<h2><strong>La requ&ecirc;te de Bachelard</strong></h2> <p>Si l&rsquo;on &eacute;voque surtout l&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t du philosophe Gaston Bachelard pour les travaux des po&egrave;tes, on conna&icirc;t parfois moins celui qu&rsquo;il avait pour les arts plastiques. Celui-ci le mena pourtant &agrave; &eacute;crire plusieurs textes et &agrave; collaborer avec des artistes. Le graveur Albert Flocon<a href="#nbp1" id="footnoteref1_jrw63aq" name="liennbp1" title="Né à Köpenick en 1909 et décédé à Paris en 1994. Pour une étude approfondie de la relation entre Flocon et Bachelard, voir Hans-Jörg Rheinberger, Le Graveur et le philosophe, trad. A. Lochmann, Paris, Hermann, 2017, p. 88.">1</a> fut l&rsquo;un d&rsquo;eux. Nous avons choisi d&rsquo;&eacute;voquer un &eacute;pisode de cette collaboration qui eut pour objet la commande d&rsquo;une maison imaginaire. Il nous permet de croiser les regards du graveur et du philosophe sur la question de l&rsquo;habiter et de porter un &eacute;clairage int&eacute;ressant sur cette notion en l&rsquo;abordant &agrave; travers le prisme de la r&ecirc;verie de maison.</p> <p>Flocon &eacute;voque dans ses m&eacute;moires sa rencontre avec Bachelard. Il le d&eacute;couvre en lisant <em>La Terre et les r&ecirc;veries de la volont&eacute;</em> (1948) dont il d&eacute;sire ins&eacute;rer quelques extraits dans la pr&eacute;face du catalogue de l&rsquo;une des expositions collectives du groupe <em>Graphies</em> qu&rsquo;il a cr&eacute;&eacute; &agrave; Paris et qui rassemble une douzaine de graveurs. Flocon prend contact avec l&rsquo;&eacute;diteur de Bachelard pour lui demander l&rsquo;autorisation de reproduire ses textes. Il lui donne son accord mais propose au graveur de rencontrer le philosophe pour avoir son avis. Lors de leur entrevue, Bachelard r&eacute;pond &agrave; Flocon &laquo;&nbsp;qu&rsquo;on n&rsquo;imprime jamais deux fois les m&ecirc;mes choses<a href="#nbp2" id="footnoteref2_zg76ui0" name="liennbp2" title="Albert Flocon, « Paysages. Le traité du burin », Points de fuite, 1933-1994, Tome II, Neuchâtel, Ides et Calendes, coll. « La bibliothèque des arts », 1995, p. 144.">2</a> &raquo; et &eacute;crit un petit texte d&rsquo;introduction pour son catalogue dont il trouve &eacute;galement le titre&nbsp;: <em>&Agrave; la gloire de la main</em>. Nous sommes en 1949. Le catalogue est &eacute;dit&eacute; et &agrave; partir de ce moment, leur collaboration va se poursuivre et s&rsquo;intensifier. Deux ouvrages conjoints voient le jour. L&rsquo;intervention de Bachelard ne se limite plus &agrave; une introduction et consiste &agrave; pr&eacute;sent &agrave; commenter les gravures de Flocon<a href="#nbp3" id="footnoteref3_86amh8o" name="liennbp3" title="L’ensemble de ces commentaires ainsi que le texte introductif de À la gloire de la main et du Traité du burin sont repris dans Gaston Bachelard, Le Droit de rêver, Paris, PUF, coll. « Quadrige », 1970, p. 252.">3</a>. Le graveur et le philosophe, devenus peu &agrave; peu amis, avaient un mode singulier de collaboration. Flocon rel&egrave;ve dans ses m&eacute;moires&nbsp;: &laquo;&nbsp;Je portais &agrave; Bachelard un ou deux cuivres par quinzaine, je le voyais donc souvent et notre amiti&eacute; s&rsquo;est d&eacute;velopp&eacute;e &agrave; partir de ce travail en commun o&ugrave; les images sont ant&eacute;rieures au texte qui les illustre<a href="#nbp4" id="footnoteref4_fcw3uwc" name="liennbp4" title="Albert Flocon, « Paysages. Le traité du burin », op. cit., p. 182.">4</a>.