<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><a name="_Toc88742245"><b><span style="color:black">Introduction</span></b></a></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">Nous partirons de la notion de schéma en commençant par en proposer la définition suivante : le schéma est une figure sans ornement. Autrement dit, c’est le modèle simplifié d’un objet spatial ou d’un processus temporel qui permet de représenter dans un espace à la fois sémiotique et graphique un objet ou un processus pour en comprendre les parties ou les moments essentiels. La fonction du schéma est donc double : elle est instructive et analytique, instructive parce qu’analytique. </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">Or pour devenir un diagramme, le schéma ne doit pas simplement conserver une homologie de structure avec ce dont il est le schéma, c’est-à-dire avec son objet entendu comme référent visé. Il doit être supplémenté d’une propriété : la générativité. Il doit donc être potentiellement producteur et reproducteur d’autre chose que ce qu’il représente. Une question se pose alors : comment le peut-il ? C’est-à-dire : quelles sont les conditions qui permettent de transformer le schéma en diagramme ? Autrement dit : de quoi le schéma doit-il être supplémenté pour être transformé en un diagramme permettant de produire un supplément caractéristique de la différence entre un schéma et un diagramme ? Quelle est la nature de ce supplément ? S’agit-il d’un supplément d’intelligibilité ? </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><b><span style="color:black">Figure, schéma et </span></b><b><span style="color:black">processus de modélisation structurelle</span></b><b> </b></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><a name="_Toc88742247"><i>Dimension spatiale du schéma</i></a><i> </i></span></span></p>
<p><span style="font-size:12.0pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">Nous venons de donner comme première définition extrêmement générale et approximative du schéma : « figure sans ornement ». Le schéma est donc une espèce du genre figure : il est en quelque sorte le squelette dont la figure est la chaire. C’est une bonne métaphore pour décrire spontanément le rapport du schéma à la figure. Car le schéma dé-densifie la figure : il la dé-sature. On peut même dire qu’en la dé-saturant, il en révèle l’ossature (Ferri, 2021). Cette ossature a deux caractéristiques : elle conserve la forme apparente de la figure mais elle la dépossède simultanément d’un certain nombre de propriétés. Par exemple <i>L’Homme de Vitruve </i>de Léonard de Vinci</span></span></span><span style="font-size:12.0pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black"> est un dessin qu’on peut considérer comme une représentation picturale du corps humain. En tant que représentation picturale, c’est une figure du corps humain :</span></span></span></p>
<p style="text-align: center;"><img height="332" src="https://www.numerev.com/img/ck_1019_17_image-20211125205004-1.png" width="290" /></p>
<p style="text-align: center;"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><a name="_Toc77581748"><i><span style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">Figure 1. L’Homme de Vitruve</span></span></i></a><i><span style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">. URL: </span></span></i><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Homme_de_Vitruve#/media/Fichier:Vitruvian_Man_by_Leonardo_da_Vinci.jpg" style="color:#0563c1; text-decoration:underline"><i><span style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">https://fr.wikipedia.org/wiki/Homme_de_Vitruve#/media/Fichier:Vitruvian_Man_by_Leonardo_da_Vinci.jpg</span></span></i></a></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">Mais la représentation du même corps, abstraction faite de sa peau, c’est-à-dire construite afin de représenter ses différentes parties internes, si elle est accompagnée d’une légende (permettant de dénommer les différentes parties constituantes du corps) et de flèches (permettant de les identifier une à une), alors elle devient un schéma. Ce peut être un schéma construit en vue de se faire une représentation des différents muscles du corps humain ou une représentation des différentes parties du corps chez l’homme et la femme :</span></span></span></p>
<p style="text-align: center;"><img height="508" src="https://www.numerev.com/img/ck_1019_17_image-20211125205126-2.png" width="460" /></p>
<p style="text-align: center;"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><a name="_Toc77581749"><i><span style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">Figure 2. Schéma du corps humain</span></span></i></a><i><span style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">. </span></span><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">URL: </span></span></i><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_muscles_du_corps_humain" style="color:#0563c1; text-decoration:underline"><i><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_muscles_du_corps_humain</span></span></i></a></span></span></p>
