<p>Longtemps associ&eacute; &agrave; un genre populaire qui s&rsquo;opposerait &agrave; la litt&eacute;rature savante<a href="#nbp1" id="footnoteref1_n9mks4c" name="liennbp1" title="Claude Grignon, Jean-Claude Passeron, Le Savant et le populaire. Misérabilisme et populisme en sociologie et en littérature, Paris, Le Seuil, 1989.">1</a>, consid&eacute;r&eacute; comme une sous-litt&eacute;rature<a href="#nbp2" id="footnoteref2_f7idl65" name="liennbp2" title="Jacques Dubois, « Champ légitime et genre périphérique : situation du roman policier », Lendemains, n° 36, 1984, p. 64-68.">2</a>, le roman policier fait aujourd&rsquo;hui l&rsquo;objet d&rsquo;un proc&egrave;s de l&eacute;gitimation, montrant ainsi comment le regard social port&eacute; sur un genre litt&eacute;raire se modifie. Le genre est une notion mixte, qui peut &ecirc;tre d&eacute;finie de fa&ccedil;on interne, c&rsquo;est-&agrave;-dire en tenant compte des &laquo;&nbsp;r&egrave;gles du genre&nbsp;&raquo;, en fait des proc&eacute;dures d&rsquo;&eacute;criture et des th&eacute;matiques communes &agrave; un ensemble d&rsquo;&oelig;uvres et de fa&ccedil;on externe en faisant intervenir des &eacute;l&eacute;ments ext&eacute;rieurs aux &oelig;uvres, qui sont les modes de fonctionnement s&eacute;lectifs des agents du champ litt&eacute;raire, &eacute;diteurs, auteurs et lecteurs<a href="#nbp3" id="footnoteref3_tkkkrsg" name="liennbp3" title="Fabienne Soldini, « Le fantastique contemporain, entre horreur et angoisse », Sociologie de l’Art, Paris, 2002, p. 37-67.">3</a>. L&rsquo;appartenance g&eacute;n&eacute;rique attribu&eacute;e aux &oelig;uvres d&eacute;termine leur distribution et leur r&eacute;partition dans le champ litt&eacute;raire<a href="#nbp4" id="footnoteref4_izc09uh" name="liennbp4" title="Pierre Bourdieu, « Le champ littéraire », Actes de la recherche en sciences sociales, Paris, 1991, p. 3-46.">4</a>, le genre fonctionnant comme un principe classificatoire discriminant. C&rsquo;est ainsi que le roman policier, du fait de ses caract&eacute;ristiques g&eacute;n&eacute;riques, tant intrins&egrave;ques comme ses codes narratifs et ses contraintes d&rsquo;&eacute;criture qu&rsquo;extrins&egrave;ques comme son public longtemps consid&eacute;r&eacute; &agrave; tort comme exclusivement populaire<a href="#nbp5" id="footnoteref5_zayk0yh" name="liennbp5" title="Alors que les différentes enquêtes sur Les Pratiques culturelles des Français montrent qu’en réalité le lectorat du roman policier se recrute dans toutes les classes sociales. Selon la dernière enquête réalisée en 2008, le genre policier est lu par 38% des ouvriers, 39 % des employés, 45 % des professions intermédiaires et 43 % des cadres supérieurs et professions intellectuelles.">5</a>, s&rsquo;est vu enferm&eacute; dans la paralitt&eacute;rature<a href="#nbp6" id="footnoteref6_75hmnjn" name="liennbp6" title="Alain-Michel Boyer, La paralittérature, Paris, PUF, Que sais-je ?, 1992.">6</a>. Or, &agrave; pr&eacute;sent, il se produit un d&eacute;placement de tout un pan de la production litt&eacute;raire polici&egrave;re contemporaine, qui fait l&rsquo;objet d&rsquo;un proc&egrave;s de l&eacute;gitimation le rattachant &agrave; la litt&eacute;rature l&eacute;gitime&nbsp;dont il est pr&eacute;sent&eacute; d&eacute;sormais comme une forme d&eacute;riv&eacute;e.</p> <p>&nbsp;</p> <h2><strong>1. Le roman policier contemporain, une forme litt&eacute;raire l&eacute;gitim&eacute;e</strong></h2> <p>&nbsp;</p> <p>Diff&eacute;rents indicateurs d&eacute;signent ce rapprochement du litt&eacute;raire et du policier, &agrave; commencer par les changements structuraux<a href="#nbp7" id="footnoteref7_ldh6w4i" name="liennbp7" title=" « Structure » au sens de Claude Lévi-Strauss qui regroupe la forme et le contenu (« La structure et la forme », Cahiers de l’I.S.E.A., n°99, 1960.">7</a> effectu&eacute;s par les producteurs, auteurs et &eacute;diteurs, sur la mat&eacute;rialit&eacute; textuelle polici&egrave;re, telle la rupture avec le nombre standard de pages impos&eacute; par les collections s&eacute;rielles&nbsp;; alors que les romans policiers d&rsquo;avant les ann&eacute;es quatre-vingt tournaient autour des deux cent cinquante pages, r&eacute;pondant au calibrage formel exig&eacute; par les contraintes &eacute;ditoriales, &agrave; pr&eacute;sent la production abonde de romans d&eacute;passant les cinq cents pages. Conjointement est arriv&eacute;e une reconnaissance de la part d&rsquo;instances de cons&eacute;cration ext&eacute;rieures, dont des prix litt&eacute;raires. Jusqu&rsquo;alors r&eacute;serv&eacute;s aux &oelig;uvres de litt&eacute;rature g&eacute;n&eacute;rale, ils sont &agrave; pr&eacute;sent attribu&eacute;s &agrave; des romans<a href="#nbp8" id="footnoteref8_wnecs94" name="liennbp8" title="Par exemple Le Diable tout le temps de Donald Ray Pollock (Paris, Albin Michel, 2012), Grand Prix de Littérature policière 2012 élu Meilleur livre de l’année 2012 par Lire, La Vérité sur l’affaire Harry Quebert de Joël Dicker (Paris, de Fallois, 2012) Grand Prix du roman de l’Académie française et Goncourt des lycéens en 2012.">8</a> ou des auteurs policiers<a href="#nbp9" id="footnoteref9_ilrl96n" name="liennbp9" title="Comme Pierre Lemaître dont le roman Au revoir là-haut (Paris, Albin Michel, 2013) a reçu le Prix Goncourt en 2013.">9</a>. Cette reconnaissance se manifeste &eacute;galement dans les discours critiques de la presse &eacute;crite, qu&rsquo;elle soit litt&eacute;raire, culturelle ou d&rsquo;actualit&eacute;s, qui repr&eacute;sente une instance de l&eacute;gitimation<a href="#nbp10" id="footnoteref10_zkbij6a" name="liennbp10" title=" « L’accès à la visibilité, par l’offre de l’œuvre au public, à travers la médiation de la presse littéraire, est une marque de reconnaissance, fût-elle négative. Pour tout écrivain, il ne suffit pas d’être publié, il importe d’être critiqué ». Delphine Naudier, « La fabrication de la croyance en la valeur littéraire », Sociologie de l’Art, 2/2004, p. 42.">10</a>, &agrave; la fois l&eacute;gitim&eacute;e et l&eacute;gitimante. Alors que la litt&eacute;rature polici&egrave;re faisait l&rsquo;objet d&rsquo;un silence &eacute;loquent traduisant son absence de l&eacute;gitimit&eacute;, elle est d&eacute;sormais amplement trait&eacute;e, jusqu&rsquo;&agrave; faire l&rsquo;objet de dossiers d&rsquo;un nombre cons&eacute;quent de pages<a href="#nbp11" id="footnoteref11_ofmj0kt" name="liennbp11" title="Par exemple, en 2015, 32 pages pour Le Magazine Littéraire (n° 556) et 27 pages pour Lire (n° 434).">11</a>, voire de num&eacute;ros hors-s&eacute;ries. L&rsquo;analyse du discours social l&eacute;gitimant &eacute;nonc&eacute; sous forme de critiques litt&eacute;raires &agrave; partir d&rsquo;un corpus de dix magazines<a href="#nbp12" id="footnoteref12_oinwukl" name="liennbp12" title="Le corpus analysé se compose de dix magazines parus entre 2012 et 2016, répartis ainsi : six numéros de magazines littéraires et un numéro d’un magazine culturel, comprenant un imposant dossier consacré au roman policier (Lire, n° 406, juin 2012, dossier « spécial polar, les 10 meilleurs de l’année 2012 » ; Lire, n° 414, avril 2013, dossier « spécial polar, les 10 meilleurs » ; Lire, n° 424, avril 2014, dossier « spécial polar, les 10 meilleurs » ; Lire, n° 434, avril 2015, dossier « spécial polar, les 10 meilleurs » ; Le Magazine Littéraire, n° 519, mai 2012, dossier « Le polar aujourd’hui » ; Le Magazine Littéraire, n° 556, juin 2015, dossier « spécial série noire » ; Transfuge, n° 77, avril 2014, dossier « spécial polar ») et trois numéros hors-séries de la presse d’actualités, traitant exclusivement du genre policier (Le Monde, avril/juin 2014 ; Marianne, mars 2015 ; Marianne, mai 2016).">12</a> litt&eacute;raires et culturels va permettre de saisir le proc&egrave;s de l&eacute;gitimation du genre policier. L&rsquo;h&eacute;t&eacute;rog&eacute;n&eacute;it&eacute; du corpus &ndash; si <em>Lire</em> et <em>Le Magazine Litt&eacute;raire</em> sont deux magazines exclusivement litt&eacute;raires, le premier s&rsquo;inscrit dans une des fractions les moins valoris&eacute;es de la presse litt&eacute;raire<a href="#nbp13" id="footnoteref13_a6h7dbc" name="liennbp13" title="Voir Delphine Naudier, « La fabrication de la croyance en la valeur littéraire », Sociologie de l’Art 2/2004 (OPuS 4) , p. 37-66.">13</a> et s&rsquo;int&eacute;resse &agrave; la production litt&eacute;raire contemporaine alors que le second s&rsquo;attache surtout &agrave; des auteurs classiques, consacr&eacute;s et/ou canonis&eacute;s par l&rsquo;institution scolaire&nbsp;; de m&ecirc;me <em>Le Monde </em>et <em>Marianne</em>, qui publient tous deux des hors-s&eacute;ries consacr&eacute;s au roman policier, se situent dans des p&ocirc;les oppos&eacute;s de la presse d&rsquo;actualit&eacute;- s&rsquo;av&egrave;re pertinente pour analyser les discours critiques l&eacute;gitimant le roman policier ; en effet, quel que soit le positionnement des magazines dans le champ de la presse &eacute;crite, l&rsquo;analyse des critiques montre une congruence dans les discours produits, soulignant ainsi la validit&eacute; du proc&egrave;s de l&eacute;gitimation du genre policier.