<p>&Agrave; partir de la cr&eacute;ation du journal La <em>Presse</em> &agrave; Paris, en 1836, on constate que l&rsquo;&eacute;criture des pages des quotidiens fran&ccedil;ais, que ce soit dans le rez-de-chauss&eacute;e de la premi&egrave;re page, ou dans les rubriques qui incorporent une structure narrative, comme le fait divers, est trait&eacute;e sous le mode de la fictionnalisation. Ce trait, qui trouve son origine dans le journalisme fran&ccedil;ais d&rsquo;opinion, a &eacute;t&eacute; adapt&eacute; par plusieurs presses europ&eacute;ennes, notamment hispaniques ou germaniques, et par les journaux d&rsquo;Am&eacute;rique Latine&nbsp;; il constitue un premier exemple de la mondialisation m&eacute;diatique.</p> <p>Ainsi, les quotidiens br&eacute;siliens des ann&eacute;es 1840 n&rsquo;ont pas tard&eacute; &agrave; int&eacute;grer eux aussi cette caract&eacute;ristique dans leurs pages. Pour avoir une id&eacute;e plus concr&egrave;te de la promptitude de cette assimilation, deux faits concernant le roman-feuilleton sont remarquables. Il s&rsquo;agit, d&rsquo;abord, de la publication de la traduction du roman <em>Le Capitaine Paul</em>, d&rsquo;Alexandre Dumas, au<em> Jornal do Commercio</em>, &agrave; partir d&rsquo;octobre 1838 &ndash; c&rsquo;est-&agrave;-dire quatre mois apr&egrave;s sa parution dans les pages du <em>Si&egrave;cle</em>. Au Br&eacute;sil, ce roman est paru dans la rubrique &laquo;&nbsp;Vari&eacute;t&eacute;&nbsp;&raquo;, qui n&rsquo;&eacute;tait pas encore fix&eacute;e en bas de page. Le deuxi&egrave;me fait marque la parution du premier roman-feuilleton de la presse quotidienne br&eacute;silienne. De janvier &agrave; mars 1839, <em>L&rsquo;anniversaire de Don Miguel en 1828</em><a href="#nbp1" name="liennbp1">1</a>, roman historique de Jo&atilde;o Manuel Pereira da Silva, a &eacute;t&eacute; publi&eacute; au bas de page du Jornal do Commercio.</p> <p>Ces deux constatations montrent que la presse br&eacute;silienne &eacute;tait en phase avec les innovations et les transformations de la matrice m&eacute;diatique fran&ccedil;aise. Ce mod&egrave;le a surtout &eacute;t&eacute; import&eacute; gr&acirc;ce &agrave; la pr&eacute;sence des &eacute;diteurs et libraires fran&ccedil;ais &agrave; la cour br&eacute;silienne &agrave; partir des ann&eacute;es 1820. &Agrave; cet &eacute;gard deux exemples sont remarquables&nbsp;: Pierre Plancher, imprimeur, libraire et cr&eacute;ateur du <em>Jornal do Commercio</em> &ndash; le plus important quotidien de la capitale imp&eacute;riale br&eacute;silienne du XIXe si&egrave;cle &ndash; est arriv&eacute; &agrave; Rio de Janeiro en 1824. Junius Villeneuve, le futur propri&eacute;taire du <em>Jornal</em> &agrave; partir de 1832, a d&eacute;but&eacute; son m&eacute;tier de directeur de r&eacute;daction du quotidien en 1830 sous la direction g&eacute;n&eacute;rale de Plancher<a href="#nbp2" name="liennbp2">2</a>.</p> <p>Dans ce contexte de modernisation de la presse br&eacute;silienne, nous retrouvons la &laquo;&nbsp;Semaine Lyrique&nbsp;&raquo;. Compos&eacute;e de cinquante-deux articles, cette s&eacute;rie &eacute;crite par le dramaturge Martins Pena consiste en un ensemble de critiques dramatiques hebdomadaires parues dans la case feuilleton du <em>Jornal do Commercio</em>. Entre le 8 septembre 1846 et le 6 octobre 1847, ces articles offrent toutes les semaines<a href="#nbp3" name="liennbp3">3</a> l&rsquo;actualit&eacute; du th&eacute;&acirc;tre lyrique italien et fran&ccedil;ais de Rio de Janeiro, dont les compagnies se sont install&eacute;es, respectivement, au Th&eacute;&acirc;tre de S&atilde;o Pedro de Alc&acirc;ntara et au Th&eacute;&acirc;tre de S&atilde;o Francisco.</p> <p>En tant que revue des spectacles lyriques li&eacute;e &agrave; un grand quotidien, la &laquo;&nbsp;Semaine Lyrique &raquo; pr&eacute;sente un panorama des grands op&eacute;ras italiens, des op&eacute;ras-comiques et des vaudevilles donn&eacute;s dans les deux principaux th&eacute;&acirc;tres de la ville, avec la description des soir&eacute;es et l&rsquo;appr&eacute;ciation de ces spectacles, de leurs r&eacute;p&eacute;titions &agrave; leurs mises en sc&egrave;ne. En effet, lorsqu&rsquo;on consid&egrave;re cet ensemble d&rsquo;articles plus attentivement, on voit qu&rsquo;ils constituent plus qu&rsquo;une simple revue d&rsquo;actualit&eacute; pour les amateurs d&rsquo;op&eacute;ra. Ces feuilletons composent d&rsquo;importantes critiques d&rsquo;art du spectacle, essentiellement fond&eacute;es sur des concepts artistiques pr&eacute;cis et proposant des r&eacute;flexions sur ce qui est pr&eacute;sent&eacute; et sur l&rsquo;id&eacute;al esth&eacute;tique des spectacles. Il s&rsquo;agit donc d&rsquo;observations pragmatiques, de conseils techniques et d&rsquo;art dramatique adress&eacute;s aux artistes et aux directions des th&eacute;&acirc;tres.</p> <p>Outre le propos critique et la tournure nationaliste intrins&egrave;ques &agrave; la plume de Martins Pena, la &laquo; Semaine Lyrique&nbsp;&raquo; est le premier ensemble de critiques consacr&eacute;es exclusivement &agrave; la sc&egrave;ne lyrique de la capitale parues en s&eacute;rie dans le bas de page d&rsquo;un grand quotidien de Rio de Janeiro et du Br&eacute;sil, avant m&ecirc;me que les chroniques de vari&eacute;t&eacute;s ne soient fix&eacute;es dans la case feuilleton<a href="#nbp4" name="liennbp4">4</a>. Ainsi ces feuilletons apparaissent-ils comme un espace public m&eacute;diatis&eacute; o&ugrave; sont comment&eacute;s les postures et positionnements des directions des th&eacute;&acirc;tres, le comportement des spectateurs et les impressions sur l&rsquo;interpr&eacute;tation des acteurs et des musiciens pendant la pr&eacute;paration et les soir&eacute;es de spectacle. C&rsquo;est donc dans le traitement de ces aspects et de ces cibles que ressortaient les id&eacute;es et les principes esth&eacute;tiques de Pena sur les arts du spectacle, comme une conscience artistique consacr&eacute;e &agrave; l&rsquo;essor de la sc&egrave;ne dramatique et lyrique de la jeune nation br&eacute;silienne.