<p>Comment l&rsquo;&oelig;uvre tr&egrave;s personnelle de certains metteurs en sc&egrave;ne polonais travaillant en p&eacute;riph&eacute;rie du th&eacute;&acirc;tre institutionnel, peut-elle &ecirc;tre centrale et impacter le d&eacute;bat public&nbsp;? L&rsquo;un des facteurs de ce ph&eacute;nom&egrave;ne est certainement l&rsquo;esprit d&rsquo;insoumission qui anime le th&eacute;&acirc;tre polonais et son public. &Agrave; cela s&rsquo;ajoute la facult&eacute; de ces artistes &agrave; mettre en tension l&rsquo;intime et le collectif, cr&eacute;ant ainsi de nouveaux espaces qui font &eacute;cho aux pr&eacute;occupations de spectateurs dont une partie, elle-m&ecirc;me issue des marges, tente de s&rsquo;affirmer dans l&rsquo;espace public. Ce th&eacute;&acirc;tre ancr&eacute; dans la r&eacute;alit&eacute; socio-politique europ&eacute;enne, capable de d&eacute;passer les tabous, g&eacute;n&egrave;re la diversit&eacute; d&rsquo;un public toujours plus nombreux. Mais peut-on r&eacute;ellement parler de public lorsqu&rsquo;on &eacute;voque le nouveau th&eacute;&acirc;tre polonais&nbsp;? Cela para&icirc;t en quelque sorte r&eacute;ducteur, car si l&rsquo;on consid&egrave;re ses origines historiques, on constate que depuis le mouvement romantique, le th&eacute;&acirc;tre polonais est un th&eacute;&acirc;tre de la r&eacute;bellion qui n&rsquo;h&eacute;site pas &agrave; articuler ce que le peuple ne peut exprimer, et que les repr&eacute;sentations des spectacles s&rsquo;immiscent aussi bien dans l&rsquo;espace domestique qu&rsquo;elles investissent la place publique, s&rsquo;adressant autant &agrave; un individu, qu&rsquo;&agrave; une foule anonyme. Si l&rsquo;on consid&egrave;re, selon les &eacute;tudes de Martin S. Greenberg concernant la psychologie des foules, qu&rsquo;il est possible de diviser celles-ci en deux types (actif ou passif) et que l&rsquo;actif est synonyme de foule et le passif synonyme de public, alors le th&eacute;&acirc;tre polonais s&rsquo;adresse bien &agrave; la foule. N&eacute;anmoins, peut-on consid&eacute;rer le public comme une foule passive&nbsp;? Car comme l&rsquo;explique Jacques Ranci&egrave;re dans&nbsp;<em>Le Spectateur &eacute;mancip&eacute;</em>, les spectateurs &laquo;&nbsp;tracent leur propre chemin dans la for&ecirc;t des choses, des actes et des signes qui leur font face ou les entourent<sup><a href="#_ftn1" id="_ftnref1" name="_ftnref1">1</a></sup>&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;Tout spectateur est d&eacute;j&agrave; acteur de son histoire, tout acteur, tout homme d&rsquo;action spectateur de la m&ecirc;me histoire<sup><a href="#_ftn2" id="_ftnref2" name="_ftnref2">2</a></sup>&nbsp;&raquo;.</p> <p>&nbsp;</p> <p><b>Le th&eacute;&acirc;tre de l&rsquo;insoumission pour terreau</b></p> <p>D&eacute;j&agrave; au XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle, lorsque l&rsquo;&oelig;uvre fondatrice de Mickiewicz (1798-1855),&nbsp;<em>Dziady</em>&nbsp;(<em>Les A&iuml;eux</em>) (1823-1832), est interdite en Pologne, son auteur entre en r&eacute;sistance et fait imprimer sa pi&egrave;ce en France. Renon&ccedil;ant &agrave; sa forme spectaculaire, l&rsquo;&oelig;uvre circule alors clandestinement. Elle se d&eacute;ploie &agrave; travers un r&eacute;seau souterrain, v&eacute;hiculant une parole relay&eacute;e par diff&eacute;rents groupes de lecteurs qui la diffusent, tout en sachant qu&rsquo;ils se rendent passibles de la peine de mort. Ils garantissent ainsi la survie des&nbsp;<em>A&iuml;eux</em>&nbsp;et leur p&eacute;rennit&eacute;. Ce drame romantique acc&egrave;de enfin &agrave; la sc&egrave;ne en 1901, dans une adaptation du dramaturge et metteur en sc&egrave;ne, Stanisław Wispianski (1869-1907).</p> <p>Cette forme de th&eacute;&acirc;tre souterrain va perdurer, notamment &agrave; travers le Teatr Niezależny (Le th&eacute;&acirc;tre ind&eacute;pendant), fond&eacute; en 1942 &agrave; Cracovie par Tadeusz Kantor, dont les repr&eacute;sentations comme les r&eacute;p&eacute;titions sont confin&eacute;es dans des appartements ou des caves. Plus tard, le Th&eacute;&acirc;tre Laboratoire de Jerzy Grotowski ainsi que nombre de th&eacute;&acirc;tres &eacute;tudiants des ann&eacute;es 1970 sont eux aussi condamn&eacute;s sinon &agrave; la clandestinit&eacute;, tout au moins &agrave; la confidentialit&eacute;. Pourtant m&ecirc;me si ces repr&eacute;sentations th&eacute;&acirc;trales ne d&eacute;placent pas les foules, d&rsquo;une certaine mani&egrave;re, elles les mobilisent, pas &agrave; pas, discr&egrave;tement. En effet, ce th&eacute;&acirc;tre rend leur voix aux Polonais musel&eacute;s par un pouvoir autoritaire, se faisant l&rsquo;&eacute;cho de leurs angoisses et de leur r&eacute;volte, m&ecirc;me de fa&ccedil;on &eacute;touff&eacute;e. Et si les spectacles ont besoin du regard d&rsquo;un public pour exister, le public lui, a besoin de la parole du spectacle pour s&rsquo;exprimer. D&egrave;s lors, il n&rsquo;est pas &eacute;tonnant qu&rsquo;un spectacle puisse, en Pologne, soulever les foules et &ecirc;tre &agrave; l&rsquo;origine d&rsquo;une r&eacute;volte. C&rsquo;est ce qui se produit en mars 1968 avec le retour des A&iuml;eux &agrave; la sc&egrave;ne.</p> <p>Tout d&eacute;bute en 1967. Malgorzata Kumor-Wysocka<sup><a href="#_ftn3" id="_ftnref3" name="_ftnref3">3</a></sup>&nbsp;&eacute;crit &agrave; ce propos que Kazimierz Dejmek (1924-2002), alors directeur du Th&eacute;&acirc;tre National de Varsovie, choisit &agrave; l&rsquo;occasion du cinquantenaire de la r&eacute;volution d&rsquo;Octobre de mettre en sc&egrave;ne&nbsp;<em>Les A&iuml;eux</em>, sans la moindre censure, jugeant que l&rsquo;&oelig;uvre, elle-m&ecirc;me r&eacute;volutionnaire de par le fond et la forme, co&iuml;ncide parfaitement avec cette c&eacute;l&eacute;bration. Le public polonais, rompu au th&eacute;&acirc;tre allusif, est prompt &agrave; d&eacute;crypter ce qui se d&eacute;roule sur sc&egrave;ne et substitue la critique anti-sovi&eacute;tique &agrave; celle anti-tsariste de Mickiewicz. Constatant l&rsquo;enthousiasme du public qui applaudit avec ardeur des passages choisis du spectacle, le minist&egrave;re d&eacute;cide d&rsquo;en interdire les repr&eacute;sentations.&nbsp;<em>Les A&iuml;eux</em>&nbsp;quitte l&rsquo;affiche d&egrave;s le 30 janvier 1967, d&eacute;cision qui provoque des manifestations contre la censure, dont la violente r&eacute;pression mobilise tout le pays, aboutissant finalement aux manifestations du 8 mars 1968<sup><a href="#_ftn4" id="_ftnref4" name="_ftnref4">4</a></sup>.&nbsp;<em>Les A&iuml;eux</em>&nbsp;deviennent l&rsquo;embl&egrave;me de la r&eacute;volte de 68 qui f&eacute;d&egrave;re lyc&eacute;ens, &eacute;tudiants, intellectuels et une partie des ouvriers. Le metteur en sc&egrave;ne Dejmek perd son poste de directeur du Th&eacute;&acirc;tre National de Varsovie.</p> <p>En 1989, la chute du mur de Berlin, suivie de la d&eacute;sagr&eacute;gation de l&rsquo;empire sovi&eacute;tique, va lib&eacute;rer ce th&eacute;&acirc;tre r&eacute;sistant, qui, enfin sorti de l&rsquo;ombre, r&eacute;investit les sc&egrave;nes publiques.</p> <p>&nbsp;</p> <p><b>L&rsquo;av&egrave;nement d&rsquo;un nouveau th&eacute;&acirc;tre ou quand la marge gagne le centre</b></p> <p>Un nom &eacute;merge alors, celui du metteur en sc&egrave;ne Krystian Lupa, dont le travail de p&eacute;dagogue sera tout aussi reconnu que le travail artistique.