</p> <p>&nbsp;</p> <h3><em><strong>1.1. Le discours l&eacute;gitimant, entre tradition et prestige</strong></em></h3> <p>La litt&eacute;rature polici&egrave;re a atteint la troisi&egrave;me des quatre &eacute;tapes du proc&egrave;s de l&eacute;gitimation&nbsp;&eacute;tablies par Jacques Dubois<a href="#nbp14" id="footnoteref14_cxpi4wu" name="liennbp14" title="L’Institution de la littérature, Bruxelles-Paris, Labor-Nathan, 1986.">14</a>, qui est la cons&eacute;cration, r&eacute;sultant du travail des critiques et de l&rsquo;attribution de prix litt&eacute;raires, les trois autres &eacute;tant l&rsquo;&eacute;mergence, la reconnaissance et la canonisation. Depuis une trentaine d&rsquo;ann&eacute;es romans et auteurs policiers b&eacute;n&eacute;ficient d&rsquo;un certain &eacute;cho dans la presse &eacute;crite l&eacute;gitime<a href="#nbp15" id="footnoteref15_dzkz6lj" name="liennbp15" title="La recension critique de romans policiers contemporains a commencé dans les années quatre-vingt. Eric Neveu note que le néo-polar, forme contemporaine politisée du roman noir, a eu une rubrique dans Le Monde des livres dès 1982 (L’Idéologie dans le roman d’espionnage, Paris, Presses de la fondation nationale des sciences politiques, 1985). En une trentaine d’années l’exposition critique du roman policier est passée de quelques lignes à plusieurs dizaines de pages.">15</a>, &eacute;cho qui au fil des ans s&rsquo;amplifie. Les discours critiques construisent &agrave; pr&eacute;sent la litt&eacute;rature polici&egrave;re comme une des formes de litt&eacute;rature l&eacute;gitime contemporaine, telle cette critique du <em>Magazine Litt&eacute;raire</em>&nbsp;: &laquo;&nbsp;le polar n&eacute; dans les ann&eacute;es 1980-1990 [&hellip;] est devenu une part enti&egrave;re de la litt&eacute;rature &ndash; pas uniquement de la litt&eacute;rature polici&egrave;re<a href="#nbp16" id="footnoteref16_nftq0bz" name="liennbp16" title="N° 519, mai 2012, p 62.">16</a>&raquo;. L&rsquo;ancrant dans l&rsquo;histoire litt&eacute;raire, ils la pr&eacute;sentent comme l&rsquo;h&eacute;riti&egrave;re des romans r&eacute;alistes du XIX<sup>&egrave;me</sup> si&egrave;cle tout en l&rsquo;affiliant &agrave; un r&eacute;seau d&rsquo;&eacute;crivains consacr&eacute;s du XX<sup>&egrave;me </sup>si&egrave;cle.</p> <p>L&rsquo;un des fondements de la l&eacute;gitimit&eacute;, tant sociale et politique que culturelle, &eacute;tant la tradition sur laquelle elle s&rsquo;appuie et &agrave; laquelle elle r&eacute;f&egrave;re, la r&eacute;f&eacute;rence &agrave; une tradition litt&eacute;raire devient un &eacute;l&eacute;ment de monstration de la l&eacute;gitimit&eacute; d&rsquo;une &oelig;uvre et fait figure d&rsquo;argument d&rsquo;autorit&eacute;. A l&rsquo;instar de l&rsquo;&eacute;ditorial de<em> Lire</em>&nbsp;qui affirme que &laquo;&nbsp;personne ne peut s&eacute;rieusement douter que le polar soit l&rsquo;h&eacute;ritier d&rsquo;une longue tradition<a href="#nbp17a" id="footnoteref17_ex25wqj" name="liennbp17a" title="Lire, n° 406, juin 2012, p. 5.">17</a> &raquo;, les articles des magazines pr&eacute;sentent le policier comme un genre ancien, lui attribuant des racines ant&eacute;rieures &agrave; sa naissance que les th&eacute;oriciens de la litt&eacute;rature polici&egrave;re s&rsquo;accordent &agrave; dater du d&eacute;but de la seconde moiti&eacute; du 19<sup>&egrave;me</sup> si&egrave;cle<a href="#nbp18" id="footnoteref18_6jmjqt4" name="liennbp18" title="Boileau-Narcejac, Le Roman policier, Paris, PUF, Que sais-je ?, 1982. Jacques Dubois, Le Roman policier ou la modernité, Paris, Nathan, 1992. Yves Reuter, Le Roman policier, Paris, Nathan, 1997.">18</a>. La critique de <em>Lire</em> note qu&rsquo;<em>Une t&eacute;n&eacute;breuse affaire</em> d&rsquo;Honor&eacute; de Balzac<a href="#nbp19" id="footnoteref19_1u3wqyb" name="liennbp19" title="Paru en 1841.">19</a> peut &ecirc;tre consid&eacute;r&eacute; comme un pr&eacute;curseur du roman policier<a href="#nbp20" id="footnoteref20_uqm9dwr" name="liennbp20" title="N° 406, juin 2012, p. 35.">20</a> alors que celle de <em>Marianne</em> explique que &laquo;&nbsp;plus que les th&egrave;mes, le grand roman du XIXe si&egrave;cle construit les personnages du roman policier [&hellip;] S&rsquo;il n&rsquo;est pas le h&eacute;ros du roman mais le pers&eacute;cuteur de Valjean, Javert n&rsquo;en est pas moins le premier grand flic de l&rsquo;histoire romanesque<a href="#nbp21" id="footnoteref21_qw11xoa" name="liennbp21" title="2016, p. 62.">21</a> &raquo;, tandis que celle du<em> Magazine litt&eacute;raire</em>&nbsp;affirme &agrave; propos d&rsquo;<em>&OElig;dipe roi</em>&nbsp;: &laquo;&nbsp;enfin le chef d&rsquo;&oelig;uvre de Sophocle &eacute;tait reconnu pour ce qu&rsquo;il &eacute;tait&nbsp;: un excellent polar<a href="#nbp22" id="footnoteref22_14de9gb" name="liennbp22" title="N° 519, mai 2012, p. 48.">22</a> &raquo;, d&eacute;signant la trag&eacute;die de Sophocle comme une premi&egrave;re forme de r&eacute;cit policier, bien ant&eacute;rieure &agrave; sa mise en forme romanesque. De m&ecirc;me, les auteurs de romans policiers l&eacute;gitim&eacute;s sont inscrits dans la droite lign&eacute;e des auteurs fran&ccedil;ais du XIX<sup>&egrave;me</sup> si&egrave;cle canonis&eacute;s par l&rsquo;institution scolaire, tel Jean-Patrick Manchette, auteur embl&eacute;matique des ann&eacute;es soixante-dix, pr&eacute;sent&eacute; dans <em>Lire</em> comme un &laquo;&nbsp;bon disciple de Flaubert<a href="#nbp23" id="footnoteref23_0f616tp" name="liennbp23" title="N° 406, juin 2012, p. 42.">23</a> &raquo;. Cet ancrage dans une tradition litt&eacute;raire constitue un premier maillage l&eacute;gitimant qui va &ecirc;tre doubl&eacute; par une mise en relation avec des auteurs plus r&eacute;cents, dont la l&eacute;gitimit&eacute; ne d&eacute;coule pas de la tradition mais du prestige que leur conf&egrave;re l&rsquo;attribution de prix litt&eacute;raires, t&eacute;moignages irr&eacute;futables de la &laquo;&nbsp;grandeur<a href="#nbp24" id="footnoteref24_5biiewo" name="liennbp24" title="Voir Nathalie Heinich, L’Épreuve de la grandeur. Prix littéraires et reconnaissance, Paris, La Découverte, 1999.">24</a> &raquo; de l&rsquo;&eacute;crivain et de la valeur de son &oelig;uvre, &agrave; commencer par le Prix Nobel de Litt&eacute;rature. Des &oelig;uvres majeures d&rsquo;&eacute;crivains nob&eacute;lis&eacute;s sont red&eacute;finies comme polici&egrave;res, telles &laquo;&nbsp;<em>La Naus&eacute;e</em>, que Sartre<a href="#nbp25" id="footnoteref25_w7qx9g5" name="liennbp25" title="Qui a refusé le prix Nobel qui lui avait été décerné en 1964.">25</a> con&ccedil;ut comme un polar philosophique<a href="#nbp26a" id="footnoteref26_nzrmbze" name="liennbp26a" title="Le Magazine Littéraire, mai 2012, p. 57.">26</a> &raquo; ou <em>L&rsquo;&Eacute;tranger</em><a href="#nbp26b" id="footnoteref26_c7ohxxn" name="liennbp26b" title="Le Magazine Littéraire, mai 2012, p. 57.">26</a> d&rsquo;Albert Camus<a href="#nbp27" id="footnoteref27_ckmx2u6" name="liennbp27" title="Prix Nobel de Littérature en 1957.">27</a>. Sont aussi convoqu&eacute;s des prix nationaux prestigieux<a href="#nbp28" id="footnoteref28_kn1nxgp" name="liennbp28" title="Voir Sylvie Ducas, « Prix littéraires en France : consécration ou désacralisation de l’auteur ? », COnTEXTES, 7, 2010.">28</a>, v&eacute;ritables &laquo;&nbsp;droit&nbsp;d&rsquo;entr&eacute;e<a href="#nbp29" id="footnoteref29_1n5qhmi" name="liennbp29" title="Sylvie Ducas, « Prix Goncourt et reconnaissance littéraire : stratégies d’accès à la consécration », Droit d’entrée. Modalités et conditions d’accès aux univers artistiques, Gérard Mauger (dir.), Éditions de la Maison des Sciences de l’Homme, Paris, 2006.">29</a> &raquo; dans le champ litt&eacute;raire fran&ccedil;ais&nbsp;: <em>Les Bienveillantes</em><a href="#nbp30" id="footnoteref30_s54sdyd" name="liennbp30" title="Paris, Gallimard, 2006.">30</a> de Jonathan Littel, prix Goncourt et Grand Prix du roman de l&rsquo;Acad&eacute;mie Fran&ccedil;aise en 2006, devient un roman policier<a href="#nbp26c" id="footnoteref26_fm3saa2" name="liennbp26c" title="Le Magazine Littéraire, mai 2012, p. 57.">26</a> tandis que Jean Echenoz, laur&eacute;at du prix M&eacute;dicis en 1983<a href="#nbp31" id="footnoteref31_6pxqn7l" name="liennbp31" title="Pour Cherokee, Paris, Minuit, 1983.">31</a> et du prix Goncourt en 1999<a href="#nbp32" id="footnoteref32_cpdnbpo" name="liennbp32" title="Pour Je m’en vais, Paris, Minuit, 1999.">32</a>, est pr&eacute;sent&eacute; comme l&rsquo;&laquo;&nbsp;h&eacute;ritier de Jean-Patrick Manchette<a href="#nbp33a" id="footnoteref33_g3gi0d9" name="liennbp33a" title="N° 77, avril 2014, p.79.">33</a> &raquo;.</p> <p>&nbsp;</p> <h3><strong><em>1.2. D&eacute;cloisonnement g&eacute;n&eacute;rique, et hybridation</em></strong></h3> <p>Le rapprochement du policier et du litt&eacute;raire consacr&eacute; suppose un rejaillissement de la valeur symbolique des productions l&eacute;gitimes sur les &oelig;uvres compar&eacute;es. Cependant, pour que ce travail de l&eacute;gitimation par rapprochement et comparaison s&rsquo;accomplisse, ce doivent &ecirc;tre les qualit&eacute;s de l&rsquo;&oelig;uvre consacr&eacute;e qui se transf&egrave;rent sur le roman policier en l&rsquo;anoblissant et non l&rsquo;inverse, qui induirait une d&eacute;valuation des &oelig;uvres avec lesquelles il est compar&eacute;. L&rsquo;utilisation d&rsquo;&oelig;uvres consacr&eacute;es et d&rsquo;auteurs canonis&eacute;s annule ce risque de contamination et conf&egrave;re d&rsquo;autorit&eacute; une l&eacute;gitimit&eacute; au genre policier qui accueille d&egrave;s lors en son sein l&rsquo;excellence litt&eacute;raire. En effet, la suspicion du &laquo;&nbsp;mauvais genre<a href="#nbp34" id="footnoteref34_lx8uidj" name="liennbp34" title=" « Les mauvais genres », Les Cahiers des paralittératures, 3, Liège, Éditions du C.L.P.C.F., 1992.">34</a> &raquo; qui contaminerait de mani&egrave;re sournoise la &laquo;&nbsp;bonne&nbsp;&raquo; litt&eacute;rature demeure, puisqu&rsquo;on peut lire dans <em>Le Magazine Litt&eacute;raire</em> que &laquo;&nbsp;le polar infiltre&nbsp;toute la litt&eacute;rature avec le cheval de Troie du fait divers [&hellip;]&nbsp;il infiltre le roman historique<a href="#nbp35" id="footnoteref35_mnrlz3w" name="liennbp35" title="N° 519, mai 2012, p. 53.">35</a> &raquo;, car, explique cette critique de <em>Transfuge</em>, &laquo;&nbsp;le polar est partout, infiltre toutes les litt&eacute;ratures et impose ses codes<a href="#nbp33b" id="footnoteref33_j7km60c" name="liennbp33b" title="N° 77, avril 2014, p.79.">33</a> &raquo;. Cette &laquo;&nbsp;infiltration&nbsp;&raquo; r&eacute;v&egrave;le la perm&eacute;abilit&eacute; g&eacute;n&eacute;rique qu&rsquo;engendre le brouillage des codes scripturaux. Litt&eacute;rature polici&egrave;re et litt&eacute;rature g&eacute;n&eacute;rale n&rsquo;apparaissent plus comme deux formes romanesques qui coexistent de fa&ccedil;on herm&eacute;tiquement s&eacute;par&eacute;e mais au contraire s&rsquo;entrem&ecirc;lent, conduisant l&rsquo;&eacute;ditorial de <em>Lire</em> &agrave; constater qu&rsquo;&laquo;&nbsp;il n&rsquo;y a plus de fronti&egrave;re<a href="#nbp36" id="footnoteref36_7x33h89" name="liennbp36" title="N° 406, juin 2012, p. 5.">36</a> ! &raquo;. La perte du cloisonnement g&eacute;n&eacute;rique engendre une normalisation du roman policier qui devient &laquo;&nbsp;un roman comme les autres<a href="#nbp37" id="footnoteref37_jps6bcy" name="liennbp37" title="Lire, n° 434, avril 2015.">37</a> &raquo;, &laquo; un vrai roman<a href="#nbp38" id="footnoteref38_307twja" name="liennbp38" title=" « Le roman policier est un vrai roman ». Le Magazine Littéraire, n° 519, mai 2012, p. 51.">38</a> &raquo; <em>i.e.