<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">Sur les murs des capitales mondiales s’affichent les portraits photographiques de l’artiste-plasticien JR, dans les pages des journaux s’écrivent les douloureux <i>Portraits of Grief</i>, témoins des tragédies terroristes du XXI<sup>e</sup> siècle, sur la toile naissent des agences contemporaines de portraits, comme la lyonnaise Trafalgar Maison de portraits : le portrait est partout. Adeline Wrona, spécialiste du portrait dans l’univers médiatique<a href="#_ftn1" name="_ftnref1" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">[1]</span></span></span></span></span></a>, a ainsi souligné qu’« en matière d’information, et plus largement en contexte médiatique, [le portrait] participe à l’édification de ce que Norbert Elias analyse comme une <span calibri="" style="font-family:">"</span>société des individus<span calibri="" style="font-family:">"</span>. […] L’individu représenté s’intègre dans ce <span calibri="" style="font-family:">"</span>quelque chose qui est quelque chose de plus et quelque chose d’autre que la réunion d’une multitude d’individus isolés<span calibri="" style="font-family:">"</span> : <span calibri="" style="font-family:">"</span>une société<span calibri="" style="font-family:">"» </span>(Elias, 1941, p. 41 ; cité dans Wrona, 2007, p. 35-40). Cette observation nous permet de comprendre, à partir d’un genre multiforme, ce qui peut motiver l’enseignant d’expression-communication invitant ses étudiants, bien souvent déjà adeptes de ce que Michel Foucault appelle les « techniques de soi » (Foucault, 2001, p. 1604) <i>via</i> les « réseaux socionumériques » (Coutant, 2011, p. 54), à mettre en pratique ce type de projet d’écriture. </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">À l’IUT d’Angers, dès les premières séances TD du semestre 3, je propose aux étudiants de deuxième année du DUT Techniques de commercialisation d’écrire un article conçu à la manière du portrait de dernière page du journal <i>Libération</i>. On connaît bien l’indéboulonnable portrait « de der » qui conclut depuis le 26 septembre 1994 le quotidien national fondé en 1973 sous la protection de Jean-Paul Sartre. De nombreux lecteurs débutent la lecture de leur journal par cette dernière page. Bien souvent en revanche, les étudiants ne le connaissent pas. Cette découverte culturelle est la première étape d’un travail pédagogique créatif qui permet d’entrer tout à la fois dans l’écriture journalistique, le travail d’enquête et la réalisation d’une rencontre par l’écrit et par l’image, dans une dialectique sensible entre objectivité et subjectivité.</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">La séquence intitulée « portrait rencontre », menée sur quatre séances de TD, est donc envisagée sur le principe d’un projet d’écriture<a href="#_ftn2" name="_ftnref2" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><b><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><b><span style="font-size:12.0pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">[2]</span></span></span></b></span></b></span></a> (Perdriault, 2014, p. 32). Ce projet permet d’aborder les « enjeux communicationnels du littéraire<a href="#_ftn3" name="_ftnref3" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">[3]</span></span></span></span></span></a> » (Seurrat, 2014, p. 131), car il est construit sur la base d’un support journalistique, textuel et stylistique <i>a priori</i> attrayant, que les étudiants découvrent dans un premier temps, afin d’engager dans un second temps la collecte, le tri et le traitement des informations qui serviront à la réalisation finale : le portrait d’une personne du groupe<a href="#_ftn4" name="_ftnref4" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">[4]</span></span></span></span></span></a>. </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">La démarche proposée prend la forme d’une séquence, qui part d’une lecture de portraits parus récemment dans <i>Libération</i>, pour aller vers la réalisation de la rencontre-interview et la rédaction de l’article. Pour un étudiant de DUT Techniques de commercialisation ou d’une autre spécialité, attentif au développement des compétences relationnelles, l’exercice permet d’activer, sans que l’écriture ne devienne excessivement impressionnante, les liens qui unissent expression et communication en un exercice dialogique.</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">Le projet engage en effet une réflexion sur l’autre qui permet d’accompagner plusieurs aspects de l’enseignement d’expression-communication en DUT. Il place l’étudiant dans une interrogation précise sur la manière dont doit être abordé un sujet pleinement humain, et de surcroît un pair souvent inconnu<a href="#_ftn5" name="_ftnref5" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">[5]</span></span></span></span></span></a>. Il crée par là même un espace productif, où l’engagement du style et le travail sur le discours sont complémentaires. Il exige enfin un temps de mise en forme important et exigeant, afin que la réalisation finale soit au plus proche de la page du journal, avec les outils du bord, mais également la demande de travailler personnellement le portrait photographique qui s’associe au texte. </span></span></span></p>