</p> <p>Les feuilletons dramatiques de Martins Pena constituent non seulement un exemple effectif de l&rsquo;assimilation du feuilleton fran&ccedil;ais de l&rsquo;&egrave;re m&eacute;diatique &ndash; sur lequel s&rsquo;&eacute;rige &laquo;&nbsp;l&rsquo;&eacute;difice du journal<a href="#nbp5" name="liennbp5">5</a>&raquo; &ndash;, mais encore elles t&eacute;moignent de la r&eacute;ussite de l&rsquo;adaptation de l&rsquo;&laquo;&nbsp;ironie journalistique&nbsp;&raquo; du bas de page fran&ccedil;ais dans la case feuilleton br&eacute;silienne, bien avant l&rsquo;apparition sur la sc&egrave;ne litt&eacute;raire des chroniqueurs br&eacute;siliens les plus connus et &eacute;tudi&eacute;s, comme Jos&eacute; de Alencar et Machado de Assis, dans les ann&eacute;es 1850-1860. En effet, la s&eacute;rie sur le th&eacute;&acirc;tre lyrique de Pena fait partie des textes inscrits dans les nouveaux paradigmes d&rsquo;&eacute;criture journalistique et de production capitaliste de la presse, &eacute;tablis par la r&eacute;volution m&eacute;diatique lanc&eacute;e par &Eacute;mile de Girardin. C&rsquo;est ainsi que la &laquo;&nbsp;Semaine Lyrique&nbsp;&raquo; est construite &agrave; partir du transfert et de l&rsquo;acclimatation du style, de l&rsquo;&eacute;criture ironique et fictionalis&eacute;e des plus c&eacute;l&egrave;bres chroniqueurs fran&ccedil;ais, que Martins Pena connaissait par ses lectures de la presse &eacute;trang&egrave;re.</p> <p>&Agrave; partir de ce panorama, nous allons analyser le fonctionnement d&rsquo;une des manifestations de la fictionnalisation dans la &laquo;&nbsp;Semaine Lyrique&nbsp;&raquo;. Notre hypoth&egrave;se g&eacute;n&eacute;rale est que la fictionnalisation traverse l&rsquo;&eacute;criture de Martins Pena comme un proc&eacute;d&eacute; de litt&eacute;rarisation, par le biais de m&eacute;taphores, de comparaisons, de cr&eacute;ations de personnages et d&rsquo;espaces fictionalis&eacute;s qui configurent une strat&eacute;gie critique et ironique s&rsquo;amplifiant au fur et &agrave; mesure de la s&eacute;rie.</p> <h2>1.<strong> Un exemple de fictionnalisation dans la &laquo; Semaine Lyrique&nbsp;&raquo;&nbsp;: le courrier de &laquo;&nbsp;l&rsquo;&acirc;me de Manuel Lu&iacute;s&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;<em>La Bienveillance C&eacute;leste</em>&nbsp;&raquo;</strong></h2> <p><em>A priori</em>, le feuilleton est la section du journal ouverte au discours d&eacute;sinvolte et d&eacute;sengag&eacute; de port&eacute;e litt&eacute;raire, dont la nature et la structure narrative permettent une &eacute;laboration plus fantaisiste et assurent en m&ecirc;me temps une fa&ccedil;on plus s&eacute;duisante et interactive d&rsquo;aborder le r&eacute;el, voire de le fictionnaliser. Les feuilletons de Martins Pena ne s&rsquo;&eacute;cartent pas de ce paradigme. Bien qu&rsquo;elles abordent un sujet factuel &ndash; les spectacles lyriques &ndash;, ces critiques th&eacute;&acirc;trales ont &eacute;t&eacute; con&ccedil;ues pour occuper l&rsquo;espace du quotidien destin&eacute; au divertissement&nbsp;; sa nature permet entre autres la libert&eacute; du discours, de la forme et de l&rsquo;&eacute;criture. En incorporant cette d&eacute;sinvolture du bas de page &agrave; sa plume, le feuilletoniste br&eacute;silien cr&eacute;ait une po&eacute;tique fond&eacute;e sur les d&eacute;tours, sur l&rsquo;exp&eacute;rience du langage, sur la tournure m&eacute;taphorique et sur l&rsquo;ambigu&iuml;t&eacute; et, par cons&eacute;quent, ouverte &agrave; la fictionnalisation. Si la voie oblique et inventive caract&eacute;rise le style de Pena et si l&rsquo;habilet&eacute; cr&eacute;ative d&rsquo;&eacute;laborer l&rsquo;actualit&eacute; th&eacute;&acirc;trale en lui conf&eacute;rant un statut fictionnel configure sa po&eacute;tique, son &eacute;criture est, quant &agrave; elle, l&eacute;gitim&eacute;e par la fa&ccedil;on dont la fictionnalisation se manifeste dans ses critiques, notamment sous la forme d&rsquo;une strat&eacute;gie critique d&eacute;clench&eacute;e par la progression de l&rsquo;ironie au fur et &agrave; mesure de la s&eacute;rie.</p> <p>Ces traits, caract&eacute;ristiques de la chronique fran&ccedil;aise du XIXe si&egrave;cle, sont, en effet, li&eacute;s &agrave; la forme et au support de la rubrique, selon la formule &eacute;labor&eacute;e au moment de la r&eacute;volution m&eacute;diatique en France, &agrave; partir de 1836, notamment par Th&eacute;ophile Gautier et Delphine de Girardin<a href="#nbp6" name="liennbp6">6</a>. Ces aspects constitutifs du bas de page ont ainsi &eacute;t&eacute; import&eacute;s, assimil&eacute;s et adapt&eacute;s dans l&rsquo;&eacute;criture de Pena, observateur attentif de la soci&eacute;t&eacute; contemporaine et dramaturge de veine ironiste.</p> <p>En effet Pena construit une po&eacute;tique particuli&egrave;re qui devient autonome, puisque elle s&rsquo;aff&ucirc;te au fur et &agrave; mesure que le feuilletoniste centre son regard sur le contexte de production du th&eacute;&acirc;tre lyrique au Br&eacute;sil, en discutant non seulement des partitions et des livrets d&rsquo;op&eacute;ras pr&eacute;sent&eacute;s &agrave; Rio de Janeiro, mais aussi des conditions professionnelles et structurelles des th&eacute;&acirc;tres d&rsquo;op&eacute;ra de la capitale imp&eacute;riale. Au niveau de l&rsquo;&eacute;criture, cette progression est traduite par l&rsquo;utilisation de proc&eacute;d&eacute;s ironiques qui se fondent de plus en plus sur la fiction. Cette strat&eacute;gie stylistique montre donc que Martins Pena emprunte et adapte, &agrave; son gr&eacute;, deux traits essentiels du mod&egrave;le fran&ccedil;ais : l&rsquo;effet de litt&eacute;rarisation des feuilletons dramatiques et l&rsquo;ironie journalistique.