<p style="text-align: center;"> </p>
<p style="text-align: center;"><img height="428" src="https://www.numerev.com/img/ck_1019_17_image-20211125205233-3.png" width="540" /></p>
<p style="text-align: center;"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><i><span style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">Figure 3. Schéma des corps de la femme et de l’homme. </span></span><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">URL: </span></span></i><a href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/b/b1/Human_body_features-fr.svg/1920px-Human_body_features-fr.svg.png" style="color:#0563c1; text-decoration:underline"><i><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/b/b1/Human_body_features-fr.svg/1920px-Human_body_features-fr.svg.png</span></span></i></a></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">Deux opérations découpent donc la figure en schéma : la distinction des parties de la figure et leur dénomination une à une. Nous pouvons ainsi avancer une première définition de la figure :</span></span></span></p>
<p style="text-align: center;"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><b><span style="color:black">Une figure est une représentation graphique synthétique et synoptique, donc spatiale, plus ou moins dense et saturée, dont le schéma est la simplification et l’explicitation.</span></b></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">Qu’est-ce qu’ajoute le schéma à la figure et que lui retire-t-il simultanément ? Nous dirons qu’il lui retire la richesse sensible mais qu’il lui ajoute des attributs caractéristiques sinon des énoncés permettant d’expliciter et de simplifier ce dont la figure est l’étoffement. Autrement dit, ce qu’opère le schéma vis-à-vis de l’espace sémiotique et graphique de la figure, c’est un plongement de l’espace linguistique.</span></span></span></p>
<p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">Dès lors, si le schéma conserve la proportion des rapports de distance entre les différentes parties de la figure qu’il représente, on dit qu’il en respecte les relations métriques. S’il respecte les relations métriques de la figure, il en respecte par définition les relations topologiques (rapports de position). Mais la réciproque n’est pas vraie : le schéma peut respecter les relations topologiques sans respecter les relations métriques, comme en témoigne par exemple ce schéma d’une cellule végétale :</span></span></span></p>
<p style="text-align: center;"><img height="332" src="https://www.numerev.com/img/ck_1019_17_image-20211125205344-4.png" width="492" /></p>
<p style="text-align: center;"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><a name="_Toc77581751"><i><span style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">Figure 4. Schéma d’une cellule végétale</span></span></i></a><i><span style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">. </span></span><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">URL: </span></span></i><a href="https://www.researchgate.net/figure/Schema-dune-cellule-vegetale-dapres-Hopkins-Hopkins-1995-et-Gallien-Gallien_fig2_42100266" style="color:#0563c1; text-decoration:underline"><i><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">https://www.researchgate.net/figure/Schema-dune-cellule-vegetale-dapres-Hopkins-Hopkins-1995-et-Gallien-Gallien_fig2_42100266</span></span></i></a></span></span></p>
<p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">De plus, un schéma peut respecter les relations métriques et les relations topologiques des éléments de la figure qu’il représente sans nécessairement respecter les échelles relatives entre ces éléments. Lorsque le schéma respecte les proportions entre les relations métriques des éléments qu’il représente suivant un facteur d’échelle, le schéma devient une carte :</span></span></span></p>
<p style="text-align: center;"><img height="394" src="https://www.numerev.com/img/ck_1019_17_image-20211125205450-5.png" width="380" /></p>
