<p>La commande a permis &agrave; des artistes du pass&eacute; et du pr&eacute;sent de vivre d&eacute;cemment de leur art. En 2020, dans la pr&eacute;face de <i>Logiques de la commande (XX</i><i><sup>e</sup></i><i>-XXI</i><i><sup>e</sup></i><i> si&egrave;cles)</i>, Nathalie Heinich &eacute;voque celle relative &agrave; la sculpture<a href="#note1" name="lien1">1</a>. Tout comme la grande peinture, la sculpture faisait l&rsquo;objet de nombreuses achats publics et priv&eacute;s, permettant ainsi &agrave; des artistes le plus souvent issus des Beaux-Arts de pouvoir subsister. Dans le cadre de ma recherche, la sculpture est particuli&egrave;rement int&eacute;ressante car elle est fortement li&eacute;e &agrave; ma th&egrave;se et surtout &agrave; l&rsquo;histoire de ma bande dessin&eacute;e. Paul Ducuing, l&rsquo;artiste qui a r&eacute;alis&eacute; la statue qui est au centre de mon sc&eacute;nario, &eacute;tait un artiste officiel durant la fin du XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle et jusqu&rsquo;au milieu du XX<sup>e</sup> si&egrave;cle, &agrave; la date de sa mort en 1949. Afin de pouvoir mieux observer l&rsquo;&eacute;volution de la commande artistique, j&rsquo;ai compar&eacute; son parcours et mon exp&eacute;rience actuelle aupr&egrave;s de la municipalit&eacute; de L&eacute;zignan-Corbi&egrave;res.</p> <p>&nbsp;</p> <h2><b>Qui &eacute;tait Paul Jean-Marie Ducuing&nbsp;? </b></h2> <p>Cet artiste est n&eacute; en 1867 &agrave; Lannemezan dans les Hautes-Pyr&eacute;n&eacute;es<a href="#note2" name="lien2">2</a>. Il &eacute;tait fils de cultivateur. Son fr&egrave;re et lui ont int&eacute;gr&eacute; les Beaux-Arts de Toulouse, puis il a poursuivi sa formation de sculpteur aux Beaux-Arts de Paris gr&acirc;ce &agrave; une bourse d&rsquo;&eacute;tude. Il &eacute;tait l&rsquo;&eacute;l&egrave;ve d&rsquo;Alexandre Falgui&egrave;re (1831-1900) et d&rsquo;Antonin Merci&eacute; (1845-1916), deux sculpteurs laur&eacute;ats du prix de Rome. Paul Ducuing avait d&rsquo;excellentes relations dans le monde de l&rsquo;art et de la politique. Cela lui a permis d&rsquo;obtenir de nombreuses commandes tout au long de sa vie, mais &eacute;galement de voyager en tant qu&rsquo;artiste officiel jusqu&rsquo;en Indochine. La seule photographie<a href="#note3" name="lien3">3</a> aujourd&rsquo;hui connue de lui est un clich&eacute; de l&rsquo;artiste aux c&ocirc;t&eacute;s du Roi Sisowath du Cambodge et du R&eacute;sident g&eacute;n&eacute;ral Fran&ccedil;ois Marius Baudouin. La photographie les repr&eacute;sente aux pieds d&rsquo;une statue &agrave; l&rsquo;effigie du roi. Elle a &eacute;t&eacute; r&eacute;alis&eacute;e par Paul Ducuing lui-m&ecirc;me. En 1922, l&rsquo;artiste s&rsquo;est mari&eacute; avec la veuve d&rsquo;Antonin Merci&eacute;, son d&eacute;funt professeur des Beaux-Arts de Paris. Ce mariage lui a assur&eacute; une entr&eacute;e dans la bourgeoisie fran&ccedil;aise puisque cette dame &eacute;tait la comtesse Fran&ccedil;oise de Simard de Pitray, petite fille de la comtesse de S&eacute;gur. Il avait &eacute;galement d&rsquo;excellentes relations politiques et amicales avec les fr&egrave;res Sarrault, Albert et Maurice, respectivement d&eacute;put&eacute; radical-socialiste et directeur de la D&eacute;p&ecirc;che de Toulouse, qui &eacute;taient proches du maire de L&eacute;zignan-Corbi&egrave;res de l&rsquo;&eacute;poque&nbsp;: L&eacute;on Castel.</p> <p>L&rsquo;hypoth&egrave;se est donc que la statue au c&oelig;ur de ma bande dessin&eacute;e a pu &ecirc;tre command&eacute;e par la ville de L&eacute;zignan-Corbi&egrave;res gr&acirc;ce &agrave; ces diff&eacute;rents liens qui r&eacute;unissaient chacune des personnalit&eacute;s cit&eacute;es. Dans le cas de Paul Ducuing, comme dans le mien, les commandes ont donc jou&eacute; un r&ocirc;le fondamental dans la construction d&rsquo;une carri&egrave;re d&rsquo;artiste. Tout comme le m&eacute;c&eacute;nat.</p> <p>&nbsp;</p> <h2><b>Le m&eacute;c&eacute;nat </b></h2> <p>Nathalie Heinich explique, toujours dans <i>Logiques de la commande (XX</i><i><sup>e</sup></i><i>-XXI</i><i><sup>e</sup></i><i> si&egrave;cles)</i>, que les artistes &eacute;taient &eacute;troitement d&eacute;pendants des &laquo;&nbsp;m&eacute;c&egrave;nes situ&eacute;s au sommet de la hi&eacute;rarchie sociale<a href="#note4" name="lien4">4</a>&nbsp;&raquo;. Selon elle, &laquo;&nbsp;&agrave; l&rsquo;&eacute;poque contemporaine, la commande est devenue atypique<a href="#note5" name="lien5">5</a>&nbsp;&raquo;. Elle ajoute que &laquo;&nbsp;les aides de l&rsquo;&Eacute;tat sont venues se substituer progressivement au m&eacute;c&eacute;nat<a href="#note6" name="lien6">6</a>&nbsp;&raquo;. &Agrave; titre d&rsquo;exemple, Nathalie Heinich cite notamment les bourses, les subventions ou encore les r&eacute;sidences. Tout cela est financ&eacute; par le gouvernement, par le biais du minist&egrave;re de la Culture, des r&eacute;gions ou encore des collectivit&eacute;s. Dans mon cas, la ville de L&eacute;zignan-Corbi&egrave;res est la collectivit&eacute; territoriale commanditaire. L&rsquo;Association nationale de la recherche et de la technologie (ANRT), quant &agrave; elle, fait figure de m&eacute;c&egrave;ne car elle soutient le projet collaboratif en aidant financi&egrave;rement ma recherche doctorale tout autant que le commanditaire.