<p>Proposer une &eacute;tude concernant le vocabulaire philosophique au Japon<a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnote1_1dh777o" id="footnoteref1_1dh777o" title="Comme le veut l’usage, les anthroponymes d’Asie orientale seront donnés dans leur ordre normal : nom puis prénom. Les noms propres chinois seront d’abord donnés dans leur transcription d’usage depuis le chinois, puis entre parenthèses sera indiquée la transcription japonaise. Nos transcriptions du japonais sont celles du système Hepburn modifié, celles du chinois du système pinyin.">1</a>&nbsp;est int&eacute;ressant, mais pose diverses difficult&eacute;s. Appara&icirc;t tout d&rsquo;abord la n&eacute;cessit&eacute; de savoir ce qui est entendu par philosophie en Occident et au Japon. Si par exemple ne sont consid&eacute;r&eacute;es comme philosophie que les r&eacute;flexions portant sur la question de l&rsquo;&ecirc;tre et sur celle du&nbsp;<em>logos</em>, tout ce qui s&rsquo;&eacute;carte de cette d&eacute;finition, bien que parfois nomm&eacute; &ccedil;&agrave; et l&agrave;&nbsp;<em>tetsugaku&nbsp;</em>哲学 (philosophie), ne rel&egrave;ve pas de la philosophie telle qu&rsquo;elle est d&eacute;finie&nbsp;<em>stricto sensu</em>&nbsp;en Occident. Le terme&nbsp;<em>tetsugaku</em>&nbsp;semble alors davantage relever d&rsquo;une sous-cat&eacute;gorie du terme&nbsp;<em>shisō</em>&nbsp;思想, pens&eacute;e regroupant entre autres, outre la &laquo;&nbsp;philosophie&nbsp;&raquo;, la sociologie, la science politique, l&rsquo;&eacute;conomie, la science des religions, l&rsquo;anthropologie et d&rsquo;autres disciplines relevant d&rsquo;un discours structur&eacute; non n&eacute;cessairement subordonn&eacute; &agrave; une m&eacute;thode exp&eacute;rimentale. Pour &eacute;carter cette premi&egrave;re difficult&eacute;, ces r&eacute;flexions se limiteront &agrave; pr&eacute;senter, en tant que philologue et historien des id&eacute;es, les m&eacute;canismes et les choix ayant conduit aux traductions japonaises actuelles du vocabulaire philosophique occidental.</p> <p>Par ailleurs, se pose &eacute;galement la question de savoir comment, dans le fil du pr&eacute;sent propos, seront traduits en fran&ccedil;ais les diff&eacute;rents vocables et les id&eacute;ogrammes qui les composent. Pour chacun des vocables, sera conserv&eacute; le terme fran&ccedil;ais consacr&eacute; qui avait cours la plupart du temps bien avant que l&rsquo;&eacute;quivalent japonais de ce vocabulaire ne soit fix&eacute; dans les usages. En explicitant les id&eacute;ogrammes choisis, et la mani&egrave;re dont les choix semblent avoir &eacute;t&eacute; faits, seront expos&eacute;es les subtilit&eacute;s du vocable actuel japonais. Les id&eacute;ogrammes seront, quant &agrave; eux, expliqu&eacute;s en fran&ccedil;ais &agrave; travers au moins une traduction possible qui devra correspondre &agrave; la filiation d&rsquo;id&eacute;es dans laquelle s&rsquo;inscrit le propos de l&rsquo;auteur ou le passage en question. Un m&ecirc;me caract&egrave;re ne sera pas toujours traduit &agrave; l&rsquo;identique puisqu&rsquo;il faudra savoir s&rsquo;il s&rsquo;inscrit dans un courant confucianiste, tao&iuml;ste ou bouddhique, ce qui fait parfois varier sa signification. Des variations peuvent aussi exister en fonction des &eacute;coles, des auteurs ou des &eacute;poques.</p> <p>Ceci convenu, il n&rsquo;est pas inutile de s&rsquo;interroger sur ce que signifie traduire. Il n&rsquo;est pas question ici d&rsquo;exposer ce qu&rsquo;aurait &eacute;t&eacute; l&rsquo;histoire de la traduction et l&rsquo;analyse des m&eacute;thodes adopt&eacute;es ou non par les traducteurs. Il s&rsquo;agit tout au plus de mentionner ce qui semble &ecirc;tre les conditions minimales du traduire.&nbsp;<em>A minima</em>, traduire revient &agrave; interroger le sens d&rsquo;un propos, d&rsquo;une expression ou d&rsquo;un mot dans une langue source et &agrave; le transf&eacute;rer dans une langue cible de mani&egrave;re &agrave; le rendre intelligible, avec une possibilit&eacute; d&rsquo;erreur de compr&eacute;hension aussi faible que possible, par un usager de cette derni&egrave;re langue. Il s&rsquo;agit ainsi de transf&eacute;rer un message d&rsquo;un milieu source dans un milieu cible en pr&eacute;servant son contenu et en assurant sa juste transmission<a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnote2_j733w9u" id="footnoteref2_j733w9u" title="Le terme de milieu est ici à entendre, comme explicité par Berque, dans sa dimension écologique, technique et symbolique. Il prend en compte tant l’historicité que la spatialité inhérente aux milieux. Voir à ce propos : Augustin Berque, Écoumène : introduction à l’étude des milieux humains (2000), Paris, Belin, 2009, p. 157.">2</a><br /> . Traduire, par exemple, un vocable qui serait tir&eacute; de la philosophie fran&ccedil;aise ou allemande en japonais requerrait dans cette perspective de prendre en compte le milieu source dans ses dimensions techniques (le langage et la forme du langage mobilis&eacute;) et symboliques (les imbrications culturelles, politiques ou sociales d&rsquo;une expression, d&rsquo;un vocable, d&rsquo;un id&eacute;ogramme). Cela n&eacute;cessiterait ensuite de faire de m&ecirc;me avec le milieu cible. Traduire de la philosophie, ce n&rsquo;est donc peut-&ecirc;tre pas tant traduire d&rsquo;une langue &agrave; l&rsquo;autre que traduire un texte r&eacute;dig&eacute; pour un public donn&eacute; en une langue et en des formes langagi&egrave;res qui conviendront &agrave; la bonne compr&eacute;hension du propos et du sens des mots par un public cible. Consid&eacute;rer cela importe pour comprendre comment les intellectuels japonais ont traduit le vocabulaire philosophique occidental dans leur langue.