</p> <p>En 2005, dans&nbsp;<em>Nouveau&nbsp;? Jeune&nbsp;? Plus jeune&nbsp;? Le th&eacute;&acirc;tre polonais apr&egrave;s 1989</em><sup><a href="#_ftn5" id="_ftnref5" name="_ftnref5">5</a></sup>, Piotr Gruszczyński tente dans la premi&egrave;re partie de cet article, intitul&eacute;e&nbsp;<em>La singularit&eacute; de Lupa</em>, de cerner la sp&eacute;cificit&eacute; du th&eacute;&acirc;tre de ce metteur en sc&egrave;ne&nbsp;:</p> <p><q>D&egrave;s le d&eacute;but [&agrave; la fin des ann&eacute;es 1970], Lupa &eacute;tait un artiste &agrave; part. Il cr&eacute;ait une sorte de th&eacute;&acirc;tre totalement individuel, original, centr&eacute; sur le th&egrave;me de l&rsquo;existence. [&hellip;] Bien que pendant de nombreuses ann&eacute;es, il ait &eacute;t&eacute; sous-estim&eacute;, voire trait&eacute; par la critique avec hostilit&eacute;, il a fid&egrave;lement suivi sa propre voie. En cons&eacute;quence, apr&egrave;s 1989, il &eacute;tait pratiquement le seul artiste pr&ecirc;t &agrave; entreprendre de nouveaux d&eacute;fis artistiques<sup><a href="#_ftn6" id="_ftnref6" name="_ftnref6">6</a></sup>.</q></p> <p>Gruszczyński poursuit, soulignant que pour le metteur en sc&egrave;ne, &laquo;&nbsp;le th&eacute;&acirc;tre doit &ecirc;tre une aventure intellectuelle dangereuse qui conduit le spectateur &agrave; une connaissance de soi inattendue, &agrave; des d&eacute;couvertes que l&rsquo;on refuse parfois d&rsquo;accepter, des d&eacute;couvertes soudaines et radicales&nbsp;&raquo;. On peut penser que cette d&eacute;marche n&rsquo;est pas r&eacute;serv&eacute;e au seul spectateur mais qu&rsquo;en premier lieu, il l&rsquo;exp&eacute;rimente lui-m&ecirc;me, dans son propre processus de cr&eacute;ation et qu&rsquo;il attend le m&ecirc;me &eacute;tat d&rsquo;esprit de ses com&eacute;diens ainsi que de ses &eacute;l&egrave;ves et assistants &agrave; la mise en sc&egrave;ne. Selon le th&eacute;&acirc;trologue, pour Lupa, &laquo;&nbsp;le th&eacute;&acirc;tre est presque un espace rituel, un espace de transition entre la dispersion quotidienne et un &eacute;tat essentiel de concentration.&nbsp;&raquo;. Il conclut son article par&nbsp;: &laquo;&nbsp;Pourquoi Lupa&nbsp;? Car en plus de cr&eacute;er son propre th&eacute;&acirc;tre, il l&rsquo;enseigne &eacute;galement &agrave; des com&eacute;diens et des metteurs en sc&egrave;ne<sup><a href="#_ftn7" id="_ftnref7" name="_ftnref7">7</a></sup>&nbsp;&raquo;.</p> <p>Il est vrai que la vision tr&egrave;s personnelle de Lupa concernant le processus de cr&eacute;ation th&eacute;&acirc;tral et l&rsquo;enseignement, qui passe par le prisme d&rsquo;un maillage des multiplicit&eacute;s de connexions, d&rsquo;individus, de disciplines ou de m&eacute;dium, toile de fond d&rsquo;un th&eacute;&acirc;tre v&eacute;ritablement contemporain, ainsi que par une volont&eacute; d&rsquo;&ecirc;tre le moins directif possible avec ses &eacute;l&egrave;ves, ont constitu&eacute; le riche terreau de trois g&eacute;n&eacute;rations de metteurs en sc&egrave;ne depuis le d&eacute;but des ann&eacute;es 1990. L&rsquo;art de sa transmission, se d&eacute;fiant de l&rsquo;enseignement acad&eacute;mique, a probablement permis &agrave; ces jeunes metteurs en sc&egrave;ne de d&eacute;velopper des esth&eacute;tiques tr&egrave;s diff&eacute;rentes, d&rsquo;essaimer dans la sph&egrave;re th&eacute;&acirc;trale et m&ecirc;me au-del&agrave; en se connectant &agrave; d&rsquo;autres sph&egrave;res artistiques. Ils offrent ainsi au th&eacute;&acirc;tre un espace de plus en plus vaste et par cons&eacute;quent un public de plus en plus nombreux parce que tr&egrave;s vari&eacute;.</p> <p>La premi&egrave;re g&eacute;n&eacute;ration ayant b&eacute;n&eacute;fici&eacute; de l&rsquo;enseignement de Lupa &agrave; la PWST de Cracovie, est compos&eacute;e de Krzysztof Warlikowski (n&eacute; en 1962), Grzegorz Jarzyna (n&eacute; en 1968), et Jan Klata (n&eacute; en 1973), pour les plus connus d&rsquo;entre eux. Ces jeunes metteurs en sc&egrave;ne sont &agrave; l&rsquo;origine d&rsquo;un mouvement qualifi&eacute; par Piotr Gruszczyński de Nouveau Brutalisme. Cette appellation est une r&eacute;f&eacute;rence au mouvement anglais du m&ecirc;me nom, parfois aussi nomm&eacute;&nbsp;<em>in-yer-face</em>&nbsp;(th&eacute;&acirc;tre-coup-de-poing), dont Sarah Kane est la repr&eacute;sentante la plus connue. Le Nouveau Brutalisme s&rsquo;ancre dans la r&eacute;alit&eacute; politique et sociale de la Pologne post-communiste, alors soumise &agrave; la violence d&rsquo;un d&eacute;veloppement capitaliste acc&eacute;l&eacute;r&eacute;. Pour ces jeunes artistes, aucun th&egrave;me n&rsquo;est plus tabou. L&rsquo;hyper-consommation, le sexe, la drogue, sont abord&eacute;s frontalement et m&ecirc;me de fa&ccedil;on crue sur sc&egrave;ne. Ce choix traduit le d&eacute;sir de d&eacute;passer le th&eacute;&acirc;tre allusif pratiqu&eacute; depuis le romantisme et m&ecirc;me de s&rsquo;en lib&eacute;rer, afin de pouvoir enfin d&eacute;battre ouvertement des probl&egrave;mes de soci&eacute;t&eacute;. Michał Pawlowski &eacute;crit &agrave; ce propos, &laquo;&nbsp;Ce mouvement a gagn&eacute; l&rsquo;appui de la critique et des th&eacute;&acirc;trologues, mais surtout du jeune public qui cherche au th&eacute;&acirc;tre le reflet des d&eacute;bats de soci&eacute;t&eacute;<sup><a href="#_ftn8" id="_ftnref8" name="_ftnref8">8</a></sup>&nbsp;&raquo;. Le critique Roman Pawłowski de la&nbsp;<em>Gazeta Wyborcza</em>&nbsp;qualifie ce mouvement de &laquo;&nbsp;G&eacute;n&eacute;ration porno&nbsp;&raquo; et lui consacre un ouvrage<sup><a href="#_ftn9" id="_ftnref9" name="_ftnref9">9</a></sup>. Quant au th&eacute;&acirc;trologue et dramaturge Piotr Gruszczyński, qui a vu dans ce ph&eacute;nom&egrave;ne l&rsquo;&eacute;mergence d&rsquo;un nouveau r&eacute;alisme brutal, il r&eacute;dige un essai,&nbsp;<em>Ojcob&oacute;jcy. Młodsi zdolniejsy w teatrze polskim</em>&nbsp;[<em>Les parricides. Les jeunes les plus dou&eacute;s dans le th&eacute;&acirc;tre polonais</em>]<sup><a href="#_ftn10" id="_ftnref10" name="_ftnref10">10</a></sup>, &eacute;dit&eacute; &agrave; Varsovie en 2003.</p> <p>Cette nouvelle vague th&eacute;&acirc;trale entend bien profiter de son succ&egrave;s public et critique pour acc&eacute;der aux postes-cl&eacute;s que repr&eacute;sente la direction de th&eacute;&acirc;tres publics dans l&rsquo;&eacute;volution du fonctionnement de ces institutions. Contrairement &agrave; Krystian Lupa, les nouveaux brutalistes voient dans la gestion d&rsquo;un th&eacute;&acirc;tre public la perspective d&rsquo;une plus grande libert&eacute; de cr&eacute;ation. Cette responsabilit&eacute; leur offre aussi les moyens de cr&eacute;er une troupe permanente de jeunes com&eacute;diens unis dans une m&ecirc;me vision du th&eacute;&acirc;tre, ainsi que la possibilit&eacute; de programmer des spectacles d&rsquo;autres metteurs en sc&egrave;ne, jusqu&rsquo;ici ignor&eacute;s voire marginalis&eacute;s. Grzegorz Jarzyna prend la t&ecirc;te du TR de Varsovie d&egrave;s 1998<sup><a href="#_ftn11" id="_ftnref11" name="_ftnref11">11</a></sup>. En 2007, Krzysztof Warlikowski fonde le Nowy Teatr de Varsovie. Prudent, il d&eacute;cide d&rsquo;en assurer uniquement la direction artistique, pr&eacute;f&eacute;rant confier la direction administrative du th&eacute;&acirc;tre &agrave; l&rsquo;une de ses proches collaboratrices, Karolina Ochab. Enfin, Jan Klata se voit confier la direction de l&rsquo;un des deux th&eacute;&acirc;tres nationaux de Pologne, le prestigieux Stary Teatr de Cracovie, qu&rsquo;il assure de 2013 &agrave; 2017. Ces artistes deviennent des directeurs de th&eacute;&acirc;tres charismatiques. L&rsquo;esth&eacute;tique de Jarzyna et de sa troupe artistique est qualifi&eacute;e de &laquo;&nbsp;G&eacute;n&eacute;ration TR&nbsp;&raquo;, Krzysztof Warlikowski fait figure de&nbsp;<em>rock star</em>&nbsp;et une file de jeunes gens l&rsquo;attend pr&egrave;s de l&rsquo;entr&eacute;e des artistes lorsqu&rsquo;il se produit dans les festivals de th&eacute;&acirc;tre polonais. Par ailleurs, son th&eacute;&acirc;tre devient un lieu o&ugrave; les jeunes homosexuels, apr&egrave;s avoir &eacute;t&eacute; invisibilis&eacute;s par l&rsquo;&Eacute;tat, se sentent vus et entendus.