</p> <p>Comme Nathalie Heinich l&rsquo;explique au d&eacute;but de la m&ecirc;me pr&eacute;face, &laquo;&nbsp;le statut de la commande artistique varie fortement selon les &eacute;poques et les domaines o&ugrave; elle s&rsquo;exerce<a href="#note7" name="lien7">7</a>&nbsp;&raquo;.<b> </b>On peut donc concevoir que la commande &agrave; laquelle je dois r&eacute;pondre actuellement est une forme d&rsquo;&eacute;volution de la commande classique. Les acteurs changent, ainsi que les circonstances, mais les r&ocirc;les restent les m&ecirc;mes.</p> <p>&nbsp;</p> <h2><b>Contexte de la commande</b></h2> <p>L&eacute;zignan-Corbi&egrave;res est une ville de 12 000 habitants situ&eacute;e dans l&rsquo;Aude. On la nomme la capitale des Corbi&egrave;res. Elle est particuli&egrave;rement connue pour sa production viticole, sa gare et son a&eacute;rodrome. J&rsquo;habite dans cette ville depuis 2006. M&ecirc;me si j&rsquo;ai pass&eacute; huit ann&eacute;es &agrave; Montpellier dans le cadre de mes &eacute;tudes universitaires, je suis retourn&eacute;e &agrave; L&eacute;zignan-Corbi&egrave;res r&eacute;guli&egrave;rement, et surtout en p&eacute;riode estivale afin de travailler dans une association culturelle pendant sept &eacute;t&eacute;s cons&eacute;cutifs. Le fait d&rsquo;habiter dans cette ville depuis mes 12 ans et de participer &agrave; sa vie culturelle en tant que saisonni&egrave;re, a fait de moi une L&eacute;zignanaise de c&oelig;ur, soucieuse de rendre cette ville plus dynamique culturellement et artistiquement.</p> <p>En septembre 2020, je me suis inscrite en doctorat d&rsquo;Arts plastiques &agrave; l&rsquo;universit&eacute; Paul-Val&eacute;ry de Montpellier. Mon projet &eacute;tait de poursuivre ma recherche sur les r&eacute;seaux sociaux et de continuer &agrave; interroger leurs influences sur la soci&eacute;t&eacute; et le champ artistique. Mon but initial &eacute;tait d&rsquo;infiltrer ces nouveaux outils de communication, de d&eacute;tourner leur utilisation purement m&eacute;diatique et spectaculaire, afin d&rsquo;en faire un m&eacute;dium susceptible de cr&eacute;er une nouvelle pratique artistique que je pourrais questionner. Je souhaitais &eacute;galement r&eacute;aliser mon doctorat dans le cadre d&rsquo;une Convention Industrielle de Formation par la Recherche (CIFRE) car r&eacute;diger une th&egrave;se et cr&eacute;er une production artistique dans ces conditions allaient &ecirc;tre formateur et m&rsquo;apporter beaucoup en termes d&rsquo;exp&eacute;riences professionnelles et humaines. Ce type de convention permet &agrave; un &eacute;tudiant en doctorat de percevoir un salaire durant la r&eacute;daction de sa th&egrave;se et plus pr&eacute;cis&eacute;ment durant trois ann&eacute;es. Pour cela, il est tout d&rsquo;abord n&eacute;cessaire de trouver un organisme d&rsquo;accueil. Dans mon cas, il s&rsquo;agit de la collectivit&eacute; de L&eacute;zignan-Corbi&egrave;res. Cette derni&egrave;re per&ccedil;oit une somme de la part de l&rsquo;ANRT, qui est l&rsquo;organisme de financement. Cela permet ensuite &agrave; la ville de pouvoir me verser un salaire mensuel.</p> <p>J&rsquo;ai rencontr&eacute; en personne Monsieur G&eacute;rard Forcada, le maire de L&eacute;zignan-Corbi&egrave;res, en novembre 2020. Je lui ai expliqu&eacute; le sujet de ma th&egrave;se, les connaissances que j&rsquo;avais pu emmagasiner pendant mes deux masters, les comp&eacute;tences que j&rsquo;avais pu acqu&eacute;rir et la nature de la convention CIFRE que je lui proposais d&rsquo;&eacute;tablir avec moi. Nous avons ensuite discut&eacute; de l&rsquo;avenir culturel de la ville et fait co&iuml;ncider nos motivations. Il faut savoir que d&rsquo;une municipalit&eacute; &agrave; une autre les soutiens humains, moraux et financiers &agrave; la culture sont diff&eacute;rents. Certaines mairies ont d&rsquo;autres objectifs. Dans mon cas, la nouvelle municipalit&eacute; de L&eacute;zignan-Corbi&egrave;res voulait mettre en avant les artistes locaux, ainsi que le patrimoine historique et culturel de la ville. Il s&rsquo;agissait pour la commune de trouver une personne capable de mettre en &oelig;uvre le projet de politique culturelle qu&rsquo;elle avait d&eacute;fini. Les r&eacute;seaux sociaux &eacute;taient notamment des outils d&eacute;j&agrave; utilis&eacute;s pour diffuser de l&rsquo;information aupr&egrave;s des habitants, mais aussi pour r&eacute;animer l&rsquo;histoire de L&eacute;zignan-Corbi&egrave;res et la faire conna&icirc;tre aupr&egrave;s de la jeunesse, tr&egrave;s pr&eacute;sente sur ces plateformes. En somme, le but &eacute;tait de transmettre la m&eacute;moire peu &agrave; peu oubli&eacute;e de ce territoire rural par le biais de ces outils.