</p> <p>Ces probl&eacute;matiques seront prises en compte pour questionner la traduction en japonais de trois termes de la philosophie occidentale&nbsp;: philosophie (<em>tetsugaku</em>&nbsp;哲学), nature (<em>shizen&nbsp;</em>自然) et m&eacute;taphysique (<em>keijijōgaku&nbsp;</em>形 而上学). La traduction de ces notions appara&icirc;t caract&eacute;ristique, au regard de la culture lettr&eacute;e et savante du Japon d&rsquo;alors, des difficult&eacute;s que posa la traduction ou l&rsquo;institution en japonais d&rsquo;un vocabulaire philosophique venu d&rsquo;Occident. Mais avant de conduire de telles analyses, il n&rsquo;est pas inutile d&rsquo;&eacute;voquer quelques &eacute;l&eacute;ments concernant l&rsquo;histoire linguistique du Japon.</p> <h2><strong>La culture langagi&egrave;re au Japon</strong></h2> <p>Si la question des origines de la langue japonaise fait controverse, plusieurs constats peuvent &ecirc;tre faits. Tout d&rsquo;abord la langue japonaise, qu&rsquo;il soit question de la langue classique&nbsp;<em>bungo</em>&nbsp;文語 ou de la langue moderne&nbsp;<em>gendaigo</em>&nbsp;現代語, est fort diff&eacute;rente de la langue chinoise, qu&rsquo;il s&rsquo;agisse ou non de la langue classique. Par ailleurs, nous ne connaissons nullement ce que put &ecirc;tre la langue japonaise avant toute influence chinoise. Aussi, l&rsquo;introduction au Japon de l&rsquo;&eacute;criture chinoise fut consentie et &eacute;troitement li&eacute;e &agrave; l&rsquo;introduction au Japon de la culture lettr&eacute;e de langue chinoise. Cette introduction prit place au sein des relations qu&rsquo;entretenait le Japon avec les royaumes cor&eacute;ens ainsi qu&rsquo;avec la Chine des Tang (618-907). Le&nbsp;<em>Kojiki</em>&nbsp;古事記 (Chronique des choses anciennes) qui date de 712 recouvre, comme l&rsquo;indique Jean-No&euml;l Robert, &laquo;&nbsp;une profonde osmose des deux langues&nbsp;&raquo;<a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnote3_rw4ydzn" id="footnoteref3_rw4ydzn" title="Jean-Noël Robert, « La hiéroglossie japonaise », leçon inaugurale prononcée le 2 février 2012, Paris, Collège de France, 2012, [en ligne], http://books.openedition.org/cdf/551#annexdocs.">3</a><br /> . Dans les faits, la culture &eacute;crite japonaise classique faisait cohabiter deux langues&nbsp;: le chinois classique et le japonais classique. La diff&eacute;rence radicale entre celles-ci &eacute;tait cultiv&eacute;e par les lettr&eacute;s qui allaient jusqu&rsquo;&agrave; proposer des lectures japonaises pour certains termes ou certaines expressions chinoises. Cette double culture langagi&egrave;re perdura jusqu&rsquo;&agrave; l&rsquo;&eacute;poque Meiji (1868-1912) avant de d&eacute;cliner progressivement. Son influence culturelle n&rsquo;en demeure pas moins, aujourd&rsquo;hui encore, r&eacute;elle et non n&eacute;gligeable.</p> <p>La langue chinoise est rendue accessible aux lettr&eacute;s japonais par l&rsquo;&eacute;tude du sino-japonais, le&nbsp;<em>kanbun</em>&nbsp;漢文, une pratique qui &eacute;tait autrefois famili&egrave;re &agrave; tout lettr&eacute; dans la mesure o&ugrave; &ecirc;tre un lettr&eacute;, c&rsquo;&eacute;tait conna&icirc;tre les classiques chinois<a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnote4_iho78c4" id="footnoteref4_iho78c4" title="Notre propos est librement inspiré de la préface du manuel suivant : Jean-Noël Robert, Lectures élémentaires en style sino-japonais (kanbun), Paris, Université Paris-VII, 1986, p. 1-7.">4</a><br /> . &Agrave; l&rsquo;&eacute;poque Nara (710-784) commence &agrave; prendre forme la pratique du&nbsp;<em>kanbun</em>. Il aurait &eacute;t&eacute; lu &agrave; cette &eacute;poque en prononciation chinoise accompagn&eacute; d&rsquo;&laquo;&nbsp;une traduction litt&eacute;rale qui est &agrave; l&rsquo;origine<a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnote5_s9d63t2" id="footnoteref5_s9d63t2" title="Ibid., p. 1.">5</a><br /> &nbsp;&raquo; du&nbsp;<em>kundoku</em>&nbsp;訓読 (lecture japonaise). Puis, durant l&rsquo;&eacute;poque Heian (794-1185), l&rsquo;envoi de d&eacute;l&eacute;gations en Chine s&rsquo;interrompit et la pratique qui consistait &agrave; prononcer les textes en chinois aurait finalement peu ou prou &eacute;t&eacute; remplac&eacute;e par la lecture en japonais<a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnote6_3ebl1op" id="footnoteref6_3ebl1op" title="Ibid., p. 2.">6</a><br /> &ndash; le&nbsp;<em>yomikudashi</em>&nbsp;読み下し. Si la pratique du&nbsp;<em>kanbun</em>&nbsp;d&eacute;buta effectivement par la lecture de textes venus de Chine, les Japonais eux-m&ecirc;mes se mirent &agrave; r&eacute;diger en&nbsp;<em>kanbun</em>. Il en fut par exemple ainsi du moine Dōgen (道元, 1200-1253) dont la production &eacute;crite fut r&eacute;dig&eacute;e certaines fois en japonais classique, et d&rsquo;autres fois en&nbsp;<em>kanbun</em>. La pratique de ce dernier perdura longtemps et son d&eacute;clin fut notamment la cons&eacute;quence de politiques visant la modernisation, ou pour le dire explicitement l&rsquo;occidentalisation volontaire, du Japon. Le&nbsp;<em>kanbun&nbsp;</em>demeura jusqu&rsquo;au d&eacute;but du XX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle une pratique active. S&rsquo;int&eacute;resser aujourd&rsquo;hui &agrave; l&rsquo;histoire des id&eacute;es au Japon requiert de pouvoir en lire la production &eacute;crite ou,&nbsp;<em>a minima</em>, de pouvoir comprendre et interpr&eacute;ter avec justesse des formules anciennes mobilis&eacute;es par des auteurs modernes, voire contemporains.