<div class="entry-content"> <h3>Abstract</h3> <p>Guy Tosi (Erzange, 1910 - Paris, 2000) was a professor of Italian and comparative literature at the Sorbonne, and the French specialist in Gabriele d&#39;Annunzio, who was the subject of his doctoral thesis. From 1943 to 1952, he was a reader and then literary director at &Eacute;ditions Deno&euml;l, publishing works by Louis-Ferdinand C&eacute;line, Blaise Cendrars, Curzio Malaparte and Henry Miller, among others. Appointed director of the French Institute in Florence (1954-1962), he later returned to a professorship at the Sorbonne. Guy Tosi knew many people in literary and academic circles in both France and Italy, and the extensive network of his exchanges leaves many documents to be discovered and explored.</p> <p><strong>Keywords</strong><br /> &nbsp;</p> <p>correspondence, Blaise Cendrars, Guy Tosi, Henry Miller</p> <p>&nbsp;</p> <p>&nbsp;</p> <p>Guy Tosi (Erzange, 1910 &ndash; Paris, 2000) &eacute;tait professeur d&rsquo;italien et de litt&eacute;rature compar&eacute;e &agrave; la Sorbonne et le sp&eacute;cialiste en France de Gabriele d&rsquo;Annunzio, qui fut le sujet de sa th&egrave;se d&rsquo;&Eacute;tat. De 1943 &agrave; 1952, lecteur puis directeur litt&eacute;raire des &Eacute;ditions Deno&euml;l, il fut &agrave; ce titre l&rsquo;&eacute;diteur, entre autres, de Louis-Ferdinand C&eacute;line, Blaise Cendrars, Curzio Malaparte, Henry Miller. Nomm&eacute; directeur de l&rsquo;Institut fran&ccedil;ais de Florence (1954-1962), il a retrouv&eacute; ensuite un poste de professeur &agrave; la Sorbonne. Guy Tosi connaissait beaucoup de monde dans les milieux litt&eacute;raire et universitaire aussi bien en France qu&rsquo;en Italie et le r&eacute;seau &eacute;tendu de ses &eacute;changes laisse de nombreux documents &agrave; d&eacute;couvrir et explorer.</p> <p style="text-align: justify;">Les ann&eacute;es qui nous concernent ici sont celles o&ugrave;, chez Deno&euml;l et apr&egrave;s son d&eacute;part, Tosi est en correspondance avec &laquo;&nbsp;ses&nbsp;&raquo; &eacute;crivains&nbsp;: il ne se contente pas de les &eacute;diter mais entretient avec eux des relations tr&egrave;s cordiales, &agrave; l&rsquo;exception peut-&ecirc;tre de C&eacute;line qui, comme on sait, avait des rapports difficiles avec ses &eacute;diteurs.</p> <p style="text-align: justify;">&Agrave; la suite de circonstances qui ont tenu beaucoup au hasard, j&rsquo;ai eu eu la chance de d&eacute;couvrir plusieurs de ces correspondances&nbsp;: au domicile de Guy Tosi, en 2008, son h&eacute;ritier sortit un jour d&rsquo;un placard un dossier qui serait, disait-il, susceptible de m&rsquo;int&eacute;resser puisqu&rsquo;il connaissait mon int&eacute;r&ecirc;t pour Blaise Cendrars. La plus importante &minus; plus de cent lettres &minus;&nbsp;est celle qu&rsquo;&eacute;changent Blaise Cendrars et Guy Tosi&nbsp;; figuraient aussi dans cet ensemble plusieurs lettres d&rsquo;Henry Miller (en fran&ccedil;ais ou en anglais) qui toutes &eacute;voquaient Blaise Cendrars, qu&rsquo;Henry Miller tenait en grande estime et affection, ainsi qu&rsquo;une importante correspondance avec Curzio Malaparte (en italien) &agrave; laquelle nous n&rsquo;avons pas eu acc&egrave;s et au moins trois lettres de C&eacute;line, envoy&eacute;es du Danemark, adress&eacute;es &agrave; &laquo;&nbsp;Guy Tosi, directeur litt&eacute;raire de&nbsp;la maison de l&rsquo;assassin&eacute; Deno&euml;l, rue Am&eacute;lie&nbsp;&raquo;, donc post&eacute;rieures au 2 d&eacute;cembre 1945. Nous avons privil&eacute;gi&eacute; les &eacute;changes avec Blaise Cendrars et Henry Miller.</p> <p style="text-align: justify;">Ce dossier contenait, outre les lettres de Cendrars, en nombre, un dossier d&rsquo;hommages &agrave; Blaise Cendrars que Guy Tosi avait sollicit&eacute;s pour une exposition organis&eacute;e en f&eacute;vrier 1961 &agrave; l&rsquo;Institut fran&ccedil;ais de Florence apr&egrave;s le d&eacute;c&egrave;s de Blaise Cendrars survenu le 21 janvier. Parmi les signataires figuraient des lettres d&rsquo;&eacute;crivains ou d&rsquo;artistes fran&ccedil;ais, notamment de Jean Cocteau, Philippe Soupault, Maurice Fombeure, Paul Gilson, Pierre Albert-Birot, Pierre Mac Orlan, Nino Frank, &Eacute;douard Peisson, G&eacute;rard Bauer, Barjavel, Albert t&rsquo;Sterstevens, Cassandre, Yves Brayer, Robert Doisneau, Darius Milhaud, et parmi les &eacute;trangers Carlo B&ograve;, John Dos Passos, Ardengo Soffici, Lionello Fiumi, Libero De Libero, Orfeo Tamburi, etc. Tous ces hommages ont donn&eacute; lieu &agrave; une publication dans la revue italienne &laquo;&nbsp;Litteratura&nbsp;&raquo; (XXV<sup>e</sup> ann&eacute;e, juillet-ao&ucirc;t 1961, n&deg;52) et un tir&eacute; &agrave; part publi&eacute; par l&rsquo;Institut fran&ccedil;ais de Florence en 1961, &laquo;&nbsp;Hommage &agrave; Blaise Cendrars&nbsp;&raquo;, publi&eacute; la m&ecirc;me ann&eacute;e (&Eacute;ditions De Luca, Rome, 1961). L&rsquo;ensemble de ces documents, gr&acirc;ce &agrave; la g&eacute;n&eacute;rosit&eacute; des ayants-droit de Guy Tosi et avec l&rsquo;accord du Minist&egrave;re de la Culture, a &eacute;t&eacute; d&eacute;pos&eacute; dans le Fonds Blaise Cendrars &agrave; la Biblioth&egrave;que nationale suisse &agrave; Berne.</p> <h2 style="text-align: justify;"><span id="1_Passage_de_main_de_Robert_Denoel_a_Guy_Tosi"><strong>1. Passage de main&nbsp;: de Robert Deno&euml;l &agrave; Guy Tosi</strong></span><br /> &nbsp;</h2> <p style="text-align: justify;">Le dossier comprenait &eacute;galement trois lettres de Blaise Cendrars adress&eacute;es &agrave; Robert Deno&euml;l, avant l&rsquo;arriv&eacute;e de Guy Tosi dans la maison. Manifestement, leurs rapports &eacute;taient d&eacute;j&agrave; tr&egrave;s cordiaux &ndash; et si Cendrars ne baisse jamais tout &agrave; fait sa garde devant ses &eacute;diteurs, il t&eacute;moigne plus d&rsquo;une fois sa joie devant la lecture enthousiaste de Deno&euml;l&nbsp;: il accorde un grand prix &agrave; son jugement et en fait &eacute;tat aupr&egrave;s de ses destinataires familiers, Raymone et Jacques-Henry L&eacute;vesque.</p> <p style="text-align: justify;">La premi&egrave;re lettre, envoy&eacute;e d&rsquo;Aix-en-Provence o&ugrave; Cendrars r&eacute;sidait depuis 1940, est dat&eacute;e du 29 octobre 1942&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Mon bon vieux,</p> <p style="text-align: justify;">Peux-tu me faire adresser les <em>D&eacute;combres&nbsp;</em><a href="#_ftn1" name="_ftnref1">[1]</a>, que je ne puis trouver ici, ni &agrave; Marseille. Merci.</p> <p style="text-align: justify;">Et &agrave; part &ccedil;a, que deviens-tu et comment va&nbsp;?</p> <p style="text-align: justify;">Ma main amie</p> <p style="text-align: justify;">Blaise</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">En f&eacute;vrier 1943, Robert Deno&euml;l propose &agrave; Blaise Cendrars une &eacute;dition de ses <em>Po&eacute;sies compl&egrave;tes</em>&nbsp;qui para&icirc;tront en 1944. La r&eacute;ponse de Blaise, le 26 f&eacute;vrier, permet de dater exactement la proposition de l&rsquo;&eacute;diteur&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Mon bon vieux, ta carte du 20 me fait d&rsquo;autant plus plaisir que voici des ann&eacute;es que j&rsquo;attendais cette proposition, et je suis ravi que ce soit toi qui prenne cette initiative. Donc d&rsquo;accord, envoie un contrat. Pour la notice pr&eacute;liminaire, j&rsquo;ai sous la main un ami&nbsp;<a href="#_ftn2" name="_ftnref2">[2]</a> qui non seulement conna&icirc;t tous ces po&egrave;mes par c&oelig;ur mais les poss&egrave;de &agrave; peu pr&egrave;s tous, en plaquettes et en revues&nbsp;! Comme il va rentrer tr&egrave;s prochainement &agrave; Paris je lui dirai d&rsquo;aller te voir pour se mettre d&rsquo;accord avec toi. Cela fera un tr&egrave;s beau volume &ndash; et je te donnerai des in&eacute;dits&nbsp;! Je t&rsquo;embrasse</p> <p style="text-align: justify;">Blaise</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Dans une autre lettre &agrave; Robert Deno&euml;l dat&eacute;e du 2 mars 1943, Blaise Cendrars recommande Jacques [-Henry] Levesque pour l&rsquo;introduction&nbsp;<a href="#_ftn3" name="_ftnref3">[3]</a> et le charge d&rsquo;expliquer comment il con&ccedil;oit le livre&nbsp;; il conclut la lettre en ces termes&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Je me r&eacute;jouis beaucoup de voir ce beau livre, qui, tout &agrave; coup, &agrave; moi qui l&rsquo;attendais depuis des ans, me para&icirc;t urgent, urgent.</p> <p style="text-align: justify;">Tibi</p> <p style="text-align: justify;">Blaise.</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Les <em>Po&eacute;sies compl&egrave;tes</em> ont paru en mai 1944 en &eacute;dition &agrave; tirage limit&eacute; et num&eacute;rot&eacute;. &Agrave; la demande de Blaise Cendrars, une autre &eacute;dition (ordinaire) para&icirc;tra en 1947&nbsp;<a href="#_ftn4" name="_ftnref4">[4]</a>.</p> <p style="text-align: justify;">Nous n&rsquo;avons pas trouv&eacute; dans ce lot d&rsquo;autres lettres entre Cendrars et Deno&euml;l, qui fut assassin&eacute; le 2 d&eacute;cembre 1945, alors qu&rsquo;il se rendait au th&eacute;&acirc;tre avec Jeanne Loviton (Jean Voilier). Cette derni&egrave;re, d&eacute;j&agrave; administratrice provisoire, devint ensuite propri&eacute;taire de la maison Deno&euml;l qu&rsquo;elle revendra en octobre 1951 &agrave; la soci&eacute;t&eacute; ZED (Gallimard)&nbsp;<a href="#_ftn5" name="_ftnref5">[5]</a>. Guy Tosi, en 1945, &eacute;tait devenu le directeur litt&eacute;raire de la maison d&rsquo;&eacute;dition et les &eacute;changes que nous avons retrouv&eacute;s sont d&rsquo;abord des correspondances administratives. Le registre n&rsquo;est &eacute;videmment pas le m&ecirc;me&nbsp;: la familiarit&eacute;, l&rsquo;amiti&eacute; affectueuse, qui autorisent des demandes &agrave; l&rsquo;imp&eacute;ratif ne sont plus de saison. Le 15 ao&ucirc;t 1946, Guy Tosi envoie de S&eacute;r&eacute;nange en Moselle, dont il est originaire, une lettre manuscrite &agrave; Blaise Cendrars&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Cher monsieur et ami,</p> <p style="text-align: justify;">Vous avez d&ucirc; recevoir &ndash; ou vous allez recevoir &ndash; ces jours-ci une lettre de Madame Voilier en r&eacute;ponse &agrave; celle que vous m&rsquo;avez adress&eacute;e vers le 20 juillet au sujet de <em>La Main coup&eacute;e</em>.</p> <p style="text-align: justify;">Vous pouvez lui faire confiance. Je suis convaincu que, sous son impulsion, Deno&euml;l va faire un grand bond en avant. Sachez en tout cas que vous n&rsquo;avez cess&eacute; d&rsquo;occuper rue Am&eacute;lie, dans [les pens&eacute;es] et les projets de tous, la premi&egrave;re place.</p> <p style="text-align: justify;">Je souhaite que Madame Voilier sache vous convaincre de venir &agrave; Paris cet automne afin que je puisse enfin vous conna&icirc;tre.</p> <p style="text-align: justify;">Tr&egrave;s amicalement votre</p> <p style="text-align: justify;">Guy Tosi</p> <p style="text-align: justify;">PS. L&rsquo;article de Miller sur vous est virtuellement plac&eacute;, dans <em>Gavroche</em> pour septembre-octobre. Vous l&rsquo;avais-je dit&nbsp;?</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Nous n&rsquo;avons pas pu &eacute;tablir la date pr&eacute;cise de la premi&egrave;re rencontre entre Guy Tosi et Blaise Cendrars. Mais dans une lettre manuscrite de Cendrars qui lui est adress&eacute;e en date du mardi 11, sans autre pr&eacute;cision sur le mill&eacute;sime, Cendrars le remercie pour une gerbe de gla&iuml;euls envoy&eacute;e &agrave; Raymone, et se dit enchant&eacute; d&rsquo;avoir fait sa connaissance. En l&rsquo;absence d&rsquo;une enveloppe et du cachet de la poste il nous a &eacute;t&eacute; impossible de la dater avec pr&eacute;cision : le 11 tombe un mardi en septembre et en d&eacute;cembre 1945, ainsi qu&rsquo;en juin 1946 et en f&eacute;vrier 1947. Guy Tosi situait leur rencontre en 1945, mais la lettre cit&eacute;e ci-dessus, du 15 ao&ucirc;t 1946, permet d&rsquo;en douter. Il arrive que la correspondance, dans sa fonction documentaire, soit une source plus fiable que la m&eacute;moire &ndash; le cachet de la poste faisant foi. En revanche, c&rsquo;est explicitement &agrave; la date du 27 septembre 1946, que Blaise Cendrars adresse une lettre manuscrite &agrave; Guy Tosi au sujet de Kaputt de Malaparte qui vient de sortir. Son regard sur son temps ne s&rsquo;est pas adouci et il se reconna&icirc;t dans l&rsquo;&acirc;pret&eacute; du romancier italien :</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Cher Monsieur,</p> <p style="text-align: justify;">&hellip;J&rsquo;ai beaucoup aim&eacute; Kaput [sic] de Malaparte. C&rsquo;est un grand livre, assez d&eacute;gueulasse, comme je les aime, refl&eacute;tant bien l&rsquo;&eacute;poque.</p> <p style="text-align: justify;">Ma main amie</p> <p style="text-align: justify;">Blaise Cendrars</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Blaise Cendrars persiste et signe dans sa d&eacute;dicace en 1948 d&rsquo;une nouvelle de <em>Bourlinguer</em> &laquo;&nbsp;Naples&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;Au d&eacute;gueulasse et g&eacute;nial Curzio MALAPARTE, l&rsquo;auteur de <em>Kaputt</em>, en souvenir de la L&eacute;gion, en hommage au jeune garibaldien en chemise rouge de la for&ecirc;t d&rsquo;Argonne, au fantassin de la montagne de Reims, et ma main amie au d&eacute;port&eacute; des Lipari. Blaise Cendrars (Napolitain d&rsquo;occasion).&nbsp;&raquo;</p> <p style="text-align: justify;">&Agrave; la fin de 1946, en novembre, para&icirc;t <em>La Main coup&eacute;e</em>. Dans une lettre dat&eacute;e du 20 f&eacute;vrier 1947, Guy Tosi dresse un premier bilan pour son auteur qu&rsquo;il m&eacute;nage courtoisement, accusant l&rsquo;&eacute;tat de la librairie de la mollesse des ventes&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">&hellip;L&rsquo;actuelle gr&egrave;ve des journaux qui risque de durer jusqu&rsquo;au 1<sup>er</sup> Mars ne nous permet pas de savoir si les critiques les plus importants ont d&eacute;j&agrave; fait leurs articles.</p> <p style="text-align: justify;">Commercialement, le livre se vend un peu plus lentement que d&rsquo;habitude, en raison de l&rsquo;actuelle crise de la librairie, aggrav&eacute;e par l&rsquo;&eacute;tat d&rsquo;esprit des libraires qui attendent, pour passer leurs commandes, la nouvelle baisse imminente de 5%.