</em> un roman dont la forme et la structure s&rsquo;&eacute;loignent des codes et des contraintes d&rsquo;&eacute;criture g&eacute;n&eacute;rique, donnant naissance &agrave; une nouvelle forme de roman policier dont le changement morphologique rel&egrave;ve d&rsquo;une hybridation<a href="#nbp39" id="footnoteref39_h37jg7x" name="liennbp39" title=" « La notion d’hybridation désigne un processus multiple de brouillage qui trouble les classements traditionnels opérés au sein de la fiction. » Annie Collovald, Eric Neveu, Lire le noir. Enquête sur les lecteurs de récits policiers, Paris, BPI, 2004, p. 84-85.">39</a> litt&eacute;raire. La critique du<em> Magazine Litt&eacute;raire</em> affirme que &laquo;&nbsp;les temps sont aux ouvrages qui comportent plusieurs dimensions<a href="#nbp40" id="footnoteref40_o396pq1" name="liennbp40" title="Le Magazine Littéraire, n° 519, mai 2012, p. 48.">40</a> &raquo;, conjointement &agrave; celle de <em>Lire</em> qui explique qu&rsquo;&laquo;&nbsp;en r&eacute;alit&eacute;, le roman policier subit une mutation depuis plusieurs ann&eacute;es et les &eacute;crivains les plus dou&eacute;s sont ceux qui ont su m&eacute;langer les influences<a href="#nbp17b" id="footnoteref17_tzzbmt5" name="liennbp17b" title="Lire, n° 406, juin 2012, p. 5.">17</a> &raquo;, c&rsquo;est-&agrave;-dire qui se sont &eacute;loign&eacute;s des codes stylistiques, formels et structuraux du roman policier pour s&rsquo;approprier les crit&egrave;res normatifs de la litt&eacute;rature g&eacute;n&eacute;rale. Les romans policiers contemporains apparaissent comme des &oelig;uvres hybrides, dans lesquelles &laquo;&nbsp;l&rsquo;enqu&ecirc;te est pr&eacute;sente, certes, mais elle n&rsquo;est plus toujours aussi importante que le contexte, l&rsquo;&eacute;criture, la fa&ccedil;on dont s&rsquo;installe un suspense<a href="#nbp17c" id="footnoteref17_m1ipgi4" name="liennbp17c" title="Lire, n° 406, juin 2012, p. 5.">17</a> &raquo;. L&rsquo;enqu&ecirc;te constituant la s&eacute;quence narrative essentielle du r&eacute;cit policier, sa minoration montre comment le proc&egrave;s de l&eacute;gitimation s&rsquo;appuie sur un d&eacute;tachement d&rsquo;avec le genre, que manifeste aussi la valeur critique attribu&eacute;e &agrave; un &laquo;&nbsp;polar sans meurtre, sans m&eacute;chant<a href="#nbp41" id="footnoteref41_p68owkd" name="liennbp41" title="Lire, n° 414, avril 2013, p. 51.">41</a> &raquo;, alors que le meurtre repr&eacute;sente la fonction constitutive fondamentale<a href="#nbp42" id="footnoteref42_ticw8a6" name="liennbp42" title="Voir Vladimir Propp, Morphologie du conte, Paris, Seuil, 1970.">42</a> du r&eacute;cit policier<a href="#nbp43" id="footnoteref43_lmsyobo" name="liennbp43" title="Fabienne Soldini, « Construction et interprétation du sens du texte : la lecture de romans policiers à énigme », Formes textuelles de la communication. De la production à la réception, Galati (Roumanie), Galati University Press, 2009.">43</a>. Les romans valoris&eacute;s par les critiques sont ceux qui retravaillent les invariants du r&eacute;cit policier, tels ceux de Denis Lehane : &laquo;&nbsp;Avec ses deux derniers livres <em>Un pays &agrave; l&rsquo;aube</em> et <em>Ils vivent la nuit</em> [&hellip;] il s&rsquo;est d&eacute;tach&eacute; des stricts codes du genre pour &eacute;crire l&rsquo;histoire <em>underground</em> de la grande nation<a href="#nbp44" id="footnoteref44_026fdmr" name="liennbp44" title="Marianne, mars 2015, p. 31.">44</a> &raquo;.</p> <p>&nbsp;</p> <h3><strong><em>1.3. L&eacute;gitimation et effacement du genre</em></strong></h3> <p>La (con)fusion du policier et du litt&eacute;raire qu&rsquo;op&egrave;re l&rsquo;hybridation narrative s&rsquo;accomplit au d&eacute;triment du genre. Si, comme l&rsquo;expose Uri Eisenzweig, la d&eacute;valuation du roman policier est inh&eacute;rente &agrave; sa constitution en genre&nbsp;&ndash; c&rsquo;est parce qu&rsquo;elle est g&eacute;n&eacute;rique que la litt&eacute;rature polici&egrave;re ne peut &ecirc;tre de la &laquo;&nbsp;vraie&nbsp;&raquo; litt&eacute;rature<a href="#nbp45" id="footnoteref45_ai05jk7" name="liennbp45" title=" « On pourrait même se demander si le roman policier n’est pas rejeté précisément parce qu’il s’agit d’un genre. Dans une telle perspective, l’aspect « mauvaise littérature » ne constituerait nullement un jugement de valeur, mais bien un décret proprement constitutif du genre. Il ne s’agit pas d’une catégorie comportant un grand nombre de mauvais échantillons, mais bien d’une mauvaise littérature parce que constituée en catégorie ». Uri Eisenzweig, Autopsies du roman policier, Paris, U.G.E., 1983, p. 20, souligné par l’auteur.">45</a>-, l&rsquo;effacement du genre appara&icirc;t alors un pr&eacute;alable indispensable &agrave; l&rsquo;int&eacute;gration du roman policier dans la litt&eacute;rature l&eacute;gitime. Les r&eacute;cits valoris&eacute;s d&eacute;tachent le roman policier du genre policier tel qu&rsquo;il a &eacute;t&eacute; d&eacute;fini et codifi&eacute; notamment par l&rsquo;auteur am&eacute;ricain S.S. Van Dine qui en a &eacute;tabli les r&egrave;gles<a href="#nbp46" id="footnoteref46_wo5jo18" name="liennbp46" title="Par exemple, la règle numéro 5 stipule que « un roman policier sans cadavre, cela n’existe pas » tandis que les règles 9 et 12 posent qu’il ne doit y avoir qu’un seul assassin et un seul détective. Thomas Narcejac, Une machine à lire : le roman policier, Paris, Denoël, 1975, p. 98.">46</a> en 1928, r&egrave;gles non d&rsquo;&eacute;criture litt&eacute;raire<a href="#nbp47" id="footnoteref47_2hfay07" name="liennbp47" title="Selon la règle 16,« iI ne doit pas y avoir, dans le roman policier, de longs passages descriptifs, pas plus que d’analyses subtiles ou de préoccupations « atmosphériques ». De telles matières ne peuvent qu’encombrer lorsqu’il s’agit d’exposer clairement un crime et de chercher le coupable […] Je pense, cependant, que, lorsque l’auteur est parvenu à donner l’impression du réel et à capter l’intérêt et la sympathie du lecteur aussi bien pour les personnages que pour le problème, il a fait suffisamment de concessions à la technique purement littéraire […] Le roman policier est un genre très défini. Le lecteur n’y cherche ni des falbalas littéraires, ni des virtuosités de style, ni des analyses trop approfondies » (Boileau-Narcejac, op. cit., p. 52-53).">47</a> mais d&rsquo;&eacute;laboration d&rsquo;un jeu cognitif dont la mat&eacute;rialit&eacute; textuelle ne serait qu&rsquo;un support. La valeur attribu&eacute;e aux r&eacute;cits impose aujourd&rsquo;hui un &eacute;loignement d&rsquo;avec les contraintes d&rsquo;&eacute;criture g&eacute;n&eacute;rique et ludique, qui d&eacute;tache les romans d&rsquo;une production s&eacute;rielle notamment d&eacute;finie par une &eacute;criture non litt&eacute;raire. Alain-Michel Boyer explique que si le discours critique de la premi&egrave;re moiti&eacute; du XX<sup>&egrave;me</sup> si&egrave;cle &laquo;&nbsp;refuse toute valeur [&agrave; la paralitt&eacute;rature], c&rsquo;est qu&rsquo;elle lui semble proc&eacute;der d&rsquo;une esth&eacute;tique du non &eacute;labor&eacute;, de l&rsquo;informe, de l&rsquo;&eacute;l&eacute;mentaire, du r&eacute;p&eacute;titif &ndash; associ&eacute; au &laquo;&nbsp;m&eacute;canique&nbsp;&raquo;, au &laquo;&nbsp;fabriqu&eacute;&nbsp;&raquo;. D&rsquo;o&ugrave; les accusations d&rsquo;indigence narrative, de d&eacute;faillance grammaticale, de pauvret&eacute; psychologique, de ressassement<a href="#nbp48" id="footnoteref48_0c4ywgo" name="liennbp48" title="Op. cit., p. 34.">48</a> &raquo;. Les critiques l&eacute;gitimantes op&egrave;rent un reversement montrant que si auparavant la forme textuelle servait de support au jeu, d&eacute;sormais c&rsquo;est la forme ludique du roman policier qui devient un support stylis&eacute; d&rsquo;une forme contemporaine de litt&eacute;rature r&eacute;aliste. Sont mises en avant les qualit&eacute;s litt&eacute;raires des &oelig;uvres valoris&eacute;es induites par une attention port&eacute;e aux codes stylistiques, qui outrepassent leurs qualit&eacute;s narratives formelles, marquant la rupture avec le paralitt&eacute;raire&nbsp;: &laquo;&nbsp;Si le propos tient quasi du clich&eacute; dans moult n&eacute;opolars de toutes nationalit&eacute;s, Solares, lui, le sert avec maestria &agrave; travers un r&eacute;cit choral oscillant entre r&ecirc;ve et r&eacute;alit&eacute;, pass&eacute; et pr&eacute;sent, m&ecirc;lant les codes du genre et le r&eacute;alisme magique qui nimbe de larges pans de la litt&eacute;rature sud-am&eacute;ricaine<a href="#nbp49" id="footnoteref49_khu6mip" name="liennbp49" title="Marianne, mars 2015, p.32.">49</a> &raquo;. Abondent dans les critiques des r&eacute;f&eacute;rences &agrave; la litt&eacute;rature consacr&eacute;e ou canonis&eacute;e, montrant comment policier et litt&eacute;raire s&rsquo;entrem&ecirc;lent&nbsp;pour donner naissance &agrave; un &laquo;&nbsp;vrai roman&nbsp;&raquo; litt&eacute;raire qui d&eacute;passe ou &laquo;&nbsp;transcende&nbsp;&raquo; les codes du r&eacute;cit policier<a href="#nbp50" id="footnoteref50_2fy87ta" name="liennbp50" title=" « D’une écriture sèche, haletante, où les descriptions sont réduites au minimum, Ellroy brise à chaque fois les conventions du polar ». Le Monde, avril/juin 2014, p. 10.">50</a>: &laquo;&nbsp;Avec <em>Mourir, la belle affaire</em> (2013), Noriega transcende, &agrave; sa mani&egrave;re singuli&egrave;re, les th&egrave;mes chers au roman noir &ndash;injustice sociale, corruption et fatalit&eacute; du destin- port&eacute;s par une &eacute;criture dense et magn&eacute;tique. Ce polar cr&eacute;pusculaire, o&ugrave; s&rsquo;invitent m&ecirc;me quelques vers de Borges, cultive avec gr&acirc;ce les fleurs du mal<a href="#nbp51" id="footnoteref51_q5ixy5f" name="liennbp51" title="Le Monde, avril/juin 2014, p. 18.">51</a> &raquo;.