</p> <p>Parall&egrave;lement au&nbsp;<em>kanbun</em>, &eacute;tait utilis&eacute;e une langue que nous appelons&nbsp;<em>bungo</em>&nbsp;文語 (langue litt&eacute;raire), commun&eacute;ment appel&eacute;e &laquo;&nbsp;japonais classique&nbsp;&raquo;. Il s&rsquo;agit d&rsquo;une langue autochtone dont les structures grammaticales et syntaxiques sont radicalement diff&eacute;rentes de celles du chinois classique. Cette langue, qui n&rsquo;&eacute;tait pas l&rsquo;apanage des milieux lettr&eacute;s, devint n&eacute;anmoins la langue d&rsquo;expression privil&eacute;gi&eacute;e pour la po&eacute;sie &ndash; comme le&nbsp;<em>waka&nbsp;</em>和歌, po&egrave;mes de 31 mores, ou le&nbsp;<em>haiku</em>&nbsp;俳句, po&egrave;mes courts de 17 mores &ndash; et pour le roman &ndash; comme c&rsquo;est le cas au d&eacute;but du XI<sup>e&nbsp;</sup>si&egrave;cle du c&eacute;l&egrave;bre&nbsp;<em>Genji monogatari</em>&nbsp;源氏物語 (Le Dit du Genji) de Murasaki Shikibu (紫式部, v. 973- v. 1014).</p> <p>Concernant l&rsquo;&eacute;criture, le&nbsp;<em>kanbun</em>&nbsp;&eacute;tait r&eacute;dig&eacute; en caract&egrave;res chinois &ndash; accompagn&eacute;s de&nbsp;<em>kunten</em>&nbsp;(訓点, signes de lecture) pour en faciliter la lecture. Le&nbsp;<em>bungo</em>&nbsp;&eacute;tait, quant &agrave; lui, r&eacute;dig&eacute; &agrave; l&rsquo;aide de syllabaires &ndash;&nbsp;<em>hiragana</em>&nbsp;平仮名 et&nbsp;<em>katakana&nbsp;</em>片仮名 &ndash; et de caract&egrave;res chinois. Dans les textes en&nbsp;<em>bungo</em>, les caract&egrave;res chinois pouvaient, selon le type de texte et la tradition &agrave; laquelle il &eacute;tait li&eacute;, &ecirc;tre lus de diff&eacute;rentes mani&egrave;res. Ces lectures formaient deux grandes cat&eacute;gories de lecture&nbsp;: les lectures dites&nbsp;<em>kun&rsquo;yomi&nbsp;</em>訓読み (lecture japonaise) et les lectures sino-japonaises dites&nbsp;<em>on&rsquo;yomi</em>&nbsp;音読み (lecture phon&eacute;tique). Les lectures&nbsp;<em>on&rsquo;yomi</em>&nbsp;se divisaient elles-m&ecirc;mes en plusieurs lectures correspondant &agrave; diff&eacute;rentes p&eacute;riodes d&rsquo;introduction au Japon de celles-ci, mais &eacute;galement &agrave; des traditions de pens&eacute;e diff&eacute;rentes. Ainsi, un m&ecirc;me caract&egrave;re &eacute;tait par exemple lu diff&eacute;remment s&rsquo;il s&rsquo;agissait d&rsquo;un texte confuc&eacute;en ou bouddhique. Des distinctions dans les lectures pouvaient &eacute;galement exister au sein m&ecirc;me de ces traditions de pens&eacute;e. Ces caract&eacute;ristiques du&nbsp;<em>bungo</em>, concernant son &eacute;criture ou sa prononciation, allaient perdurer dans la langue moderne &ndash; &agrave; ceci pr&egrave;s que le nombre de&nbsp;<em>kana</em>&nbsp;et de caract&egrave;res serait r&eacute;duit.</p> <p>L&rsquo;&eacute;volution de ce syst&egrave;me jusqu&rsquo;&agrave; la langue japonaise telle que nous la connaissons aujourd&rsquo;hui ne se fit que relativement tard. Au XVIII<sup>e&nbsp;</sup>si&egrave;cle, le penseur Ogyū Sorai 荻生徂徠 (1666-1728) propose dans un ouvrage de 1715, le&nbsp;<em>Yakubun sentei&nbsp;</em>訳文筌蹄 (Guide pour la traduction du&nbsp;<em>kanbun</em>) que soient traduits dans le japonais de l&rsquo;&eacute;poque les textes r&eacute;dig&eacute;s en sino-japonais<a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnote7_26prrmx" id="footnoteref7_26prrmx" title="Voir à ce propos Natalia Teplova, « Traduction et politique langagière au Japon : de l’‘‘ouverture au monde’’ à la ‘‘mondialisation” », Meta : journal des traducteurs / Meta: Translators’ Journal, vol. 51, n° 4 (2006), p. 760 ; Uehara Mayuko, « The Philosophy of Translation: From Nishida Kitarō to Ogyū Sorai », Essays in Japanese Philosophy, vol. 7 (2010), p. 305-319.">7</a><br /> . Bien qu&rsquo;en consultant les &eacute;tag&egrave;res des librairies au Japon, nous ne pouvons que constater, vu le nombre d&rsquo;ouvrages traduits du&nbsp;<em>kanbun</em>&nbsp;au japonais moderne, que cette id&eacute;e fit des &eacute;mules, elle ne sonna pas le glas de la double culture langagi&egrave;re japonaise. Apr&egrave;s Ogyū Sorai, les d&eacute;bats se poursuivirent avec notamment, durant l&rsquo;&eacute;poque Meiji (1868-1912), le mouvement pour l&rsquo;unification de la langue parl&eacute;e et de la langue &eacute;crite,&nbsp;<em>genbun&rsquo;icchi</em>&nbsp;言文一致.</p> <p>La pratique du&nbsp;<em>kanbun</em>, qui ne fut plus l&rsquo;un des fondements de la scolarit&eacute;, d&eacute;clina progressivement. Il n&rsquo;en demeure pas moins que cette double culture langagi&egrave;re, qui joue aujourd&rsquo;hui encore un r&ocirc;le non n&eacute;gligeable au sein des milieux &eacute;rudits, eut un r&ocirc;le essentiel dans la constitution du vocabulaire philosophique au Japon. Ce fut notamment le cas de la constitution des &eacute;quivalents japonais des concepts de &laquo;&nbsp;philosophie&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;nature&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;m&eacute;taphysique&nbsp;&raquo;.