</p> <p>Une forme de manifestation de ces aspects est donn&eacute;e par la fictionnalisation dans la po&eacute;tique de la &laquo;&nbsp;Semaine Lyrique&nbsp;&raquo;. Parmi les modulations de l&rsquo;&eacute;criture du feuilletoniste fond&eacute;es sur la fiction, nous retrouvons la cr&eacute;ation de personnages qui circulent entre les espaces r&eacute;el et fictionnel et avec lesquels Pena interagit. Cette strat&eacute;gie intervient &agrave; un moment difficile travers&eacute; par le th&eacute;&acirc;tre italien. Environ trois mois avant la fin de la s&eacute;rie, ce th&eacute;&acirc;tre a subi une crise en raison d&rsquo;une direction artistique et financi&egrave;re d&eacute;plorable. D&rsquo;un c&ocirc;t&eacute;, le public ne se contentait plus des spectacles repris&nbsp;; de l&rsquo;autre, les chanteurs et les musiciens entamaient une gr&egrave;ve &agrave; cause des salaires. Apr&egrave;s avoir observ&eacute; plusieurs fois dans sa critique que la &laquo;&nbsp;dose monstrueuse de ce que le langage technique appelle le mauvais sort<a href="#nbp7" name="liennbp7">7</a> &raquo; mena&ccedil;ait la production de la troupe, Pena a d&eacute;clench&eacute;, dans les num&eacute;ros suivants du feuilleton, une sorte d&rsquo;histoire parall&egrave;le. Cette cr&eacute;ation fictionnelle, n&eacute;e de la th&eacute;matique et de la continuit&eacute; du propre feuilleton, allait pr&eacute;cis&eacute;ment remettre en question les soucis du th&eacute;&acirc;tre d&rsquo;une fa&ccedil;on surprenante&nbsp;: il recr&eacute;ait des personnages r&eacute;els et des espaces qui s&rsquo;&eacute;loignaient de la r&eacute;alit&eacute; concr&egrave;te et visible. Cependant, la narration se d&eacute;veloppait par le biais d&rsquo;une interaction directe avec le feuilletoniste, g&eacute;n&eacute;ralement par le biais de courriers, et s&rsquo;&eacute;tendait strat&eacute;giquement dans trois feuilletons&nbsp;: les num&eacute;ros 38, 43 et 52, ce dernier cl&ocirc;turant la s&eacute;rie<a href="#nbp8" name="liennbp8">8</a>.</p> <p>Gr&acirc;ce &agrave; une critique oblique et rus&eacute;e du d&eacute;clin du th&eacute;&acirc;tre italien &agrave; Rio de Janeiro, le feuilletoniste donnait vie et voix &agrave; des personnalit&eacute;s r&eacute;elles qui allaient devenir des personnages fictionnalis&eacute;s, comme Manuel Lu&iacute;s, Vincenzo Bellini, Moli&egrave;re et Antonio Jos&eacute;<a href="#nbp9" name="liennbp9">9</a>, ou encore des figures religieuses, comme S&atilde;o Pedro (Saint Pierre), et S&atilde;o Francisco (Saint Fran&ccedil;ois). Il a m&ecirc;me donn&eacute; vie &agrave; une figure &eacute;sot&eacute;rique, (l&rsquo;) <em>Anjo da Harmonia</em> (l&rsquo;Ange de l&rsquo;Harmonie), incorpor&eacute; en tant que personnage employ&eacute; au gr&eacute; du discours du chroniqueur, comme manifestation de son reproche vis-&agrave;-vis du manque de professionnalisme et de sp&eacute;cialisation du cercle d&rsquo;artistes et du personnel du th&eacute;&acirc;tre lyrique de Rio.</p> <p>Parmi les personnages qui hantent cette historiette, Manuel Lu&iacute;s Ferreira est le protagoniste principal. D&rsquo;origine portugaise, il est probablement arriv&eacute; au Br&eacute;sil dans les ann&eacute;es 1760 <a href="#nbp10" name="liennbp10" title="Sa biographie signale qu’avant de réussir comme acteur au Brésil, Manuel Luís avait déjà travaillé comme barbier, comme danseur et comme musicien mais ne précise pas l’année exacte de son arrivée à Rio de Janeiro. Voir Galante de Sousa, O teatro no Brasil, vol. 2, Rio de Janeiro, INL, 1960, pp. 234-235, et Ayres Andrade, Francisco Manuel e seu tempo, vol. 1, Rio de Janeiro, Tempo Brasileiro, 1967, pp. 61-69.">10</a>. Son nom est notable dans l&rsquo;histoire du th&eacute;&acirc;tre et de l&rsquo;op&eacute;ra au Br&eacute;sil, car il fut le directeur et l&rsquo;entrepreneur du plus important th&eacute;&acirc;tre (dramatique et lyrique) de la fin du XVIIIe si&egrave;cle &agrave; Rio de Janeiro, parall&egrave;lement &agrave; son activit&eacute; d&rsquo;acteur. Par ses efforts personnels et artistiques, il a inaugur&eacute;, aux alentours de 1776, le th&eacute;&acirc;tre le plus moderne de la ville, l&rsquo;<em>Opera Nova</em> (Nouvel Op&eacute;ra), une salle de spectacles vivants appel&eacute;e Teatro R&eacute;gio (Th&eacute;&acirc;tre Royal) &agrave; partir de 1808, lorsque le prince Jean VI de Portugal s&rsquo;est install&eacute; au Br&eacute;sil. Malgr&eacute; un engagement dans l&rsquo;art du spectacle et une habilet&eacute; dans les caricatures dont t&eacute;moignent ses biographies, les historiens de la sc&egrave;ne br&eacute;silienne sont unanimes sur le fait que son th&eacute;&acirc;tre &eacute;tait absolument d&eacute;pourvu de m&eacute;thode, de technique et de vraisemblance. Manuel Lu&iacute;s a appris son m&eacute;tier par passion, gr&acirc;ce &agrave; une pratique quotidienne et selon ce que l&rsquo;environnement lui avait accord&eacute;, &agrave; savoir l&rsquo;absence de cours dramatique et aucun moyen financier pour investir dans la sc&egrave;ne.</p> <p>&Agrave; l&rsquo;&eacute;poque de Martins Pena, Manuel Lu&iacute;s ne repr&eacute;sentait qu&rsquo;un th&eacute;&acirc;tre d&eacute;mod&eacute; et amateur, symbole d&rsquo;une sc&egrave;ne ridicule et d&eacute;cadente. C&rsquo;est cette image de Manuel Lu&iacute;s que Pena s&rsquo;est appropri&eacute;e. Il a transpos&eacute; ce regard obsol&egrave;te et cette voix c&eacute;l&egrave;bre pour montrer par antith&egrave;se la fa&ccedil;on de faire p&eacute;rim&eacute;e de l&rsquo;art lyrique au th&eacute;&acirc;tre de S&atilde;o Pedro. Le proc&eacute;d&eacute; absurde et loufoque qui consiste &agrave; &eacute;voquer ce personnage, ses opinions et ses id&eacute;es comme un mod&egrave;le de l&rsquo;art du spectacle est une critique oblique qui cr&eacute;e l&rsquo;humour. En effet, ce personnage est repr&eacute;sent&eacute; dans la &laquo;&nbsp;Semaine Lyrique&nbsp;&raquo; sous la forme de &laquo;&nbsp;l&rsquo;&acirc;me de Manuel Lu&iacute;s&nbsp;&raquo; qui &eacute;crit des lettres