</p> <p>La mise en discours litt&eacute;raire de l&rsquo;intrigue polici&egrave;re n&rsquo;efface pas la logique narrative g&eacute;n&eacute;rique, alliant myst&egrave;re et suspense, mais l&rsquo;enqu&ecirc;te qui n&rsquo;est plus auto-finalis&eacute;e permet d&rsquo;ouvrir le r&eacute;cit sur une perspective r&eacute;aliste, introduisant des probl&eacute;matiques sociales<a href="#nbp52" id="footnoteref52_i0ldfnk" name="liennbp52" title=" « Cette fiction rassemble tout ce qu’on aime chez cet écrivain : la précision du détail, l’empathie du héros pour les victimes, une intrigue admirablement ficelée, sans oublier une réflexion sur l’évolution sociale et les progrès scientifiques ». Lire, n° 434, avril 2015, p. 36, à propos de Dans la ville en feu de Michael Connelly.">52</a>, ce qui induit une autre rupture avec les r&egrave;gles g&eacute;n&eacute;riques<a href="#nbp53" id="footnoteref53_z3j7qih" name="liennbp53" title="La règle 19 de Van Dine imposait que « le motif du crime doit toujours être strictement personnel. Les complots internationaux et les sombres machinations de la grande politique doivent être laissés au roman d’espionnage ». Voir « Les 20 règles du roman policier », Québec français, n° 141, 2006, p. 60.">53</a>. D&rsquo;essentielle qu&rsquo;elle &eacute;tait, la trame polici&egrave;re appara&icirc;t d&eacute;sormais un pr&eacute;texte pour traiter d&rsquo;aspects cach&eacute;s de la r&eacute;alit&eacute; humaine et sociale, fournissant au r&eacute;cit policier une plus-value litt&eacute;raire. Le meurtre n&rsquo;est plus une &eacute;nigme cognitive abstraite mais un argument litt&eacute;raire qui questionne le r&eacute;el, ce qui conduit la critique du <em>Monde</em> &agrave; affirmer que &laquo;&nbsp;le mauvais genre a gagn&eacute;. Vous voulez comprendre le monde&nbsp;? Lisez des romans noirs<a href="#nbp54a" id="footnoteref54_mjsldl4" name="liennbp54a" title="Le Monde, avril/juin 2014, p. 16.">54</a> &raquo;, rejoignant celle de <em>Lire</em> qui pose que &laquo;&nbsp;le polar, en 2012, sert &agrave; dire le monde<a href="#nbp17d" id="footnoteref17_n0z1bk4" name="liennbp17d" title="Lire, n° 406, juin 2012, p. 5.">17</a> &raquo;.</p> <p>&nbsp;</p> <h2><strong>2. La l&eacute;gitimation du roman noir, forme contemporaine de litt&eacute;rature r&eacute;aliste</strong></h2> <p>&nbsp;</p> <p>Les romans policiers valoris&eacute;s paraissent des &oelig;uvres complexes qui conjuguent fictionnel et r&eacute;el, formes stylistiques litt&eacute;raires et codes narratifs g&eacute;n&eacute;riques, &agrave; l&rsquo;instar de <em>Mapuche</em> de Caryl F&eacute;rey : &laquo;&nbsp;Ce livre magnifique est publi&eacute; en S&eacute;rie Noire, il pourrait l&rsquo;&ecirc;tre dans toute collection litt&eacute;raire qui se respecte<a href="#nbp17e" id="footnoteref17_jbm37zy" name="liennbp17e" title="Lire, n° 406, juin 2012, p. 5.">17</a> &raquo;, &eacute;tant &laquo;&nbsp;un polar &agrave; la fois poignant et tr&egrave;s document&eacute;<a href="#nbp55" id="footnoteref55_zphf2hr" name="liennbp55" title="Lire, n° 406, juin 2012, p. 58.">55</a> &raquo;. Effectuant une mise en r&eacute;cit d&rsquo;une r&eacute;alit&eacute; sociale et politique, ces romans d&rsquo;objectivation de la r&eacute;alit&eacute; op&egrave;rent par un double brouillage de fronti&egrave;res&nbsp;; au brouillage entre le litt&eacute;raire et le policier s&rsquo;ajoute un brouillage entre le r&eacute;el et le fictif&nbsp;: ils r&eacute;alisent une r&eacute;&eacute;criture du r&eacute;el, m&ecirc;lant &eacute;v&eacute;nements historiques, faits politiques et sociaux, personnages r&eacute;els et fictionnnels, &agrave; l&rsquo;instar de James Ellroy, l&rsquo;un des auteurs les plus valoris&eacute;s dans les critiques<a href="#nbp56" id="footnoteref56_6m12opa" name="liennbp56" title="Par exemple, tandis qu’il est présenté ainsi dans Marianne : « Ellroy est un maître de la langue, et se place toutes époques et tous genres confondus, parmi les grands écrivains des États-Unis. » (Mars 2015, p. 30), sa photo fait la couverture des hors-séries du Monde et du Magazine Littéraire 2015, qui proposent également une longue interview de cet auteur.">56</a>, qui tisse ses fictions sur du r&eacute;el dans un &eacute;cheveau tellement serr&eacute; qu&rsquo;il en devient difficile de d&eacute;m&ecirc;ler le r&eacute;el du fictionnel&nbsp;: &laquo;&nbsp;Histoire et fiction, tout est ici plus mix&eacute; qu&rsquo;un cocktail dans une villa de nabab, toute l&rsquo;assise documentaire d&rsquo;Ellroy est sans cesse recompos&eacute;e, trafiqu&eacute;e, manipul&eacute;e<a href="#nbp57" id="footnoteref57_mtkqx6r" name="liennbp57" title="Transfuge, n° 77, avril 2014, p. 81.">57</a>.&raquo;. H&eacute;riti&egrave;re de la litt&eacute;rature r&eacute;aliste du XIX<sup>&egrave;me</sup> si&egrave;cle, la litt&eacute;rature polici&egrave;re contemporaine devient pour les critiques une monstration litt&eacute;raris&eacute;e des r&eacute;alit&eacute;s sociales et g&eacute;opolitiques&nbsp;: &laquo;&nbsp;Depuis la fin des ann&eacute;es 1980, le polar est ainsi devenu pour beaucoup d&rsquo;auteurs, le moyen d&rsquo;ausculter nos soci&eacute;t&eacute;s contemporaines, substitut au roman social, voire au journalisme ou au travail des historiens dans certains pays<a href="#nbp58" id="footnoteref58_gbmm2cq" name="liennbp58" title="Le Monde, avril/juin 2014, p. 46.">58</a> &raquo;.</p> <p>&nbsp;</p> <h3><strong><em>2.1. Le roman noir</em></strong></h3> <p>Plut&ocirc;t que de la fiction pure qui serait issue d&rsquo;une imagination d&eacute;brid&eacute;e, les critiques mettent l&rsquo;accent sur l&rsquo;observation du milieu dans lequel vivent les &eacute;crivains ou au sein duquel ils vont s&rsquo;ins&eacute;rer pour b&acirc;tir une intrigue riche et d&eacute;peindre un univers pr&eacute;cis&nbsp;: &laquo;&nbsp;Pelecanos, lequel est &agrave; Washington ce qu&rsquo;Ellroy, Lehane [&hellip;] sont &agrave; Los Angeles, Boston [&hellip;]&nbsp;: des archivistes de terrain et ethnologues de l&rsquo;asphalte<a href="#nbp59" id="footnoteref59_2ibt89e" name="liennbp59" title="Marianne, mars 2015, p. 30.">59</a> &raquo;. Ils insistent aussi sur l&rsquo;important travail de recherche et de documentation r&eacute;alis&eacute; par l&rsquo;auteur, qui articule la figure de l&rsquo;&eacute;crivain avec celle du reporter t&eacute;moin des &eacute;v&eacute;nements ou de l&rsquo;historien qui exhume des archives jusqu&rsquo;alors dissimul&eacute;es, conjuguant litt&eacute;rarit&eacute; et v&eacute;racit&eacute;. Les discours critiques valident la qualit&eacute; de l&rsquo;exploitation et du traitement litt&eacute;raire du mat&eacute;riau recueilli et expos&eacute; dans les romans &agrave; l&rsquo;aide de r&eacute;f&eacute;rences issues des sciences humaines dont la philosophie<a href="#nbp60" id="footnoteref60_i1lfpga" name="liennbp60" title="« Comme Walter Benjamin, ces auteurs expriment, dans leurs fictions, un désir qui excède celui de savoir comment se sont réellement déroulés les événements historiques : ils veulent rappeler ce qui a été possible et ce qui a été manqué. » (Le Magazine Littéraire, n° 519, mai 2012, p. 62)">60</a> et la sociologie<a href="#nbp61" id="footnoteref61_ey5ldwp" name="liennbp61" title="« On peut aussi bien comprendre le polar contemporain comme une étude de milieu selon Pierre Bourdieu, qui réconcilie dans ses travaux l’histoire quotidienne et l’histoire sociale ». Le Magazine Littéraire, n° 519, mai 2012, p. 62.">61</a> pour expliquer le rapport de l&rsquo;homme au monde et &agrave; l&rsquo;Histoire et la s&eacute;miologie<a href="#nbp62" id="footnoteref62_ykalrwi" name="liennbp62" title="« Une logique qui est celle du paradigme indiciel analysé par Carlo Ginzburg, où le sens se construit à partir de détails apparemment insignifiants ». Le Magazine Littéraire, n° 519, mai 2012, p. 51.">62</a> pour justifier le traitement litt&eacute;raire du social et du politique, qui viendront renforcer et compl&eacute;ter les r&eacute;f&eacute;rences litt&eacute;raires &agrave; des &eacute;crivains consacr&eacute;s et/ou canonis&eacute;s&nbsp;: &laquo;&nbsp;Quitte &agrave; paraphraser ce bon vieux Walter Benjamin [&hellip;] disons que les (bons) &eacute;crivains &laquo;&nbsp;de noir&nbsp;&raquo; cherchent &agrave; &laquo;&nbsp;historiciser&nbsp;&raquo; le pr&eacute;sent pour actualiser l&rsquo;histoire<a href="#nbp63" id="footnoteref63_lkxfzer" name="liennbp63" title="Le Monde, avril/juin 2014, p. 17.">63</a> &raquo;.</p> <p>Toutefois, les th&eacute;matiques valoris&eacute;es et leur traitement narratif ne s&rsquo;av&egrave;rent pas repr&eacute;sentatifs de l&rsquo;ensemble de la litt&eacute;rature polici&egrave;re mais caract&eacute;risent en r&eacute;alit&eacute; le roman noir, un des trois sous-genres qui la composent. Si la d&eacute;nomination &laquo;&nbsp;roman noir&nbsp;&raquo; a supplant&eacute; l&rsquo;appellation &laquo;&nbsp;roman policier&nbsp;&raquo; dans la majorit&eacute; des discours critiques, cela traduit non une &eacute;quivalence o&ugrave; roman noir serait synonyme de roman policier et o&ugrave; l&rsquo;on passerait indiff&eacute;remment d&rsquo;une appellation &agrave; l&rsquo;autre mais montre que la l&eacute;gitimation du genre policier s&rsquo;av&egrave;re partielle&nbsp;: de ce genre polymorphe, un seul des trois sous-genres qui le composent acquiert ses lettres de noblesse, le roman noir, les deux autres, le roman &agrave; &eacute;nigme et le thriller, demeurant dans les limbes de la non l&eacute;gitimit&eacute; litt&eacute;raire.