</p> <p>Pour effectuer ce travail de transmission il y avait d&rsquo;autres solutions, bien moins virtuelles et plus authentiques. Cependant, le contexte de ma rencontre avec la municipalit&eacute; et la p&eacute;riode pendant laquelle j&rsquo;avais commenc&eacute; ma th&egrave;se &eacute;taient tr&egrave;s particuliers. Je me suis inscrite en doctorat en septembre 2020. Nous &eacute;tions encore en pleine pand&eacute;mie mondiale. Sept mois auparavant nous avions &eacute;t&eacute; confin&eacute;s pendant plusieurs semaines. Le jour de ma rencontre avec Monsieur le Maire, nous venions de commencer le deuxi&egrave;me confinement, bient&ocirc;t relay&eacute; par le dernier en mai 2021. La pand&eacute;mie avait marqu&eacute; les esprits et nos habitudes sociales s&rsquo;&eacute;taient transform&eacute;es. La plupart des mus&eacute;es du monde avaient d&ucirc; rester ferm&eacute;s pendant plusieurs mois cons&eacute;cutifs, et certaines galeries et associations culturelles avaient, quant &agrave; elles, eu l&rsquo;obligation de fermer d&eacute;finitivement. L&rsquo;art et la culture &eacute;taient grandement fragilis&eacute;s. Les artistes ne pouvaient plus r&eacute;aliser d&rsquo;exposition pour faire conna&icirc;tre leur travail ou le vendre aupr&egrave;s des acheteurs et des collectionneurs. Ils s&rsquo;&eacute;taient donc rabattus sur les r&eacute;seaux sociaux pour garder de la visibilit&eacute;, de m&ecirc;me que les institutions et les grands acteurs du monde de l&rsquo;art, notamment les maisons de ventes aux ench&egrave;res comme <i>Sotheby&rsquo;s</i> et <i>Christie&rsquo;s</i>. De nombreuses villes avaient utilis&eacute; les m&ecirc;mes outils afin de garder un semblant de lien avec leurs populations. L&eacute;zignan-Corbi&egrave;res en faisait partie. L&rsquo;objectif que l&rsquo;on m&rsquo;avait confi&eacute; &eacute;tait donc de valoriser et de transmettre l&rsquo;histoire de L&eacute;zignan-Corbi&egrave;res ainsi que sa culture locale, tout en respectant les gestes barri&egrave;res et les r&egrave;gles sanitaires. Je devais essayer de communiquer avec les habitants sans pouvoir les rencontrer dans le monde physique. L&rsquo;acc&egrave;s gratuit &agrave; ces outils de communication et de diffusion est aussi &agrave; souligner car il permet &agrave; une collectivit&eacute; de cette taille, qui ne dispose pas de moyens financiers importants, de proposer des solutions alternatives dans un contexte sanitaire d&eacute;licat. La ville avait d&eacute;j&agrave; un site web, ainsi qu&rsquo;une page Facebook et Instagram. Durant les premiers mois de mon contrat, j&rsquo;ai donc particip&eacute; activement &agrave; la gestion de ces plateformes en r&eacute;digeant des articles culturels, tout en poursuivant des recherches approfondies dans les archives locales. Pendant cette p&eacute;riode je me suis nourrie de l&rsquo;histoire de la ville et c&rsquo;est aussi cela qui m&rsquo;a ensuite permis de r&eacute;aliser ma bande dessin&eacute;e.</p> <p>Puis, une rencontre avec le b&eacute;d&eacute;aste R&eacute;gis Franc a permis de mieux d&eacute;finir la commande artistique qu&rsquo;allait me faire la collectivit&eacute;. R&eacute;gis Franc est un L&eacute;zignanais, sa famille habite &agrave; L&eacute;zignan-Corbi&egrave;res depuis des g&eacute;n&eacute;rations. Il est auteur de bandes dessin&eacute;es, &eacute;crivain, sc&eacute;nariste et r&eacute;alisateur. Un de ces films a notamment &eacute;t&eacute; pr&eacute;sent&eacute; au festival de Cannes en 1989. Il a &eacute;galement travaill&eacute; pour le magazine <i>Elle</i> et pour <i>Charlie Hebdo</i>. Il publie encore r&eacute;guli&egrave;rement des romans graphiques.</p> <p>Lors de notre rencontre, je lui ai pr&eacute;sent&eacute; diff&eacute;rents croquis ainsi que mes recherches sur l&rsquo;histoire de L&eacute;zignan-Corbi&egrave;res. Notre &eacute;change m&rsquo;a inspir&eacute; le projet de cr&eacute;er un roman graphique &agrave; mon tour. L&rsquo;id&eacute;e a beaucoup plu &agrave; la municipalit&eacute; puisqu&rsquo;elle r&eacute;pondait &agrave; ses besoins. Il a fallu encore un peu de temps pour d&eacute;finir plus pr&eacute;cis&eacute;ment le sujet, la p&eacute;riode historique, et r&eacute;diger les grandes lignes du sc&eacute;nario, tout cela en m&rsquo;adaptant aux crit&egrave;res et aux contraintes instaur&eacute;s. La premi&egrave;re ann&eacute;e de mon contrat a donc servi &agrave; mieux conna&icirc;tre mon terrain de recherche et les besoins de la collectivit&eacute;. J&rsquo;ai aussi rencontr&eacute; beaucoup d&rsquo;acteurs qui jouent encore aujourd&rsquo;hui un r&ocirc;le fondamental dans la cr&eacute;ation de mon projet artistique.