au feuilletoniste. Concernant leur &laquo;&nbsp;premier contact&nbsp;&raquo;, &eacute;tabli au cours d&rsquo;une soir&eacute;e de reprise du <em>Barbier de S&eacute;ville</em> au th&eacute;&acirc;tre italien, le chroniqueur t&eacute;moigne&nbsp;:</p> <p><q>&nbsp;Nous ne dirions rien de l&rsquo;espi&egrave;gle Rosina et de ses gentils compagnons si, en arrivant &agrave; la maison, nous n&rsquo;avions pas trouv&eacute; sur la table une lettre nous &eacute;tant adress&eacute;e qui disait&nbsp;: </q></p> <p><q>&nbsp;&quot;Mon cher Feuilletoniste, </q></p> <p><q>&nbsp;Gloire &agrave; Dieu au plus haut des cieux et paix aux hommes sur la terre. </q></p> <p><q>&nbsp;Je suis une pauvre &acirc;me qui jouit de la b&eacute;atitude l&agrave;-haut, dans un petit coin du ciel. Pendant quelque temps, j&rsquo;ai souffert le purgatoire pour racheter mes p&eacute;ch&eacute;s&nbsp;; mais l&rsquo;in&eacute;puisable mis&eacute;ricorde divine s&rsquo;est finalement apitoy&eacute;e sur moi [&hellip;] Ce fut un extraordinaire acte de justice, car celui qui a tant souffert sur terre m&eacute;rite bien le ciel, et quelle souffrance&nbsp;! Si je la racontais, elle serait aussi &eacute;ternelle que l&rsquo;&eacute;ternit&eacute;. Il suffit de dire que j&rsquo;ai dirig&eacute; un th&eacute;&acirc;tre et que j&rsquo;ai d&ucirc; supporter tous ces gens qui chantent, qui parlent, qui dansent, qui sautent, qui peignent, qui injurient, qui intriguent [&hellip;]. S&rsquo;il y a une place bien m&eacute;rit&eacute;e au ciel, et pour la d&eacute;duction des p&eacute;ch&eacute;s, c&rsquo;est certainement la mienne&nbsp;; que la volont&eacute; de Dieu soit faite<em><a href="#nbp11" name="liennbp11">11</a></em>.&quot; </q></p> <p>Il va sans dire que le d&eacute;but sarcastique de ce premier contact d&eacute;valorise pour les bons lecteurs la qualit&eacute; de cette &laquo;&nbsp;&acirc;me&nbsp;&raquo; dans la &laquo;&nbsp;Semaine Lyrique&nbsp;&raquo;, et met en valeur la posture critique consciente et intransigeante du feuilletoniste envers le th&eacute;&acirc;tre de l&rsquo;&eacute;poque et son histoire. En ce qui concerne l&rsquo;ironie en tant que proc&eacute;d&eacute;, on notera qu&rsquo;elle repose principalement sur le fait de donner voix &agrave; un &ecirc;tre depuis longtemps d&eacute;c&eacute;d&eacute;&nbsp;&ndash; et pourtant devenu immortel. L&rsquo;effet humoristique d&rsquo;une telle strat&eacute;gie rh&eacute;torique amuse et entretient le lecteur &ndash; habitut&eacute; aux r&eacute;cits fictionnels de la case feuilleton &ndash; en m&ecirc;me temps qu&rsquo;il sert au propos caustique du chroniqueur. Ce proc&eacute;d&eacute; est alors d&eacute;ploy&eacute; dans les arrangements du r&eacute;cit de &laquo;&nbsp;l&rsquo;&acirc;me de Manuel Lu&iacute;s&nbsp;&raquo;, par exemple avec la remarque sur sa carri&egrave;re et sur ses apports au th&eacute;&acirc;tre, lorsqu&rsquo;il parle de son m&eacute;tier, ou encore avec son point de vue ou ses railleries sur le sujet. De surcro&icirc;t, les louanges et les hyperboles &eacute;parpill&eacute;es dans toute la &laquo;&nbsp;lettre&nbsp;&raquo; ajoutent une allure comique, voire sarcastique, &agrave; la pr&eacute;sentation de la &laquo; pauvre &acirc;me&nbsp;&raquo; qui continue ainsi&nbsp;:</p> <p><q>Quand j&rsquo;&eacute;tais vivant, il y a quelques lustres, j&rsquo;animais un corps appel&eacute; Manuel Lu&iacute;s. Je crois que quelques-uns se souviennent encore de cet homme et de ses bons services. Quel talent&nbsp;! Quel g&eacute;nie&nbsp;! Quelles ressources l&rsquo;entouraient&nbsp;! Quelle belle administration du th&eacute;&acirc;tre&nbsp;!&hellip; Mais comme tout ce qui est bon a une fin, Manuel Lu&iacute;s s&rsquo;est &eacute;teint, et moi, sa petite &acirc;me, j&rsquo;ai abandonn&eacute; son corps [&hellip;]. S&rsquo;il m&rsquo;avait &eacute;t&eacute; permis, [&hellip;]. j&rsquo;aurais demand&eacute;, indign&eacute;&nbsp;: Qu&rsquo;a-t-on fait des restes de Manuel Lu&iacute;s&nbsp;? [&hellip;]. Quelles colonnes ont &eacute;t&eacute; &eacute;rig&eacute;es &agrave; sa m&eacute;moire<a href="#nbp12" name="liennbp12">12</a> ?</q></p> <p>Par suite, Manuel Lu&iacute;s raconte au feuilletoniste ses inqui&eacute;tudes sur le th&eacute;&acirc;tre italien, suscit&eacute;es par la lecture du <em>Jornal do Commercio</em>, &laquo;&nbsp;gliss&eacute; sous la porte du ciel<a href="#nbp13" name="liennbp13">13</a> &raquo;. Il se demande alors&nbsp;: &laquo;&nbsp;Les hommes auront-ils continu&eacute; l&rsquo;&oelig;uvre de mon g&eacute;nie&nbsp;? Mes lumineux principes seront-ils suivis comme ils le m&eacute;ritent<a href="#nbp14" name="liennbp14">14</a> ?&nbsp;&raquo; Soucieux de le savoir, il convainc S&atilde;o Pedro de &laquo;&nbsp;lui ouvrir les portes du ciel&nbsp;&raquo;.</p> <p><q>Sans plus tarder, je me suis mis en route, j&rsquo;ai travers&eacute; les airs comme une fl&egrave;che et je suis arriv&eacute; &agrave; l&rsquo;All&eacute;e du Rocio en cinq minutes. Sept heures sonnaient &agrave; je ne sais quelle tour&nbsp;; je me suis faufil&eacute; par la porte du hall et ai lu l&rsquo;annonce qui disait&nbsp;: <em>Il Barbiere di Seviglia</em>, je suis entr&eacute; par la porte du premier rang du parterre et je me suis assis sur la bo&icirc;te du r&eacute;gisseur<a href="#nbp15" name="liennbp15">15</a>.</q></p> <p>Ainsi, le feuilletoniste incorpore &agrave; son discours la revue que Manuel Lu&iacute;s fait dans sa lettre de sa soir&eacute;e au th&eacute;&acirc;tre italien, comme s&rsquo;il s&rsquo;agissait de la transcription du courrier re&ccedil;u, mais celui-ci fonctionne comme le compte rendu critique du spectacle. En d&rsquo;autres termes, Martins Pena se sert de la voix du personnage posthume pour donner son appr&eacute;ciation sur le spectacle, en l&rsquo;occurrence, un avis contraire &agrave; celui exprim&eacute; par l&rsquo;ex-directeur.