&eacute;mies, aux fun&eacute;railles des plus grands enterr&eacute;s on tue au mieux un bouc. Et quelle sorte de bouc ? Tr&egrave;s souvent un bouc fam&eacute;lique gouttant moins de sang qu&rsquo;une carpe. Et quelle qualit&eacute; de sang ? Du sang aussi pauvre que les menstrues d&rsquo;une vieille fille s&egrave;che C&rsquo;&eacute;tait pour ces raisons que Balla aimait affirmer que tous les morts des soleils des Ind&eacute;pendances vivaient au serr&eacute; dans l&rsquo;au-del&agrave; pour avoir &eacute;t&eacute; tous mal accueillis par leurs devanciers</i>&nbsp;&raquo; (p. 94).</span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">Dans ce passage l&rsquo;anadiplose oratoire introduit un jeu de progression lin&eacute;aire donnant une forte connotation orale au discours. Les questions que se pose le narrateur aux allures de conteur accentuent aussi la tonalit&eacute; humoristique de l&rsquo;extrait cristallis&eacute;e dans la pr&eacute;sentation descriptive de l&rsquo;animal expiatoire qu&rsquo;est le bouc, en lieu et place des taureaux et des b&eacute;liers. La description du bouc joue ainsi sur l&rsquo;&eacute;tymologie de l&rsquo;expression &laquo;&nbsp;bouc &eacute;missaire&nbsp;&raquo; qui a trait &agrave; cet usage sacrificiel. L&rsquo;humour tient aussi dans ce passage &agrave; la comparaison antith&eacute;tique entre le sang du bouc, cens&eacute; purifier le d&eacute;funt, et celui des menstrues (doxiquement impur) d&rsquo;une &laquo;&nbsp;vieille fille s&egrave;che&nbsp;&raquo; (&eacute;pith&egrave;te dont on devine que la diachronie dans le parler ivoirien a &eacute;volu&eacute; du r&eacute;f&eacute;rent de <i>vieille</i> &agrave; celui de <i>laide</i>. En nouchi &ecirc;tre <i>frais</i> ou <i>fraiche</i>, c&rsquo;est &ecirc;tre <i>beau</i> ou <i>belle</i>). On remarquera l&rsquo;expression &laquo;&nbsp;vivre au serr&eacute;&nbsp;&raquo; dans la derni&egrave;re phrase du passage. Celle-ci signifie toujours dans le parler ivoirien<i> vivre chichement / mener une vie de privation</i>. Elle a cependant &eacute;volu&eacute; connotativement depuis la publication des <i>Soleils</i> pour d&eacute;signer l&rsquo;obligation (je suis serr&eacute; de toi / je suis au serr&eacute; pour toi = je suis amoureux de toi / je suis ton oblig&eacute;). </span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">La quintuple &eacute;num&eacute;ration des fl&eacute;aux sociaux entreprise par le narrateur n&rsquo;est pas non plus fortuite dans la mesure o&ugrave; elle &eacute;tablit un rapport de contigu&iuml;t&eacute; entre les diff&eacute;rents &eacute;l&eacute;ments cit&eacute;s : &laquo; </span>le parti unique, l&rsquo;ind&eacute;pendance, le manque, les famines et les &eacute;pid&eacute;mies&nbsp;&raquo;.<span style="font-family:" times=""> Il apparait implicitement que cette contigu&iuml;t&eacute; m&ecirc;me est li&eacute;e &agrave; la chronologie de la cause pour l&rsquo;effet. Ce serait donc &laquo;&nbsp;</span>le parti unique&nbsp;&raquo; qui aurait engendr&eacute; &laquo;&nbsp;l&rsquo;ind&eacute;pendance&nbsp;&raquo; et &agrave; son tour &laquo;&nbsp;le manque&nbsp;&raquo; qui engendra &laquo;&nbsp;les famines&nbsp;&raquo; et &agrave; leur tour &laquo;&nbsp;les &eacute;pid&eacute;mies&nbsp;&raquo;.<span style="font-family:" times=""> Sous les traits humoristiques ainsi annonc&eacute;s, Kourouma entreprend cependant une violente satire de la gouvernance des hommes d&rsquo;&Eacute;tat apr&egrave;s les ind&eacute;pendances. Il y retranscrit un raisonnement par l&rsquo;absurde au nom duquel la mis&egrave;re fait des victimes sur terre et <i>a fortiori</i> dans l&rsquo;au-del&agrave;. Une chanson Zouglou du groupe ivoirien<i>&nbsp;Espoir</i> <i>2000</i> intitul&eacute;e &laquo;&nbsp;Ivoirien&nbsp;&raquo; est d&rsquo;ailleurs fortement inspir&eacute;e de ce passage et rend compte de cette r&eacute;alit&eacute; en ces termes : &laquo;&nbsp;Ivoirien est chr&eacute;tien parce que y&rsquo;a plus l&rsquo;argent pour payer les moutons, les cabris de sacrifice&nbsp;&raquo;.