</p> <p>&nbsp;</p> <h2><b>La statue disparue </b></h2> <p>Ma bande dessin&eacute;e raconte l&rsquo;histoire d&rsquo;une statue nomm&eacute;e <i>la Capounado</i> par les L&eacute;zignanais. J&rsquo;ai d&eacute;couvert son existence lorsque je menais des recherches dans les archives de la ville. Sa beaut&eacute; m&rsquo;a tout de suite &eacute;mue autant que son absence dans le paysage actuel. En arri&egrave;re-plan de la statue, dans les diff&eacute;rentes cartes postales que j&rsquo;avais retrouv&eacute;es, je reconnaissais sans difficult&eacute; le jardin public Victor Hugo situ&eacute; dans le centre-ville de L&eacute;zignan-Corbi&egrave;res. Mais je comprenais que la statue ne s&rsquo;y trouvait plus d&eacute;sormais. Je me suis donc renseign&eacute;e et j&rsquo;ai commenc&eacute; &agrave; mener une enqu&ecirc;te sur la myst&eacute;rieuse disparition de cette statue en bronze, celle-l&agrave; m&ecirc;me que je mets en sc&egrave;ne dans ma bande dessin&eacute;e. Je me repr&eacute;sente fouillant notamment dans les archives locales, trouvant diff&eacute;rents documents en rapport avec la statue, mais aussi avec le quotidien des habitants pendant la Seconde Guerre mondiale.</p> <p>&nbsp;</p> <p><img height="363" src="https://www.numerev.com/img/ck_3048_31_image.png" width="363" /></p> <p><i>Figure 1: </i>Myriam Ducoin, extrait 1 de ma bande dessin&eacute;e<i>. Les archives. </i>Peinture digitale, 2022.</p> <p>&nbsp;</p> <p>D&rsquo;apr&egrave;s les &eacute;l&eacute;ments trouv&eacute;s &agrave; ce jour, Paul Ducuing a r&eacute;alis&eacute; une statue en pl&acirc;tre qu&rsquo;il a ensuite expos&eacute;e en 1909 au Salon. La m&ecirc;me ann&eacute;e, il a confi&eacute; son &oelig;uvre &agrave; la Maison Barbedienne, une grande fonderie fran&ccedil;aise, afin qu&rsquo;une version en bronze de cette m&ecirc;me statue soit cr&eacute;&eacute;e. Quelques ann&eacute;es plus tard, la sculpture a trouv&eacute; sa place dans le jardin public de L&eacute;zignan-Corbi&egrave;res. Elle y est rest&eacute;e durant environ une trentaine d&rsquo;ann&eacute;es avant de dispara&icirc;tre pendant la Seconde Guerre mondiale. D&rsquo;apr&egrave;s les archives de la Soci&eacute;t&eacute; des artistes fran&ccedil;ais, Paul Ducuing a expos&eacute; son &oelig;uvre au Salon en 1909 sous le nom de <i>La Surprise</i>. Le m&ecirc;me titre figure sur diff&eacute;rentes cartes postales. Les archives nationales ont conserv&eacute; des informations sur la statue sous le nom de <i>Faune et Bacchante</i>. Les habitants des Corbi&egrave;res l&rsquo;appellent <i>La Capounado</i>. L&rsquo;&oelig;uvre d&rsquo;art poss&egrave;de donc trois titres. &Eacute;tant issue d&rsquo;une formation en arts plastiques, j&rsquo;ai rapidement analys&eacute; l&rsquo;&oelig;uvre en question comme repr&eacute;sentant une sc&egrave;ne mythologique dans laquelle un satyre ou un faune et une nymphe ou une bacchante se s&eacute;duisent. La statue poss&egrave;de plusieurs aspects semblables &agrave; l&rsquo;&oelig;uvre de James Pradier <i>Satyre et bacchante</i> (1834). Le visage de la bacchante a la m&ecirc;me expression joyeuse et des traits similaires. Le satyre la surplombe comme dans l&rsquo;&oelig;uvre de Paul Ducuing. Des &eacute;l&eacute;ments rappelant le vin et le dieu Bacchus, tel que le raisin et le pied de vigne, sont &eacute;galement pr&eacute;sents dans la composition des deux statues.</p> <p>&nbsp;</p> <p><img height="307" src="https://www.numerev.com/img/ck_3048_31_image1.png" width="399" /></p> <p><i>Figure 2 : Carte postale de La Capounado, </i>d&eacute;but du XX<sup>e</sup> si&egrave;cle.</p> <p>&nbsp;</p> <p>Un autre objet confirme que l&rsquo;homme est bien un faune, il s&rsquo;agit du tambourin que l&rsquo;on retrouve positionn&eacute; pr&egrave;s des jambes du couple. Les faunes sont souvent repr&eacute;sent&eacute;s avec un instrument. Dans un de ses croquis &agrave; la sanguine, <i>Faune dansant avec un tambourin entour&eacute; de trois puttis </i>(XVI<sup>e</sup> si&egrave;cle)<i>, </i>Michel-Ange a dessin&eacute; cet &ecirc;tre mythologique avec un tambourin et des jambes humaines. Ce d&eacute;tail a son importance, car encore aujourd&rsquo;hui certains habitants des Corbi&egrave;res restent persuad&eacute;s que le couple dans l&rsquo;&oelig;uvre de Paul Ducuing est humain car l&rsquo;homme n&rsquo;a pas de sabots ni de cornes. Or, dans diff&eacute;rentes repr&eacute;sentations, les faunes et les satyres ne poss&egrave;dent pas ces attributs bien qu&rsquo;ils soient issus de la mythologie.</p> <p>Mais alors, que signifie <i>La Capounado&nbsp;</i>? Il s&rsquo;agit d&rsquo;un terme occitan et d&rsquo;une tradition viticole pr&eacute;sente notamment dans l&rsquo;Aude sous la forme d&rsquo;une farce. Elle implique d&rsquo;&eacute;craser du raisin sur le visage des jeunes femmes pendant les vendanges, puis de les embrasser. La position des personnages, ainsi que la grappe de raisin tenue par le faune au-dessus du visage de la bacchante, sont donc &agrave; l&rsquo;origine du titre non officiel de cette &oelig;uvre donn&eacute; par les habitants des Corbi&egrave;res. Dans la r&eacute;daction de ma th&egrave;se et dans la r&eacute;alisation de ma bande dessin&eacute;e j&rsquo;int&egrave;gre les deux interpr&eacute;tations du sens de cette statue. Cette &oelig;uvre est aussi bien rattach&eacute;e &agrave; la tradition des Beaux-Arts qu&rsquo;&agrave; la culture audoise. Elle symbolise &eacute;galement la m&eacute;moire peu &agrave; peu oubli&eacute;e d&rsquo;un territoire rural. &Agrave; ce jour, j&rsquo;enqu&ecirc;te toujours sur cette statue disparue pendant une nuit d&rsquo;hiver, il y a quatre-vingts ans.