</p> <h1><strong>Philosophie</strong></h1> <p>Le terme de philosophie appara&icirc;t au Japon dans la deuxi&egrave;me moiti&eacute; du XVI<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle. Il se trouve dans une traduction partielle de la&nbsp;<em>L&eacute;gende des Saints</em>&nbsp;intitul&eacute;e&nbsp;<em>Extraits des &oelig;uvres des Saints</em>&nbsp;(<em>Sanctos no go saguio no uchi nuqigaqi</em>)<a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnote8_5p4l1g1" id="footnoteref8_5p4l1g1" title="Voir les documents suivants : Frédéric Girard, « En quel sens peut-on parler de philosophie au Japon ? », dans Cipango : cahiers d’études japonaises, n°2 (1993), p. 116-117 ; Miyanaga Takashi 宮永孝,Seiyōtetsugaku denraikō : muromachi jidaimakki kara meijiki made 西洋哲学伝来考 : 室町時代末期から明治期まで (Réflexions sur l’introduction de la philosophie occidentale : de la fin de l’époque Muromachi à l’époque Meiji), Tōkyō, Hōseidaigaku shakaigakubugakkai 法政大学社会学部学会, 2005, p. 25-28 ; Miyanaga Takashi 宮永孝, Seiyōtetsugaku denraishōshi 西洋哲学伝来小史 (Petite histoire de l’introduction de la philosophie occidentale), Tōkyō, Hōseidaigaku shakaigakubugakkai 法政大学社会学部学会, 2010, p. 2-5.">8</a><br /> . Celle-ci fut publi&eacute;e en 1591 par les presses j&eacute;suites de Kazusa, install&eacute;es en 1590, qui amor&ccedil;aient alors un travail de publication d&rsquo;ouvrages ayant trait &agrave; la chr&eacute;tient&eacute;. Ouvrage de langue japonaise r&eacute;dig&eacute; en caract&egrave;res romains, il note &laquo;&nbsp;philosophia&nbsp;&raquo; pour philosophie et &laquo;&nbsp;philosophar&nbsp;&raquo; pour philosopher. Il s&rsquo;agit alors, selon la d&eacute;finition qui en est donn&eacute;e, de conna&icirc;tre le fondement / l&rsquo;origine (&laquo;&nbsp;conguen&nbsp;&raquo;, transcription en caract&egrave;res romains dans cet ouvrage du compos&eacute; 根元) des choses. Si dans cette d&eacute;finition paraissent alors ignor&eacute;es les composantes ontologique et logique qui traversent l&rsquo;histoire de la philosophie en Occident, il n&rsquo;est pas certain, mais possible, que le terme ou sa d&eacute;finition aient connu une diffusion en dehors des&nbsp;<em>seminario</em>. Et bien que des connaissances philosophiques se diffusent &agrave; cette &eacute;poque, une traduction du terme de philosophie ne s&rsquo;imposa vraiment qu&rsquo;&agrave; partir du XIX<sup>e&nbsp;</sup>si&egrave;cle sous l&rsquo;impulsion de Nishi Amane 西周 (1829-1897).</p> <p>Nishi Amane fut un acteur majeur dans l&rsquo;introduction de la philosophie au Japon. N&eacute; dans le bourg f&eacute;odal de Tsuwano, il re&ccedil;oit, enfant, une &eacute;ducation confucianiste et n&eacute;oconfucianiste comprenant l&rsquo;&eacute;tude, d&egrave;s quatre ans, du&nbsp;<em>Livre de la pi&eacute;t&eacute; filiale</em>&nbsp;(<em>kōkyū</em>&nbsp;孝経) et, d&egrave;s six ans, des quatre livres (<em>shisho</em>&nbsp;四書) que forment la&nbsp;<em>Grande &eacute;tude</em>&nbsp;(<em>daigaku</em>&nbsp;大学), l&rsquo;<em>Invariable milieu</em>&nbsp;(<em>chūyō</em>&nbsp;中庸), les&nbsp;<em>Entretiens de Confucius</em>&nbsp;(<em>rongo&nbsp;</em>論語) et le&nbsp;<em>Mengzi</em>&nbsp;(<em>mōshi</em>&nbsp;孟子). Devenu fin connaisseur du n&eacute;oconfucianisme de Zhu Xi (<em>shushi</em>&nbsp;朱子, 1130-1200) qui d&eacute;fendait une m&eacute;taphysique faite d&rsquo;&eacute;nergie vitale (ch.&nbsp;<em>qi&nbsp;</em>/ jp.&nbsp;<em>ki&nbsp;</em>気) et de principes d&rsquo;ordre (ch.&nbsp;<em>li&nbsp;</em>/ jp.&nbsp;<em>ri&nbsp;</em>理), il s&rsquo;adonna &agrave; la lecture du penseur Ogyū Sorai 荻生徂徠 (1666-1728) qui pr&ocirc;nait un retour &agrave; l&rsquo;antiquit&eacute; chinoise en faisant fi des &eacute;crits et commentaires qui auraient suivi ceux de Confucius (551-479 av. J.-C.). Ce qui &eacute;cartait bien s&ucirc;r les &eacute;crits de n&eacute;oconfuc&eacute;ens tels que ceux de Zhu Xi, rejetait l&rsquo;emphase m&eacute;taphysique du n&eacute;oconfucianisme et constituait dans le Japon d&rsquo;alors une rupture qui marqua profond&eacute;ment la pens&eacute;e de Nishi Amane. Ce dernier s&rsquo;&eacute;cartera progressivement du contenu m&eacute;taphysique que contenaient le confucianisme et le n&eacute;oconfucianisme, mais aussi, lorsqu&rsquo;il la rencontrera, du contenu m&eacute;taphysique de la philosophie occidentale.</p> <p>En 1853, l&rsquo;armada am&eacute;ricaine, conduite par le Commodore Perry (1794-1858), enjoint le Japon d&rsquo;ouvrir ses ports. Envoy&eacute; par son seigneur &agrave; Edo (actuelle Tōkyō) pour enqu&ecirc;ter sur cet &eacute;v&egrave;nement, Nishi profite de l&rsquo;occasion pour se lancer dans l&rsquo;&eacute;tude du hollandais, qui &eacute;tait dans le Japon cloisonn&eacute; d&rsquo;alors, via les &eacute;tudes dites hollandaises (<em>rangaku</em>&nbsp;蘭学), le vecteur principal des connaissances occidentales. Parti &eacute;tudier aux Pays-Bas le droit, l&rsquo;&eacute;conomie, la statistique, la diplomatie, la philosophie et le fran&ccedil;ais, Nishi est &eacute;tudiant &eacute;tranger &agrave; l&rsquo;Universit&eacute; de Leyde de 1863 &agrave; 1865.</p> <p>Philosophiquement, il s&rsquo;int&eacute;resse au positivisme d&rsquo;Auguste Comte (1798-1857) qui postulait au sein des savoirs humains la loi des trois &eacute;tats th&eacute;oriques successifs&nbsp;: th&eacute;ologique, m&eacute;taphysique et scientifique. Ogyū Sorai et Auguste Comte concourront ainsi au d&eacute;samour de Nishi pour la m&eacute;taphysique.