<h1><span style="font-size:16pt"><span style="break-before:page"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black"><a name="_Toc54355029">Le projet d’écriture : déroulement et objectifs</a></span></span></span></span></h1>
<h2><span style="font-size:14pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black"><a name="_Toc54355030">Déroulement du projet</a> </span></span></span></h2>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">Une première séance TD est consacrée au genre discursif du portrait de presse, à la lecture active de ces articles dans le journal <i>Libération</i> (anciennement sur son site web, la lecture des portraits étant désormais soumise à abonnement) et à la compréhension des enjeux de cet article dans l’économie globale du journal, en termes d’écriture journalistique et de positionnement, essentiels au développement du projet, car « on n’a pas forcément l’âme d’un journaliste<a href="#_ftn6" name="_ftnref6" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">[6]</span></span></span></span></span></a> ». </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">La deuxième séance s’attache à décrypter les principaux mécanismes d’écriture journalistique du « portrait rencontre » et d’en comprendre clairement la démarche : le principe de l’interview qui procure à l’article sa tonalité particulière et son équilibre entre éléments d’information et subjectivité du journaliste ; le fonctionnement du titre, du chapeau, de la photographie (un portrait, deux auteurs, deux points de vue, celui du journaliste, celui du photographe) ; les principes d’écriture essentiels : concision, construction syntaxique, insertion des citations et des témoignages, etc. </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">Parallèlement, les étudiants mettent en place la rencontre et l’interview, qui engagent leurs capacités relationnelles, notamment l’empathie<a href="#_ftn7" name="_ftnref7" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">[7]</span></span></span></span></span></a>. L’écriture du portrait relève ainsi de la « mise en œuvre d’une relation » (Wrona, 2007) qui ouvre l’opportunité de « pouvoir parler de soi d’une autre manière<a href="#_ftn8" name="_ftnref8" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">[8]</span></span></span></span></span></a> ». </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">L’écriture et la réécriture, travaillées durant la troisième et la quatrième séances, s’appuient sur les éléments signifiants issus de la rencontre : identité, faits et gestes ; contexte et ambiance du portrait ; oralité de l’échange et expression d’une voix singulière, à travers les citations ; notations physiques permettant l’incarnation, le tout visant à équilibrer éthopée et prosopographie<a href="#_ftn9" name="_ftnref9" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">[9]</span></span></span></span></span></a>.</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">Enfin, les étudiants sont invités à travailler leur portrait en binôme en dehors de l’espace de cours, notamment pour créer un environnement dans lequel le portrait pourra s’inscrire : </span></span></span></p>
<ul>
<li style="text-align: justify; text-indent: 1cm; margin-left: 48px;"><span style="font-size:11pt"><span open="" sans="" style="font-family:">L’étudiant rencontre son binôme au cours d’un rendez-vous dans un lieu (chez soi, au travail, en famille) ou un contexte évocateur, qui a, si possible, du sens pour la personne interviewée : le portrait en garde la trace.</span></span></li>
<li style="text-align: justify; text-indent: 1cm; margin-left: 48px;"><span style="font-size:11pt"><span open="" sans="" style="font-family:">La personne interrogée fournit deux moyens de joindre des personnes susceptibles d’être appelées pour donner leur « point de vue » sur elle<a href="#_ftn10" name="_ftnref10" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:11.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[10]</span></span></span></span></a>.</span></span></li>
<li style="text-align: justify; text-indent: 1cm; margin-bottom: 13px; margin-left: 48px;"><span style="font-size:11pt"><span open="" sans="" style="font-family:">La photographie d’illustration est réalisée par le binôme en contexte réel (souvent à l’IUT, parfois en dehors, ponctuellement dans des lieux singuliers<a href="#_ftn11" name="_ftnref11" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:11.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[11]</span></span></span></span></a>) : c’est aussi un portrait. </span></span></li>
</ul>
<h2><span style="font-size:14pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black"><a name="_Toc54355031">Objectifs</a> </span></span></span></h2>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">Pour l’étudiant qui se présente à l’autre, l’enjeu premier est d’envisager une présentation publique de soi : que dit-on de soi dans un portrait qui sera lu par d’autres, qui entrera dans une « sphère médiatique » minimale, à une échelle pédagogique<a href="#_ftn12" name="_ftnref12" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">[12]</span></span></span></span></span></a> ? L’étudiant ne dit pas tout (et bien souvent ne souhaite pas « tout dire ») : l’exercice n’est ni hagiographique ni autobiographique. Il ne s’apparente pas non plus à une description narrativisée du <i>curriculum vitae.