</p> <p>&nbsp;</p> <p><img height="516" src="https://www.numerev.com/img/ck_3048_31_image2.png" width="365" /></p> <p><i>Figure 3 : </i>Myriam Ducoin,<i> </i>extrait 2 de ma bande dessin&eacute;e.<i> La tradition. </i>Peinture digitale, 2023.</p> <p>&nbsp;</p> <p><img height="231" src="https://www.numerev.com/img/ck_3048_31_image3.png" width="225" /><img height="233" src="https://www.numerev.com/img/ck_3048_31_image4.png" width="226" /></p> <p>&nbsp;</p> <h2><b>Le corpus </b></h2> <p>Pour dessiner des sc&egrave;nes li&eacute;es &agrave; l&rsquo;univers viticole de l&rsquo;&eacute;poque ou au quotidien des habitants, je me suis appuy&eacute;e sur la &laquo;&nbsp;collection Costes&egrave;que&nbsp;&raquo;, un ensemble de clich&eacute;s photographiques r&eacute;alis&eacute; par Pierre et Paul Costes&egrave;que, en partie num&eacute;ris&eacute;e par les Archives D&eacute;partementales de l&rsquo;Aude. P&egrave;re et fils &eacute;taient propri&eacute;taires d&rsquo;un studio de photographie, et ont immortalis&eacute; des &eacute;v&egrave;nements publics et priv&eacute;s &agrave; L&eacute;zignan-Corbi&egrave;res et dans ses environs au courant du XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle. Dans les ann&eacute;es 2000, leurs descendants ont l&eacute;gu&eacute; la collection &agrave; la ville qui poss&egrave;de d&eacute;sormais pr&egrave;s d&rsquo;un millier de petits cartons de n&eacute;gatifs divers&nbsp;: plaques de verre,&nbsp; g&eacute;latines et pellicules vari&eacute;es. C&rsquo;est ce patrimoine culturel l&eacute;zignanais que ma bande dessin&eacute;e vise &eacute;galement &agrave; valoriser.</p> <p>Les archives municipales de L&eacute;zignan-Corbi&egrave;res et de Toulouse, celles d&eacute;partementales de l&rsquo;Aude et des Hautes-Pyr&eacute;n&eacute;es, celles de la Soci&eacute;t&eacute; des artistes fran&ccedil;ais ainsi que les Archives nationales, m&rsquo;ont permis d&rsquo;acc&eacute;der &agrave; de nombreux documents qui ont aliment&eacute; une longue et intensive phase de recherche pr&eacute;alable &agrave; la cr&eacute;ation.</p> <p>Cette partie du travail, en g&eacute;n&eacute;ral solitaire mais passionnante, a n&eacute;cessit&eacute; des comp&eacute;tences diverses, tr&egrave;s proches de celles que les historiens, les journalistes, les g&eacute;n&eacute;alogistes et les enqu&ecirc;teurs ont l&rsquo;occasion d&rsquo;utiliser. Le principe de l&rsquo;enqu&ecirc;te est souvent employ&eacute; dans le genre de la bande dessin&eacute;e. L&rsquo;&oelig;uvre de Joe Sacco, <i>Gaza 1956 en marge de l&rsquo;histoire </i>(2009) en est un parfait exemple&nbsp;: l&rsquo;auteur y m&egrave;ne une enqu&ecirc;te au sujet d&rsquo;un massacre survenu en Palestine et rassemble des t&eacute;moignages divers.</p> <p>Afin de traduire dans ma bande dessin&eacute;e la p&eacute;riode de la Seconde Guerre mondiale, je me suis appuy&eacute;e sur le classique et c&eacute;l&egrave;bre <i>Maus</i> (1980) de Art Spiegelman. L&rsquo;objectif &eacute;tait de comprendre comment l&rsquo;auteur avait pu retranscrire les moments souvent tragiques de la vie quotidienne de cette &eacute;poque.</p> <p>Les t&eacute;moignages et les souvenirs sont ainsi des &eacute;l&eacute;ments fondamentaux de ma bande dessin&eacute;e et font partie de mon corpus. Dans un premier temps, je les ai rassembl&eacute;s au fil du temps et des rencontres sous la forme d&rsquo;enregistrements vocaux et de textes, puis je les ai transpos&eacute;s plastiquement en m&rsquo;inspirant du fameux roman graphique de Will Eisner&nbsp;: <i>Un pacte avec Dieu (1978)</i>. Cette retranscription plastique m&rsquo;a permis de mettre en lumi&egrave;re les caract&eacute;ristiques d&rsquo;une &eacute;poque, celle de l&rsquo;occupation et de la pr&eacute;sence terrifiante des soldats du <i>Reich</i> dans l&rsquo;Aude.</p> <p>&nbsp;</p> <h2><b>Les choix plastiques et sc&eacute;naristiques </b></h2> <p>Les outils de cr&eacute;ation que j&rsquo;utilise sont en grande majorit&eacute; num&eacute;riques. Une tablette graphique et des logiciels me permettent en particulier de r&eacute;aliser des dessins et des peintures digitales, de cr&eacute;er des montages et d&rsquo;ajouter des textes facilement. N&eacute;anmoins, je conserve encore une pratique traditionnelle&nbsp;: mes &eacute;bauches et mes <i>storyboards </i>sont toujours ex&eacute;cut&eacute;s &agrave; la mine graphite sur des carnets de croquis ou des formats plus grands pour une vision d&rsquo;ensemble du sc&eacute;nario.