I. Introduction L’objectif de cette publication est d’identifier un nouvel objet qui a émergé avec internet et l’économie de l’attention : les “documenteurs”, désormais utilisés comme une arme dans le cadre de guerres informationnelles, par des individus, des organisations ou des pays. Elle vise à clarifier le débat et propose la grille d’analyse NOVACS. Celle-ci fait émerger des pistes de réflexions sur la définition des “documenteurs”. 1. 1. La particularité de l’objet documentaire. Le documentaire diffère de la fiction. Il prétend décrire la réalité, interroge le monde factuel, quand la fiction s’attache à une narration (Broudoux, 2012; Jacquinot, 1994). Il diffère du reportage, puisqu’il est le support d’un propos, d’une thèse, ce qui pose inévitablement la question de la subjectivité propre à son auteur et demande un effort cognitif important au spectateur (Amato, 2015). D’après Ellis (2005), il est un subtil équilibre entre ce que l’auteur souhaite communiquer ou cacher, les croyances du public cible, et les contraintes du support filmique. Capter l’attention est un enjeu majeur des guerres de l’information, et l’auteur de documentaire peut compter sur un “capital d’attention” du spectateur d’une heure environ. Ce temps d’attention est donc mis à profit en utilisant des images ou des thématiques déjà connues du grand public dans une démarche de persuasion (Lyon, 2008). Cet engagement de la cognition du spectateur est important, puisque celui-ci doit s’ouvrir aux propos du documentaire et y trouver sa propre posture critique. Pour obtenir cette attention, un “pacte de confiance” s’établit entre auteur et spectateur, créant un engagement réciproque. Ce “pacte documentaire”, inverse du pacte fictionnel, consiste à affirmer que le film dépeint le monde réel (Comolli, 2006). Toute rupture de ce pacte induit une manipulation de l’information, et donc un potentiel documenteur. Néanmoins, tous les documenteurs ne se valent pas : en effet, la manière dont le pacte documentaire n’est pas respecté peut tantôt induire un documenteur artistique, culturel, tantôt un documenteur manipulatoire, voire propagandiste. 2. 2. Le documenteur, un objet à l’origine “artistique” ou de propagande. À l’origine, le terme documenteur fait référence à une &oelig;uvre visuelle de fiction, parfois parodique, reprenant les codes du documentaire. Il en a l’apparence, la structure, en passant par le contrat de lecture, mais reste fictionnel ou ouvertement faux (Veyrat-Masson, 2014). Son objectif demeure principalement, par cette falsification, de questionner le rapport entre le spectateur et la réalité, et la manière dont elle est représentée. Il permet d’interroger les croyances des spectateurs en les confrontant à la réalité, semant le doute et nourrissant l’esprit critique par la parodie ou la fiction (Steinle, 2013). Ces faux documentaires se voient attribuer la terminologie « mockumentary » en anglais (“documoqueur” en français; Chamberland, 2008), bien que celle-ci soit souvent synonyme de documentaire satirique, et impliquent donc une connivence contractuelle entre l’émetteur et le récepteur. L’exemple classique des documoqueurs de Sacha Baron-Cohen (Borat, Bruno) permet d’illustrer rapidement ce label. Parmi les plus célèbres, Opération Lune, réalisé par William Karel<a href="#sdfootnote1sym">1</a> en 2003 pour la chaîne Arte, développe la thèse que, pour se couvrir d'un éventuel échec d’Apollo 11, les images des premiers pas de l'Homme sur la Lune ont été réalisées dans un studio avec l’appui de Stanley Kubrick. Ce documenteur convaincant aura cependant en partie l’effet inverse de celui escompté, puisqu’il alimente encore aujourd’hui les thèses conspirationnistes (Wagner-Egger, 2021). Mais les documoqueurs susmentionnés ont une vocation culturelle, artistique, voire pédagogique, qui ne masquent pas leurs intentions, ou les révèlent rapidement. Ces objets constituent un genre à part entière, avec leurs propres événements, comme au Québec le Festival du DocuMenteur de l’Abitibi-Témiscamingue, ou encore le festival On Vous Ment ! à Lyon. Leur objectif n’est pas d’emporter la conviction du spectateur, mais de la questionner, de renforcer l’esprit critique de ce dernier en “trahissant le pacte”, en créant un contrat communicationnel entre les réalisateurs et le public suggérant que le contenu est ouvertement faux. À l’inverse, des documentaires de propagande ont pu se voir qualifier de documenteurs, notamment ceux du gouvernement de Vichy et de l’occupant nazi réalisés durant la deuxième guerre mondiale. Ainsi « une guerre de propagandes par images interposées s’installe dès juin 1940. Censées refléter la réalité, ces images renvoient aux luttes d’influence entre les protagonistes. » (Bertin-Maghit, 2004). On constate une résurgence actuelle de ce type de documentaire, via des