<p><q>&nbsp;La pens&eacute;e moderne s&rsquo;est peut-&ecirc;tre invent&eacute; le baroque comme on s&rsquo;offre un miroir<sup><a href="#nbp_1" id="note_1" name="lien_nbp_1" title="Aller à la note de bas de page n°1">1</a></sup>.</q></p> <p>Au cours des ann&eacute;es 1950-60, le &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; devient signe pour une vari&eacute;t&eacute; extr&ecirc;mement large de situations et d&rsquo;objets, au point qu&rsquo;il aurait pu figurer, &agrave; c&ocirc;t&eacute; du &laquo;&nbsp;<em>bifteck</em>&nbsp;&raquo; ou de la &laquo;&nbsp;Publicit&eacute; de la profondeur&nbsp;&raquo;<em>,</em>&nbsp;parmi les mythologies de Roland Barthes. D&rsquo;une mani&egrave;re similaire au processus subi par ces &laquo;&nbsp;mythes&nbsp;&raquo;, de&nbsp;<em>sens,</em>&nbsp;le terme s&rsquo;est transform&eacute; en&nbsp;<em>forme</em>, transformation au cours de laquelle &laquo;&nbsp;le sens &eacute;loigne sa contingence&nbsp;; il se vide, il s&rsquo;appauvrit, l&rsquo;histoire s&rsquo;&eacute;vapore, il ne reste plus que la lettre<sup><a href="#lien_nbp_2" id="note_2" name="lien_nbp_2" title="Aller à la note de bas de page n°2">2</a></sup>&nbsp;&raquo;. Ainsi, l&rsquo;&laquo;&nbsp;inflation&nbsp;d&eacute;sordonn&eacute;e&nbsp;&raquo; du terme a permis &laquo; que soient p&ecirc;le-m&ecirc;le annex&eacute;s &agrave; un baroque &eacute;ternel le g&eacute;n&eacute;ral de Gaulle et l&rsquo;avant-garde litt&eacute;raire, le jeu d&rsquo;un footballeur et des recettes de cuisine&nbsp;&raquo;, en rendant presque impossible d&rsquo;en &eacute;tablir une d&eacute;finition arr&ecirc;t&eacute;e<sup><a href="#lien_nbp_3" id="note_3" name="lien_nbp_3" title="Aller à la note de bas de page n°3">3</a></sup>.</p> <p>Cette &eacute;volution vers une sorte de palimpseste s&eacute;miotique trouve son origine dans une p&eacute;riode relativement r&eacute;cente&nbsp;: au d&eacute;but du XX<sup>&egrave;me</sup>&nbsp;si&egrave;cle le mot, qui indiquait jusqu&rsquo;alors la production artistique d&rsquo;une p&eacute;riode historique pr&eacute;cise, en arrive &agrave; d&eacute;signer l&rsquo;un des caract&egrave;res atemporels de la sensibilit&eacute; humaine. Rappelons rapidement les &eacute;tapes principales qui scandent l&rsquo;histoire critique du mot, ancr&eacute;e dans des &eacute;changes intellectuels europ&eacute;ens. Si Jacob Burckhardt est parmi les premiers, dans son<em>&nbsp;Cicerone</em><sup><a href="#lien_nbp_4" id="note_4" name="lien_nbp_4" title="Aller à la note de bas de page n°4">4</a></sup><em>,</em>&nbsp;&agrave; utiliser l&rsquo;adjectif pour d&eacute;signer un art et un style con&ccedil;us dans la continuit&eacute; de la Renaissance, on doit la premi&egrave;re &eacute;tude approfondie &agrave; Heinrich W&ouml;lfflin, son disciple et successeur &agrave; l&rsquo;Universit&eacute; de B&acirc;le. En 1888, ce dernier publie le texte fondateur&nbsp;<em>Renaissance und Barock</em><sup><a href="#lien_nbp_5" id="note_5" name="lien_nbp_5" title="Aller à la note de bas de page n°5">5</a></sup>, qui circulera rapidement dans les d&eacute;cennies successives en influen&ccedil;ant en particulier la critique anglaise et italienne. Commence ainsi un&nbsp;<em>revival</em>&nbsp;baroque qui marquera tout le XX<sup>&egrave;me&nbsp;</sup>si&egrave;cle, m&ecirc;me si l&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t qu&rsquo;on a port&eacute; &agrave; la notion n&rsquo;a pas &eacute;t&eacute; toujours positivement connot&eacute;. On a un exemple majeur d&rsquo;une attitude ambigu&euml; chez Benedetto Croce, qui en 1929 publie&nbsp;<em>Storia dell&rsquo;et&agrave; barocca in Italia</em><sup><a href="#lien_nbp_6" id="note_6" name="lien_nbp_6" title="Aller à la note de bas de page n°6">6</a></sup>. Ce livre joue un r&ocirc;le paradoxal&nbsp;: s&rsquo;il se trouve &agrave; l&rsquo;origine du processus de red&eacute;couverte du &laquo;&nbsp;baroque historique&nbsp;&raquo; (notamment par le travail consid&eacute;rable de r&eacute;&eacute;dition de textes men&eacute; par Croce), il condamne en m&ecirc;me temps la notion ainsi que le XVII<sup>&egrave;me</sup>&nbsp;si&egrave;cle, en stigmatisant la production de cette p&eacute;riode en tant qu&rsquo;expression du &laquo;&nbsp;laid artistique&nbsp;&raquo;. Il ne faut attendre que tr&egrave;s peu, toutefois, pour voir &eacute;merger une position &agrave; l&rsquo;oppos&eacute; de la conception de Croce, &agrave; savoir celle du critique espagnol Eugenio D&rsquo;Ors qui, en 1931, publie<em>&nbsp;Du baroque</em>. Dans ce texte, qu&rsquo;on retrouvera plus loin, D&rsquo;Ors est le premier &agrave; parler du &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; en tant qu&rsquo;<em>e</em><em>on</em>, &agrave; savoir &laquo;&nbsp;une constante qui se retrouve &agrave; des &eacute;poques aussi r&eacute;ciproquement &eacute;loign&eacute;es que l&rsquo;Alexandrisme de la Contre-r&eacute;forme ou celle-ci [les ann&eacute;es 1930] de la p&eacute;riode &ldquo;fin de si&egrave;cle<sup><a href="#lien_nbp_7" id="note_7" name="lien_nbp_7" title="Aller à la note de bas de page n°7">7</a></sup>&rdquo;&nbsp;&raquo;. Si l&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t pour cette cat&eacute;gorie est donc constant depuis la fin du XIX<sup>&egrave;me</sup>&nbsp;si&egrave;cle, c&rsquo;est dans le deuxi&egrave;me apr&egrave;s-guerre que &laquo;&nbsp;la guerre de reconqu&ecirc;te [se mue] en marche triomphale<sup><a href="#lien_nbp_8" id="note_8" name="lien_nbp_8" title="Aller à la note de bas de page n°8">8</a></sup>&nbsp;&raquo;, et que la notion &laquo;&nbsp;fait &eacute;v&eacute;nement&nbsp;&raquo;, comme le confirme l&rsquo;&eacute;tendue des &eacute;tudes d&eacute;di&eacute;es au sujet. &Agrave; cause de la circulation incontr&ocirc;l&eacute;e du terme, de quel c&ocirc;t&eacute; qu&rsquo;on se tourne, d&egrave;s lors, en mati&egrave;re de &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo;, on est constamment hant&eacute; par la menace du trop-plein. Les diff&eacute;rentes significations s&rsquo;ajoutent et se superposent les unes aux autres jusqu&rsquo;&agrave; brouiller les limites du domaine l&eacute;gitime de son utilisation<sup><a href="#lien_nbp_9" id="note_9" name="lien_nbp_9" title="Aller à la note de bas de page n°9">9</a></sup>.</p> <p>Toutefois, bien que le cas du &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; soit sans doute extr&ecirc;me de ce point de vue, il s&rsquo;agit l&agrave;, &agrave; bien voir, d&rsquo;un destin que partagent d&rsquo;autres cat&eacute;gories utilis&eacute;es couramment dans l&rsquo;histoire litt&eacute;raire et artistique. &Agrave; l&rsquo;instar des notions comme celle de &laquo;&nbsp;r&eacute;alisme&nbsp;&raquo;, de &laquo;&nbsp;romantisme&nbsp;&raquo; et de &laquo;&nbsp;modernisme&nbsp;&raquo;, entre autres, cette &eacute;tiquette, se pr&ecirc;tant aux usages les plus disparates, devient un mot vague, permettant d&rsquo;&eacute;tablir des rapprochements m&eacute;taphoriques sur lesquels on pr&eacute;tend fonder des interpr&eacute;tations historiques<sup><a href="#lien_nbp_10" id="note_10" name="lien_nbp_10" title="Aller à la note de bas de page n°10">10</a></sup>. Si on peut parler du &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; comme d&rsquo;un &laquo;&nbsp;mythe&nbsp;&raquo; contemporain, ce n&rsquo;est pas en ce qu&rsquo;il d&eacute;signerait une &laquo;&nbsp;essence&nbsp;&raquo; de l&rsquo;esprit, mais plut&ocirc;t au sens o&ugrave; Barthes d&eacute;finissait le mythe comme &eacute;tant proche &laquo;&nbsp;de ce que la sociologie durkheimienne appelle une &ldquo;repr&eacute;sentation collective<sup><a href="#lien_nbp_11" id="note_11" name="lien_nbp_11" title="Aller à la note de bas de page n°11">11</a></sup>&rdquo;&nbsp;&raquo;. Pour comprendre les raisons de l&rsquo;attraction que le &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; a exerc&eacute;e et continue d&rsquo;exercer, il convient donc d&rsquo;adopter une approche qui, s&rsquo;inspirant de l&rsquo;histoire sociale des structures mentales collectives, s&rsquo;interroge sur ce que le terme de &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; a permis de dire et a permis de faire, plut&ocirc;t qu&rsquo;en tant que concept qui servirait &agrave; d&eacute;signer des qualit&eacute;s intrins&egrave;ques aux &oelig;uvres. Nous nous proposons donc d&rsquo;aborder la notion dans une optique qui pense celle-ci &laquo;&nbsp;comme un objet relationnel et positionnel se pr&ecirc;tant &agrave; des usages strat&eacute;giques, antagonistes et conflictuels<sup><a href="#lien_nbp_12" id="note_12" name="lien_nbp_12" title="Aller à la note de bas de page n°12">12</a></sup>&nbsp;&raquo;. Autrement dit, comme l&rsquo;un des instruments utilis&eacute;s dans la lutte des repr&eacute;sentations qui anime les champs culturels.</p> <p>Il s&rsquo;agira dans ce qui suit d&rsquo;analyser la p&eacute;riode du succ&egrave;s maximal de la notion, les ann&eacute;es 1950-60, en concentrant notre attention sur deux pays, la France et l&rsquo;Italie, dont l&rsquo;analyse nous permettra d&rsquo;illustrer l&rsquo;affirmation suivante, qui ouvre l&rsquo;entr&eacute;e &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; du&nbsp;<em>Dictionnaire des intraduisibles&nbsp;:&nbsp;</em>&laquo;&nbsp;l&rsquo;&eacute;vidence de sa traduction dans toutes les langues europ&eacute;ennes masque les signifi&eacute;s multiples du mot<sup><a href="#lien_nbp_13" id="note_13" name="lien_nbp_13" title="Aller à la note de bas de page n°13">13</a></sup>. &raquo; Si la notion de &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; voyage entre l&rsquo;espace italien et l&rsquo;espace fran&ccedil;ais, devenant par-l&agrave; l&rsquo;indicateur d&rsquo;une synchronisation r&eacute;elle au niveau europ&eacute;en dans le domaine de la culture, derri&egrave;re ce mot se cache en effet une vari&eacute;t&eacute; d&rsquo;enjeux et d&rsquo;objets. L&rsquo;&laquo;&nbsp;&acirc;ge baroque&nbsp;&raquo; oubli&eacute; resurgit, en prenant part au renouveau g&eacute;n&eacute;ral qui investit &agrave; la fois la cr&eacute;ation et la critique, mais cela en suivant les logiques propres aux traditions intellectuelles de chaque pays. Cette r&eacute;&eacute;valuation n&rsquo;est possible, ensuite, que gr&acirc;ce &agrave; l&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t de toute une partie des acteurs du champ culturel, parmi lesquels on trouve &eacute;galement une nouvelle g&eacute;n&eacute;ration de critiques litt&eacute;raires qui s&rsquo;approprient la notion pour op&eacute;rer un deuxi&egrave;me type de transfert, cette fois-ci vers leur discipline. Les d&eacute;cennies 1950-60, au cours desquelles ce transfert a lieu, sont une p&eacute;riode de transition, qui s&rsquo;ouvre et se cl&ocirc;t par deux crises historiques majeures&nbsp;: d&rsquo;une part la fin de la deuxi&egrave;me Guerre Mondiale, avec les cons&eacute;quences que cela comporte en termes de r&eacute;organisation de la vie civile et culturelle, d&rsquo;autre part la crise de Mai 1968, qui affecte &eacute;norm&eacute;ment le champ intellectuel et universitaire<sup><a href="#lien_nbp_14" id="note_14" name="lien_nbp_14" title="Aller à la note de bas de page n°14">14</a></sup>. Ces facteurs historiques jouent un r&ocirc;le capital dans la reconstruction de la gen&egrave;se des usages du &laquo;&nbsp;baroque litt&eacute;raire&nbsp;&raquo;. Ils entra&icirc;nent, d&rsquo;une part, un effet de superposition temporelle&nbsp;: la plupart des critiques se r&eacute;f&eacute;rant &agrave; la notion ont soulign&eacute;, en effet, la proximit&eacute; qu&rsquo;elle permet de mettre au jour entre l&rsquo;histoire sombre du XX<sup>&egrave;me</sup>&nbsp;si&egrave;cle et les &eacute;v&eacute;nements historico-politiques qui caract&eacute;risent le XVII<sup>&egrave;me</sup>&nbsp;si&egrave;cle. L&rsquo;association du &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; avec une p&eacute;riode marqu&eacute;e par la catastrophe et le trauma qui d&eacute;rive de ce rapprochement temporel contribue &agrave; faire de celui-ci un horizon de compr&eacute;hension &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur duquel situer le contemporain. Les moments de crise se configurent, d&rsquo;autre part, comme des &laquo;&nbsp;temps ouverts o&ugrave; tous les avenirs paraissent possibles<sup><a href="#lien_nbp_15" id="note_15" name="lien_nbp_15" title="Aller à la note de bas de page n°15">15</a></sup>&nbsp;&raquo;, et au cours desquels peut avoir lieu une restructuration des appareils cognitifs et conceptuels. Ce sont des temps propices &agrave; la r&eacute;vision des sch&eacute;mas collectifs de perception et &agrave; l&rsquo;&eacute;mergence de notions qui avaient du mal &agrave; circuler et &agrave; s&rsquo;imposer avant.