</i> Le rédacteur-journaliste et le sujet du portrait discutent davantage de la personnalité de l’interviewé, sans mise à nu cependant<a href="#_ftn13" name="_ftnref13" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">[13]</span></span></span></span></span></a>. L’exercice est parfois périlleux, parfois aléatoire, en tout cas formateur pour la maîtrise de sa propre communication : il peut être conçu comme une préparation aux entretiens de la vie professionnelle.</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">Pour l’étudiant-rédacteur, écouter son partenaire demande d’aiguiser sa capacité d’attention, sa capacité d’expression et de reformulation d’un discours parfois disparate ou informel, et enfin sa capacité de synthèse. Ce travail d’enquête préalable s’appuie sur un guide d’entretien qui permet d’aborder concrètement la rencontre :</span></span></span></p>
<ul>
<li style="text-align: justify; text-indent: 1cm; margin-left: 48px;"><span style="font-size:11pt"><span open="" sans="" style="font-family:">Préparer une liste de mots-clés thématiques (sur les valeurs, les étapes, les projets, les motivations, etc.) ;</span></span></li>
<li style="text-align: justify; text-indent: 1cm; margin-left: 48px;"><span style="font-size:11pt"><span open="" sans="" style="font-family:">Noter les termes et citations exacts : faits, dates, fonctions, chiffres essentiels doivent être conservés intacts ;</span></span></li>
<li style="text-align: justify; text-indent: 1cm; margin-left: 48px;"><span style="font-size:11pt"><span open="" sans="" style="font-family:">Favoriser une prise de notes efficace, accumulative mais problématisée ;</span></span></li>
<li style="text-align: justify; text-indent: 1cm; margin-left: 48px;"><span style="font-size:11pt"><span open="" sans="" style="font-family:">Laisser intervenir les détails, y compris secondaires ou légers, qui aideront ensuite le travail d’écriture.</span></span></li>
</ul>
<p style="text-align:justify; text-indent:1cm; margin-bottom:13px; margin-left:48px"> </p>
<h1><span style="font-size:16pt"><span style="break-before:page"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black"><a name="_Toc54355032">Les portraits : réussites, écueils, apprentissages</a></span></span></span></span></h1>
<h2><span style="font-size:14pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black"><a name="_Toc54355033">Intégrer la contrainte</a></span></span></span></h2>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">C’est une lecture hiérarchisée qui organise l’article. La position stratégique du portrait en dernière page du journal en facilite l’accès et contribue à le rendre attractif<a href="#_ftn14" name="_ftnref14" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">[14]</span></span></span></span></span></a>. À la dernière page de <i>Libération</i>, le traitement réservé aux personnalités, connues ou inconnues du public, est « démocratique » et chaque portrait répond à des critères similaires : quatre feuillets et une photographie (Lassalle, 2013). Sur ce principe initial, les précisions données aux étudiants sont les suivantes (un barème d’évaluation accompagne les consignes) :</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><img height="343" src="https://www.numerev.com/img/ck_672_20_image-20220629185112-1.jpeg" width="625" /></p>
<h2><span style="font-size:14pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black"><a name="_Toc54355034">Écrire avec l’autre</a></span></span></span></h2>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">Le « portrait rencontre » se donne donc un objectif précis : « arracher l’individu à son existence singulière » (Wrona, 2007), afin de le placer dans une représentation collective. Les étudiants se heurtent vite à cette difficulté principale de ne pas céder à ce que Pierre Bourdieu nomme « l’illusion biographique » (Bourdieu, 1986, p. 72), ce dont témoignent rapidement les scripteurs<a href="#_ftn17" name="_ftnref17" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">[17]</span></span></span></span></span></a>. Pour les étudiants, il faut donc bien différencier portrait et biographie, portrait littéraire et portrait de presse. </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">Véronique Fillol a d’ailleurs pu étudier, dans le portrait de <i>Libération</i>, le tissage entre « stratégie énonciative » et « stratégie de communication médiatique ». Elle a ainsi examiné, à travers la pratique quotidienne d’un exercice de style déjà codé, qui travaille l’« image de marque » et la « philosophie éditoriale » d’un journal, comment le genre instaure tout à la fois un cadre d’écriture et un nécessaire « positionnement énonciatif » (Fillol, 2001, p. 438). Qui parle de qui ? Poser une voix, dire ponctuellement « je », « nous » ou « on », expliciter l’écoute engagée par la rencontre implique que le rédacteur ne se mette pas ostensiblement en scène et soit avant tout le réceptacle de la parole recueillie :</span></span></span></p>