<p style="text-align: center;"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><i><span style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">Figure 5. Carte de la France. </span></span><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">URL: </span></span></i><a href="https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/e/e1/France_blank.png" style="color:#0563c1; text-decoration:underline"><i><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/e/e1/France_blank.png</span></span></i></a></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">Nous venons de présenter la dimension spatiale du schéma comme représentation graphique. Il nous faut à présent caractériser sa dimension temporelle.</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><a name="_Toc88742248"><i>Dimension temporelle du schéma</i></a></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">Le schéma peut aussi avoir une dimension et une signification temporelles : c’est le schéma au sens du schéma comportemental, l’ensemble perceptible des rapports constants que laisse apparaître une conduite répétée. Cette dimension temporelle conduit d’ailleurs le schéma à se transformer en schème. Car la dimension temporelle est aussi celle qui introduit le mouvement du schéma au sein d’un processus moteur. En ce sens, le schéma devenant schème est une figure du corps en mouvement : c’est la figure d’un comportement qui se manifeste de façon répétitive, suivant une certaine constance et une certaine fréquence dans le temps, à travers des mouvements s’exprimant par des actions et des manières de faire. </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">Si dans sa dimension spatiale le schéma est à la figure ce que le squelette est à la chaire, on peut se demander quels sont les analogues temporels de la figure et du schéma ? Autrement dit, quelle image pourrait nous donner une représentation figurative du rapport des analogues temporels de la figure spatiale et du schéma spatial ? Nous dirons que le schème est à l’action ce que le schéma est à la figure (Ferri, 2021). Autrement dit, le schème est à la figure temporelle ce que le schéma est à la figure spatiale. C’est une dé-densification et une désaturation de la complexité de l’action saisie dans son épaisseur temporelle. Nous posons donc : </span></span></span></p>
<p style="text-align: center;"><span style="font-family:"Cambria Math",serif"><span style="color:black"><span style="font-style:italic"><m:ctrlpr></m:ctrlpr></span></span></span> <span style="font-size:12.0pt"><span style="font-family:"Cambria Math",serif"><span style="color:black"><m:r><m:rpr><m:scr m:val="roman"><m:sty m:val="p"></m:sty></m:scr></m:rpr>Figure</m:r></span></span></span> <span style="font-size:12.0pt"><span style="font-family:"Cambria Math",serif"><span style="color:black"><m:r><m:rpr><m:scr m:val="roman"></m:scr></m:rpr>/ Schéma</m:r></span></span></span> <i><span style="font-size:12.0pt"><span style="font-family:"Cambria Math",serif"><span style="color:black"><m:r>≡</m:r></span></span></span></i> <span style="font-family:"Cambria Math",serif"><span style="color:black"><span style="font-style:italic"><m:ctrlpr></m:ctrlpr></span></span></span> <span style="font-size:12.0pt"><span style="font-family:"Cambria Math",serif"><span style="color:black"><m:r><m:rpr><m:scr m:val="roman"><m:sty m:val="p"></m:sty></m:scr></m:rpr>Action</m:r></span></span></span> <span style="font-size:12.0pt"><span style="font-family:"Cambria Math",serif"><span style="color:black"><m:r><m:rpr><m:scr m:val="roman"><m:sty m:val="p"></m:sty></m:scr></m:rpr>/ Schème</m:r></span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">L’action est ainsi posée comme une figure du temps, dont le schème est l’abstraction, c’est-à-dire le schéma. Nous pouvons dès lors poser la question suivante : comment peut-on représenter le schème, c’est-à-dire l’abstraction d’une figure temporelle, à travers un schéma spatial ? Autrement dit : comment peut-on représenter le schéma temporel d’une action, c’est-à-dire son schème, à travers un schéma spatial ?</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">Si on décompose l’action comme on décompose la figure dans le schéma figuratif, alors les segments de l’action considérée comme une totalité en constituent les parties temporelles. Si chaque segment partiel d’une action est représenté par une figure, alors il est possible d’extraire les schémas représentatifs des moments de l’action décomposée. Le principe de cette décomposition nous est donné par la technique de la chronophotographie :</span></span></span></p>
<p style="text-align: center;"><img height="446" src="https://www.numerev.com/img/ck_1019_17_image-20211125210023-6.png" width="716" /></p>
<p style="text-align: center;"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><i><span style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">Figure 6. Chronophotographie. URL : </span></span></i><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Chronophotographie#/media/Fichier:The_Horse_in_Motion.jpg" style="color:#0563c1; text-decoration:underline"><i><span style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">https://fr.wikipedia.org/wiki/Chronophotographie#/media/Fichier:The_Horse_in_Motion.jpg</span></span></i></a></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">La représentation spatiale d’un schème au sens où nous venons de le définir se présente donc comme la sériation ordonnée d’un nombre fini de schémas. Si le schème désigne l’ensemble des rapports entre différents points du temps définissant les