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">La r&eacute;ception de ce style &agrave; valeur de myth&egrave;me fait sourire l&rsquo;auteur quelques ann&eacute;es apr&egrave;s la publication de son livre et le sacre qu&rsquo;il connait. &Eacute;tant donn&eacute; qu&rsquo;il cassait les codes de l&rsquo;&eacute;criture usuelle et des canons en vigueur, il a essuy&eacute; maints quolibets comme il en t&eacute;moigne en ces termes :</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><i><span style="font-family:" times="">La premi&egrave;re chose qu&rsquo;on fait c&rsquo;est de prendre contact avec des &eacute;diteurs africains. Ils m&rsquo;ont r&eacute;pondu que ce n&rsquo;&eacute;tait pas r&eacute;dig&eacute; en bon fran&ccedil;ais, qu&rsquo;il fallait d&rsquo;abord que j&rsquo;apprenne &agrave; &eacute;crire dans cette langue [rires]. [Pr&eacute;sence africaine commen&ccedil;ait &agrave; &ecirc;tre subventionn&eacute; par les &Eacute;tats africains&hellip;] Mon livre, dans une partie expurg&eacute;e, comportait beaucoup d&rsquo;allusions &agrave; peine voil&eacute;es, &agrave; la politique en C&ocirc;te d&rsquo;Ivoire, au r&eacute;gime, aux tortures. Alors &eacute;videmment Pr&eacute;sence africaine m&rsquo;a dit, &laquo; Avant de critiquer les &Eacute;tats africains, avant d&rsquo;attaquer le pr&eacute;sident, apprenez donc &agrave; &eacute;crire en fran&ccedil;ais &raquo; [rires].</span></i><span style="font-family:" times=""> (Kourouma, 1991)</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">Manifestement, l&rsquo;objectif de Kourouma fut atteint d&egrave;s lors que son &oelig;uvre &eacute;tait reconnue comme n&rsquo;&eacute;tant pas &eacute;crite en fran&ccedil;ais. Il impose au lecteur un effort suppl&eacute;mentaire au d&eacute;codage. Celui de prendre en compte sa culture et son identit&eacute; hybride de malink&eacute;-ivoirien et francophone. Au sujet de l&rsquo;inscription mythologique du style de Kourouma, on se rem&eacute;morera ce propos de Corcoran qui soutient que :</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><i>La v&eacute;ritable gen&egrave;se de Kourouma &eacute;crivain s&rsquo;inscrit dans une pratique de l&rsquo;&eacute;criture et se d&eacute;ploie sous une double contrainte : linguistique, d&rsquo;abord, puisque sa naissance &agrave; l&rsquo;&eacute;criture s&rsquo;apparente &agrave; une lutte intense pour faire &eacute;merger une langue idiolectale nourrie de sa double appartenance aux cultures malink&eacute; et fran&ccedil;ais ; politico-culturelle ensuite, parce que son statut d&rsquo;&eacute;crivain francophone postcolonial repr&eacute;sente un deuxi&egrave;me obstacle &agrave; ses tentatives de faire entendre sa voix. Il a fallu l&rsquo;effort de toute une vie pour surmonter ces difficult&eacute;s. Le &laquo; devenir &eacute;crivain &raquo; de Kourouma n&rsquo;est au fond donc rien d&rsquo;autre qu&rsquo;un synonyme de la fa&ccedil;on toute personnelle qu&rsquo;il a choisie pour s&rsquo;engager dans cette lutte </i>(Corcoran, 2018 : 13).