&nbsp;&raquo; Bachelard s&rsquo;exprime &eacute;galement &agrave; ce sujet&nbsp;: &laquo;&nbsp;Jamais Flocon ne m&rsquo;a expliqu&eacute; ce qu&rsquo;il voulait faire. De lui &agrave; moi, pas de discours. Il n&rsquo;est pas de ces po&egrave;tes qui vous d&eacute;clament leurs vers<a href="#nbp5" id="footnoteref5_3fl19cf" name="liennbp5" title="Gaston Bachelard, « Châteaux en Espagne », Le Droit de rêver, op. cit., p. 99.">5</a>.&nbsp;&raquo; Deux ouvrages naissent de ce <em>modus operandi&nbsp;</em>: <em>Paysages</em> (1950), et <em>Ch&acirc;teaux en Espagne </em>(1956)<a href="#nbp6" id="footnoteref6_7megfs4" name="liennbp6" title="Entre les deux paraît également Le Traité du burin (1952) dont Bachelard rédige la préface.">6</a>. C&rsquo;est ce dernier recueil qui nous int&eacute;resse ici. Il contient une s&eacute;rie de gravures qui &eacute;voquent des r&ecirc;ves de construction de &laquo;&nbsp;ch&acirc;teaux du songe<a href="#nbp7" id="footnoteref7_8tw0ql9" name="liennbp7" title="Gaston Bachelard, « Châteaux en Espagne », Le Droit de rêver, op. cit., p. 136.">7</a> &raquo;. C&rsquo;est &agrave; l&rsquo;occasion de ce travail que va s&rsquo;op&eacute;rer le seul et unique renversement du mode de collaboration de Bachelard et Flocon. Nous sommes en 1953 &agrave; mi-parcours entre les publications de <em>La Terre et les r&ecirc;veries de la volont&eacute; </em>et de <em>La Po&eacute;tique de l&rsquo;espace</em>. Flocon rel&egrave;ve dans ses m&eacute;moires&nbsp;:</p> <p><q>&nbsp;Bachelard m&rsquo;a fait remarquer qu&rsquo;il ne m&rsquo;avait jamais rien demand&eacute;, qu&rsquo;il avait toujours suivi les id&eacute;es que je lui avais apport&eacute;es, mais qu&rsquo;il voulait maintenant me faire une commande&nbsp;: un ermitage de philosophe dans la nature. J&rsquo;ai essay&eacute;, mais il a trouv&eacute; que je lui avais fait un bureau d&rsquo;architecte&nbsp;; j&rsquo;ai fait un autre ermitage, mais cette fois, c&rsquo;&eacute;tait un atelier de g&eacute;om&egrave;tre&nbsp;; sur quoi Bachelard m&rsquo;a dit que d&eacute;cid&eacute;ment, je n&rsquo;&eacute;tais pas le graveur des chaumi&egrave;res<a href="#nbp8" id="footnoteref8_od2jxb6" name="liennbp8" title="Albert Flocon, « Avec Bachelard », Points de fuite, 1933-1994, Tome II, op. cit., p. 198-199.">8</a>. </q></p> <p>La demande de Bachelard et le d&eacute;sarroi que g&eacute;n&egrave;rent les r&eacute;alisations de Flocon constituent l&rsquo;horizon de cet article qui rev&ecirc;t la forme d&rsquo;une enqu&ecirc;te autour de la d&eacute;ception du philosophe. Pour pouvoir la r&eacute;soudre, il nous faut tout d&rsquo;abord d&eacute;velopper dans une premi&egrave;re &eacute;tape plusieurs outils conceptuels dont celui de &laquo;&nbsp;maison onirique&nbsp;&raquo;. Cette notion nous