extrémités des segments d’une action entière et totale, alors il est possible de projeter ces points dans un espace de configuration pour en obtenir un schéma spatial. Cela conduit à l’idée de la représentation de moments temporels grâce à la disposition dans l’espace graphique d’un ensemble de marques qui représentent ces moments. Cela conduit donc à l’idée de </span><span style="color:black">dispositif graphique, si l’on entend par dispositif la détermination d’un comportement temporel par l’organisation spatiale d’un ensemble d’éléments reliés les uns aux autres</span><span style="color:black"> (Bachimont, 2004, p. 16)</span><span style="color:black">, dont l’unité synergique est orientée vers l’accomplissement d’une tâche déterminée, d’une action précise.</span><span style="color:black"> Cela nous reconduit alors à la définition du mécanisme au sens cartésien du terme (Simondon, 2016, p. 397-411).</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">La représentation d’un mécanisme au moyen d’un dispositif graphique de marques conduit ainsi à l’idée de schéma technologique. C’est par exemple le schéma technologique du cycle 4-temps à allumage commandé du moteur à combustion et explosion. Le schéma de chaque phase nous donne un moment du cycle :</span></span></span></p>
<p style="text-align: center;"><img height="766" src="https://www.numerev.com/img/ck_1019_17_image-20211125210143-7.png" width="530" /></p>
<p style="text-align: center;"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><a name="_Toc77581754"><i><span style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">Figure 7. Cycle 4-temps du moteur à combustion et explosion</span></span></i></a><i><span style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">.</span></span></i></span></span></p>
<p style="text-align: center;"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><b><i><span style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">URL : </span></span></i></b><a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Moteur_%C3%A0_combustion_et_explosion#/media/Fichier:4-Stroke-Engine.gif" style="color:#0563c1; text-decoration:underline"><i><span style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">https://fr.wikipedia.org/wiki/Moteur_%C3%A0_combustion_et_explosion#/media/Fichier:4-Stroke-Engine.gif</span></span></i></a><i><span style="font-size:10.0pt"><span style="color:black"> (Figure modifiée dans Ferri, 2021, p. 95)</span></span></i></span></span></p>
<p style="text-align:justify"> </p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">La mise en mouvement chronophotographique de ces schémas permet de simuler graphiquement le cycle. Le GIF du cycle permet d’en donner quant à lui une représentation dynamiqu<a name="_Toc88521474"></a></span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><b><span style="color:black">Du dispositif graphique </span></b><b><span style="color:black">au modèle de Turing</span></b></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><a name="_Toc88742250"><i>Extension du concept de dispositif : dispositif mécanique, dispositif thermodynamique et dispositif computationnel</i></a></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">Il nous faut maintenant revenir à l’histoire de la pensée moderne et contemporaine, car l’histoire de la rationalité moderne et contemporaine – telle qu’elle s’étend de Descartes jusqu’aux développements les plus récents de l’informatique théorique – nous enseigne que l’essence du mécanisme se loge dans le concept de dispositif. Qu’est-ce alors qu’un dispositif ?</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">Un dispositif peut être défini concrètement comme l’interdépendance systématique d’un nombre fini d’éléments dont la principale caractéristique est d’être des entités spatiales (i.e. des entités non seulement étendues mais aussi localisables dans un espace). Lorsque le dispositif fonctionne, les pièces qui le constituent sont mises en mouvement les unes par rapport aux autres suivant un ordre temporel bien défini. C’est pourquoi un dispositif se définit aussi par un nombre fini de moments temporels pendant lesquels ses pièces sont en mouvement les unes par rapport aux autres, dans les limites de ce qu’on appelle en physique des degrés de liberté. La restauration périodique des mêmes rapports entre ces entités spatiales, qui sont constitutives du dispositif (entendu comme ensemble d’entités matérielles ayant une solidarité concrète), définit quant à elle des cycles de fonctionnement, temporellement programmés par la disposition des pièces et l’ordre de leurs interactions dans le temps. </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">L’exemple canonique du dispositif mécanique est ainsi la montre, car la montre est le symbole concret du mécanisme qui produit, présente et reproduit le temps qui règle le calendrier de nos rapports sociaux. L’exemple canonique du dispositif thermodynamique est quant à lui le moteur, car le moteur est le symbole concret du mécanisme qui ne se réduit pas à l’automouvement immobile d’un mécanisme horloger, mais produit le mouvement du dispositif dont le moteur est le cœur. Par exemple, le moteur à explosion est le cœur du dispositif voiture, qui grâce à lui, rend possible son auto-mobilité, et par conséquent son déplacement spatial.