</p> <p>N&eacute;anmoins, le feuilletoniste semble dissimuler sa propre ironie critique lorsque le narrateur du feuilleton s&rsquo;explique avant de transcrire la lettre&nbsp;: &laquo;&nbsp;Mardi nous avons d&ucirc; choisir le <em>Barbier de S&eacute;ville</em>, au Th&eacute;&acirc;tre de S. Pedro, ou<em> Les Diamants de la Couronne</em>, au Th&eacute;&acirc;tre de S. Francisco&nbsp;: en toute conscience, nous avons opt&eacute; pour ce dernier op&eacute;ra<a href="#nbp16" name="liennbp16">16</a>.&nbsp;&raquo; Cette derni&egrave;re information est un signe du discours double de l&rsquo;auteur qui souligne la transition entre l&rsquo;espace r&eacute;el et l&rsquo;imaginaire, puisqu&rsquo;il est &eacute;vident que Pena est all&eacute; au th&eacute;&acirc;tre italien et non au th&eacute;&acirc;tre fran&ccedil;ais, sur lequel il n&rsquo;&eacute;crit pas une seule ligne. Toutefois, ce signe est presque effac&eacute; par le style s&eacute;duisant du feuilletoniste, qui conduit le lecteur entre les actualit&eacute;s tangibles et les &eacute;v&eacute;nements imagin&eacute;s de fa&ccedil;on tellement naturelle et d&eacute;contract&eacute;e qu&rsquo;il invalide toutes les tensions du d&eacute;calage entre la r&eacute;alit&eacute; et la fantaisie.</p> <p>Dans les r&eacute;cits fantastiques des lettres de Manuel Lu&iacute;s apparaissent deux personnages all&eacute;goriques. Il s&rsquo;agit des figures religieuses et dogmatiques de S&atilde;o Pedro (Saint Pierre) et de S&atilde;o Francisco (Saint Fran&ccedil;ois)&nbsp;; le premier d&eacute;tient &laquo;&nbsp;la cl&eacute; du ciel&nbsp;&raquo; et le second garde sa splendeur &laquo;&nbsp;bienveillante&nbsp;&raquo;. &Eacute;videmment, ce n&rsquo;est pas par hasard si ces noms ont &eacute;t&eacute; choisis parmi les saints catholiques. Ce sont aussi les deux principaux th&eacute;&acirc;tres de la capitale imp&eacute;riale, le th&eacute;&acirc;tre de S&atilde;o Pedro de Alcantara&nbsp;&ndash; le si&egrave;ge de la Compagnie Lyrique Italienne depuis 1844<a href="#nbp17" name="liennbp17">17</a> &ndash;, et le th&eacute;&acirc;tre de S&atilde;o Francisco&nbsp;&ndash; la sc&egrave;ne de la Compagnie Lyrique Fran&ccedil;aise d&egrave;s 1846. Le &laquo;&nbsp;Prince des Ap&ocirc;tres&nbsp;&raquo;, surnom par lequel Manuel Lu&iacute;s appelle S&atilde;o Pedro, appara&icirc;t d&egrave;s la premi&egrave;re lettre et S&atilde;o Francisco, &laquo;&nbsp;le Patriarche&nbsp;&raquo;, participe au r&eacute;cit de la troisi&egrave;me lettre. Dans ce dernier courrier, &laquo;&nbsp;l&rsquo;&acirc;me&nbsp;&raquo; de l&rsquo;ex-directeur t&eacute;moigne&nbsp;: &laquo;&nbsp;Je travaillais avec amour et diligence [&hellip;] lorsqu&rsquo;en levant la t&ecirc;te [&hellip;] j&rsquo;ai vu devant moi les v&eacute;n&eacute;rables figures de Saint Pierre et de Saint Fran&ccedil;ois qui me regardaient attrist&eacute;es<a href="#nbp18" name="liennbp18">18</a>. &raquo;</p> <p>Outre les anges et les bons esprits qui hantent la demeure &eacute;ternelle de &laquo;&nbsp;l&rsquo;&acirc;me de Manuel Lu&iacute;s&nbsp;&raquo;, le ciel abrite un autre personnage essentiel &agrave; cette aventure fabuleuse&nbsp;: l&rsquo;esprit de Vincenzo Bellini, le c&eacute;l&egrave;bre compositeur italien<a href="#nbp19" name="liennbp19">19</a>, qui se manifeste comme le compagnon des aventures m&eacute;lodramatiques de &laquo;&nbsp;l&rsquo;&acirc;me de Manuel Lu&iacute;s&nbsp;&raquo;.Le musicien appara&icirc;t dans la deuxi&egrave;me lettre de Manuel Lu&iacute;s adress&eacute;e au feuilletoniste, envoy&eacute;e environ un mois apr&egrave;s la premi&egrave;re. Dans cette lettre, le<em> maestro</em> explique qu&rsquo;il arbitre un pari &eacute;tabli entre Manuel Lu&iacute;s et S&atilde;o Pedro. Au d&eacute;but du r&eacute;cit, &laquo;&nbsp;l&rsquo;&acirc;me&nbsp;&raquo; de l&rsquo;ex-directeur fait conna&icirc;tre &agrave; son interlocuteur les nouvelles du ciel et la discussion qui a provoqu&eacute; son deuxi&egrave;me voyage au th&eacute;&acirc;tre italien&nbsp;:</p> <p><q>[&hellip;] Je discutais avec Moli&egrave;re et Antonio Jos&eacute; [&hellip;] lorsque j&rsquo;ai aper&ccedil;u de tr&egrave;s loin Saint Pierre qui embrassait le <em>maestro</em> Bellini avec exaltation et enthousiasme. J&rsquo;ai tout de suite remarqu&eacute; que le cas &eacute;tait important, car Saint Pierre a toujours &eacute;t&eacute; quelqu&rsquo;un de tr&egrave;s s&eacute;rieux [&hellip;]. Le Prince des Ap&ocirc;tres m&rsquo;a interrompu&nbsp;en s&rsquo;exclamant&nbsp;: [&hellip;]. Vous ne voyez pas que je suis content parce que l&rsquo;on pr&eacute;sente ce soir dans mon th&eacute;&acirc;tre la grande <em>Norma</em>, un op&eacute;ra de ce<em> maestro</em>&nbsp;? &ndash;&nbsp;Oui, mon op&eacute;ra ch&eacute;ri, a ajout&eacute; ce dernier&nbsp;; un enfant de mon inspiration et de mon enthousiasme<a href="#nbp20" name="liennbp20">20</a>.</q></p> <p>La conversation entre Manuel Lu&iacute;s et S&atilde;o Pedro continue &agrave; propos des op&eacute;ras qui pourraient sauvegarder et garantir la morale et les caisses du th&eacute;&acirc;tre, comme la <em>Norma</em> et <em>I Capuleti e I Montecchi</em>, une autre &oelig;uvre remarquable du compositeur italien<a href="#nbp21" name="liennbp21">21</a>. &Agrave; ce moment, le prince des ap&ocirc;tres se tourne vers le<em> maestro</em> qui &laquo;&nbsp;s&rsquo;&eacute;tait absorb&eacute; dans la composition d&rsquo;un air pour son nouvel op&eacute;ra&nbsp;&ndash; <em>La</em> <em>Bienveillance C&eacute;leste&nbsp;</em>&ndash; et ne lui a pas pr&ecirc;t&eacute; attention<a href="#nbp22" name="liennbp22">22</a> &raquo;. Conform&eacute;ment &agrave; ce que Saint Pierre avait annonc&eacute;, ce soir-l&agrave;, la <em>Norma</em> &eacute;tait pr&eacute;sent&eacute;e au th&eacute;&acirc;tre de S&atilde;o Pedro et Manuel Lu&iacute;s cherchait une bonne raison pour y aller, afin de vivre une nouvelle aventure &laquo;&nbsp;en traversant les airs&nbsp;&raquo; du ciel vers le plateau du th&eacute;&acirc;tre italien. &Agrave; cet &eacute;gard, &laquo;&nbsp;l&rsquo;&acirc;me&nbsp;&raquo; de