régimes autoritaires qui disposent du contrôle de leur production audiovisuelle. Les documentaires produits par la Chine posent ainsi question. Ces productions peuvent promouvoir les réussites du régime comme Trop fort, mon pays ("Amazing China" en anglais), ou justifier la répression comme La Guerre dans l’ombre : les défis de la lutte contre le terrorisme dans le Xinjiang. Ainsi, lors de la crise de Covid 19, face à des documentaires étrangers critiques comme Coronation, sont sortis des documentaires tels que 76 Days ou Jours et nuits à Wuhan. Ce dernier présente comment la Chine a bien su gérer la crise sanitaire, et comment l’amour permettrait la résistance face à l’épidémie<a href="#sdfootnote2sym">2</a>. Ces films montrent que la Chine a compris l’utilité de l’arme documentaire pour alimenter son “soft power”<a href="#sdfootnote3sym">3</a> et imposer sa vision des faits. Cette forme de manipulation se retrouve également dans le sous-titrage de documentaires étrangers : les sous-titres divergent du discours proposé, suggérant une manipulation idéo-politique des mots affichés (Li, 2020). Ces documentaires, dont l’intention pernicieuse sera discutée dans cet article, correspondent davantage à l’appellation anglophone de pseudo-documentary qu’aux mockumentaries décrits ci-dessus <a href="#sdfootnote4sym">4</a>. 2. 3. Les limites de la subjectivité. Le dénominateur commun des documenteurs suggère que leur priorité n’est pas la véracité des faits présentés, mais l’adhésion du spectateur. La structure du documenteur s’applique donc à des documentaires dont l’auteur décide de falsifier la réalité, non pour la questionner, mais, comme les documentaires de propagande, pour imposer sa vision des faits, quitte à tromper et manipuler pour emporter la conviction. Le Cauchemar de Darwin, de Hubert Sauper, sorti en 2005, décrit les rives du lac Victoria, en Tanzanie, où se côtoient pauvreté, trafic d’armes et catastrophe écologique due à l’introduction de la perche du Nil, faisant de cet endroit, selon la promotion du film, le “pire cauchemar de la mondialisation”. Immense succès critique et public dans un premier temps, le film suscite la polémique<a href="#sdfootnote5sym">5</a> dès lors qu’historiens et spécialistes de l’Afrique se penchent sur son contenu. Pour les uns, la thèse implicite de l’auteur d’une responsabilité exclusive de l’occident n’est pas soutenable (Giri, 2005). D'autres accusent le réalisateur de mystification, de prestidigitation afin de vendre “à des centaines de milliers d’incrédules un produit faisandé mais au fort fumet” (Garçon, 2006). Il apparaît que le film s’écarte de l’analyse scientifique pour laisser place à l’affectif (Lévêque & Paugy, 2007). Garçon accuse Sauper de “supercherie” dans les médias, et ce dernier porte plainte devant les tribunaux. Le point qui nous intéresse est la ligne de défense de Sauper, qui affirme n’avoir pas voulu faire une enquête journalistique mais un “documentaire de création”, revendiquant un point de vue subjectif, Dès lors, se pose la question de la limite à cette subjectivité. Réaliser un “documentaire de création” autorise-t-il son auteur à tous les procédés pour remporter l’adhésion du spectateur ? À quel moment un documentaire usant de raisonnements fallacieux ou de procédés déloyaux quitte-t-il la sphère des documentaires “engagés” pour celle des documentaires “sensationnalistes”, voire des documenteurs ? Cette question est d’autant plus critique que l’environnement de la création et de la diffusion se modifie profondément au XXIe siècle. Par exemple avec les “docu-fictions” contenant des éléments de narration fictionnels pour renforcer ou illustrer leurs propos (Ewing, 2014). Le problème se pose si ces éléments sont dissimulés. C’est le cas avec Mermaids: The Body Found de Sid Bennett en 2012. Ce “faux documentaire” (Thalera & Shiffman, 2015) montre les dérives du docu-fiction si celui-ci est mis au service du sensationnalisme et de l’audience : il brouille la distinction entre science et fiction en suggérant des preuves de l'existence des sirènes, sans émettre d’avertissements explicite et visible du caractère fictionnel (Wallace, 2017). Avec presque sept millions de spectateurs sur YouTube, son succès suggère combien l’esprit critique est poreux lorsqu’il est confronté à une frontière entre documentaire et fiction qui s’estompe. 2. 