</span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">Ainsi, &agrave; l&rsquo;en croire, Kourouma, que la critique a longtemps per&ccedil;u comme n&rsquo;&eacute;tant que l&rsquo;homme d&rsquo;un seul livre, a fait corps avec sa premi&egrave;re &oelig;uvre. Celle-ci a g&eacute;n&eacute;r&eacute; aussi bien un projet politique qu&rsquo;un projet esth&eacute;tique auquel l&rsquo;auteur s&rsquo;est identifi&eacute; au point de se voir r&eacute;duit &agrave; un style, celui des <i>Soleils</i>, fait d&rsquo;iconoclastie langagi&egrave;re et d&rsquo;ind&eacute;pendance scripturaire. De ce point de vue, autant les consid&eacute;rants expressifs (faits de langage) constituent des myth&egrave;mes &eacute;difiant l&rsquo;ossature mythologique des <i>Soleils</i>, autant cette &oelig;uvre m&ecirc;me constitue un myth&egrave;me qui, avec des indices transtextuels de diverses natures et d&rsquo;origine auctoriale ou ex&eacute;g&eacute;tique, construisent le mythe personnel de Kourouma comme influenceur pionnier de l&rsquo;esth&eacute;tique langagi&egrave;re de l&rsquo;africanisation, et de l&rsquo;&eacute;mancipation du parler ivoirien en r&eacute;gime d&rsquo;artistisation. </span></span></span></p> <h2 style="text-align: justify;"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span style="font-family:" times="">Conclusion</span></b></span></span></h2> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">Les myth&egrave;mes, envisag&eacute;s comme autant de styl&egrave;mes dans cette &eacute;tude, mettent en lumi&egrave;re la constance de l&rsquo;influence des <i>Soleils</i>, et par ricochet celle de Kourouma aussi bien sur la soci&eacute;t&eacute; ivoirienne en particulier, que celle plus g&eacute;n&eacute;rale de la soci&eacute;t&eacute; des Lettres. Si le projet de l&rsquo;auteur a longtemps &eacute;t&eacute; per&ccedil;u comme essentiellement politique, il est utile de rappeler la bipolarit&eacute; de cette ambition iconoclaste qui visait sous le couvert de la d&eacute;structuration du fran&ccedil;ais correct, celle de la contestation de la monarchie-r&eacute;publicaine. C&rsquo;est donc au d&eacute;tour d&rsquo;une subtile mise en abyme que Salimata y incarne la culture africaine (langagi&egrave;re surtout) amput&eacute;e, viol&eacute;e et jug&eacute;e st&eacute;rile par un imp&eacute;rialisme occidental sans scrupule et, de surcroit, doublement incarn&eacute; par le pouvoir politique (le parti) et le pouvoir mystique (Ti&eacute;coura). Dans cette approche herm&eacute;neutique nourrie par le symbolisme, Fama n&rsquo;incarne plus l&rsquo;Afrique traditionnelle, qui meurt faute de pouvoir s&rsquo;adapter aux ind&eacute;pendances, mais plut&ocirc;t la projection esp&eacute;r&eacute;e du pouvoir politique noir, nourri aux mamelles du capitalisme occidental, ill&eacute;gitime parce qu&rsquo;impos&eacute; &agrave; l&rsquo;Afrique, et dont l&rsquo;indignit&eacute; le condamne &agrave; mourir du fait de son incapacit&eacute; &agrave; s&rsquo;adapter vraiment &agrave; la civilisation noire. C&rsquo;est tout le sens d&rsquo;un autre mythe illustre dans <i>Les Soleils</i>&nbsp;: celui de la b&acirc;tardise&nbsp;; de la b&acirc;tardise politique, de la b&acirc;tardise linguistique&nbsp;et de la b&acirc;tardise g&eacute;n&eacute;rique.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">Peut-on alors parler d&rsquo;un &laquo;&nbsp;genre Kourouma&nbsp;&raquo;&nbsp;? Vraisemblablement oui, en raison de ce que l&rsquo;auteur a initi&eacute; une pratique langagi&egrave;re et scripturaire d&rsquo;o&ugrave; s&rsquo;originent aussi bien un mode d&rsquo;expression sp&eacute;cifique au continuum culturel ivoirien, qu&rsquo;une ossature formelle et canonique de l&rsquo;&eacute;criture n&eacute;gro-africaine. Les &eacute;cueils rencontr&eacute;s avant la publication des <i>Soleils</i>, le grand succ&egrave;s qui en a d&eacute;coul&eacute; par la suite, au point de d&eacute;finir Kourouma pendant longtemps comme l&rsquo;homme d&rsquo;un seul roman, l&rsquo;immensit&eacute; des recensions qui lui ont &eacute;t&eacute; accord&eacute;es, et dont le couronnement s&rsquo;est traduit par les divers prix engrang&eacute;s&hellip; Tout cela d&eacute;finit avec pr&eacute;cision la carrure de cet auteur, son ethos de pionnier et de l&eacute;gitimit&eacute; quant &agrave; mettre au diapason de la cr&eacute;ation romanesque, l&rsquo;imaginaire socio-discursif en circulation dans la soci&eacute;t&eacute; postcoloniale d&rsquo;Afrique noire.