</p> <p>Apr&egrave;s avoir reconstruit quelques-uns des enjeux des op&eacute;rations historiographiques qui m&egrave;nent &agrave; la r&eacute;&eacute;valuation de la notion en France et en Italie, nous interrogerons les usages du &laquo;&nbsp;baroque litt&eacute;raire&nbsp;&raquo;. Pour ce faire, nous concentrerons notre attention sur les &eacute;crivains Carlo Emilio Gadda et Claude Simon. Les usages de la notion dans leurs cas sont particuli&egrave;rement &eacute;clairants, puisqu&rsquo;ils montrent les diff&eacute;rents enjeux que celle-ci recouvrait dans l&rsquo;apr&egrave;s-guerre. Il ne s&rsquo;agira donc pas tant d&rsquo;analyser en quoi les &oelig;uvres de Gadda et de Simon peuvent &ecirc;tre consid&eacute;r&eacute;es comme baroques, mais plut&ocirc;t de se demander pourquoi, ou comment, les critiques, et les &eacute;crivains eux-m&ecirc;mes, ont eu recours &agrave; cette notion parmi d&rsquo;autres disponibles.</p> <h2>1.France&nbsp;: la mont&eacute;e du &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; entre &laquo;&nbsp;g&eacute;nie classique&nbsp;&raquo; et structuralisme</h2> <p>En tant que travail de r&eacute;vision historiographique, les d&eacute;bats autour du baroque adviennent principalement &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur et aux marges du champ acad&eacute;mique. Laissant de c&ocirc;t&eacute; les quelques voix isol&eacute;es qui s&rsquo;expriment en sa faveur avant la deuxi&egrave;me Guerre Mondiale, le premier moment important de visibilit&eacute; est constitu&eacute; sans doute par la publication, en 1949, d&rsquo;un num&eacute;ro de la&nbsp;<em>Revue des sciences humaines</em>, qui, en r&eacute;unissant les chercheurs travaillant sur ce sujet, visait un bilan de la recherche francophone<sup><a href="#lien_nbp_16" id="note_16" name="lien_nbp_16" title="Aller à la note de bas de page n°16">16</a></sup>. Pour voir comment la notion se d&eacute;-historicise et arrive &agrave; &ecirc;tre utilis&eacute;e pour les &oelig;uvres litt&eacute;raires, il faut porter l&rsquo;attention sur la figure en particulier de Jean Rousset, &laquo;&nbsp;ma&icirc;tre-pilote en Baroque<sup><a href="#lien_nbp_17" id="note_17" name="lien_nbp_17" title="Aller à la note de bas de page n°17">17</a></sup>&nbsp;&raquo;. N&eacute; en 1910, il se forme &agrave; l&rsquo;universit&eacute; de Gen&egrave;ve, en suivant entre autres les cours d&rsquo;Albert Thibaudet. Il commence &agrave; travailler sur le th&egrave;me du &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo;, qui sera le cadre de toutes ses recherches, en r&eacute;digeant une th&egrave;se sous la direction de Marcel Raymond<sup><a href="#lien_nbp_18" id="note_18" name="lien_nbp_18" title="Aller à la note de bas de page n°18">18</a></sup>, qui, s&rsquo;&eacute;tant d&eacute;j&agrave; int&eacute;ress&eacute; au sujet, le guide vers ce choix. Sa th&egrave;se, publi&eacute;e en 1953, appara&icirc;t sous le titre&nbsp;<em>La litt&eacute;rature de l&rsquo;&acirc;ge baroque en France</em>, ouvrage dont le succ&egrave;s sera consid&eacute;rable.</p> <p><q>Je me suis m&ecirc;l&eacute; dans les ann&eacute;es 50-60, &agrave; ce qui fut une d&eacute;couverte collective, faut-il dire m&ecirc;me l&rsquo;invention d&rsquo;un baroque litt&eacute;raire en France&nbsp;; ce fut le travail d&rsquo;une g&eacute;n&eacute;ration d&rsquo;apr&egrave;s-guerre, pr&eacute;par&eacute; d&egrave;s le d&eacute;but du si&egrave;cle dans les cercles restreints d&rsquo;historiens de l&rsquo;art, surtout hors de France<sup><a href="#lien_nbp_19" id="note_19" name="lien_nbp_19" title="Aller à la note de bas de page n°19">19</a></sup>.</q></p> <p>De ces quelques mots qui nous renvoient &agrave; cette p&eacute;riode, retenons en particulier le caract&egrave;re international de cette d&eacute;couverte collective. Que l&rsquo;impulsion &agrave; la r&eacute;&eacute;valuation du &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; vienne de la part des &laquo;&nbsp;francophones&nbsp;&raquo; suisses tels Rousset et Raymond, situ&eacute;s dans une sorte de &laquo;&nbsp;lieu de m&eacute;diation&nbsp;&raquo; entre la France et le reste de l&rsquo;Europe et par-l&agrave; moins impliqu&eacute;s dans les contraintes du champ acad&eacute;mique fran&ccedil;ais, n&rsquo;est pas pour surprendre<sup><a href="#lien_nbp_20" id="note_20" name="lien_nbp_20" title="Aller à la note de bas de page n°20">20</a></sup>.</p> <p>Pour les tenants de la norme classique, alors dominante en France, la r&eacute;habilitation de &laquo;&nbsp;l&rsquo;&acirc;ge baroque&nbsp;&raquo; comportait une s&eacute;rie de cons&eacute;quences non secondaires, qui &eacute;taient, avant tout, d&rsquo;ordre g&eacute;opolitique. Comme Rousset l&rsquo;affirme dans son livre pionnier, en mati&egrave;re de &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; &laquo;&nbsp;la France tient son r&ocirc;le dans un concert&nbsp;; il est impossible d&rsquo;&eacute;tudier et d&rsquo;estimer ce r&ocirc;le en l&rsquo;isolant de l&rsquo;&eacute;tranger [&hellip;] Ce qui ressort de ces recherches c&rsquo;est que la France re&ccedil;oit, ou refuse, plut&ocirc;t qu&rsquo;elle ne donne<sup><a href="#lien_nbp_21" id="note_21" name="lien_nbp_21" title="Aller à la note de bas de page n°21">21</a></sup>&nbsp;&raquo;. On comprend bien qu&rsquo;accepter un tel constat et l&eacute;gitimer la notion de &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; signifiait, en somme, renoncer au primat de la &laquo;&nbsp;litt&eacute;rature nationale&nbsp;&raquo; en mettant par l&agrave; en danger son identit&eacute;. Du point de vue du contenu ensuite, le &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; appara&icirc;t comme l&rsquo;expression de l&rsquo;irrationnel, du d&eacute;sordre, de l&rsquo;instabilit&eacute;, de l&rsquo;outrance. Suivant une logique binaire que son insertion visait justement &agrave; d&eacute;construire<sup><a href="#lien_nbp_22" id="note_22" name="lien_nbp_22" title="Aller à la note de bas de page n°22">22</a></sup>, il r&eacute;sumait, autrement dit, tous les traits contraires &agrave; l&rsquo;&laquo;&nbsp;esprit fran&ccedil;ais&nbsp;&raquo;, qui, selon la d&eacute;finition donn&eacute;e par des historiens de la litt&eacute;rature aussi influents que Nisard et Lanson, est &laquo;&nbsp;classique&nbsp;&raquo; par d&eacute;finition et serait l&rsquo;incarnation, ou l&rsquo;expression, &laquo;&nbsp;de la logique elle-m&ecirc;me<sup><a href="#lien_nbp_23" id="note_23" name="lien_nbp_23" title="Aller à la note de bas de page n°23">23</a></sup>&nbsp;&raquo;. Ce qui se profile au cours de ces d&eacute;bats est l&rsquo;affrontement entre deux conceptions incompatibles du pass&eacute; litt&eacute;raire et de la nation contemporaine, et, plus pr&eacute;cis&eacute;ment, le questionnement du rapport m&ecirc;me que ces deux termes doivent entretenir. L&rsquo;horizon id&eacute;ologique que ces oppositions d&eacute;voilent dans l&rsquo;apr&egrave;s-guerre est mis en avant par un observateur attentif tel que Roland Barthes, qui reconna&icirc;t comment dans cette&nbsp;lutte de valeurs,&nbsp;&laquo;&nbsp;ce qui est fran&ccedil;ais &ndash; le g&eacute;n&eacute;ral de Gaulle en a donn&eacute; une d&eacute;finition &ndash; c&rsquo;est ce qui est &ldquo;r&eacute;gulier, normal, national&rdquo;<sup><a href="#lien_nbp_24" id="note_24" name="lien_nbp_24" title="Aller à la note de bas de page n°24">24</a></sup>&nbsp;&raquo;.</p> <p>Afin de comprendre les raisons profondes qui sont &agrave; la base de l&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t qui se d&eacute;veloppe autour du &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo;, il faut donc prendre en compte les conflits qui structuraient plus largement l&rsquo;espace acad&eacute;mique de l&rsquo;&eacute;poque ainsi que l&rsquo;espace culturel en g&eacute;n&eacute;ral. Revenant &agrave; Rousset, sa trajectoire elle-m&ecirc;me, les int&eacute;r&ecirc;ts qui animent ses recherches successives ainsi que le type de lecture des textes qu&rsquo;il propose sont tr&egrave;s significatifs &agrave; cet &eacute;gard. Sous tous ces aspects Rousset est en effet tr&egrave;s proche des repr&eacute;sentants d&rsquo;un courant qui, encore embryonnaire dans les ann&eacute;es 1950, &eacute;mergera dans la d&eacute;cennie suivante sous l&rsquo;&eacute;tiquette de &laquo;&nbsp;nouvelle critique&nbsp;<sup><a href="#lien_nbp_25" id="note_25" name="lien_nbp_25" title="Aller à la note de bas de page n°25">25</a></sup>&raquo;. En proposant une approche transdisciplinaire faisant interagir l&rsquo;histoire litt&eacute;raire avec des disciplines naissantes, telles la linguistique structurale et la s&eacute;miotique, des penseurs comme Barthes, Genette, Todorov et Kristeva &eacute;taient en train de modifier la critique litt&eacute;raire. Allaient dans cette m&ecirc;me direction les membres de l&rsquo;&laquo;&eacute;cole de Gen&egrave;ve&raquo;, dont Rousset &eacute;tait une figure de relief, qui partageaient avec la &laquo;&nbsp;nouvelle critique&nbsp;&raquo; la mise en question de l&rsquo;histoire litt&eacute;raire et l&rsquo;attention port&eacute;e aux dynamiques internes des textes<sup><a href="#lien_nbp_26" id="note_26" name="lien_nbp_26" title="Aller à la note de bas de page n°26">26</a></sup>. Fond&eacute; sur une approche ph&eacute;nom&eacute;nologique, l&rsquo;acte critique &eacute;tait con&ccedil;u par Rousset comme le r&eacute;sultat de la rencontre entre un homme et une &oelig;uvre. Sa conception novatrice pr&ocirc;nait un regard subjectif, capable de se laisser guider par le plaisir que l&rsquo;&oelig;uvre suscite, et de saisir l&rsquo;organisation interne de celle-ci. Le corpus des &oelig;uvres &laquo;&nbsp;baroques&nbsp;&raquo; et l&rsquo;usage de la cat&eacute;gorie elle-m&ecirc;me, abord&eacute;s dans cet esprit, se constituent, m&ecirc;me et peut-&ecirc;tre surtout du point de vue m&eacute;thodologique, comme une enclave de libert&eacute; &agrave; l&rsquo;abri de la&nbsp;<em>doxa</em>&nbsp;acad&eacute;mique ainsi qu&rsquo;une sorte de laboratoire o&ugrave; exp&eacute;rimenter des lectures nouvelles des textes. C&rsquo;est justement &agrave; partir des recherches sur le XVII<sup>&egrave;me</sup>&nbsp;si&egrave;cle que Rousset con&ccedil;oit&nbsp;<em>Forme et signification&nbsp;: essais sur les structures litt&eacute;raires de Corneille &agrave; Claudel</em><sup><a href="#lien_nbp_27" id="note_27" name="lien_nbp_27" title="Aller à la note de bas de page n°27">27</a></sup>. Cet ouvrage publi&eacute; en 1962 eut un succ&egrave;s important&nbsp;: en pla&ccedil;ant le concept de structure dans le titre et dans l&rsquo;exergue, l&rsquo;auteur marquait une association claire avec le structuralisme dont l&rsquo;influence &eacute;tait de plus en plus importante.