<br /> Inutile de vous dire que nous sommes sans inqui&eacute;tude sur le succ&egrave;s final de <em>La Main coup&eacute;e</em>.</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Guy Tosi ajoute en post-scriptum&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">D&rsquo;une lettre de Henry Miller &agrave; l&rsquo;un de nos collaborateurs, nous extrayons le passage suivant qui vous concerne&nbsp;: &laquo;&nbsp;r&eacute;cemment j&rsquo;ai lu une interview de mon ancien ami Blaise Cendrars par Maximilien Vox (dans <em>Op&eacute;ra</em> 8 janvier 1947). Je voudrais bien savoir comment communiquer avec Cendrars. Est-ce que vous pourriez me renseigner l&agrave;-dessus&hellip; quand j&rsquo;ai vu &ldquo;sa gueule&rdquo; j&rsquo;ai &eacute;t&eacute; &eacute;mu, parce que je l&rsquo;ai cru mort&nbsp;&raquo;.</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Miller a redoubl&eacute; le 28 mars sa demande directement pr&egrave;s de Guy Tosi&nbsp;<a href="#_ftn6" name="_ftnref6">[6]</a>&nbsp;comme l&rsquo;atteste cette lettre cit&eacute;e par Jay Bochner&nbsp;: &laquo;&nbsp;[&hellip;] j&rsquo;ai &eacute;crit sur lui un texte tr&egrave;s &eacute;logieux intitul&eacute; &ldquo;Hommage &agrave; Blaise Cendrars&rdquo; qui a d&rsquo;abord paru dans un magazine chinois de Shanghai ou Honk Kong et par la suite dans un livre de morceaux choisis intitul&eacute; <em>Wisdom of the Heart</em> (New directions, 1947). Je crois qu&rsquo;il a &eacute;t&eacute; &eacute;galement introduit dans l&rsquo;&eacute;dition originale anglaise de <em>Max and the White Phagocytes </em>[&hellip;]&nbsp;<a href="#_ftn7" name="_ftnref7">[7]</a>&nbsp;&raquo;. Tosi ayant fait suivre la lettre, Cendrars met ses amis L&eacute;vesque qui habitent New York sur la piste et re&ccedil;oit le 13 juin le livre de Miller o&ugrave; figure &laquo; Tribute to Blaise Cendrars&nbsp;&raquo;, ce dont il informe son &eacute;diteur le m&ecirc;me jour. Et Guy Tosi de demander le 16 juin &agrave; Cendrars de lui envoyer le livre pour traduction afin de placer le texte dans &laquo;&nbsp;quelque revue ou hebdomadaire de quelque importance&nbsp;&raquo;. Il approuve les arguments strat&eacute;giques de Blaise Cendrars&nbsp;: &laquo;&nbsp;&ldquo;A Tribute to Blaise Cendrars&rdquo; est certainement appel&eacute; &agrave; un grand retentissement et, comme vous le dites, ce sera en outre une excellente publicit&eacute; au moment o&ugrave; va sortir la r&eacute;&eacute;dition de <em>L&rsquo;Homme foudroy&eacute;. </em>Envoyez-nous donc le livre le plus t&ocirc;t possible&nbsp;<a href="#_ftn8" name="_ftnref8">[8]</a> [&hellip;]&nbsp;&raquo; Tosi reproduit aussi le post-scriptum de la lettre de Miller&nbsp;: &laquo;&nbsp;Hier j&rsquo;ai achev&eacute; la lecture de <em>L&rsquo;HOMME FOUDROY&Eacute;</em>&nbsp;de Cendrars. Je vais lui &eacute;crire tr&egrave;s bient&ocirc;t. C&rsquo;est un grand livre. Je suis &eacute;mu. Dommage qu&rsquo;il ne soit pas aux environs. J&rsquo;ai tellement envie de prendre &ldquo;sa main amie&rdquo;, comme il dit, et dire &ldquo;Merci, bravo&nbsp;!&rdquo;&nbsp;&raquo;. Le mercredi 18 juin, Cendrars &eacute;crit &agrave; Miller pour le remercier. La relation &eacute;pistolaire, qui s&rsquo;&eacute;tait interrompue le 30 novembre 1938 avec Miller peut reprendre, dix ans plus tard&nbsp;: Guy Tosi a r&eacute;tabli le contact et jou&eacute;, l&agrave; encore, son r&ocirc;le de passeur<em>. </em>C&rsquo;est ainsi que le texte de Miller traduit en fran&ccedil;ais peut figurer dans le bulletin publicitaire <em>Le</em>&nbsp;<em>Courrier Deno&euml;l</em>&nbsp;en m&ecirc;me temps que dans&nbsp;<em>Gavroche </em>en d&eacute;cembre 1947.</p> <p style="text-align: justify;">Parall&egrave;lement se d&eacute;roulent des n&eacute;gociations plus serr&eacute;es&nbsp;: en mars 1947, les &Eacute;ditions Deno&euml;l, envoient une proposition de contrat pour le prochain livre de Cendrars, <em>Le Lotissement du Ciel</em>, qui para&icirc;tra en 1949. Dans sa lettre d&rsquo;accompagnement, Guy Tosi signale que le titre pr&eacute;vu par Cendrars, &laquo;&nbsp;La Possession du monde&nbsp;&raquo;, appartenait d&eacute;j&agrave; &agrave; Georges Duhamel et, d&rsquo;autre part, qu&rsquo;aucun &agrave;-valoir n&rsquo;est pr&eacute;vu dans le contrat. Le 20 mars 1947, par une lettre manuscrite adress&eacute;e d&rsquo;Aix-en-Provence &agrave; Guy Tosi, Blaise Cendrars, pas tr&egrave;s content, r&eacute;agit &agrave; la proposition de contrat&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Cher Monsieur Tosi,</p> <p style="text-align: justify;">J&rsquo;ai bien re&ccedil;u le contrat du 14 mars. Merci beaucoup. Mais excusez-moi je ne vous le renvoie pas et ne le signe pas. En effet, ce que je demandais en insistant pour l&rsquo;obtenir, c&rsquo;&eacute;tait une s&eacute;rieuse avance. [&hellip;] Comme je l&rsquo;&eacute;crivais ce matin &agrave; l&rsquo;ami Vox, mon travail est mon capital et mon int&eacute;r&ecirc;t n&rsquo;est pas de l&rsquo;engager longtemps &agrave; l&rsquo;avance &ndash; surtout par les temps qui courent.</p> <p style="text-align: justify;">Pour le titre, vous avez raison &ndash; j&rsquo;en trouverai un autre. [&hellip;]</p> <p style="text-align: justify;">Ma main amie</p> <p style="text-align: justify;">Blaise Cendrars</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">D&egrave;s le 4 avril 1947, Guy Tosi assure Cendrars que la maison Deno&euml;l s&rsquo;emploie &agrave; trouver les moyens de lui donner enti&egrave;re satisfaction d&egrave;s que Deno&euml;l aura retrouv&eacute; une stabilit&eacute; financi&egrave;re d&eacute;finitive et, en gage de bonne intention, lui demande de bien vouloir accorder &agrave; Deno&euml;l la pr&eacute;f&eacute;rence pour &laquo;&nbsp;trois &oelig;uvres &agrave; venir&nbsp;&raquo;.</p> <p style="text-align: justify;">Dans sa r&eacute;ponse manuscrite &agrave; Guy Tosi dat&eacute;e d&rsquo;Aix-en-Provence, le 15 avril 1947, Blaise Cendrars se radoucit mais sans se laisser s&eacute;duire par des promesses, il cherche des garanties, rappelant au passage qu&rsquo;il a aussi d&rsquo;autres sources d&rsquo;information et qu&rsquo;il n&rsquo;a pas &agrave; faire les frais d&rsquo;une crise qu&rsquo;il aurait &eacute;t&eacute; possible d&rsquo;anticiper&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">&hellip;Je sais quelle est la crise que traversent actuellement la librairie et l&rsquo;&eacute;dition &ndash; elle &eacute;tait &agrave; pr&eacute;voir &ndash; rien ne presse, prenez votre temps et d&egrave;s que votre tr&eacute;sorerie sera &agrave; l&rsquo;aise, je suis votre homme.</p> <p style="text-align: justify;">Cette crise g&eacute;n&eacute;rale se double chez vous d&rsquo;une crise int&eacute;rieure, un changement de direction ou d&rsquo;administration, je ne sais quoi &ndash; Vox vient de m&rsquo;&eacute;crire qu&rsquo;il a donn&eacute; sa d&eacute;mission d&rsquo;administrateur provisoire, ce qui m&rsquo;ennuie beaucoup. Avant de m&rsquo;engager pour trois autres bouquins je voudrais savoir qui sera &agrave; la t&ecirc;te de la maison Deno&euml;l, d&rsquo;autant plus qu&rsquo;en 1948 j&rsquo;esp&egrave;re pouvoir me mettre &agrave; &eacute;crire mes grands romans annonc&eacute;s depuis si longtemps et dont chacun me prendra deux ou trois ann&eacute;es d&rsquo;&eacute;criture. C&rsquo;est vous dire que je voudrais &ecirc;tre tranquille durant tout ce temps-l&agrave;, soutenu par mon &eacute;diteur et ne pas &ecirc;tre &agrave; la merci de changements de direction plus ou moins provisoires. [&hellip;]</p> <p style="text-align: justify;">Croyez-moi tr&egrave;s fid&egrave;lement v&ocirc;tre. &Agrave; vous</p> <p style="text-align: justify;">Ma main amie</p> <p style="text-align: justify;">Blaise Cendrars</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">La n&eacute;gociation, comme souvent, tourne &agrave; la satisfaction de Cendrars&nbsp;: par une lettre du 16 mai 1947, de &laquo;&nbsp;Guy Tosi, Directeur Litt&eacute;raire&nbsp;&raquo;, la maison Deno&euml;l se dit pr&ecirc;te &agrave; signer le contrat aux conditions souhait&eacute;es par Blaise Cendrars. Le 4 janvier 1948, s&rsquo;ouvre un nouveau chapitre de ce &laquo;&nbsp;roman&nbsp;&raquo; &eacute;ditorial&nbsp;: Blaise annonce &agrave; Guy Tosi l&rsquo;envoi de <em>Bourlinguer </em>dans une lettre manuscrite envoy&eacute;e d&rsquo;Aix-en-Provence&nbsp;<a href="#_ftn9" name="_ftnref9">[9]</a>&nbsp;; on note que Tosi est pass&eacute; du c&ocirc;t&eacute; des &laquo;&nbsp;amis&nbsp;&raquo; &agrave; la faveur de sa visite &minus;&nbsp;rien de tel que la pr&eacute;sence et la conversation de vive voix pour que s&rsquo;installe chez Blaise un ton familier et direct&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Cher ami Tosi,</p> <p style="text-align: justify;">Hier, je vous ai adress&eacute; le manuscrit de <em>Bourlinguer</em>. Veuillez m&rsquo;en accuser r&eacute;ception par t&eacute;l&eacute;graphe. Merci. C&rsquo;&eacute;tait l&agrave; la grosse surprise que je vous r&eacute;servais. Votre visite ici n&rsquo;y est pas &eacute;trang&egrave;re.</p> <p style="text-align: justify;">Cela fait plus de 400 pages et des pages pleines&nbsp;! c&rsquo;est de la m&ecirc;me veine que <em>L&rsquo;homme foudroy&eacute;</em>, et je crois plus fort, vous verrez. Si vous corrigez des fautes d&rsquo;orthographe et autres &agrave; la lecture (certains refrains d&rsquo;une chanson napolitaine), je ne serai nullement vex&eacute;, au contraire, je vous en remercie d&rsquo;avance.</p> <p style="text-align: justify;">&Agrave; quand les &eacute;preuves&nbsp;? grouillez-vous&nbsp;! &hellip; et</p> <p style="text-align: justify;">De tout c&oelig;ur</p> <p style="text-align: justify;">V&ocirc;tre</p> <p style="text-align: justify;">Blaise Cendrars</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Juste apr&egrave;s l&rsquo;accus&eacute; de r&eacute;ception du manuscrit de <em>Bourlinguer</em>, auquel Guy Tosi, le 7 janvier 1948&nbsp;<a href="#_ftn10" name="_ftnref10">[10]</a>, r&eacute;pond par un &eacute;loge nuanc&eacute; (&laquo;&nbsp;presque toujours enthousiasm&eacute;&nbsp;&raquo;), les &eacute;changes se resserrent sur les d&eacute;tails techniques de la fabrication, du calendrier, des textes d&rsquo;escorte. Trois jour plus tard, Blaise Cendrars r&eacute;pond &agrave; Guy Tosi, en homme toujours press&eacute; de voir se concr&eacute;tiser les projets, dans une lettre envoy&eacute;e de Villefranche-sur-Mer o&ugrave; il vient de d&eacute;m&eacute;nager avec Raymone et sa m&egrave;re, &laquo;&nbsp;mamanternelle&nbsp;&raquo;&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Samedi 10</p> <p style="text-align: justify;">Cher ami &ndash; Merci d&rsquo;avoir donn&eacute; le MS &agrave; la composition. Il faut se grouiller et t&acirc;cher de ne pas avoir de retard. Je vous ai fait une belle surprise, pas&nbsp;? Mais c&rsquo;est aussi parce que vous disiez pouvoir faire imprimer le livre en deux mois. Que Dieu vous entende&nbsp;! De mon c&ocirc;t&eacute; je ne vous mettrai pas en retard [&hellip;]</p> <p style="text-align: justify;">N&rsquo;oubliez pas que la couleur de ma couverture est <em>le bleu</em>.</p> <p style="text-align: justify;">[&hellip;]</p> <p style="text-align: justify;">T&acirc;chez de trouver un bon texte pour la bande.</p> <p style="text-align: justify;">[&hellip;]</p> <p style="text-align: justify;">Ma main amie</p> <p style="text-align: justify;">Blaise Cendrars</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;"><em>Bourlinguer </em>est pr&eacute;sent&eacute; encore une fois comme un cadeau inattendu, qui suppose en retour un service rapide, et autorise &agrave; l&rsquo;auteur de la lettre beaucoup d&rsquo;injonctions &agrave; l&rsquo;imp&eacute;ratif. Une autre lettre du 22 janvier 1948 manifeste des exigences pr&eacute;cises &ndash;&nbsp;et un refus non moins clair de faire ce qui pourrait &ecirc;tre la pr&eacute;sentation pour le Bulletin Deno&euml;l, ou un dossier remis &agrave; la presse&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Mon cher ami Guy Tosi,</p> <p style="text-align: justify;">&hellip;Dites &agrave; Mr. Chevalier que la date du 1<sup>er</sup> avril me convient (si ce n&rsquo;est pas un poisson d&rsquo;avril&nbsp;!)&nbsp;; enfin, qu&rsquo;il fasse pour le mieux, et presse l&rsquo;imprimeur, et veille au grain en cas de nouvelles gr&egrave;ves&nbsp;! je d&eacute;sirerais recevoir mes &eacute;preuves en double jeu, un que je renverrais et l&rsquo;autre que je garderais pour moi comme guide-&acirc;ne. Et qu&rsquo;on brosse ces &eacute;preuves sur un papier potable qui supporte les corrections &agrave; l&rsquo;encre, et non sur papier buvard ou macules. Deux &eacute;preuves suffiront, typographiques et de mise en page. Il n&rsquo;y aura pas de retard car je ne fais gu&egrave;re de corrections d&rsquo;auteur, si bien que je pourrai donner le bon &agrave; tirer sur le deuxi&egrave;me jeu. [&hellip;.]</p> <p style="text-align: justify;">Mais je ne puis &eacute;crire les 50 lignes que vous me demandez pour votre Bulletin de mars. Demandez-les &agrave; quelqu&rsquo;un d&rsquo;autre qui le signerait (&agrave; un Thierry Maulnier par exemple, qui a fait plusieurs bons papiers sur <em>L&rsquo;homme foudroy&eacute;</em>). Moi je m&rsquo;en sens pour l&rsquo;instant incapable. Et puis, j&rsquo;ai autre chose &agrave; &eacute;crire&hellip; Ce livre est d&eacute;j&agrave; derri&egrave;re moi.</p> <p style="text-align: justify;">[&hellip;] Je me suis d&eacute;j&agrave; remis au travail.</p> <p style="text-align: justify;">N&rsquo;oubliez pas qu&rsquo;on vous attend un jour (prochain&nbsp;!) au</p> <p style="text-align: justify;">Clair Logis</p> <p style="text-align: justify;">Avenue St Est&egrave;ve</p> <p style="text-align: justify;">Villefranche-sur-Mer</p> <p style="text-align: justify;">A.M.