&nbsp; Le g&eacute;nie de Kourouma aura donc &eacute;t&eacute; d&rsquo;op&eacute;rer, dans cette &oelig;uvre culte, une triple r&eacute;volution de nature linguistique, stylistique et politique. Si l&rsquo;iconoclastie qu&rsquo;il a ainsi &eacute;rig&eacute;e en principe d&rsquo;artistisation, voire en mode d&rsquo;expression, a &eacute;t&eacute; per&ccedil;ue comme un acte de d&eacute;fiance et de r&eacute;bellion contre une classe politique quasi sadique, nombreux ex&eacute;g&egrave;tes ont pass&eacute; sous silence l&rsquo;&eacute;vidence selon laquelle <i>Les Soleils</i> constituent r&eacute;solument le produit d&rsquo;une affirmation identitaire plut&ocirc;t que celui d&rsquo;une qu&ecirc;te de l&rsquo;identit&eacute;. Ainsi, la langue et le style de Kourouma, encore vifs dans les habitus langagiers ivoiriens et n&eacute;gro-africains, ne se sont jamais cherch&eacute; une quelconque l&eacute;gitimit&eacute; mais, bien au contraire, ont toujours l&eacute;gitim&eacute; cette &oelig;uvre dont la contemporan&eacute;it&eacute; s&rsquo;actualise, toujours si intens&eacute;ment, quarante ans apr&egrave;s.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="text-align: center;"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><b><span style="font-family:" times="">Bibliographie</span></b></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">BONHOMME Marc (1998), <i>Les figures-cl&eacute;s du discours</i>, Paris, Seuil.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">BORASO Silvia (2017), &laquo;&nbsp;Ahmadou Kourouma et la transposition de la parole malink&eacute; Analyse de la repr&eacute;sentation langagi&egrave;re et du projet de l&eacute;gitimation linguistique dans Allah n&rsquo;est pas oblig&eacute;, Il Tolomeo, Vol. 19.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">BOUTIN B&eacute;atrice Akissi (2002), <i>Description de la variation: &Eacute;tudes transformationnelles des phrases du fran&ccedil;ais de C&ocirc;te d&rsquo;Ivoire</i>. Linguistique. Universit&eacute; Stendhal - Grenoble III. Fran&ccedil;ais.&nbsp; tel- 00736883.</span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">CAITUCOLI Claude (2004), &laquo; L&rsquo;&eacute;crivain francophone agent glottopolitique. L&rsquo;exemple d&rsquo;Ahmadou Kourouma &raquo;, Glottopol, 3, 6-25.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">CAITUCOLI Claude (2007), &laquo; Ahmadou Kourouma et l&rsquo;appropriation du fran&ccedil;ais. Th&eacute;orie et pratique &raquo;, Synergies Afrique Centrale et de l&rsquo;Ouest, 2, 53-70.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">CORCORAN Patrick, (2018), &laquo; Le &laquo; devenir auctorial &raquo; d&rsquo;Ahmadou Kourouma &raquo;, Continents manuscrits [En ligne], 10 | 2018, mis en ligne le 15 mars 2018, consult&eacute; le 30 avril 2019. URL : http://journals.openedition.org/coma/1158 ; DOI : 10.4000/coma.1158. </span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">DELBART Anne-Rosine (2005), <i>Les exil&eacute;s du langage : Un si&egrave;cle d&#39;&eacute;crivains fran&ccedil;ais venus d&#39;ailleurs</i> (1919-2000), Limoges, Presses Universitaires de Limoges et du Limousin.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">GASSAMA Makhily (1995), <i>La langue d&rsquo;Ahmadou Kourouma ou le fran&ccedil;ais sous le soleil d&rsquo;Afrique</i>, Paris, ACCT-Karthala.