4. Le bouleversement internet. Ce nombre de vues impressionnant illustre comment le monde du documentaire est bouleversé par l’apparition sur Internet des web-documentaires, “un nouveau style qui n'a pas encore trouvé son nom et qui oscille entre plusieurs directions de développement” (Broudoux, 2012). Cette avalanche de documentaires, suscitée par l’ouverture démocratique du web, peut mettre des bâtons dans les roues de la veille informationnelle (D’Almeida, 2001; Moinet, 2011), favoriser l’implication du spectateur et empêcher le recul nécessaire à une réflexion critique (Broudoux, 2012). Par la suite, les réseaux sociaux permettent au documentaire de démultiplier les publics, d’accélérer sa diffusion, de créer un lien direct entre ceux-ci et le réalisateur (Huyghe, 2011). Il n’est plus un simple objet télévisuel, mais le déclencheur ou le fédérateur d’une communauté qui adhère à son propos. Il devient dès lors une arme dans la guerre d’information, d’autant qu’il s’affranchit des circuits de diffusion classique. Loose Change, documentaire conspirationniste sur le 11 septembre, devient en 2005 “le premier blockbuster d'internet”. En France, le documentaire pseudo-scientifique La Révélation des Pyramides, de Patrice Pooyard et Jacques Grimault connaît depuis 2010 un franc succès sur le net avec près de 10 millions de vues sur YouTube, ainsi que de multiples rediffusions, notamment sur RMC Découvertes. Plus récemment, Andrew Wakefield, auteur d’une fraude scientifique établissant un faux lien entre le vaccin ROR et l'autisme, compense son discrédit scientifique et sa radiation du registre médical en Grande-Bretagne par la réalisation d’un documentaire controversé, Vaxxed, qui devient emblématique du nouveau champ de bataille des controverses scientifiques que sont devenus les réseaux sociaux (Bennato, 2017). Il réaffirme dans ce documentaire un lien de causalité entre vaccins et autisme sans jamais en apporter la preuve (Moukheiber, 2019). Sa diffusion gratuite du 1er au 8 novembre 2018 permet de renforcer considérablement le mouvement anti-vaccin. En confirmant leurs croyances, le film va ainsi exploiter habilement le « biais de surconfiance » des militants anti-vaccins. Ainsi, exposés à la désinformation, la majorité d'entre eux persistent dans l’illusion qu’ils maîtrisent mieux ce sujet que les experts du domaine (Motta, Callaghan, Sylvester, 2018). Les documentaires controversés et conspirationnistes surgissent ensuite lors de chaque crise sanitaire pour porter un contre-discours, comme Hold-Up en France, ou Plandemic aux USA, réalisés en pleine épidémie de Covid 19. Néanmoins, la question de leur intentionnalité demeure. En effet, il reste complexe d’évaluer si le faux message émis par le documentaire est une erreur de bonne foi, ou un mensonge volontaire (Dornan, 2020). Pour cela, et afin d’élargir le caractère embryonnaire de la psychologie à l’intelligence économique (Moinet, 2009), nous proposons d’aborder le problème du caractère mensonger des documenteurs par l’angle de la psychologie du mensonge. 2. 5. Le problème du mensonge. L’attribution de l’étiquette “documenteur” est de fait problématique, puisqu’elle implique que la réalisation et la production de ces documentaires ont pour objectif de mentir au public afin d’en obtenir l’adhésion (Huyghe, 2016). Si cette définition du documenteur peut se rapprocher de celle du mensonge canonique, elle en reste éloignée. En effet, le mensonge implique, au-delà de la construction d’un discours faux, une volonté et une intention de tromper autrui en faisant passer ce discours falsifié pour vrai (Elissalde, Tomas, Delmas, & Raffin, 2019). Or, comment prouver l’intention de mentir dans le cadre de documenteurs ? Bien qu’aucune étude, à notre connaissance, ne se soit penchée sur la production et la détection d’un documentaire mensonger, l’intégralité de la littérature sur la détection du mensonge est unanime : il n’existe, à ce jour, aucune méthode avérée pour dévoiler le mensonge (Luke, 2019). Certaines pistes sont évoquées, comme la complexification de la production du discours ou l'évaluation de la charge cognitive des menteurs, mais celles-ci ne sont pas applicables aux documentaires (Tomas et al., 2021). Néanmoins, nous argumentons qu’une autre approche peut être investiguée dans le cadre de l’évaluation du contenu du potentiel documenteur : l’évaluation de la crédibilité. Si le mensonge est une manipulation du message exercée par l’émetteur et à laquelle le récepteur n’a que peu de chances d’avoir accès un jour, l’évaluation de la crédibilité est quant à elle intrinsèque à la perception du récepteur. En d’autres termes, la crédibilité réside dans les yeux de celui qui observe, et donc juge le message émis à son égard (Denault, Rioux-Turcotte, & Tomas, 2019). La crédibilité est un jugement émis par le récepteur à l’aide de ses connaissances préalables (ou de l’absence de celles-ci), de ses heuristiques, de ses biais cognitifs et sociaux. Or, plusieurs études font état de la tendance naturelle de l’être humain à considérer que les messages qui lui sont communiqués sont a priori véridiques (Levine, 2014). Cette “théorie de la vérité par défaut” permet d’expliquer, en partie, le succès de ces documenteurs : considérés comme vrais et communiquant des informations