</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">Or nous savons depuis maintenant 80 ans qu’il y a un modèle scientifique qui donne une formalisation rigoureuse de ce qu’est un dispositif, c’est ce qu’on appelle la machine de Turing (Turing, 1939). Pourquoi la machine de Turing est-elle la formalisation rigoureuse de ce qu’est un dispositif ? Avant de répondre à cette question, il est nécessaire de revenir sur le terme d’informatique et sur le sens de cette science qui a moins d’un siècle, car cela nous permettra de faire la transition entre les dispositifs thermodynamiques et les dispositifs computationnels, pour arriver à l’idée de géométrie abstraite et discrète du temps (Bachimont, 1996) dont la diagrammatique est selon nous le complément. Car la diagrammatique est la géométrie concrète des opérations pratiques pourvues de signification, menant à la résolution des problèmes de la vie concrète. La sémiotique diagrammatique est en effet le langage visuel de la pratique entendue comme ensemble des opérations non calculatoires, c’est-à-dire des opérations qui excèdent toute formalisation algorithmique et donc nécessitent pour être modélisées le développement d’une nouvelle discipline que nous appelons l’ingénierie sémiotique des systèmes diagrammatiques (Ferri, 2021). </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><a name="_Toc88742251"><i>L’informatique comme modèle scientifique des dispositifs</i></a></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">La machine de Turing est le modèle théorique du fonctionnement des ordinateurs modernes. </span></span></span></p>
<p style="text-align: center;"><img height="330" src="https://www.numerev.com/img/ck_1019_17_image-20211125210531-8.png" width="330" /></p>
<p style="text-align: center;"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><i><span style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">Figure 8. Schéma de la machine de Turing. </span></span><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">URL: </span></span></i><a href="http://www.desmontils.net/emiage/Module209EMiage/c5/Ch5_2.htm" style="color:#0563c1; text-decoration:underline"><i><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">http://www.desmontils.net/emiage/Module209EMiage/c5/Ch5_2.htm</span></span></i></a></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">Elle </span><span style="color:black">est un dispositif composé de trois éléments fondamentaux : </span></span></span></p>
<ul>
<li style="text-align: justify;"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">Une bande mémoire divisée en cases sur lesquelles sont inscrites en entrées des données codées dans un alphabet fini et dénombrable. </span></span></span></li>
<li style="text-align: justify;"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">Un programme enregistré sur cette même bande mémoire, mais sur un emplacement distinct de celui des données. Ce programme est ce qui contient les instructions opératoires que la machine doit effectuer sur le code des données : il contient donc les règles de lecture.</span></span></span></li>
<li style="text-align: justify;"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">Le dispositif est composé d’une tête de lecture/écriture à états internes, en nombre fini et mutuellement exclusifs, appliquant les instructions du programme sur le code des données. Cette tête de lecture effectue donc les manipulations dictées par le programme. Elle est capable soit d’écrire un symbole, soit d’effacer un symbole, soit de se déplacer d’une case sur la bande, à droite ou à gauche. </span></span></span></li>
</ul>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">Lorsque la tête de lecture rencontre un couple formé d’un état interne associé à une instruction de déplacement, mais qui n’est pas enregistré dans sa table de transitions, la machine s’arrête et l’ordonnancement des symboles stockés sur la bande mémoire correspond au résultat du traitement calculatoire effectué par la machine. Ainsi, ce que nous a permis de comprendre la machine de Turing, c’est qu’exécuter un algorithme au sein d’un dispositif informatique est équivalent à effectuer un calcul arithmétique avec un dispositif papier/crayon. Exécuter un algorithme, dans le cas le plus simple, c’est effectuer un calcul arithmétique automatisé au sein d’un ordinateur, qui est une réalisation concrète du principe de fonctionnement de la machine abstraite de Turing, modèle de tout dispositif, c’est-à-dire de tout arraisonnement du temps par l’espace (Bachimont, 2004, p. 30-31).