</p> <p>Tous ces conflits, qui restent latents pendant environ une d&eacute;cennie, acqui&egrave;rent une visibilit&eacute; soudaine en 1966, quand &eacute;clate l&rsquo;&laquo;&nbsp;affaire Barthes-Picard&nbsp;&raquo;. &Eacute;tablissant une opposition nette entre une critique universitaire conservatrice et une critique d&rsquo;avant-garde, cette querelle impose une unit&eacute; &agrave; deux camps qui &eacute;taient loin d&rsquo;&ecirc;tre homog&egrave;nes et oblige l&rsquo;ensemble du monde critique, directement ou indirectement, &agrave; prendre position<sup><a href="#lien_nbp_28" id="note_28" name="lien_nbp_28" title="Aller à la note de bas de page n°28">28</a></sup>. Bref, en observant les r&eacute;seaux &agrave; travers lesquels la notion de &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; est promue en France, on s&rsquo;aper&ccedil;oit que ce sont des r&eacute;seaux proches de ceux qui ont &eacute;t&eacute; &agrave; la base de l&rsquo;essor du structuralisme, et parfois les m&ecirc;mes. Le &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;litt&eacute;raire &raquo; entre ainsi dans l&rsquo;arsenal de concepts et de m&eacute;thodes &agrave; disposition de l&rsquo;avant-garde intellectuelle de l&rsquo;&eacute;poque, destin&eacute;e &agrave; changer radicalement le panorama th&eacute;orique fran&ccedil;ais et international.</p> <p>&gt;h1 id=&quot;toc-italie-le-baroque-contre-le-mythe-de-la-dcadence&quot; class=&quot;dontsplit dontend&quot;&gt;Italie, le &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; contre le mythe de la d&eacute;cadence</p> <p>Cette reconstruction sommaire des enjeux que la notion de &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; recouvre dans le champ fran&ccedil;ais des ann&eacute;es 1950-60 montre que les jugements critiques qu&rsquo;on lui porte, qu&rsquo;ils soient positifs ou n&eacute;gatifs, d&eacute;passent largement la sph&egrave;re purement esth&eacute;tique, en se chargeant d&rsquo;enjeux d&rsquo;ordre moral et id&eacute;ologique. Cet aspect n&rsquo;appara&icirc;t que davantage quand on se tourne du c&ocirc;t&eacute; italien, o&ugrave; le nombre d&rsquo;agents du champ qui s&rsquo;int&eacute;ressent &agrave; la notion et qui l&rsquo;adoptent &agrave; un moment ou &agrave; un autre est impressionnant. Pour que notre reconstitution soit compl&egrave;te et pour qu&rsquo;elle rende justice &agrave; l&rsquo;ampleur caract&eacute;risant la reprise des &eacute;tudes sur le &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo;, il faudrait prendre en compte des figures aussi diverses que Pier Paolo Pasolini et Roberto Longhi, Carlo Calcaterra, Italo Calvino, Giovanni Getto, Ezio Raimondi et Enrico Filippini<sup><a href="#lien_nbp_29" id="note_29" name="lien_nbp_29" title="Aller à la note de bas de page n°29">29</a></sup>. Faute de pouvoir les aborder tous, nous allons concentrer notre attention sur Luciano Anceschi, qui est peut-&ecirc;tre le chef de ce concert de voix baroques et qu&rsquo;on peut consid&eacute;rer comme un v&eacute;ritable &laquo;&nbsp;passeur&nbsp;&raquo; de la notion en Italie, ainsi qu&rsquo;un pont entre le champ acad&eacute;mique et le champ litt&eacute;raire. N&eacute; en 1911 &agrave; Milan, il est &eacute;l&egrave;ve d&rsquo;Antonio Banfi, figure de premier plan de la philosophie italienne des ann&eacute;es 1930. C&rsquo;est en fr&eacute;quentant ses cours qu&rsquo;Anceschi commence &agrave; s&rsquo;int&eacute;resser &agrave; la ph&eacute;nom&eacute;nologie, exp&eacute;rience qui va entrecroiser &agrave; maints &eacute;gards son int&eacute;r&ecirc;t pour le &laquo;&nbsp;baroque<sup><a href="#lien_nbp_30" id="note_30" name="lien_nbp_30" title="Aller à la note de bas de page n°30">30</a></sup>&nbsp;&raquo;. Il commence &agrave; travailler sur ce dernier &agrave; la suite de la d&eacute;couverte des textes de Carlo Calcaterra, et en particulier du livre&nbsp;<em>Il Parnaso in rivolta</em>, dans lequel le XVII&egrave;me si&egrave;cle, contre la vulgate courante, est pr&eacute;sent&eacute; comme une p&eacute;riode ayant des liens profonds avec la modernit&eacute;<sup><a href="#lien_nbp_31" id="note_31" name="lien_nbp_31" title="Aller à la note de bas de page n°31">31</a></sup>. Calcaterra est &agrave; son tour la voie d&rsquo;acc&egrave;s aux travaux d&rsquo;Eugenio D&rsquo;Ors, dont Anceschi traduit&nbsp;<em>Du baroque&nbsp;</em>en 1945, en accompagnant la traduction par une pr&eacute;face qui constitue le premier texte qu&rsquo;il consacre au sujet<sup><a href="#lien_nbp_32" id="note_32" name="lien_nbp_32" title="Aller à la note de bas de page n°32">32</a></sup>.</p> <p>On peut interroger les raisons de cette importation en prenant en consid&eacute;ration les trois op&eacute;rations qui caract&eacute;risent, selon Pierre Bourdieu, l&rsquo;&laquo;&nbsp;import-export&nbsp;&raquo; intellectuel&nbsp;: la &laquo;&nbsp;s&eacute;lection&nbsp;&raquo; (qu&rsquo;est-ce qu&rsquo;on traduit&nbsp;?), le &laquo;&nbsp;marquage&nbsp;&raquo; (qui traduit&nbsp;? comment et pourquoi&nbsp;?) et la &laquo;&nbsp;lecture&nbsp;&raquo; (quelles cat&eacute;gories de perception guident l&rsquo;interpr&eacute;tation<sup><a href="#lien_nbp_33" id="note_33" name="lien_nbp_33" title="Aller à la note de bas de page n°33">33</a></sup>&nbsp;?). Quant au choix du texte D&rsquo;Ors, celui-ci semble motiv&eacute; par des raisons qui sont les m&ecirc;mes que pour Rousset. Pour celui-ci l&rsquo;ouvrage du critique espagnol, bien qu&rsquo;il n&rsquo;ait pas fait l&rsquo;objet d&rsquo;une traduction, restait quand m&ecirc;me un rep&egrave;re fondamental. D&rsquo;une part, il s&rsquo;agissait d&rsquo;un livre qui, en fournissant une interpr&eacute;tation positive du &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo;, permettait aux deux critiques d&rsquo;en revendiquer la valeur contre le primat du classicisme pour l&rsquo;un, et la position de Croce pour l&rsquo;autre<sup><a href="#lien_nbp_34" id="note_34" name="lien_nbp_34" title="Aller à la note de bas de page n°34">34</a></sup>. D&rsquo;autre part, en &eacute;tudiant le baroque comme une notion transhistorique et en faisant abstraction de son contexte de d&eacute;part, D&rsquo;Ors rendait celle-ci disponible et applicable &agrave; d&rsquo;autres contextes et, surtout, &agrave; d&rsquo;autres disciplines. De notion dont la pertinence se limitait &agrave; l&rsquo;espace restreint de la recherche historique, elle devenait une notion qui pouvait interagir avec un vaste ensemble de ph&eacute;nom&egrave;nes contemporains. Ainsi, si la &laquo;&nbsp;d&eacute;couverte&nbsp;&raquo; du &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; &eacute;tait en Italie, comme dans le cas fran&ccedil;ais, un &eacute;v&eacute;nement en grande partie interne &agrave; la critique universitaire, elle finit par int&eacute;resser &eacute;galement l&rsquo;espace de la cr&eacute;ation artistique, et ceci en grande partie gr&acirc;ce, pr&eacute;cis&eacute;ment, &agrave; la position double d&rsquo;Anceschi. Ce dernier en effet, en plus d&rsquo;&ecirc;tre universitaire, &eacute;tait l&rsquo;une des figures de pointe de la&nbsp;<em>neoavanguardia</em>, mouvement litt&eacute;raire et po&eacute;tique qui influen&ccedil;a de mani&egrave;re importante la vie culturelle du pays pendant une d&eacute;cennie et dont il &eacute;tait un animateur infatigable. La principale revue de la<em>&nbsp;neoavanguardia</em>,&nbsp;<em>il Verri</em>, fond&eacute;e par Anceschi lui-m&ecirc;me, en 1958 consacre au &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; un num&eacute;ro sp&eacute;cial, expliquant les raisons de son actualit&eacute; et d&eacute;diant plusieurs articles aux &eacute;crivains du XVII<sup>&egrave;me&nbsp;</sup>si&egrave;cle. L&rsquo;une des caract&eacute;ristiques de l&rsquo;approche d&rsquo;Anceschi, dans laquelle on peut lire une volont&eacute; d&rsquo;internationalisation qui &eacute;tait assez r&eacute;pandue dans l&rsquo;apr&egrave;s-guerre, est la conviction que l&rsquo;&eacute;tude de cette notion doit se faire dans une perspective europ&eacute;enne, l&agrave; o&ugrave; Croce l&rsquo;avait men&eacute;e dans une perspective strictement nationale. En plus de signifier une ouverture aux productions artistiques &eacute;trang&egrave;res et la promotion d&rsquo;&eacute;tudes compar&eacute;es entre celles-ci et les &oelig;uvres italiennes, cela implique &eacute;galement une attention port&eacute;e aux d&eacute;bats critiques internationaux. La preuve en est le fait qu&rsquo;une section du num&eacute;ro monographique de&nbsp;<em>il Verri</em>&nbsp;pr&eacute;sentait les comptes-rendus des ouvrages critiques &eacute;trangers qui venaient de sortir sur le sujet. Parmi ceux-ci le livre de Rousset, dont l&rsquo;importance est attribu&eacute;e au fait qu&rsquo;il est le premier &agrave; consid&eacute;rer les formes litt&eacute;raires par r&eacute;f&eacute;rence aux formes figuratives<sup><a href="#lien_nbp_35" id="note_35" name="lien_nbp_35" title="Aller à la note de bas de page n°35">35</a></sup>. La m&eacute;diation &eacute;trang&egrave;re, d&rsquo;abord espagnole, fran&ccedil;aise ensuite, est donc fondamentale pour pouvoir op&eacute;rer le &laquo; rachat historiographique&nbsp;&raquo;, qui est l&rsquo;un des objectifs d&eacute;clar&eacute;s d&rsquo;Anceschi<sup><a href="#lien_nbp_36" id="note_36" name="lien_nbp_36" title="Aller à la note de bas de page n°36">36</a></sup>&nbsp;et qui vise la modification des paradigmes historiographiques dominants jusqu&rsquo;alors. Mais encore d&rsquo;autres raisons accompagnent le choix d&rsquo;un num&eacute;ro monographique, comme on le comprend en lisant l&rsquo;introduction, o&ugrave; on parle de la centralit&eacute; de cette th&eacute;matique&nbsp;:</p> <p><q>Il n&rsquo;y a sans doute pas de question plus controvers&eacute;e au sein de la critique [que celle du baroque]; elle englobe dans son syst&egrave;me de relations un ordre tr&egrave;s ample de structures [&hellip;] vraiment fondamentales, et, en m&ecirc;me temps, elle semble se r&eacute;f&eacute;rer &agrave; ce que nous sommes aujourd&rsquo;hui, il s&rsquo;agit d&rsquo;une notion qui nous r&eacute;v&egrave;le notre conscience d&rsquo;hommes contemporains<sup><a href="#lien_nbp_37" id="note_37" name="lien_nbp_37" title="Aller à la note de bas de page n°37">37</a></sup>.