sensationnalistes, ceux-ci sont davantage médiatisés et permettent donc d’étendre leur diffusion en touchant davantage de public. Il est donc essentiel de promouvoir l’acquisition d’heuristiques plus performantes face aux documentaires potentiellement mensongers que le spectateur peut rencontrer. Pour cela, plusieurs caractéristiques des fake news sont intéressantes. Premièrement, un effet de polarisation est observable, puisque leur viralité sur les réseaux sociaux s’explique principalement par l’adhésion à un récit dénonçant un camp adverse (Osmundsen et al., 2020). De même, nous pouvons nous attendre à ce qu’un documentaire polarisant, souhaitant se détacher d’une science dépassionnée et distante par des affirmations fortes et sensationnelles, puisse gagner en viralité. Deuxièmement, les notions d’épistémologie tribale et de chambre d'écho expliquent la puissance de répercussion des communautés partageant les mêmes idées (Rainie, Anderson, & Albright, 2017). Elles prédisposent les individus à la diffusion d’idées fausses ou partiales. L’existence de ces communautés nous semblent donc davantage relever du documenteur que du documentaire. Le corollaire des principes de polarisation et de chambre d’écho implique une exposition sélective régulière à des informations partielles et partiales (Barnidge & Peacock, 2019). Ainsi, l’évaluation des sources d’un documentaire, de leur partialité, et de leur fiabilité globale est primordiale. Enfin, la crédibilité d’un documentaire peut être évaluée au regard de l’appel à l’action souvent proposé dans le cadre de fausses informations et de vidéogrammes propagandistes (Stanley, 2018). Il découle de ces principes que le documenteur est un outil de persuasion, une donnée que nous proposons de retenir en tant que critère dans le cadre d’un “continuum d’engagement” du spectateur. 6. Du documentaire informatif au documenteur, un “continuum d’engagement”. Il est acté qu’internet et la guerre de l’attention ont fait émerger des documentaires considérés par certains observateurs comme des documenteurs. Néanmoins, comme vu plus haut, classer un documentaire comme documenteur en s’appuyant uniquement sur l’analyse de son propos ou le constat d'une rupture du pacte mène à une impasse. Outre la difficulté à dévoiler le mensonge, tout documentaire est subjectif par essence. Il serait facile de parler de “documenteur” dès l’instant où le propos ou les méthodes de son créateur seraient contestables, en cherchant par exemple à désigner un coupable (Durand & Renard, 2018), ou lorsque le film est simplement engagé, et se départit d’une posture apparemment neutre et objective. Les mêmes difficultés apparaissent quand il s’agit de définir et de détecter concrètement ce qui peut être décrit comme sensationnaliste (Labasse, 2012). Pour sortir de cette impasse consistant, nous proposons une grille de lecture incluant des propositions de définitions de nouvelles catégories, ainsi que des critères permettant leur décryptage pour mieux évaluer leur crédibilité, et détecter une guerre informationnelle à l’&oelig;uvre.   II. Méthodologie Sur base de la littérature préalablement discutée, nous avons extrait six critères permettant de proposer une grille d'analyse de potentiels documenteurs. En combinant les éléments des littératures concernant le documentaire comme oeuvre informative, et les mensonge et fake news comme ensemble d'éléments discursifs visant à contrôler le marché de l'information, nous avons développé une grille d'analyse composée de six critères : la narration, l'opposition, la viralité, l'appel à l'adhésion, le contenu, et les sources. Nous référons à partir d'ici à cette grille sous le nom de grille NOVACS. L’objectif de cette grille est d’isoler les ”documenteurs” en tant qu’extrême d’un “continuum d’engagement” révélateur d’un affrontement informationnel. Le continuum d'engagement est détaillé dans le tableau 1. Les critères sont détaillés et référencés dans le tableau 2. La grille NOVACS est détaillée dans le tableau 3.   Tableau 1. Continuum d'engagement constitué de quatre types de documentaires <img src="https://www.numerev.com/img/ck_872_18_image-20210915230410-1.png" style="width: 711px; height: 400px;" /> Tableau 2. Critères permettant l'évaluation de la crédibilité des documentaires <img src="https://www.numerev.com/img/ck_872_18_image-20210915230410-2.png" style="width: 694px; height: 400px;" />   Tableau 3. Grille d'analyse NOVACS <img height="856" src="https://www.numerev.com/img/ck_872_18_image-20210915230410-3.png" width="672" /> Ces critères remplissent une vocation de faisceaux d’indices destinés à mettre en alerte l’esprit critique du spectateur, et à explorer l’hypothèse d’une guerre informationnelle. De ce fait, un documentaire ne saurait être considéré comme documenteur ou sensationnaliste parce qu’il remplirait un seul