</p> <p>C&rsquo;est de retour au Japon qu&rsquo;il s&rsquo;essaiera &agrave; trouver un &eacute;quivalent du terme de philosophie<a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnote9_yguu8sw" id="footnoteref9_yguu8sw" title="Nous proposons ici une synthèse de plusieurs travaux : Frédéric Girard, « En quel sens peut-on parler de philosophie au Japon ? », op. cit., p. 116-117 ; Uehara Mayuko, « La tâche du traducteur en philosophie dans le Japon moderne », Essays in Japanese Philosophy, n°3 (2008), p. 284-286 ; Ishizuka Masahide 石塚正英, Shibata Takayuki 柴田隆行, Tetsugaku – shisō hon.yakugo jiten 哲学・思想翻訳語辞典 (Dictionnaire des termes traduits de la philosophie et de la pensée), Tōkyō, Ronsōsha 論創社, 2013, p. 209-210.">9</a><br /> . Dans un premier temps, il en fait une simple transcription phon&eacute;tique en caract&egrave;res chinois&nbsp;<em>hirosohi&nbsp;</em>斐鹵蘇比. Il proposera ensuite plusieurs traductions qu&rsquo;il jugera possibles comme&nbsp;<em>rigaku</em>&nbsp;理学 (science des principes),<em>&nbsp;kyūrigaku</em>&nbsp;窮理学 (science scrutant les principes),&nbsp;<em>girigaku</em>&nbsp;義理学 (science de la moralit&eacute; et des principes),&nbsp;<em>seirigaku</em>&nbsp;性理学 (science des principes de la nature),&nbsp;<em>riron</em>&nbsp;理論 (science des principes),&nbsp;<em>kiken&nbsp;</em>希賢 (qu&ecirc;te de la sagesse) ou bien parmi d&rsquo;autres encore&nbsp;<em>jugaku</em>&nbsp;儒学 (confucianisme). Ces traductions renvoyaient toutes, plus ou moins explicitement, au confucianisme puisque comme le remarque Fr&eacute;d&eacute;ric Girard, Nishi &laquo;&nbsp;a vu dans le sage confuc&eacute;en, comme chez le moine zen d&rsquo;ailleurs, l&rsquo;attitude la plus proche de celle du philosophe qui consiste &agrave; chercher le principe de la nature des choses<a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnote10_uwyh23a" id="footnoteref10_uwyh23a" title="Frédéric Girard, « En quel sens peut-on parler de philosophie au Japon ? », op. cit., p. 116.">10</a><br /> &nbsp;&raquo;. Cependant, Nishi souhaitait distinguer explicitement le confucianisme, d&rsquo;origine orientale, et la philosophie. Aussi, il cherchait &agrave; &eacute;viter toute confusion avec d&rsquo;autres sciences comme la physique (<em>butsurigaku</em>&nbsp;物理学) ou la physiologie (<em>seirigaku</em>&nbsp;生理学). Il finira par utiliser le vocable&nbsp;<em>tetsugaku</em>&nbsp;哲学 (science de la sagesse), expression abr&eacute;g&eacute;e de&nbsp;<em>kitetsugaku</em>&nbsp;希哲学 (science de la recherche de la sagesse), venant d&rsquo;une autre expression&nbsp;<em>kikyūtetsuchi</em>&nbsp;希求哲智 (qu&ecirc;te de la sagesse). Cette derni&egrave;re expression est elle-m&ecirc;me inspir&eacute;e de la formule&nbsp;<em>shikiken&nbsp;</em>士希賢 (lettr&eacute; recherchant la sagesse) du confuc&eacute;en Zhou Dunyi (<em>shūton.i&nbsp;</em>周敦頤, 1017-1073).</p> <h1><strong>Nature</strong></h1> <p>Contrairement au mot utilis&eacute; pour d&eacute;signer la philosophie, le terme utilis&eacute; pour d&eacute;signer en japonais la nature &ndash; la nature environnante &ndash; ne rel&egrave;ve pas exclusivement d&rsquo;une tentative de traduction d&rsquo;un terme occidental. Son origine est &agrave; rechercher en Chine. D&eacute;sign&eacute;e par le vocable&nbsp;<em>z&igrave;r&aacute;n</em>&nbsp;自然 (ce qui est ainsi de lui-m&ecirc;me, spontan&eacute;ment), sa signification d&rsquo;origine tao&iuml;ste se construisit par contraste avec le terme confuc&eacute;en&nbsp;<em>x&igrave;ng&nbsp;</em>(性) qui d&eacute;signe la nature intrins&egrave;que, la nature inn&eacute;e<a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnote11_2cmia6f" id="footnoteref11_2cmia6f" title="Voir à ce propos : Kristofer Schipper, « Nature. 性 xìng. 自然 zìrán », dans Pierre Legendre [dir.], Tour du monde des concepts, Paris, Fayard, 2013, p. 137-141.">11</a><br /> .</p> <p>Au Japon, l&rsquo;occurrence la plus ancienne du vocable chinois&nbsp;<em>z&igrave;r&aacute;n&nbsp;</em>自然, alors prononc&eacute;&nbsp;<em>jinen</em>, figure dit-on dans deux ouvrages du VIII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle<a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnote12_pjmldcf" id="footnoteref12_pjmldcf" title="Le présent propos est constitué à partir du dictionnaire suivant : Hiromatsu Wataru 廣松渉, Iwanami tetsugaku – shisō jiten 岩波哲学・思想辞典 (Dictionnaire de la philosophie et de la pensée [de l’éditeur] Iwanami), Tōkyō, Iwanami shoten 岩波書店, 1998, p. 639-640.">12</a><br /> intitul&eacute;s&nbsp;<em>Fudoki</em>&nbsp;風土記 (Chroniques du milieu [japonais]) et le&nbsp;<em>Man&rsquo;yōshū</em>&nbsp;万葉集 (Recueil de dix mille feuilles). Les&nbsp;<em>Fudoki</em>&nbsp;sont des chroniques cens&eacute;es rapporter, &agrave; la demande de l&rsquo;imp&eacute;ratrice Genmei 元明 (661-721), l&rsquo;histoire, les coutumes, les traditions, la g&eacute;ographie ou encore certains des mythes et l&eacute;gendes qui avaient cours dans les provinces du Japon. Le&nbsp;<em>Man&rsquo;yōshū</em>&nbsp;n&rsquo;est autre que la premi&egrave;re anthologie de&nbsp;<em>waka</em>&nbsp;和歌. C&rsquo;est chez le moine fondateur de l&rsquo;&eacute;cole bouddhique japonaise&nbsp;<em>Shingon</em>&nbsp;真言, le c&eacute;l&egrave;bre Kūkai (空海, 774-835), que nous trouvons le premier usage au Japon de&nbsp;<em>jinen</em>&nbsp;dans un contexte qui serait celui de l&rsquo;histoire des id&eacute;es. Dans le&nbsp;<em>Himitsu mandara jūjūshinron&nbsp;</em>秘 密曼荼羅十住心論 (Les dix demeures du mental du mandala pr&eacute;cieux) qui date de 830, Kūkai fait usage de ce terme comme traduction du sanskrit&nbsp;<em>svabhāva</em>&nbsp;&ndash; habituellement traduit en sino-japonais&nbsp;<em>jishō</em>&nbsp;自性 &ndash; et d&eacute;signe ainsi la nature propre des choses. N&eacute;anmoins, pour Kūkai, il s&rsquo;agit de la m&ecirc;me chose que ce que d&eacute;signe&nbsp;<em>z&igrave;r&aacute;n</em>&nbsp;chez les tao&iuml;stes Laozi (VI<sup>e&nbsp;</sup>si&egrave;cle av. J.-C.) et Zhuangzi (IV<sup>e&nbsp;</sup>si&egrave;cle av. J.