<p class="MsoQuote" style="text-align:justify; margin-right:85px; margin-left:76px"><span style="font-size:11pt"><span arial="" style="font-family:">Aujourd’hui […] Lucas prend son envol, loin des oiseaux multicolores ou du Tri Martolod, seul. Il ose regarder vers le futur et se projeter. Il parle de voyages, d’îles paradisiaques du Pacifique, de petits villages asiatiques, de « tous ces pays qui se finissent en –tan ». Il s’enchante, il veut voir le monde, voir ce qu’il a à lui offrir<a href="#_ftn18" name="_ftnref18" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:11.0pt"><span arial="" style="font-family:">[18]</span></span></span></span></a>.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">Dans le « portrait rencontre », l’étudiant interviewé devient <i>de facto</i> un personnage médiatique ou une « figure contemporaine » (Wrona, 2012), le temps de quelques lignes de texte. L’étudiant journaliste-rédacteur partage avec son correspondant cette actualité médiatique, dans une stratégie intéressante d’échange des discours, discours de l’interview et discours du portrait lui-même. Le portrait n’est en effet pas seulement narratif, mais engage, par un « effet d’objectivité », selon les termes de Véronique Fillol, l’idée d’une représentation. </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">En cela, le travail d’enquête, d’interview et d’écriture proposé aux étudiants de DUT leur permet d’ouvrir, le temps d’un texte long, une re-présentation de leur sujet, puisque le portrait dans <i>Libération</i> reste d’abord, selon les mots de Luc Le Vaillant, responsable de la rubrique dans le quotidien national, le « récit d’une rencontre ». Le rôle du rédacteur est évidemment déterminant mais s’accompagne, dans le dispositif proposé, de la conscience particulière de la présence et de l’engagement du sujet portraituré<a href="#_ftn19" name="_ftnref19" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">[19]</span></span></span></span></span></a>. </span></span></span></p>
<h2><span style="font-size:14pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black"><a name="_Toc54355035">Trouver les mots</a></span></span></span></h2>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">Ce projet d’écriture mené avec les étudiants en début de semestre 3 peut enfin être considéré comme une propédeutique aux écrits longs, tels que les dossiers de projet ou le rapport de stage de fin de diplôme, c’est-à-dire aussi comme un exercice de style. Les étudiants y reconnaissent d’ailleurs « un moyen de s’exprimer, un exercice rédactionnel […] avec des contraintes de forme permettant de structurer sa pensée. » </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">Le travail stylistique dans le cheminement d’écriture est par ailleurs l’étape qui prend le plus de temps<a href="#_ftn20" name="_ftnref20" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">[20]</span></span></span></span></span></a>. Trois éléments au moins sont mis en perspective dans le travail préparatoire avec les étudiants. L’impact fort et saisissant du titre du portrait, souvent ludique dans <i>Libération</i>, toujours travaillé en coup de poing. La rigueur du chapeau, synthèse codifiée de l’article et prélude à la diversité de l’interview. La tonalité globale des articles, subtil mélange de registres, d’univers référentiels et de clins d’œil au lecteur, ceux-ci étant rédigés pour <i>Libération </i>par une équipe de journalistes aux approches et aux styles différents.</span></span></span></p>
<p class="MsoQuote" style="text-align:justify; margin-right:85px; margin-left:76px"><span style="font-size:11pt"><span arial="" style="font-family:">Comme sur une piste montagneuse, Florimond fait le tour de ses envies, toujours en mouvement<a href="#_ftn21" name="_ftnref21" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:11.0pt"><span arial="" style="font-family:">[21]</span></span></span></span></a>.</span></span></p>
<p class="MsoQuote" style="text-align:justify; margin-right:85px; margin-left:76px"><span style="font-size:11pt"><span arial="" style="font-family:">Le jeune homme se présente comme une force tranquille, rieur et bon vivant, dégageant ce côté entier et pur qu’on retrouve chez les joyeux drilles tendres et braves. […] Lunettes de soleil, short et tennis confortables, si Alex veut nous faire passer un message, c’est bien que « l’important, c’est de vivre l’instant présent »<a href="#_ftn22" name="_ftnref22" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:11.0pt"><span arial="" style="font-family:">[22]</span></span></span></span></a>.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">L’approche de la titraille implique notamment un travail sur le « titre incitatif » (Marchon, 2016) du portrait, qui contient une information essentielle mais surtout constitue une accroche pour le lecteur. L’art du titre a un objectif clair qui est d’attirer l’attention et de délivrer un message riche tout en étant soumis à la règle tacite du double sens ou du jeu de mots, particulièrement attractif et mémoriel. Dans <i>Libération</i>, parmi tant d’autres : « La jeune verte erre » ; « Miss spleen » ; « L’effet flow lent » ; « Ibère batailleuse » ; « « Je en réseaux ». Dans les écrits des étudiants : « Voilée, dévoilée » ; « Des Herbiers à la Maine » ; « Pas à pas » ; « Tête de peloton » ; « Girouette à la découverte » ; « Un nouveau GAP à franchir » ; « Breihz’ilien » ; « Sans sushis » ; « L’écommercial », par exemple. L’approche de la polysémie, de la synonymie ou des tropes permet aux étudiants, le temps de l’article, de travailler finement sur la richesse et l’expressivité lexicale.</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">Autre élément caractéristique fort, le chapeau résume l’article à venir en un corps de caractères plus important que celui de l’article. Porte d’entrée du portrait, il apporte des informations essentielles en conciliant brièveté, rythme ternaire et sens de la formule :</span></span></span></p>