des critères. Nous proposons un système de points, allant de 0 (absent) à 3 (très élevé) pour chaque critère. À l'issue du visionnage du documentaire, le spectateur est enjoint à remplir la grille et à examiner chaque critère afin d'en déterminer l'étendue et l'importance. De ce fait, si le documentaire est truffé d'éléments mettant en valeur un narrateur fictif ou réel, alors il s'agit de noter ce critère Narration comme "Très élevé". De même, si le documentaire ne semble pas créer d'opposition entre deux groupes (i.e., version officielle vs. version réelle, scientifiques vs. équipe du narrateur, etc.), alors il s'agit de noter le critère Opposition comme "Absent". De là, chaque élément indiquant la présence ou l'absence d'un critère se voit accorder un système de notation. Si des critères sont considérés comme absents, il convient d'en multiplier le nombre d'occurences par 0. Si des critères sont considérés comme présents, leur occurence doit être multipliée par 1. Si des critères sont indiqués comme élevés, nous les multiplierons par 2. Enfin, si des critères sont très elevés, leur occurence sera multipliée par 3. Les scores pour chaque critère seront additionnés, donnant un score global au documentaire. Enfin, dans la perspective du continuum d'engagement, nous introduisons par ailleurs un "effet de seuils" afin de rendre l'analyse plus pratique. Les seuils sont déterminés à partir du minimum évaluatif. Nous entendons par là que l'évaluation se base sur l'estimation minimale permettant de dire qu'un documentaire appartient à telle ou telle catégorie. Ainsi, si un documentaire est évalué avec trois critères en catégorie "absent", et trois critères en catégorie "présent", alors ce documentaire sera considéré comme davantage engagé. La valeur de 3 (3*0 + 3*1 = 3 points) est donc le point de pivot évaluatif entre un documentaire informatif et engagé. De même, le point de pivot entre un documentaire "engagé" et "sensationnaliste" se trouve à 9 (3*1 + 3*2 = 9 points), et celui entre un documentaire "sensationnaliste" et un "documenteur" se trouve à 15 (3*2 + 3*9 = 15 points). Ainsi, plus le score est haut, plus le documentaire doit être considéré comme potentiellement mensonger et donc susciter l'attention et la prudence chez le spectateur. <img height="61" src="https://www.numerev.com/img/ck_872_18_image-20210915230410-4.png" width="899" /> Selon cette échelle, tout document dépassant un score global de 9 suscite l’interrogation, tandis qu’un score supérieur à 14<a href="#sdfootnote6sym">6</a> indique un probable documenteur.   III. Analyse de 3 documentaires Pour éprouver la grille NOVACS, nous avons retenus 3 documentaires (Loose Change, La Revelation des Pyramides, Hold-Up) permettant d'en illustrer les ressorts. Ces documentaires ont été choisis selon les critères suivants : diversité de domaines (géopolitique, histoire, santé), de nationalités (2 français, 1 américain) et d'époques (2005, 2010, 2020), succès (permettant de disposer d'une littérature à son sujet) et enfin controverse (contexte d'affrontement informationnel). 1. Loose Change (2005, contexte de crise géopolitique) Réalisé par trois adolescents américains, et particulièrement par Dylan Avery, Loose Change est un documentaire sur les attentats du 11 septembre, présentés comme un “inside job”. Ce “premier blockbuster d'internet”<a href="#sdfootnote7sym">7</a> connaît de nombreuses versions et rééditions (Loose Change Second Edition - 2006, Loose Change Final Cut - 2007, Loose Change: An American Coup - 2009) dont la dernière est financée par Alex Jones, animateur radio américain à tendance conspirationniste<a href="#sdfootnote8sym">8</a>. Il est à noter qu’à l’origine Loose Change était censé être une fiction des adolescents qui découvrent la conspiration du 11 septembre<a href="#sdfootnote9sym">9</a>. Narration : Loose Change repose sur l’effet de dévoilement la révélation d’un complot caché par le gouvernement, et que la “théorie du complot” serait en réalité la version officielle. Opposition : La thèse d’un attentat préparé et perpétré par le gouvernement reprend des récits existants relayés par le mouvement des truthers (présent dans les films suivants celui de 2005) et réactive des polémiques sur les réseaux sociaux, où nombre d’internautes appellent à lutter contre les institutions. Viralité : Ce film et ses suites ont connu un succès mondial par le biais des polémiques engendrées par le mouvement, et font partie intégrante du mouvement d’investigation sur le 11-Septembre, le “9/11 Truth Movement” (Ledoux, 2009). Appel à l'adhésion : Le film se conclut par un appel à agir, en suggérant une forme de révolution active à l’image des passagers du vol 93 qui se sont sacrifiés, à l’encontre de la version officielle et du gouvernement présentés comme des tyrans. Contenu : Abondent des affirmations fausses assénées avec certitude (pas d’avion dans le Pentagone, pas de Boeing dans le World Trade Center, démolition contrôlée…) à tendance conspirationniste, ainsi que plusieurs inversions fallacieuses de la charge de la preuve. Même sans preuve d’une intention délibérée de déformer la réalité, des éléments troublants apparaissent. Ainsi le journaliste Mike Walter, témoin de l’attaque du Pentagone, dit à la télévision avoir vu avec certitude un avion American Airlines, qu’il compare à “A cruise missile with wings” (un missile avec des ailes) ; Dylan Avery récupère la vidéo du témoignage et le tronque, ne gardant que “A cruise missile with wings”.