</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">Si la machine de Turing marque l’acte de naissance de l’informatique comme science, la réalisation du premier ordinateur en marque en revanche la naissance comme ingénierie. Dans informatique, il y a deux mots en un : information et automatique. Mais le mot information ne doit pas nous tromper. Il doit être entendu au sens technique du terme, </span><span style="color:black">c’est-à-dire tel que défini par Claude Shannon au sortir de la Seconde Guerre mondiale (Bachimont, 1994, p. 16). L’information, en ce sens technique, c’est un code. Or un code est d’autant plus informant qu’il contient de bits. </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">L’informatique est donc l’ingénierie du traitement automatique de l’information, tel qu’il est mis en œuvre par une machine concrète, qui est un centre de calcul : l’ordinateur. Puisque le traitement est effectué par la médiation de calculs (qui correspondent à des exécutions d’algorithmes) effectués sur des codages (qui correspondent à des suites d’informations au sens de Shannon), l’informatique est aussi une science. On peut dire qu’elle est une science de la nature, car elle permet de comprendre comment des systèmes physiques structurellement différents peuvent être fonctionnellement homologues, car capables d’opérer les mêmes transferts logiques d’information, et donc être susceptibles d’une même modélisation algorithmique (Chazelle, 2012, §68). C’est ce que Simondon appelait le « principe d’équivalence des méthodes » (Simondon, 2016, p. 46) et que nous appelons le « principe d’équivalence fonctionnelle » (Ferri, 2021, p. 547), selon lequel un même résultat peut être obtenu à partir d’opérations et de structures très différentes. La réciproque étant vraie aussi : des mécanismes qui produisent des effets différents peuvent être équivalents. Par exemple, une sonnette électrique est équivalente à une horloge électrique, car elle fonctionne grâce au principe d’établissement et de rupture d’un courant dans un circuit à partir d’une action par contact. Le rapport </span><m:omath><m:f><m:fpr><span style="font-family:"Cambria Math",serif"><span style="color:black"><m:ctrlpr></m:ctrlpr></span></span></m:fpr><m:num><span style="font-family:"Cambria Math",serif"><span style="color:black"><m:r><m:rpr><m:scr m:val="roman"><m:sty m:val="p"></m:sty></m:scr></m:rpr>Opérateur humain </m:r></span></span></m:num><m:den><span style="font-family:"Cambria Math",serif"><span style="color:black"><m:r><m:rpr><m:scr m:val="roman"><m:sty m:val="p"></m:sty></m:scr></m:rpr>/ Sonnette</m:r></span></span></m:den></m:f></m:omath><span style="color:black"> est strictement équivalent au rapport </span><m:omath><m:f><m:fpr><span style="font-family:"Cambria Math",serif"><span style="color:black"><m:ctrlpr></m:ctrlpr></span></span></m:fpr><m:num><span style="font-family:"Cambria Math",serif"><span style="color:black"><m:r><m:rpr><m:scr m:val="roman"><m:sty m:val="p"></m:sty></m:scr></m:rpr>Balancier</m:r></span></span></m:num><m:den><span style="font-family:"Cambria Math",serif"><span style="color:black"><m:r><m:rpr><m:scr m:val="roman"><m:sty m:val="p"></m:sty></m:scr></m:rpr> / Horloge</m:r></span></span></m:den></m:f></m:omath><span style="color:black">. Il y a donc beaucoup plus d’analogie réelle entre une horloge électrique et une sonnette électrique, qu’entre cette horloge électrique et une horloge à poids, dont l’ensemble <i>poids – roue motrice – crochet – remontoir – tambour</i> est strictement équivalent à un treuil de carrière.</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">L’informatique est le traitement automatique des informations (Berry, 2009), parce qu’elle est l’ingénierie de l’information discrétisée numériquement, dont le format technique de manipulation est le codage binaire, et dont le support virtuel opératoire et calculatoire est la machine de Turing</span><span style="color:black">. Elle est aussi une science, car les lois qui régissent ses manipulations sont les lois du calcul, formalisées à travers des algorithmes. Qu’est-ce qu’un algorithme ? </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">C’est un calcul effectuable sur des codages, c’est-à-dire sur de l’information discrétisée numériquement et techniquement manipulée dans un format binaire. Mais les signes manipulés ne signifient rien dans la mesure où ils ne le sont qu’en fonction de leur forme syntaxique (définie par le langage de programmation utilisé) et non de la signification qui leur est associée (purement conventionnelle et extrinsèque à la manipulation calculatoire). Comme la manipulation n’est pas fondée sur la nature physique des symboles manipulés, mais sur les règles syntaxiques du langage de programmation utilisé, un algorithme et son exécution ne dépendent pas de la nature physique de l’ordinateur qui les réalise. C’est la raison pour laquelle l’informatique a pu être définie comme une physique abstraite des signes. « Physique des signes » dans la mesure où ces derniers sont manipulés de manière purement mécanique ; « physique abstraite » dans la mesure où les lois qui la concernent ne sont pas relatives à la matière, mais au temps (Bachimont, 1994, p. 16).