</p> <p>Afin de r&eacute;aliser cette bande dessin&eacute;e, j&rsquo;ai pris le parti de codifier la couleur pour permettre aux lecteurs de mieux comprendre les diff&eacute;rentes temporalit&eacute;s dans lesquelles se joue l&rsquo;histoire&nbsp;: le pr&eacute;sent est polychrome et le pass&eacute; en noir et blanc selon une similitude plastique avec les photographies et les cartes postales anciennes sur lesquelles je m&rsquo;appuie. De plus, &agrave; titre personnel, je consid&egrave;re que le noir et le blanc traduisent une certaine authenticit&eacute; et un sentiment de nostalgie que je souhaite retranscrire dans ma bande dessin&eacute;e.</p> <p>D&rsquo;autres choix effectu&eacute;s concernent l&rsquo;utilisation des documents et des photographies d&rsquo;archives elles-m&ecirc;mes&nbsp;: j&rsquo;avais la possibilit&eacute; de les reproduire afin de les adapter au style graphique de ma bande dessin&eacute;e, ou bien de les int&eacute;grer sans les modifier &agrave; la mani&egrave;re de Art Spiegelman dans <i>Maus</i><a href="#note8" name="lien8">8</a> qui hybride des m&eacute;diums pour lier la forme et le sens et susciter des sentiments sp&eacute;cifique. Dans son travail, les photographies sont associ&eacute;es aux dessins afin de rappeler la v&eacute;racit&eacute; de l&rsquo;histoire des personnes, la rendre vraisemblable, plus authentique et touchante. Je me suis donc inspir&eacute;e du travail de ce c&eacute;l&egrave;bre b&eacute;d&eacute;aste afin de r&eacute;aliser ma production artistique.</p> <p>Afin d&rsquo;organiser tous les t&eacute;moignages que j&rsquo;ai rassembl&eacute;s au cours de mon enqu&ecirc;te et cr&eacute;er un sc&eacute;nario plus ordonn&eacute;, j&rsquo;ai imagin&eacute; un groupe de personnages fictifs sous la forme d&rsquo;une classe d&rsquo;&eacute;cole primaire. Ce sont les aventures de ces enfants que l&rsquo;on suit au fil des cases qui racontent des moments de leur enfance sous l&rsquo;occupation. Je leur ai attribu&eacute; les pr&eacute;noms des personnes qui ont t&eacute;moign&eacute; de cette p&eacute;riode &agrave; l&rsquo;occasion de discussions, ou &agrave; travers des &eacute;crits litt&eacute;raires ou journalistiques.</p> <p>&nbsp;</p> <h2><b>La cr&eacute;ation de liens </b></h2> <p>La bande dessin&eacute;e portera le titre suivant&nbsp;: <i>La Myst&eacute;rieuse disparition de La Capounado de L&eacute;zignan-Corbi&egrave;res.</i> Elle sera accessible sur le site de la ville et ses r&eacute;seaux sociaux. Des liens hypertextes et des codes QR m&egrave;neront &agrave; des enregistrements sonores, &agrave; des t&eacute;moignages et &agrave; d&rsquo;autres documents annexes tels que des photographies et des extraits d&rsquo;archives diverses. Cela permettra aux lecteurs d&rsquo;obtenir des informations suppl&eacute;mentaires sur la p&eacute;riode de l&rsquo;occupation &agrave; L&eacute;zignan-Corbi&egrave;res et sur la statue disparue.</p> <p>Internet et les nouvelles plateformes de diffusion et de communication rendent possible l&rsquo;hybridation de contenus. On peut donc m&ecirc;ler les images fixes (dessins, photographies, documents d&rsquo;archives), &agrave; des vid&eacute;os, des animations et des enregistrements sonores (bruitages&nbsp; et t&eacute;moignages audios). Dans le cadre de cette commande et des crit&egrave;res demand&eacute;s, j&rsquo;ai donc tent&eacute; d&rsquo;innover en int&eacute;grant les r&eacute;seaux sociaux dans mon projet afin de rendre cette bande dessin&eacute;e accessible et ludique aupr&egrave;s d&rsquo;un vaste public.</p> <p>N&eacute;anmoins, je connais les d&eacute;rives inh&eacute;rentes &agrave; ce type de m&eacute;dia&nbsp;: l&rsquo;&eacute;tat hypnotique engendr&eacute; par les &eacute;crans est notamment &eacute;voqu&eacute;e par Roland Reuss dans <i>Sortir de l&rsquo;hypnose num&eacute;rique</i><a href="#note9" name="lien9">9</a> (2013)<i>,</i> ainsi que par Jean Ch&acirc;teauvert et Gilles Delavaud dans l&rsquo;ouvrage collectif <i>D&rsquo;un &eacute;cran &agrave; l&rsquo;autre, les mutations du spectateur</i><a href="#note10" name="lien10">10</a><i> </i>(2016). Je suis &eacute;galement consciente de la fragilit&eacute; actuelle des liens sociaux et du ph&eacute;nom&egrave;ne de d&eacute;tachement vis-&agrave;-vis du corps et du sensible engendr&eacute;s par Internet et les r&eacute;seaux sociaux, processus identifi&eacute; par &Eacute;ric Sadin dans <i>La Vie algorithmique :&nbsp;critique de la raison num&eacute;rique</i><a href="#note11" name="lien11">11</a> (2015) et Philippe Breton dans <i>Le Culte de l&rsquo;Internet, une menace pour le lien social ?</i><a href="#note12" name="lien12">12</a> (2000).