</p> <p>D&egrave;s sa cr&eacute;ation dans les ann&eacute;es 1920 le roman noir comportait une forte dimension de critique sociale et de d&eacute;nonciation politique. Ces r&eacute;cits qui explorent cr&ucirc;ment la r&eacute;alit&eacute; sociale et o&ugrave; le crime se conjugue avec la violence et la corruption sont apparus en r&eacute;action contre la premi&egrave;re forme du roman policier, le roman &agrave; &eacute;nigme, qui expose des assassinats souvent irr&eacute;alistes bien que vraisemblables<a href="#nbp64" id="footnoteref64_osuhhkx" name="liennbp64" title="Voir Gérard Genette, Figures II, Paris, Seuil,1969.">64</a> dans le monde du texte<a href="#nbp65" id="footnoteref65_tihay14" name="liennbp65" title="Pierre Ricoeur, Temps et récit. Tome 1, Seuil, 1983.">65 </a>; perp&eacute;tr&eacute;s de fa&ccedil;on particuli&egrave;rement complexe, les meurtres sont pr&eacute;sent&eacute;s comme de purs probl&egrave;mes intellectuels qui s&rsquo;accomplissent g&eacute;n&eacute;ralement dans des sph&egrave;res sociales tr&egrave;s polic&eacute;es. Quant au troisi&egrave;me sous-genre, le <em>thriller</em>, n&eacute; dans les ann&eacute;es cinquante, il base sa narration sur le pur suspense et allie fr&eacute;quemment policier et horreur, avec la cr&eacute;ation d&rsquo;un tueur <em>serial killer</em>. Pendant longtemps, le roman &agrave; &eacute;nigme a constitu&eacute; la forme noble bien que futile du roman policier en raison du travail cognitif qu&rsquo;&eacute;tait l&rsquo;&eacute;nigme &agrave; r&eacute;soudre, tandis que le roman noir, par l&rsquo;exhibition du corps &agrave; travers la violence et la sexualit&eacute;, devenait l&rsquo;embl&egrave;me d&rsquo;une litt&eacute;rature populaire et vulgaire, tout comme le thriller. Le roman noir contemporain s&rsquo;inscrit dans la lign&eacute;e de celui des origines<a href="#nbp66" id="footnoteref66_l1q9ca9" name="liennbp66" title=" « Il est aujourd’hui l’un des maîtres du roman noir américain […] l’héritier de l’immense Raymond Chandler […] Depuis près de vingt ans, Bosch [l’enquêteur récurrent créé par Connelly] accompagne Michael Connelly dans les bas-fonds de Los Angeles et lui permet de tendre à la société américaine un miroir dans lequel elle se voit moins triomphante qu’elle ne le souhaiterait […] Il suit en entomologiste l’évolution de la Cité des Anges », Le Magazine Littéraire, n° 519, mai 2012, p. 86.">66</a>, ouvrant les th&eacute;matiques socio-politiques sur des probl&eacute;matiques historiques et ethnographiques&nbsp;: &laquo;&nbsp;L&rsquo;intrigue criminelle souligne &agrave; la fois les zones d&rsquo;ombres et les trous noirs du pass&eacute;, les crimes du colonialisme, du fascisme et de la r&eacute;pression de classe, mais aussi le go&ucirc;t amer des r&eacute;volutions d&eacute;faites et des engagements trahis [&hellip;] Chez les auteurs du noir contemporain, la fr&eacute;quentation du pass&eacute; se r&eacute;v&egrave;le indissociable d&rsquo;une critique du pr&eacute;sent<a href="#nbp67" id="footnoteref67_ilsim1o" name="liennbp67" title="Le Magazine Littéraire, n° 519, mai 2012, p 61.">67</a> &raquo;.</p> <p>Si les romans noirs plongent leur intrigue dans un pass&eacute; r&eacute;cent, ils se distinguent toutefois des romans policiers historiques, car, plus qu&rsquo;&agrave; retracer fid&egrave;lement une &eacute;poque, ils s&rsquo;attachent davantage &agrave; la mise au jour de la corruption politique qui a gangr&eacute;n&eacute; le pass&eacute; et poursuit ses ramifications dans le pr&eacute;sent. Ils se diff&eacute;rencient aussi des polars dits ethnologiques<a href="#nbp68" id="footnoteref68_w3d6e8x" name="liennbp68" title="Comme ceux de Tony Hillerman qui se déroulaient chez les Indiens du Nouveau-Mexique ou de Arthur Upfield chez les Aborigènes d’Australie, très en vogue dans les années quatre-vingt-dix.">68</a>, m&ecirc;me si les auteurs fran&ccedil;ais pris&eacute;s par les critiques situent leur intrigue au sein d&rsquo;ethnies sp&eacute;cifiques&nbsp;comme les Indiens Mapuche, les Maoris et les Zoulous pour Caryl F&eacute;rey ou encore les Lapons pour Olivier Truc, car plus que la description de coutumes et de fa&ccedil;ons de vivre, ces romans d&eacute;noncent avec force les injustices et la discrimination que subit une minorit&eacute;, s&rsquo;int&eacute;ressant plus au contexte socio-&eacute;conomique qu&rsquo;aux m&oelig;urs folkloriques, lesquels sont recontextualis&eacute;s socialement. La culture locale est pr&eacute;sent&eacute;e comme inscrite dans un champ politique qui l&rsquo;englobe et la d&eacute;passe. Ainsi, contrairement aux romans policiers historiques et ethnologiques qui restent bien souvent des formes d&eacute;riv&eacute;es du roman &agrave; &eacute;nigme, le roman noir contemporain met au jour non le pass&eacute; d&rsquo;un individu, victime ou tueur, mais r&eacute;v&egrave;le le pass&eacute; historico-politique<a href="#nbp69" id="footnoteref69_2uhtfl1" name="liennbp69" title=" « Ces romans ne reposent plus sur la quête du tueur –dans la plupart des cas il est connu- mais exhument un temps resté dans l’ombre ». Le Magazine Littéraire, n° 519, mai 2012, p. 62.">69</a> d&rsquo;un pays<a href="#nbp70" id="footnoteref70_lakoh9a" name="liennbp70" title="Si les romans policiers édités en France restent majoritairement des romans français, américains et britanniques, ces trois nationalités étant celles du genre policier – rappelons en effet que l’origine du récit policier est attribuée conjointement à l’Américain Edgar Allan Poe pour la nouvelle et au Français Emile Gaboriau pour le roman ; rappelons aussi que les romans à énigme et les romans noirs étaient respectivement surnommés romans policiers anglais et romans policiers américains –, témoignant ainsi de la suprématie de ces trois origines nationales, depuis une vingtaine d’années sont aussi présents de façon notable dans le champ éditorial français des romans venus d’autres horizons, dont les pays scandinaves. Les critiques analysées, même si elles laissent la part belle aux romans français et anglo-saxons, s’attachent aussi aux auteurs scandinaves et sud-américains, ainsi qu’à ceux d’Europe du Sud et d’Asie. L’élargissement géographique des romans policiers édités, autorisant de fait un discours géopolitique sur « le monde », participe à la légitimation du genre dans le discours critique.">70</a>, d&rsquo;une classe ou d&rsquo;un groupe sociaux dont les agissements ont &eacute;t&eacute; pass&eacute;s sous silence&nbsp;: &laquo;&nbsp;Des s&eacute;quelles de la dictature chilienne [&hellip;] &agrave; la violente Histoire du Mexique [&hellip;], des dessous de l&rsquo;&egrave;re Mitterrand [&hellip;] &agrave; la vacuit&eacute; de l&rsquo;Italie berlusconienne [&hellip;], des origines de la soci&eacute;t&eacute; am&eacute;ricaine actuelle [&hellip;] aux mutations de la Chine moderne [&hellip;]: partout, le polar s&rsquo;affirme comme un outil efficace pour raconter notre monde contemporain<a href="#nbp71a" id="footnoteref71_8g9yok0" name="liennbp71a" title="Transfuge, n° 77, avril 2014, p. 79.">71</a> &raquo;.</p> <p>&nbsp;</p> <h3><strong><em>2.2.&nbsp;Les clivages g&eacute;n&eacute;riques</em></strong></h3> <p>La valorisation du roman noir s&rsquo;op&egrave;re par opposition et d&eacute;valorisation du roman &agrave; &eacute;nigme et du thriller, qui tous deux appuient leurs intrigues sur un vraisemblable litt&eacute;raire autofinalis&eacute;<a href="#nbp72" id="footnoteref72_01thlly" name="liennbp72" title=" « Le vraisemblable est donc ici un signifié sans signifiant, ou plutôt il n’a pas d’autre signifiant que l’œuvre elle-même ». Gérard Genette, op. cit., p. 76.">72</a> tandis que le r&eacute;alisme des r&eacute;cits noirs trouve sa signification en dehors du monde clos du texte. Le travail d&rsquo;imagination pure est d&eacute;valu&eacute; au profit du travail de recherche et de documentation r&eacute;v&eacute;lant un renversement des valeurs&nbsp;au sein du genre policier, o&ugrave;, &agrave; pr&eacute;sent, l&rsquo;art de l&rsquo;&eacute;crivain ne saurait se r&eacute;duire exclusivement &agrave; inventer des histoires, aussi complexes soient-elles. Pour les critiques l&rsquo;intrigue polici&egrave;re ne doit plus &ecirc;tre sa propre finalit&eacute;, conception que partagent les auteurs. Par exemple, Don Winslow&nbsp;que <em>Le Magazine Litt&eacute;raire</em> pr&eacute;sente comme &laquo;&nbsp;l&rsquo;un des ma&icirc;tres du polar am&eacute;ricain<a href="#nbp73a" id="footnoteref73_2zt60bh" name="liennbp73a" title="Le Magazine Littéraire, n° 519, mai 2012, p. 64.">73</a> &raquo; pr&eacute;cise &laquo;&nbsp;je ne sais pas si je pourrais donner dans la pure imagination<a href="#nbp73b" id="footnoteref73_hllarch" name="liennbp73b" title="Le Magazine Littéraire, n° 519, mai 2012, p. 64.">73</a> &raquo;, tournant en d&eacute;rision le roman &agrave; &eacute;nigme : &laquo;&nbsp;Il y a d&rsquo;excellents polars o&ugrave; un chat r&eacute;sout un myst&egrave;re. Mais ce ne sont ni ceux que j&rsquo;&eacute;cris ni ceux que j&rsquo;ai envie d&rsquo;&eacute;crire<a href="#nbp74" id="footnoteref74_mjjtxk8" name="liennbp74" title="Le Magazine Littéraire, n° 519, mai 2012, p. 64-65.">74</a> &raquo;. Le reproche majeur adress&eacute; au roman &agrave; &eacute;nigme est la vacuit&eacute; de ses intrigues, oppos&eacute;e &agrave; la v&eacute;racit&eacute; de celles du roman noir, formul&eacute; ainsi dans cette critique du <em>Monde</em>&nbsp;:&nbsp;&laquo;&nbsp;que valent les histoires, m&ecirc;mes admirablement construites, d&rsquo;&eacute;nigme en chambre close face &agrave; des intrigues peupl&eacute;es de passions, de trahisons, de luttes pour le profit et le pouvoir, de sexe, de violence et de mort&nbsp;? Pas grand-chose car elles ne disent rien du monde dans lequel nous vivons, de ses contradictions, de son d&eacute;senchantement<a href="#nbp54b" id="footnoteref54_3egejhc" name="liennbp54b" title="Le Monde, avril/juin 2014, p. 16.">54</a> &raquo;. Ainsi, quelles que soient les qualit&eacute;s de construction formelle et structurale des r&eacute;cits &agrave; &eacute;nigme, quelle que soit la solidit&eacute; de leur coh&eacute;rence narrative, le vraisemblable narratif devient insignifiant face &agrave; la valeur ajout&eacute;e que donne le r&eacute;alisme. La l&eacute;gitimation du roman noir passe ainsi par la rupture avec la forme du roman policier qui longtemps a symbolis&eacute; le genre