</p> <p style="text-align: justify;">Ma main amie</p> <p style="text-align: justify;">Blaise Cendrars</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">La hantise de l&rsquo;orthographe s&rsquo;expose dans une lettre envoy&eacute;e &agrave; Guy Tosi de Villefranche-sur-Mer cette fois &agrave; la date du 16 f&eacute;vrier 1948, une lettre manuscrite que nous aimons tout particuli&egrave;rement&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Cher ami Tosi,</p> <p style="text-align: justify;">J&rsquo;envie les gens qui poss&egrave;dent l&rsquo;orthographe. Je n&rsquo;ai jamais pu me la fourrer dans la t&ecirc;te&nbsp;; probablement parce qu&rsquo;elle figure dans les dictionnaires et que tout ce que l&rsquo;on note, on l&rsquo;oublie. Aussi, jugez de ma joie de me sentir &eacute;paul&eacute; par un correcteur plein de tact et de science. Ou l&rsquo;avez-vous d&eacute;nich&eacute;&nbsp;? [&hellip;] Ce gar&ccedil;on m&eacute;rite une belle d&eacute;dicace et un grand papier quand le bouquin sortira. Je ne sais comment le remercier. C&rsquo;est un v&eacute;ritable soulagement pour moi, beaucoup de travail en moins et du temps gagn&eacute; [&hellip;]</p> <p style="text-align: justify;">&nbsp;Je travaille beaucoup</p> <p style="text-align: justify;">Ma main amie</p> <p style="text-align: justify;">Blaise Cendrars</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">&Agrave; la demande de Jean Voilier (Jeanne Loviton) qui invitait Cendrars &agrave; venir &agrave; Paris pour le lancement de&nbsp;<em>Bourlinguer</em>, Blaise Cendrars r&eacute;pond par une fin de non-recevoir &ndash;&nbsp;le roman suivant le requiert enti&egrave;rement&nbsp;<a href="#_ftn11" name="_ftnref11">[11]</a>. Il r&eacute;it&egrave;re son refus le 15 mars 1948 aupr&egrave;s de Guy Tosi :</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Mon cher ami Tosi,</p> <p style="text-align: justify;">Je vous confirme ce que j&rsquo;ai &eacute;crit samedi &agrave; Mme Voilier&nbsp;: excusez-moi, il m&rsquo;est absolument impossible de venir actuellement &agrave; Paris&nbsp;: j&rsquo;ai trop de travail&nbsp;; je ne veux pas risquer d&rsquo;interrompre mon horaire de travail et la r&eacute;daction du <em>Lotissement du Ciel</em>&nbsp;dans laquelle je suis en plein&nbsp;; un s&eacute;jour &agrave; Paris comprend trop de risques pour moi actuellement apr&egrave;s tant d&rsquo;ann&eacute;es d&rsquo;absence&nbsp;: affaires &agrave; liquider, gens &agrave; aller voir, 2-3 d&eacute;m&eacute;nagements, etc., etc&hellip; L&rsquo;avant-derni&egrave;re fois que j&rsquo;&eacute;tais venu &agrave; Paris, pour 3-4 jours, histoire de signer un contrat de cin&eacute;ma, j&rsquo;y suis rest&eacute; 4 ans&nbsp;! &ndash; et je ne veux pas m&rsquo;exposer aujourd&rsquo;hui au m&ecirc;me risque, surtout que les gens de cin&eacute;ma me relancent une fois de plus et m&rsquo;ont d&eacute;j&agrave; envoy&eacute; ici 3 fois une voiture pour m&rsquo;enlever&nbsp;! Et je tiens bon car je dois &eacute;crire&hellip; Aller aujourd&rsquo;hui &agrave; Paris c&rsquo;est m&rsquo;exposer d&eacute;lib&eacute;r&eacute;ment &agrave; une catastrophe.</p> <p style="text-align: justify;">Par contre, je viendrai cet automne en vous remettant le MS du <em>Lotissement du Ciel</em>&nbsp;et je serai encore l&agrave; pour le lancement de ce dernier bouquin, je corrigerai les &eacute;preuves &agrave; Paris et ferai enfin personnellement le service d&eacute;dicaces et autres corv&eacute;es, presse, interviewes, cocktails, photographes, etc., etc., &minus; et sans rechigner car je passerai alors le temps qu&rsquo;il faudra &agrave; Paris pour vous donner satisfaction dans tous les domaines et prendrai le temps de mettre en ordre toutes mes autres affaires. Mais aujourd&rsquo;hui c&rsquo;est impossible &agrave; cause de mes &eacute;critures&hellip;.</p> <p style="text-align: justify;">Excusez-moi</p> <p style="text-align: justify;">Content d&rsquo;apprendre que la couverture sera identique aux pr&eacute;c&eacute;dentes. Quand recevrai-je les prochaines &eacute;preuves&nbsp;? je vous donnerai le bon &agrave; tirer. Quand pensez-vous que nous pourrons para&icirc;tre&nbsp;? Vers le 15 avril&nbsp;? C&rsquo;est magnifique et merci de votre diligence.</p> <p style="text-align: justify;">Ma main amie</p> <p style="text-align: justify;">Blaise Cendrars</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Guy Tosi prend acte, non sans avancer une objection strat&eacute;gique de poids, le 19 mars, une de celles auxquelles Blaise est g&eacute;n&eacute;ralement sensible&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Cher Monsieur et ami,</p> <p style="text-align: justify;">Je re&ccedil;ois votre lettre du 15 mars. Nous comprenons vos raisons&nbsp;; il n&rsquo;en reste pas moins que votre absence de Paris, au moment du lancement de <em>Bourlinguer</em>, sera pour le succ&egrave;s commercial du livre une semi-catastrophe&nbsp;: j&rsquo;estime que la diff&eacute;rence dans la vente est au moins du simple au double. C&rsquo;est dommage mais nous aurions mauvaise gr&acirc;ce &agrave; insister&nbsp;<a href="#_ftn12" name="_ftnref12">[12]</a>.</p> <p style="text-align: justify;">[&hellip;] Ren&eacute; Barjavel nous donnera dans quelques jours son papier sur <em>Bourlinguer</em>&nbsp;; il para&icirc;tra en bonne place dans notre bulletin. Le livre sortira vers le 15 avril. [&hellip;]</p> <p style="text-align: justify;">Tr&egrave;s amicalement votre</p> <p style="text-align: justify;">Guy Tosi</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Devant la menace de manque &agrave; gagner brandie par son &eacute;diteur Cendrars, dans une lettre en date du samedi 20 mars, se laisse finalement convaincre, en bougonnant.</p> <p>&nbsp;<a class="fancybox image" href="#_ftn"><img alt="Maurice Poccachard_Fig 1a" class="alignnone size-medium wp-image-2171" height="300" loading="lazy" sizes="(max-width: 233px) 100vw, 233px" src="https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Fig-1a-233x300.jpg" srcset="https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Fig-1a-233x300.jpg 233w, https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Fig-1a.jpg 535w" width="233" /><img alt="Maurice Poccachard_Fig 1b" class="alignnone size-medium wp-image-2172" loading="lazy" sizes="(max-width: 233px) 100vw, 233px" src="https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Fig-1b-233x300.jpg" srcset="https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Fig-1b-233x300.jpg 233w, https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Fig-1b.jpg 533w" style="width: 233px; height: 300px;" /></a></p> <p><small>Doc. 1 ‒ Fac-simil&eacute; lettre de Blaise Cendrars &agrave; Guy Tosi,&nbsp;samedi 20 mars 1948. Transcription en note <a href="#_ftn13" name="_ftnref13">[13]</a>.</small></p> <p style="text-align: justify;">On note que, non sans malice, il pr&eacute;tend c&eacute;der pour ne pas le l&eacute;ser &ndash;&nbsp;et non dans son int&eacute;r&ecirc;t personnel&hellip; mais il m&eacute;dite de &laquo;&nbsp;rentabiliser&nbsp;&raquo; sa concession en faisant du pot organis&eacute; par Deno&euml;l une f&ecirc;te pour les amis avec lesquels il veut trinquer avant de redescendre travailler&nbsp;: le jour m&ecirc;me de sa r&eacute;ponse &agrave; Tosi, Cendrars &eacute;crit &agrave; Jacques&nbsp;: &laquo;&nbsp;Motus&nbsp;! Je pense passer quelques jours &agrave; Paris pour la sortie de <em>Bourlinguer</em>, fin avril. Alors, on se verra. Quelle joie&nbsp;!&hellip;&nbsp;&raquo;, mais les retrouvailles seront diff&eacute;r&eacute;es. En effet le 6 avril 1948, Blaise Cendrars annonce &agrave; Guy Tosi qu&rsquo;il a sign&eacute; le bon &agrave; tirer et qu&rsquo;il l&rsquo;a envoy&eacute; &agrave; M. Chevalier. Il ajoute avec peut-&ecirc;tre un brin d&rsquo;ironie&nbsp;: &laquo;&nbsp;C&rsquo;est merveilleux nous aurons &agrave; peine 15 jours de retard.&nbsp;&raquo; Et un peu plus loin il s&rsquo;informe&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Maintenant, autre chose&nbsp;: veuillez me faire conna&icirc;tre le programme des r&eacute;jouissances que vous me promettez lors de mon s&eacute;jour &agrave; Paris&nbsp;? La date ne pourrait-elle pas &ecirc;tre fix&eacute;e apr&egrave;s le 15 mai&nbsp;? donc apr&egrave;s la Pentec&ocirc;te. J&rsquo;ai une derni&egrave;re s&eacute;ance &agrave; Radio Monte-Carlo le 13 mai. Qu&rsquo;en pensez-vous&nbsp;? La presse battera [sic] alors son plein. MM. les critiques sont souvent lents &agrave; se mettre en branle.</p> <p style="text-align: justify;">&Agrave; bient&ocirc;t</p> <p style="text-align: justify;">Blaise Cendrars.</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Toutes ses lettres confirment alors qu&rsquo;il est pris dans une fr&eacute;n&eacute;sie d&rsquo;&eacute;criture, et que ce voyage express &agrave; Paris perturbe la l&eacute;vitation de son Joseph de Cupertino, mais le retard de Deno&euml;l lui permet d&rsquo;avancer et le 16 mai, il pr&eacute;cise &agrave; Jacques-Henry L&eacute;vesque&nbsp;: &laquo;&nbsp;Serai &agrave; Paris du 1<sup>er</sup> au 7 juin pour la sortie de mon livre et cocktail chez Deno&euml;l vendredi 4, o&ugrave; je vous ai fait convier. Tout cela m&rsquo;emb&ecirc;te, &agrave; part de revoir quelques amis et de vous embrasser car je suis en train de terminer <em>Saint Joseph de Cupertino</em>&nbsp;<a href="#_ftn14" name="_ftnref14">[14]</a>.&nbsp;&raquo; L&rsquo;achev&eacute; d&rsquo;imprimer de l&rsquo;&eacute;dition originale de <em>Boulinguer</em> est dat&eacute; de la veille, le 15 mai 1948. Une nouvelle &eacute;dition revue et corrig&eacute;e suivra fin septembre de la m&ecirc;me ann&eacute;e. La r&eacute;ception pour le lancement du livre a lieu dans les locaux de la rue Am&eacute;lie le vendredi 4 juin 1948 et, selon Guy Tosi, ce serait &agrave; cette occasion que Blaise Cendrars aurait rencontr&eacute; pour la premi&egrave;re fois Curzio Malaparte.</p> <p style="text-align: justify;"><a class="fancybox image" href="#_ftn"><img alt="Maurice Poccachard_Fig 2_Lancement de Bourlinguer le 4 juin 1948" class="alignnone size-medium wp-image-2174" height="300" loading="lazy" sizes="(max-width: 211px) 100vw, 211px" src="https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Fig-2_Lancement-de-Bourlinguer-le-4-juin-1948-211x300.jpg" srcset="https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Fig-2_Lancement-de-Bourlinguer-le-4-juin-1948-211x300.jpg 211w, https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Fig-2_Lancement-de-Bourlinguer-le-4-juin-1948.jpg 467w" width="211" /></a></p> <p style="text-align: justify;"><small>Doc. 2 ‒&nbsp;Lancement de <em>Bourlinguer </em>le 4 juin 1948 dans les locaux de la rue Am&eacute;lie. Sur la photo de gauche &agrave; droite&nbsp;: Guy Tosi, Blaise Cendrars et Jean Voilier (Jeanne Loviton).</small></p> <p style="text-align: justify;">La premi&egrave;re &eacute;dition de <em>Bourlinguer</em> se vend bien&nbsp;: d&egrave;s le 25 juin Guy Tosi annonce &agrave; Cendrars que l&rsquo;&eacute;dition originale sur pur fil et alfa est &eacute;puis&eacute;e et que 4&nbsp;000 exemplaires de l&rsquo;&eacute;dition ordinaire (sur un tirage de 10&nbsp;000) ont d&eacute;j&agrave; &eacute;t&eacute; vendus. En marge de cette lettre, Blaise Cendrars a inscrit le calcul des droits d&rsquo;auteur qu&rsquo;il pourrait encaisser.</p> <p style="text-align: justify;"><img alt="Maurice Poccachard_Doc 3_Guy Tosi, lettre à Cendrars du 25 juin 1948" class="alignnone size-medium wp-image-2176" height="300" loading="lazy" sizes="(max-width: 235px) 100vw, 235px" src="https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Doc-3_Guy-Tosi-lettre-à-Cendrars-du-25-juin-1948-235x300.jpg" srcset="https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Doc-3_Guy-Tosi-lettre-à-Cendrars-du-25-juin-1948-235x300.jpg 235w, https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Doc-3_Guy-Tosi-lettre-à-Cendrars-du-25-juin-1948.jpg 653w" width="235" /></p> <p><small>Doc. 3 ‒&nbsp;Guy Tosi, lettre &agrave; Blaise Cendrars du 25 juin 1948.</small></p> <p style="text-align: justify;">Le 26 juin 1948 il envisage une nouvelle &eacute;dition et &eacute;crit &agrave; Guy Tosi&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">&hellip;. Et si l&rsquo;on fait un nouveau tirage, pr&eacute;venez-moi &agrave; temps, j&rsquo;ai des corrections &agrave; faire, dont deux de taille&nbsp;!</p> <p style="text-align: justify;">[&hellip;.]</p> <p style="text-align: justify;">Amiti&eacute;s de Raymone. &Agrave; vous</p> <p style="text-align: justify;">Ma main amie</p> <p style="text-align: justify;">Blaise</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">En m&ecirc;me temps que se pr&eacute;pare la sortie en fanfare de <em>Bourlinguer, </em>Cendrars continue de chercher des cautions outre-Atlantique&nbsp;: Dos Passos et Henry Miller, qui ont chant&eacute; ses louanges avant la guerre, ne sont-ils pas d&eacute;sormais port&eacute;s au pinacle par la nouvelle g&eacute;n&eacute;ration d&rsquo;&eacute;crivains&nbsp;? Cendrars presse son &eacute;diteur de faire traduire et publier ces grands &eacute;crivains qui l&rsquo;ont salu&eacute; comme un ma&icirc;tre et un pr&eacute;curseur en un temps o&ugrave; la critique fran&ccedil;aise le pla&ccedil;ait encore dans l&rsquo;ombre d&rsquo;Apollinaire.</p> <p style="text-align: justify;">Nous avons retrouv&eacute; dans les archives de Guy Tosi une traduction de &laquo;&nbsp;L&rsquo;Hom&egrave;re du Transsib&eacute;rien&nbsp;&raquo; avec des corrections et des pr&eacute;cisions manuscrites apport&eacute;es par Blaise Cendrars. Le document n&rsquo;est pas dat&eacute;. En ce qui concerne les illustrations de Dos Passos pour le livre, Cendrars indique que ce sont &laquo; des reproductions d&rsquo;aquarelles absolument quelconques&nbsp;&raquo;<em>&nbsp;; </em>il juge &laquo;&nbsp;les po&egrave;mes bien traduits malgr&eacute; quelques grossi&egrave;res erreurs de glossaire, et une pr&eacute;face dont je ne me souviens pas, comme je vous le disais&nbsp;&raquo; (lettre dat&eacute;e du 7 mars 1948). Cendrars vise autre chose et d&egrave;s le 24 mars 1948 revient &agrave; la charge&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Mon cher ami Tosi,</p> <p style="text-align: justify;">Bien re&ccedil;u le PANAMA. Merci beaucoup.</p> <p style="text-align: justify;">Mais comme je vous le disais (et comme j&rsquo;en avais gard&eacute; le souvenir) la pr&eacute;face de John Dos Passos est anodine. Ce qu&rsquo;il faut trouver maintenant et faire traduire c&rsquo;est son fameux chapitre de l&rsquo;<em>Orient-Express</em>.