</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">Suivant ces principes de codage numérique de l’information et de codage numérique des transformations à opérer sur des informations numérisées, il est possible d’obtenir le code résultat des données d’un problème et de sa méthode de résolution pour lequel l’exécution d’un programme enregistré sur une machine de Turing</span><span style="color:black"> permet d’obtenir une résolution automatique du problème numérisé. Dès lors on peut se poser la question suivante : comment une physique de signes informatiques peut-elle devenir une physique des signes investis d’esprit ?</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><a name="_Toc88742252"><i>Dispositif computationnel et production de sens : l’ingénierie des connaissances</i></a></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">En opérant non plus un traitement automatique d’informations numérisées mais un traitement automatique des connaissances, comme l’a prouvé l’ingénierie des connaissances. </span></span></span></p>
<p style="text-align: center;"><img height="346" src="https://www.numerev.com/img/ck_1019_17_image-20211125210838-9.png" width="838" /></p>
<p style="text-align: center;"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><i><span style="font-size:10.0pt"><span style="color:black">Figure 9. Diagrammes de fonctionnement de l’IA conçue comme ingénierie des connaissances</span></span></i><span style="font-size:10.0pt"><span style="color:black"> (Bachimont, 1996, p. 3 et 5)</span></span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">En effet, en opérant la modélisation de contenus véhiculés par des représentations linguistiques grâce à des représentations logiques formelles enrégimentées dans des processus calculatoires, l’ingénierie des connaissances a prouvé qu’il était possible de produire de nouvelles connaissances interprétables dans des domaines d’expertise (Bachimont, 1996). Dès lors on peut se poser la question suivante : comment une physique de signes investis d’esprit peut-elle devenir une algèbre symbolique pourvue de sens ? </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">Notre réponse est : en devenant une techno-sémiotique des opérations symboliques où coexistent sur un même support graphique sens et calcul. Comment est-ce possible ? En construisant des diagrammes. Car les diagrammes sont des machines sémiotiques (Ferri, 2021) qui produisent des calculs qui ont du sens. Dans cette mesure, ce sont de nouveaux supports de connaissances, qui donnent accès à des fonctionnements signifiants et rendent possible des manipulations pourvues de sens. </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><a name="_Toc88742253"><b><span style="color:black">Dispositif graphique et ingénierie sémiotique</span></b></a><b><span style="color:black"> : vers une modélisation diagrammatique</span></b></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><a name="_Toc88742254"><i>Schéma et iconicité structurelle</i></a></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">Ce que cherche à préciser dans ce que nous appelons l’ingénierie sémiotique, c’est un principe de modélisation qui exploite l’oubli du formalisme logique hérité du Cercle de Vienne et un principe d’effectivité qui supplémente le principe d’effectivité calculatoire qui nous est donné par la logique mathématique (Bachimont 1996). Nous proposons un autre principe de modélisation, complémentaire au principe de formalisation logique, que nous nommons principe de modélisation diagrammatique (Ferri, 2021, p. 422). Il doit permettre d’exprimer le contenu non logique d’une connaissance phénoménologique, c’est-à-dire la structure qualitative sur laquelle s’appuie la faculté intuitive non logique, qui était déjà reconnue par Turing dans le §11 de sa thèse comme l’une des deux sources du raisonnement mathématique (Turing, 1939, p. 214-215).