<a href="#sdfootnote10sym">10</a> <img src="https://www.numerev.com/img/ck_872_18_image-20210915230410-5.png" style="width: 552px; height: 300px;" /> Séquence vidéo à 2’15’’ : cette image se veut une “preuve” qu’il ne s’agit pas de Boeing qui ont percuté le World Trade Center. Sources : Les sources révèlent une sélection partiale, l’utilisation de témoignages vagues en une compilation servant uniquement la thèse d’un complot. Le film relaie avec certitude des thèses intenables (faux avions dans les tours, missile dans le Pentagone, vol 93 ne s'étant pas écrasé…), ce qui lui vaut d’être accusé par d’autres conspirationnistes de chercher à discréditer le mouvement.<a href="#sdfootnote11sym">11</a> Tableau 4. Analyse de Loose Change à l'aide de la grille NOVACS <img height="186" src="https://www.numerev.com/img/ck_872_18_image-20210915230410-6.png" width="556" /> Dans notre grille d'analyse NOVACS, le film Loose Change obtient un score de 16 (2*2 + 4*3 = 16 points), indiquant un risque élevé de documenteur.     2. La révélation des Pyramides (LRDP, 2010, contexte de révisionnisme historique) Ce documentaire révèle que les pyramides d’Égypte auraient été construites par une civilisation avancée mais disparue avant les temps historiques.<a href="#sdfootnote12sym">12</a> La narratrice s’appuie sur un informateur secret, en lutte contre la “science officielle”, qui égraine les indices, d’un “équateur penché” (Delorme, 2016) jusqu’à la révélation finale : une apocalypse à venir. LRDP marque le “grand retour du Réalisme Fantastique dans l’espace médiatique” (Karbovnic, 2016). Il illustre comment un documentaire est mis au service de ce qui peut s’apparenter à une réécriture de l’histoire accréditant la thèse que les peuples autochtones non-occidentaux ne sont pas les bâtisseurs de leurs monuments remarquables (Boulay, 2021). <img src="https://www.numerev.com/img/ck_872_18_image-20210915230410-7.png" style="width: 496px; height: 300px;" /> Introduction du film Narration : La narratrice se présente comme une non-scientifique, à laquelle chacun peut s’identifier. La posture de “chercheur de vérité”<a href="#sdfootnote13sym">13</a> donne au récit la forme d’une quête initiatique face à une science officielle qui tente d’étouffer la vérité. Le procédé s’avère efficace puisque l’influenceur Squeezie, dans une vidéo “Ces théories vous feront transpirer” relaie ces thèses en parlant des “scientifiques qui ne savent rien” (Rouiller, 2019). Opposition : La rhétorique conspirationniste du documentaire entraîne une telle polarisation qu’en dépit des multiples démystifications, certains partisans se sont peut-être “davantage enfoncés dans leur croyance suite à ce qui ressemble à la confrontation de deux visions du monde” (Durand & Tapas, 2019). Viralité : On a constaté la formation d’une communauté de fans en lien direct avec les auteurs qui alimentent leurs croyances au sein des réseaux de la “complosphère” (Karbovnik, 2016), aboutissant à un référencement record de cette production. Appel à l'adhésion : Crowdfunding, contreparties, vente de conférences et de livrets, livre à sortir… Plus que faire prendre conscience à ses spectateurs d’un danger imminent, le documentaire “d’un point de vue éthique, ressemble à s’y méprendre à un business plan bien rôdé” (Karbovnik, 2017). Contenu : Ce documentaire a été maintes fois “débunké” et contre-expertisé, (Karbovnic, 2017). L’authenticité du fameux équateur penché, élément clé du film, s’avère totalement exclue<a href="#sdfootnote14sym">14</a>. Enfin, et surtout, Jacques Grimault revendique avoir piégé l’un des intervenants scientifiques, Jean-Pierre Adam, pour le ridiculiser<a href="#sdfootnote15sym">15</a>. Sources : Le vocabulaire de référence et les prises de positions de l’auteur du documentaire, Jacques Grimault, sont empruntés aux pseudo-chercheurs des années 1960 dans ce qui constitue un plagiat, entendu que ”en science, le plagiaire est l’avant-dernier degré du pseudo-scientifique, avant celui de faussaire”.<a href="#sdfootnote16sym">16</a> <img src="https://www.numerev.com/img/ck_872_18_image-20210915230410-8.png" style="width: 527px; height: 300px;" /> Séquence vidéo à 7’30’’ , affirmation fausse de la narratrice: “Alors que le reste de la planète se promenait encore en peaux de bêtes, l’Egypte bâtissait les pyramides”.   