</p> <p>Un renouveau th&eacute;&acirc;tral tant artistique qu&rsquo;institutionnel a bien lieu, soutenu par le public et la critique. La Pologne n&rsquo;est plus &laquo;&nbsp;nulle part<sup><a href="#_ftn12" id="_ftnref12" name="_ftnref12">12</a></sup>&nbsp;&raquo;, bien ancr&eacute;e dans l&rsquo;Europe, avec un art th&eacute;&acirc;tral qui la distingue et lui donne une visibilit&eacute; au-del&agrave; m&ecirc;me des fronti&egrave;res europ&eacute;ennes.</p> <p>L&rsquo;accession du PIS<sup><a href="https://alepreuve.org/content/lupa-et-les-nouvelles-generations-theatrales-polonaises-un-reseau-souterrain-qui-draine-la#_ftn13" id="_ftnref13" name="_ftnref13" title="">13</a></sup>&nbsp;au pouvoir, lors des &eacute;lections de 2015, met un frein &agrave; cet &eacute;panouissement.</p> <p>&nbsp;</p> <p><b>Fragilisation</b></p> <p>Krystian Lupa d&eacute;clare alors dans la presse se sentir comme un &eacute;tranger dans son propre pays et publie un manifeste<sup><a href="#_ftn14" id="_ftnref14" name="_ftnref14">14</a></sup>. Inquiet de la mont&eacute;e des partis populistes en Europe, dont l&rsquo;accession du PIS au pouvoir est l&rsquo;un des r&eacute;sultats, il envisage de mettre en sc&egrave;ne&nbsp;<em>Le Proc&egrave;s</em>&nbsp;de Kafka.</p> <p>Ce projet est programm&eacute; en 2016 au Teatr Polski de Wroclaw (TPL), avec lequel il collabore r&eacute;guli&egrave;rement. Il appr&eacute;cie particuli&egrave;rement le travail de son directeur, Krzysztof Mieszkowski, dont la programmation traduit l&rsquo;exigeante vision artistique et a permis au TPL de devenir l&rsquo;un des meilleurs th&eacute;&acirc;tres de Pologne, ainsi que l&rsquo;un des plus critiques et des plus ouvertement rebelles aux valeurs conservatrices du PIS. C&rsquo;est pour ces derni&egrave;res raisons et parce qu&rsquo;il refuse les compromis que Mieszkowski est le premier directeur de th&eacute;&acirc;tre &agrave; &ecirc;tre &eacute;vinc&eacute;. Pour la premi&egrave;re fois depuis 1989, un ministre de la culture essaie d&rsquo;appliquer une censure pr&eacute;ventive &agrave; un spectacle, pour soup&ccedil;on de pornographie. Il s&rsquo;agit de&nbsp;<em>Śmierć i dziewczyna</em>&nbsp;(<em>La Jeune fille et la mort</em>)<sup><a href="#_ftn15" id="_ftnref15" name="_ftnref15">15</a></sup>&nbsp;de la metteuse en sc&egrave;ne Ewelyna Marciniak (n&eacute;e en 1984), d&rsquo;apr&egrave;s Elfriede Jelinek. Le th&eacute;&acirc;tre r&eacute;siste et les repr&eacute;sentations ont lieu. La derni&egrave;re grosse production de Mieszkowski restera&nbsp;<em>Dziady</em>&nbsp;(<em>Les</em>&nbsp;<em>A&iuml;eux</em>), mis en sc&egrave;ne par Michał Zadara (n&eacute; en 1976) et son assistante Marta Streker, &eacute;galement assistante de Lupa sur&nbsp;<em>Le Proc&egrave;</em>s, &agrave; la m&ecirc;me p&eacute;riode. Pour la premi&egrave;re fois dans l&rsquo;histoire du th&eacute;&acirc;tre, le spectacle&nbsp;<em>Les A&iuml;eux</em>&nbsp;est repr&eacute;sent&eacute; dans son int&eacute;gralit&eacute;. La premi&egrave;re a lieu le 20 f&eacute;vrier 2016 et la repr&eacute;sentation dure 810 minutes avec sept entractes, d&eacute;butant &agrave; midi elle se termine &agrave; 01h30. L&rsquo;affiche est une photographie de la foule des &eacute;tudiants de 1968, suite &agrave; la mise en sc&egrave;ne des&nbsp;<em>A&iuml;eux</em>&nbsp;par Kazimierz Dejmek au Th&eacute;&acirc;tre National de Varsovie fin 1967.</p> <p>L&rsquo;esprit d&rsquo;insubordination de Mieszkowski conduit au non-renouvellement de son contrat et &agrave; son remplacement par Cesary Morawski, acteur de&nbsp;<em>sitcom</em>&nbsp;et de th&eacute;&acirc;tre de boulevard, proche du ministre de la Culture. Krystian Lupa, qui avait, d&egrave;s le d&eacute;but du bras de fer avec la R&eacute;gion et le minist&egrave;re de la Culture, suspendu les r&eacute;p&eacute;titions du&nbsp;<em>Proc&egrave;s</em>&nbsp;d&eacute;but&eacute;es quatre mois plus t&ocirc;t, finit par annuler le projet.</p> <p>Une lutte acharn&eacute;e est livr&eacute;e contre l&rsquo;ing&eacute;rence de l&rsquo;&Eacute;tat dans la cr&eacute;ation artistique et plus largement dans la sph&egrave;re culturelle, &agrave; Varsovie comme &agrave; Wroclaw, et dans tous les th&eacute;&acirc;tres polonais qui se sentent concern&eacute;s par cette situation. Ce combat est men&eacute; non seulement par les professionnels du spectacle, mais aussi par les spectateurs qui, parfois r&eacute;unis en collectif comme &agrave; Wroclaw<sup><a href="#_ftn16" id="_ftnref16" name="_ftnref16">16</a></sup>, manifestent aussi bien sur la voie publique, dans les th&eacute;&acirc;tres, que sur les r&eacute;seaux sociaux, ainsi que par tous ceux qui d&eacute;fendent la libert&eacute; d&rsquo;expression. On peut voir sur les photos de presse une foule assez dense, mass&eacute;e au pied du Palais de la Culture, lors d&rsquo;une manifestation &agrave; Varsovie en 2016.</p> <p>La r&eacute;sistance se manifeste aussi dans la volont&eacute; de quatre directeurs de th&eacute;&acirc;tre de produire&nbsp;<em>Le Proc&egrave;s</em>&nbsp;de Krystian Lupa, en lui assurant une totale libert&eacute; de cr&eacute;ation. Parmi eux, deux anciens &eacute;l&egrave;ves et assistants de Lupa, Krzysztof Warlikowski dont le Nowy Teatr est le producteur principal ainsi que Grzegorz Jarzyna, directeur du TR Warszawa. Le Teatr Powszechny et le Studio Teatrgaleria sont coproducteurs du spectacle et ont, par ailleurs, engag&eacute; dans leur troupe permanente respective les acteurs du&nbsp;<em>Proc&egrave;s</em>, d&eacute;missionnaires ou licenci&eacute;s du Teatr Polski de Wroclaw. L&rsquo;entraide fonctionne, les liens se renforcent et la premi&egrave;re du&nbsp;<em>Proc&egrave;s</em>&nbsp;a lieu le 15 novembre 2017 au Nowy Teatr de Varsovie.</p> <p>Dans le m&ecirc;me temps, le metteur en sc&egrave;ne Jan Klata perd la direction du Stary Teatr de Cracovie, qui en tant que th&eacute;&acirc;tre national d&eacute;pend directement du Minist&egrave;re de la Culture. Plus r&eacute;cemment, en f&eacute;vrier 2022, Krzysztof Głuchowski (n&eacute; en 1966), acteur et metteur en sc&egrave;ne, directeur du Teatr Juliusz Słowacki &agrave; Cracovie depuis 2016, est l&rsquo;objet d&rsquo;une proc&eacute;dure visant &agrave; son &eacute;viction. Dipl&ocirc;m&eacute; de la PWST de Cracovie en 1990, section acteur, il a lui aussi &eacute;t&eacute; l&rsquo;&eacute;l&egrave;ve de Lupa, puis acteur dans deux de ses spectacles. Sa d&eacute;cision de programmer&nbsp;<em>Les A&iuml;eux</em>&nbsp;de Maja Kleczewska d&rsquo;apr&egrave;s Mickiewicz, a acc&eacute;l&eacute;r&eacute; sa chute. L&rsquo;adaptation est jug&eacute;e politiquement trop critique par les responsables gouvernementaux. Le directeur essaie de se battre contre cette d&eacute;cision, soutenu par toute l&rsquo;&eacute;quipe du th&eacute;&acirc;tre, le public, la communaut&eacute; du Public TP de Wroclaw, ainsi que la communaut&eacute; artistique. Aujourd&rsquo;hui, la metteuse en sc&egrave;ne Monika Strzępka (n&eacute;e en 1976), directrice du Th&eacute;&acirc;tre Dramatique de Varsovie depuis le d&eacute;but du mois de septembre, est d&eacute;mise de ses fonction sur d&eacute;cision de la R&eacute;gion qui ne peut cautionner l&rsquo;expression &nbsp;&raquo;. Rafał Trzaskowski, maire de Varsovie, a d&eacute;clar&eacute; que la d&eacute;cision de contr&ocirc;le de la R&eacute;gion, qui est une attaque &agrave; l&rsquo;autonomie de la ville de Varsovie, fera l&rsquo;objet d&rsquo;un recours. Une p&eacute;tition, en soutien &agrave; Monika Strzępka, circule sur les r&eacute;seaux sociaux, notamment sur le Facebook du Teatr Polski w Podziemiu&nbsp;/&nbsp;Theater Polski in the Underground.