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">GILBERT Durand (1996), <i>Introduction &agrave; la mythodologie. Mythes et soci&eacute;t&eacute;s</i>, Paris, Albin Michel.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">HOUIS Maurice (1977), &laquo; Les niveaux de signification dans &ldquo;Les soleils des ind&eacute;pendances&rdquo;, par Ahmadou Kourouma &raquo;, <i>Recherche, P&eacute;dagogie et Culture</i>, n&deg; 28, mars-avril.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">KOUADIO N&rsquo;guessan J&eacute;r&eacute;mie (1990), &laquo; Le nouchi abidjanais, naissance d&rsquo;un argot ou mode linguistique passag&egrave;re ? &raquo;, Gouaini/Thiam (&eacute;ds.), Des Langues et des villes, Paris, ACCT/Didier Erudition, p. 373-383.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">KOUADIO N&rsquo;guessan J&eacute;r&eacute;mie , (2006). &laquo; Le nouchi et les rapports dioula-fran&ccedil;ais &raquo;, <i>Le fran&ccedil;ais en Afrique</i>, n&deg; 21, pp. 177-192.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">KOUROUMA Ahmadou (1991), dans Jeune Afrique &Eacute;conomie, n&deg; 139, janvier 1991, p. 102-107. Propos recueillis par Odile Felgine et Michel Lob&eacute; Ewan&eacute;.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">KOUROUMA Ahmadou (1997), &laquo; &Eacute;crire en fran&ccedil;ais, penser dans sa langue maternelle &raquo;. &Eacute;tudes fran&ccedil;aises, 33(1), 115-18.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">MOLINI&Eacute; Georges ([1986]1991), <i>&Eacute;l&eacute;ments de stylistique fran&ccedil;aise</i>, Paris, PUF.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">MOLINI&Eacute; Georges (1992), <i>Dictionnaire de rh&eacute;torique</i>, Paris, Librairie g&eacute;n&eacute;rale fran&ccedil;aise.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">MOLINI&Eacute; Georges (2000), &laquo; Coda : Topique et littérarité&quot;, <i>Le sens (du) commun : histoire, théorie et lecture</i>, Volume 36, numéro 1, 2000, p. 151-156, URI : id.erudit.org/iderudit/036175ar </span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">OUATTARA Basile (2014), &laquo;&nbsp;Hybridit&eacute; et artificialit&eacute; du nouchi : lectures sociolinguistiques d&rsquo;un parler&nbsp;&raquo;, <i>Langue et territoire, &Eacute;tudes en sociolinguistique urbaine</i>, Boissonneault Julie, Reguigui Ali (Sous la dir.) S&eacute;rie monographique en sciences humaines 15, Sudbury, Ontario, p. 211-241.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">OUEDRAOGO Jean &amp; KOUROUMA Ahmadou (2001), <i>Entretien avec Ahmadou</i> <i>Kourouma</i>, The French Review, Vol. 74, No. 4 (Mars), pp. 772-785</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">OUEDRAOGO Jean (&eacute;d.) (2010). <i>L&rsquo;imaginaire d&rsquo;Ahmadou Kourouma. Contours et enjeux d&rsquo;une esth&eacute;tique</i>, Paris, Karthala.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">RIFFATERRE Michael. &laquo;&nbsp;L&rsquo;intertexte inconnu&nbsp;&raquo;. <i>Littérature</i>, n&deg;41, 1981. <i>Intertextualité et roman en France, au Moyen Âge</i>. pp. 4-7; https://www.persee.fr/doc/litt_0047-4800_1981_num_41_1_1330.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">VAHID Nejad Mohammad, MATHIEU-JOB Martine (2016), &laquo;&nbsp;Lecture mythocritique d&rsquo;Onitsha de Jean-Marie Gustave Le Cl&eacute;zio&nbsp;&raquo;, <i>Recherches en langue et Litt&eacute;rature Fran&ccedil;aises</i>, n&deg; 18, p. 101-124.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="font-family:" times="">ZALESSKY Mich&egrave;le (1988), &laquo; La langue : un habit cousu pour qu&rsquo;il moule bien &raquo; (entretien avec Ahmadou Kourouma), Diagonales, n&deg; 7, suppl&eacute;ment du Fran&ccedil;ais dans le monde, n&deg; 218, p. 4-5.</span></span></span></p>