</q></p> <p>Le choix de faire de cette revue l&rsquo;un des organes de diffusion du &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; est tr&egrave;s significatif, car il indique l&rsquo;intention explicite de le rendre solidaire des programmes th&eacute;oriques et po&eacute;tiques de l&rsquo;avant-garde litt&eacute;raire. Que cette r&eacute;flexion sur le &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; occupe une place importante parmi les sources qui ont servi &agrave; Umberto Eco (&agrave; l&rsquo;&eacute;poque jeune critique recrut&eacute; par Anceschi comme contributeur de&nbsp;<em>il Verri</em>) pour l&rsquo;&eacute;laboration de la notion d&rsquo;&laquo;&nbsp;&oelig;uvre ouverte&nbsp;&raquo; n&rsquo;est pas pour surprendre. Car cette notion renvoie clairement &agrave; celle de &laquo;&nbsp;forme ouverte&nbsp;&raquo;<em>,</em>&nbsp;formul&eacute;e par W&ouml;lfflin comme un terme constituant l&rsquo;un des cinq couples cens&eacute;s repr&eacute;senter l&rsquo;opposition entre l&rsquo;art baroque et l&rsquo;art classique<sup><a href="#lien_nbp_38" id="note_38" name="lien_nbp_38" title="Aller à la note de bas de page n°38">38</a></sup>.</p> <p>Pour comprendre pleinement la troisi&egrave;me des op&eacute;rations qui accompagnent l&rsquo;importation de la notion de &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; en Italie, la &laquo;&nbsp;lecture&nbsp;&raquo; faite par Anceschi, il faut la situer dans le contexte de l&rsquo;apr&egrave;s-guerre. Celui-ci est marqu&eacute; par des changements profonds qui comportent la r&eacute;organisation radicale des milieux politiques et intellectuels<sup><a href="#lien_nbp_39" id="note_39" name="lien_nbp_39" title="Aller à la note de bas de page n°39">39</a></sup>. Si on assiste &agrave; l&rsquo;&eacute;mergence de ph&eacute;nom&egrave;nes nouveaux dans le domaine &agrave; la fois de la th&eacute;orie et de la cr&eacute;ation, tel justement la&nbsp;<em>neoavanguardia</em>, les syst&egrave;mes de pens&eacute;e qui dominaient avant la guerre, ainsi que les figures auxquelles ils &eacute;taient associ&eacute;s, ne disparaissent pas pour autant. C&rsquo;est bien le cas de la figure de Croce, dont la conception de l&rsquo;historiographie litt&eacute;raire constitue un dernier &eacute;l&eacute;ment &agrave; prendre en consid&eacute;ration pour compl&eacute;ter le cadre &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur duquel la discussion autour du &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; prend tout son sens. Comme nous l&rsquo;avons vu, Croce d&eacute;finit le &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; comme l&rsquo;expression du &laquo;&nbsp;laid artistique&nbsp;&raquo;, d&rsquo;une sensibilit&eacute; qui, au lieu de suivre les lois esth&eacute;tiques, est le r&eacute;sultat de la logique du caprice et de l&rsquo;h&eacute;donisme. En choisissant la voie facile qui remplace la recherche de la v&eacute;rit&eacute; par la construction d&rsquo;un effet excitant et stup&eacute;fiant, le &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; devenait &agrave; ses yeux l&rsquo;expression de la l&acirc;chet&eacute; et de la perversion morales<sup><a href="#lien_nbp_40" id="note_40" name="lien_nbp_40" title="Aller à la note de bas de page n°40">40</a></sup>. Le succ&egrave;s durable de cette lecture s&rsquo;explique par le fait qu&rsquo;elle &eacute;tait constitutive d&rsquo;une &eacute;conomie narrative dont l&rsquo;objet &eacute;tait, encore une fois, l&rsquo;identit&eacute; nationale, racont&eacute;e &agrave; travers son histoire litt&eacute;raire. Promue par des critiques comme Girolamo Tiraboschi et surtout Francesco De Sanctis, et avalis&eacute;e, du c&ocirc;t&eacute; des &eacute;crivains, par des figures comme Alessandro Manzoni et Giacomo Leopardi, la version officielle consid&eacute;rait la p&eacute;riode du&nbsp;<em>Risorgimento</em>, donc le moment de fondation de la nation unie, comme la r&eacute;action h&eacute;ro&iuml;que &agrave; environ deux si&egrave;cles de d&eacute;cadence, inaugur&eacute;s justement par le XVII<sup>&egrave;me&nbsp;</sup>si&egrave;cle baroque. Le &laquo;&nbsp;paradigme de la d&eacute;cadence&nbsp;&raquo; ne cesse d&rsquo;&ecirc;tre objet de discussion apr&egrave;s la deuxi&egrave;me Guerre Mondiale, quand il trouve de nouveaux d&eacute;fenseurs dans les repr&eacute;sentants de la gauche officielle, qui ranime la position de Croce &agrave; travers une lecture marxiste filtr&eacute;e par la pens&eacute;e d&rsquo;Antonio Gramsci, dont la publication des &oelig;uvres compl&egrave;tes a lieu ces m&ecirc;mes ann&eacute;es<sup><a href="#lien_nbp_41" id="note_41" name="lien_nbp_41" title="Aller à la note de bas de page n°41">41</a></sup>.</p> <p>Les cat&eacute;gories de perception du champ d&rsquo;accueil, fonctionnant comme un &laquo;&nbsp;prisme d&eacute;formant<sup><a href="#lien_nbp_42" id="note_42" name="lien_nbp_42" title="Aller à la note de bas de page n°42">42</a></sup>&nbsp;&raquo;, orientent donc l&rsquo;importation de la notion de &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; en la faisant entrer en dialogue avec les conflits de l&rsquo;&eacute;poque. Devenant objet de pol&eacute;mique surtout &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur de l&rsquo;historiographie marxiste, elle se trouve en profonde r&eacute;sonance, en particulier, avec les d&eacute;bats contemporains autour de l&rsquo;h&eacute;ritage moral de la R&eacute;sistance et avec la question li&eacute;e du r&ocirc;le des intellectuels<sup><a href="#lien_nbp_43" id="note_43" name="lien_nbp_43" title="Aller à la note de bas de page n°43">43</a></sup>. Ceci &agrave; cause de l&rsquo;image, souvent promue au cours de ces ann&eacute;es, de la R&eacute;sistance con&ccedil;ue comme un deuxi&egrave;me&nbsp;<em>Risorgimento</em>, qui, tout aussi bien que ce dernier, serait la r&eacute;action h&eacute;ro&iuml;que &agrave; une &eacute;poque sombre, repr&eacute;sent&eacute;e dans son cas par le r&eacute;gime fasciste<sup><a href="#lien_nbp_44" id="note_44" name="lien_nbp_44" title="Aller à la note de bas de page n°44">44</a></sup>. Ainsi charg&eacute;e de connotations politiques, la cat&eacute;gorie de &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; finit par indiquer des positions h&eacute;t&eacute;rodoxes, contraires &agrave; celles de la gauche officielle. Avec un flair que sa position d&rsquo;observateur &eacute;tranger ne fait qu&rsquo;aiguiser, Jean-Paul Sartre, qui au d&eacute;but des ann&eacute;es 1950 s&eacute;journe &agrave; Rome, semble saisir, en les exasp&eacute;rant peut-&ecirc;tre, ces conflits id&eacute;ologiques &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur desquels le &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; &eacute;tait pris. Dans un texte qu&rsquo;il r&eacute;dige au cours de son s&eacute;jour romain, apr&egrave;s avoir pr&eacute;sent&eacute; cet art comme l&rsquo;un des premiers exemples de &laquo;&nbsp;moyen de propagande<sup><a href="#lien_nbp_45" id="note_45" name="lien_nbp_45" title="Aller à la note de bas de page n°45">45</a></sup>&nbsp;&raquo;, il conclut ses notes de condamnation par le commentaire suivant&nbsp;: &laquo;&nbsp;Les Italiens d&rsquo;aujourd&rsquo;hui datent de la Contre-R&eacute;forme. Leur path&eacute;tique, leur go&ucirc;t de la vitesse, leur sinuosit&eacute;, l&rsquo;&eacute;loquence. La politique de 1870 &agrave; 1900, baroque. Mussolini&nbsp;: baroque<sup><a href="#lien_nbp_46" id="note_46" name="lien_nbp_46" title="Aller à la note de bas de page n°46">46</a></sup>. &raquo;</p> <h2>1. Transferts litt&eacute;raires</h2> <p>Si du c&ocirc;t&eacute; de ses d&eacute;tracteurs la notion constitue, comme on l&rsquo;a vu, une menace pour l&rsquo;int&eacute;grit&eacute; du canon litt&eacute;raire et, plus g&eacute;n&eacute;ralement, pour l&rsquo;histoire r&eacute;cente de la nation, pour les critiques qui se l&rsquo;approprient, son importation depuis l&rsquo;histoire de l&rsquo;art appara&icirc;t, en r&eacute;activant la m&eacute;moire d&rsquo;une &eacute;poque et d&rsquo;un corpus d&rsquo;ouvrages oubli&eacute;s, comme un instrument de subversion. Du m&ecirc;me coup, elle a servi, d&rsquo;un c&ocirc;t&eacute;, &agrave; consolider la position de ces critiques, nouveaux entrants dans le champ, et de l&rsquo;autre, comme nous l&rsquo;avons vu en particulier dans le cas de la France, &agrave; l&eacute;gitimer une conception sp&eacute;cifique de la litt&eacute;rature, ainsi que des &oelig;uvres contemporaines se rattachant &agrave; celle-ci. Malgr&eacute; le risque d&rsquo;anachronisme et d&rsquo;impr&eacute;cision auquel cette op&eacute;ration expose, l&rsquo;association &eacute;tablie entre une production litt&eacute;raire et artistique ancienne, alors reconnue par la critique qui se pr&eacute;sente comme la plus novatrice de l&rsquo;&eacute;poque, avec des textes contemporains appara&icirc;t comme une mani&egrave;re de l&eacute;gitimer ces derniers. Par d&eacute;finition (encore) inclassable, la litt&eacute;rature contemporaine demande toujours des points de rep&egrave;res pour &ecirc;tre situ&eacute;e, d&rsquo;autant plus si ces r&eacute;f&eacute;rences apparaissent comme des lettres de noblesse.</p> <p>Si tout transfert interdisciplinaire entra&icirc;ne un processus de re-s&eacute;mantisation, on peut interroger les enjeux de l&rsquo;application de la notion de &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; &agrave; des &oelig;uvres contemporaines. Les &eacute;crivains qui y font r&eacute;f&eacute;rence dans l&rsquo;apr&egrave;s-guerre &eacute;tant nombreux, nous avons d&eacute;cid&eacute; de concentrer notre attention sur Carlo Emilio Gadda et Claude Simon, &agrave; cause de leur position dans leurs champs respectifs, &agrave; maints &eacute;gards homologue et comparable. Suivant les analyses de Gilles Philippe et de Julien Piat, les ann&eacute;es 1950 sont marqu&eacute;es par le primat des questions stylistiques par rapport &agrave; l&rsquo;attention port&eacute;e traditionnellement aux contenus litt&eacute;raires et elles inaugurent une p&eacute;riode au cours de laquelle les choix linguistiques des &eacute;crivains deviennent l&rsquo;indicateur principal des enjeux id&eacute;ologiques et sociaux de leurs &oelig;uvres<sup><a href="#lien_nbp_47" id="note_47" name="lien_nbp_47" title="Aller à la note de bas de page n°47">47</a></sup>. Qu&rsquo;on pense aux r&eacute;flexions de Roland Barthes dans ces ann&eacute;es, notamment &agrave; l&rsquo;id&eacute;e d&rsquo;une &laquo;&nbsp;morale de la forme&nbsp;&raquo;, laquelle indique tr&egrave;s bien ce d&eacute;placement du plan th&eacute;matique au plan formel. Il appara&icirc;t d&egrave;s lors fructueux d&rsquo;appr&eacute;hender le champ litt&eacute;raire &agrave; partir des prises de position stylistiques et d&rsquo;esquisser une sorte de &laquo;&nbsp;cartographie des styles &raquo; des ann&eacute;es 1950, en reprenant les travaux de Philippe et Piat eux-m&ecirc;mes. Faisons l&rsquo;hypoth&egrave;se que le &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; a une place dans cette cartographie et qu&rsquo;il permet aux &eacute;crivains de se situer parmi les possibles litt&eacute;raires de l&rsquo;&eacute;poque. Dans un espace relationnel &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur duquel les styles coexistent et signifient les uns par rapport aux autres, le terme de &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; en