</p> <p>L&rsquo;implantation du nouveau th&eacute;&acirc;tre polonais au niveau de la direction des institutions th&eacute;&acirc;trales est tr&egrave;s fragile, les lieux alternatifs de qualit&eacute;, rarissimes, et sans grande visibilit&eacute;. Pourtant, certains artistes essaient de cr&eacute;er de nouveaux lieux en r&eacute;ponse aux attaques r&eacute;p&eacute;t&eacute;es de l&rsquo;&Eacute;tat qui rendent leur situation pr&eacute;caire et leur avenir incertain.</p> <p>C&rsquo;est ainsi que, face &agrave; la mainmise du Minist&egrave;re de la Culture sur les institutions th&eacute;&acirc;trales, le Teatr Polski w Podziemiu&nbsp;/&nbsp;Theater Polski in the Underground (ou TP) devient un collectif tr&egrave;s actif de la r&eacute;sistance th&eacute;&acirc;trale. La page Facebook du collectif, qui lui permet de garder le contact avec ses soutiens diss&eacute;min&eacute;s dans le pays ou &agrave; l&rsquo;&eacute;tranger, s&rsquo;est tr&egrave;s vite mu&eacute;e en m&eacute;dia d&rsquo;activisme artistique. Durant la lutte, des spectacles performatifs organis&eacute;s dans des lieux d&rsquo;accueil non d&eacute;di&eacute;s de Wroclaw sont mis en ligne, parfois m&ecirc;me diffus&eacute;s en direct sur Facebook. Les performances sont cr&eacute;&eacute;es par des metteurs en sc&egrave;ne et des acteurs qui ont fait partie du Teatr Polski de Wroclaw et qui ont &agrave; pr&eacute;sent, pour la plupart, int&eacute;gr&eacute;s d&rsquo;autres th&eacute;&acirc;tres publics polonais. &Agrave; cette &eacute;poque (2016), tous travaillent gratuitement &agrave; ces performances d&rsquo;un soir, y compris les techniciens. R&eacute;sister &agrave; l&rsquo;oppression est leur motivation. Le Teatr Polski w Podziemiu renoue ainsi avec la tradition polonaise des th&eacute;&acirc;tres non institutionnels. Leur public les suit aux quatre coins de la ville et ceux qui ne peuvent se d&eacute;placer les suivent sur les r&eacute;seaux sociaux.</p> <p>Aujourd&rsquo;hui, ce collectif a un site en ligne<sup><a href="#_ftn17" id="_ftnref17" name="_ftnref17">17</a></sup>&nbsp;et depuis 2019, une salle de spectacle, PIEKARNIA, install&eacute;e dans un ancien fournil de Wroclaw. Le TP, dont le directeur artistique est Piotr Rudzki, l&rsquo;ancien directeur litt&eacute;raire du Teatr Polski de Wroclaw, est soutenu par la fondation Fundacja Teatr Polski &ndash; TP dla Sztuki (la Fondation Teatr Polski &ndash; TP pour l&rsquo;Art), dont Piotr Rudzki est le pr&eacute;sident. Le collectif b&eacute;n&eacute;ficie aussi de subventions, entre autres de la ville de Wroclaw, et de partenariats, avec par exemple l&rsquo;institut Grotowski. Ces financements leur permettent d&rsquo;assurer plusieurs repr&eacute;sentations des spectacles programm&eacute;s et d&rsquo;avoir une &eacute;quipe artistique permanente. Le TP reste fid&egrave;le &agrave; ses choix artistiques exigeants, de m&ecirc;me qu&rsquo;aux anciens artistes embl&eacute;matiques du TPL de Wroclaw, qui eux aussi continuent de collaborer avec le collectif d&egrave;s qu&rsquo;ils le peuvent. Plusieurs metteurs en sc&egrave;ne ayant travaill&eacute; avec Lupa ont d&eacute;j&agrave; cr&eacute;&eacute; des spectacles avec le collectif&nbsp;: Krzysztof Garbaczewski (n&eacute; en 1983), Michał Borczuch (n&eacute; en 1979) et en novembre/d&eacute;cembre 2023 aura lieu la premi&egrave;re d&rsquo;<em>Elisabeth II</em>&nbsp;de Krystian Lupa, d&rsquo;apr&egrave;s Thomas Bernhard, un spectacle d&rsquo;Oskar Sadowski (n&eacute; en 1993) est aussi annonc&eacute;.</p> <p>Comme indiqu&eacute; sur leur site, ce jeune th&eacute;&acirc;tre a d&eacute;j&agrave; re&ccedil;u plusieurs prix pour ses activit&eacute;s dont le prix &laquo;&nbsp;Kamyk Puzyny<sup><a href="#_ftn18" id="_ftnref18" name="_ftnref18">18</a></sup>&nbsp;&raquo; pour &laquo;&nbsp;l&rsquo;activit&eacute; th&eacute;&acirc;trale combinant l&rsquo;art et la vie, l&rsquo;originalit&eacute; cr&eacute;ative avec une implication dans les affaires publiques&nbsp;&raquo;. Il est aussi pr&eacute;cis&eacute; dans la pr&eacute;sentation du th&eacute;&acirc;tre&nbsp;:</p> <p><q>Nous construisons un th&eacute;&acirc;tre qui s&rsquo;inscrit dans la continuit&eacute; du parcours cr&eacute;atif suivi par l&rsquo;&eacute;quipe du T[PL] tout au long de la d&eacute;cennie 2006-2016. Nos imp&eacute;ratifs sont&nbsp;: la libert&eacute; de cr&eacute;ation, la pr&eacute;paration de spectacles au plus haut niveau artistique et le dialogue avec le public<sup><a href="#_ftn19" id="_ftnref19" name="_ftnref19">19</a></sup>.</q></p> <p>Ainsi, le Teatr Polski de Wroclaw apr&egrave;s s&rsquo;&ecirc;tre d&eacute;mat&eacute;rialis&eacute; pour devenir le TP, un th&eacute;&acirc;tre &laquo;&nbsp;virtuel&nbsp;&raquo; sur une page Facebook, s&rsquo;est finalement r&eacute;incarn&eacute; dans un lieu, non-d&eacute;di&eacute; certes, mais qu&rsquo;il s&rsquo;est appropri&eacute; et qui lui rend une visibilit&eacute;. Dor&eacute;navant, il permet aux artistes d&rsquo;avoir &laquo;&nbsp;une maison&nbsp;&raquo;, c&rsquo;est comme cela qu&rsquo;ils surnommaient le TPL du temps de Mieszkowski, et de cr&eacute;er dans de bonnes conditions au sein d&rsquo;une famille qui les soutient.</p> <p>Ce fonctionnement horizontal dont les connexions constituent des alliances capables d&rsquo;abolir les fronti&egrave;res, n&rsquo;est pas sans rappeler le rhizome de Deleuze et Guattari. Lorsque l&rsquo;on observe le processus de cr&eacute;ation des spectacles de ces metteurs en sc&egrave;ne, il appara&icirc;t que le d&eacute;veloppement du nouveau th&eacute;&acirc;tre polonais est &agrave; l&rsquo;image de leur fa&ccedil;on de travailler et du fonctionnement de leur &eacute;quipe.</p> <p>&nbsp;</p> <p><b>Un d&eacute;veloppement rhizomatique irr&eacute;pressible</b></p> <p><q>Ne soyez pas un ni multiples soyez des multiplicit&eacute;s<sup><a href="#_ftn20" id="_ftnref20" name="_ftnref20">20</a></sup>&nbsp;!</q></p> <p>Pour Gruszczyński, &laquo;&nbsp;l&rsquo;existence et l&rsquo;&eacute;thique sont devenues les th&egrave;mes fondamentaux du nouveau th&eacute;&acirc;tre polonais&nbsp;&raquo; que repr&eacute;sentent Lupa et les trois g&eacute;n&eacute;rations de metteurs en sc&egrave;ne qui se r&eacute;clament de son th&eacute;&acirc;tre. En effet, la libert&eacute; de penser et de cr&eacute;er qu&rsquo;ils ont exp&eacute;riment&eacute;e aupr&egrave;s de lui, leur a permis de rencontrer leur singularit&eacute; artistique, en affirmant leur propre vision du monde et leur propre esth&eacute;tique. Lupa les a ouverts &agrave; une pens&eacute;e nomade, faite d&rsquo;associations d&rsquo;id&eacute;es, de connexions de domaines et de savoirs h&eacute;t&eacute;rog&egrave;nes. Ainsi, plus qu&rsquo;un ma&icirc;tre, Lupa est un stimulateur qui pulse un flux continu d&rsquo;&eacute;nergie irriguant le territoire th&eacute;&acirc;tral polonais. Plus qu&rsquo;un enseignant, c&rsquo;est quelqu&rsquo;un qui accompagne et permet &agrave; des artistes de se d&eacute;velopper en choisissant leur propre chemin. Il d&eacute;clare m&ecirc;me lors d&rsquo;un entretien avec l&rsquo;un de ses anciens &eacute;l&egrave;ves Adam Nawojczyk, &agrave; propos de ses cours &agrave; la PWST de Cracovie&nbsp;: &laquo;&nbsp;Si l&rsquo;on ne d&eacute;couvre pas quelque chose ensemble, c&rsquo;est tout simplement improductif et inefficace<sup><a href="#_ftn21" id="_ftnref21" name="_ftnref21">21</a></sup>&nbsp;&raquo;. Cette r&eacute;flexion semble une nouvelle fois valoir tant pour le processus de cr&eacute;ation que pour la repr&eacute;sentation th&eacute;&acirc;trale, incluant aussi bien les artistes que les spectateurs.