permet d&rsquo;inscrire la question de l&rsquo;habiter au c&oelig;ur de notre d&eacute;veloppement. En effet, si Bachelard annonce &eacute;tudier dans ses derniers travaux sur le langage po&eacute;tique une &laquo;&nbsp;ph&eacute;nom&eacute;nologie du verbe habiter<a href="#nbp9" id="footnoteref9_id6dj0t" name="liennbp9" title="Gaston Bachelard, La Poétique de l’espace, Paris, PUF, coll. « Quadrige », 1957, p. 19.">9</a> &raquo;, il nous permet de saisir par la m&ecirc;me occasion comment et pourquoi nous pouvons &laquo;&nbsp;habiter oniriquement&nbsp;&raquo;, c&rsquo;est-&agrave;-dire dans la r&ecirc;verie, les maisons de notre pass&eacute; ainsi que des demeures imaginaires.</p> <h2><strong>Premi&egrave;re partie&nbsp;: pr&eacute;parer l&rsquo;enqu&ecirc;te </strong></h2> <h3><strong><em>Pr&eacute;ambule&nbsp;: imagination et r&ecirc;verie</em></strong></h3> <p>Nous pouvons diviser l&rsquo;&oelig;uvre de Bachelard en deux pans&nbsp;: son &oelig;uvre diurne et son &oelig;uvre nocturne. Le premier pan correspond &agrave; ses travaux &eacute;pist&eacute;mologiques&nbsp;; le deuxi&egrave;me &agrave; ses travaux sur l&rsquo;imagination po&eacute;tique<a href="#nbp10" id="footnoteref10_yjdo3mh" name="liennbp10" title="Cette appellation œuvre diurne/œuvre nocturne est fréquemment utilisée par les spécialistes de Bachelard. Elle dérive des propos du philosophe qui s’exprime sur son travail et sur la double nature de sa conscience : « Trop tard, j’ai connu la bonne conscience dans le travail alterné des images et des concepts, deux bonnes consciences qui seraient celle du plein jour, et celle qui accepte le côté nocturne de l’âme » in Gaston Bachelard, La Poétique de la rêverie, Paris, PUF, coll. « Quadrige », 1960, p. 47. Il est intéressant d’observer que si certains spécialistes se concentrent sur l’un des deux pans de l’œuvre de Bachelard, d’autres cherchent à lier les deux en s’interrogeant par exemple sur l’imaginaire du scientifique ou sur la dimension épistémologique de l’imaginaire.">10</a>. Ce sont ceux qui nous int&eacute;ressent ici. Cette &oelig;uvre nocturne se divise elle-m&ecirc;me en deux cycles&nbsp;: le <em>Cycle des &eacute;l&eacute;ments </em>(1938-1948) et les <em>Po&eacute;tiques </em>(1957-1960)<a href="#nbp11" id="footnoteref11_p9xhe62" name="liennbp11" title="L’ouvrage Lautréamont (1939) occupe une place singulière dans son œuvre nocturne. Nous ne l’abordons pas ici.">11</a>. Les images auxquelles Bachelard s&rsquo;int&eacute;resse sont des images litt&eacute;raires cr&eacute;&eacute;es par les po&egrave;tes. Il se compare &agrave; &laquo;&nbsp;un botaniste en promenade&nbsp;&raquo; qui amasse au hasard de ses lectures des &laquo;&nbsp;fleurs po&eacute;tiques<a href="#nbp12" id="footnoteref12_9pm3tc6" name="liennbp12" title="Gaston Bachelard, Fragments d’une Poétique du Feu, Paris, PUF, 1988, p. 28.">12</a> &raquo;. Avec la m&eacute;thode et la pr&eacute;cision du scientifique, il d&eacute;cortique ensuite au microscope chaque pi&egrave;ce de sa collecte pour constituer un &laquo;&nbsp;herbier des images comment&eacute;es<a href="#nbp13" id="footnoteref13_qwnhx8h" name="liennbp13" title="Idem, p. 