vient donc &agrave; indiquer l&rsquo;une des &laquo;&nbsp;&eacute;critures&nbsp;&raquo; possibles. Celle-ci occuperait une position qui s&rsquo;oppose, d&rsquo;une part, aux &laquo;&nbsp;&eacute;critures politiques&nbsp;&raquo; (ou &laquo;&nbsp;r&eacute;volutionnaires&nbsp;&raquo;), &agrave; cause de l&rsquo;ambigu&iuml;t&eacute; id&eacute;ologique dont le terme &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; est charg&eacute;&nbsp;; d&rsquo;autre part, aux &laquo;&nbsp;&eacute;critures classiques&nbsp;&raquo;, par sa port&eacute;e exp&eacute;rimentale&nbsp;; ensuite &agrave; une n&eacute;buleuse de termes, similaires et parfois interchangeables, tels que &laquo;&nbsp;minimalisme&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;degr&eacute; z&eacute;ro de l&rsquo;&eacute;criture&nbsp;&raquo; ou &laquo;&nbsp;&eacute;criture blanche&nbsp;&raquo;, et qui indiquent tous le code stylistique et narratif dominant de ces ann&eacute;es<sup><a href="#lien_nbp_48" id="note_48" name="lien_nbp_48" title="Aller à la note de bas de page n°48">48</a></sup>. L&rsquo;usage d&rsquo;un langage complexe et recherch&eacute;, fond&eacute; sur une po&eacute;tique de l&rsquo;exc&egrave;s et de l&rsquo;indirection, qui caract&eacute;rise le style baroque, apparaissait, pendant ces ann&eacute;es, comme l&rsquo;indicateur d&rsquo;un&nbsp;<em>ethos</em>&nbsp;&eacute;litiste, ou aristocratique &ndash; un style se doublant d&rsquo;un&nbsp;<em>ethos</em>, donc exprimant en termes formels une position &eacute;thique. Se soustrayant &agrave; la norme, incarn&eacute;e par un langage limpide garantissant la communication et fond&eacute; sur une intention d&eacute;mocratique, il devenait objet pol&eacute;mique. Des reproches proprement litt&eacute;raires pesaient donc &eacute;galement sur le terme, &agrave; c&ocirc;t&eacute; de ceux plus ouvertement id&eacute;ologiques que nous avons vus. L&rsquo;imaginaire stylistique baroque &eacute;tait per&ccedil;u comme anormal, exc&eacute;dant le commun et tombant par-l&agrave; dans l&rsquo;illisibilit&eacute;. Or cette accusation fut souvent adress&eacute;e, aux cours de ces ann&eacute;es, &agrave; des &eacute;crivains comme Gadda et Simon.</p> <p>Que le champ des possibles stylistiques fran&ccedil;ais soit comparable &agrave; l&rsquo;italien, se confirme par le fait, par exemple, que les m&ecirc;mes &eacute;tiquettes circulent entre ces deux espaces. Et ceci &agrave; partir, &eacute;videmment, de celle de &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo;, jusqu&rsquo;&agrave; celle de &laquo;&nbsp;degr&eacute; z&eacute;ro de l&rsquo;&eacute;criture&nbsp;&raquo;, qui est import&eacute;e en Italie o&ugrave; elle sert au critique Gianfranco Contini pour caract&eacute;riser le style d&rsquo;un &eacute;crivain comme Alberto Moravia<sup><a href="#lien_nbp_49" id="note_49" name="lien_nbp_49" title="Aller à la note de bas de page n°49">49</a></sup>. Ainsi tous ces aspects qu&rsquo;on vient de pr&eacute;senter nous semblent s&rsquo;appliquer aux choix d&rsquo;&eacute;criture faits par Claude Simon et par Carlo Emilio Gadda. Mais il convient d&rsquo;approfondir cette question dans les pages suivantes, en d&eacute;clinant &agrave; pr&eacute;sent les sp&eacute;cificit&eacute;s de chaque &eacute;crivain.</p> <h2>2.Gadda et l&rsquo;encombrante &eacute;tiquette de &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo;</h2> <p>Carlo Emilio Gadda, &eacute;crivain actif depuis le d&eacute;but des ann&eacute;es 1930, mais envers qui la critique, &agrave; l&rsquo;exclusion de quelques exceptions, est rest&eacute;e indiff&eacute;rente jusqu&rsquo;&agrave; assez tard, connut dans l&rsquo;apr&egrave;s-guerre un succ&egrave;s consid&eacute;rable, en particulier &agrave; partir de 1957, ann&eacute;e de publication de son dernier livre &ndash;&nbsp;<em>Quer Pasticciaccio brutto de via Marulana</em>. C&rsquo;est &agrave; partir de ce moment que s&rsquo;entame un processus de r&eacute;ception et de cons&eacute;cration, au cours duquel son &oelig;uvre devient, aux yeux de beaucoup, un mod&egrave;le pour le renouveau du roman italien. Le &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; a fini par constituer un&nbsp;<em>topos</em>&nbsp;de la critique qui depuis lors a consacr&eacute; &agrave; cet &eacute;crivain une attention constante. L&rsquo;adoption de ce terme date des ann&eacute;es 1930, quand le critique Giuseppe De Robertis l&rsquo;emploie dans un essai o&ugrave;, loin de l&rsquo;imposer arbitrairement, il le reprenait du texte de Gadda lui-m&ecirc;me. Il sera utilis&eacute; par la suite r&eacute;guli&egrave;rement, souvent comme synonyme de&nbsp;<em>maccheronico</em>&nbsp;ou de grotesque, ou encore pour renvoyer au plurilinguisme qui caract&eacute;rise cet &oelig;uvre<sup><a href="#lien_nbp_50" id="note_50" name="lien_nbp_50" title="Aller à la note de bas de page n°50">50</a></sup>. Gadda est donc le premier &agrave; faire r&eacute;f&eacute;rence &agrave; l&rsquo;imaginaire baroque et &agrave; utiliser l&rsquo;adjectif dans ses romans, parfois pour renvoyer &agrave; des mod&egrave;les artistiques pr&eacute;cis, d&rsquo;autres fois simplement, en l&rsquo;utilisant comme synonyme de &laquo;&nbsp;bizarre&nbsp;&raquo;, ou, dans l&rsquo;acception de &laquo;&nbsp;baroquisme&nbsp;&raquo;, comme synonyme de &laquo;&nbsp;pr&eacute;cieux&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;sophistiqu&eacute;&nbsp;&raquo;. Du point de vue du style ensuite, c&rsquo;est encore Gadda lui-m&ecirc;me qui, en faisant l&rsquo;inventaire des possibilit&eacute;s qui caract&eacute;risent son &eacute;criture, parle d&rsquo;une mani&egrave;re &laquo;&nbsp;<em>meravigliosa 600</em>&nbsp;&raquo;, qui appelle comme mod&egrave;le le ton emphatique et la recherche d&rsquo;un effet de surprise caract&eacute;risant les &oelig;uvres du XVII<sup>&egrave;me&nbsp;</sup>si&egrave;cle<sup><a href="#lien_nbp_51" id="note_51" name="lien_nbp_51" title="Aller à la note de bas de page n°51">51</a></sup>. Il s&rsquo;agit enfin, &eacute;galement, d&rsquo;une r&eacute;f&eacute;rence philosophique, car le &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; renvoie &agrave; des philosophes, tels Spinoza et en particulier Leibniz, qui sont &agrave; la base de la formation de Gadda et dont la pens&eacute;e est fondamentale pour la construction du syst&egrave;me de compr&eacute;hension du monde sur lequel se fonde son &oelig;uvre.</p> <p>Et pourtant, malgr&eacute; ces nombreuses r&eacute;f&eacute;rences qui semblent le rapprocher de cette cat&eacute;gorie, Gadda a toujours montr&eacute; une m&eacute;fiance &agrave; son &eacute;gard, m&eacute;fiance qui appara&icirc;t plus &eacute;vidente, et plus motiv&eacute;e, dans les ann&eacute;es de l&rsquo;apr&egrave;s-guerre. L&rsquo;&acirc;pre conflit de valeurs au centre duquel la notion de &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; se trouvait alors, et que nous avons vu dans les pages pr&eacute;c&eacute;dentes, joue, en effet, pleinement chez cet &eacute;crivain, qui, par la complexit&eacute; de ses int&eacute;r&ecirc;ts et la singularit&eacute; de son &oelig;uvre, occupe une position difficile &agrave; d&eacute;finir. Si la cat&eacute;gorie de &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; avait &eacute;t&eacute; &eacute;lue, d&rsquo;un c&ocirc;t&eacute;, par la&nbsp;<em>neoavanguardia</em>&nbsp;pour indiquer une esth&eacute;tique et un style exp&eacute;rimentaux r&eacute;pondant le mieux aux exigences de la contemporan&eacute;it&eacute;, pour les &eacute;crivains proches du n&eacute;or&eacute;alisme et ayant des positions politiques de gauche, elle &eacute;tait surtout connot&eacute;e n&eacute;gativement. Le terme &eacute;tait en effet synonyme de d&eacute;sengagement, sinon, dans le pire des cas, comme le parall&egrave;le de Sartre le laisse entendre, l&rsquo;expression d&rsquo;une position r&eacute;actionnaire. Gadda, qui en 1950 avait exprim&eacute; publiquement son aversion pour l&rsquo;esth&eacute;tique n&eacute;or&eacute;aliste et dont les positions politiques &eacute;taient loin d&rsquo;&ecirc;tre progressistes, percevait l&rsquo;&eacute;tiquette de &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; comme une menace qui lui aurait enlev&eacute; les faveurs de tout un pan important de la critique, au moment o&ugrave; commen&ccedil;ait la publication d&rsquo;une partie de son &oelig;uvre chez Einaudi, &eacute;diteur d&eacute;j&agrave; prestigieux qui &eacute;tait &agrave; l&rsquo;&eacute;poque l&rsquo;un des repr&eacute;sentants de la gauche militante italienne. D&rsquo;autre part, Gadda est attentif &agrave; prendre ses distances avec cette notion sans doute pour ne pas &ecirc;tre confondu avec la production avant-gardiste, &agrave; laquelle il &eacute;tait souvent, et malgr&eacute; lui, associ&eacute;<sup><a href="#lien_nbp_52" id="note_52" name="lien_nbp_52" title="Aller à la note de bas de page n°52">52</a></sup>. La r&eacute;action de Pier Paolo Pasolini, l&rsquo;un des &eacute;crivains de la nouvelle g&eacute;n&eacute;ration qui d&eacute;fend et promeut son &oelig;uvre, est tr&egrave;s significative &agrave; cet &eacute;gard. Conscient du risque de marginalisation, il propose de parler de &laquo;&nbsp;baroque-r&eacute;aliste&nbsp;&raquo;, aussi pour distinguer Gadda du &laquo;&nbsp;d&eacute;cadent&nbsp;&raquo; D&rsquo;Annunzio<sup><a href="#lien_nbp_53" id="note_53" name="lien_nbp_53" title="Aller à la note de bas de page n°53">53</a></sup>. Pasolini adopte par l&agrave; une strat&eacute;gie de l&eacute;gitimation qui, en associant le &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; avec le &laquo;&nbsp;r&eacute;alisme&nbsp;&raquo;, label alors tr&egrave;s en vogue, permettait de lib&eacute;rer l&rsquo;&oelig;uvre gaddienne du soup&ccedil;on de d&eacute;sengagement.</p> <p>Bref, la position de Gadda &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur de ces conflits qui structurent le champ litt&eacute;raire italien ne saurait &ecirc;tre minimis&eacute;e quand il s&rsquo;agit d&rsquo;expliquer la &laquo;&nbsp;question du baroque&nbsp;&raquo; chez cet &eacute;crivain, qui est souvent abord&eacute;e, au contraire, uniquement par le biais d&rsquo;une lecture interne<sup><a href="#lien_nbp_54" id="note_54" name="lien_nbp_54" title="Aller à la note de bas de page n°54">54</a></sup>. &Agrave; d&eacute;faut de la resituer dans ce contexte historique et id&eacute;ologique, on reste perplexe face &agrave; des r&eacute;actions constamment contradictoires et presque schizophr&eacute;niques&nbsp;: d&rsquo;un c&ocirc;t&eacute; un Gadda qui, au cours des ann&eacute;es 1950, contribue au renouveau de l&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t pour l&rsquo;&eacute;poque baroque en traduisant les textes des Espagnols du &laquo;&nbsp;<em>Siglo de oro</em>&nbsp;&raquo;, qui jouent dans son &oelig;uvre, d&rsquo;ailleurs, un r&ocirc;le fondamental d&rsquo;inspiration<sup><a href="#lien_nbp_55" id="note_55" name="lien_nbp_55" title="Aller à la note de bas de page n°55">55</a></sup>. De l&rsquo;autre c&ocirc;t&eacute;, moins de dix ans plus tard, un Gadda qui dans la postface &agrave; l&rsquo;&eacute;dition de&nbsp;<em>La cognizione del dolore</em>&nbsp;publi&eacute;e chez Einaudi<em>,</em>&nbsp;refuse tout voisinage avec cette notion, en offrant comme excuse ce qui appara&icirc;t &agrave; de nombreux critiques comme un raccourci logique. Plut&ocirc;t qu&rsquo;un parti pris esth&eacute;tique en soi difficile &agrave; d&eacute;finir, ce qui oriente l&rsquo;attitude de Gadda, en la rendant in&eacute;vitablement ambigu&euml; et complexe, c&rsquo;est sans doute la signification que l&rsquo;actualit&eacute; conf&egrave;re &agrave; la notion&nbsp;de &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo;&nbsp;: l&rsquo;ensemble des cons&eacute;quences que d&eacute;clenche la relecture du pass&eacute; en fonction des enjeux du pr&eacute;sent, les discours et les positions qu&rsquo;elle sert &agrave; l&eacute;gitimer.