Tableau 5. Analyse de la Révélation des Pyramides <img height="186" src="https://www.numerev.com/img/ck_872_18_image-20210915230410-9.png" width="555" />  Dans notre grille d'analyse NOVACS, le documentaire La Révélation des Pyramides obtient un score de 16 (2*2 + 4*3 = 16 points), indiquant un risque élevé de documenteur.     3. Hold-Up (2020, contexte de crise sanitaire) Financé en crowdfunding avec un succès considérable, ce film réalisé par Pierre Barnérias développe la théorie d'un complot mondial à l’origine du covid-19 pour asservir l’humanité. Son impact et sa viralité sont tels, avec des millions de vues sur différentes plateformes, que pour la première fois un film conspirationniste fait l’objet dès sa sortie d’une large couverture médiatique (Klein & Nera, 2021). Narration : Il s'agit d'une fiction conspirationniste dissimulée sous les habits du documentaire (Klein & Nera, 2021). Un “pseudo-documentaire, avec des pseudo-experts, sur fond de pseudo-enquête” qui “recourt beaucoup à cette figure rhétorique de l’appel au bon sens, qui permet de ne pas avoir à prouver quelque chose en l’avançant comme évident pour chacun”. <a href="#sdfootnote17sym">17</a> Opposition : Le documentaire pratique la “reductio ad Hitlerum”. L’une des intervenantes, la sociologue Monique Pinçon-Charlot, y prétend que nous serions entrés dans une “troisième guerre mondiale” menée par les plus riches contre les plus pauvres, avec pour objectif de provoquer un Holocauste et d’éliminer la partie la plus pauvre de l’humanité, devenue inutile (Mariscal, 2021). Viralité : Le film s’est appuyé sur les communautés et médias conspirationnistes et Gilets Jaunes, notamment sur Twitter. À cet égard, “un regard plus approfondi sur certains de ces jeunes comptes [soutenant Hold Up (NDA)] dévoile que ces derniers sont actifs uniquement pour partager ou retweeter des messages concernant le film Hold-Up. Il apparaîtrait alors que ces comptes ont été créés uniquement dans ce but. Cela pourrait correspondre à l’utilisation d’une stratégie de bots, dans un but de renforcer le phénomène de viralité autour du film”.<a href="#sdfootnote18sym">18</a> Appel à l'adhésion : Ce projet a été financé par une campagne de crowdfunding dont le succès a dépassé les espérances, notamment suite au relai sur les réseaux sociaux par les groupes soutenant Didier Raoult et les Gilets Jaunes. Malgré son succès financier, les producteurs du film continuent de réclamer de l’argent, invoquant la lutte contre la censure, pour financer d'autres productions. <img src="https://www.numerev.com/img/ck_872_18_image-20210915230410-10.png" style="width: 730px; height: 300px;" /> Capture du site de Hold Up Contenu : Après analyse minutieuse<a href="#sdfootnote19sym">19</a>, le collectif citoyen Covid 19 Fédération conclut à un “monument de désinformation”. Le film affirme par exemple que “le virus a été fabriqué par l’Institut Pasteur”, qui a porté plainte pour diffamation. Pierre Barnérias affirme que l’information du dépôt de plainte est fausse et qu’il s’agit de “propagande au plus haut niveau”.<a href="#sdfootnote20sym">20</a> <img src="https://www.numerev.com/img/ck_872_18_image-20210915230410-11.png" style="width: 546px; height: 300px;" /> Séquence vidéo à 1h53’00’’ : relayant les affirmations que “l’Institut Pasteur a créé le virus et l’a expédié à Wuhan ou ailleurs” le narrateur affirme “le coupable de l’épidémie de covid-19 a bien été trouvé” Sources : Outre la présence de conspirationnistes et de sources avérées de désinformation (comme FranceSoir), presque tous les intervenants rejettent les données de la science, car elle contredit une ou plusieurs des croyances personnelles pour lesquelles ils militent.<a href="#sdfootnote21sym">21</a>   Analyse de Hold-Up <img height="186" src="https://www.numerev.com/img/ck_872_18_image-20210915230410-12.png" width="556" /> D’après NOVACS, Hold-Up est l’archétype du documenteur, avec un score optimal de 18/18. Les 3 documentaires analysés comptent 4 à 6 critères indiquant une possibilité d’être un “documenteur”, et ont tous un score dépassant 15/18, seuil à partir duquel la grille NOVACS indique la présence potentielle d’un documenteur. Plus qu’une accumulation de critères, c’est bien leur positionnement final sur le continuum amène à ces conclusions, et donc alerte notre esprit critique. Par ailleurs, si ces documentaires peuvent diverger sur la catégorisation de leur contenu, de leurs sources et de leur narration, ils se rejoignent sur la polarisation, la viralité et l’appel à l'adhésion.     IV.            