</p> <p>Ces artistes ont en commun une propension au mouvement, l&rsquo;organicit&eacute; est le ma&icirc;tre-mot de leur processus de cr&eacute;ation. Leur d&eacute;veloppement rhizomatique est stimul&eacute; par leurs liens interg&eacute;n&eacute;rationnels et interdisciplinaires. Ces metteurs en sc&egrave;ne (y compris Lupa) ont su cr&eacute;er de v&eacute;ritables communaut&eacute;s artistiques dont certains membres sont reli&eacute;s &agrave; plusieurs d&rsquo;entre elles simultan&eacute;ment, comme les acteurs, dramaturges, sc&eacute;nographes, musiciens, costumiers, vid&eacute;astes, etc., qui travaillent sur le long terme avec diff&eacute;rents metteurs en sc&egrave;ne, en alternance ou parfois m&ecirc;me sur deux projets simultan&eacute;ment sur une m&ecirc;me p&eacute;riode. Ces connexions multiples permettent &agrave; chacun de ces artistes (acteurs, metteurs en sc&egrave;ne, etc.) d&rsquo;agrandir sa famille, d&rsquo;&eacute;tendre son champ d&rsquo;action et de toucher non pas un mais des publics.</p> <p>C&rsquo;est la notion de collectif qui sous-tend ce d&eacute;veloppement, un certain esprit de famille. Lupa ainsi que ces jeunes g&eacute;n&eacute;rations de metteurs en sc&egrave;ne, travaillent le plus souvent avec quelques collaborateurs attitr&eacute;s qui constituent le noyau dur de leur &eacute;quipe artistique. Cependant, et de fa&ccedil;on r&eacute;guli&egrave;re, de nouveaux artistes int&egrave;grent l&rsquo;&eacute;quipe, ponctuellement ou d&eacute;finitivement.</p> <p>Ce fonctionnement, sous forme de famille artistique, induit les notions de confiance et de partage qui se traduisent par un ph&eacute;nom&egrave;ne commun, celui d&rsquo;une surexposition de l&rsquo;intime. Cette intimit&eacute; na&icirc;t au tout d&eacute;but du processus de cr&eacute;ation commun, lors du travail &agrave; la table. C&rsquo;est un moment privil&eacute;gi&eacute; d&rsquo;&eacute;changes o&ugrave; la d&eacute;couverte du projet propos&eacute; par le metteur en sc&egrave;ne est l&rsquo;occasion d&rsquo;aborder des sujets tr&egrave;s personnels propices aux confidences qui viendront renforcer les liens de l&rsquo;&eacute;quipe et nourrir le projet commun. Non seulement cette intimit&eacute; est partag&eacute;e au sein de l&rsquo;&eacute;quipe mais plus tard lors des r&eacute;p&eacute;titions, elle peut aussi donner lieu &agrave; des improvisations face cam&eacute;ra. Ces enregistrements, traces des r&eacute;p&eacute;titions, peuvent ensuite &ecirc;tre diffus&eacute;es sur sc&egrave;ne lors des repr&eacute;sentations. Devenant partie int&eacute;grante du spectacle, l&rsquo;intimit&eacute; est rendue publique, incluant les spectateurs dans le monde int&eacute;rieur des artistes et des personnages.</p> <p>D&egrave;s lors, les acteurs, au m&ecirc;me titre que le dramaturge ou le metteur en sc&egrave;ne, deviennent coauteurs du spectacle. Ce processus atteste d&rsquo;une volont&eacute; de d&eacute;-hi&eacute;rarchisation des r&ocirc;les de la part du metteur en sc&egrave;ne. Cette structure est particuli&egrave;rement pr&eacute;gnante chez Oskar Sadowski qui n&rsquo;h&eacute;site pas &agrave; engager sur ses projets des acteurs non-professionnels, venus de sph&egrave;res artistiques autres que celle du th&eacute;&acirc;tre et appartenant le plus souvent &agrave; son cercle d&rsquo;amis. En travaillant avec Lupa, il dit avoir compris l&rsquo;importance de se cr&eacute;er une famille et d&rsquo;&ecirc;tre attentif au potentiel des gens que l&rsquo;on rencontre. Lui-m&ecirc;me a eu la chance que Lupa acc&egrave;de &agrave; sa demande d&rsquo;assistanat sur&nbsp;<em>Wycinka</em>&nbsp;/&nbsp;<em>Holzf&auml;llen</em>, alors qu&rsquo;il venait tout juste de terminer le lyc&eacute;e et n&rsquo;&eacute;tait donc affili&eacute; &agrave; aucune &eacute;cole de th&eacute;&acirc;tre.</p> <p>&Agrave; la port&eacute;e artistique des &oelig;uvres est associ&eacute;e une port&eacute;e politique. Le positionnement de ces metteurs en sc&egrave;ne dans le paysage th&eacute;&acirc;tral polonais et plus largement soci&eacute;tal est &agrave; l&rsquo;image de leur volont&eacute; de d&eacute;-hi&eacute;rarchiser les rapports au sein m&ecirc;me de leur processus de cr&eacute;ation. En effet, &agrave; l&rsquo;&Eacute;tat polonais fortement centralis&eacute; et autoritaire, la nouvelle sc&egrave;ne th&eacute;&acirc;trale polonaise oppose un th&eacute;&acirc;tre des marges tant dans son fonctionnement interne que dans les th&egrave;mes trait&eacute;s.</p> <p>Ainsi, Michał Borczuch (n&eacute; en 1979) aborde le th&egrave;me des LGBTQ+ dans son spectacle&nbsp;<em>Mieszkanie na Uranie</em>&nbsp;(<em>Un appartement sur Uranus</em>) cr&eacute;&eacute; en 2022 au Nowy Teatr de Varsovie, d&rsquo;apr&egrave;s le recueil de Paul B. Preciado et r&eacute;alise un film,&nbsp;<em>Warany z Komodo</em>&nbsp;(<em>Les Dragons de Komodo</em>) avec des autistes. Oskar Sadowski, qui soutient le mouvement LGBTQ+, &eacute;voque dans une lecture performative, intitul&eacute;e&nbsp;<em>Muzeum rzeczy zagubionych</em><sup><a href="#_ftn22" id="_ftnref22" name="_ftnref22">22</a></sup>&nbsp;(<em>Le Mus&eacute;e des choses perdues</em>), la personnalit&eacute; complexe du compositeur Karol Szymanowski (1882-1937), sans &eacute;luder son homosexualit&eacute;, les sc&eacute;nographies de Sadowski jouant constamment avec l&rsquo;imagerie gay.</p> <p>Plus largement, qu&rsquo;il s&rsquo;agisse de Krystian Lupa, Michał Borczuch, ou Oskar Sadowski, une attention particuli&egrave;re est port&eacute;e aux marginaux, aux voix opprim&eacute;es mais aussi aux personnages secondaires des &oelig;uvres litt&eacute;raires qu&rsquo;ils adaptent.</p> <p>Faire foule, c&rsquo;est rassembler, inclure et sur sc&egrave;ne braquer les projecteurs sur les personnes invisibilis&eacute;es d&rsquo;une soci&eacute;t&eacute; s&eacute;gr&eacute;gative. Ces artistes font foule car le th&eacute;&acirc;tre est pour eux une agora o&ugrave; l&rsquo;on peut d&eacute;battre, et o&ugrave; les marges deviennent le centre du d&eacute;bat. Ils repr&eacute;sentent une v&eacute;ritable force d&rsquo;opposition au gouvernement liberticide et l&rsquo;&Eacute;tat, qui tente de les museler, l&rsquo;a bien compris.</p> <p>&nbsp;</p> <p><b>Une nouvelle cartographie de la sc&egrave;ne th&eacute;&acirc;trale&nbsp;: de l&rsquo;utopie aux h&eacute;t&eacute;rotopies</b></p> <p><q>Si la carte s&rsquo;oppose au calque, c&rsquo;est qu&rsquo;elle est toute enti&egrave;re tourn&eacute;e vers une exp&eacute;rimentation en prise sur le r&eacute;el. [&hellip;] Elle fait elle-m&ecirc;me partie du rhizome. La carte est ouverte, elle est connectable dans toutes ses dimensions&nbsp;; d&eacute;montable, renversable, susceptible de recevoir constamment des modifications. Elle peut &ecirc;tre d&eacute;chir&eacute;e, renvers&eacute;e, s&rsquo;adapter &agrave; des montages de toute nature&nbsp;; &ecirc;tre mise en chantier par un individu, un groupe, une formation sociale<sup><a href="#_ftn23" id="_ftnref23" name="_ftnref23">23</a></sup>.</q></p> <p>Lors d&rsquo;un entretien publi&eacute; dans le magazine&nbsp;<em>Espaces</em>, Lupa raconte au metteur en sc&egrave;ne Michał Borczuch, son ancien &eacute;l&egrave;ve et assistant, que lorsqu&rsquo;il &eacute;tait enfant, sa m&egrave;re et lui lisaient le soir dans la cuisine, assis sur une couverture qui semblait d&eacute;limiter leur monde. Sa m&egrave;re entrait dans ce qu&rsquo;il d&eacute;crit comme une fureur de lecture, les amenant tous deux dans une sorte de transe. Lors d&rsquo;un entretien cet &eacute;t&eacute;, alors que j&rsquo;&eacute;voquais cet article, il m&rsquo;a confi&eacute; qu&rsquo;&agrave; la m&ecirc;me p&eacute;riode, tous deux avaient aussi invent&eacute; un pays au sein de l&rsquo;enclos du poulailler, personnifi&eacute; le coq et ses poules en leur inventant des histoires et des aventures. Lorsque l&rsquo;un des volatiles &eacute;tait mang&eacute;, sa m&egrave;re &eacute;voquait un d&eacute;part pour l&rsquo;Am&eacute;rique. Un peu plus tard, il inventa le pays de Juskunia et sa capitale Yelo, tra&ccedil;a des cartes imaginaires, partagea ces histoires avec ses camarades de jeu dans le jardin. Tout cela semble renfermer le germe de son th&eacute;&acirc;tre, comme le d&eacute;chiffrage commun d&rsquo;un texte, ainsi que sa propension &agrave; cartographier les pays imaginaires d&rsquo;alors comme l&rsquo;espace sc&eacute;nique d&rsquo;aujourd&rsquo;hui. La ligne rouge de ses sc&eacute;nographies trace une fronti&egrave;re virtuelle sur le plateau entre acteurs et public qui peut selon les spectacles remonter le long des murs et former un ou des cadre(s) enserrant certains espaces comme des tableaux.