</p> <h2>3. Simon, exp&eacute;rimentation entre litt&eacute;rature et peinture</h2> <p>Au niveau du discours tenu par l&rsquo;&eacute;crivain, la pr&eacute;sence du &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; chez Claude Simon est beaucoup moins importante que chez Gadda et ne constitue jamais l&rsquo;objet d&rsquo;une confrontation directe. D&rsquo;une mani&egrave;re g&eacute;n&eacute;rale, Simon explicite rarement ses choix th&eacute;oriques, et ce point ne fait pas exception. Comme pour d&rsquo;autres aspects de son &oelig;uvre, le lecteur doit s&rsquo;appuyer sur les textes eux-m&ecirc;mes, qu&rsquo;il faut souvent consid&eacute;rer comme des &laquo;&nbsp;manifestes pratiques<sup><a href="#lien_nbp_56" id="note_56" name="lien_nbp_56" title="Aller à la note de bas de page n°56">56</a></sup>&nbsp;&raquo;. Malgr&eacute; cette absence de d&eacute;clarations directes, la critique s&rsquo;est souvent ralli&eacute;e &agrave; l&rsquo;opinion de Jean Rousset, qui consid&eacute;rait l&rsquo;&oelig;uvre de Claude Simon comme une manifestation contemporaine de l&rsquo;esth&eacute;tique baroque. Cette classification se fonde sur plusieurs traits&nbsp;: les renvois fr&eacute;quents aux peintres de l&rsquo;&acirc;ge baroque tout d&rsquo;abord&nbsp;; ensuite les th&egrave;mes privil&eacute;gi&eacute;s (tels la mort, l&rsquo;obscurit&eacute;, l&rsquo;illusion et plus en g&eacute;n&eacute;ral tous les aspects qui sont reli&eacute;s &agrave; l&rsquo;isotopie th&eacute;&acirc;trale et au&nbsp;<em>topos</em>&nbsp;du&nbsp;<em>theatrum mundi</em><sup><a href="#lien_nbp_57" id="note_57" name="lien_nbp_57" title="Aller à la note de bas de page n°57">57</a></sup>)<em>&nbsp;</em>; et enfin le style et l&rsquo;&eacute;criture.</p> <p>Au niveau du paratexte, la r&eacute;f&eacute;rence au &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; appara&icirc;t d&rsquo;une mani&egrave;re explicite dans le sous-titre du roman publi&eacute; en 1957,&nbsp;<em>Le Vent&nbsp;: tentative de restitution d&rsquo;un retable baroque</em>. Cette allusion ne saurait &ecirc;tre un hasard, puisqu&rsquo;il s&rsquo;agit du premier roman publi&eacute; par Simon chez Minuit, celui qui va marquer un tournant dans sa trajectoire ainsi que dans son style. On pourrait interpr&eacute;ter ce sous-titre comme une &laquo;&nbsp;strat&eacute;gie inconsciente<sup><a href="#lien_nbp_58" id="note_58" name="lien_nbp_58" title="Aller à la note de bas de page n°58">58</a></sup>&nbsp;&raquo;, permettant &agrave; Claude Simon, d&rsquo;une part, d&rsquo;inscrire son &oelig;uvre dans l&rsquo;horizon intellectuel dont nous avons esquiss&eacute; les contours&nbsp;; de l&rsquo;autre, de souligner les aspects stylistiques qui relient son &eacute;criture aux recherches du p&ocirc;le exp&eacute;rimental, tel qu&rsquo;il est d&eacute;crit par Piat<sup><a href="#lien_nbp_59" id="note_59" name="lien_nbp_59" title="Aller à la note de bas de page n°59">59</a></sup>.</p> <p>On peut conclure par une derni&egrave;re consid&eacute;ration, d&rsquo;ordre m&eacute;thodologique. &laquo;&nbsp;Peut-on transf&eacute;rer un ordre formel du registre plastique au registre litt&eacute;raire&nbsp;? Qu&rsquo;est-ce en litt&eacute;rature qu&rsquo;une courbe ou une droite, un plan centr&eacute; ou allong&eacute;, un vide ou un plein, une fa&ccedil;ade<sup><a href="#lien_nbp_60" id="note_60" name="lien_nbp_60" title="Aller à la note de bas de page n°60">60</a></sup>&nbsp;?&nbsp;&raquo;. Si les probl&egrave;mes soulev&eacute;s par ce transfert n&rsquo;ont pas cess&eacute; d&rsquo;occuper Rousset, qui, une d&eacute;cennie plus tard, revenait encore sur la l&eacute;gitimit&eacute; de son op&eacute;ration, on devine comment le dialogue que ses recherches instaurent entre art et litt&eacute;rature pouvait plaire &agrave; un &eacute;crivain comme Simon. Le parall&egrave;le entre la peinture et l&rsquo;&eacute;criture, en plus de guider toute sa pratique d&rsquo;&eacute;crivain, est &agrave; la base de l&rsquo;interpr&eacute;tation qu&rsquo;il donne de l&rsquo;histoire du roman. L&rsquo;&eacute;volution de la peinture, depuis les premi&egrave;res formes artistiques, qui avaient comme fonction principale celle d&rsquo;&ecirc;tre des m&eacute;diums et des instruments d&rsquo;&eacute;dification au service de la religion, a amen&eacute; &agrave; la peinture moderne, enfin lib&eacute;r&eacute;e de la tyrannie du sujet. Ce qui n&rsquo;a pas manqu&eacute; d&rsquo;avoir des cons&eacute;quences sur le peintre lui-m&ecirc;me, dont la fonction s&rsquo;est trouv&eacute;e</p> <p><q>en quelque sorte invers&eacute;e et le savoir ou, si l&rsquo;on pr&eacute;f&egrave;re, le sens est pass&eacute; d&rsquo;un c&ocirc;t&eacute; &agrave; l&rsquo;autre de son action, la pr&eacute;c&eacute;dant dans un premier temps, la suscitant, pour, &agrave; la fin, r&eacute;sulter de cette action m&ecirc;me, qui va non plus exprimer du sens mais en produire<sup><a href="#lien_nbp_61" id="note_61" name="lien_nbp_61" title="Aller à la note de bas de page n°61">61</a></sup>.</q></p> <p>Si les arts visuels ont r&eacute;alis&eacute; effectivement cette &eacute;volution, elle restait encore en grande partie une id&eacute;e r&eacute;gulatrice pour la litt&eacute;rature. Le renvoi au &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; indiquait ainsi pour l&rsquo;&eacute;crivain un projet th&eacute;orique, la volont&eacute; de transposer un mod&egrave;le pictural, en marquant par-l&agrave; la distance entre le roman &laquo;&nbsp;du pr&eacute;sent&nbsp;&raquo; et le roman &laquo;&nbsp;traditionnel&nbsp;&raquo;, qu&rsquo;il s&rsquo;agissait pour Simon de d&eacute;passer<sup><a href="#lien_nbp_62" id="note_62" name="lien_nbp_62" title="Aller à la note de bas de page n°62">62</a></sup>. Mettre le roman sur le m&ecirc;me plan que la peinture signifiait, par ailleurs, en revendiquer la l&eacute;gitimit&eacute; de vis&eacute;es artistiques qui n&rsquo;allaient pas de soi dans ces ann&eacute;es-l&agrave;. C&rsquo;&eacute;tait, plus pr&eacute;cis&eacute;ment, pour Claude Simon, une mani&egrave;re de creuser l&rsquo;&eacute;cart entre la &laquo;&nbsp;litt&eacute;rature engag&eacute;e&nbsp;&raquo; et lui-m&ecirc;me, en prenant ses distances par rapport &agrave; Sartre, qui situait la peinture du c&ocirc;t&eacute; de la po&eacute;sie, dans une opposition nette avec la prose.</p> <h2>4.Conclusion</h2> <p>Loin de pr&eacute;tendre pr&eacute;senter une &eacute;tude exhaustive, nous nous sommes limit&eacute;s &agrave; donner un aper&ccedil;u des enjeux complexes que la notion de &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; recouvre dans l&rsquo;apr&egrave;s-guerre. L&rsquo;analyse des diff&eacute;rents espaces nationaux dans lesquels cette notion a &eacute;t&eacute; op&eacute;ratoire et des mani&egrave;res dont elle a &eacute;t&eacute; utilis&eacute;e dans la production litt&eacute;raire contemporaine nous aide &agrave; expliquer le succ&egrave;s que ce concept a eu dans cette p&eacute;riode. Deux aspects en particulier ressortent de notre reconstruction. Tout d&rsquo;abord, les significations du &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; se renouvellent constamment gr&acirc;ce aux effets d&rsquo;un ensemble complexe de transferts, qui sont de type transhistorique, transnational, et interdisciplinaire. Ensuite, cette cat&eacute;gorie a &eacute;t&eacute; l&rsquo;un des ressorts utilis&eacute;s dans l&rsquo;&eacute;laboration des r&eacute;volutions symboliques et intellectuelles qui ont marqu&eacute; la deuxi&egrave;me moiti&eacute; du XX<sup>&egrave;me&nbsp;</sup>si&egrave;cle. On peut r&eacute;pondre par la n&eacute;gative &agrave; la question que Jacques Roubaud posait dans un court article pol&eacute;mique, celle de savoir &laquo; si l&rsquo;&eacute;tiquette &ldquo;baroque&rdquo; [&hellip;] a jamais eu la moindre utilit&eacute; explicative<sup><a href="#lien_nbp_63" id="note_63" name="lien_nbp_63" title="Aller à la note de bas de page n°63">63</a></sup>&nbsp;&raquo;. Il faut, en revanche, souligner sa pertinence au niveau de l&rsquo;analyse historique, puisqu&rsquo;elle constitue une pi&egrave;ce importante du puzzle caract&eacute;risant l&rsquo;&eacute;tat du champ culturel et intellectuel des ann&eacute;es 1950-60. Il est sans doute fructueux de focaliser l&rsquo;attention sur ce moment, &agrave; maints &eacute;gards fondateur, o&ugrave; l&rsquo;on observe les premi&egrave;res migrations de cette notion, qui ont continu&eacute; de se produire jusqu&rsquo;&agrave; aujourd&rsquo;hui. On peut se demander, par exemple, si la m&eacute;moire de ces d&eacute;bats reste active dans le domaine du postcolonial, o&ugrave; le &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo;, dans sa version&nbsp;<em>n&eacute;o</em>, semble &ecirc;tre l&rsquo;objet d&rsquo;un vif int&eacute;r&ecirc;t, qui le fait migrer vers d&rsquo;autres significations encore<sup><a href="#lien_nbp_64" id="note_64" name="lien_nbp_64" title="Aller à la note de bas de page n°64">64</a></sup>.</p> <hr /> <h2>Notes et r&eacute;f&eacute;rences</h2> <p><a href="#lien_nbp_1" name="nbp_1">1 </a>G&eacute;rard Genette cit&eacute; par Dominique Viart,&nbsp;<em>Une m&eacute;moire inqui&egrave;te&nbsp;: La Route des Flandres de Claude Simon</em>, Paris, PUF, 1997, p.&nbsp;246.</p> <p><a href="#" name="nbp_2">2 </a>Roland Barthes, &laquo;&nbsp;Le mythe aujourd&rsquo;hui&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Mythologies</em>, Paris, Le Seuil, 1957, p.&nbsp;224.</p> <p><a href="#lien_nbp_3" name="nbp_3">3 </a>Jeanyves Gu&eacute;rin, &laquo;&nbsp;Errances dans un archipel introuvable&nbsp;: notes sur les r&eacute;surgences baroques au XX<sup>&egrave;me</sup>&nbsp;si&egrave;cle&nbsp;&raquo;, dans Jean-Marie Benoist [dir.]<em>, Figures du baroque</em>, Paris, Presses Universitaires de France, 1983, p.&nbsp;339.</p> <p><a href="#lien_nbp_4" name="nbp_4">4 </a>Jacob Burckhardt,&nbsp;<em>Der Cicerone&nbsp;: eine Anleitung zum Genuss der Kunstwerke Italiens</em>&nbsp;(1855), traduction fran&ccedil;aise par Auguste G&eacute;rard &agrave; partir de la 5<sup>e</sup>&nbsp;&eacute;dition,&nbsp;<em>Le Cicerone&nbsp;</em>:<em>&nbsp;guide de l&rsquo;art antique et de l&rsquo;art moderne en Italie</em>, vol. 2, Paris, Firmin-Didot, 1885-1892.</p> <p><a href="#lien_nbp_5" name="nbp_5">5 </a>Traduit en italien en 1928 (Firenze, &eacute;d. L. Filippi)&nbsp;; traduit en fran&ccedil;ais en 1967&nbsp;; l&rsquo;ouvrage majeur de W&ouml;lfflin,<em>&nbsp;Principes fondamentaux de l&rsquo;histoire de l&rsquo;art</em>, est traduit en fran&ccedil;ais en 1953.