</p> <p style="text-align: justify;">Ma main amie</p> <p style="text-align: justify;">Blaise Cendrars</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Toujours attentif aux livres d&rsquo;Henry Miller et &agrave; ce qu&rsquo;on &eacute;crit sur lui, Blaise Cendrars sollicite Guy Tosi le 5 juillet 1948&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Par votre interm&eacute;diaire ne puis-je recevoir <em>Le Colosse de Maroussi</em> de Henry Miller, qui vient de para&icirc;tre aux &eacute;ditions du Ch&ecirc;ne. Mais les &eacute;diteurs fcs [fran&ccedil;ais] de Miller ne m&rsquo;envoyent [sic] jamais un bouquin. Il para&icirc;t qu&rsquo;il parle encore de moi. Merci</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">En ao&ucirc;t 1948, ce sont les vacances et voici Guy Tosi &agrave; Gardone, o&ugrave; il poursuit ses recherches sur Gabriele d&rsquo;Annunzio au Vitttoriale, d&rsquo;o&ugrave; il &eacute;crit &agrave; Cendrars une lettre sur papier &agrave; en-t&ecirc;te de la Pensione Hohl, Gardone Riviera<em>&nbsp;</em>, le 10 ao&ucirc;t 1948&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Cher ami,</p> <p style="text-align: justify;">[&hellip;] J&rsquo;ai eu une petite &eacute;motion ce matin, en feuilletant des lettres au Vitttoriale de tomber sur une lettre de <em>F&eacute;licie Cendrars</em> &agrave; d&rsquo;Annunzio o&ugrave; il est question de vous, de l&rsquo;envoi d&rsquo;une de vos plaquettes de vers. [&hellip;]</p> <p style="text-align: justify;">Bien &agrave; vous</p> <p style="text-align: justify;">Toute mon amiti&eacute; &agrave; Madame Raymone</p> <p style="text-align: justify;">Guy Tosi</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Blaise Cendrars r&eacute;pond le 9 septembre par une lettre d&rsquo;invitation qui lui attire cette le&ccedil;on de g&eacute;ographie le 14 septembre 1948&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Mon Cher Cendrars,</p> <p style="text-align: justify;">[&hellip;] Madame Voilier est tomb&eacute;e malade et j&rsquo;ai d&ucirc; rentrer quelques jours plus t&ocirc;t. Elle est actuellement en convalescence &agrave; B&eacute;duer <a href="#_ftn15" name="_ftnref15">[15]</a> pour tout le mois de septembre.</p> <p style="text-align: justify;">Je dois ajouter, &agrave; ma d&eacute;charge et &agrave; votre confusion, &ocirc; grand bourlingueur, que Gardone ne se trouve pas sur la Riviera mais sur le Lac de Garde. Je n&rsquo;&eacute;tais donc pas votre voisin cet &eacute;t&eacute;. Ceci dit, mon intention &eacute;tait bien de rentrer d&rsquo;Italie par Nice et de m&rsquo;arr&ecirc;ter &agrave; Saint Segond. Tous les regrets sont pour moi.</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Le reste de la lettre traite essentiellement des aspects financiers entre la maison Deno&euml;l et Blaise Cendrars et juxtapose sans transition, ce qui est fr&eacute;quent dans la correspondance de Blaise avec ses &eacute;diteurs, le registre de l&rsquo;amiti&eacute; ou d&rsquo;une intimit&eacute; presque &laquo;&nbsp;familiale&nbsp;&raquo; aux n&eacute;gociations parfois &acirc;pres. Le 15 septembre 1948, Blaise Cendrars qui trouve souvent exasp&eacute;rants les silences de ses correspondants, et particuli&egrave;rement les vacances de ses &eacute;diteurs, r&eacute;pond &agrave; Tosi&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Mon cher Tosi,</p> <p style="text-align: justify;">Quelle joie de reprendre contact. Sous pr&eacute;texte d&rsquo;aller prendre l&rsquo;air, les gens asphyxient le pays&nbsp;! car partant tous ensemble, tout s&rsquo;arr&ecirc;te &ndash; et l&rsquo;on ne sait plus rien. Je suis navr&eacute; d&rsquo;apprendre la maladie de Jean Voilier. J&rsquo;esp&egrave;re que ce n&rsquo;est pas grave. Faites-lui mes amiti&eacute;s et dites-lui que je vais lui &eacute;crire. Bien s&ucirc;r Gardone doit &ecirc;tre sur le Lac de Garde, son nom l&rsquo;indique, mais l&rsquo;en-t&ecirc;te de votre h&ocirc;telier portant la mention RIVIERA, je n&rsquo;ai pas pens&eacute; plus loin que ma voisine, voisin&nbsp;! &ndash; et surtout pas &agrave; cette Riviera alpestre des lacs italiens. [&hellip;.]</p> <p style="text-align: justify;">Je vous signale que j&rsquo;ai sign&eacute; hier le contrat <em>Seghers</em> pour l&rsquo;anthologie &agrave; para&icirc;tre dans sa collection des &laquo;&nbsp;Po&egrave;tes d&rsquo;Aujourd&rsquo;hui&nbsp;&raquo; et dans les conditions que je vous avais annonc&eacute;es pr&eacute;c&eacute;demment. Nous aurons donc un premier &agrave;-valoir &agrave; toucher au&nbsp;<em>15 oct</em>.</p> <p style="text-align: justify;">Merci pour les coupures, les nouvelles de l&rsquo;&eacute;mission et tout.</p> <p style="text-align: justify;">Jamais re&ccedil;u la Volga&nbsp;<a href="#_ftn16" name="_ftnref16">[16]</a>, ni les autres livres annonc&eacute;s.</p> <p style="text-align: justify;">Si vous voyez Robert Doisneau, dites-lui de vous montrer les photos extraordinaires qu&rsquo;il a faites des banlieusards et de la banlieue parisienne. Il y aurait de quoi composer un tr&egrave;s bel album, pour lequel j&rsquo;&eacute;crirais volontiers un texte. Est-ce que cela int&eacute;resserait &eacute;ventuellement la maison&nbsp;?</p> <p style="text-align: justify;">Ma main amie</p> <p style="text-align: justify;">Blaise Cendrars</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Ainsi naissent les projets&nbsp;: celui-ci sera r&eacute;alis&eacute; puisque <em>La Banlieue de Paris</em> para&icirc;tra simultan&eacute;ment &agrave; La Guilde du Livre (Lausanne) et chez Pierre Seghers (Paris) en 1949, avec les photos de Robert Doisneau et un texte de Blaise Cendrars, &minus; mais pas chez Deno&euml;l&nbsp;! Quelques jours plus tard, le 23 septembre Guy Tosi fait le bilan des envois de part et d&rsquo;autre, des retards et ne manque pas de signaler &agrave; l&rsquo;&eacute;crivain que sa notori&eacute;t&eacute; s&rsquo;&eacute;tend en Italie&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Je vous fais parvenir un autre exemplaire de <em>La Volga na&icirc;t en Europe </em>[de Curzio Malaparte], puisque vous n&rsquo;avez pas re&ccedil;u le pr&eacute;c&eacute;dent. Quant aux beaux papiers de <em>Bourlinguer</em>&nbsp;vous nous en avez accus&eacute; r&eacute;ception dans votre lettre du 10 juin dernier.</p> <p style="text-align: justify;">Je ne me suis pas encore mis en rapport avec Robert Doisneau &agrave; qui j&rsquo;&eacute;cris aujourd&rsquo;hui sans faute. En ce qui concerne l&rsquo;album photographique et banlieusard, il faudrait attendre le retour de Madame Voilier vers le d&eacute;but d&rsquo;octobre.</p> <p style="text-align: justify;">Tamburi&nbsp;<a href="#_ftn17" name="_ftnref17">[17]</a> me charge de vous dire que l&rsquo;interview d&rsquo;Aniante a paru presque simultan&eacute;ment dans <em>Il Tempo</em>&nbsp;de Rome et dans le magazine <em>Oggi</em>. D&rsquo;autre part, un des meilleurs po&egrave;tes de l&rsquo;Italie actuelle, Libero de Libero, que j&rsquo;ai vu &agrave; Rome cet &eacute;t&eacute;, pr&eacute;pare sur vous et sur l&rsquo;influence de votre po&eacute;sie en Italie, une importante &eacute;tude qui sera achev&eacute;e dans un mois environ. [&hellip;] M.&nbsp;Tamburi ajoute &laquo;&nbsp;Faites-moi le plaisir de dire &agrave; Cendrars que je me sens pour lui beaucoup d&rsquo;affection et une grande estime&nbsp;&raquo;.</p> <p style="text-align: justify;">Tr&egrave;s cordialement v&ocirc;tre.</p> <p style="text-align: justify;">Guy Tosi</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;"><a class="fancybox image" href="#_ftn"><img alt="Maurice Poccachard_Doc 4_Portrait de Cendrars, Orfeo Tamburi" class="alignnone size-medium wp-image-2175" height="300" loading="lazy" sizes="(max-width: 232px) 100vw, 232px" src="https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Doc-4_Portrait-de-Cendrars-Orfeo-Tamburi-232x300.jpg" srcset="https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Doc-4_Portrait-de-Cendrars-Orfeo-Tamburi-232x300.jpg 232w, https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Doc-4_Portrait-de-Cendrars-Orfeo-Tamburi.jpg 434w" width="232" /></a></p> <p style="text-align: justify;"><small>Doc.&nbsp;4 ‒&nbsp;Portrait de Cendrars, Orfeo Tamburi, 1948</small></p> <p style="text-align: justify;">Ce n&rsquo;est pas ce portrait mais une lithographie abstraite de Tamburi, qui illustrera la couverture de l&rsquo;essai qu&rsquo;Henry Miller consacre &agrave; Blaise Cendrars lors de sa publication en fran&ccedil;ais en 1951. Le 30 septembre 1948 <em>Bourlinguer</em> fait l&rsquo;objet d&rsquo;une nouvelle &eacute;dition &laquo;&nbsp;revue et corrig&eacute;e&nbsp;&raquo;. Blaise Cendrars accuse r&eacute;ception le 28 d&eacute;cembre 1948, mais ne laisse rien passer&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Cher ami Tosi,</p> <p style="text-align: justify;">Bien re&ccedil;u 10 exemplaires de <em>Bourlinguer</em>. Merci beaucoup. Mais il y erreur. Vous m&rsquo;envoyez des anciens tirages et c&rsquo;est 10 exemplaires du <em>nouveau tirage</em> que je vous avais demand&eacute;s. Veuillez faire le n&eacute;cessaire pour rectifier.</p> <p style="text-align: justify;">Le Bulletin est amusant, dommage qu&rsquo;il ne paraisse pas plus souvent. Veuillez me donner l&rsquo;adresse du libraire dont vous donnez la vitrine en photo, je lui enverrai un mot de f&eacute;licitation. Le texte de John Dos Passos est bon, mais c&rsquo;est le chapitre sur l&rsquo;<em>Hom&egrave;re du Transsib&eacute;rien</em> que je voudrais voir reproduit. J&rsquo;ai encore une fois &eacute;crit en Am&eacute;rique pour me procurer <em>L&rsquo;Orient Express</em>&nbsp;!</p> <p style="text-align: justify;">Le petit volume de Seghers vient de para&icirc;tre&nbsp;<a href="#_ftn18" name="_ftnref18">[18]</a>. L&rsquo;avez-vous re&ccedil;u&nbsp;? Il est tr&egrave;s bien.</p> <p style="text-align: justify;"><u>Dan Yack</u> vient de para&icirc;tre en Angleterre. Dommage que l&rsquo;&eacute;dition fran&ccedil;aise soit foutue. J&rsquo;aurais bien d&eacute;sir&eacute; que les &Eacute;d. Deno&euml;l reprennent cette &eacute;dition, il doit en rester 2-3.000 expl. dans la faillite de la Tour qui vont tomber entre les mains des revendeurs&nbsp;<a href="#_ftn19" name="_ftnref19">[19]</a>&nbsp;!</p> <p style="text-align: justify;">Et c&rsquo;est dommage&hellip;</p> <p style="text-align: justify;">Mes bons v&oelig;ux, mon cher Tosi, &agrave; vous, &agrave; Mme Voilier, aux &Eacute;ditions Deno&euml;l &ndash; et &agrave; nos livres.</p> <p style="text-align: justify;">Ma main amie</p> <p style="text-align: justify;">Blaise Cendrars</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Le 30 d&eacute;cembre 1948, Blaise Cendrars re&ccedil;oit ses droits d&rsquo;auteur arr&ecirc;t&eacute;s au 30 juin 1948, droits amput&eacute;s de l&rsquo;&agrave;-valoir du <em>Lotissement du Ciel</em> en cours de r&eacute;daction. Il n&rsquo;est manifestement pas tr&egrave;s content de cette rigoureuse gestion, et demande &agrave; Guy Tosi qu&rsquo;on lui envoie ses droits arr&ecirc;t&eacute;s au 31 d&eacute;cembre 1948. Il m&eacute;dite une man&oelig;uvre de r&eacute;torsion, la proximit&eacute; amicale avec l&rsquo;&eacute;diteur n&rsquo;emp&ecirc;chant pas de constants bras de fer&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Selon le r&eacute;sultat je jugerai si je puis reprendre imm&eacute;diatement la r&eacute;daction du <em>Lotissement du Ciel</em>&nbsp;interrompu lors de la r&eacute;ception de votre lettre du 14 sept. Ou si je dois me plonger dans de nouvelles besognes pour assurer mon budget de l&rsquo;ann&eacute;e qui vient.</p> <p style="text-align: justify;">Quelle sale &eacute;poque&nbsp;! ne pas m&ecirc;me pouvoir compter sur un minimum pour vivre&hellip;</p> <p style="text-align: justify;">Avec mes bons v&oelig;ux et ma main amie</p> <p style="text-align: justify;">Blaise Cendrars</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Ce leitmotiv est fr&eacute;quemment entonn&eacute; et il est parfois contraint de mettre sa menace &agrave; ex&eacute;cution, diff&eacute;rant l&rsquo;&oelig;uvre en chantier le temps d&rsquo;une adaptation radio, ou d&rsquo;une &eacute;dition &laquo;&nbsp;alimentaire&nbsp;&raquo;. Dans ce cas, le malentendu semble vite dissip&eacute; puisque dans sa lettre du 7 janvier 1949, Cendrars reprend le fil de son projet, non sans d&eacute;plorer le temps perdu&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Mr Logerot (le comptable de Deno&euml;l) m&rsquo;a &eacute;crit et je suis tr&egrave;s sensible apr&egrave;s sa mise au point &agrave; sa compr&eacute;hension. Il n&rsquo;y avait &eacute;galement aucune mauvaise volont&eacute; ni d&rsquo;impatience de ma part, mais la constatation d&rsquo;un fait, fait qui m&rsquo;a fait perdre trois mois dans mon travail.</p> <p style="text-align: justify;">Je reprends le <em>Lotissement du Ciel</em> lundi 10 et j&rsquo;esp&egrave;re bien le mener &agrave; sa fin pour la mi ou la fin f&eacute;vrier. Il ne me reste plus qu&rsquo;une quarantaine de pages &agrave; &eacute;crire&hellip;</p> <p style="text-align: justify;">Je vous &eacute;crirai dimanche au sujet de <em>Dan Yack</em>.</p> <p style="text-align: justify;">Ma main amie</p> <p style="text-align: justify;">Blaise Cendrars</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Le 4 avril 1949, c&rsquo;est Jean Voilier qui prend le relais pr&egrave;s de Cendrars sur un registre qui commence et finit presque tendrement, mais qui entre-temps en appelle &agrave; la compr&eacute;hension, passe par tous les arguments commerciaux, essaie de toucher la piti&eacute;, la vanit&eacute;, les esp&eacute;rances de march&eacute; am&eacute;ricain, rappelle &agrave; l&rsquo;&eacute;crivain les difficult&eacute;s de l&rsquo;heure et son manuscrit en retard&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Mon cher Cendrars,</p> <p style="text-align: justify;">Me voici pr&egrave;s de vous de fa&ccedil;on tangible.</p> <p style="text-align: justify;">Rien ne ressemblait moins au d&eacute;tachement ou &agrave; l&rsquo;indiff&eacute;rence que ce silence qui, de mon fait, s&rsquo;&eacute;tait &eacute;tabli entre vous et moi.</p> <p style="text-align: justify;">Je n&rsquo;ai cess&eacute;, cher Blaise, de vous parler int&eacute;rieurement et de penser &agrave; vous&hellip; Car moi je vous aime bien.