-C.). Il est ainsi question de ce qui est ainsi de lui-m&ecirc;me, spontan&eacute;ment. Dans son&nbsp;<em>Jinen hōni&nbsp;</em>自然法爾 (La nature spontan&eacute;e), le moine Shinran (親鸞, 1173-1262), fondateur de l&rsquo;&eacute;cole bouddhique japonaise du Jōdo Shinshū 浄土真宗, invite &agrave; la lecture japonaise du compos&eacute;&nbsp;<em>jinen</em>&nbsp;自然 par l&rsquo;expression verbale&nbsp;<em>onozukara shikaru&nbsp;</em>自 ずから然る (fait d&rsquo;&ecirc;tre dans un &eacute;tat de spontan&eacute;it&eacute; faisant abstraction de tout artifice), ce qui imposera cette lecture aupr&egrave;s des sph&egrave;res intellectuelles nippones.</p> <p>C&rsquo;est &agrave; travers les &eacute;tudes hollandaises (<em>rangaku</em>&nbsp;蘭学) que le compos&eacute;&nbsp;<em>shizen&nbsp;</em>自然 en vient &agrave; signifier nature. En 1796 est publi&eacute; au Japon le&nbsp;<em>Harumawage</em>&nbsp;(波留麻和解), une traduction en japonais du dictionnaire hollandais-fran&ccedil;ais de Fran&ccedil;ois Halma (1653-1722), dans lequel le hollandais&nbsp;<em>natuur</em>&nbsp;est traduit&nbsp;<em>shizen</em>&nbsp;自然. La diffusion plus importante de dictionnaires hollandais-japonais, comme le&nbsp;<em>Yakuken&nbsp;</em>(訳鍵) de Fujibayashi Fuzan (藤林普山, 1781-1836) datant de 1810, qui associaient&nbsp;<em>shizen</em>&nbsp;自然 et nature, contribua &agrave; fixer l&rsquo;usage et ce, malgr&eacute; la concurrence de traductions telles que&nbsp;<em>zōka</em>&nbsp;(造化, cr&eacute;ation) ou&nbsp;<em>tenchi</em>&nbsp;(天地, litt. le ciel et la terre, c&rsquo;est-&agrave;-dire le monde).</p> <p>Aujourd&rsquo;hui, le compos&eacute; 自然 conserve en japonais son ambivalence avec son bassin s&eacute;mantique tao&iuml;que renvoyant au caract&egrave;re spontan&eacute; et autonome de la nature, sa signification bouddhique en tant que nature propre des choses&nbsp;<em>jishō</em>自性 (<em>svabhāva</em>), et son sens occidental en tant que nature, et dans des consid&eacute;rations modernes, en tant que nature objectiv&eacute;e. Cette ambivalence permet &agrave; un auteur comme Augustin Berque de reprendre &agrave; son compte une partie du patrimoine s&eacute;mantique sino-japonais de ce vocable en proposant la conception d&rsquo;une science naturante,&nbsp;<em>shizengaku</em>&nbsp;自然学<a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnote13_2k5fbdm" id="footnoteref13_2k5fbdm" title="Augustin Berque, Poétique de la Terre. Histoire naturelle et histoire humaine, essai de mésologie, Paris, Belin, 2014, p. 199-200.">13</a><br /> . En outre, le chinois &eacute;galement mobilise de nos jours le compos&eacute; 自然 pour d&eacute;signer la nature.</p> <h1><strong>M&eacute;taphysique</strong></h1> <p>Dans le&nbsp;<em>Classique des mutations</em>&nbsp;(<em>Ekikyō</em>&nbsp;易経), recueil de textes de nature divinatoire dont le contenu se serait stabilis&eacute; sous les dynasties des Han (206 av. J.-C.- 220 apr. J.-C.), il peut &ecirc;tre lu que&nbsp;:&nbsp;&laquo;&nbsp;Ce qui est au-del&agrave; des formes (<em>keijijō&nbsp;</em>形而上) s&rsquo;appelle Dao&nbsp;; ce qui est en-de&ccedil;&agrave; des formes (<em>keijika</em>&nbsp;形而下) s&rsquo;appelle objets concrets<a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnote14_z0zc4gl" id="footnoteref14_z0zc4gl" title="Nous reprenons pour cette formule célèbre la traduction et le commentaire d’Anne Cheng. Nous ajoutons simplement les graphies ainsi que les lectures japonaises. Voir : Anne Cheng, Histoire de la pensée chinoise, Paris, Seuil, 1997, p. 282-285.">14</a><br /> . &raquo;</p> <p>Dans le Japon de l&rsquo;&eacute;poque d&rsquo;Edo (1603-1867), les compos&eacute;s&nbsp;<em>keijijō&nbsp;</em>et&nbsp;<em>keijika</em>&nbsp;apparaissent dans un ouvrage d&rsquo;Arai Hakuseki (新井白石, 1657-1725) r&eacute;dig&eacute; dans les ann&eacute;es 1710, le&nbsp;<em>Seiyō kibun</em>&nbsp;(西洋紀聞), une &eacute;tude en trois volumes de l&rsquo;Occident bas&eacute;e sur des entretiens d&rsquo;Arai Hakuseki avec le missionnaire j&eacute;suite Giovanni Battista Sidotti (1668-1714). Ces deux compos&eacute;s figurent &eacute;galement dans le&nbsp;<em>Taigiroku</em>&nbsp;(大疑録), un ouvrage de 1714 du n&eacute;oconfuc&eacute;en Kaibara Ekiken (貝原益軒, 1630-1714), o&ugrave; il est question de ce qui est en amont des formes (<em>keijijō&nbsp;</em>形而上) et de ce qui se trouve en aval des formes (<em>keijika</em>&nbsp;形而下) dans la perspective du&nbsp;<em>Classique des Mutations</em>. Dans son carnet de notes personnel (<em>Bunken manroku</em>&nbsp;聞見漫録), le hollandisant Takano Chōei (高野長英, 1804-1850)<a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnote15_z7l0rwz" id="footnoteref15_z7l0rwz" title="Sur cette figure des études hollandaises, voir : Frédéric Girard, « Les théories des philosophes occidentaux (1836). La première histoire épistémique de la philosophie occidentale en japonais, par Takano Chōei », Ebisu [en ligne], n° 51 (2014), http://ebisu.revues.org/1480 [consulté le 22 juin 2015].">15</a><br /> parle de la science de ce qui est au-del&agrave; des formes (<em>keijijō no gaku&nbsp;</em>形而上の学), c&rsquo;est-&agrave;-dire celle qu&rsquo;aborde le&nbsp;<em>Classique des Mutations</em>, et de celle qui traite de ce qui se trouve en-de&ccedil;&agrave; des formes (<em>keijika no gaku&nbsp;</em>形 而下の学), c&rsquo;est-&agrave;-dire le sensible, le physique, renvoyant ainsi aux sciences occidentales. Progressivement, plusieurs traductions concurrentes seront propos&eacute;es pour m&eacute;taphysique comme&nbsp;<em>seirigaku</em>&nbsp;性理学 (science des principes de la nature) dont le terme sera ensuite utilis&eacute; par Nishi pour d&eacute;signer la psychologie, usage qui ne perdurera pas puisque le terme actuel pour d&eacute;signer la psychologie est&nbsp;<em>shinrigaku</em>&nbsp;心理学 (science des principes du mental).