<p>Mon entrée à la radio, comment y penser aujourd’hui, mettre des mots, lesquels ? Je sors d’un tunnel de dix-huit années où je travaille comme rédacteur pour le <em>Dictionnaire des œuvres </em>de Laffont-Bompiani. Je passe mes journées enfermé à la Bibliothèque nationale, à lire tous les livres et mes soirées enfermé chez moi à faire l’analyse et le résumé des ouvrages lus. Immergé dans la concentration et le silence, je vis ma voix comme une sorte de fantôme. La toute première fois où Claude Royet-Journoud me demande de parler de <em>Décimale blanche</em> paru au Mercure de France en 1967 dans son émission de radio, <em>Poésie ininterrompue</em>, je réagis vivement et je dis : <em>non</em>. Comment retrouver la parole, alors que je ne parle plus depuis l’âge de 7 ans ? Grande peur. Nous sommes en mai 1975. Devant son insistance qui met en jeu notre amitié, je me rends au studio quelques semaines plus tard à l’heure dite. Je vis dans un véritable état second l’entretien de quarante minutes qui dans <em>Poésie ininterrompue</em> achève la semaine de lectures de poèmes et, en travaillant avec le réalisateur, je découvre à la fois ma voix et le génie du montage ; comment une voix est enregistrée et comment je peux la modifier et lui faire dire autre chose, sinon parfois le contraire.</p>