</p> <p>Afin de contrer cette utilisation trop importante des r&eacute;seaux sociaux dans ma pratique, j&rsquo;ai souhait&eacute; favoriser les rencontres avec les publics et les &eacute;changes avec les habitants, les associations locales, les acteurs locaux de la culture et les &eacute;tablissements scolaires. Mon souhait &eacute;tait de tisser des liens authentiques et durables avec la population. Il m&rsquo;a cependant fallu attendre une ann&eacute;e avant de cr&eacute;er ces rencontres puisque le contexte sanitaire &eacute;tait encore d&eacute;licat. Cette commande et la cr&eacute;ation de cette bande dessin&eacute;e investissent en d&eacute;finitive les relations sociales et la transmission m&eacute;morielle. Tous les acteurs pr&eacute;c&eacute;demment cit&eacute;s sont intervenus &agrave; leur mani&egrave;re dans la conception de ce roman graphique, en partageant notamment des t&eacute;moignages enregistr&eacute;s et des photographies personnelles.</p> <p>Dans son ouvrage, <i>L&rsquo;&OElig;uvre commune&nbsp;: affaire d&rsquo;art et de citoyen </i>(2012)<i>,</i> Jean-Paul Fourmentraux expose certains aspects de la commande artistique similaires &agrave; mon exp&eacute;rience. Le sociologue &eacute;voque le devenir public de l&rsquo;art et explique que l&rsquo;innovation r&eacute;side aussi dans l&rsquo;id&eacute;e que l&rsquo;&oelig;uvre d&rsquo;art devrait &ecirc;tre le fruit d&rsquo;une rencontre. Pour l&rsquo;auteur, &laquo;&nbsp;l&rsquo;&oelig;uvre cr&eacute;e le public autant qu&rsquo;elle est produite par lui. C&rsquo;est la rencontre qui compte<a href="#note13" name="lien13">13</a>&nbsp;&raquo;. Il ajoute dans le paragraphe suivant que &laquo;&nbsp;l&rsquo;artiste parle &agrave; son public. Et m&ecirc;me, il apprend de lui<a href="#note14" name="lien14">14</a>&nbsp;&raquo;. Ce dernier point d&eacute;crit aussi l&rsquo;engagement et la reconnaissance que j&rsquo;ai envers toutes les personnes qui participent &agrave; ce projet, et qui me font confiance. Elles partagent avec moi leurs souvenirs et me permettent d&rsquo;enrichir mes connaissances et mon exp&eacute;rience en tant qu&rsquo;artiste.</p> <p>Pour Jean-Paul Fourmentraux, la commande artistique de notre &eacute;poque peut impliquer &laquo;&nbsp;de faire se rencontrer des acteurs diff&eacute;rents, de les confronter, de les faire dialoguer ensemble<a href="#note15" name="lien15">15</a>&nbsp;&raquo;. Bien que mon projet comporte l&rsquo;utilisation d&rsquo;outils num&eacute;riques susceptibles d&rsquo;&eacute;loigner physiquement les individus, je tente &agrave; chaque &eacute;tape de ma cr&eacute;ation d&rsquo;instaurer des liens authentiques entre le public, l&rsquo;&oelig;uvre et moi-m&ecirc;me dans un seul et unique but&nbsp;: celui de transmettre la m&eacute;moire riche et les traditions passionnantes d&rsquo;un territoire.</p> <p>La nature de la commande r&eacute;alis&eacute;e par la collectivit&eacute; de L&eacute;zignan-Corbi&egrave;res n&rsquo;a pas &eacute;t&eacute; d&eacute;finie d&egrave;s le premier jour. Une longue p&eacute;riode d&rsquo;acclimatation &agrave; mon terrain de recherche et de nombreuses rencontres ont &eacute;t&eacute; n&eacute;cessaires pour aboutir &agrave; la d&eacute;finition d&rsquo;un projet concret et r&eacute;alisable. Encore aujourd&rsquo;hui, il subsiste de nombreuses difficult&eacute;s dans sa r&eacute;alisation. N&eacute;anmoins l&rsquo;exp&eacute;rience n&rsquo;en est que plus enrichissante car elle d&eacute;bouche sur la cr&eacute;ation de liens humains durables au c&oelig;ur d&rsquo;un projet fondamentalement engag&eacute;. Mon statut est aussi tr&egrave;s particulier car je suis une artiste embarqu&eacute;e dans la politique culturelle d&rsquo;un territoire rural, au sein d&rsquo;une collectivit&eacute; qui a des besoins particuliers et peu de moyens. Dans le cadre de mon contrat et de cette commande, j&rsquo;ai des crit&egrave;res &agrave; respecter et des contraintes auxquelles je dois m&rsquo;adapter, ce qui m&rsquo;am&egrave;ne &agrave; innover. Ce sont peut-&ecirc;tre ces diff&eacute;rents aspects qui d&eacute;finissent ce qu&rsquo;est la commande artistique aujourd&rsquo;hui&nbsp;: s&rsquo;adapter, innover et s&rsquo;engager. C&rsquo;est ce que j&rsquo;ai la chance d&rsquo;exp&eacute;rimenter &agrave; travers la r&eacute;alisation de cette commande et de cette &laquo;&nbsp;aventure humaine<a href="#note16" name="lien16">16</a>&nbsp;&raquo;.</p> <p>&nbsp;</p> <hr /> <p><b>Notes et r&eacute;f&eacute;rences</b></p> <p><strong>Bibliographie</strong></p> <p>&nbsp;</p> <p>OUVRAGES SOCIO-CRITIQUES SUR LES THEMES D&rsquo;INTERNET ET DES NOUVELLES TECHNOLOGIES</p> <p>Breton Philippe, <i>Le Culte de l&rsquo;Internet. Une menace pour le lien social ?</i>,<i> </i>Paris, La D&eacute;couverte, 2000.</p> <p>Chateauvert Jean, Delavaud Gilles (dir.), <i>D&rsquo;un &eacute;cran &agrave; l&rsquo;autre, les mutations du spectateur, </i>Paris, L&rsquo;Harmattan, 2016.</p> <p>Reuss Roland, Vergne-Cain Brigitte et Rudent G&eacute;rard,&nbsp;<i>Sortir de l&rsquo;hypnose num&eacute;rique</i>, Paris, Des &icirc;lots de r&eacute;sistance, 2013.</p> <p>Sadin &Eacute;ric, <i>La Vie algorithmique : critique de la raison num&eacute;rique</i>, Paris, &Eacute;ditions L&rsquo;&Eacute;chapp&eacute;e, 2015.