<p class="MsoQuote" style="text-align:justify; margin-right:85px; margin-left:76px"><span style="font-size:11pt"><span arial="" style="font-family:">Représentant d’élite du DUT Techniques de commercialisation d’Angers, le Choletais ambitionne le DUETI grâce à son admission dans la classe internationale<a href="#_ftn23" name="_ftnref23" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:11.0pt"><span arial="" style="font-family:">[23]</span></span></span></span></a></span></span></p>
<p class="MsoQuote" style="text-align:justify; margin-right:85px; margin-left:76px"><span style="font-size:11pt"><span arial="" style="font-family:">Étudiante sémillante et téméraire, la jeune Nantaise en quête de sensations anticipe déjà un futur mélodieux<a href="#_ftn24" name="_ftnref24" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:11.0pt"><span arial="" style="font-family:">[24]</span></span></span></span></a>.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">Article écrit au temps présent, le portrait dialogue également avec la photographie<a href="#_ftn25" name="_ftnref25" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">[25]</span></span></span></span></span></a> qui éclaire elle aussi un parti pris d’actualité et plus encore un point de vue sur le sujet du portrait. De même, la personnalisation du texte, au <i>storytelling<a href="#_ftn26" name="_ftnref26" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><b><span style="font-size:12.0pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">[26]</span></span></span></b></span></span></a></i> particulier, riche de citations et parfois de quelques coups de force langagiers, met en œuvre différents points de style utiles aux étudiants : insertion des paroles rapportées (un discours citant qui oblige à travailler avec ses « mots à lui », parlant de l’étudiant que l’on interviewe – si l’on s’est donné l’objectif de « poser les bonnes questions pour obtenir les bonnes réponses »), construction des paragraphes, précision et recherche précise du vocabulaire.</span></span></span></p>
<h1><span style="font-size:16pt"><span style="break-before:page"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black"><a name="_Toc54355036">Conclusion</a> </span></span></span></span></h1>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">Face au portrait de presse abordé comme un « dispositif médiatique de représentation du social » (Seurrat, 2014, p. 131-132), le « portrait rencontre » crée une dynamique au sein d’un binôme d’étudiants et plus largement au sein du groupe, dans le cadre d’un projet d’écriture ouvert sur l’actualité et sur une pratique de lecture de la presse quotidienne nationale. Dans une logique de pastiche, il se heurte indéniablement à des difficultés, car il est « dur de trouver les bons mots », il est « compliqué d’avoir une jolie façon de s’exprimer ». Mais, souvent conscients des enjeux inhérents à la production écrite professionnelle, les étudiants accueillent plutôt l’exercice comme un palier (ré)créatif dans leur formation : « L’écriture est un point essentiel dans le monde professionnel ». </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">Écrire pour l’autre revient en effet à mettre en œuvre des capacités rédactionnelles tout autant que relationnelles : « Un vrai travail d’investigation et d’écriture où l’on prend plaisir à bien écrire. » Puisqu’il existe autant de portraits que de portraitistes (Lelièvre, 2007), expérimenter une technique d’expression journalistique, pour mettre en place un « usage communicationnel de la représentation » (Wrona, 2012), permet à l’étudiant, dans ce cadre, de remobiliser ses compétences à travers un prisme nouveau, plus personnel, plus subjectif, et sans doute plus engageant.</span></span></span></p>
<h1><span style="font-size:16pt"><span style="break-before:page"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black"><a name="_Toc54355037">Bibliographie</a></span></span></span></span></h1>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">BOURDIEU, Pierre (1986). « L’illusion biographique ». <i>Actes de la recherche en sciences sociales</i>. N°62/63, p. 72.</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">COUTANT, Alexandre (2011). « Des techniques de soi ambivalentes », <i>Hermès, La Revue</i>. Vol. 59, n<sup>o</sup>1, p. 53-58.</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">ELIAS, Norbert [1939] (1991), <i>La Société des individus</i>. Paris : Fayard, collection Agora.</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">FILLOL, Véronique (2001). « Stratégies énonciatives et pratiques d’écriture journalistiques : le portrait dans <i>Libération</i> ». <i>Cahiers de Narratologie</i>. Mis en ligne le 19 novembre 2014. URL : http://journals.openedition.org/narratologie/6974 ; DOI : 10.4000/narratologie.6974 [consulté le 13 janvier 2020].</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">FOUCAULT, Michel (2001). <i>Dits et écrits. Tome 2 : 1976-1988</i>. Paris : Gallimard.