IV. Discussion et conclusion Sur base d’une littérature couvrant une approche communicationnelle du documentaire, du mensonge, et des fake news, nous avons développé une grille d'analyse NOVACS permettant d’évaluer la crédibilité d’un documentaire et d’estimer si celui-ci peut être un documenteur. Il s’agit d’un outil d’évaluation et de prise de décision. Cette grille répond à un manque, tant dans le domaine académique que dans le cadre opérationnel des guerres de l'information. Si de nombreuses études se sont concentrées sur l'évaluation et la détection des fake news et discours complotistes (e.g., Li, 2020; Wagner-Egger, 2021), il n'existe à notre connaissance aucune grille permettant de proposer une évaluation de la crédibilité d'un documentaire. Pourtant, avec la diffusion de plus en plus rapide des fake news et leur développement sous la forme documentaire, l'esprit critique du spectateur peut être mis à rude épreuve et doit être aidé d'outils de prise de décision favorisant une analyse objective de l'information (Bertin-Maghit, 2004; D’Almeida, 2001; Huyghe, 2011; Moinet, 2011; Steinle, 2013). Cette première grille permet de mettre en évidence une guerre informationnelle en cours en évaluant la présence de documenteurs et de documentaires sensationnalistes pouvant jouer le rôle de signal fort. Cette grille d’analyse, qui demande bien sûr à être précisée et expérimentée avec d’autres productions, pose également les bases d’une clarification de la sémantique autour du terme “documenteurs”, quand cette terminologie s’applique non pas aux documentaires de fiction, mais à ceux défendant une thèse qu’ils entendent imposer. Néanmoins, soulignons certaines limites dans cette étude. Premièrement, les documentaires choisis sont des exemples extrêmes qui illustrent la radicalité de l’échelle, et déterminent comment celle-ci peut alerter son utilisateur sur une potentielle guerre informationnelle. Ensuite, nous n’avons analysé que trois occurrences. Une validation plus importante, portée par plusieurs utilisateurs différents face à des documentaires variés sera proposée dans les études futures. Par exemple, nous proposons de comparer des documentaires traitant d’un même sujet, et de déterminer comment cette grille d'analyse NOVACS et son système de notation permettent d’endiguer la subjectivité du public et d’évaluer la crédibilité des documentaires proposés. Enfin, nous avons, dans le cas de Loose Change, choisi d’évaluer uniquement le premier volet de la tétralogie. Il serait intéressant de poursuivre l’analyse afin de voir si les positions des réalisateurs ont évolué. Il s’agit là d’une piste à suivre pour de futures recherches. On pourra poursuivre l’expérimentation de cette grille de lecture sur d’autres types de documentaires, tels que les documentaires judiciaires, patriotiques, issus de médias mainstream ou de service public. Notre grille d’analyse a vocation à faciliter l’exercice de l’esprit critique de tout un chacun, non pas sur des vidéogrammes déjà étiquetés comme documenteurs, ou médias conspirationnistes ou sensationnalistes, mais envers tout documentaire. Elle pourrait également s’appliquer, quitte à être adaptée pour intégrer leurs codes de narration, à des productions audiovisuelles apparentées aux documentaires, telles que les reportages, les émissions de “télé-réalité documentaires”, ou sur Internet aux productions des vidéastes YouTube. Enfin, d’un point de vue cognitif, il serait judicieux d’estimer la part d’effort nécessaire à l’utilisation de cette grille d'analyse NOVACS. En effet, si certains critères semblent aller de soi, comme la polarisation, d’autres nécessitent des recherches plus approfondies. Par exemple, évaluer la qualité des sources, ou déterminer la viralité communautaire d’un documentaire ne se fait pas sans effort, ni sans risque d’une forte subjectivité, et nécessiterait donc d’être évalué. De plus, il serait légitime de poser la question suivante : une formation à l’esprit critique peut-elle faciliter l’usage de pareille grille ? Nous invitons les chercheurs et praticiens à s’y intéresser, afin que la lutte contre la désinformation puisse servir à un rééquilibrage des forces en condition de guerre de l’information.   BIBLIOGRAPHIE AMATO E. A., "Le webdocumentaire et ses ressorts fonctionnels, au croisement du film documentaire et de la narration hypermédia.", in SOULEZ G. & KITSOPANIDOU K., Le levain des médias. Forme, format, média, 2015. BARNIDGE M. & PEACOCK C., "A third wave of selective exposure research? The challenges posed by hyperpartisan news on social media.", Media and communication, 7, n° 3, 2019. BING, J.-B., "Fauxcumentaires cryptozoologiques: Dahu et chasse en montagne." Journal of Alpine Research - Revue de géographie alpine, 2015. BENNATO D., "The shift from public science communication to public relations. The Vaxxed case", Journal of Science Communication, 16, 2017. 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