</p> <p style="text-align: justify;">Je ne pense pas que, d&rsquo;o&ugrave; vous &ecirc;tes, vous puissiez vous rendre compte des difficult&eacute;s &eacute;normes qu&rsquo;il faut surmonter dans l&rsquo;&eacute;dition. Je m&egrave;ne une vie de for&ccedil;at. Les ventes sont ralenties au-del&agrave; de l&rsquo;imaginable, les acheteurs ayant laiss&eacute; leur fric entre les mains du fisc. Les libraires ne paient qu&rsquo;apr&egrave;s de nombreuses lettres de rappel et au bout d&rsquo;un long d&eacute;lai.</p> <p style="text-align: justify;">Nos repr&eacute;sentants font toujours pour vous les m&ecirc;mes efforts, mais vous le savez, il est difficile de concilier le talent, la r&eacute;putation que vous avez acquise, et les gros succ&egrave;s de librairie. Vos tirages n&rsquo;atteindront sans doute jamais les grands chiffres, mais en France et dans le monde, vous avez de fervents admirateurs. Le cher Miller ne passe pas de mois sans qu&rsquo;il me tienne au courant de ses tentatives de vous imposer en Am&eacute;rique.</p> <p style="text-align: justify;">Mais l&agrave;-bas, comme ici, l&rsquo;&eacute;dition est touch&eacute;e, les imb&eacute;ciles et les analphab&egrave;tes font des petits.</p> <p style="text-align: justify;">J&rsquo;attends avec impatience le <em>Lotissement du Ciel</em>, d&rsquo;abord parce que je suis curieuse de le lire mais aussi parce qu&rsquo;il commence &agrave; &ecirc;tre temps de sortir une nouvelle &oelig;uvre de vous.</p> <p style="text-align: justify;">Vous avez re&ccedil;u un ch&egrave;que de 100.000 frs, croyez que je ne perds pas de vue un instant vos n&eacute;cessit&eacute;s mat&eacute;rielles et qu&rsquo;&agrave; chaque fois qu&rsquo;il sera possible, nous vous enverrons des droits d&rsquo;auteur.</p> <p style="text-align: justify;">Mais &laquo;&nbsp;livres vendus&nbsp;&raquo; ne signifie malheureusement pas pour nous &laquo;&nbsp;livres r&eacute;gl&eacute;s&nbsp;&raquo; ce qui rend souvent difficile notre tr&eacute;sorerie.</p> <p style="text-align: justify;">J&rsquo;aimerais, mon cher Blaise, savoir comment vous &ecirc;tes maintenant, j&rsquo;avais &eacute;t&eacute; d&eacute;sol&eacute;e de vous savoir souffrant en janvier et f&eacute;vrier. Je pense que le printemps m&eacute;diterran&eacute;en vous verra tout &agrave; fait r&eacute;tabli et joyeux. Pour ma part je vis &laquo;&nbsp;surmen&eacute;e&nbsp;&raquo; et sans espoir d&rsquo;en sortir.</p> <p style="text-align: justify;">Excusez cette longue lettre et croyez-moi tr&egrave;s amicalement v&ocirc;tre.</p> <p style="text-align: justify;">Jean Voilier&nbsp;<a href="#_ftn20" name="_ftnref20">[20]</a>.</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Le 8 avril Cendrars temporise pr&egrave;s de Tosi&nbsp;; cette r&eacute;ponse annonc&eacute;e ouvre avec Jean Voilier une s&eacute;rie d&rsquo;&eacute;changes qu&rsquo;on lira dans <em>Cendrars</em> <em>le bourlingueur&nbsp;des deux rives</em>&nbsp;; sous le couvert de protestations d&rsquo;amiti&eacute; leur correspondance rel&egrave;ve de la n&eacute;gociation subtile, avec chantage de part et d&rsquo;autre &ndash;&nbsp;pour l&rsquo;une &agrave; la faillite, pour l&rsquo;autre &agrave; l&rsquo;abandon du livre, un jeu d&rsquo;amabilit&eacute;s au second degr&eacute; auquel les deux interlocuteurs semblent prendre un certain plaisir. Ici affleure la menace de suspendre la copie&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Cher ami Tosi,</p> <p style="text-align: justify;">Dites &agrave; Mme Voilier que je r&eacute;pondrai dimanche &agrave; sa bonne lettre.</p> <p style="text-align: justify;">Je ferai l&rsquo;impossible pour vous donner satisfaction, mais comme je vous l&rsquo;ai dit, je ne suis pas adversaire de voir <em>Le Lotissement du Ciel</em> <u>[</u>ne<u>]</u> para&icirc;tre qu&rsquo;en septembre-octobre.</p> <p style="text-align: justify;">&hellip;</p> <p style="text-align: justify;">Ma main amie</p> <p style="text-align: justify;">Blaise Cendrars</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">&nbsp;L&rsquo;achev&eacute; d&rsquo;imprimer du <em>Lotissement du Ciel</em> sera cependant dat&eacute; du 20 juillet 1949.</p> <p style="text-align: justify;">Le 1<sup>er</sup> juillet 1949, Guy Tosi s&rsquo;&eacute;tait permis de sugg&eacute;rer quelques corrections &agrave; apporter aux citations italiennes et espagnoles du texte. Il mentionnait &eacute;galement le dernier num&eacute;ro de <em>La Table Ronde</em> qui contenait un &laquo;&nbsp;long article d&rsquo;Alberto Savinio auquel vous faites allusion dans <em>Bourlinguer</em>&nbsp;&raquo;. Le lendemain, c&rsquo;est au tour de Cendrars de donner &agrave; Tosi une petite le&ccedil;on, d&rsquo;histoire litt&eacute;raire cette fois&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;"><em>&nbsp;</em>Cher ami Tosi,</p> <p style="text-align: justify;">Bien re&ccedil;u le N&deg; de la <em>Table Ronde</em>. Savinio ne raconte pas tout. Dans le dernier ou l&rsquo;avant-dernier N&deg; des <em>Soir&eacute;es de Paris</em>, juin ou juillet-ao&ucirc;t 1914 il y a un compte rendu de Savinio au piano chez la Barone [sic] ― qui n&rsquo;&eacute;tait fille de l&rsquo;Empereur&nbsp;!&hellip; Savinio s&rsquo;est laiss&eacute; bluffer (j&rsquo;avoue qu&rsquo;il y avait de quoi&nbsp;!). La seule batarde [sic] de l&rsquo;Empereur qui ait fait sensation dans le monde &agrave; Paris, &eacute;tait la marquise Casati (morte &agrave; Londres durant la derni&egrave;re guerre).</p> <p style="text-align: justify;">Ma main amie</p> <p style="text-align: justify;">Blaise Cendrars</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Habitant Villefranche-sur-Mer, depuis janvier 1948, Cendrars a quitt&eacute; Saint-Segond pour la Villa Andr&eacute;, avenue Foch, mais &agrave; la fin de cette ann&eacute;e 1949, il cherche &agrave; revenir habiter &agrave; Paris et Guy Tosi s&rsquo;active pour lui trouver un logement. Dans une lettre dat&eacute;e du 28 d&eacute;cembre 1949, l&rsquo;&eacute;crivain repousse l&rsquo;offre de son &eacute;diteur qui conduit assez loin, pourtant, la pr&eacute;venance, dans la plus pure tradition des Maisons d&rsquo;&eacute;dition d&rsquo;avant-guerre choyant les &eacute;crivains de leur &eacute;curie&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Cher ami Tosi,</p> <p style="text-align: justify;">Merci de votre t&eacute;l&eacute;&nbsp;<a href="#_ftn21" name="_ftnref21">[21]</a> nous signalant ces 3 pi&egrave;ces libres dans un petit h&ocirc;tel de l&rsquo;Isle St Louis. Ce serait provisoirement parfait si l&rsquo;Isle ne me fichait le cafard et comme d&rsquo;autre part je me suis remis au travail, je ne viendrai pas &agrave; Paris avant P&acirc;ques.</p> <p style="text-align: justify;">Merci de penser &agrave; nous et bonnes f&ecirc;tes.</p> <p style="text-align: justify;">Raymone et Blaise</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">La correspondance, dans le dossier Tosi, ne reprend qu&rsquo;un an plus tard, par une lettre de Cendrars dat&eacute;e du 10 novembre 1950. Il r&eacute;side alors &agrave; Paris, rue Jean Dolent, depuis le 1<sup>er</sup> septembre, et re&ccedil;oit chaque jour une foule d&rsquo;amis, apr&egrave;s les d&eacute;jeuners qui plusieurs fois dans la semaine r&eacute;unissent les plus proches. Cette lettre n&rsquo;est pas simplement un billet d&rsquo;invitation mais r&eacute;pond &agrave; ce qu&rsquo;il juge &ecirc;tre une erreur d&rsquo;analyse r&eacute;pandue aupr&egrave;s des &eacute;crivains et de leurs &eacute;diteurs&nbsp;: non, l&rsquo;adaptation radio ne profite pas au livre&nbsp;!</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Ce que Mr Tagerot me dit de la Radio me navre, mais ne me surprend pas. J&rsquo;ai toujours pr&eacute;tendu que ce n&rsquo;&eacute;tait pas le m&ecirc;me public qui lisait les livres ou qui &eacute;coutait les ondes. N&eacute;anmoins, les gens sont moches. Ils sont tellement paresseux qu&rsquo;il faudrait leur apporter les livres &agrave; domicile quand ils &eacute;coutent la Radio car pas un ne descendrait chez un libraire.<br /> Quand vous voit-on&nbsp;? Venez boire un verre un soir apr&egrave;s le bureau.</p> <p style="text-align: justify;">Ma main amie</p> <p style="text-align: justify;">Blaise</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Il r&eacute;it&egrave;re son invitation le 21 novembre&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Cher ami Tosi,</p> <p style="text-align: justify;">Veuillez noter que c&rsquo;est <u>vendredi 24</u> que nous vous attendons &agrave; d&eacute;jeuner avec Orfeo [Tamburi] et la belle Edmonde de Charles-Roux.</p> <p style="text-align: justify;">Ma main</p> <p style="text-align: justify;">Blaise</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Les lettres ensuite se rar&eacute;fient. Guy Tosi explique pourquoi&nbsp;: &laquo;&nbsp;C&rsquo;est entre 1950 et 1954 (date de ma nomination &agrave; l&rsquo;Institut Fran&ccedil;ais de Florence) que j&rsquo;ai rencontr&eacute; le plus souvent Blaise Cendrars et d&egrave;s lors nous avions moins besoin de nous &eacute;crire.&nbsp;&raquo; Nous avons cependant une lettre dat&eacute;e du 9 octobre 1952, qui montre qu&rsquo;une longue fr&eacute;quentation ne dispense pas de toute pr&eacute;caution&hellip; mais Cendrars, comme on l&rsquo;a vu reste en affaires toujours vigilant&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Mon cher Tosi,</p> <p style="text-align: justify;">Bien re&ccedil;u votre lettre du 7 m&rsquo;accusant r&eacute;ception de mes MS et autres ouvrages.</p> <p style="text-align: justify;">Je d&eacute;sirais un mot de la maison me disant que les MS re&ccedil;us sont enregistr&eacute;s sous les N&deg;-N&deg;- tant et tant, sont accept&eacute;s et entrent de ce fait dans le circuit de mon contrat g&eacute;n&eacute;ral comme pr&eacute;vu pour les in&eacute;dits.</p> <p style="text-align: justify;">Et que les ouvrages corrig&eacute;s entrent dans le circuit comme pr&eacute;vu pour les r&eacute;impressions.</p> <p style="text-align: justify;">Ceci afin d&rsquo;&eacute;viter les malentendus. Ce n&rsquo;&eacute;tait donc pas un simple accus&eacute; r&eacute;ception que je demandais. Je me suis mal exprim&eacute;.</p> <p style="text-align: justify;">C&rsquo;est avec un tr&egrave;s grand plaisir que j&rsquo;ai lu le <em>Paris Insolite</em> de l&rsquo;ami Cl&eacute;bert. C&rsquo;est tr&egrave;s bien &ndash; et mon influence est moins apparente que vous me disiez. Il faut le soutenir et le pousser. Il a du coffre.</p> <p style="text-align: justify;">Ma main amie</p> <p style="text-align: justify;">Blaise</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Nous ne savons pas &agrave; quelle date exactement Guy Tosi a quitt&eacute; les &Eacute;ditions Deno&euml;l, probablement fin 1952 ou 1953. Cependant leurs &eacute;changes continuent le 15 novembre 1953 par cette invitation&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Cher ami Tosi,</p> <p style="text-align: justify;">Voulez-vous noter qu&rsquo;on vous attend &agrave; la maison <em>lundi 30</em> vers 17h. On boira en l&rsquo;honneur de la Croix de l&rsquo;ami Seghers et nous bavarderons un peu, depuis le temps&hellip;</p> <p style="text-align: justify;">&hellip;</p> <p style="text-align: justify;">Ma main</p> <p style="text-align: justify;">Blaise</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Lorsqu&rsquo;en 1954 Guy Tosi est nomm&eacute; directeur de l&rsquo;Institut fran&ccedil;ais de Florence, il n&rsquo;a pas pour autant renonc&eacute; &agrave; ses pr&eacute;occupations de passeur de textes et s&rsquo;implique dans le volume d&rsquo;hommages, comme le prouve cette lettre du 10 mai&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Mon cher Tosi,</p> <p style="text-align: justify;">Je ne sais pas ce que sont ces po&egrave;mes des <em>Soir&eacute;es de Paris</em>&nbsp;!</p> <p style="text-align: justify;">Si cela convient &agrave; <em>Risques</em> qu&rsquo;ils les publient.</p> <p style="text-align: justify;">&Agrave; bient&ocirc;t chez Janine.</p> <p style="text-align: justify;">Comment va votre maman&nbsp;?</p> <p style="text-align: justify;">Ma main amie</p> <p style="text-align: justify;">Blaise</p> </blockquote> <p><a class="fancybox image" href="#_ftn"><img alt="Maurice Poccachard_Doc 5_Risques 9-10" class="alignnone size-medium wp-image-2177" height="300" loading="lazy" sizes="(max-width: 194px) 100vw, 194px" src="https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Doc-5_Risques-9-10-194x300.jpg" srcset="https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Doc-5_Risques-9-10-194x300.jpg 194w, https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Doc-5_Risques-9-10.jpg 323w" width="194" /></a></p> <p><small>Doc. 5 ‒ Couverture de <em>Risques</em> num&eacute;ro 9-10, qui publie un hommage &agrave; Blaise Cendrars, dont &laquo; &Agrave; un autre immortel avec fifres et clairons &raquo;, par Henry Miller.</small></p> <p style="text-align: justify;">Les quelques lettres que nous r&eacute;serve encore ce dossier montrent que si le fil des &eacute;changes s&rsquo;est distendu, l&rsquo;&eacute;diteur est fid&egrave;le &agrave; son admiration pour l&rsquo;&eacute;crivain et que leur amiti&eacute;, encore et toujours, reste fond&eacute;e en litt&eacute;rature<em>&nbsp;:</em> &laquo;&nbsp;J&rsquo;ai bien re&ccedil;u la Vie de J&eacute;r&ocirc;me Cardan et vous en remercie. Votre portrait &eacute;claire et domine toute l&rsquo;exposition Tamburi qui a lieu en ce moment &agrave; Rome./Nous vous embrassons de tout c&oelig;ur&nbsp;<a href="#_ftn22" name="_ftnref22">[22]</a>.&nbsp;&raquo; Et le 26 janvier 1956 lorsque para&icirc;t, toujours chez Deno&euml;l, o&ugrave; Blaise Cendrars a trait&eacute; avec Philippe Rossignol, ce qui est devenu le &laquo;&nbsp;dernier roman&nbsp;&raquo;, <em>Emm&egrave;ne-moi au bout du monde&nbsp;!&hellip;</em>, Guy Tosi &agrave; Florence f&eacute;licite son ami le 26 f&eacute;vrier 1956&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Mon cher Blaise,</p> <p style="text-align: justify;">Nous venons de lire d&rsquo;une traite, en m&ecirc;me temps, car nous en avons deux exemplaires <em>Emm&egrave;ne-moi au bout du monde</em>. Comme tout ce qui sort de votre main amie, c&rsquo;est brutal, puissant, entra&icirc;nant.</p> <p style="text-align: justify;">Je n&rsquo;ai rien lu depuis longtemps, je crois bien depuis <em>Lotissement du Ciel</em> qui fasse circuler le sang aussi vite. Bravo, mon cher Blaise&nbsp;!</p> <p style="text-align: justify;">C&rsquo;est un regret constant que celui de ne plus vous voir. Ne vous accorderez-vous pas un peu de repos pour venir jusqu&rsquo;ici&nbsp;? Une chambre d&rsquo;h&ocirc;te vous y attend.