</p> <p>On peut remarquer que ce d&eacute;sir de cartographier l&rsquo;espace est partag&eacute; par les jeunes metteurs en sc&egrave;ne.</p> <p>C&rsquo;est ce qui appara&icirc;t avec le spectacle&nbsp;<em>Respublika</em>, cr&eacute;&eacute; en 2020 au Th&eacute;&acirc;tre Dramatique National de Lituanie &agrave; Vilnius par l&rsquo;ancien assistant et vid&eacute;aste de Lupa, le metteur en sc&egrave;ne et artiste multim&eacute;dia, Łukasz Twarkowski (n&eacute; en 1983). Ce spectacle est l&rsquo;histoire d&rsquo;une utopie, le r&ecirc;ve d&rsquo;un nouveau mod&egrave;le de soci&eacute;t&eacute; qui donne lieu &agrave; la tentative de mettre en place ce projet, cr&eacute;ant des h&eacute;t&eacute;rotopies successives, de r&eacute;p&eacute;titions en repr&eacute;sentations.</p> <p>Pour ce projet, les acteurs et le metteur en sc&egrave;ne forment une petite communaut&eacute; qui va vivre pendant quelques semaines au fond de la for&ecirc;t lituanienne dans des caravanes. Durant ces r&eacute;p&eacute;titions &laquo;&nbsp;en plein air&nbsp;&raquo;, Twarkowski demande aux acteurs de lire l&rsquo;essai&nbsp;<em>Homos Deus &ndash; une br&egrave;ve histoire du futur</em>&nbsp;de Yuval Noah Harari, source principale de son inspiration. Au cours de cette p&eacute;riode, chacun dispose d&rsquo;un &laquo;&nbsp;revenu universel&nbsp;&raquo; de 20 euros par jour qui sont rapidement mis en commun. Le principe de revenu universel questionne le concept de travail. Les artistes, livr&eacute;s &agrave; eux-m&ecirc;mes, se filment et se confient face cam&eacute;ra. Tr&egrave;s rapidement, la musique &eacute;lectro et la danse unissent le groupe.</p> <p>Quand vient la premi&egrave;re du spectacle, la repr&eacute;sentation a lieu dans un vaste studio du p&ocirc;le cin&eacute;ma de Vilnius o&ugrave; le campement de la communaut&eacute; est recr&eacute;&eacute; en miniature (cuisine, chambres, douche, sauna, une petite caravane dans laquelle on peut se filmer&hellip;). La construction d&rsquo;une haute structure m&eacute;tallique offre des gradins aux spectateurs qui souhaitent observer de loin ce qui se passe devant et sur l&rsquo;immense &eacute;cran en fond de salle. Des captations de la vie en for&ecirc;t, des images en direct, et des textes se succ&egrave;dent. Le spectateur re&ccedil;oit &agrave; l&rsquo;entr&eacute;e une feuille de salle expliquant qu&rsquo;il est libre d&rsquo;&eacute;voluer dans tous les espaces, d&rsquo;utiliser la douche, le sauna et la cuisine, de parler avec les acteurs, tout en veillant &agrave; ne pas entraver la libre circulation de l&rsquo;&eacute;quipe de&nbsp;<em>cameramen</em>&nbsp;et les acteurs lors des performances. Le verso de la feuille de salle est un plan du lieu qui permet d&rsquo;identifier les moindres recoins de l&rsquo;installation (le labyrinthe secret et les &eacute;crans diss&eacute;min&eacute;s dans l&rsquo;espace). Des bouchons d&rsquo;oreilles sont aussi distribu&eacute;s, le volume de la musique &eacute;lectro &eacute;tant tr&egrave;s &eacute;lev&eacute;. Un bracelet permet au spectateur de quitter le b&acirc;timent et d&rsquo;y revenir comme bon lui semble, n&eacute;anmoins l&rsquo;h&eacute;t&eacute;rotopie est ferm&eacute;e, et son acc&egrave;s r&eacute;serv&eacute; au d&eacute;tenteur d&rsquo;un billet de spectacle. La repr&eacute;sentation de six heures se termine en rave, ouverte &agrave; tous, puisqu&rsquo;en fin de semaine (g&eacute;n&eacute;ralement la derni&egrave;re repr&eacute;sentation), il est possible d&rsquo;acheter un ticket d&rsquo;entr&eacute;e &agrave; un prix modique qui permet de participer &agrave; la soir&eacute;e &eacute;lectro, sans avoir assist&eacute; au spectacle.</p> <p>Ce spectacle immersif se d&eacute;ploie en plusieurs dimensions&nbsp;: l&rsquo;installation, la performance, la danse, la musique et la r&eacute;alisation filmique avec le montage d&rsquo;une s&eacute;lection de&nbsp;<em>rushes</em>&nbsp;en alternance avec des projections en direct. Les spectateurs deviennent acteurs du spectacle et lui donnent v&eacute;ritablement corps, faisant vivre l&rsquo;h&eacute;t&eacute;rotopie qui d&eacute;pend beaucoup de l&rsquo;implication du public. La&nbsp;<em>rave</em>&nbsp;est le point d&rsquo;orgue de la repr&eacute;sentation, qui unit acteurs et spectateurs en une foule de corps utopiques&nbsp;: &laquo;&nbsp;apr&egrave;s tout, est-ce que le corps du danseur n&rsquo;est pas justement un corps dilat&eacute; selon un espace qui lui est int&eacute;rieur et ext&eacute;rieur &agrave; la fois<sup><a href="#_ftn24" id="_ftnref24" name="_ftnref24">24</a></sup>&nbsp;?&nbsp;&raquo;. Cr&eacute;&eacute; en Lituanie, le spectacle forme une cha&icirc;ne de corps connect&eacute;s par le souvenir d&rsquo;une exp&eacute;rience commune. Il laisse une trace au fil de sa tourn&eacute;e, une m&eacute;moire du corps.</p> <p>En 2020, Oskar Sadowski et son &eacute;quipe, en accord avec les habitants du 34 et 36 d&rsquo;un immeuble de la rue Mickiewicz de Varsovie, investissent deux appartements pour la repr&eacute;sentation de leur spectacle. Ils incluent les autres appartements de l&rsquo;escalier &agrave; la sc&eacute;nographie en utilisant les fen&ecirc;tres o&ugrave; alternent lumi&egrave;res et affiches, selon les &eacute;tages. Cette performance pluridisciplinaire est organis&eacute;e en soutient aux revendications du collectif Strajk Kobiet (Gr&egrave;ve des Femmes), qui le jour pr&eacute;c&eacute;dent avait organis&eacute; une grande manifestation pour d&eacute;fendre le droit &agrave; l&rsquo;avortement. Le public est convi&eacute; via les r&eacute;seaux sociaux et des annonces dans diff&eacute;rents m&eacute;dias. Pour cet &eacute;v&eacute;nement, Sadowski cr&eacute;e aux fen&ecirc;tres d&rsquo;un immeuble de la rue Mickiewicz de Varsovie,&nbsp;<em>Dziady na Miczkiewicza</em><sup><a href="#_ftn25" id="_ftnref25" name="_ftnref25">25</a></sup>&nbsp;(<em>Les A&iuml;eux &agrave; Mickiewicz</em>), d&rsquo;apr&egrave;s&nbsp;<em>Les A&iuml;eux</em>&nbsp;de Mickiewicz. Ici le metteur en sc&egrave;ne, sorti des cadres du th&eacute;&acirc;tre ou m&ecirc;me d&rsquo;une salle de repr&eacute;sentation, cr&eacute;e une h&eacute;t&eacute;rotopie ouverte. Il jouit d&rsquo;une cartographie &agrave; &eacute;chelle r&eacute;elle, utilisant l&rsquo;architecture urbaine, c&rsquo;est-&agrave;-dire un espace &agrave; la fois priv&eacute;, repr&eacute;sent&eacute; par l&rsquo;immeuble dans lequel se d&eacute;roule la repr&eacute;sentation, et public, avec la rue dans laquelle se massent les spectateurs. Il occupe plusieurs appartements dont les habitants se joignent au public, participant ainsi doublement au spectacle, en offrant tout d&rsquo;abord le lieu de la performance, puis, en se joignant au public de la rue. Ce segment de voie publique, le jeune metteur en sc&egrave;ne l&rsquo;occupe gr&acirc;ce aux spectateurs qui se pressent sous les fen&ecirc;tres des appartements, grandes ouvertes, et devant lesquelles apparaissent les acteurs, danseurs et chanteurs, soutenus par une sono puissante. Les artistes brandissent le drapeau de Strajk Kobiet au-dessus du public qui devient d&egrave;s cet instant une foule manifestante. Tout le monde peut rejoindre cette foule ou suivre le spectacle en direct sur les r&eacute;seaux sociaux. Suite &agrave; cette performance, deux jeunes chanteurs populaires qui y participaient ont perdu leurs sponsors.