</p> <p>&nbsp;</p> <p>OUVRAGE SUR LE THEME DE LA COMMANDE PUBLIQUE</p> <p>Fourmentraux Jean-Paul, Ardenne Paul,&nbsp;<i>L&rsquo;&OElig;uvre commune : affaire d&rsquo;art et de citoyen</i>, Dijon, les Presses du r&eacute;el, 2012.</p> <p>&nbsp;</p> <p>ROMANS GRAPHIQUES DE REFERENCE</p> <p>Eisner Will, <i>Un pacte avec Dieu</i>, Paris, &Eacute;ditions Delcourt, 2018.</p> <p>Sacco Joe, <i>Gaza 1956. En marge de l&rsquo;histoire, </i>Paris<i>,</i> &Eacute;ditions Futuropolis, 2010.</p> <p>Spiegelman Art, <i>Maus - L&rsquo;int&eacute;grale, &eacute;dition anniversaire</i>, Paris, &Eacute;ditions Flammarion, 1998.</p> <p>&nbsp;</p> <p>WEBOGRAPHIE&nbsp;</p> <p>Heinich Nathalie,&nbsp;&laquo;&nbsp;Pr&eacute;face&nbsp;&raquo;, <i>Logiques de la commande (XX</i><i><sup>e</sup></i><i>-XXI</i><i><sup>e</sup></i><i>&nbsp;si&egrave;cles)</i>,&nbsp;<i>COnTEXTES</i>, n&deg; 29,&nbsp;2020, [En ligne], consult&eacute; le&nbsp;10 avril 2023.</p> <hr /> <p><a href="#lien1" name="note1">1</a>&nbsp;Nathalie&nbsp;Heinich,&nbsp;&laquo;&nbsp;Pr&eacute;face&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Logiques de la commande (XX<sup>e</sup>-XXI<sup>e</sup> si&egrave;cles)</em>, <em>in</em> <i>COnTEXTES</i>, n&deg;29,&nbsp;2020, [en ligne] <a href="http://journals.openedition.org.ezpupv.scdi-montpellier.fr/contextes/9553">http://journals.openedition.org.ezpupv.scdi-montpellier.fr/contextes/9553</a>, consult&eacute; le&nbsp;10 avril 2023.</p> <p><a href="#lien2" name="note2">2</a> Luce Rivet, &laquo;&nbsp;Le sculpteur toulousain Paul Ducuing (1867-1949)&nbsp;: un artiste officiel sous la Troisi&egrave;me R&eacute;publique&nbsp;&raquo;, <i>Annales du Midi : revue arch&eacute;ologique, historique et philologique de la France m&eacute;ridionale</i>, tome 100, n&deg;182, 1988, p. 181-192, [en ligne] https://www.persee.fr/doc/anami_0003-4398_1988_num_100_182_2173, consult&eacute; le&nbsp;27 mars 2023.&nbsp;</p> <p><a href="#lien3" name="note3">3</a> Photographie disponible sur le site <a href="https://www.le-souvenir-francais-thailande.com">https://www.le-souvenir-francais-thailande.com</a>.</p> <p><a href="#lien4" name="note4">4</a> Nathalie&nbsp;Heinich,&nbsp;&laquo;&nbsp;Pr&eacute;face&nbsp;&raquo;,&nbsp;<i>op. cit. </i></p> <p><a href="#lien5" name="note5">5</a> <i>Ibid.</i></p> <p><a href="#lien6" name="note6">6</a> <i>Ibid.</i></p> <p><a href="#lien7" name="note7">7</a> <i>Ibid.</i></p> <p><a href="#lien8" name="note8">8</a> Art Spiegelman, <i>Maus</i> &ndash; L&rsquo;int&eacute;grale, &eacute;dition anniversaire, Paris, Flammarion, 1998, p. 102, 165, 294.</p> <p><a href="#lien9" name="note9">9</a> Roland Reuss, Brigitte Vergne-Cain et G&eacute;rard Rudent,&nbsp;<i>Sortir de l&rsquo;hypnose num&eacute;rique</i>, Paris, Des &icirc;lots de r&eacute;sistance, 2013.</p> <p><a href="#lien10" name="note10">10</a> Jean Chateauvert, Gilles Delavaud (dir.), <i>D&rsquo;un &eacute;cran &agrave; l&rsquo;autre, les mutations du spectateur, </i>Paris, L&rsquo;Harmattan, 2016.</p> <p><a href="#lien11" name="note11">11</a> &Eacute;ric Sadin, <i>La Vie algorithmique : critique de la raison num&eacute;rique</i>, Paris, &Eacute;ditions L&rsquo;&Eacute;chapp&eacute;e, 2015.</p> <p><a href="#lien12" name="note12">12</a> Philippe Breton, <i>Le Culte de l&rsquo;Internet. Une menace pour le lien social ?</i>,<i> </i>Paris, La D&eacute;couverte, 2000.</p> <p><a href="#lien13" name="note13">13</a> Jean-Paul Fourmentraux, Paul Ardenne,&nbsp;<i>L&rsquo;&OElig;uvre commune&nbsp;: affaire d&rsquo;art et de citoyen</i>, Dijon, Les Presses du r&eacute;el, 2012, p. 297.</p> <p><a href="#lien14" name="note14">14</a> <i>Ibid. </i></p> <p><a href="#lien15" name="note15">15</a> <i>Ibid.</i></p> <p><a href="#lien16" name="note16">16</a> <i>Ibid</i>., p. 298.</p> <p>&nbsp;</p> <hr /> <h2><b>&Agrave; propos de l&rsquo;autrice</b></h2> <p>Myriam Ducoin est doctorante en arts et sciences de l&rsquo;Art, Arts Plastiques, au sein du laboratoire RIRRA21 &agrave; l&rsquo;Universit&eacute; Paul-Val&eacute;ry Montpellier 3, sous la direction de Monsieur &Eacute;ric Villagordo (MCF HDR Arts Plastiques et Sociologie de l&rsquo;art&nbsp;&ndash; Universit&eacute;&nbsp; Paul-Val&eacute;ry Montpellier 3). Dans cette universit&eacute;, elle a obtenu un premier master en Arts plastiques, puis un second en &Eacute;tudes culturelles. Ses deux m&eacute;moires portaient sur le ph&eacute;nom&egrave;ne des r&eacute;seaux sociaux, leurs influences et leurs cons&eacute;quences sur la soci&eacute;t&eacute; et sur le champ artistique.<b> </b>Elle r&eacute;alise sa th&egrave;se dans le cadre d&rsquo;une Convention Industrielle de Formation par la Recherche (CIFRE) &agrave; la mairie de L&eacute;zignan-Corbi&egrave;res dans l&rsquo;Aude. Elle est charg&eacute;e d&rsquo;une mission culturelle dans cette collectivit&eacute;. Sa recherche s&rsquo;oriente vers les outils de cr&eacute;ation et de diffusion num&eacute;rique.&nbsp;</p>