avant de tomber en l&eacute;g&egrave;re d&eacute;su&eacute;tude et dont la perte de vitesse co&iuml;ncide avec l&rsquo;ascension du thriller tant sur le plan de la production que de la r&eacute;ception. Car les thrillers, contrairement aux romans noirs, repr&eacute;sentent les plus fortes ventes de romans policiers en France. Cependant, ce sous-genre est peu &eacute;voqu&eacute; dans les critiques du corpus analys&eacute;. Exception faite des auteurs de best-sellers Franck Thilliez et Harlen Coben, dont <em>Le Magazine Litt&eacute;raire</em><a href="#nbp75" id="footnoteref75_0nj5tt1" name="liennbp75" title="N° 519, mai 2012.">75</a> et <em>Lire</em><a href="#nbp76" id="footnoteref76_8ctp4is" name="liennbp76" title="N° 406, juin 2012.">76</a> publient une interview, les auteurs de thrillers sont bien souvent ignor&eacute;s, voire mentionn&eacute;s comme repoussoirs du roman noir&nbsp;: &laquo;&nbsp;De nouveaux auteurs ont fait leur apparition, moins soucieux de critique sociale que de faire jeu &eacute;gal, et m&ecirc;me d&rsquo;en remontrer, aux bons gros thrillers &laquo;&nbsp;&agrave; l&rsquo;am&eacute;ricaine&nbsp;&raquo; [&hellip;] Ils &eacute;parpillent du <em>serial killer</em> d&eacute;cha&icirc;n&eacute;, des complots ma&ccedil;onniques, du surnaturel de pacotille, des fiches Wikip&eacute;dia &agrave; peine retravaill&eacute;es, de la psychologie &agrave; deux balles et emballent le tout dans des r&eacute;cits lorgnant lourdement vers l&rsquo;adaptation t&eacute;l&eacute; ou cin&eacute;ma. Mais le public adh&egrave;re, comme en t&eacute;moignent les succ&egrave;s ph&eacute;nom&eacute;naux de Jean-Christophe Grang&eacute;, l&rsquo;auteur des <em>Rivi&egrave;res pourpres</em>, de Maxime Chattam ou encore Guillaume Musso<a href="#nbp77" id="footnoteref77_rlp1rqd" name="liennbp77" title="Marianne, mars 2015, p. 87.">77</a> &raquo;.</p> <p>Facilit&eacute; d&rsquo;&eacute;criture et utilisation <em>ad nauseam</em> de clich&eacute;s qui &eacute;taient les reproches longtemps adress&eacute;s au roman policier en comparaison avec la litt&eacute;rature dite litt&eacute;raire sont d&eacute;sormais ceux adress&eacute;s au <em>thriller</em> en comparaison avec le roman noir, <em>thrillers</em> qui symbolisent les mauvais romans policiers tout comme les romans policiers symbolisaient jusqu&rsquo;il y a peu la mauvaise litt&eacute;rature&nbsp;: &laquo;&nbsp;le polar est un march&eacute; pour lequel on bataille &acirc;prement mais en sort-il grandi&nbsp;? Pas vraiment, si l&rsquo;on &eacute;voque le &eacute;ni&egrave;me r&eacute;cit de disparition d&rsquo;enfant ou de traque de <em>serial killer</em>. M&eacute;caniques sans fond trop bien huil&eacute;es &ndash; du frisson r&eacute;p&eacute;tant inlassablement les m&ecirc;mes sch&eacute;mas [&hellip;] Heureusement [&hellip;] derri&egrave;re la surexploitation de filons porteurs et les livres ressassant des clich&eacute;s centenaires, le noir a pris le dessus<a href="#nbp71b" id="footnoteref71_u0lbcdu" name="liennbp71b" title="Transfuge, n° 77, avril 2014, p. 79.">71</a> &raquo;.</p> <p>Pour &eacute;loign&eacute;s qu&rsquo;ils soient pos&eacute;s par les critiques, roman noir et thriller partagent une extr&ecirc;me violence qui s&rsquo;exprime dans des sc&egrave;nes narratives d&eacute;crivant avec force d&eacute;tails une corporalit&eacute; sanglante, exacerb&eacute;e et tourment&eacute;e. Mais alors que cette violence devient un argument suppl&eacute;mentaire de non l&eacute;gitimit&eacute; du thriller, les critiques la justifient pour le roman noir, tant sur le plan du sens que du style&nbsp;: &laquo;&nbsp;Dans leurs polars fr&eacute;n&eacute;tiques [&hellip;] on y meurt copieusement, dans des conditions dantesques. Les personnages principaux ne sont pas &eacute;pargn&eacute;s par cette po&eacute;sie sombre et vertigineuse, o&ugrave; le sublime &ndash; sa qu&ecirc;te, du moins &ndash; caresse l&rsquo;effroyable. Omnipr&eacute;sente, la mise &agrave; mort, r&eacute;elle ou symbolique, se teinte des oripeaux expressionnistes d&rsquo;un cauchemar &agrave; plusieurs entr&eacute;es<a href="#nbp78" id="footnoteref78_gdszimt" name="liennbp78" title="Le Magazine Littéraire, n° 556, juin 2015, p. 79.">78</a> &raquo;. La violence extr&ecirc;me est construite non comme auto-finalis&eacute;e telle la violence &laquo;&nbsp;gratuite&nbsp;&raquo; pr&ecirc;t&eacute;e au thriller mais comme un outil de d&eacute;nonciation, un moyen de d&eacute;crire la face obscure de la soci&eacute;t&eacute;. Aussi insoutenable soit-elle, la violence narrative du roman noir para&icirc;t un t&eacute;moignage sans concession d&rsquo;une soci&eacute;t&eacute; violente, un reflet des institutions qui la g&eacute;n&egrave;rent et l&rsquo;instrumentalisent (la violence &eacute;tatique) ou du d&eacute;sespoir social (la violence criminelle), contrairement &agrave; celle du <em>thriller</em> d&eacute;finie comme la marque du sadisme d&rsquo;un tueur, n&rsquo;ayant d&rsquo;autre finalit&eacute; narrative que sa propre monstration&nbsp;: &laquo;&nbsp;Ces auteurs ne font pas du crime le d&eacute;cha&icirc;nement d&rsquo;une force arbitraire, mais reconstituent une chaine de responsabilit&eacute;s, en d&eacute;piautant les excavations, pour en faire non une pulsion inconsciente d&rsquo;elle-m&ecirc;me, mais une machinerie intellectualis&eacute;e de la mise &agrave; mort, proc&eacute;duri&egrave;re et assum&eacute;e [&hellip;] Ces &eacute;pisodes d&rsquo;hyst&eacute;rie macabres font &eacute;merger les souillures d&rsquo;un monde-abattoir<a href="#nbp79" id="footnoteref79_0cp7hil" name="liennbp79" title="Le Magazine Littéraire, n° 556, juin 2015, p. 80.">79</a> &raquo;.</p> <p>&nbsp;</p> <p>L&rsquo;analyse des discours critiques montre que la l&eacute;gitimation du roman noir s&rsquo;accomplit par le d&eacute;tachement d&rsquo;avec le genre policier d&rsquo;une part et d&rsquo;autre part par la dissociation d&rsquo;avec les deux autres sous-genres, le roman &agrave; &eacute;nigme et le thriller. Il se produit aujourd&rsquo;hui dans le sous-champ de la litt&eacute;rature polici&egrave;re ce qui s&rsquo;&eacute;tait produit dans la seconde moiti&eacute; du XIX<sup>&egrave;me</sup> si&egrave;cle dans le champ litt&eacute;raire<a href="#nbp80" id="footnoteref80_q8ae819" name="liennbp80" title="Voir Pierre Bourdieu, Les Règles de l’art. Genèse et structure du champ littéraire, Paris, Seuil, 1992.">80</a>, o&ugrave; le roman, jug&eacute; alors la plus basse des formes litt&eacute;raires<a href="#nbp81" id="footnoteref81_noaercu" name="liennbp81" title="Alain-Michel Boyer rappelle que jusque dans la seconde moitié du XIXème siècle, « le roman était resté en marge de la littérature. Méprisé, honni, il […] était considéré, selon les époques, comme un genre « bas », « mineur », « secondaire » : un divertissement vulgaire, sans qualité artistique […] qui s’adressait à la partie la moins estimable du public […] Les termes employés alors ne sont guère différents de ceux dont on use aujourd’hui à l’égard de la paralittérature ». La paralittérature, Paris, PUF, Que sais-je ?, 1992, p. 28.">81</a>, pour int&eacute;grer les Belles-Lettres et pour &ecirc;tre l&eacute;gitim&eacute; &agrave; son tour s&rsquo;&eacute;tait d&eacute;tach&eacute; de tout un pan de sa production&nbsp;; les romans r&eacute;alistes, dont les auteurs sont aujourd&rsquo;hui canonis&eacute;s, avaient d&ucirc; s&rsquo;extraire, &agrave; l&rsquo;aide de formes d&rsquo;instances de cons&eacute;cration dont les prix litt&eacute;raires et le travail des critiques, de l&rsquo;ensemble de la production litt&eacute;raire. Le clivage au sein du genre policier reproduit le clivage entre litt&eacute;rature et paralitt&eacute;rature au sein du champ de la litt&eacute;rature romanesque. Le mode de l&eacute;gitimation s&rsquo;est d&eacute;plac&eacute;&nbsp;; plut&ocirc;t que d&rsquo;opposer un genre dans son ensemble &agrave; la litt&eacute;rature g&eacute;n&eacute;rale, il s&rsquo;exerce d&eacute;sormais &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur du genre lui-m&ecirc;me. Sous couvert d&rsquo;unification de la production polici&egrave;re sous la d&eacute;nomination g&eacute;n&eacute;ralisante de &laquo;&nbsp;polar&nbsp;&raquo; devenu synonyme familier de roman policier, le genre demeure en r&eacute;alit&eacute; un fort principe discriminant qui travaille les sous-genres, lesquels d&eacute;finissent, hi&eacute;rarchisent et distribuent les &oelig;uvres, auxquelles sont attribu&eacute;es ou refus&eacute;es un ensemble de valeurs. Les d&eacute;finitions g&eacute;n&eacute;riques continuent de valider l&rsquo;ensemble de la production litt&eacute;raire polici&egrave;re contemporaine.</p> <p>(<em>Aix Marseille Univ, CNRS, LAMES, Aix-en-Provence</em>)</p> <p>&nbsp;</p> <p>&nbsp;</p> <hr /> <p><strong>Notes et r&eacute;f&eacute;rences</strong></p> <p><a href="#liennbp1" name="nbp1">1</a> Claude Grignon, Jean-Claude Passeron, <em>Le Savant et le populaire. Mis&eacute;rabilisme et populisme en sociologie et en litt&eacute;rature</em>, Paris, Le Seuil, 1989.</p> <p><a href="#liennbp2" name="nbp2">2</a> Jacques Dubois, &laquo;&nbsp;Champ l&eacute;gitime et genre p&eacute;riph&eacute;rique : situation du roman policier&nbsp;&raquo;, <em>Lendemains</em>, n&deg; 36, 1984, p. 64-68.</p> <p><a href="#liennbp3" name="nbp3">3</a> Fabienne Soldini, <strong>&laquo; </strong>Le fantastique contemporain, entre horreur et angoisse &raquo;, <em>Sociologie de l&rsquo;Art</em>, Paris, 2002, p. 37-67.</p> <p><a href="#liennbp4" name="nbp4">4</a> Pierre Bourdieu, &laquo;&nbsp;Le champ litt&eacute;raire&nbsp;&raquo;, <em>Actes de la recherche en sciences sociales</em>, Paris, 1991, p. 3-46.</p> <p><a href="#liennbp5" name="nbp5">5</a> Alors que les diff&eacute;rentes enqu&ecirc;tes sur <em>Les Pratiques culturelles des Fran&ccedil;ais </em>montrent qu&rsquo;en r&eacute;alit&eacute; le lectorat du roman policier se recrute dans toutes les classes sociales. Selon la derni&egrave;re enqu&ecirc;te r&eacute;alis&eacute;e en 2008, le genre policier est lu par 38% des ouvriers, 39 % des employ&eacute;s, 45 % des professions interm&eacute;diaires et 43 % des cadres sup&eacute;rieurs et professions intellectuelles.