</p> <p>Quant &agrave; Michał Borczuch, lorsqu&rsquo;il adapte au th&eacute;&acirc;tre le cycle de romans,&nbsp;<em>Moja Walka</em>&nbsp;(<em>Mon Combat</em>) de Karl Ove Knausg&aring;rd, il choisit de filmer un &eacute;chantillon de lecteurs dont il int&egrave;gre les enregistrements au spectacle, cr&eacute;ant une interaction entre l&rsquo;espace sc&eacute;nique et l&rsquo;espace du public. D&rsquo;une certaine mani&egrave;re, le spectacle invite le public sur sc&egrave;ne qui re&ccedil;oit lui-m&ecirc;me le spectacle dans la salle. Le public est &agrave; la fois acteur et spectateur. Cette interp&eacute;n&eacute;tration renforce la connexion entre les artistes et le public qui cr&eacute;ent une communaut&eacute;. Les spectateurs se sentent regard&eacute;s, entendus et donc autoris&eacute;s &agrave; exister. L&agrave; encore, comme Lupa avec sa m&egrave;re, il y a en quelque sorte une tentative de d&eacute;chiffrage commun du texte.</p> <p>Avec ces metteurs en sc&egrave;ne, les lieux deviennent des espaces h&eacute;t&eacute;rotopiques qui prennent corps telle une excroissance dans l&rsquo;espace public, et le transforment.</p> <p>&nbsp;</p> <p><b>Conclusion</b></p> <p>On peut en conclusion souligner que la singularit&eacute; du th&eacute;&acirc;tre polonais de l&rsquo;insoumission consiste en sa capacit&eacute; &agrave; cr&eacute;er un entrelacs de communaut&eacute;s qui redessine inlassablement les contours d&rsquo;une cartographie de la sc&egrave;ne th&eacute;&acirc;trale comme de la soci&eacute;t&eacute;, faisant &eacute;merger ou ressurgir des espaces gomm&eacute;s ou en passe de l&rsquo;&ecirc;tre. Particuli&egrave;rement aujourd&rsquo;hui, le nouveau th&eacute;&acirc;tre dont les multiplicit&eacute;s de connexions d&rsquo;individus, de diverses disciplines, de textes et d&rsquo;artefacts font la force, acquiert une grande plasticit&eacute; qui, lorsqu&rsquo;il est soumis &agrave; une autorit&eacute; oppressive, assure paradoxalement son expansion. &Agrave; l&rsquo;image des&nbsp;<em>A&iuml;eux</em>, ce th&eacute;&acirc;tre est toujours ici et maintenant, sous diff&eacute;rentes formes, en diff&eacute;rents lieux, irr&eacute;ductible. Son public est une foule dynamique, compos&eacute;e d&rsquo;individus parfois r&eacute;unis en groupes, pr&ecirc;ts &agrave; descendre en foule dans la rue pour d&eacute;fendre leurs valeurs et leurs droits, publiquement. Cette foule est ouverte et n&rsquo;h&eacute;site pas &agrave; manifester avec toute personne qui partage ses valeurs, qu&rsquo;elle fr&eacute;quente les th&eacute;&acirc;tres ou pas. Il s&rsquo;agit donc d&rsquo;une foule pensante, respectueuse de la sph&egrave;re publique mais capable de d&eacute;sob&eacute;issance civile et apte &agrave; remettre en question les actions d&rsquo;un gouvernement autoritaire. &laquo;&nbsp;Regarder est aussi une action<sup><a href="#_ftn26" id="_ftnref26" name="_ftnref26">26</a></sup>&nbsp;&raquo;, d&eacute;clarait Jacques Ranci&egrave;re dans&nbsp;<em>Le Spectateur &eacute;mancip&eacute;</em>, et il est vrai que le public qui est habitu&eacute; &agrave; r&eacute;fl&eacute;chir, &agrave; questionner ce qui l&rsquo;entoure et &agrave; se remettre lui-m&ecirc;me en question, gr&acirc;ce aux &oelig;uvres qu&rsquo;il regarde, est ainsi amen&eacute; &agrave; prendre une part active aux choix politiques qui le concernent lui et ses concitoyens.</p> <p>&nbsp;</p> <hr /> <p><b>R&eacute;f&eacute;rences</b></p> <p>Gilles Deleuze, F&eacute;lix Guattari,&nbsp;<em>Capitalisme et schizophr&eacute;nie 2, Mille plateaux</em>, Paris, Les &Eacute;ditions de Minuit, &laquo;&nbsp;Critique&nbsp;&raquo;, 2021.</p> <p>Michel Foucault,&nbsp;<em>Le Corps utopique suivi de Les h&eacute;t&eacute;rotopies</em>, [postface de Daniel Defert], Paris, &Eacute;ditions Lignes, 2014.</p> <p>Piotr Gruszczyński,&nbsp;<em>Ojcob&oacute;jcy. Młodsi zdolniejsy w teatrze polskim</em>&nbsp;[<em>Les parricides. Les jeunes les plus dou&eacute;s dans le th&eacute;&acirc;tre polonais</em>], Varsovie, &Eacute;ditions W.A.B, 2003.</p> <p>Piotr Gruszczyński,&nbsp;<em>New young, younger polish theater after 1989</em>, URL&nbsp;:&nbsp;<a href="https://culture.pl/en/article/new-young-younger-polish-theatre-after-1989">https://culture.pl/en/article/new-young-younger-polish-theatre-after-19&hellip;</a>.</p> <p>Marguerite Kumor-Wysocka, &laquo;&nbsp;Choisir sa voie&nbsp;: quelques propos sur le ph&eacute;nom&egrave;ne du jeune th&eacute;&acirc;tre des ann&eacute;es 1970 en Pologne&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Jeu</em>, n&deg;23, 1982, URL&nbsp;:&nbsp;<a href="https://www.erudit.org/fr/revues/jeu/1982-n23-jeu1066880/29388ac.pdf">https://www.erudit.org/fr/revues/jeu/1982-n23-jeu1066880/29388ac.pdf</a>.</p> <p>Kystian Lupa, Piotr Gruszczyński,<em>&nbsp;</em>Th&eacute;&acirc;tre du Nord,&nbsp;<em>&Agrave; propos, Les pr&eacute;venus&nbsp;: Nous tous</em>, entretien Kystian Lupa&nbsp;/&nbsp;Piotr Gruszczyński, Agata Kozak (trad.), URL&nbsp;:&nbsp;<a href="https://www.theatredunord.fr/a-propos-le-proces">https://www.theatredunord.fr/a-propos-le-proces</a>.</p> <p>Krystian Lupa,&nbsp;<em>Manifeste</em>, Agnieszka Zgieb (trad.), Cracovie, 2015, mis en ligne par la Maison Antoine Vitez, URL&nbsp;:&nbsp;<a href="http://www.maisonantoinevitez.com/files/files/manifeste-56a9f9a2623b3.pdf">http://www.maisonantoinevitez.com/files/files/manifeste-56a9f9a2623b3.p&hellip;</a>.</p> <p>Krystian Lupa, Adam Nawojczyk, &laquo;&nbsp;Dialogue sur l&rsquo;art d&rsquo;enseigner&nbsp;&raquo;, Adam Nawojczyk et Krystian Lupa&nbsp;<em>in</em>&nbsp;Agnieszka Zgieb (dir.), &nbsp;<em>Krystian Lupa&nbsp;&ndash; Espaces, Th&eacute;&acirc;tre/Public</em>, n&deg;240, p.&nbsp;44-48.</p> <p>Michel Masłowski, &laquo;&nbsp;Changement de paradigme&nbsp;: le th&eacute;&acirc;tre polonais avant et apr&egrave;s 1989&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Revue des &eacute;tudes slaves</em>, LXXXV-4, 2014, p.&nbsp;709-722, URL&nbsp;:&nbsp;<a href="https://journals.openedition.org/res/289">https://journals.openedition.org/res/289</a>.</p> <p>Roman Pawłowski,&nbsp;<em>Pokolenie porno i inne niesmaczne utwory teatralne</em>&nbsp;[<em>La g&eacute;n&eacute;ration porno et ses cr&eacute;ations th&eacute;&acirc;trales de mauvais go&ucirc;t</em>], Cracovie, &Eacute;ditions Zielona Sowa, 2003.</p> <p>Urszula Wolak, &laquo;&nbsp;Mistrz i uczeń. Dwa bieguny, rozmowa z Krystianem Lupą&nbsp;&raquo; [&laquo;&nbsp;Ma&icirc;tre et disciple. Deux p&ocirc;les, entretien avec Krystian Lupa&nbsp;&raquo;],&nbsp;<em>Dziennik Teatralny</em>, 24 septembre 2012, URL&nbsp;:&nbsp;<a href="http://www.dziennikteatralny.pl/artykuly/mistrz-i-uczen-dwa-bieguny.html">http://www.dziennikteatralny.pl/artykuly/mistrz-i-uczen-dwa-bieguny.html</a>.</p> <p>Agnieszka Zgieb, Krystian Lupa,&nbsp;<em>L&rsquo;Autre c&ocirc;t&eacute; &ndash; Entretien entre Krystian Lupa et Fabienne Darge</em>, Agnieszka Zgieb (trad.), Montpellier, &Eacute;ditions Deuxi&egrave;me &Eacute;poque, 2018.</p> <p>&nbsp;</p> <hr /> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref1" id="_ftn1" name="_ftn1" title="&gt;&lt;span style=">1</a></sup>&nbsp;Jacques Ranci&egrave;re,&nbsp;<em>Le Spectateur &eacute;mancip&eacute;</em>, Paris, La Fabrique &eacute;ditions, 2008, p. 23.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref2" id="_ftn2" name="_ftn2" title="&gt;&lt;span style=">2</a></sup>&nbsp;<em>Ibid</em>., p. 24.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref3" id="_ftn3" name="_ftn3" title="&gt;&lt;span style=">3</a></sup>&nbsp;Marguerite Kumor-Wysocka,&nbsp;<em>Choisir sa voie&nbsp;: quelques propos sur le ph&eacute;nom&egrave;ne du jeune th&eacute;&acirc;tre des ann&eacute;es 1970 en Pologne</em>, Jeu, n&deg;23, 1982.