<p>Un aspect de la réforme des « grands entretiens » de France Culture en 1975 a consisté à donner le plus souvent possible à des écrivains le rôle de l’intervieweur. Après Michel Chaillou, Georges Perec, Édouard Maunick ou Jean Daive interrogeant Michel Deguy, Claude Ollier, Maurice Nadeau, Aimé Césaire ou Georges Perros, voici Michel Butor tendant le micro à Camille Bryen, dans une série en cinq parties de vingt à vingt-cinq minutes diffusée sur France Culture du lundi 5 avril au vendredi 9 avril 1976, entre 22h35 et 23h. Coutumier depuis longtemps des exercices d’explication de ses œuvres dans les médias, l’expérimentateur-né des formes de la littérature et des arts ne pouvait qu’être ravi de se mettre dans la peau du « barbier », comme disait Jean Amrouche. Comment s’y prend-il, qu’en fait-il et que fait-il des figures imposées et des routines du rôle, c’est ce que l’article examine. Il commence par des remarques sur la genèse et la composition de la série. Il continue en décrivant comment Butor, amateur de <em>conversation</em> plus que d’<em>entretien</em>, inscrit dans la sonorité de leurs échanges, où l’oreille est saisie par la voix de l’un et le rire de l’autre, l’égalité entre interlocuteurs voulue par la logique amicale de la conversation. Il montre ensuite comment l’écrivain, tout en acceptant de poser des questions, s’amuse en même temps de quelques clichés du rôle, dans un passage de l’émission 3 qui tourne au pastiche. Une dernière partie s’intéresse au choix de Bryen comme interlocuteur et au projet de faire à deux, de leurs entretiens, une sorte de <em>livre sonore</em>.</p>