</p> <p>Nishi Amane lui-m&ecirc;me proposera plusieurs traductions pour le terme de m&eacute;taphysique. En 1870 dans son&nbsp;<em>Hyakugaku renkan&nbsp;</em>(百学連環,&nbsp;<em>Panorama de toutes les sciences</em>), il propose l&rsquo;expression&nbsp;<em>butsurigai no gaku&nbsp;</em>物 理外ノ学, science de ce qui est au-del&agrave; du physique. Conforme &agrave; son d&eacute;samour pour le propos m&eacute;taphysique, cette formulation tendait &agrave; isoler le m&eacute;taphysique du physique. Plusieurs traductions viendront ensuite sous sa plume comme&nbsp;<em>chōrigaku</em>&nbsp;超理学, science au-del&agrave; des principes,&nbsp;<em>mukeirigaku</em>&nbsp;無形理学, science des principes du sans forme, ou encore&nbsp;<em>rigaku</em>&nbsp;理学, science des principes. Nous voyons bien que dans ses traductions, Nishi s&rsquo;essayait &agrave; rendre les deux composantes du terme de m&eacute;taphysique que sont &laquo;&nbsp;m&eacute;ta&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;physique&nbsp;&raquo;. Dans son&nbsp;<em>Seisei hatsu&rsquo;un</em>&nbsp;(生性発蘊,&nbsp;<em>Fondements de la physiologie et de la psychologie</em>), r&eacute;dig&eacute; entre 1871 et 1873, il &eacute;crit lui-m&ecirc;me que les m&eacute;taphysiciens (<em>chōrigakuka</em>&nbsp;超理学家) traitent des principes (<em>ri</em>&nbsp;理) de ce qui est au-del&agrave; des formes (<em>keijijō&nbsp;</em>形而上)<a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnote16_6amyk15" id="footnoteref16_6amyk15" title="Cité dans le Dictionnaire des termes traduits de la philosophie et de la pensée, op. cit., p. 89.">16</a><br /> .</p> <p>Finalement, faisant reposer son contenu sur des travaux et usages ant&eacute;rieurs, le&nbsp;<em>Tetsugaku jii</em>&nbsp;(哲学字彙, Vocabulaire de la philosophie) dirig&eacute; par Inoue Tetsujirō (井上哲次郎, 1855-1944), contribua en 1881 &agrave; fixer ce qui &eacute;tait probablement d&eacute;j&agrave; l&rsquo;usage&nbsp;: traduire le terme de m&eacute;taphysique par&nbsp;<em>keijijōgaku&nbsp;</em>形而上学, la science de ce qui est au-del&agrave; des formes. Une traduction qui doit beaucoup au&nbsp;<em>Classique des Mutations</em>&nbsp;et que la Chine reprendra pour d&eacute;signer elle aussi la m&eacute;taphysique.</p> <h1><strong>Conclusion</strong></h1> <p>Reprenant une formule ancienne signifiant &laquo;&nbsp;&acirc;me japonaise, g&eacute;nie chinois&nbsp;&raquo;&nbsp;<em>wakon kansai&nbsp;</em>和 魂漢才, qui notait et entretenait &agrave; la fois l&rsquo;importance pour le Japon de la culture lettr&eacute;e chinoise, Fukuzawa Yukichi (福沢諭吉, 1835-1901), un intellectuel japonais proposa la formule &laquo; &acirc;me japonaise, g&eacute;nie occidental&nbsp;&raquo;&nbsp;<em>wakon yōsai</em>&nbsp;和魂洋才. C&rsquo;est dire l&rsquo;importance que rev&ecirc;taient les savoirs occidentaux pour les &eacute;lites intellectuelles d&rsquo;alors. Les &eacute;lites intellectuelles japonaises cherchaient activement &agrave; assimiler les savoirs occidentaux, parmi lesquels la philosophie. Si, dans un premier temps, les &eacute;lites politiques de l&rsquo;&eacute;poque d&rsquo;Edo furent, pour certaines d&rsquo;entre elles, r&eacute;ticentes &agrave; cette occidentalisation possible du Japon, celles de l&rsquo;&eacute;poque Meiji y furent grandement favorables. Elles visaient la modernisation du pays principalement par crainte que le Japon ne finisse par &ecirc;tre colonis&eacute; ou annex&eacute; par une autre puissance. Crainte m&ecirc;l&eacute;e d&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t, telles sont de longue date les relations du Japon &agrave; la Chine et du Japon &agrave; l&rsquo;Occident. Peut-&ecirc;tre est-ce l&agrave; l&rsquo;une des clefs pour lire l&rsquo;actualit&eacute; extr&ecirc;me-orientale ?</p> <h2>Notes et r&eacute;f&eacute;rences</h2> <ul> <li id="footnote1_1dh777o"><a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnoteref1_1dh777o">1</a>Comme le veut l&rsquo;usage, les anthroponymes d&rsquo;Asie orientale seront donn&eacute;s dans leur ordre normal&nbsp;: nom puis pr&eacute;nom. Les noms propres chinois seront d&rsquo;abord donn&eacute;s dans leur transcription d&rsquo;usage depuis le chinois, puis entre parenth&egrave;ses sera indiqu&eacute;e la transcription japonaise. Nos transcriptions du japonais sont celles du syst&egrave;me Hepburn modifi&eacute;, celles du chinois du syst&egrave;me pinyin.</li> <li id="footnote2_j733w9u"><a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnoteref2_j733w9u">2</a>Le terme de milieu est ici &agrave; entendre, comme explicit&eacute; par Berque, dans sa dimension &eacute;cologique, technique et symbolique. Il prend en compte tant l&rsquo;historicit&eacute; que la spatialit&eacute; inh&eacute;rente aux milieux. Voir &agrave; ce propos&nbsp;: Augustin Berque,&nbsp;<em>&Eacute;coum&egrave;ne : introduction &agrave; l&rsquo;&eacute;tude des milieux humains&nbsp;</em>(2000), Paris, Belin, 2009, p. 157.</li> <li id="footnote3_rw4ydzn"><a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnoteref3_rw4ydzn">3</a>Jean-No&euml;l Robert, &laquo;&nbsp;La hi&eacute;roglossie japonaise&nbsp;&raquo;, le&ccedil;on inaugurale prononc&eacute;e le 2 f&eacute;vrier 2012, Paris, Coll&egrave;ge de France, 2012, [en ligne],&nbsp;<a href="http://books.openedition.org/cdf/551%23annexdocs">http://books.openedition.org/cdf/551#annexdocs</a>.</li> <li id="footnote4_iho78c4"><a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnoteref4_iho78c4">4</a>Notre propos est librement inspir&eacute; de la pr&eacute;face du manuel suivant&nbsp;: Jean-No&euml;l Robert,&nbsp;<em>Lectures &eacute;l&eacute;mentaires en style sino-japonais (kanbun)</em>, Paris, Universit&eacute; Paris-VII, 1986, p. 1-7.