29.">13</a> &raquo;. L&rsquo;image de la maison en constitue un chapitre cons&eacute;quent. Si nous ne pouvons pas &eacute;tudier ici en d&eacute;tails l&rsquo;approche bachelardienne de l&rsquo;imagination et les &eacute;volutions qu&rsquo;elle va conna&icirc;tre, il nous faut mentionner que Bachelard n&rsquo;a cess&eacute; de d&eacute;fendre la force cr&eacute;atrice de l&rsquo;imagination, se positionnant contre une conception qui ne ferait de celle-ci qu&rsquo;une fonction reproductrice d&eacute;pendante de la perception et de la m&eacute;moire<a href="#nbp14" id="footnoteref14_lgrpjds" name="liennbp14" title="Bachelard identifie dans La Terre et les rêveries de la volonté ses « adversaires » : ce sont le philosophe réaliste et le commun des psychologues. Cependant, il n’identifie pas clairement qui est le philosophe réaliste qu’il avait déjà été amené à rencontrer dans le cadre de sa philosophie des sciences. Il pourrait à la fois faire référence à une certaine tradition philosophique qui donne à l’image un statut mimétique mais peut-être également à certains égards à des courants plus contemporains comme la phénoménologie française pour laquelle la visée perceptive de la conscience reste première. Voir notamment à ce sujet Jean-Jacques Wunenberger, « La phénoménologie bachelardienne de l’imagination, écarts et variations », Cahiers Gaston Bachelard, Bachelard et la phénoménologie, n° 8 (2006), p. 68-78.">14</a>. En sus du caract&egrave;re nouveau de l&rsquo;image produite par l&rsquo;imagination, il lui attribue &eacute;galement une puissance d&rsquo;action&nbsp;: une image peut agir sur nous. Ce pouvoir est d&eacute;velopp&eacute; dans les <em>Po&eacute;tiques</em> dans lesquelles Bachelard veut examiner comment une image po&eacute;tique peut prendre racine en quelqu&rsquo;un et devenir sienne comme si le lecteur de po&eacute;sie &eacute;tait lui-m&ecirc;me po&egrave;te et avait produit cette image<a href="#nbp15" id="footnoteref15_o6tg7rp" name="liennbp15" title="C’est la notion de « retentissement » que Bachelard développe à partir de sa lecture d’Eugène Minkowski.">15</a>. Pour bien saisir les modalit&eacute;s d&rsquo;action des images, il faut &eacute;galement &eacute;voquer la r&ecirc;verie. Pour Bachelard, c&rsquo;est toujours dans la r&ecirc;verie que l&rsquo;homme imagine des images nouvelles. Au d&eacute;but des ann&eacute;es 1950, la r&ecirc;verie devient un v&eacute;ritable objet d&rsquo;&eacute;tude. Il s&rsquo;inscrit dans une anthropologie d&eacute;sign&eacute;e comme le th&egrave;me de &laquo;&nbsp;l&rsquo;homme des vingt-quatre heures<a href="#nbp16" id="footnoteref16_n3fx7fc" name="liennbp16" title="Gaston Bachelard, L’Engagement rationaliste, Paris, PUF, coll. « Bibliothèque de philosophie contemporaine », 1972, p. 47. « Si j'avais à faire le plan général des réflexions d'un philosophe à l'automne de sa vie, je dirais que j'ai maintenant la nostalgie d'une certaine anthropologie. Et s'il fallait être complet, il me semble que j'aimerais à discuter d'un thème qui n'est pas celui d'aujourd'hui, thème que j'appellerai “l'homme des vingt-quatre heures”. Il me semble, par conséquent, que si