</p> <p style="text-align: justify;">Je vais relancer quelques &eacute;diteurs &agrave; votre sujet&nbsp;: mais quel traducteur il vous faudrait&nbsp;! &laquo;&nbsp;Emm&egrave;ne-moi&nbsp;&raquo; me para&icirc;t pratiquement intraduisible.</p> <p style="text-align: justify;">Mes hommages les plus affectueux &agrave; Raymone. Nous vous embrassons tous les deux.</p> <p style="text-align: justify;">Guy Tosi</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">On a pu constater que <em>Emm&egrave;ne-moi au bout du monde&nbsp;!&hellip;</em> n&rsquo;a jamais &eacute;t&eacute; traduit jusqu&rsquo;&agrave; ce jour en Italie&nbsp;<a href="#_ftn23" name="_ftnref23">[23]</a> ou nous avons recens&eacute; pourtant environ quarante traductions de textes de Cendrars. Mais le livre a quand m&ecirc;me &eacute;t&eacute; traduit en allemand, en anglais et en espagnol. La r&eacute;ponse de Cendrars le 19 mai 1956&nbsp;trahit son &eacute;puisement, au printemps 1956, apr&egrave;s les six ann&eacute;e de combat que lui a co&ucirc;t&eacute; ce roman &eacute;crit entre les adaptations radiophoniques, les r&eacute;&eacute;ditions et recueils de textes dispers&eacute;s qui &laquo;&nbsp;assurent la mat&eacute;rielle&nbsp;&raquo;&nbsp;; on le voit partag&eacute; entre le d&eacute;sir de l&rsquo;Italie et les obligations du &laquo;&nbsp;m&eacute;tier d&rsquo;&eacute;crivain&nbsp;&raquo; auquel il ne parvient plus &agrave; s&rsquo;arracher &ndash;&nbsp;en proie &agrave; une fatigue qui aboutit &agrave; l&rsquo;attaque c&eacute;r&eacute;brale de l&rsquo;&eacute;t&eacute; 1956&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Cher ami Tosi,</p> <p style="text-align: justify;">Merci de vos mots si gentils. Si Dieu le veut, nous viendrons cette ann&eacute;e en Italie. En tout cas j&rsquo;en ai grand envie, mais je ne fais plus de projets&hellip; Quand Raymone aura termin&eacute; la saison de Paris, nous partons &agrave; Lausanne ou nous avons une grande &eacute;mission fin juin. Apr&egrave;s, je ne sais pas. Je dois travailler. 8 volumes sont sortis depuis le d&eacute;but de l&rsquo;ann&eacute;e et Deno&euml;l doit en sortir encore quatre &agrave; la rentr&eacute;e&hellip; Et je dois travailler. Mais j&rsquo;ai promis &agrave; Raymone de la mener &agrave; Naples, ou je voudrais bien passer l&rsquo;hiver, le dernier a &eacute;t&eacute; terrible&hellip;</p> <p style="text-align: justify;">On vous embrasse tous les deux</p> <p style="text-align: justify;">Blaise Cendrars</p> <p style="text-align: justify;">PS. Il m&rsquo;arrive de donner votre adresse &agrave; des amis. Viennent-ils vous voir ou vous emb&ecirc;ter&nbsp;?&hellip;</p> <p style="text-align: justify;">Car les gentils Fran&ccedil;ais sont bien ennuyeux &agrave; l&rsquo;&eacute;tranger, avant tout en Italie, o&ugrave; ils passent &agrave; c&ocirc;t&eacute;. Montaigne, Rabelais, le Pr&eacute;sident de Brosses sauf Stendhal &agrave; Parme et Milan et Saint Beno&icirc;t Labre &agrave; Rome.</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Quelques billets factuels t&eacute;moignant de leur proximit&eacute; quasi familiale jalonnent encore les derni&egrave;res ann&eacute;es o&ugrave; Cendrars peut encore &eacute;crire quelques mots&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Le 4 avril 1957,</p> <p style="text-align: justify;">Mon cher Tosi,</p> <p style="text-align: justify;">J&rsquo;ai &eacute;crit un mot &agrave; Malaparte. Son cas est tragique&nbsp;<a href="#_ftn24" name="_ftnref24">[24]</a>.</p> <p style="text-align: justify;">Nous serons &agrave; partir du 15 avril &agrave; <u>Biot </u>(A.M.) au Mus&eacute;e Fernand L&eacute;ger.</p> <p style="text-align: justify;">Quelle joie de vous voir.</p> <p style="text-align: justify;">Bonnes amiti&eacute;s &agrave; vous deux</p> <p style="text-align: justify;">Blaise</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">&Agrave; l&rsquo;annonce du d&eacute;c&egrave;s de la m&egrave;re de Guy Tosi, le 24 juin 1958 les condol&eacute;ances sont trac&eacute;es d&rsquo;une &eacute;criture tr&egrave;s maladroite&nbsp;; quelques jours apr&egrave;s une h&eacute;morragie se d&eacute;clare, que suivra un accident c&eacute;r&eacute;bral &agrave; l&rsquo;&eacute;t&eacute; 1958.</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Cher ami Guy et ch&egrave;re Jeanne-Marie,</p> <p style="text-align: justify;">Suis de tout c&oelig;ur avec vous. Suis tr&egrave;s malade. Je sais qu&rsquo;on s&rsquo;occupe des traductions italiennes.</p> <p style="text-align: justify;">Merci de tout c&oelig;ur</p> <p style="text-align: justify;">Blaise</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Le 27 d&eacute;cembre 1958, les remerciements et l&rsquo;annonce du dernier livre ne peuvent faire illusion. La douleur retenue se dit sobrement, en post-scriptum, sur un rythme agonique&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Chers amis,</p> <p style="text-align: justify;">Jean-Fran&ccedil;ois est venu hier nous apporter vos cadeaux de No&euml;l et Raymone, qui adore les cadeaux s&rsquo;amuse depuis avec les napperons et la bo&icirc;te en citronnier fait sa joie.</p> <p style="text-align: justify;">J&rsquo;esp&egrave;re que vous avez re&ccedil;u <em>Trop c&rsquo;est trop</em> avec</p> <p style="text-align: justify;">Ma main amie</p> <p style="text-align: justify;">Blaise</p> <p style="text-align: justify;">Cela va mal, cela va bien, c&rsquo;est horrible.</p> </blockquote> <h2 style="text-align: justify;"><span id="2_A_propos_de_Blaise_les_echanges_entre_Guy_Tosi_et_Henry_Miller"><strong>2. &Agrave; propos de Blaise&nbsp;: les &eacute;changes entre Guy Tosi et Henry Miller</strong></span><br /> &nbsp;</h2> <p style="text-align: justify;">Cendrars a &eacute;t&eacute; le premier &eacute;crivain fran&ccedil;ais &agrave; consacrer un article dans la revue <em>Orbes</em> (&eacute;t&eacute; 1935, 2<sup>e</sup> s&eacute;rie, n&deg;4) &agrave; Henry Miller &laquo;&nbsp;Un &eacute;crivain am&eacute;ricain nous est n&eacute; HENRY MILLER, auteur de <em>Tropic of Cancer</em>&nbsp;&raquo; (The Obelisk Press, 238 rue Saint-Honor&eacute;, Paris 1934). &laquo;&nbsp;Livre royal, livre atroce, exactement le genre de livre que j&rsquo;aime le plus&nbsp;&raquo;, s&rsquo;exclame-t-il alors. Tr&egrave;s touch&eacute;, Henry Miller, de son c&ocirc;t&eacute; avait &eacute;crit sur Blaise Cendrars un essai qui para&icirc;t en 1936 dans une revue chinoise&nbsp;<a href="#_ftn25" name="_ftnref25">[25]</a>.</p> <p style="text-align: justify;">Si nous b&eacute;n&eacute;ficions de deux &eacute;ditions fran&ccedil;aises de la correspondance entre Blaise Cendrars et Henry Miller, sans compter les traductions&nbsp;: <em>1934-1979 &ndash; 45 ans d&rsquo;amiti&eacute;</em> par Miriam Cendrars en 1995&nbsp;<a href="#_ftn26" name="_ftnref26">[26]</a> , puis <em>Blaise Cendrars &ndash; Henry Miller 1934-1959</em> par Jay Bochner&nbsp;<a href="#_ftn27" name="_ftnref27">[27]</a>, les &eacute;changes entre Miller et Tosi qui presque toujours parlent de Cendrars restent &agrave; d&eacute;couvrir.</p> <p style="text-align: justify;">On l&rsquo;a vu, Henry Miller vouait une v&eacute;ritable passion &agrave; Cendrars, bataillant avec ardeur pour que les livres de Cendrars puissent &ecirc;tre &eacute;dit&eacute;s aux &Eacute;tats-Unis, ce qui &eacute;tait depuis longtemps le grand r&ecirc;ve de l&rsquo;auteur de <em>L&rsquo;Or&nbsp;</em>: conqu&eacute;rir le public am&eacute;ricain&nbsp;! Voici quelques extraits de sa correspondance avec Tosi, dont nous avons tenu &agrave; conserver la syntaxe, pour les lettres en fran&ccedil;ais.</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Cher Monsieur Tosi,</p> <p style="text-align: justify;">[&hellip;]</p> <p style="text-align: justify;">Quant &agrave; Cendrars &ndash; ce chapitre sur lui &ndash; oui, je serais content de le voir dans une revue, seulement, et encore une fois (et merde alors&nbsp;!), tout d&eacute;pend de Girodias &agrave; qui j&rsquo;ai donn&eacute; le droit de distribuer toutes mes choses aux &eacute;diteurs. Mais j&rsquo;esp&egrave;re qu&rsquo;il n&rsquo;offre pas de r&eacute;sistance. C&rsquo;est lui aussi qui a les droits sur tous mes livres, y compris &laquo;&nbsp;The Wisdom&nbsp;of the Heart&nbsp;&raquo;*</p> <p style="text-align: justify;">Henry</p> <p style="text-align: justify;">Excusez l&rsquo;&eacute;criture, la h&acirc;te et tout &ccedil;a. Ma t&ecirc;te tourne avec la chaleur accablante &ndash; et la corv&eacute;e (correspondance) qui reste &agrave; faire.</p> <p style="text-align: justify;">Bien &agrave; vous tous</p> <p style="text-align: justify;">HM&nbsp;<a href="#_ftn28" name="_ftnref28">[28]</a></p> <p style="text-align: justify;">*The Wisdom of the Heart (La Sagesse du c&oelig;ur) 1941</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">&Agrave; la suite de cette lettre, Henry Miller ajoutait, malgr&eacute; son vertige devant les correspondances du jour, une longue note&nbsp;o&ugrave; on le voit pr&ecirc;t &agrave; diffuser les feuillets de la pr&eacute;sentation Deno&euml;l en militant passionn&eacute; de la cause cendrarsienne&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Si le chapitre para&icirc;tra dans une revue ou quoi, j&rsquo;aimerais beaucoup si l&rsquo;&eacute;diteur aurait la gentillesse &ndash; pour mes amis Chinois &ndash; de signaler que cette &eacute;loge &agrave; un grand &eacute;crivain fran&ccedil;ais, comme partout au monde, n&rsquo;avait pu trouver un &eacute;diteur obligeant qu&rsquo;en Chine &ndash; chez la revue <em>T&rsquo;ien Haia</em>&nbsp;(Shanghai ou Hong Kong) o&ugrave; il &eacute;tait r&eacute;dig&eacute; en anglais comme &eacute;crit. Et que c&rsquo;&eacute;tait en 1936 ou 37 &ndash; au moins je crois &ndash; bien avant que j&rsquo;aie lu tous les livres de Cendrars). Aujourd&rsquo;hui, si seulement j&rsquo;avais du temps et la t&ecirc;te et quoi (<em>du g&eacute;nie</em> peut-&ecirc;tre) je pourrai ajouter bien plus que &ccedil;a. Je r&eacute;p&egrave;te et je ne puis que r&eacute;p&eacute;ter assez souvent &ndash; pour moi Cendrars est un grand homme, grand &eacute;crivain, et un ami incomparable. Avec chaque phrase il me touche profond&eacute;ment. Ce n&rsquo;est pas un &ecirc;tre humain c&rsquo;est un titan. Que le Dieu b&eacute;nisse et prot&egrave;ge&nbsp;!</p> <p style="text-align: justify;">(et de penser qu&rsquo;ici aux E.U. en pleine guerre on l&rsquo;a trait&eacute; comme &laquo;&nbsp;un collaborateur&nbsp;&raquo; (sic&nbsp;!).)</p> <p style="text-align: justify;">Je viens d&rsquo;achever la lecture de <em>La Main coup&eacute;e</em>. Je vais lui &eacute;crire encore une fois. Et merci pour les &nbsp;que je viens de recevoir. Envoyez-moi s.v.p. une centaine de feuilles (pour les deux livres &ndash; <em>L&rsquo;Homme foudroy&eacute;</em> et <em>La Main coup&eacute;e</em> &ndash; que vous ins&eacute;rez dans les bouquins. C&rsquo;est pour mes amis et &eacute;diteurs am&eacute;ricains).</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">&Agrave; l&rsquo;automne de l&rsquo;ann&eacute;e suivante, Miller continue d&rsquo;assurer la promotion des derni&egrave;res publications&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Mon cher Guy Tosi,</p> <p style="text-align: justify;">Un petit mot pour vous dire que j&rsquo;aurai le MS. (Pr&eacute;face) du livre de Mme Ross dans vos mains avant le 15 mai&nbsp;<a href="#_ftn29" name="_ftnref29">[29]</a>.</p> <p style="text-align: justify;">Je n&rsquo;ai pas encore re&ccedil;u les (6) derniers exemples [sic] de <em>L&rsquo;Homme foudroy&eacute;</em> que j&rsquo;ai demand&eacute; il y a bien des semaines. [<em>dans la marge, au crayon, il est indiqu&eacute;&nbsp;:</em> envoy&eacute; une 2<sup>&egrave;me</sup> fois il y a quelques jours].</p> <p style="text-align: justify;">Voulez-vous faire encore une commission pour moi&nbsp;? Envoyez une exemplaire, je vous en prie, &agrave; Mr Robert Finkelstein &ndash; 4875 n.Magnolia St. &ndash; Chicago (40) Illinois de &laquo;&nbsp;Blaise Cendrars&nbsp;&raquo; par J.H. L&eacute;vesque (&Eacute;d. de la Nouvelle Revue Critique &ndash; 17 rue de S&egrave;vres, Paris) et mettez les frais sur mon compte, oui&nbsp;?</p> <p style="text-align: justify;">Je plante des arbres, des arbres, des arbres maintenant &ndash; et lutte contre la brousse et le &laquo;&nbsp;poison oak&nbsp;&raquo;.</p> <p style="text-align: justify;">Pas de nouvelles de Monsieur Laleure. J&rsquo;esp&egrave;re qu&rsquo;il n&rsquo;est pas facheux contre moi&nbsp;!</p> <p style="text-align: justify;">Bien cordialement</p> <p style="text-align: justify;">Henry Miller&nbsp;<a href="#_ftn30" name="_ftnref30">[30]</a> .</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;"><em>&nbsp;<a class="fancybox image" href="#_ftn"><img alt="Maurice Poccachard_Doc 6_The Stranger-A Novel of the Big Sur" class="alignnone size-medium wp-image-2180" height="300" loading="lazy" sizes="(max-width: 189px) 100vw, 189px" src="https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Doc-6_The-Stranger-A-Novel-of-the-Big-Sur-189x300.jpg" srcset="https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Doc-6_The-Stranger-A-Novel-of-the-Big-Sur-189x300.jpg 189w, https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Doc-6_The-Stranger-A-Novel-of-the-Big-Sur.jpg 243w" width="189" /></a></em></p> <p style="text-align: justify;"><small>Doc. 6 ‒&nbsp;<em>The Stranger&nbsp;: A Novel of the Big Sur (1942) </em>traduit par Fran&ccedil;ois Villi&eacute;, avec une pr&eacute;face d&rsquo;Henry Miller, &eacute;dit&eacute; par Deno&euml;l en 1948.</small></p> <p style="text-align: justify;">Probablement inform&eacute; par Guy Tosi des projets de Jean Voilier, qui s&rsquo;appr&ecirc;te &agrave; publier sous le titre <em>Blaise Cendrars</em> l&rsquo;essai d&rsquo;Henry Miller dont nous avons parl&eacute; manifestement sans l&rsquo;en avoir averti, ce dernier s&rsquo;adresse &agrave; elle &agrave; plusieurs reprises pour soutenir son &laquo;&nbsp;obsession&nbsp;&raquo; cendrarsienne&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Dear Madame Voilier,</p> <p style="text-align: justify;">Cendrars writes me to my great surprise, that you are bringing on my chapter on him &ldquo;dans un petit volume&rdquo;. I look forward to seeing it eagerly.