</p> <p><a href="#liennbp6" name="nbp6">6</a> Alain-Michel Boyer, <em>La paralitt&eacute;rature</em>, Paris, PUF, Que sais-je&nbsp;?, 1992.</p> <p><a href="#liennbp7" name="nbp7">7</a>&nbsp; &laquo; Structure &raquo; au sens de Claude L&eacute;vi-Strauss qui regroupe la forme et le contenu (&laquo;&nbsp;La structure et la forme&nbsp;&raquo;, <em>Cahiers de l&rsquo;I.S.E.A</em>., n&deg;99, 1960.</p> <p><a href="#liennbp8" name="nbp8">8</a> Par exemple <em>Le Diable tout le temps</em> de Donald Ray Pollock (Paris, Albin Michel, 2012), Grand Prix de Litt&eacute;rature polici&egrave;re 2012 &eacute;lu Meilleur livre de l&rsquo;ann&eacute;e 2012 par <em>Lire</em>, <em>La V&eacute;rit&eacute; sur l&rsquo;affaire Harry Quebert</em> de Jo&euml;l Dicker (Paris, de Fallois, 2012) Grand Prix du roman de l&rsquo;Acad&eacute;mie fran&ccedil;aise et Goncourt des lyc&eacute;ens en 2012.</p> <p><a href="#liennbp9" name="nbp9">9</a> Comme Pierre Lema&icirc;tre dont le roman <em>Au revoir l&agrave;-haut</em> (Paris, Albin Michel, 2013) a re&ccedil;u le Prix Goncourt en 2013.</p> <p><a href="#liennbp10" name="nbp10">10</a>&nbsp; &laquo;&nbsp;L&rsquo;acc&egrave;s &agrave; la visibilit&eacute;, par l&rsquo;offre de l&rsquo;&oelig;uvre au public, &agrave; travers la m&eacute;diation de la presse litt&eacute;raire, est une marque de reconnaissance, f&ucirc;t-elle n&eacute;gative. Pour tout &eacute;crivain, il ne suffit pas d&rsquo;&ecirc;tre publi&eacute;, il importe d&rsquo;&ecirc;tre critiqu&eacute; &raquo;. Delphine Naudier, &laquo;&nbsp;La fabrication de la croyance en la valeur litt&eacute;raire&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Sociologie de l&rsquo;Art</em>, 2/2004, p.&nbsp;42.</p> <p><a href="#liennbp11" name="nbp11">11</a> Par exemple, en 2015, 32 pages pour <em>Le Magazine Litt&eacute;raire</em> (n&deg; 556) et 27 pages pour<em> Lire</em> (n&deg; 434).</p> <p><a href="#liennbp12" name="nbp12">12</a> Le corpus analys&eacute;&nbsp;se compose de dix magazines parus entre 2012 et 2016, r&eacute;partis ainsi&nbsp;: six num&eacute;ros de magazines litt&eacute;raires et un num&eacute;ro d&rsquo;un magazine culturel, comprenant un imposant dossier consacr&eacute; au roman policier (<em>Lire</em>, n&deg; 406, juin 2012, dossier&nbsp;&laquo;&nbsp;sp&eacute;cial polar, les 10 meilleurs&nbsp;de l&rsquo;ann&eacute;e 2012 &raquo; ; <em>Lire</em>, n&deg; 414, avril 2013, dossier&nbsp;&laquo;&nbsp;sp&eacute;cial polar, les 10 meilleurs&nbsp;&raquo;&nbsp;; <em>Lire</em>, n&deg; 424, avril 2014, dossier&nbsp;&laquo;&nbsp;sp&eacute;cial polar, les 10 meilleurs&nbsp;&raquo;&nbsp;; <em>Lire</em>, n&deg; 434, avril 2015, dossier&nbsp;&laquo;&nbsp;sp&eacute;cial polar, les 10 meilleurs&nbsp;&raquo;&nbsp;; <em>Le Magazine Litt&eacute;raire</em>, n&deg; 519, mai 2012, dossier &laquo;&nbsp;Le polar aujourd&rsquo;hui&nbsp;&raquo;&nbsp;; <em>Le Magazine Litt&eacute;raire</em>, n&deg; 556, juin 2015, dossier &laquo;&nbsp;sp&eacute;cial s&eacute;rie noire&nbsp;&raquo;&nbsp;;<em> Transfuge</em>, n&deg; 77, avril 2014, dossier&nbsp;&laquo;&nbsp;sp&eacute;cial polar&nbsp;&raquo;) et trois num&eacute;ros hors-s&eacute;ries de la presse d&rsquo;actualit&eacute;s, traitant exclusivement du genre policier (<em>Le Monde</em>, avril/juin 2014&nbsp;;<em> Marianne</em>, mars 2015&nbsp;; <em>Marianne</em>, mai 2016).</p> <p><a href="#liennbp13" name="nbp13">13</a> Voir Delphine Naudier, &laquo;&nbsp;La fabrication de la croyance en la valeur litt&eacute;raire&nbsp;&raquo;,&nbsp;<em>Sociologie de l&rsquo;Art</em> 2/2004 (OPuS 4) , p.&nbsp;37-66.</p> <p><a href="#liennbp14" name="nbp14">14</a><em> L&rsquo;Institution de la litt&eacute;rature</em>, Bruxelles-Paris, Labor-Nathan, 1986.</p> <p><a href="#liennbp15" name="nbp15">15</a> La recension critique de romans policiers contemporains a commenc&eacute; dans les ann&eacute;es quatre-vingt. Eric Neveu note que le n&eacute;o-polar, forme contemporaine politis&eacute;e du roman noir, a eu une rubrique dans <em>Le Monde des livres</em> d&egrave;s 1982 (<em>L&rsquo;Id&eacute;ologie dans le roman d&rsquo;espionnage</em>, Paris, Presses de la fondation nationale des sciences politiques, 1985). En une trentaine d&rsquo;ann&eacute;es l&rsquo;exposition critique du roman policier est pass&eacute;e de quelques lignes &agrave; plusieurs dizaines de pages.</p> <p><a href="#liennbp16" name="nbp16">16</a> N&deg; 519, mai 2012, p 62.</p> <p>17 <a href="#liennbp17a" name="nbp17a">a</a> <a href="#liennbp17b" name="nbp17b">b</a> <a href="#liennbp17c" name="nbp17c">c</a> <a href="#liennbp17d" name="nbp17d">d</a> <a href="#liennbp17e" name="nbp17e">e</a> <em>Lire</em>, n&deg; 406, juin 2012, p. 5.</p> <p><a href="#liennbp18" name="nbp18">18</a> Boileau-Narcejac, <em>Le Roman policier</em>, Paris, PUF, Que sais-je&nbsp;?, 1982. Jacques Dubois, <em>Le Roman policier ou la modernit&eacute;</em>, Paris, Nathan, 1992. Yves Reuter, <em>Le Roman policier</em>, Paris, Nathan, 1997.</p> <p><a href="#liennbp19" name="nbp19">19</a> Paru en 1841.</p> <p><a href="#liennbp20" name="nbp20">20</a> N&deg; 406, juin 2012, p. 35.</p> <p><a href="#liennbp21" name="nbp21">21</a> 2016, p. 62.</p> <p><a href="#liennbp22" name="nbp22">22</a> N&deg; 519, mai 2012, p.&nbsp;48.</p> <p><a href="#liennbp23" name="nbp23">23</a> N&deg; 406, juin 2012, p. 42.</p> <p><a href="#liennbp24" name="nbp24">24</a> Voir Nathalie Heinich, <em>L&rsquo;&Eacute;preuve de la grandeur. Prix litt&eacute;raires et reconnaissance</em>, Paris, La D&eacute;couverte, 1999.</p> <p><a href="#liennbp25" name="nbp25">25</a> Qui a refus&eacute; le prix Nobel qui lui avait &eacute;t&eacute; d&eacute;cern&eacute; en 1964.</p> <p>26 <a href="#liennbp26a" name="nbp26a">a</a> <a href="#liennbp26b" name="nbp26b">b</a> <a href="#liennbp26c" name="nbp26c">c</a> <em>Le Magazine Litt&eacute;raire</em>, mai 2012, p. 57.</p> <p><a href="#liennbp27" name="nbp27">27</a> Prix Nobel de Litt&eacute;rature en 1957.</p> <p><a href="#liennbp28" name="nbp28">28</a> Voir Sylvie Ducas, &laquo;&nbsp;Prix litt&eacute;raires en France&nbsp;: cons&eacute;cration ou d&eacute;sacralisation de l&rsquo;auteur&nbsp;?&nbsp;&raquo;, <em>COnTEXTES</em>, 7,&nbsp;2010.</p> <p><a href="#liennbp29" name="nbp29">29</a> Sylvie Ducas, &laquo;&nbsp;Prix Goncourt et reconnaissance litt&eacute;raire&nbsp;: strat&eacute;gies d&rsquo;acc&egrave;s &agrave; la cons&eacute;cration&nbsp;&raquo;, <em>Droit d&rsquo;entr&eacute;e. Modalit&eacute;s et conditions d&rsquo;acc&egrave;s aux univers artistiques</em>, G&eacute;rard Mauger (dir.), &Eacute;ditions de la Maison des Sciences de l&rsquo;Homme, Paris, 2006.</p> <p><a href="#liennbp30" name="nbp30">30</a> Paris, Gallimard, 2006.</p> <p><a href="#liennbp31" name="nbp31">31</a> Pour <em>Cherokee, </em>Paris, Minuit, 1983.</p> <p><a href="#liennbp32" name="nbp32">32</a> Pour <em>Je m&rsquo;en vais, </em>Paris, Minuit, 1999.</p> <p>33 <a href="#liennbp33a" name="nbp33a">a</a> <a href="#liennbp33b" name="nbp33b">b</a> N&deg; 77, avril 2014, p.79.</p> <p><a href="#liennbp34" name="nbp34">34</a>&nbsp; &laquo;&nbsp;Les mauvais genres&nbsp;&raquo;,<em> Les Cahiers des paralitt&eacute;ratures</em>, 3, Li&egrave;ge, &Eacute;ditions du C.L.P.C.F., 1992.</p> <p><a href="#liennbp35" name="nbp35">35</a> N&deg; 519, mai 2012, p. 53.</p> <p><a href="#liennbp36" name="nbp36">36</a> N&deg; 406, juin 2012, p. 5.</p> <p><a href="#liennbp37" name="nbp37">37</a><em> Lire</em>, n&deg; 434, avril 2015.</p> <p><a href="#liennbp38" name="nbp38">38</a>&nbsp; &laquo;&nbsp;Le roman policier est un vrai roman &raquo;. <em>Le Magazine Litt&eacute;raire,</em> n&deg; 519, mai 2012, p. 51.</p> <p><a href="#liennbp39" name="nbp39">39</a>&nbsp; &laquo;&nbsp;La notion d&rsquo;hybridation d&eacute;signe un processus multiple de brouillage qui trouble les classements traditionnels op&eacute;r&eacute;s au sein de la fiction.&nbsp;&raquo; Annie Collovald, Eric Neveu,<em> Lire le noir. Enqu&ecirc;te sur les lecteurs de r&eacute;cits policiers</em>, Paris, BPI, 2004, p. 84-85.</p> <p><a href="#liennbp40" name="nbp40">40</a><em> Le Magazine Litt&eacute;raire</em>, n&deg; 519, mai 2012, p. 48.</p> <p><a href="#liennbp41" name="nbp41">41</a><em> Lire</em>, n&deg; 414, avril 2013, p. 51.</p> <p><a href="#liennbp42" name="nbp42">42</a> Voir Vladimir Propp, <em>Morphologie du conte</em>, Paris, Seuil, 1970.</p> <p><a href="#liennbp43" name="nbp43">43</a> Fabienne Soldini, &laquo;&nbsp;Construction et interpr&eacute;tation du sens du texte&nbsp;: la lecture de romans policiers &agrave; &eacute;nigme&nbsp;&raquo;, <em>Formes textuelles de la communication. De la production &agrave; la r&eacute;ception</em>, Galati (Roumanie), <em>Galati University Press</em>, 2009.</p> <p><a href="#liennbp44" name="nbp44">44</a><em> Marianne</em>, mars 2015, p. 31.</p> <p><a href="#liennbp45" name="nbp45">45</a>&nbsp; &laquo;&nbsp;On pourrait m&ecirc;me se demander si le roman policier n&rsquo;est pas rejet&eacute; pr&eacute;cis&eacute;ment <em>parce qu&rsquo;il</em> s&rsquo;agit d&rsquo;un genre. Dans une telle perspective, l&rsquo;aspect &laquo;&nbsp;mauvaise litt&eacute;rature&nbsp;&raquo; ne constituerait nullement un jugement de valeur, mais bien un d&eacute;cret proprement <em>constitutif</em> du genre. Il ne s&rsquo;agit pas d&rsquo;une cat&eacute;gorie comportant un grand nombre de mauvais &eacute;chantillons, mais bien d&rsquo;une mauvaise litt&eacute;rature <em>parce que</em> constitu&eacute;e en cat&eacute;gorie &raquo;. Uri Eisenzweig, <em>Autopsies du roman policier</em>, Paris, U.G.E., 1983, p. 20, soulign&eacute; par l&rsquo;auteur.</p> <p><a href="#liennbp46" name="nbp46">46</a> Par exemple, la r&egrave;gle num&eacute;ro 5 stipule que &laquo;&nbsp;un roman policier sans cadavre, cela n&rsquo;existe pas&nbsp;&raquo; tandis que les r&egrave;gles 9 et 12 posent qu&rsquo;il ne doit y avoir qu&rsquo;un seul assassin et un seul d&eacute;tective. Thomas Narcejac,<em> Une machine &agrave; lire&nbsp;: le roman policier</em>, Paris, Deno&euml;l, 1975, p. 98.