</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">Au lieu d’avoir une abstraction du contenu linguistique par la formalisation logique, on obtient une abstraction du contenu intuitif par la représentation diagrammatique. C’est pour cette raison que l’ingénierie sémiotique ne s’intéresse pas à l’idiome linguistique comme vecteur de connaissance, mais au symbole graphique. Car ce dernier a pour fonction de compacter spatialement cette structure qualitative phénoménologique, pour la rendre saisissable de façon synoptique. </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><i>Diagramme et iconicité opérationnelle</i></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">Ensuite, il faut un principe d’effectivité. Ce principe, nous l’appelons le principe d’iconicité opérationnelle. C’est un principe d’effectivité opérationnelle non computationnelle. Au lieu d’exploiter un principe d’effectivité calculatoire, il s’agit d’exploiter la médiation grâce à laquelle on accède à l’effectivité non computationnelle. Cette médiation est selon nous l’iconicité opérationnelle (Ferri, 2021, p. 425). Or l’iconicité opérationnelle peut être capturée par un diagramme dans la mesure où un diagramme est une machine sémiotique, c’est-à-dire une machine qui donne accès à un contenu opérationnel qui n’est pas réductible à un contenu computationnel. Dès lors </span><span style="color:black">l’enjeu de l’ingénierie sémiotique consiste à élaborer un dictionnaire et une grammaire visuels de la pratique, c’est-à-dire une sémiotique visuelle des opérations pratiques irréductibles à des opérations de calcul. </span><span style="color:black">C’est donc la sémiotique qui peut nous donner accès à la géométrie du sens pratique que nous appelons la diagrammatique, qui est la géométrie de l’espace des opérations non calculatoires de la pensée et de l’action pratique dans le monde.</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><a name="_Toc88742256"><b><span style="color:black">Conclusion</span></b></a><b> </b></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">L’analyse du schéma, dans ses dimensions spatiale et temporelle, conduit à l’idée de dispositif graphique, entendu comme disposition des signes graphiques dans l’espace sémiotique d’inscription permettant de représenter une configuration d’objets dont les relations au cours du temps sont programmées, c’est-à-dire déterminées à se reproduire suivant des cycles répétitifs.</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><span style="color:black">La déclinaison du concept de dispositif permet d’en donner une caractérisation mécanique, thermodynamique et enfin computationnelle, dont la formalisation achevée est donnée par le modèle de Turing. Les limites de ce modèle autorisent l’introduction de la notion de dispositif diagrammatique, permettant la modélisation d’opérations non calculables, parce que non saisies par la formalisation algorithmique. Ces opérations non calculables sont l’objet d’une nouvelle discipline, l’ingénierie sémiotique, dont la finalité est de modéliser la </span><span style="color:black">géométrie du sens pratique nommée diagrammatique, qui est la géométrie de l’espace des opérations non calculatoires de la pensée et de l’action pratique dans le monde.</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12""><b><span style="color:black">Bibliographie </span></b></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12"">Bachimont, B. (1994). <i>Le contrôle dans les systèmes à base de connaissances</i><i> : contribution à l’épistémologie de l’intelligence artificielle</i>. Paris : Hermès.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12"">Bachimont, B. (1996). <i>Herméneutique matérielle et Artéfacture : des machines qui pensent aux machines qui donnent à penser ; Critique du formalisme en intelligence artificielle</i> (Thèse de doctorat d’épistémologie, École Polytechnique).</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12"">Bachimont, B. (2004). <i>Arts et sciences du numérique : ingénierie des connaissances et critique de la raison computationnelle</i> (Mémoire d’Habilitation à diriger des recherches, Université de technologie de Compiègne). </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12"">Berry, G. (2009). <i>Penser, modéliser et maîtriser le calcul informatique</i>. Paris : Collège de France/Fayard.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12"">Chazelle, B. (2012). <i>L’algorithmique et les sciences</i>. Paris : Collège de France/Fayard.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12"">Ferri, F. (2021). <i>Science opérative et ingénierie sémiotique : des machines graphiques à la morphogenèse organique</i> (Thèse de doctorat d’épistémologie, Université de technologie de Compiègne).</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12"">Simondon, G. (2016). L’objet technique comme paradigme d’intelligibilité universelle. In : Simondon, N., Saurin I. (dir.), <i>Sur la philosophie</i><i> </i><i>: 1950-1980. </i>Paris, Presses universitaires de France, 397-420.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12"">Turing, A. M. (1937). On Computable Numbers, with an Application to the Entscheidungsproblem. <i>Proceedings of the London Mathematical Society</i>, vol. s2-42, no 1, 1937, 230-265.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"LM Roman 12"">Turing, A. M. (1939). Systems of Logic Based on Ordinals†. <i>Proceedings of the London Mathematical Society</i>, vol. s2-45, no 1, 1939, 161-228.</span></span></p>