<p>Si la Grande Guerre a vite trouv&eacute; dans le Thomas de Jean Cocteau sa plus c&eacute;l&egrave;bre figure d&rsquo;imposteur (<em>Thomas l&rsquo;imposteur</em>, 1923), il aura fallu plus de temps pour qu&rsquo;&eacute;merge son &eacute;quivalent dans les fictions sur la Seconde Guerre mondiale. Sans doute le personnage d&rsquo;Albert Dehousse, protagoniste du roman&nbsp;<em>Un h&eacute;ros tr&egrave;s discret</em>, de Jean-Fran&ccedil;ois Deniau (1989), et surtout de son adaptation filmique par Jacques Audiard en 1996, remplit-il cet office. Le film, qui a obtenu la palme du meilleur sc&eacute;nario au festival de Cannes et attir&eacute; plus d&rsquo;un demi-million de spectateurs en salles<a href="https://alepreuve.org/node/143#footnote1_fluyrdk" id="footnoteref1_fluyrdk" title="Bibliothèque du film, [en ligne]. http://cinema.encyclopedie.films.bifi.fr/imprime.php?pk=59926 [site consulté le 4 août 2017].">1</a>, raconte l&rsquo;histoire (fictive) d&rsquo;un faux r&eacute;sistant montant de toute pi&egrave;ce sa l&eacute;gende &agrave; la Lib&eacute;ration et acc&eacute;dant &agrave; un haut grade militaire, avant de voir sa supercherie d&eacute;couverte. Il fournit &agrave; la fois un regard historique sur la Seconde Guerre mondiale et une r&eacute;flexion plus large sur le statut de l&rsquo;imposteur. D&rsquo;une part, il reprend une figure connue&nbsp;‑&nbsp;mais qui n&rsquo;avait jamais jusqu&rsquo;alors fait l&rsquo;objet d&rsquo;un traitement aussi serr&eacute;&nbsp;‑&nbsp;des r&eacute;cits sur la guerre, figure dont il ressaisit, cinquante ans apr&egrave;s le conflit, l&rsquo;importance symbolique majeure. D&rsquo;autre part, il interroge la puissance de fascination du mensonge, et, partant, de la fiction. Traitant donc &agrave; la fois d&rsquo;une &laquo;imposture&nbsp;<em>dans</em>&nbsp;la fiction&raquo; (l&rsquo;histoire d&rsquo;Albert Dehousse) et d&rsquo;une &laquo;imposture&nbsp;<em>de</em>&nbsp;la fiction<a href="https://alepreuve.org/node/143#footnote2_kacjya8" id="footnoteref2_kacjya8" title="Nathalie Kremer, Jean-Paul Sermain et Yen-Maï Tran-Gervat [dir.], «Présentation», Imposture et fiction dans les récits d’Ancien Régime, Paris, Hermann, 2016, p.11.">2</a>&nbsp;&raquo; (le film int&egrave;gre de fausses s&eacute;quences documentaires), selon une distinction &eacute;tablie par Nathalie Kremer, Jean-Paul Sermain et Yen-Ma&iuml; Tran-Gervat,&nbsp;<em>Un h&eacute;ros tr&egrave;s discret</em>&nbsp;invite &agrave; remonter aux lendemains de la Lib&eacute;ration pour r&eacute;fl&eacute;chir au sens, aux mutations et aux permanences de la figure de l&rsquo;imposteur r&eacute;sistant.</p>