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref4" id="_ftn4" name="_ftn4" title="&gt;&lt;span style=">4</a></sup>&nbsp;Piotr Moszynski, &laquo;&nbsp;Pologne&nbsp;: mars 68&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>rfi.fr</em>, URL&nbsp;:&nbsp;<a href="http://www1.rfi.fr/actufr/articles/100/article_65662.asp">http://www1.rfi.fr/actufr/articles/100/article_65662.asp</a>&nbsp;(consult&eacute; le 17/11/2022).</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref5" id="_ftn5" name="_ftn5" title="&gt;&lt;span style=">5</a></sup>&nbsp;URL&nbsp;:&nbsp;<a href="https://culture.pl/en/article/new-young-younger-polish-theatre-after-1989">https://culture.pl/en/article/new-young-younger-polish-theatre-after-19&hellip;</a>&nbsp;(consult&eacute; le 17/11/2022).</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref6" id="_ftn6" name="_ftn6" title="&gt;&lt;span style=">6</a></sup>&nbsp;<em>Ibid</em>.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref7" id="_ftn7" name="_ftn7" title="&gt;&lt;span style=">7</a></sup>&nbsp;Krystian Lupa, dipl&ocirc;m&eacute; de la PWST (Państwowa Wyższa Szkoła Teatralna, l&rsquo;&Eacute;cole Nationale Sup&eacute;rieure d&rsquo;Art Dramatique) de Cracovie y a lui-m&ecirc;me enseign&eacute; la mise en sc&egrave;ne et le jeu &agrave; partir de 1983 avant d&rsquo;en &ecirc;tre le doyen de 1990 &agrave; 1996.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref8" id="_ftn8" name="_ftn8" title="&gt;&lt;span style=">8</a></sup>&nbsp;Michał Masłowski, &laquo;&nbsp;Changement de paradigme&nbsp;: le th&eacute;&acirc;tre polonais avant et apr&egrave;s 1989&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Revue des &eacute;tudes slaves</em>, LXXXV-4, 2014, p. 709-722, URL&nbsp;:&nbsp;<a href="https://journals.openedition.org/res/289?lang=en#quotation">https://journals.openedition.org/res/289?lang=en#quotation</a>&nbsp;(consult&eacute; le 17/11/2022).</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref9" id="_ftn9" name="_ftn9" title="&gt;&lt;span style=">9</a></sup>&nbsp;Roman Pawłowski,&nbsp;<em>Pokolenie porno i inne niesmaczne utwory teatralne</em>&nbsp;<em>[La g&eacute;n&eacute;ration porno et ses cr&eacute;ations th&eacute;&acirc;trales de mauvais go&ucirc;t</em>], Cracovie, &Eacute;ditions Zielona Sowa, 2003.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref10" id="_ftn10" name="_ftn10" title="&gt;&lt;span style=">10</a></sup>&nbsp;Piotr Gruszczyński,&nbsp;<em>Ojcob&oacute;jcy. Młodsi zdolniejsy w teatrze polskim&nbsp;</em>[<em>Les parricides. Les jeunes les plus dou&eacute;s dans le th&eacute;&acirc;tre polonais</em>], Varsovie, &Eacute;ditions W.A.B, 2003.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref11" id="_ftn11" name="_ftn11" title="&gt;&lt;span style=">11</a></sup>&nbsp;TR Waszawa, Teatr Rozmaitości (Th&eacute;&acirc;tre de vari&eacute;t&eacute;s).</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref12" id="_ftn12" name="_ftn12" title="&gt;&lt;span style=">12</a></sup>&nbsp;&laquo;&nbsp;En Pologne, c&rsquo;est-&agrave;-dire nulle part&nbsp;&raquo;, Ubu Roi d&rsquo;Alfred Jarry.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref13" id="_ftn13" name="_ftn13" title="&gt;&lt;span style=">13</a></sup>&nbsp;Prawo i Sprawiedliwość (Droit et Justice), parti conservateur, nationaliste, eurosceptique, fond&eacute; en 2001 par les fr&egrave;res Jarosław Kaczyński et Lech Kaczyński.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref14" id="_ftn14" name="_ftn14" title="&gt;&lt;span style=">14</a></sup>&nbsp;Krystian Lupa,<em>&nbsp;Manifeste</em>, [trad. Agnieszka Zgieb], Cracovie, 2015, mis en ligne par la Maison Antoine Vitez, URL&nbsp;:&nbsp;<a href="http://www.maisonantoinevitez.com/files/files/manifeste-56a9f9a2623b3.pdf">http://www.maisonantoinevitez.com/files/files/manifeste-56a9f9a2623b3.p&hellip;</a>.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref15" id="_ftn15" name="_ftn15" title="&gt;&lt;span style=">15</a></sup>&nbsp;D&rsquo;apr&egrave;s&nbsp;: Elfriede Jelinek,&nbsp;<em>Drames de princesses. La Jeune fille et la Mort I&nbsp;</em>&ndash;&nbsp;<em>V</em>, 2003.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref16" id="_ftn16" name="_ftn16" title="&gt;&lt;span style=">16</a></sup>&nbsp;Publiczność Teatru Polskiego we Wrocławiu (Le public du Th&eacute;&acirc;tre polonais de Wrocław), ou Le PublicznoscTP &middot; Społeczność (Le Public TP &ndash; communaut&eacute;) dont l&rsquo;une des repr&eacute;sentantes les plus actives est Magdalena Chlasta-Dzięciołowska, sp&eacute;cialiste de la litt&eacute;rature du XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref17" id="_ftn17" name="_ftn17" title="&gt;&lt;span style=">17</a></sup>&nbsp;URL&nbsp;:&nbsp;<a href="https://www.teatrpolskiwpodziemiu.pl/pl/aktualnosci/premiera-na-jubileusz-podziemia">https://www.teatrpolskiwpodziemiu.pl/pl/aktualnosci/premiera-na-jubileu&hellip;</a>&nbsp;(consult&eacute; le 17/11/2022).</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref18" id="_ftn18" name="_ftn18" title="&gt;&lt;span style=">18</a></sup>&nbsp;Le &laquo;&nbsp;Kamyk Puzyny&nbsp;&raquo; est un prix cr&eacute;&eacute; en 2015 &agrave; l&rsquo;initiative du mensuel Dialog, il r&eacute;compense une activit&eacute; cr&eacute;ative conjugu&eacute;e &agrave; une implication dans la vie publique. Le fondateur est l&rsquo;Institut du livre. Il doit son nom &agrave; Konstanty Puzyna (1929-1989), th&eacute;&acirc;trologue, &eacute;diteur, essayiste, publiciste et po&egrave;te polonais.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref19" id="_ftn19" name="_ftn19" title="&gt;&lt;span style=">19</a></sup>&nbsp;URL&nbsp;:&nbsp;<a href="https://www.teatrpolskiwpodziemiu.pl/pl/aktualnosci/premiera-na-jubileusz-podziemia">https://www.teatrpolskiwpodziemiu.pl/pl/aktualnosci/premiera-na-jubileu&hellip;</a>&nbsp;(consult&eacute; le 17/11/2022) [traduction personnelle].</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref20" id="_ftn20" name="_ftn20" title="&gt;&lt;span style=">20</a></sup>&nbsp;Gilles Deleuze, F&eacute;lix Guattari,&nbsp;<em>Capitalisme et schizophr&eacute;nie 2, Mille plateaux</em>, Les &eacute;ditions de Minuit, &laquo;&nbsp;Critique&nbsp;&raquo;, Paris, 2021, p. 36.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref21" id="_ftn21" name="_ftn21" title="&gt;&lt;span style=">21</a></sup>&nbsp;Adam Nawojczyk et Krystian Lupa, &laquo;&nbsp;Dialogue sur l&rsquo;art d&rsquo;enseigner&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>in</em>&nbsp;Agnieszka Zgieb (dir.),&nbsp;<em>Krystian Lupa &ndash; Espaces, Th&eacute;&acirc;tre/Public</em>, n&deg;240, p.&nbsp;44-48.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref22" id="_ftn22" name="_ftn22" title="&gt;&lt;span style=">22</a></sup>&nbsp;Lecture performative d&rsquo;apr&egrave;s une nouvelle de Marcin Miętus, cr&eacute;&eacute;e au Teatr Nowy de Poznań en mai 2022 pour le cycle de lecture &laquo;&nbsp;nouveaux drames&nbsp;&raquo;.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref23" id="_ftn23" name="_ftn23" title="&gt;&lt;span style=">23</a></sup>&nbsp;<em>Ibid</em>., p. 20.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref24" id="_ftn24" name="_ftn24" title="&gt;&lt;span style=">24</a></sup>&nbsp;Michel Foucault,&nbsp;<em>Le Corps utopique suivi de Les h&eacute;t&eacute;rotopies</em>, [postface de Daniel Defert], Paris, &Eacute;ditions Lignes, 2014, p. 17.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref25" id="_ftn25" name="_ftn25" title="&gt;&lt;span style=">25</a></sup>&nbsp;Oskar Sadowski,&nbsp;<em>Les A&iuml;eux &agrave; Mickiewicz</em>, 34/36 rue Mickiewicz, Varsovie, 31 octobre 2020.</p> <p><sup><a font-size:10.0pt="" href="#_ftnref26" id="_ftn26" name="_ftn26" title="&gt;&lt;span style=">26</a></sup>&nbsp;Jacques Ranci&egrave;re,&nbsp;<em>Le Spectateur &eacute;mancip&eacute;</em>, Paris, La Fabrique &eacute;ditions, 2008, p. 19.</p>