Manuel Lu&iacute;s n&rsquo;a pas h&eacute;sit&eacute; &agrave; forger des commentaires d&eacute;pr&eacute;ciatifs, sans se douter de la r&eacute;action indign&eacute;e de ses interlocuteurs imaginaires&nbsp;:</p> <p><q>La <em>Norma</em> est nulle. Nulle ! ont hurl&eacute; l&rsquo;Ap&ocirc;tre et le <em>Maestro</em>&hellip; tellement nulle&nbsp;! [&hellip;] Non seulement elle est nulle, ai-je r&eacute;torqu&eacute; avec courage, comme je parie qu&rsquo;elle ne remplira pas la moiti&eacute; de la salle. &ndash; J&rsquo;accepte le pari, s&rsquo;est exclam&eacute; Saint Pierre&nbsp;; &ndash;&nbsp;[&hellip;]. Ce qui est dit est dit, ai-je dit ; cependant, il faut que quelqu&rsquo;un v&eacute;rifie le cas&nbsp;; c&rsquo;est pourquoi je propose que le <em>Maestro</em> y aille et, puisque qu&rsquo;il est int&eacute;ress&eacute; et afin qu&rsquo;il ne nous trompe pas, je l&rsquo;accompagnerai<a href="#nbp23" name="liennbp23">23</a>.</q></p> <p>Les voil&agrave; tous deux partis pour prouver la victoire de S&atilde;o Pedro dans le pari. Pourtant, la r&eacute;ussite de la soir&eacute;e n&rsquo;a pas garanti le succ&egrave;s du th&eacute;&acirc;tre dans les spectacles suivants, ce que le feuilletoniste conclut lorsqu&rsquo;il annonce sa derni&egrave;re critique. Ce feuilleton est compos&eacute; de la transcription du dernier courrier de &laquo;&nbsp;l&rsquo;&acirc;me de Manuel Lu&iacute;s&nbsp;&raquo; outre les derniers mots du feuilletoniste sur le paysage lyrique de Rio. C&rsquo;est au cours de ce dernier voyage que Manuel Lu&iacute;s et Bellini rencontrent l&rsquo;Ange de l&rsquo;Harmonie, qui &laquo;&nbsp;partait au ciel &agrave; toute vitesse<a href="#nbp24" name="liennbp24">24</a> &raquo;, au moment de leur arriv&eacute;e au th&eacute;&acirc;tre.</p> <p><q>&ndash; Manuel Lu&iacute;s, m&rsquo;a dit le maestro, voici l&rsquo;Ange de l&rsquo;Harmonie&nbsp;! D&rsquo;o&ugrave; peut-il bien venir&nbsp;?</q></p> <p><q>&ndash; Je ne sais pas&nbsp;; demandez-lui.</q></p> <p><q>&ndash; Je te salue, messager c&eacute;leste, s&rsquo;est exclam&eacute; le maestro, pourquoi t&rsquo;envoles-tu avec autant d&rsquo;empressement&nbsp;?</q></p> <p><q>&ndash; Je m&rsquo;enfuis de la terre, maestro&nbsp; ̶ a r&eacute;pondu l&rsquo;ange ayant reconnu celui qui l&rsquo;interrogeait ou mieux, je m&rsquo;enfuis de Rio de Janeiro o&ugrave; je suis atrocement maltrait&eacute; par la troupe italienne et son digne orchestre. Tout cela est une horreur, maestro&nbsp;; et pour ne pas renier mon essence c&eacute;leste, j&rsquo;ai battu de mes ailes, j&rsquo;ai laiss&eacute; le th&eacute;&acirc;tre lyrique &agrave; l&rsquo;abandon et j&rsquo;ai pris le chemin du ciel. Adieu maestro, et bon voyage<a href="#nbp25" name="liennbp25">25</a>.</q></p> <p>&Agrave; partir de ces brefs exemples, on note que la cr&eacute;ation et l&rsquo;incorporation des personnages sont un proc&eacute;d&eacute; assez efficace pour analyser les spectacles et l&rsquo;organisation du th&eacute;&acirc;tre lyrique. Pendant que la figure de l&rsquo;Ange de l&rsquo;Harmonie garde un effet de l&eacute;gitimit&eacute; de la d&eacute;cadence du th&eacute;&acirc;tre italien, le point de vue de l&rsquo;&nbsp;&laquo;&nbsp;&acirc;me de Manuel Lu&iacute;s&nbsp;&raquo; ressort dans le r&eacute;cit. Le fait de s&rsquo;approprier la voix d&rsquo;une figure cl&eacute; du th&eacute;&acirc;tre br&eacute;silien, comme celle de Manuel Lu&iacute;s Ferreira, installe &agrave; nouveau l&rsquo;ironie, produite par la pr&eacute;sence et par les id&eacute;es p&eacute;rim&eacute;es de l&rsquo;ex-directeur du th&eacute;&acirc;tre <em>Opera Nova</em> (Nouvel Op&eacute;ra). En effet, comme il s&rsquo;agit d&rsquo;un proc&eacute;d&eacute; d&rsquo;&eacute;valuation du th&eacute;&acirc;tre &eacute;tabli par antiphrase, c&rsquo;est-&agrave;-dire par l&rsquo;image contraire de ce que repr&eacute;sente Manuel Lu&iacute;s, la construction narrative assimil&eacute;e et souvent mise en &oelig;uvre par Pena acquiert &agrave; nouveau le caract&egrave;re pittoresque et romanc&eacute; qu&rsquo;on lui conna&icirc;t. Ce dernier exemple vient souligner derechef l&rsquo;astuce et la ma&icirc;trise du feuilletoniste.</p> <p>M&eacute;ticuleux, censeur et railleur, ce sont quelques caract&eacute;ristiques aussi d&rsquo;un des plus grands feuilletonistes dramatiques fran&ccedil;ais&nbsp;: Th&eacute;ophile Gautier. Certainement, il fait partie de la liste des feuilletonistes suivis par Martins Pena dans ses lectures de la presse &eacute;trang&egrave;re. Il nous semble notamment que Martins Pena, comme un bon lecteur (dans le sens large du mot), a d&eacute;couvert le subtil m&eacute;tadiscours du chroniqueur-po&egrave;te. &Eacute;galement, le feuilletoniste br&eacute;silien a bien remarqu&eacute; les proc&eacute;d&eacute;s de &laquo;&nbsp;l&rsquo;ironie journalistique&nbsp;&raquo;, lus dans les entre-lignes de la chronique de Gautier, parues dix ans auparavant de la s&eacute;rie br&eacute;silienne. Dou&eacute; d&rsquo;une &eacute;criture dramaturgique d&eacute;j&agrave; teint&eacute;e d&rsquo;un fin sarcasme, Pena, nous semble-t-il, n&rsquo;a pas seulement int&eacute;gr&eacute; ces aspects retrouv&eacute;s, par exemple, chez Gautier, mais il a aussi compl&egrave;tement r&eacute;ussi &agrave; acclimater le potentiel litt&eacute;raire de saisir la fiction &agrave; partir des proc&eacute;d&eacute;s ironiques. En plus de personnaliser la posture d&rsquo;ironiste dans ses chroniques, Th&eacute;ophile Gautier y entra&icirc;ne aussi la fiction, soit comme une strat&eacute;gie pour d&eacute;ployer sa critique, soit tout simplement comme une strat&eacute;gie pour remplir les colonnes de son feuilleton en s&rsquo;esquivant des spectacles<a href="#nbp26" name="liennbp26">26</a>.