</p> <p><a href="#liennbp47" name="nbp47">47</a> Selon la r&egrave;gle 16,&laquo;&nbsp;iI ne doit pas y avoir, dans le roman policier, de longs passages descriptifs, pas plus que d&rsquo;analyses subtiles ou de pr&eacute;occupations &laquo;&nbsp;atmosph&eacute;riques&nbsp;&raquo;. De telles mati&egrave;res ne peuvent qu&rsquo;encombrer lorsqu&rsquo;il s&rsquo;agit d&rsquo;exposer clairement un crime et de chercher le coupable [&hellip;] Je pense, cependant, que, lorsque l&rsquo;auteur est parvenu &agrave; donner l&rsquo;impression du r&eacute;el et &agrave; capter l&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t et la sympathie du lecteur aussi bien pour les personnages que pour le probl&egrave;me, il a fait suffisamment de concessions &agrave; la technique purement litt&eacute;raire [&hellip;] Le roman policier est un genre tr&egrave;s d&eacute;fini. Le lecteur n&rsquo;y cherche ni des falbalas litt&eacute;raires, ni des virtuosit&eacute;s de style, ni des analyses trop approfondies&nbsp;&raquo; (Boileau-Narcejac, <em>op. cit</em>., p. 52-53).</p> <p><a href="#liennbp48" name="nbp48">48</a><em> Op. cit</em>., p. 34.</p> <p><a href="#liennbp49" name="nbp49">49</a><em> Marianne</em>, mars 2015, p.32.</p> <p><a href="#liennbp50" name="nbp50">50</a>&nbsp; &laquo;&nbsp;D&rsquo;une &eacute;criture s&egrave;che, haletante, o&ugrave; les descriptions sont r&eacute;duites au minimum, Ellroy brise &agrave; chaque fois les conventions du polar &raquo;. <em>Le Monde</em>, avril/juin 2014,&nbsp;p. 10.</p> <p><a href="#liennbp51" name="nbp51">51</a><em> Le Monde</em>, avril/juin 2014, p. 18.</p> <p><a href="#liennbp52" name="nbp52">52</a>&nbsp; &laquo;&nbsp;Cette fiction rassemble tout ce qu&rsquo;on aime chez cet &eacute;crivain&nbsp;: la pr&eacute;cision du d&eacute;tail, l&rsquo;empathie du h&eacute;ros pour les victimes, une intrigue admirablement ficel&eacute;e, sans oublier une r&eacute;flexion sur l&rsquo;&eacute;volution sociale et les progr&egrave;s scientifiques &raquo;. <em>Lire</em>, n&deg; 434, avril 2015, p. 36, &agrave; propos de <em>Dans la ville en feu</em> de Michael Connelly.</p> <p><a href="#liennbp53" name="nbp53">53</a> La r&egrave;gle 19 de Van Dine imposait que &laquo;&nbsp;le motif du crime doit toujours &ecirc;tre strictement personnel. Les complots internationaux et les sombres machinations de la grande politique doivent &ecirc;tre laiss&eacute;s au roman d&rsquo;espionnage &raquo;. Voir &laquo;&nbsp;Les 20 r&egrave;gles du roman policier&nbsp;&raquo;, <em>Qu&eacute;bec fran&ccedil;ais</em>, n&deg; 141, 2006, p. 60.</p> <p>54 <a href="#liennbp54a" name="nbp54a">a</a> <a href="#liennbp54b" name="nbp54b">b</a> <em>Le Monde</em>, avril/juin 2014, p. 16.</p> <p><a href="#liennbp55" name="nbp55">55</a><em> Lire</em>, n&deg; 406, juin 2012, p. 58.</p> <p><a href="#liennbp56" name="nbp56">56</a> Par exemple, tandis qu&rsquo;il est pr&eacute;sent&eacute; ainsi dans <em>Marianne</em>&nbsp;: &laquo;&nbsp;Ellroy est un ma&icirc;tre de la langue, et se place toutes &eacute;poques et tous genres confondus, parmi les grands &eacute;crivains des &Eacute;tats-Unis<sup>.</sup> &raquo; (Mars 2015, p. 30), sa photo fait la couverture des hors-s&eacute;ries du <em>Monde</em> et du <em>Magazine Litt&eacute;raire</em> 2015, qui proposent &eacute;galement une longue interview de cet auteur.</p> <p><a href="#liennbp57" name="nbp57">57</a><em> Transfuge</em>, n&deg; 77, avril 2014, p. 81.</p> <p><a href="#liennbp58" name="nbp58">58</a><em> Le Monde</em>, avril/juin 2014, p. 46.</p> <p><a href="#liennbp59" name="nbp59">59</a><em> Marianne</em>, mars 2015, p. 30.</p> <p><a href="#liennbp60" name="nbp60">60</a> &laquo;&nbsp;Comme Walter Benjamin, ces auteurs expriment, dans leurs fictions, un d&eacute;sir qui exc&egrave;de celui de savoir comment se sont r&eacute;ellement d&eacute;roul&eacute;s les &eacute;v&eacute;nements historiques&nbsp;: ils veulent rappeler ce qui a &eacute;t&eacute; possible et ce qui a &eacute;t&eacute; manqu&eacute;. &raquo; (<em>Le Magazine Litt&eacute;raire</em>, n&deg; 519, mai 2012, p. 62)</p> <p><a href="#liennbp61" name="nbp61">61</a> &laquo;&nbsp;On peut aussi bien comprendre le polar contemporain comme une &eacute;tude de milieu selon Pierre Bourdieu, qui r&eacute;concilie dans ses travaux l&rsquo;histoire quotidienne et l&rsquo;histoire sociale &raquo;. <em>Le Magazine Litt&eacute;raire</em>, n&deg; 519, mai 2012, p. 62.</p> <p><a href="#liennbp62" name="nbp62">62</a> &laquo;&nbsp;Une logique qui est celle du paradigme indiciel analys&eacute; par Carlo Ginzburg, o&ugrave; le sens se construit &agrave; partir de d&eacute;tails apparemment insignifiants &raquo;. <em>Le Magazine Litt&eacute;raire</em>, n&deg; 519, mai 2012, p. 51.</p> <p><a href="#liennbp63" name="nbp63">63</a><em> Le Monde</em>, avril/juin 2014, p. 17.</p> <p><a href="#liennbp64" name="nbp64">64</a> Voir G&eacute;rard Genette, <em>Figures II</em>, Paris, Seuil,1969.</p> <p><a href="#liennbp65" name="nbp65">65</a> Pierre Ricoeur, <em>Temps et r&eacute;cit. Tome 1</em>, Seuil, 1983.</p> <p><a href="#liennbp66" name="nbp66">66</a>&nbsp; &laquo;&nbsp;Il est aujourd&rsquo;hui l&rsquo;un des ma&icirc;tres du roman noir am&eacute;ricain [&hellip;] l&rsquo;h&eacute;ritier de l&rsquo;immense Raymond Chandler [&hellip;] Depuis pr&egrave;s de vingt ans, Bosch [l&rsquo;enqu&ecirc;teur r&eacute;current cr&eacute;&eacute; par Connelly] accompagne Michael Connelly dans les bas-fonds de Los Angeles et lui permet de tendre &agrave; la soci&eacute;t&eacute; am&eacute;ricaine un miroir dans lequel elle se voit moins triomphante qu&rsquo;elle ne le souhaiterait [&hellip;] Il suit en entomologiste l&rsquo;&eacute;volution de la Cit&eacute; des Anges &raquo;, <em>Le Magazine Litt&eacute;raire</em>, n&deg; 519, mai 2012, p. 86.</p> <p><a href="#liennbp67" name="nbp67">67</a><em> Le Magazine Litt&eacute;raire</em>, n&deg; 519, mai 2012, p 61.</p> <p><a href="#liennbp68" name="nbp68">68</a> Comme ceux de Tony Hillerman qui se d&eacute;roulaient chez les Indiens du Nouveau-Mexique ou de Arthur Upfield chez les Aborig&egrave;nes d&rsquo;Australie, tr&egrave;s en vogue dans les ann&eacute;es quatre-vingt-dix.</p> <p><a href="#liennbp69" name="nbp69">69</a>&nbsp; &laquo; Ces romans ne reposent plus sur la qu&ecirc;te du tueur &ndash;dans la plupart des cas il est connu- mais exhument un temps rest&eacute; dans l&rsquo;ombre&nbsp;&raquo;. <em>Le Magazine Litt&eacute;raire</em>, n&deg; 519, mai 2012, p. 62.</p> <p><a href="#liennbp70" name="nbp70">70</a> Si les romans policiers &eacute;dit&eacute;s en France restent majoritairement des romans fran&ccedil;ais, am&eacute;ricains et britanniques, ces trois nationalit&eacute;s &eacute;tant celles du genre policier &ndash; rappelons en effet que l&rsquo;origine du r&eacute;cit policier est attribu&eacute;e conjointement &agrave; l&rsquo;Am&eacute;ricain Edgar Allan Poe pour la nouvelle et au Fran&ccedil;ais Emile Gaboriau pour le roman&nbsp;;&nbsp;rappelons aussi que les romans &agrave; &eacute;nigme et les romans noirs &eacute;taient respectivement surnomm&eacute;s romans policiers anglais et romans policiers am&eacute;ricains &ndash;, t&eacute;moignant ainsi de la supr&eacute;matie de ces trois origines nationales, depuis une vingtaine d&rsquo;ann&eacute;es sont aussi pr&eacute;sents de fa&ccedil;on notable dans le champ &eacute;ditorial fran&ccedil;ais des romans venus d&rsquo;autres horizons, dont les pays scandinaves. Les critiques analys&eacute;es, m&ecirc;me si elles laissent la part belle aux romans fran&ccedil;ais et anglo-saxons, s&rsquo;attachent aussi aux auteurs scandinaves et sud-am&eacute;ricains, ainsi qu&rsquo;&agrave; ceux d&rsquo;Europe du Sud et d&rsquo;Asie. L&rsquo;&eacute;largissement g&eacute;ographique des romans policiers &eacute;dit&eacute;s, autorisant de fait un discours g&eacute;opolitique sur &laquo;&nbsp;le monde&nbsp;&raquo;, participe &agrave; la l&eacute;gitimation du genre dans le discours critique.</p> <p>71 <a href="#liennbp71a" name="nbp71a">a</a> <a href="#liennbp71b" name="nbp71b">b</a> <em>Transfuge</em>, n&deg; 77, avril 2014, p. 79.</p> <p><a href="#liennbp72" name="nbp72">72</a>&nbsp; &laquo;&nbsp;Le vraisemblable est donc ici un signifi&eacute; sans signifiant, ou plut&ocirc;t il n&rsquo;a pas d&rsquo;autre signifiant que l&rsquo;&oelig;uvre elle-m&ecirc;me &raquo;. G&eacute;rard Genette, <em>op. cit.</em>, p. 76.</p> <p>73 <a href="#liennbp73a" name="nbp73a">a</a> <a href="#liennbp73b" name="nbp73b">b</a> <em>Le Magazine Litt&eacute;raire</em>, n&deg; 519, mai 2012, p. 64.</p> <p><a href="#liennbp74" name="nbp74">74</a><em> Le Magazine Litt&eacute;raire</em>, n&deg; 519, mai 2012, p. 64-65.</p> <p><a href="#liennbp75" name="nbp75">75</a> N&deg; 519, mai 2012.</p> <p><a href="#liennbp76" name="nbp76">76</a> N&deg; 406, juin 2012.</p> <p><a href="#liennbp77" name="nbp77">77</a><em> Marianne</em>, mars 2015, p. 87.</p> <p><a href="#liennbp78" name="nbp78">78</a><em> Le Magazine Litt&eacute;raire</em>, n&deg; 556, juin 2015, p. 79.</p> <p><a href="#liennbp79" name="nbp79">79</a><em> Le Magazine Litt&eacute;raire</em>, n&deg; 556, juin 2015, p. 80.</p> <p><a href="#liennbp80" name="nbp80">80</a> Voir Pierre Bourdieu, <em>Les R&egrave;gles de l&rsquo;art. Gen&egrave;se et structure du champ litt&eacute;raire</em>, Paris, Seuil, 1992.</p> <p><a href="#liennbp81" name="nbp81">81</a> Alain-Michel Boyer rappelle que jusque dans la seconde moiti&eacute; du XIX<sup>&egrave;me</sup> si&egrave;cle, &laquo;&nbsp;le roman &eacute;tait rest&eacute; en marge de la litt&eacute;rature. M&eacute;pris&eacute;, honni, il [&hellip;] &eacute;tait consid&eacute;r&eacute;, selon les &eacute;poques, comme un genre &laquo;&nbsp;bas&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;mineur&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;secondaire&nbsp;&raquo; : un divertissement vulgaire, sans qualit&eacute; artistique [&hellip;] qui s&rsquo;adressait &agrave; la partie la moins estimable du public [&hellip;] Les termes employ&eacute;s alors ne sont gu&egrave;re diff&eacute;rents de ceux dont on use aujourd&rsquo;hui &agrave; l&rsquo;&eacute;gard de la paralitt&eacute;rature &raquo;. <em>La paralitt&eacute;rature</em>, Paris, PUF, Que sais-je&nbsp;?, 1992, p. 28.</p>