</p> <p><a href="#lien_nbp_6" name="nbp_6">6 </a>Benedetto Croce,&nbsp;<em>Storia dell&rsquo;et&agrave; barocca in Italia&nbsp;: pensiero- Poesia e Letteratura- Vita Morale</em>, Bari, Laterza, 1929.</p> <p><a href="#lien_nbp_7" name="nbp_7">7 </a>Eugenio D&rsquo;Ors,&nbsp;<em>Du baroque</em>, Paris, Gallimard, 2000, p.&nbsp;78. La premi&egrave;re &eacute;dition fran&ccedil;aise sort en 1935 chez Gallimard, dans la traduction d&rsquo;Agathe Rouardt-Val&eacute;ry.</p> <p><a href="#lien_nbp_8" name="nbp_8">8 </a>Pierre Charpentrat,&nbsp;<em>Le mirage baroque</em>, Paris, &Eacute;ditions de Minuit,</p> <p><a href="#lien_nbp_9" name="nbp_9">9 </a>Jusqu&rsquo;&agrave; se confondre avec d&rsquo;autres cat&eacute;gories&nbsp;: ainsi le &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; est souvent utilis&eacute; comme synonyme de modernisme, et sa version n&eacute;o-baroque comme synonyme de post-modernisme. Voir Lois Parkinson Zamora et Monika Kaup [dir.],&nbsp;<em>Baroque new worlds&nbsp;: representation, transculturation, counterconquest</em>, Duke University Press, 2009.</p> <p><a href="#lien_nbp_10" name="nbp_10">10 </a>Voir Anna Boschetti,&nbsp;<em>Ismes</em>,&nbsp;<em>Du r&eacute;alisme au post-modernisme</em>, Paris, CNRS &eacute;ditions, 2014. Notre article s&rsquo;inspire beaucoup de cette &eacute;tude, qui propose une sociogen&egrave;se des cat&eacute;gories les plus employ&eacute;es dans l&rsquo;histoire culturelle en reconstruisant les luttes dans desquelles les agents qui se les appropriaient &eacute;taient impliqu&eacute;s. Voir aussi les travaux de Christophe Charle, en particulier l&rsquo;article &laquo;&nbsp;L&rsquo;Habitus scolastique et ses effets. &Agrave; propos des classifications litt&eacute;raires et artistiques&nbsp;&raquo;, dans&nbsp;<em>L&rsquo;inconscient acad&eacute;mique</em>, Zurich, Seismo-Verlag, 2006, p.&nbsp;67-87.</p> <p><a href="#lien_nbp_11" name="nbp_11">11 </a>Roland Barthes, &laquo;&nbsp;La mythologie aujourd&rsquo;hui&nbsp;&raquo;, dans&nbsp;<em>Le bruissement de la langue</em>, Paris, Seuil, 1984, p.&nbsp;81-87.</p> <p><a href="#lien_nbp_12" name="nbp_12">12 </a>Walter Moser, &laquo;&nbsp;R&eacute;surgence et valences du baroque &raquo;, dans W. Moser et N. Goyer,<em>&nbsp;R&eacute;surgences baroques&nbsp;: les trajectoires d&rsquo;un processus transculturel</em>, Bruxelles, La lettre vol&eacute;e, 2001, p.&nbsp;30.</p> <p><a href="#lien_nbp_13" name="nbp_13">13 </a>Entr&eacute;e &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; par C. Mignot dans Barbara Cassin [dir.],<em>&nbsp;Vocabulaire europ&eacute;en des philosophies&nbsp;: dictionnaire des intraduisibles</em>, Paris, Seuil, 2004, p.&nbsp;157.</p> <p><a href="#lien_nbp_14" name="nbp_14">14 </a>Voir Anna Boschetti,&nbsp;<em>Isme</em>,<em>&nbsp;op.cit.</em>, et Boris Gobille, &laquo; Les mobilisations de l&rsquo;avant-garde litt&eacute;raire fran&ccedil;aise en mai 1968 : capital politique, capital litt&eacute;raire et conjoncture de crise&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Actes de la recherche en sciences sociales</em>, n&deg;&nbsp;158 (juin 2005), p.&nbsp;30-61.</p> <p><a href="#lien_nbp_15" name="nbp_15">15 </a>Pierre Bourdieu,&nbsp;<em>Homo Academicus</em>, Paris, &Eacute;ditions de Minuit, 1984, p.&nbsp;212.</p> <p><a href="#lien_nbp_16" name="nbp_16">16&nbsp;</a><em>Revue des sciences humaines</em>, publication de l&rsquo;universit&eacute; de Lille, n&deg;&nbsp;55-56, 1949. Pour une reconstruction d&eacute;taill&eacute;e du num&eacute;ro et de la position de la revue voir Guy Catusse<strong>,</strong>&nbsp;&laquo;&nbsp;Aux origines du &ldquo;baroque litt&eacute;raire&rdquo; en France&nbsp;: 1935-1950. Aper&ccedil;us historiographiques&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Les Dossiers du Grihl</em>, n&deg;&nbsp;2 (2012).</p> <p><a href="#lien_nbp_17" name="nbp_17">17 </a>On trouve cette formule dans la d&eacute;dicace que Marcel Raymond met en exergue de son livre&nbsp;<em>Baroque et renaissance po&eacute;tique</em>, Paris, Jos&eacute; Corti, 1955.</p> <p><a href="#lien_nbp_18" name="nbp_18">18 </a>Il est l&rsquo;auteur du livre&nbsp;<em>Baroque et renaissance po&eacute;tique</em>,&nbsp;<em>op. cit.</em>, ainsi que le traducteur du livre de W&ouml;lfflin&nbsp;<em>Principes fondamentaux de l&rsquo;histoire de l&rsquo;art</em>, Paris, Plon, 1953.</p> <p><a href="#lien_nbp_19" name="nbp_19">19 </a>Jean Rousset, &laquo;&nbsp;Mon baroque&nbsp;&raquo;, dans Michel Jeanneret [dir.],<em>&nbsp;L&rsquo;aventure baroque</em>, Carouge-Gen&egrave;ve, 2006, p.&nbsp;49.</p> <p><a href="#lien_nbp_20" name="nbp_20">20 </a>Rousset reconna&icirc;t l&rsquo;importance que les travaux des critiques italiens, de Croce &agrave; Anceschi, ont eu pour son travail et comment il s&rsquo;est inspir&eacute; du renouveau de l&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t italien pour la notion afin de l&rsquo;appliquer au contexte fran&ccedil;ais. Voir J. Rousset,&nbsp;<em>Dernier regard sur le Baroque</em>, Paris, Jos&eacute; Corti, 1998, p.&nbsp;17<em>.&nbsp;</em>Sur l&rsquo;apport des travaux critiques italiens et europ&eacute;ens pour l&rsquo;historiographie baroque fran&ccedil;aise, voir Franco Simone,&nbsp;<em>Umanesimo, Rinascimento, Barocco in Francia</em>, Milano, Mursia, 1968, en particulier le chapitre &laquo;&nbsp;I contributi europei all&rsquo;identificazione del barocco francese&nbsp;&raquo;, p.&nbsp;298-328. Voir aussi Christophe Charle,&nbsp;<em>op. cit</em>., p.&nbsp;77.</p> <p><a href="#lien_nbp_21" name="nbp_21">21 </a>Jean Rousset,&nbsp;<em>La litt&eacute;rature de l&rsquo;&acirc;ge baroque en France</em>, Paris, Jos&eacute; Corti, 1953, p.&nbsp;237-238.</p> <p><a href="#lien_nbp_22" name="nbp_22">22 </a>Rousset le reconna&icirc;t explicitement&nbsp;: &laquo;&nbsp;D&egrave;s qu&rsquo;on distingue ou qu&rsquo;on oppose Baroque et Classicisme, la tentation est in&eacute;vitable d&rsquo;identifier Baroque et Romantisme, si forte est l&rsquo;habitude de concevoir l&rsquo;histoire litt&eacute;raire en France comme la lutte de deux principes adverses alternant les d&eacute;faites et les victoires&nbsp;; on en conclut que tout ce qui n&rsquo;est pas classique est romantique&nbsp;; conclusion h&acirc;tive. L&rsquo;introduction de la cat&eacute;gorie du Baroque dans notre histoire litt&eacute;raire serait sans utilit&eacute; si elle n&rsquo;aboutissait qu&rsquo;&agrave; substituer un terme &agrave; un autre&nbsp;; elle se justifierait, en revanche, si elle pouvait servir &agrave; &eacute;largir le dispositif binaire traditionnellement employ&eacute;&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>La litt&eacute;rature de l&rsquo;&acirc;ge baroque en France</em>,<em>&nbsp;op. cit.</em>, p.&nbsp;251.</p> <p><a href="#lien_nbp_23" name="nbp_23">23 </a>Voir D&eacute;sir Nisard,&nbsp;<em>Histoire de la litt&eacute;rature fran&ccedil;aise</em>, Paris, Librairie Firmin-Didot, 1874, p.&nbsp;22. Voir aussi Vincent Tapi&eacute; plus r&eacute;cemment&nbsp;: &laquo;&nbsp;la civilisation fran&ccedil;aise, par ses caract&egrave;res g&eacute;n&eacute;raux, par la qualit&eacute; de sa discipline, m&eacute;rite d&rsquo;&ecirc;tre reconnue irr&eacute;ductible aux autres civilisations, en d&eacute;pit d&rsquo;apparentements n&eacute;cessaires. Elle se pr&eacute;sente comme une r&eacute;ussite classique et ne peut accepter d&rsquo;autre nom&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Le baroque</em>, Paris, PUF, coll. &laquo;&nbsp;Que sais-je&nbsp;?&nbsp;&raquo;, 1961, p. 86.</p> <p><a href="#lien_nbp_24" name="nbp_24">24 </a>Roland Barthes, &laquo;&nbsp;R&eacute;flexions sur un manuel&nbsp;&raquo;, dans&nbsp;<em>Le bruissement de la langue&nbsp;: essais critiques IV</em>, Paris, Seuil, 1984, p.&nbsp;54. Barthes reconna&icirc;t la nature fonctionnelle de cette &eacute;tiquette quand il parle du &laquo;&nbsp;baroque&nbsp;&raquo; comme d&rsquo;un &laquo;&nbsp;mot provisoirement utile tant qu&rsquo;il permet de provoquer le classicisme inv&eacute;t&eacute;r&eacute; des lettres fran&ccedil;aises&nbsp;&raquo;, Roland Barthes,&nbsp;<em>op. cit.</em>, p.&nbsp;284. L&rsquo;intention de contrarier cette vision est reconnue explicitement par Rousset qui, dans un bilan des ann&eacute;es 1970, &eacute;crit&nbsp;: &laquo;&nbsp;&eacute;tant venue de l&rsquo;&eacute;tranger, la nouvelle cat&eacute;gorie avait d&rsquo;autre part l&rsquo;avantage d&rsquo;imposer la vision europ&eacute;enne, de d&eacute;cloisonner une histoire litt&eacute;raire et artistique trop longtemps hexagonale&nbsp;&raquo;, Jean Rousset, &laquo;&nbsp;Sur l&rsquo;actualit&eacute; de la notion de Baroque&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Baroque</em>&nbsp;[en ligne], n&deg;&nbsp;09-10 (1980),&nbsp;<a href="http://baroque.revues.org/532">http://baroque.revues.org/532</a>.</p> <p><a href="#lien_nbp_25" name="nbp_25">25 </a>Fran&ccedil;ois Dosse,&nbsp;<em>Histoire du structuralisme</em>, tome I,&nbsp;<em>Le champ du signe&nbsp;: 1945-1966</em>, Paris, La D&eacute;couverte, 1992. Pour le r&ocirc;le jou&eacute; par Barthes voir Tiphaine Samoyault<em>, Roland Barthes</em>, Paris, Seuil, 2015.</p> <p><a href="#lien_nbp_26" name="nbp_26">26 </a>Voir Michel Jeanneret, &laquo;&nbsp;L&rsquo;&eacute;cole de Gen&egrave;ve&nbsp;?&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Revue d&rsquo;histoire litt&eacute;raire de la France</em>, 95<sup>e</sup>&nbsp;ann&eacute;e, n&deg;6, Presses Universitaires de France, 1995, p.&nbsp;54-64.</p> <p><a href="#lien_nbp_27" name="nbp_27">27 </a>Jean Rousset,&nbsp;<em>Forme et signification&nbsp;: essais sur les structures litt&eacute;raires de Corneille &agrave; Claudel</em>, Paris, Jos&eacute; Corti, 1962. Le livre est d&eacute;di&eacute; &agrave; Georges Poulet et on trouve en exergue de l&rsquo;introduction la citation de H. James &laquo;&nbsp;Le myst&egrave;re sacr&eacute; de la structure&nbsp;&raquo;.</p> <p><a href="#lien_nbp_28" name="nbp_28">28 </a>Fran&ccedil;ois Dosse,&nbsp;<em>Histoire du structuralisme, tome I&nbsp;: le champ du signe 1945-1966</em>, Paris, La D&eacute;couverte, 1991, p.&nbsp;238.</p> <p><a href="#lien_nbp_29" name="nbp_29">29 </a>Voir Giovanni Getto,&nbsp;<em>Il Barocco letterario in Italia</em>, Milano, Mondadori, 2000.</p> <p><a href="#lien_nbp_30" name="nbp_30">30 </a>Pour la formation philosophique d&rsquo;Anceschi voir le num&eacute;ro sp&eacute;cial&nbsp;<em>Luciano Anceschi tra filosofia e letteratura</em>, &laquo;&nbsp;Studi di estetica&nbsp;: rivista semestrale fondata da Luciano Anceschi&nbsp;&raquo;, n&deg;&nbsp;15, 1997.</p> <p><a href="#lien_nbp_31" name="nbp_31">31 </a>Carlo Calcaterra,&nbsp;<em>Il Parnaso in rivolta&nbsp;: Barocco e Antibarocco nella poesia italiana</em>, Milano, Mondadori, 1940.</p> <p><a href="#lien_nbp_32" name="nbp_32">32 </a>Le livre sort chez l&rsquo;&eacute;diteur Rosa e Ballo de Milan, et la pr&eacute;face sign&eacute;e Anceschi est titr&eacute;e &laquo;&nbsp;Rapporto sull&rsquo;idea del barocco&nbsp;&raquo;.</p> <p><a href="#lien_nbp_33" name="nbp_33">33 </a>Pierre Bourdieu, &laquo;&nbsp;Les conditions sociales de la circulation internationale des id&eacute;es&nbsp;&raquo;<em>,&nbsp;</em>dans&nbsp;<em>Actes de la recherche en sciences sociales</em>, n&deg;&nbsp;145, 2002, p.&nbsp;3-8, p.&nbsp;4.