</p> <p>Au Br&eacute;sil, Pena a traduit dans le feuilleton une importante partie de l&rsquo;univers culturel de Rio de Janeiro des ann&eacute;es 1840 en se servant d&rsquo;une prose litt&eacute;rairement joyeuse, pleine de sous-entendus et d&rsquo;allusions railleuses. Avant lui, aucun journaliste n&rsquo;avait jamais d&eacute;di&eacute; une s&eacute;rie de chroniques sp&eacute;cialis&eacute;es aux spectacles lyriques. Pena est remarquable par la formule ing&eacute;nieuse dont il se sert pour cr&eacute;er et d&eacute;velopper sa critique, sans pr&eacute;c&eacute;dent au Br&eacute;sil. L&eacute;gitim&eacute;e par son propre m&eacute;tadiscours ainsi que par son processus de cr&eacute;ation, la &laquo;&nbsp;Semaine Lyrique&nbsp;&raquo; est fond&eacute;e sur une po&eacute;tique soigneusement construite gr&acirc;ce &agrave; la fusion des emprunts aux feuilletons fran&ccedil;ais et de la contextualisation du th&eacute;&acirc;tre lyrique au Br&eacute;sil. Outre la conjonction des ces aspects, la s&eacute;rie de Martins Pena retrouve son autonomie et son originalit&eacute; gr&acirc;ce &agrave; l&rsquo;habilet&eacute; rh&eacute;torique et discursive d&rsquo;un &eacute;crivain-dramaturge, mais certainement aussi gr&acirc;ce &agrave; l&rsquo;expertise d&rsquo;un grand lecteur de la soci&eacute;t&eacute; et des pratiques culturelles du Br&eacute;sil et d&rsquo;ailleurs.</p> <p>&nbsp;</p> <hr /> <p><strong>Notes et r&eacute;f&eacute;rences</strong></p> <p><a href="#liennbp1" name="nbp1">1</a> En portugais : <em>O aniversario de D. Miguel em 1828</em>.</p> <p><a href="#liennbp2" name="nbp2">2</a> Laurence Hallewell, <em>O livro no Brasil</em>, S&atilde;o Paulo, EDUSP, 2005, pp. 139-149.</p> <p><a href="#liennbp3" name="nbp3">3 </a>Normalement le mercredi&nbsp;; n&eacute;anmoins, certains mois, les feuilletons n&rsquo;&eacute;taient pas toujours publi&eacute;s le m&ecirc;me jour de la semaine. Nous rappelons que la p&eacute;riodicit&eacute; et la dur&eacute;e&nbsp;&ndash; treize mois successifs&nbsp;&ndash; de parution de ces feuilletons lui conf&egrave;rent le statut de s&eacute;rie, &agrave; la diff&eacute;rence des feuilletons dramatiques parus auparavant, dont la parution est discontinue&nbsp;&ndash; ils varient au gr&eacute; du succ&egrave;s des spectacles ou des actualit&eacute;s des th&eacute;&acirc;tres.</p> <p><a href="#liennbp4" name="nbp4">4</a> Nous rappelons &eacute;galement que la premi&egrave;re s&eacute;rie de vari&eacute;t&eacute;s publi&eacute;e dans l&rsquo;espace du feuilleton n&rsquo;est apparue qu&rsquo;en d&eacute;cembre 1852, avec les chroniques de &laquo;&nbsp;A Semana&nbsp;&raquo; (La Semaine), de Francisco Otaviano.</p> <p><a href="#liennbp5" name="nbp5">5</a> Th&eacute;ophile Gautier, <em>La Presse</em>, 18 juin 1838.</p> <p><a href="#liennbp6" name="nbp6">6</a> Marie-&Egrave;ve Th&eacute;renty, &laquo;&nbsp;La case ironique: Delphine de Girardin et Th&eacute;ophile Gautier feuilletonistes (1836-1848), dans Jo&euml;lle Gardes Tamine, Cristine Marcandier et Vincent Vives [dir&nbsp;.],<em> Ironies: entre dualit&eacute;s et duplicit&eacute;s</em>, Aix-Marseille, Presses de l&rsquo;Universit&eacute; de Provence, coll. &laquo;&nbsp;Textuelles litt&eacute;rature&nbsp;&raquo;, 2007, p. 79.</p> <p><a href="#liennbp7" name="nbp7">7</a><em> Jornal do Com&eacute;rcio</em>, 18 novembre 1846. &laquo;&nbsp;[&hellip;] uma dose monstro disso a que em linguagem t&eacute;cnica se chama quebranto. &raquo;</p> <p><a href="#liennbp8" name="nbp8">8 </a>Il s&rsquo;agit des feuilletons parus le 22 juin, le 28 juillet et le 6 octobre 1847.</p> <p><a href="#liennbp9" name="nbp9">9</a> Plus connu par son surnom, &laquo;&nbsp;O Judeu&nbsp;&raquo; (le Juif) (1705-1739), Antonio Jos&eacute; est le premier dramaturge br&eacute;silien de l&rsquo;histoire du th&eacute;&acirc;tre national.</p> <p><a href="#liennbp10" name="nbp10">10</a> Sa biographie signale qu&rsquo;avant de r&eacute;ussir comme acteur au Br&eacute;sil, Manuel Lu&iacute;s avait d&eacute;j&agrave; travaill&eacute; comme barbier, comme danseur et comme musicien mais ne pr&eacute;cise pas l&rsquo;ann&eacute;e exacte de son arriv&eacute;e &agrave; Rio de Janeiro. Voir Galante de Sousa, <em>O teatro no Brasil</em>, vol. 2, Rio de Janeiro, INL, 1960, pp.&nbsp;234-235, et Ayres Andrade,<em> Francisco Manuel e seu tempo</em>, vol. 1, Rio de Janeiro, Tempo Brasileiro, 1967, pp.&nbsp;61-69.</p> <p><a href="#liennbp11" name="nbp11">11</a> <em>Jornal do Com&eacute;rcio</em>, 22 juin 1847. &laquo;&nbsp;Nada dir&iacute;amos pois da travessa Rosina e de seus am&aacute;veis companheiros, se, ao chegarmos &agrave; casa, n&atilde;o encontr&aacute;ssemos em cima da nossa mesa uma carta a n&oacute;s endere&ccedil;ada, a qual assim se expressava:</p> <p>&laquo;&nbsp;Meu caro Folhetinista, &laquo;&nbsp;Gl&oacute;ria a Deus no c&eacute;u, e paz na terra aos homens.</p> <p>Sou uma pobre alma que goza a bem-aventuran&ccedil;a c&aacute; em um cantinho do c&eacute;u. Por algum tempo penei no purgat&oacute;rio, pagando os meus pecados; mas enfim a inesgot&aacute;vel miseric&oacute;rdia divina condoeu-se de mim, e para junto de si chamou-me. Isto foi um grande ato de justi&ccedil;a, porque bem merecia o c&eacute;u quem tanto sofreu na terra, e que sofrimento! Se os fora contar, seria eterno como a eternidade. Basta dizer que dirigi um teatro, e que tive de aturar a toda essa gente que canta, que fala, que dan&ccedil;a, que pula, que pinta, que descomp&otilde;e, que intriga, [&hellip;]. Se h&aacute; lugar bem merecido no c&eacute;u, e por desconto de pecados, &eacute; certamente o meu; e seja feita a vontade de Deus.&nbsp;&raquo;</p> <p><a href="#liennbp12" name="nbp12">12 </a><em>Ibidem</em>. &laquo;&nbsp;Quando estive no mundo, l&aacute; se v&atilde;o bons pares de anos, animei um corpo chamado Manuel Lu&iacute;s. Creio que ainda algu&eacute;m se recorda desse bom homem e do grande pr&eacute;stimo que tinha. Que talento! que g&ecirc;nio! que recursos lhe assistiam! Como administrava ele um teatro!