l'on voulait donner à l'ensemble de l'anthropologie ses bases philosophiques ou métaphysiques, il faudrait et il suffirait de décrire un homme dans vingt-quatre heures de sa vie ».">16</a> &raquo;&nbsp;:</p> <p><q>Pris dans son int&eacute;gralit&eacute;, l&rsquo;homme est un &ecirc;tre qui non seulement pense mais d&rsquo;abord imagine. Pour une d&eacute;termination compl&egrave;te de l&rsquo;&ecirc;tre humain, il faut faire l&rsquo;addition d&rsquo;un &ecirc;tre nocturne et d&rsquo;un &ecirc;tre diurne. Il faut essayer de trouver les dynamismes qui vont d&rsquo;un p&ocirc;le &agrave; l&rsquo;autre entre songe et pens&eacute;e<a href="#nbp17" id="footnoteref17_zdt93u9" name="liennbp17" title="Gaston Bachelard, « Nous sommes des dormeurs éveillés, des rêveurs lucides », émission radio diffusée le 19 janvier 1954 sur Paris Inter.">17</a>.</q></p> <p>L&rsquo;anthropologie bachelardienne se caract&eacute;rise par une approche cadenc&eacute;e de l&rsquo;existence. Bachelard appelle &agrave; une vie rythmique bienfaitrice et place progressivement ses travaux sur la r&ecirc;verie po&eacute;tique sur l&rsquo;axe d&rsquo;une recherche, celle d&rsquo;un &ecirc;tre nouveau&nbsp;: &laquo;&nbsp;l&rsquo;homme heureux<a href="#nbp18" id="footnoteref18_af3m98e" name="liennbp18" title="Gaston Bachelard, La Poétique de l’espace, op. cit., p. 12.">18</a> &raquo;. Celui-ci doit alterner action et repos, pens&eacute;e et r&ecirc;verie, &ecirc;tre &agrave; la fois &ecirc;tre pensant et &ecirc;tre r&ecirc;veur. Bachelard veut par ailleurs montrer &laquo; comment une r&ecirc;verie de po&egrave;te peut mettre de l&rsquo;ordre en nous<a href="#nbp19" id="footnoteref19_p1p2amf" name="liennbp19" title="Gaston Bachelard, Fragments d’une Poétique du Feu, op. cit., p. 35.">19</a> &raquo; et &ecirc;tre source d&rsquo;un bienfait psychique.</p> <p>Avant de consacrer un &eacute;crit exclusivement &agrave; la r&ecirc;verie, Bachelard publie le premier ouvrage de ses <em>Po&eacute;tiques</em>&nbsp;: <em>La Po&eacute;tique de l&rsquo;espace</em><a href="#nbp20" id="footnoteref20_chqu480" name="liennbp20" title="La Poétique de l’espace est publiée en 1957 ; La Poétique de la rêverie en 1960.">20</a>. Il semble que celui-ci cherche d&rsquo;abord &agrave; ancrer le r&ecirc;veur au sein d&rsquo;un espace dans lequel il pourra abriter sa r&ecirc;verie. Les espaces dont il va &ecirc;tre question sont des espaces v&eacute;cus qui sont saisis par l&rsquo;imagination et non des espaces g&eacute;om&eacute;triques dessin&eacute;s ou construits scientifiquement pour une exp&eacute;rience. Le philosophe annonce vouloir examiner uniquement les images des espaces heureux et d&eacute;terminer la &laquo;&nbsp;valeur humaine&nbsp;&raquo; que nous leur donnons<a href="#nbp21" id="footnoteref21_6nhg7jx" name="liennbp21" title="Gaston Bachelard, La Poétique de l’espace, op. cit.,p. 17.">21</a>. La valeur principale dont il est question ici est une valeur de protection. Bachelard &eacute;tudie l&rsquo;espace de la maison et d&eacute;veloppe avec l&rsquo;aide des po&egrave;tes la notion de maison onirique. Nous allons voir qu&rsquo;il trouve ainsi une demeure pour son r&ecirc;veur et inscrit &agrave; la m&ecirc;me occasion une &laquo;&nbsp;g&eacute;om&eacute;trie r&ecirc;veuse<a href="#nbp22" id="footnoteref22_u2l3y3f" name="liennbp22" title="Idem, p. 59.">22</a> &raquo; au c&oelig;ur de l&rsquo;homme&nbsp;: les dimensions de cette maison sont celles de son int&eacute;riorit&eacute;.