</p> <p><a href="#lien_nbp_34" name="nbp_34">34 </a>Anceschi lui-m&ecirc;me l&rsquo;explicite&nbsp;:&nbsp;&laquo;&nbsp;Tout en ne partageant pas enti&egrave;rement la th&egrave;se D&rsquo;Ors, j&rsquo;ai pens&eacute; qu&rsquo;il &eacute;tait convenable de faire conna&icirc;tre aux lecteurs italiens ces &eacute;tudes sur le Baroque, pour une raison de p&eacute;dagogie spirituelle, mais avant tout contre la position qui est si bien d&eacute;fendue par Croce&nbsp;&raquo;, cit&eacute; par Gillo Dorfles, &laquo;&nbsp;Luciano Anceschi e la &ldquo;Disputa del Baroccoˮ &raquo;, dans&nbsp;<em>Luciano Anceschi tra filosofia e letteratura</em>,&nbsp;<em>op. cit.</em>, p.&nbsp;13. Anceschi exprime ses positions anti-Croce dans plusieurs articles, dont une partie est recueillie dans le volume&nbsp;<em>Autonomia non &egrave; indifferenza&nbsp;: s</em><em>critti dal 1929 al 1963</em>, Rimini, Raffaelli Editore, 1997.</p> <p><a href="#lien_nbp_35" name="nbp_35">35 </a>Anceschi parle de l&rsquo;influence de Rousset aussi dans &laquo;&nbsp;Contributo allo studio del barocco&nbsp;&raquo;, dans&nbsp;<em>Retorica e barocco&nbsp;: actes du colloque III Congresso Internazionale di Studi Umanistici</em>, promosso dal centro internazionale di studi umanistici, Venezia Isola di San Giorgio Maggiore, Giugno 1954, p.&nbsp;251-255. La critique francophone avait d&eacute;j&agrave; jou&eacute; un r&ocirc;le important dans le cas d&rsquo;Ungaretti, lequel consid&eacute;rait lui aussi comme central le lien entre le baroque et son &oelig;uvre&nbsp;; voir &agrave; ce propos M. Lucarelli, &laquo;&nbsp;Un&rsquo;idea modernista di Barocco&nbsp;; note su alcune possibili mediazioni europee della concezione ungarettiana del Barocco&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Gli intellettuali italiani e l&rsquo;Europa 1903-1956</em>, Lecce, Manni, 2007, p.&nbsp;169-193.</p> <p><a href="#lien_nbp_36" name="nbp_36">36 </a>Lettre envoy&eacute;e le 9 juillet 1958 &agrave; L. Anceschi, dans&nbsp;<em>Il laboratorio di Luciano Anceschi&nbsp;: Pagine, carte, memorie</em>, Milano, Libri Scheiwiller, 1998, p.&nbsp;263.</p> <p><a href="#lien_nbp_37" name="nbp_37">37&nbsp;</a><em>il Verri</em>, n&deg;&nbsp;2 (1958), p.&nbsp;5. V. O.&nbsp;: &laquo;&nbsp;<em>Non c&rsquo;&egrave; forse oggi questione pi&ugrave; assiduamente dibattuta nella critica&nbsp;; d&rsquo;altra parte, essa coinvolge nel suo sistema di relazioni un largo ordine di strutture (dottrinali, storico-culturali, e di &laquo;&nbsp;vita delle forme&nbsp;&raquo;) veramente fondamentali, e, nello stesso tempo, sembra avere un essenziale riferimento al nostro essere, &egrave; un connotato attivo e rivelatore della nostra consapevolezza di uomini contemporanei</em>&nbsp;&raquo;. Nous traduisons.</p> <p><a href="#lien_nbp_38" name="nbp_38">38 </a>Umberto Eco,&nbsp;<em>Opera aperta</em>, Bompiani, 1962, voir en particulier p.&nbsp;38-39. Voir aussi U. Eco, &laquo;&nbsp;I primi numeri del&nbsp;<em>Verri&nbsp;</em>&raquo;, dans&nbsp;<em>Luciano Anceschi tra filosofia e letteratura</em>,<em>&nbsp;op. cit</em>, p.&nbsp;29-33.</p> <p><a href="#lien_nbp_39" name="nbp_39">39 </a>Voir Anna Boschetti, &laquo; La genesi delle poetiche e dei canoni. Esempi italiani (1945-1970) &raquo;,&nbsp;<em>Allegoria</em>&nbsp;[en ligne], n&deg;&nbsp;55, janvier-juin 2007,&nbsp;<a href="http://www.allegoriaonline.it/index.php/i-numeri-precedenti/allegoria-n55/72-la-genesi-delle-poetiche-e-dei-canoni-esempi-italiani-1945-1970.html">http://www.allegoriaonline.it/index.php/i-numeri-precedenti/allegoria-n55/72-la-genesi-delle-poetiche-e-dei-canoni-esempi-italiani-1945-1970.html</a>. Voir aussi du m&ecirc;me auteur, &laquo;&nbsp;La recomposition de l&rsquo;espace intellectuel en Europe apr&egrave;s 1945&nbsp;&raquo;, dans Gis&egrave;le Sapiro [dir.],&nbsp;<em>L&rsquo;espace intellectuel en Europe&nbsp;: de la formation des &Eacute;tats-nations &agrave; la mondialisation</em>, Paris, La D&eacute;couverte, 2009, p.&nbsp;147-182.</p> <p><a href="#lien_nbp_40" name="nbp_40">40 </a>Benedetto Croce,&nbsp;<em>Storia dell&rsquo;et&agrave; barocca in Italia&nbsp;: p</em><em>ensiero, poesia e letteratura, vita morale</em>, Milano, Adelphi, 1996,&nbsp;p.&nbsp;44&nbsp;; voir en particulier le chapitre &laquo;&nbsp;La vita morale&nbsp;&raquo;, p.&nbsp;571-597.</p> <p><a href="#lien_nbp_41" name="nbp_41">41 </a>Pour une reconstruction d&eacute;taill&eacute;e de ces d&eacute;bats, nous renvoyons &agrave; l&rsquo;article d&rsquo;Amedeo Quondam, &laquo;&nbsp;Il barocco e la letteratura. Genealogie del mito della decadenza italiana&nbsp;&raquo;, dans&nbsp;<em>I capricci di Proteo. Percorsi e linguaggi del barocco. Atti del convegno di Lecce 2000</em>, Roma, Salerno, 2002, p.&nbsp;111-175.</p> <p><a href="#lien_nbp_42" name="nbp_42">42 </a>Pierre Bourdieu,&nbsp;<em>Les conditions sociales de la circulation internationale des id&eacute;es</em>,&nbsp;<em>op. cit.</em>, p.&nbsp;8.</p> <p><a href="#lien_nbp_43" name="nbp_43">43</a> Voir toujours Amedeo Quondam, &laquo;&nbsp;Il barocco e la letteratura. Genealogie del mito della decadenza italiana&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>op. cit.</em>, p.&nbsp;152-157.</p> <p><a href="#lien_nbp_44" name="nbp_44">44 </a>Voir M. Ponzani, &laquo;&nbsp;Il mito del secondo Risorgimento nazionale. Retorica e legittimit&agrave; della Resistenza nel linguaggio politico instituzionale&nbsp;: il caso delle Fosse Ardeatine&nbsp;&raquo;, Annali della Fondazione Luigi Einaudi, 2003.</p> <p><a href="#lien_nbp_45" name="nbp_45">45 </a>Jean-Paul Sartre, &laquo;&nbsp;Sur le baroque&nbsp;&raquo;, dans&nbsp;<em>Les Temps modernes</em>, n&deg;632-634 (Juillet-Octobre 2005), p.&nbsp;698.</p> <p><a href="#lien_nbp_46" name="nbp_46">46&nbsp;</a><em>Ibid.</em>, p.&nbsp;705.</p> <p><a href="#lien_nbp_47" name="nbp_47">47 </a>Gilles Philippe et Julien Piat [dir.],&nbsp;<em>La Langue litt&eacute;raire&nbsp;: une histoire de la prose en France de Gustave Flaubert &agrave; Claude Simon</em>, Paris, Fayard, 2009. J. Piat,&nbsp;<em>L&rsquo;exp&eacute;rimentation syntaxique dans l&rsquo;&eacute;criture du Nouveau Roman (Beckett, Pinget, Simon)&nbsp;: contribution &agrave; une histoire de la langue litt&eacute;raire dans les ann&eacute;es 1950</em>, Paris, Honor&eacute; Champion, 2011.</p> <p><a href="#lien_nbp_48" name="nbp_48">48 </a>Nelly Wolf,&nbsp;<em>Proses du monde&nbsp;: les enjeux sociaux des styles litt&eacute;raires</em>, Villeneuve-d&rsquo;Ascq, Presses Universitaires du Septentrion, 2014. Voir aussi Nelly Wolf [dir.],<em>&nbsp;Amn&eacute;sies fran&ccedil;aises &agrave; l&rsquo;&eacute;poque gaullienne (1958&ndash;1981)&nbsp;: litt&eacute;rature, cin&eacute;ma, presse, politique</em>, Paris, Garnier Classiques, 2011.</p> <p><a href="#lien_nbp_49" name="nbp_49">49 </a>Gianfranco Contini,&nbsp;<em>Letteratura dell&rsquo;Italia unita 1861-1968</em>, Sansoni, Firenze, 1968, p.&nbsp;993.</p> <p><a href="#lien_nbp_50" name="nbp_50">50 </a>C&rsquo;est &eacute;galement en qualit&eacute; d&rsquo;&eacute;crivain baroque que l&rsquo;une des &eacute;tudes les plus importantes sur lui le pr&eacute;sente au public fran&ccedil;ais&nbsp;; il s&rsquo;agit de l&rsquo;ouvrage de Jean-Paul Manganaro,&nbsp;<em>Le baroque et l&rsquo;ing&eacute;nieur&nbsp;: e</em><em>ssai sur l&rsquo;&eacute;criture de Carlo Emilio Gadda</em>, Paris, Seuil, 1994.</p> <p><a href="#lien_nbp_51" name="nbp_51">51 </a>Carlo Emilio Gadda,&nbsp;<em>Racconto Italiano di ignoto del novecento (Cahier d&rsquo;&eacute;tude)</em>, Torino, Einaudi, 1983, p.&nbsp;14</p> <p><a href="#lien_nbp_52" name="nbp_52">52 </a>Malgr&eacute; ses liens d&rsquo;amiti&eacute; avec des repr&eacute;sentants de celle-ci comme Anceschi lui-m&ecirc;me, avec qui il &eacute;tait sur le point de collaborer pour&nbsp;<em>il Verri</em>&nbsp;et Alberto Arbasino. Voir Carlo Emilio Gadda,&nbsp;<em>Per favore mi lasci nell&rsquo;ombra&nbsp;: interviste 1950-1972</em>, Milano, Adelphi, 1993, p.&nbsp;88.</p> <p><a href="#lien_nbp_53" name="nbp_53">53 </a>Pier Paolo Pasolini, &laquo;&nbsp;Gadda : le novelle del ducato in fiamme&nbsp;&raquo;, dans&nbsp;<em>Passione e ideologia</em>, Milano, Garzanti, 1973, p.&nbsp;309-314.</p> <p><a href="#lien_nbp_54" name="nbp_54">54 </a>Voir Federico Bertoni,&nbsp;<em>La verit&agrave; sospetta&nbsp;: gadda e l&rsquo;invenzione della realt&agrave;</em>, Milano, Einaudi, 2001. Ainsi que Roberto Stracuzzi,&nbsp;<em>&laquo;&nbsp;Barocco&nbsp;&raquo;&nbsp;: t</em><em>he Edinburgh Journal of Gadda Studies</em>&nbsp;[en ligne], n&deg;2 (2002),&nbsp;<a href="http://www.gadda.ed.ac.uk/Pages/resources/walks/pge/baroccostracuz.php">http://www.gadda.ed.ac.uk/Pages/resources/walks/pge/baroccostracuz.php</a>.</p> <p><a href="#lien_nbp_55" name="nbp_55">55 </a>Traductions des textes de Quevedo, Salas Barbadillo et Ruiz de Alarc&oacute;n, publi&eacute;es en 1941 et en 1957. Voir&nbsp;<em>La verit&agrave; sospetta&nbsp;: tre traduzioni di Carlo Emilio Gadda</em>, &eacute;d. M. B. Billeter, Milano, Bompiani, 1977.</p> <p><a href="#lien_nbp_56" name="nbp_56">56 </a>Expression propos&eacute;e par Julien Piat,&nbsp;<em>L&rsquo;exp&eacute;rimentation syntaxique dans l&rsquo;&eacute;criture du Nouveau Roman</em>,<em>&nbsp;op. cit.</em>, p.&nbsp;18.</p> <p><a href="#lien_nbp_57" name="nbp_57">57 </a>Jean Rousset,&nbsp;&laquo;&nbsp;Comment raconter l&rsquo;indicible&nbsp;: le r&eacute;cit de guerre selon Claude Simon&nbsp;&raquo;, dans&nbsp;<em>Dernier regard sur le baroque</em>, Paris, Jos&eacute; Corti, 1998, p.&nbsp;155-169.</p> <p><a href="#lien_nbp_58" name="nbp_58">58 </a>Pierre Bourdieu,&nbsp;<em>Raisons pratiques&nbsp;: sur la th&eacute;orie de l&rsquo;action</em>, Paris, Seuil, 1994.</p> <p><a href="#lien_nbp_59" name="nbp_59">59 </a>Julien Piat,&nbsp;<em>op. cit.</em>, chapitre 8 &laquo;&nbsp;Pratiques du style et situation dans le champ litt&eacute;raire&nbsp;&raquo;, p.&nbsp;369-436.</p> <p><a href="#lien_nbp_60" name="nbp_60">60 </a>Jean Rousset, &laquo;&nbsp;Sur l&rsquo;actualit&eacute; de la notion de Baroque&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Baroque</em>&nbsp;[en ligne], n&deg;&nbsp;09-10 (1980),&nbsp;<a href="http://baroque.revues.org/532">http://baroque.revues.org/532</a>.</p> <p><a href="#lien_nbp_61" name="nbp_61">61 </a>Claude Simon, &laquo;&nbsp;Discours de Stockholm&nbsp;&raquo;, dans&nbsp;<em>&OElig;uvres</em>, vol. I, Paris, Gallimard, 2006, p.&nbsp;897.</p> <p><a href="#lien_nbp_62" name="nbp_62">62 </a>Yona Hanhart-Marmor, &laquo;&nbsp;<em>Le Vent</em>&nbsp;: tentative de restitution d&rsquo;un retable baroque ou un principe de transfigure (sur un roman de Claude Simon) &raquo;,&nbsp;<em>Sens public</em>, o&ugrave; l&rsquo;auteure fait une analyse de la &laquo;&nbsp;transposition scripturale&nbsp;&raquo; op&eacute;r&eacute; dans le roman &agrave; partir de l&rsquo;esth&eacute;tique baroque.</p> <p><a href="#lien_nbp_63" name="nbp_63">63 </a>Dont le sous-titre ironique est tr&egrave;s explicite&nbsp;: &laquo;&nbsp;Qualifier des po&egrave;mes de baroques revient &agrave; plonger leurs couleurs dans le d&eacute;tergent d&rsquo;une esth&eacute;tique molle&nbsp;: petite lessive explicative&nbsp;&raquo;, Jacques Roubaud, dans&nbsp;<em>Le Magazine litt&eacute;raire</em>, 1992, p.&nbsp;47.</p> <p><a href="#lien_nbp_64" name="nbp_64">64</a> Lois Parkinson Zamora et Monika KAUP [dir.],&nbsp;<em>Baroque new world&nbsp;: representation, transculturation, counterconquest</em>,<em>&nbsp;op. cit.</em></p>