&hellip; Mas como tudo o que &eacute; bom acaba-se, acabou-se Manuel Lu&iacute;s, e eu, sua querida alminha, abandonei seu corpo [&hellip;]. Se me fosse permitido, [&hellip;] perguntaria indignado: &laquo;&nbsp;O que &eacute; feito dos restos de Manuel Lu&iacute;s? [&hellip;] Que colunas se erigiram &agrave; sua mem&oacute;ria?&nbsp;&raquo;</p> <p><a href="#liennbp13" name="nbp13">13 </a><em>Ibidem.</em> &laquo;&nbsp;[&hellip;] meteram por baixo da porta do c&eacute;u&nbsp;[&hellip;]&nbsp;&raquo;</p> <p><a href="#liennbp14" name="nbp14">14</a><em> Ibidem</em>. &laquo;&nbsp;Ter&atilde;o os homens continuado a obra do meu g&ecirc;nio? Meus luminosos princ&iacute;pios ser&atilde;o seguidos como o merecem ser?&nbsp;&raquo;</p> <p><a href="#liennbp15" name="nbp15">15 </a>&laquo;&nbsp;Sem mais tardar pus-me a caminho, atravessei os ares como uma seta, e em menos de cinco minutos cheguei ao Largo do Rocio; davam sete horas n&atilde;o sei em que torre, enfiei pela porta do sagu&atilde;o, li o an&uacute;ncio que dizia: ─ <em>Il Barbiere di Siviglia</em> ─ , entrei depois pela porta da plateia, e fui sentar-me em cima da caixa do ponto.&nbsp;&raquo;</p> <p><a href="#liennbp16" name="nbp16">16</a><em> Ibidem</em>. &laquo; Na ter&ccedil;a-feira t&iacute;nhamos a escolher, ou <em>o Barberio de Sevilha</em> no Teatro de S. Pedro, ou<em> Les Diamants de la Couronne</em>, no de S. Francisco: demos com muito ju&iacute;zo prefer&ecirc;ncia a esta &uacute;ltima &oacute;pera. &raquo;</p> <p><a href="#liennbp17" name="nbp17">17</a> Nous signalons que Pedro de Alc&acirc;ntara est aussi le pr&eacute;nom du premier Empereur du Br&eacute;sil.</p> <p><a href="#liennbp18" name="nbp18">18</a><em> Jornal do Commercio</em>, 6 octobre 1847. &laquo;&nbsp;Trabalhava com todo o amor e aplica&ccedil;&atilde;o [&hellip;] quando, ao levantar a cabe&ccedil;a [&hellip;], vi diante de mim as vener&aacute;veis figuras de S. Pedro e de S. Francisco que encaravam-me contristados.&nbsp;&raquo;</p> <p><a href="#liennbp19" name="nbp19">19</a> Malgr&eacute; son importante &oelig;uvre m&eacute;lodramatique, Bellini n&rsquo;a v&eacute;cu que 34 ans (1801-1835). Pour le Br&eacute;sil, son chef-d&rsquo;&oelig;uvre a &eacute;t&eacute; la trag&eacute;die <em>Norma</em>, drame lyrique en deux actes et livret de Felice Romani, cr&eacute;&eacute; au th&eacute;&acirc;tre Scala de Milan en 1831. Le succ&egrave;s extraordinaire de la <em>Norma</em> &agrave; Rio de Janeiro &agrave; partir de 1844 n&rsquo;a pas &eacute;chapp&eacute; au regard critique de Martins Pena, qui, en 1845, a &eacute;crit l&rsquo;amusante com&eacute;die <em>O diletante</em>, dont le sujet est la folie d&rsquo;un &laquo;&nbsp;m&eacute;lomaniaque&nbsp;&raquo; de <em>Norma</em>, en reprenant notamment l&rsquo;air <em>Casta Diva</em>.</p> <p><a href="#liennbp20" name="nbp20">20</a><em> Jornal do Commercio</em>, 28 juillet 1847. &laquo; Estava eu conversando com Moli&egrave;re e Ant&ocirc;nio Jos&eacute; [&hellip;] quando lobriguei ao longe S&atilde;o Pedro abra&ccedil;ando ao <em>maestro</em> Bellini com exalta&ccedil;&atilde;o e entusiasmo. Eu vi logo que o caso era de grande import&acirc;ncia, porque S&atilde;o Pedro foi sempre uma pessoa muito s&eacute;ria [&hellip;] O Pr&iacute;ncipe dos Ap&oacute;stolos atalhou-me exclamando: [&hellip;] Pois n&atilde;o v&ecirc;s que todo este meu contentamento &eacute; porque se representa hoje no meu teatro a grande <em>Norma</em>, &oacute;pera aqui do <em>maestro</em> ? ─ Sim, a minha &oacute;pera querida, acrescentou este; a filha das minhas inspira&ccedil;&otilde;es e entusiasmo. &raquo;</p> <p><a href="#liennbp21" name="nbp21">21 </a>Op&eacute;ra en deux actes&nbsp;; livret de Felice Romani. Cr&eacute;&eacute; &agrave; Venise, au Th&eacute;&acirc;tre La Fenice, en 1830.</p> <p><a href="#liennbp22" name="nbp22">22</a><em> Jornal do Commercio</em>, 28 juillet 1847. &laquo;&nbsp;S&atilde;o Pedro, no dizer estas palavras, voltou-se para Bellini; mas este, embebido na composi&ccedil;&atilde;o de uma &aacute;ria da sua nova &oacute;pera ─ <em>A Bem-aventuran&ccedil;a Celeste</em> ─, n&atilde;o lhe deu aten&ccedil;&atilde;o. &raquo;</p> <p><a href="#liennbp23" name="nbp23">23</a><em> Ibidem</em>. &laquo; &laquo;&nbsp;A <em>Norma</em> n&atilde;o presta. &nbsp;&raquo; &laquo;&nbsp;N&atilde;o presta! bradaram o Ap&oacute;stolo e o <em>Maestro</em>&hellip; n&atilde;o presta! &nbsp;&raquo; [&hellip;]&nbsp;&raquo;N&atilde;o s&oacute; n&atilde;o presta, tornei eu com impavidez, como aposto que n&atilde;o dar&aacute; nem meia casa. ─ Aceito a aposta, exclamou S&atilde;o Pedro; ─ O dito, dito, disse eu; mas &eacute; preciso que algu&eacute;m verifique o caso; assim proponho que v&aacute; o <em>Maestro</em>, e para que ele n&atilde;o nos engane, por isso que &eacute; interessado, irei eu tamb&eacute;m em sua companhia.&nbsp;&raquo;</p> <p><a href="#liennbp24" name="nbp24">24</a><em> Jornal do Commercio</em>, 6 octobre 1847. &laquo;&nbsp;[&hellip;] que demandava o c&eacute;u com toda a velocidade&nbsp;&raquo;.</p> <p><a href="#liennbp25" name="nbp25">25</a> <em>Ibidem</em>. &laquo; &ndash; Manuel Lu&iacute;s, disse-me o maestro, aquele &eacute; o Anjo da Harmonia! Donde vir&aacute; ele ?</p> <p>&ndash; N&atilde;o sei; pergunta-lhe.</p> <p>&ndash; Salve, mensageiro celeste, bradou o maestro, porque t&atilde;o apressado caminhas para as alturas ?</p> <p>&ndash; Fujo da terra, maestro, respondeu o anjo reconhecendo quem o interrogava, ou para melhor dizer, fujo do Rio de Janeiro, onde tenho sido atrozmente maltratado pela companhia italiana e sua digna orquestra. Aquilo por l&aacute;, maestro, anda que &eacute; um horror, e para n&atilde;o renegar da minha ess&ecirc;ncia celeste, bati asas, deixei o teatro l&iacute;rico entregue ao seu abandono, e tomei o caminho do c&eacute;u. Adeus maestro feliz viagem.&nbsp;&raquo;</p> <p><a href="#liennbp26" name="nbp26">26</a> &Agrave; ce propos, voir les notes et remarques de Patrick Berthier dans Th&eacute;ophile Gautier, <em>&OElig;uvres Compl&egrave;tes</em>, vol. 4, Paris, Honor&eacute; Champions, 2012, pp. 10 et 78.</p>