</p> <p style="text-align: justify;">I think I now have a title for this book about books, from which the Cendrars piece is taken &ndash; <em>The Quick and the Dead</em>&nbsp;<a href="#_ftn31" name="_ftnref31">[31]</a>.</p> <p style="text-align: justify;">New Directions (James Laughlin) will bring it out next spring, I understand.</p> <p style="text-align: justify;">Incidentally, I make reference to Cendrars a number of times in this book. He pops up like an obsession&nbsp;!</p> <p style="text-align: justify;">Cordial greetings&nbsp;!</p> <p style="text-align: justify;">And best to Monsieur Tosi too&nbsp;!</p> <p style="text-align: justify;">Henry Miller&nbsp;<a href="#_ftn32" name="_ftnref32">[32]</a></p> </blockquote> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Dear Madame Voilier,</p> <p style="text-align: justify;">I learned just a day or two from Monsieur Tosi that you are putting out my chapter on Cendrars, together with &ndash; according to the newspaper &ndash; &ldquo;un hommage&rdquo; de sa part, which, if true, sound fascinating to me. If you had only let me know I would have sent you a better photo, of the same studio, than the one Cendrars gave you. (I got it much later, or I would have sent it to Cendrars originally).</p> <p style="text-align: justify;">However, the main purpose in writing you to-day is to tell you about the enclosed pages, which represent the last chapter of Volume one of <em>The Quick and the Dead</em>. They are meant for Cendrars, and I would have sent them to him direct except for the fact that the last message I had from him was that he had buckled down to work again &ndash; and I did not wish to disturb him. So I send them to you, trusting that one day when there is a let up, when you meet him for lunch or for an aperitif, you will hand them to him. The part I think he will be most interested in, is from page 29 on. In the opening pages of the book I mentioned his name, and as you see, I close with it. Proof that I am constantly thinking of him, constantly rendering him my homage. In these pages there are passages, once again, about &ldquo;The Tailor Shop&rdquo;, which I know Cendrars enjoys reading about.</p> <p style="text-align: justify;">I do not know whether this chapter is a good one but I do know I worked on it considerably&nbsp;; there was so much material and I had to be so condensed that I am not sure if I carried it off successfully. The title, in English, of one of Nerval&rsquo;s books &ndash; <em>Dream and Life</em> &ndash; has always stuck in my head. I mention it once, without quotes. But what I have been thinking all the time I have been working on this book about books is &ndash; &ldquo;Books and Life&rdquo;. And the last pages of the enclosed end on &ndash; <em>Life</em>. Another reason why I wanted Cendrars to read it.</p> <p style="text-align: justify;">I might, of course, have waited until this book came out, but more and more lately I live in the thought that none of us know when the end may come. Please anyway, be sure to tell him, when you do hand him the pages, that he is not to bother to give me his impressions of reactions &ndash; I merely want him to read them. It is a little souvenir of &ldquo;little ole&rsquo;Manhattan&rdquo; which he, of all Frenchmen, can appreciate best.</p> <p style="text-align: justify;">&hellip;</p> <p style="text-align: justify;">Valentin, our little girl, was five yesterday. She had a wonderful party, despite the fact that it has been raining cats and dogs here for a whole week steady&nbsp;! My wife Lepska sends you warm greetings, as do I.</p> <p style="text-align: justify;">Cordially yours</p> <p style="text-align: justify;">Henry Miller&nbsp;<a href="#_ftn33" name="_ftnref33">[33]</a></p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Dans une lettre de fin de l&rsquo;ann&eacute;e 1950 (que nous n&rsquo;avons pas, mais &agrave; laquelle Miller faisait allusion dans sa lettre &agrave; Mme Voilier), Guy Tosi demandait &agrave; Henry Miller de lui donner des ouvrages que Deno&euml;l pourrait publier. Henry Miller s&rsquo;est visiblement ex&eacute;cut&eacute; et r&eacute;agit quelques mois plus tard, dans une lettre manuscrite envoy&eacute;e de Big Sur dat&eacute;e du 1<sup>er</sup> mai 1951&minus; plut&ocirc;t juin en fait, si la lettre du 9 mai porteuse du refus date de 1951 :</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Cher ami Guy Tosi,</p> <p style="text-align: justify;">Bien re&ccedil;ue, votre lettre du 9 mai &agrave; propos du refus de mes deux ouvrages. M. Laughlin mon &eacute;diteur, vous &eacute;crira &agrave; tr&egrave;s bient&ocirc;t, sans doute de vous demander de donner ces deux livres &agrave; Raymond Queneau chez Gallimard.</p> <p style="text-align: justify;">Je commence &agrave; croire que le grand public fran&ccedil;ais ne s&rsquo;int&eacute;resse qu&rsquo;aux livres sensationnels de ma main&nbsp;<a href="#_ftn34" name="_ftnref34">[34]</a>. Dommage&nbsp;! En tout cas la guerre III d&eacute;truira tout en peu de temps. Ceux qui survivront la catastrophe demanderont des auteurs (s&rsquo;il y aura des livres&nbsp;!) bien diff&eacute;rents que nous vivants.</p> <p style="text-align: justify;">Quant &agrave; l&rsquo;article sur Cendrars, vous avez bien raison. Coupez tous les noms que vous voudrez. Je serai bien content d&rsquo;avoir <em>une</em> pour moi-m&ecirc;me.</p> <p style="text-align: justify;">&laquo;&nbsp;Ma main amie&nbsp;&raquo;</p> <p style="text-align: justify;">Henry Miller</p> <p style="text-align: justify;">PS &ndash; L&rsquo;aquarelle viendra&nbsp;! Faut pas se d&eacute;sesp&eacute;rer&nbsp;!</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">L&rsquo;ann&eacute;e suivante se confirme une certaine amertume &agrave; l&rsquo;&eacute;gard de la politique &eacute;ditoriale des &eacute;ditions Deno&euml;l&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Big Sur &ndash; 2/20/52</p> <p style="text-align: justify;">Cher ami Guy Tosi,</p> <p style="text-align: justify;">Merci pour l&rsquo;envoi des livres et votre message <em>Tropiques</em> &ndash; Cendrars &ndash; myst&egrave;re.<br /> &Agrave; propos des livres &agrave; faire &ndash; je vous ai donn&eacute; 3 ou 4 chances, mais rien ne vous a plu. Que faire&nbsp;? Il y aurait 5 ou 6 nouvelles traductions faites &agrave; Paris maintenant. Vous ‒ ou Madame Voilier &ndash; &ecirc;tes difficile &agrave; plaire.</p> <p style="text-align: justify;">Je suis toujours ami, comme vous le savez</p> <p style="text-align: justify;">Bien &agrave; vous</p> <p style="text-align: justify;">Henry Miller</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;"><em>Tropic of Cancer </em>publi&eacute; en 1934 &agrave; Paris par Obelisk Press, traduit en fran&ccedil;ais par Henri Fluch&egrave;re, &eacute;tait sorti chez Deno&euml;l en 1945. Le livre, qui avait fait scandale, ne sera autoris&eacute; aux &Eacute;tats-Unis qu&rsquo;en 1964 et sa version fran&ccedil;aise reste bloqu&eacute;e aux fronti&egrave;res. Henry Miller dans une lettre manuscrite &agrave; Guy Tosi dat&eacute;e du 6 juin 1952 semble r&eacute;sign&eacute;&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Cher ami,</p> <p style="text-align: justify;">Pri&egrave;re de m&rsquo;exp&eacute;dier 6 exemplaires de <em>Cendrars vous parle</em>&nbsp;et 3 de <em>Les Fain&eacute;ants</em> par Cossery.</p> <p style="text-align: justify;">Les <em>Cancer</em> &eacute;taient saisis par la douane am&eacute;ricaine. On ne peut rien contre cela. Dommage&nbsp;!</p> <p style="text-align: justify;">Ce dernier de Cendrars est &eacute;patant. Tachez encore une fois de trouver un &eacute;diteur am&eacute;ricain (ou anglais) pour cela.</p> <p style="text-align: justify;">Amiti&eacute;s</p> <p style="text-align: justify;">Henry Miller</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">&laquo;&nbsp;Le dernier&nbsp;&raquo; de Cendrars, d&eacute;signe les entretiens avec Manoll qui viennent d&rsquo;&ecirc;tre publi&eacute;s en avril 1952 par Deno&euml;l sous le titre <em>Blaise Cendrars vous parle&hellip;</em>&nbsp;; Henry Miller esp&egrave;re une traduction aux &Eacute;tats-Unis, et revient &agrave; la charge dans une carte postale du 2 juillet 1952, pour assurer la promotion, plus optimiste pour les livres de son ami que pour les siens&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Cher ami,</p> <p style="text-align: justify;">Est-ce que vous pouvez m&rsquo;envoyer un paquet de petites annonces (vient de para&icirc;tre) du livre de Cendrars &ndash; <em>Cendrars vous parle&hellip;</em>&nbsp;&ndash;&nbsp;?</p> <p style="text-align: justify;">Cette fois-ci, il me semble que nous devrions trouver un &eacute;diteur am&eacute;ricain. Ce livre-ci est plein de dynamite, m&ecirc;me pour les &eacute;trangers et ignorants.</p> <p style="text-align: justify;">Henry Miller</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">&Agrave; ce jour, aucune traduction n&rsquo;a encore &eacute;t&eacute; faite en Angleterre de ce livre d&rsquo;entretiens. En revanche, <em>The Paris Review </em>en a publi&eacute; des extraits dans le n&deg;37 de la revue en 1966 et dans le livre &laquo;&nbsp;Writers at Work&nbsp;&raquo;, &eacute;dit&eacute; par The Paris Review Publishers en 1967. Il faudra attendre 2016 pour voir une traduction int&eacute;grale chez Ekstasis Publishers au Canada sous la plume de David J. MacKinnon.</p> <p style="text-align: justify;"><a class="fancybox image" href="#_ftn"><img alt="Maurice Poccachard_Doc 7_Blaise Cendrars Speaks-2016" class="alignnone size-medium wp-image-2181" height="300" loading="lazy" sizes="(max-width: 194px) 100vw, 194px" src="https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Doc-7_Blaise-Cendrars-Speaks-2016-194x300.jpg" srcset="https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Doc-7_Blaise-Cendrars-Speaks-2016-194x300.jpg 194w, https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Doc-7_Blaise-Cendrars-Speaks-2016.jpg 324w" width="194" /></a></p> <p><small>Doc. 7 ‒&nbsp; Premi&egrave;re traduction int&eacute;grale en anglais de <em>Blaise Cendrars vous parle</em>, chez Ekstasis Publishers au Canada, 2016.</small></p> <p style="text-align: justify;">La relation posthume d&rsquo;Henry Miller avec Cendrars ne s&rsquo;ach&egrave;ve qu&rsquo;&agrave; son d&eacute;c&egrave;s en Californie le 7 juin 1980. Le dossier de Guy Tosi se cl&ocirc;t sur la derni&egrave;re carte postale re&ccedil;ue de lui le 28 novembre 1979 repr&eacute;sentant un tableau d&rsquo;Henry Miller et Cendrars reste au c&oelig;ur de leur relation&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Cher Guy Tosi,</p> <p style="text-align: justify;">Excusez-moi si je ne r&eacute;ponds pas gentiment &agrave; votre bonne lettre. Ma sant&eacute; n&rsquo;est pas bonne, ni mes yeux, et je n&rsquo;est pas d&rsquo;&eacute;nergie de vous &eacute;crire d&eacute;cemment. Cendrars est toujours avec moi&nbsp;!</p> <p style="text-align: justify;">Henry Miller</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;"><a class="fancybox image" href="#_ftn"><img alt="Maurice Poccachard_Doc 8a_ Henry Miller à Guy Tosi, dernière carte postale (28 novembre 1979)" class="alignnone size-medium wp-image-2179" height="212" loading="lazy" sizes="(max-width: 300px) 100vw, 300px" src="https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Doc-8a_-Henry-Miller-à-Guy-Tosi-dernière-carte-postale-28-novembre-1979-300x212.jpg" srcset="https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Doc-8a_-Henry-Miller-à-Guy-Tosi-dernière-carte-postale-28-novembre-1979-300x212.jpg 300w, https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Doc-8a_-Henry-Miller-à-Guy-Tosi-dernière-carte-postale-28-novembre-1979.jpg 693w" width="300" /></a> <a class="fancybox image" href="#_ftn"><img alt="Maurice Poccachard_Doc 8b_ Henry Miller à Guy Tosi, dernière carte postale (28 novembre 1979)" class="alignnone size-medium wp-image-2178" height="300" loading="lazy" sizes="(max-width: 212px) 100vw, 212px" src="https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Doc-8b_-Henry-Miller-à-Guy-Tosi-dernière-carte-postale-28-novembre-1979-212x300.jpg" srcset="https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Doc-8b_-Henry-Miller-à-Guy-Tosi-dernière-carte-postale-28-novembre-1979-212x300.jpg 212w, https://komodo21.fr/wp-content/uploads/2018/11/Maurice-Poccachard_Doc-8b_-Henry-Miller-à-Guy-Tosi-dernière-carte-postale-28-novembre-1979.jpg 372w" width="212" /></a></p> <p><small>Doc. 8 ‒ Henry Miller &agrave; Guy Tosi, derni&egrave;re carte postale (28 novembre 1979)&hellip;</small></p> <h2 style="text-align: justify;"><strong>Notes</strong><br /> &nbsp;</h2> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref1" name="_ftn1">[1]</a> Ce livre de Lucien Rebatet, publi&eacute; en 1942, auxquels s&rsquo;ajoutent les textes de C&eacute;line &ndash; roman et pamphlets, explique la mise sous tutelle de la Maison Deno&euml;l, mais surtout le fait que la moiti&eacute; des parts sociales de la maison appartiennent &agrave; un &eacute;diteur allemand, ce qui fait d&rsquo;elle un &laquo;&nbsp;bien ennemi&nbsp;&raquo;. Les &Eacute;ditions Deno&euml;l sont mises sous s&eacute;questre par l&rsquo;administration des Domaines le 19 ao&ucirc;t 1944 et le 30 ao&ucirc;t Robert Deno&euml;l est officiellement suspendu de ses fonctions. Maximilien Vox est nomm&eacute; administrateur provisoire en octobre 1944.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref2" name="_ftn2">[2]</a> Le lecteur aura reconnu Jacques-Henry L&eacute;vesque (voir dans ce num&eacute;ro l&rsquo;article de Marie-Paule Berranger sur les lettres de Blaise Cendrars &agrave; Jacques-Henry L&eacute;vesque).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref3" name="_ftn3">[3]</a> La correspondance avec L&eacute;vesque &eacute;claire non seulement le travail de rassemblement des recueils et po&egrave;mes mais aussi leur chronologie, les circonstances de leur &eacute;criture et surtout le plan initialement pr&eacute;vu de certains recueils (<em>Au c&oelig;ur du monde, Feuilles de route)</em>&nbsp;; elle constitue une sorte de journal de bord de la pr&eacute;paration de l&rsquo;&eacute;dition des Po&eacute;sies et montre le d&eacute;saccord sur le titre du volume entre l&rsquo;auteur et son &eacute;diteur.