</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">LASSALLE, Isabelle (2013). « Portrait de <i>Libération</i> : le récit d’une rencontre ». <i>France Culture</i>, 15 avril 2013, article mis à jour le 2 août 2016. URL : <a href="https://www.franceculture.fr/medias/portrait-de-liberation-le-recit-d-une-rencontre" style="color:navy; text-decoration:underline">https://www.franceculture.fr/medias/portrait-de-liberation-le-recit-d-une-rencontre</a> [consulté le 31 juillet 2020].</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">LELIEVRE, Marie-Dominique (2007). <i>Portraits pleine page : 13 ans de libre enquête</i>. Paris : J’ai lu.</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black"><i>Libération – Portraits 1994-2009</i> (2010). Préface de Laurent JOFFRIN. Paris : La Table Ronde / Libération.</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">MARCHON, Hervé (2016). <i>Libé. Les meilleurs titres</i>. Paris : Editions La Martinière.</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">PERDRIAULT, Marguerite (2014). <i>L’écriture créative. Démarche pour les empêchés d’écrire et les autres</i>, Paris : ERES, collection Trames.</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">SALMON, Christian (2007). <i>Storytelling la machine à fabriquer des histoires et à formater les esprits</i>. Paris : La Découverte.</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">SEURRAT, Aude (2014). « Face au Portrait. De Sainte-Beuve à Facebook. WRONA Adeline, Hermann, Paris, 2012, 444 p. ». <i>Communication & Langages</i>. N°180, p. 131-132. URL : <a href="https://www.cairn.info/revue-communication-et-langages1-2014-2-page-131.htm" style="color:navy; text-decoration:underline">https://www.cairn.info/revue-communication-et-langages1-2014-2-page-131.htm</a> [consulté le 31 juillet 2020].</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">WRONA, Adeline (2007). « Présentation », in WRONA, Adeline, <i>Communication et langages</i>, « Usages médiatiques du portrait ». N°152. Paris : Armand Colin.</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">WRONA, Adeline (2012). <i>Face au portrait. De Sainte-Beuve à Facebook</i>. Paris : Hermann, coll. Cultures numériques.</span></span></span></p>
<h1><span style="font-size:16pt"><span style="break-before:page"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black"><a name="_Toc54355038">Annexes</a></span></span></span></span></h1>
<h2><span style="font-size:14pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">Annexe 1 : Portrait de Claire Moulènes par Alex Morlier, IUT d’Angers, octobre 2019</span></span></span><img height="962" src="https://www.numerev.com/img/ck_672_20_image-20220629184500-1.jpeg" width="716" /></h2>
<h3> </h3>
<h2><span style="font-size:14pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">Annexe 2 : Portrait de Léo Tijou par Thomas Wiatrowski, IUT d’Angers, octobre 2019</span></span></span></h2>
<p style="text-align:justify"> </p>
<p align="center" style="text-align:justify"><img height="793" src="https://www.numerev.com/img/ck_672_20_image-20220629184500-2.jpeg" width="602" /></p>
<p style="text-align:justify"> </p>
<div>
<hr align="left" size="1" width="33%" />
<div id="ftn1">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:1cm"><span style="font-size:10pt"><span open="" sans="" style="font-family:"><a href="#_ftnref1" name="_ftn1" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[1]</span></span></span></span></a> Professeur au CELSA Sorbonne Université, Adeline Wrona a publié, en 2012, <i>Face au portrait. De Sainte-Beuve à Facebook</i>, ouvrage qui a notamment nourri la réflexion de cet article.</span></span></p>
</div>
<div id="ftn2">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:1cm"><span style="font-size:10pt"><span open="" sans="" style="font-family:"><a href="#_ftnref2" name="_ftn2" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[2]</span></span></span></span></a> « […] L’atelier s’adresse à des volontaires, sans visée didactique, contrairement au projet, mené souvent dans un cadre contraint, et plus orienté vers des apprentissages. »</span></span></p>
</div>
<div id="ftn3">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:1cm"><span style="font-size:10pt"><span open="" sans="" style="font-family:"><a href="#_ftnref3" name="_ftn3" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[3]</span></span></span></span></a> Aude Seurrat mentionne à cet égard les travaux des chercheurs Marie-Eve Thérenty, Yves Jeanneret et Emmanuël Souchier.</span></span></p>
</div>
<div id="ftn4">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:1cm"><span style="font-size:10pt"><span open="" sans="" style="font-family:"><a href="#_ftnref4" name="_ftn4" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[4]</span></span></span></span></a> Le binôme rédacteur/sujet du portrait est désigné arbitrairement par l’enseignant ; l’un écrit le portrait de l’autre, et réciproquement. Ce fonctionnement implique de prendre en compte, dans l’accompagnement pédagogique, que « certains [aient] des histoires plus inspirantes que d’autres ». </span></span></p>
</div>
<div id="ftn5">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:1cm"><span style="font-size:10pt"><span open="" sans="" style="font-family:"><a href="#_ftnref5" name="_ftn5" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[5]</span></span></span></span></a> Je conduis cette séquence en début de semestre 3 au mitan du DUT, alors que les étudiants sont familiers les uns des autres, sans se connaître nécessairement (notamment parce que les groupes classes ont été redistribués). Après un premier stage de quatre semaines en fin de DUT 1, et parfois après avoir travaillé pendant l’été qui précède, les étudiants de deuxième année peuvent ainsi ouvrir des perspectives personnelles et professionnelles.</span></span></p>