</li> <li id="footnote5_s9d63t2"><a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnoteref5_s9d63t2">5</a><em>Ibid.</em>, p. 1.</li> <li id="footnote6_3ebl1op"><a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnoteref6_3ebl1op">6</a><em>Ibid.</em>, p. 2.</li> <li id="footnote7_26prrmx"><a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnoteref7_26prrmx">7</a>Voir &agrave; ce propos Natalia Teplova, &laquo;&nbsp;Traduction et politique langagi&egrave;re au Japon&nbsp;: de l&rsquo;&lsquo;&lsquo;ouverture au monde&rsquo;&rsquo; &agrave; la &lsquo;&lsquo;mondialisation&rdquo; &raquo;,&nbsp;<em>Meta&nbsp;: journal des traducteurs&nbsp;/ Meta: Translators&rsquo; Journal</em>, vol. 51, n&deg; 4 (2006), p.&nbsp;760 ; Uehara Mayuko, &laquo;&nbsp;<a href="http://nirc.nanzan-u.ac.jp/nfile/2151">The Philosophy of Translation: From Nishida Kitarō to Ogyū Sorai&nbsp;</a>&raquo;,&nbsp;<em>Essays in Japanese Philosophy</em>, vol. 7 (2010), p. 305-319.</li> <li id="footnote8_5p4l1g1"><a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnoteref8_5p4l1g1">8</a>Voir les documents suivants&nbsp;: Fr&eacute;d&eacute;ric Girard, &laquo;&nbsp;En quel sens peut-on parler de philosophie au Japon&nbsp;?&nbsp;&raquo;, dans&nbsp;<em>Cipango : cahiers d&rsquo;&eacute;tudes japonaises</em>, n&deg;2 (1993), p. 116-117 ; Miyanaga Takashi 宮永孝,<em>Seiyōtetsugaku denraikō&nbsp;: muromachi jidaimakki kara meijiki made</em>&nbsp;西洋哲学伝来考&nbsp;: 室町時代末期から明治期まで (R&eacute;flexions sur l&rsquo;introduction de la philosophie occidentale&nbsp;: de la fin de l&rsquo;&eacute;poque Muromachi &agrave; l&rsquo;&eacute;poque Meiji), Tōkyō, Hōseidaigaku shakaigakubugakkai 法政大学社会学部学会, 2005, p. 25-28 ; Miyanaga Takashi 宮永孝,&nbsp;<em>Seiyōtetsugaku denraishōshi</em>&nbsp;西洋哲学伝来小史 (Petite histoire de l&rsquo;introduction de la philosophie occidentale), Tōkyō, Hōseidaigaku shakaigakubugakkai 法政大学社会学部学会, 2010, p. 2-5.</li> <li id="footnote9_yguu8sw"><a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnoteref9_yguu8sw">9</a>Nous proposons ici une synth&egrave;se de plusieurs travaux&nbsp;: Fr&eacute;d&eacute;ric Girard, &laquo;&nbsp;En quel sens peut-on parler de philosophie au Japon&nbsp;?&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>op. cit.</em>, p. 116-117 ; Uehara Mayuko, &laquo;&nbsp;La t&acirc;che du traducteur en philosophie dans le Japon moderne&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Essays in Japanese Philosophy</em>, n&deg;3 (2008), p. 284-286 ; Ishizuka Masahide 石塚正英, Shibata Takayuki 柴田隆行, Tetsugaku &ndash; shisō hon.yakugo jiten 哲学・思想翻訳語辞典 (Dictionnaire des termes traduits de la philosophie et de la pens&eacute;e), Tōkyō, Ronsōsha 論創社, 2013, p. 209-210.</li> <li id="footnote10_uwyh23a"><a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnoteref10_uwyh23a">10</a>Fr&eacute;d&eacute;ric Girard, &laquo;&nbsp;En quel sens peut-on parler de philosophie au Japon&nbsp;?&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>op. cit.</em>, p. 116.</li> <li id="footnote11_2cmia6f"><a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnoteref11_2cmia6f">11</a>Voir &agrave; ce propos : Kristofer Schipper, &laquo;&nbsp;Nature. 性&nbsp;<em>x&igrave;ng</em>.<em> </em>自然&nbsp;<em>z&igrave;r&aacute;n</em>&nbsp;&raquo;, dans Pierre Legendre [dir.],&nbsp;<em>Tour du monde des concepts</em>, Paris, Fayard, 2013, p. 137-141.</li> <li id="footnote12_pjmldcf"><a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnoteref12_pjmldcf">12</a>Le pr&eacute;sent propos est constitu&eacute; &agrave; partir du dictionnaire suivant&nbsp;: Hiromatsu Wataru 廣松渉,&nbsp;<em>Iwanami tetsugaku &ndash; shisō jiten</em>&nbsp;岩波哲学・思想辞典 (Dictionnaire de la philosophie et de la pens&eacute;e [de l&rsquo;&eacute;diteur] Iwanami), Tōkyō, Iwanami shoten 岩波書店, 1998, p. 639-640.</li> <li id="footnote13_2k5fbdm"><a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnoteref13_2k5fbdm">13</a>Augustin Berque,&nbsp;<em>Po&eacute;tique de la Terre. Histoire naturelle et histoire humaine, essai de&nbsp;m&eacute;sologie</em>,<em>&nbsp;</em>Paris, Belin, 2014, p. 199-200.</li> <li id="footnote14_z0zc4gl"><a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnoteref14_z0zc4gl">14</a>Nous reprenons pour cette formule c&eacute;l&egrave;bre la traduction et le commentaire d&rsquo;Anne Cheng. Nous ajoutons simplement les graphies ainsi que les lectures japonaises. Voir&nbsp;: Anne Cheng,&nbsp;<em>Histoire de la pens&eacute;e chinoise</em>, Paris, Seuil, 1997, p. 282-285.</li> <li id="footnote15_z7l0rwz"><a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnoteref15_z7l0rwz">15</a>Sur cette figure des &eacute;tudes hollandaises, voir&nbsp;: Fr&eacute;d&eacute;ric&nbsp;Girard, &laquo;&nbsp;<em>Les th&eacute;ories des philosophes occidentaux</em>&nbsp;(1836). La premi&egrave;re histoire &eacute;pist&eacute;mique de la philosophie occidentale en japonais, par Takano Chōei&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Ebisu</em>&nbsp;[en ligne], n&deg; 51 (2014),&nbsp;<a href="http://ebisu.revues.org/1480">http://ebisu.revues.org/1480</a>&nbsp;[consult&eacute; le 22 juin 2015].</li> <li id="footnote16_6amyk15"><a href="https://alepreuve.org/content/vie-de-concepts-le-vocabulaire-philosophique-au-japon#footnoteref16_6amyk15">16</a>Cit&eacute; dans le&nbsp;<em>Dictionnaire des termes traduits de la philosophie et de la pens&eacute;e</em>,&nbsp;<em>op. cit.</em>, p. 89.</li> </ul>