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref4" name="_ftn4">[4]</a> Voir Claude Leroy, pr&eacute;sentation du recueil dans &nbsp;<em>&OElig;uvres romanesques pr&eacute;c&eacute;d&eacute;es des Po&eacute;sies compl&egrave;tes</em>, sous la direction de Claude Leroy avec la collaboration de Marie-Paule Berranger, Myriam Boucharenc, Christine Le Quellec-Cottier, Jean-Carlo Fl&uuml;ckiger, Michelle Touret, Paris, Gallimard, &laquo;&nbsp;Biblioth&egrave;que de la Pl&eacute;iade&nbsp;&raquo;, 2017, p. 1185-1188.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref5" name="_ftn5">[5]</a> La ma&icirc;tresse de Deno&euml;l Jean Voilier, pseudonyme de Jeanne Loviton (1903-1996), assume les responsabilit&eacute;s directoriales lorsque Robert Deno&euml;l est &laquo;&nbsp;d&eacute;pos&eacute;&nbsp;&raquo; en attendant son proc&egrave;s &agrave; la Lib&eacute;ration. &Agrave; Raymone, le 6 d&eacute;cembre, Cendrars &eacute;crit avec affection&nbsp;: &laquo; Pauvre Deno&euml;l, tu sais, il a &eacute;t&eacute; tr&egrave;s chic avec moi. Il venait de m&rsquo;&eacute;crire il y a deux jours. Sa mort est bien suspecte. &raquo; Cet &eacute;pisode toujours obscur a fait l&rsquo;objet d&rsquo;un ouvrage d&rsquo;Anne Louise Staman,<em> With the Stroke of a Pen</em>, Thomas Dunne Books, St Martin Press, New York, 2002, traduit avec certaines suppressions sous le titre <em>Assassinat d&rsquo;un &eacute;diteur &agrave; la Lib&eacute;ration. Robert Deno&euml;l (1902-1945)</em>, trad. Jean-Fran&ccedil;ois Delorme, Paris,&nbsp; E-dite, 2005.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref6" name="_ftn6">[6]</a> Voir plus loin les &eacute;changes Miller-Tosi.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref7" name="_ftn7">[7]</a> &laquo;&nbsp;Tribute to Blaise Cendrars&nbsp;&raquo; parut pour la premi&egrave;re fois &agrave; Shangai en 1938 puis fut repris dans <em>The</em> <em>Wisdom of the Heart</em>, en 1941 et 1946. Jay Bochner a donn&eacute; le d&eacute;tail de cette reprise de contact dans l&rsquo;&eacute;dition de la correspondance Blaise Cendrars-Henry Miller, p. 54, note 1, qui montre bien ce r&ocirc;le de pivot que joue l&rsquo;&eacute;diteur Guy Tosi entre les deux &eacute;crivains&nbsp;et donne &agrave; lire cet hommage dans sa version fran&ccedil;aise en annexe (voir <em>Blaise Cendrars-Henry Miller, 1934-1959. &laquo;&nbsp;Je travaille &agrave; pic pour descendre en profondeur&nbsp;&raquo;</em>, &eacute;dition &eacute;tablie, &eacute;tablie, pr&eacute;sent&eacute;e et annot&eacute;e par Jay Bochner, Gen&egrave;ve, Zo&eacute;, 2013, p.&nbsp;54 et p. 289-298).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref8" name="_ftn8">[8]</a> Cette partie de la lettre figure dans les notes de l&rsquo;&eacute;dition de Jay Bochner, <em>op. cit. </em>p. 54.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref9" name="_ftn9">[9]</a> Une carte postale d&rsquo;Aix portant le cachet du 3 janvier 1948 annonce fi&egrave;rement &agrave; Jacques-Henry L&eacute;vesque la nouvelle &laquo;&nbsp;J&rsquo;ai remis aujourd&rsquo;hui <em>Bourlinguer</em> &agrave; son &eacute;diteur. Un Ms de plus de 400 pages. Ouf&nbsp;!&nbsp;&raquo; (&eacute;d. cit. p.&nbsp;275).</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref10" name="_ftn10">[10]</a> &laquo;&nbsp;Cher Monsieur et ami,/Je viens de passer deux heures &agrave; lire <em>Bourlinguer</em>, et pour gagner du temps, je le donne &agrave; la fabrication aujourd&rsquo;hui m&ecirc;me. Je le lirai plus attentivement sur &eacute;preuves. [&hellip;] / Ce que j&rsquo;en ai lu m&rsquo;a presque toujours passionn&eacute; et j&rsquo;ai retrouv&eacute; derri&egrave;re chaque mot, derri&egrave;re chaque phrase, l&rsquo;&eacute;cho de votre voix. Vos d&eacute;dicaces sont excellentes. [&hellip;]/ Je fais &eacute;tablir votre contrat. Il vous sera envoy&eacute; dans quelques jours./ En h&acirc;te, mais tr&egrave;s cordialement v&ocirc;tre./Guy Tosi.&nbsp;&raquo;</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref11" name="_ftn11">[11]</a> On trouvera des pi&egrave;ces de cette correspondance &agrave; fleurets mouchet&eacute;s dans&nbsp;Claude Leroy et Jean-Carlo Fl&uuml;ckiger (dir.),&nbsp;<em>Le Boulingueur des deux rives</em>, Armand Colin, 1995.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref12" name="_ftn12">[12]</a> Ces strat&eacute;gies &eacute;ditoriales de lancement on fait l&rsquo;objet d&rsquo;une communication au colloque <em>Marketing et strat&eacute;gies &eacute;ditoriales </em>organis&eacute; &agrave; l&rsquo;Imec &agrave; Caen par Brigitte Diaz et Julie Anselmini les 26-27-28 avril 2018 (Marie-Paule Berranger, &laquo;&nbsp;Les strat&eacute;gies &eacute;ditoriales de Blaise Cendrars&nbsp;:&nbsp;&ldquo;Parlez de mes livres&rdquo;&nbsp;&raquo;).</p> <p><a href="#_ftnref13" name="_ftn13">[13]</a>&nbsp;Transcription de la lettre de Blaise Cendrars &agrave; Guy Tosi&nbsp;du samedi 20 mars 1948 :</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Mon cher ami Tosi,</p> <p style="text-align: justify;">Je re&ccedil;ois &agrave; l&rsquo;instant votre lettre du 19.</p> <p style="text-align: justify;">Je ne vois pas tr&egrave;s bien en quoi la pr&eacute;sence physique de l&rsquo;auteur peut faire monter la vente d&rsquo;un livre de 50%, mais comme vous parlez d&rsquo;une baisse &eacute;ventuelle de 50% sur la vente, cela m&rsquo;&eacute;pouvante, ne tenant pas &agrave; vous faire le moindre tort. Si donc vous ne voyez pas d&rsquo;autre moyen de publicit&eacute; et de lancement, comme je ne suis pas ent&ecirc;t&eacute;, je suis pr&ecirc;t &agrave; venir &agrave; Paris, mais &agrave; vous d&rsquo;organiser la chose de fa&ccedil;on que mon s&eacute;jour &agrave; Paris ne d&eacute;passe pas 48 heures (trois jours au grand maximum) et que durant ce court laps de temps je satisfasse &agrave; tous vos d&eacute;sirs. Mais je vous supplie, r&eacute;duisez les corv&eacute;es au strict minimum&nbsp;! [&hellip;] inutile n&rsquo;est-ce pas de me d&eacute;ranger si le livre n&rsquo;est pas encore en vente. &Agrave; vous &agrave; fixer la date &ndash; et de me donner le d&eacute;tail des corv&eacute;es auxquelles vous allez m&rsquo;astreindre.</p> <p style="text-align: justify;">Le service de presse&nbsp;? &ndash; bon je le ferai.</p> <p style="text-align: justify;">Un cocktail&nbsp;? &ndash; bon, j&rsquo;y serai, mais je demande la permission d&rsquo;y inviter les amis que je n&rsquo;aurai pas le temps d&rsquo;aller voir et avec qui je me brouillerais si je ne leur faisais signe lors de mon passage &agrave; Paris. Ce sont de vilains jaloux. [&hellip;]</p> <p style="text-align: justify;">La radio&nbsp;? &ndash; cela m&rsquo;emb&ecirc;te. Et vous pouvez faire quelque chose &agrave; la radio sans ma participation. Mais si vous croyez que cela est indispensable, on peut improviser quelque chose avec Paul Gilson qui est un ami personnel et que j&rsquo;inviterai d&rsquo;ici.</p> <p style="text-align: justify;">Mais ce qui me fait le plus rechigner, c&rsquo;est une s&eacute;ance chez un libraire. Je vous prie de m&rsquo;en dispenser. C&rsquo;est toc et je n&rsquo;ai jamais encore sign&eacute; mes exemplaires en public et au public comme un chimpanz&eacute; qui saurait tenir une plume.</p> <p style="text-align: justify;">Ne m&rsquo;en demandez pas plus s.v.p.</p> <p style="text-align: justify;">Envoyez-moi copie de l&rsquo;article de Barjavel. Merci.</p> <p style="text-align: justify;">Et merci de la pr&eacute;face de John Dos Passos que vous m&rsquo;annoncez. Je n&rsquo;en ai pas gard&eacute; souvenir. C&rsquo;est &laquo;&nbsp;L&rsquo;Hom&egrave;re du Transsib&eacute;rien&nbsp;&raquo;, un chapitre de <em>L&rsquo;Orient Express</em>&nbsp;de John Dos Passos qui compte et qu&rsquo;il faudrait traduire et republier.</p> <p style="text-align: justify;">[&hellip;]</p> <p style="text-align: justify;">&Agrave; bient&ocirc;t donc et je me r&eacute;jouis de rencontrer enfin Mme Voilier. Dites-le-lui.</p> <p style="text-align: justify;">V&ocirc;tre</p> <p style="text-align: justify;">Blaise Cendrars.</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref14" name="_ftn14">[14]</a> Correspondance avec Jacques-Henry L&eacute;vesque, &eacute;d. cit. p. 566.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref15" name="_ftn15">[15]</a> Le ch&acirc;teau de Jeanne Loviton se trouve dans le Lot pr&egrave;s de Figeac.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref16" name="_ftn16">[16]</a> Il s&rsquo;agit de <em>La Volga na&icirc;t en Europe </em>de Malaparte.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref17" name="_ftn17">[17]</a> Le peintre Orfeo Tamburi (1910-1994), ami de Curzio Malaparte, s&rsquo;est install&eacute; &agrave; Paris en 1947. On conna&icirc;t de lui plusieurs portraits de Cendrars.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref18" name="_ftn18">[18]</a> Il s&rsquo;agit de l&rsquo;essai de Louis Parrot compl&eacute;t&eacute; de l&rsquo;anthologie et de la bibliographie pr&eacute;par&eacute;es par Jacques-Henry L&eacute;vesque dans la collection &laquo;&nbsp;Po&egrave;tes d&rsquo;aujourd&rsquo;hui&nbsp;&raquo;.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref19" name="_ftn19">[19]</a> Cendrars avait pr&eacute;par&eacute; avec soin la republication des deux volumes de <em>Dan Yack </em>en un seul pour Les &Eacute;ditions de La Tour, anciennement Nouvelles &Eacute;ditions Fran&ccedil;aises, qui avaient peu apr&egrave;s fait faillite&nbsp;&ndash;&nbsp;elles appartenaient &agrave; Robert Deno&euml;l, via des pr&ecirc;te-noms puisqu&rsquo;il ne pouvait plus exercer avant que son proc&egrave;s n&rsquo;ait lieu.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref20" name="_ftn20">[20]</a> <em>Le Bourlingueur des deux rives, </em>&eacute;d. cit., p. 300.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref21" name="_ftn21">[21]</a> Abr&eacute;viation de t&eacute;l&eacute;gramme en un temps o&ugrave; la t&eacute;l&eacute;vision n&rsquo;a pas encore de petit nom familier.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref22" name="_ftn22">[22]</a> Lettre du 26 mai 1955 adress&eacute;e de Florence par Guy Tosi &agrave; Blaise Cendrars, rue Jean Dolent.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref23" name="_ftn23">[23]</a> Seuls des extraits ont &eacute;t&eacute; donn&eacute;s dans <em>Capo dei quattro venti</em> traduction et choix de Claudio Savonuzzi, Milan, Il Saggiatore, &laquo;&nbsp;Biblioteca delle Silerche&nbsp;&raquo;, 1962.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref24" name="_ftn24">[24]</a> Allusion probable &agrave; l&rsquo;agonie de Malaparte, atteint d&rsquo;un cancer, qui meurt le 8 juin 1957, apr&egrave;s avoir obtenu son adh&eacute;sion au Parti communiste et s&rsquo;&ecirc;tre peu de temps apr&egrave;s converti au catholicisme en abjurant certains de ses &eacute;crits.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref25" name="_ftn25">[25]</a> Ce texte, apr&egrave;s les &eacute;changes qu&rsquo;on a vus plus haut entre Blaise et Guy Tosi, en 1948 sera enfin traduit chez Deno&euml;l&nbsp;; Jean Voilier en publie une &eacute;dition de luxe en 1951&nbsp;: <em>Blaise Cendrars</em>, d&rsquo;Henry Miller, sort sous une couverture illustr&eacute;e d&rsquo;une lithographie abstraite d&rsquo;Orfeo Tamburi, assortie en frontispice d&rsquo;un portrait de Cendrars par Albert Ri&eacute;ra&nbsp;; la traduction est de Fran&ccedil;ois Villi&eacute;.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref26" name="_ftn26">[26]</a> Blaise Cendrars, Henry Miller, <em>Correspondance 1934-1979 : 45 ans d&rsquo;amiti&eacute;</em> ; &eacute;tablie et pr&eacute;sent&eacute;e par Miriam Cendrars ; introd. de Fr&eacute;d&eacute;ric Jacques Temple ; notes de Jay Bochner, Paris, Deno&euml;l, 1995.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref27" name="_ftn27">[27]</a> Blaise Cendrars, Henry Miller,<em> Correspondance 1934 &ndash; 1959, &laquo; Je travaille &agrave; pic pour descendre en profondeur &raquo;,</em> texte établi, annoté et présenté par Jay Bochner, avec la collaboration de Christine Le Quellec Cottier ; traduction des lettres de Henry Miller par Miriam Cendrars, Gen&egrave;ve, &eacute;ditions Zo&eacute;, &laquo;&nbsp;Cendrars en toutes lettres&nbsp;&raquo;, 2013.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref28" name="_ftn28">[28]</a> Lettre manuscrite en fran&ccedil;ais &agrave; l&rsquo;encre verte d&rsquo;Henry Miller &agrave; Guy Tosi, dat&eacute;e du 7 ao&ucirc;t 1947, Big Sur, California.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref29" name="_ftn29">[29]</a> Lillian Bos Ross, <em>The Stranger&nbsp;: A Novel of the Big Sur </em>[1942], Deno&euml;l, 1948.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref30" name="_ftn30">[30]</a> Lettre manuscrite d&rsquo;Henry Miller &agrave; Guy Tosi, dat&eacute;e de Big Sur, 4 novembre 1948.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref31" name="_ftn31">[31]</a> Mort ou vif. Nous ne connaissons aucun livre d&rsquo;Henry Miller correspondant &agrave; ce titre, mais nous pensons qu&rsquo;il s&rsquo;agit du livre <em>Les livres de ma vie</em> qui sera publi&eacute; par Gallimard en 1957.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref32" name="_ftn32">[32]</a> Lettre manuscrite du 15 novembre 1950, adress&eacute;e &agrave; Madame Voilier.</p> <p style="text-align: justify;"><a href="#_ftnref33" name="_ftn33">[33]</a> Lettre &agrave; Madame Voilier dat&eacute;e November 20 th, 1950, Big Sur, California.</p> <h3 style="text-align: justify;"><span id="Auteur">Auteur</span></h3> <p style="text-align: justify;"><strong>Maurice Poccachard</strong>, parall&egrave;lement &agrave; une vie professionnelle remplie de chiffres, a &eacute;t&eacute; un lecteur passionn&eacute; et un collectionneur des &oelig;uvres de Blaise Cendrars. Tr&eacute;sorier et pr&eacute;sident de l&rsquo;Association des &eacute;tudes internationales Blaise Cendrars, il a r&eacute;guli&egrave;rement nourri les rubriques publications, manifestations, films, expositions, des revues et sites cendrarsiens et, grand voyageur lui-m&ecirc;me,&nbsp; achevait, lors de sa disparition le 5 septembre 2018, un ouvrage richement document&eacute; rep&eacute;rant les traductions de Blaise Cendrars partout dans le monde qui devrait para&icirc;tre prochainement.</p> <h3><strong>Copyright</strong></h3> <p>Tous droits r&eacute;serv&eacute;s.</p> </div>