</div>
<div id="ftn6">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:1cm"><span style="font-size:10pt"><span open="" sans="" style="font-family:"><a href="#_ftnref6" name="_ftn6" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[6]</span></span></span></span></a> Sauf mention bibliographique contraire, certaines citations des étudiants seront insérées dans le texte entre guillemets. Elles sont extraites d’un questionnaire qualitatif qui leur a été soumis <span arial="" class="MsoSubtleReference" style="font-family:"><span style="font-variant:normal !important"><span style="color:#5a5a5a"><span style="text-transform:none"><span style="font-size:8.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times="">en</span></span></span></span></span></span> fin de semestre 3, sur les enjeux de la formation en expression-communication aux compétences rédactionnelles en DUT.</span></span></p>
</div>
<div id="ftn7">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:1cm"><span style="font-size:10pt"><span open="" sans="" style="font-family:"><a href="#_ftnref7" name="_ftn7" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[7]</span></span></span></span></a> « La rencontre et la découverte de l’autre, moi, ça me passionne. J’ai aussi beaucoup aimé creuser la réflexion sur moi-même, comment je me sentais, ce qui m’animait vraiment. »</span></span></p>
</div>
<div id="ftn8">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:1cm"><span style="font-size:10pt"><span open="" sans="" style="font-family:"><a href="#_ftnref8" name="_ftn8" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[8]</span></span></span></span></a> « J’ai beaucoup apprécié le fait de découvrir une personne de la classe d’une autre manière que dans la vie de tous les jours à l’IUT. J’ai eu l’impression d’être une sorte de confident pour lui, et en tant que personne interviewée, cela fait du bien de se livrer. »</span></span></p>
</div>
<div id="ftn9">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:1cm"><span style="font-size:10pt"><span open="" sans="" style="font-family:"><a href="#_ftnref9" name="_ftn9" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[9]</span></span></span></span></a> Pour rappel, l’éthopée (emprunté au bas latin<i> ethopœia</i>, « portrait, caractère ») est une figure de pensée qui a pour objet la peinture des mœurs et du caractère d’un personnage, tandis que la prosopographie (de prosop-, élément tiré du gr. π ρ ο ́ σ ω π ο ν, « face, figure ») renvoie à la description des qualités physiques d’un personnage réel ou fictif. Source : Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales (CNRTL), <a href="https://www.cnrtl.fr/" style="color:navy; text-decoration:underline">https://www.cnrtl.fr/</a>. </span></span></p>
</div>
<div id="ftn10">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:1cm"><span style="font-size:10pt"><span open="" sans="" style="font-family:"><a href="#_ftnref10" name="_ftn10" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[10]</span></span></span></span></a> Dans <i>Libération</i>, ce sont les amis, les ennemis, les observateurs pluriels de la personne portraiturée.</span></span></p>
</div>
<div id="ftn11">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:1cm"><span style="font-size:10pt"><span open="" sans="" style="font-family:"><a href="#_ftnref11" name="_ftn11" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[11]</span></span></span></span></a> La technique photographique n’est pas travaillée en tant que telle. Cependant, les étudiants ne puisent pas dans leurs archives personnelles mais réalisent la photographie dans le même temps qu’ils rédigent l’article.</span></span></p>
</div>
<div id="ftn12">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:1cm"><span style="font-size:10pt"><span open="" sans="" style="font-family:"><a href="#_ftnref12" name="_ftn12" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[12]</span></span></span></span></a> Notre souhait, encore non abouti à ce stade, est de concevoir un recueil de portraits des étudiants à la manière des recueils publiés par <i>Libération</i> et la Table Ronde (<i>Libération – Portraits 1994-2009</i>, préface de Laurent JOFFRIN, La Table Ronde/Libération, 2010, 372 pages).</span></span></p>
</div>
<div id="ftn13">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:1cm"><span style="font-size:10pt"><span open="" sans="" style="font-family:"><a href="#_ftnref13" name="_ftn13" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[13]</span></span></span></span></a> « Interviewer un camarade, c’est plutôt délicat, mais finalement ça devient naturel et on se prête vite au jeu. »</span></span></p>
</div>
<div id="ftn14">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:1cm"><span style="font-size:10pt"><span open="" sans="" style="font-family:"><a href="#_ftnref14" name="_ftn14" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[14]</span></span></span></span></a> Au-delà du positionnement stratégique du portrait dans <i>Libération</i> qui lui confère une place à part, on pourra s’appuyer aussi utilement, pour en aborder l’écriture, sur la loi de proximité journalistique. À ce titre, le portrait dans <i>Libération</i> attire son lecteur par le récit d’un parcours dans lequel le lecteur peut se projeter.</span></span></p>
</div>
<div id="ftn15">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:1cm"><span style="font-size:10pt"><span open="" sans="" style="font-family:"><a href="#_ftnref15" name="_ftn15" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[15]</span></span></span></span></a> Les étudiants travaillent librement sur les logiciels de mise en page exploités en Technologie de l’Information et de la Communication.</span></span></p>
</div>
<div id="ftn16">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:1cm"><span style="font-size:10pt"><span open="" sans="" style="font-family:"><a href="#_ftnref16" name="_ftn16" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[16]</span></span></span></span></a> L’écriture empathique est une contrainte imposée ici aux étudiants. L’écriture des portraits dans <i>Libération</i> déborde largement ce cadre ; elle sait être incisive, ironique, parfois cruelle, selon les journalistes et les sujets du portrait. Au regard des attentes de l’exercice, déjà nombreuses, je privilégie l’approche empathique pour les étudiants. </span></span></p>
</div>
<div id="ftn17">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:1cm"><span style="font-size:10pt"><span open="" sans="" style="font-family:"><a href="#_ftnref17" name="_ftn17" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[17]</span></span></span></span></a> « Ma plus grande peur était mon style. J’avais peur de ne pas être aussi intéressant qu’un journaliste. »</span></span></p>
</div>
<div id="ftn18">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:1cm"><span style="font-size:10pt"><span open="" sans="" style="font-family:"><a href="#_ftnref18" name="_ftn18" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[18]</span></span></span></span></a> Réalisation finale d’Estelle Durivault, 2019.</span></span></p>
</div>
<div id="ftn19">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:1cm"><span style="font-size:10pt"><span open="" sans="" style="font-family:"><a href="#_ftnref19" name="_ftn19" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[19]</span></span></span></span></a> « Faire face au regard de l’autre, mais aussi découvrir l’autre. »</span></span></p>
</div>
<div id="ftn20">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:1cm"><span style="font-size:10pt"><span open="" sans="" style="font-family:"><a href="#_ftnref20" name="_ftn20" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[20]</span></span></span></span></a> « J’ai aimé trouver les bons mots pour décrire ce portrait. »</span></span></p>
</div>
<div id="ftn21">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:1cm"><span style="font-size:10pt"><span open="" sans="" style="font-family:"><a href="#_ftnref21" name="_ftn21" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[21]</span></span></span></span></a> Réalisation finale de Léonie Dorvau, 2019.</span></span></p>
</div>
<div id="ftn22">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:1cm"><span style="font-size:10pt"><span open="" sans="" style="font-family:"><a href="#_ftnref22" name="_ftn22" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[22]</span></span></span></span></a> Réalisation finale de Claire Moulènes, 2019.</span></span></p>
</div>
<div id="ftn23">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:1cm"><span style="font-size:10pt"><span open="" sans="" style="font-family:"><a href="#_ftnref23" name="_ftn23" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[23]</span></span></span></span></a> Réalisation finale de Thomas Wiatrowski, 2019.</span></span></p>
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<div id="ftn24">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:1cm"><span style="font-size:10pt"><span open="" sans="" style="font-family:"><a href="#_ftnref24" name="_ftn24" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[24]</span></span></span></span></a> Réalisation finale d’Alex Morlier, 2019.</span></span></p>
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<div id="ftn25">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:1cm"><span style="font-size:10pt"><span open="" sans="" style="font-family:"><a href="#_ftnref25" name="_ftn25" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[25]</span></span></span></span></a> « Seul visuel, elle donne à voir le point de vue du photographe, subjectif et assumé comme tel, avec le choix artistique qui en découle », in LASSALLE, Isabelle, <i>op.cit.</i></span></span></p>
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<div id="ftn26">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:1cm"><span style="font-size:10pt"><span open="" sans="" style="font-family:"><a href="#_ftnref26" name="_ftn26" style="color:navy; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span open="" sans="" style="font-family:">[26]</span></span></span></span></a> Sur cette notion complexe, voir par exemple : SALMON, Christian (2007). <i>Storytelling la machine à fabriquer des histoires et à formater les esprits</i>. Paris : La Découverte.</span></span></p>
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