</p> <h3><strong><em>Habiter la maison onirique</em></strong></h3> <p>C&rsquo;est dans <em>La Terre et les r&ecirc;veries du repos</em> du <em>Cycle des &eacute;l&eacute;ments</em> que l&rsquo;on rel&egrave;ve la premi&egrave;re occurrence de la notion de maison onirique &agrave; laquelle Bachelard consacre une section. Il retravaillera ensuite ce concept pour lui d&eacute;dier le chapitre d&rsquo;ouverture de <em>La Po&eacute;tique de l&rsquo;espace</em>. D&rsquo;une part, Bachelard observe que lorsque nous tentons de nous souvenir de notre maison natale ou d&rsquo;une maison de notre pass&eacute;, il est quasi impossible de nous limiter &agrave; des souvenirs factuels car nous sommes rapidement pris par le songe. D&rsquo;autre part, il remarque que lorsque nous r&ecirc;vons &agrave; une maison nouvelle, &laquo;&nbsp;tout un pass&eacute; vient [y]&nbsp;vivre<a href="#nbp23" id="footnoteref23_jzdnqwm" name="liennbp23" title="Idem, p. 25.">23</a> &raquo;, un peu comme si nous importions dans cette maison imagin&eacute;e nos souvenirs li&eacute;s aux maisons que nous avons habit&eacute;es. Bachelard d&eacute;crit cette contamination du r&ecirc;ve et du souvenir comme un ph&eacute;nom&egrave;ne d&rsquo;endosmose<a href="#nbp24" id="footnoteref24_zp3zct5" name="liennbp24" title="Gaston Bachelard, La Terre et les rêveries du repos, Paris, Corti, coll. « Les Massicotès », 1971, p. 111-112.">24</a>. Il ne peut pas y avoir un travail exclusif ni de l&rsquo;imagination ni de la m&eacute;moire. Lorsque souvenirs et images imagin&eacute;es de maisons se m&ecirc;lent dans la r&ecirc;verie, nous acc&eacute;dons selon Bachelard &agrave; une zone seuil de notre int&eacute;riorit&eacute; dans laquelle nous nous d&eacute;tachons d&rsquo;un pass&eacute; factuel, fig&eacute;, et acc&eacute;dons &agrave; &laquo;&nbsp;une communaut&eacute; du souvenir et de l&rsquo;image<a href="#nbp25" id="footnoteref25_993bjfe" name="liennbp25" title="Gaston Bachelard, La Poétique de l’espace, op. cit., p. 25.">25</a> &raquo;. Celle-ci r&eacute;sulte d&rsquo;une pratique de la r&ecirc;verie. S&rsquo;adonner tout au long de notre existence &agrave; la r&ecirc;verie dans des espaces de solitude font que les souvenirs des diff&eacute;rentes demeures de notre vie dans lesquelles nous avons v&eacute;cu et r&ecirc;v&eacute; vont se comp&eacute;n&eacute;trer et former progressivement &laquo;&nbsp;quelque chose de ferm&eacute;<a href="#nbp26a" id="footnoteref26_zmdl3e9" name="liennbp26a" title="Ibidem.">26</a> &raquo;. Ce r&eacute;ceptacle correspond selon Bachelard &agrave; notre maison onirique. Nous y d&eacute;posons outre nos souvenirs, toutes les images de nos r&ecirc;veries men&eacute;es dans des abris de toutes sortes et en premier lieu celles de nos r&ecirc;veries enfantines dans notre maison natale. C&rsquo;est sur cette base que le philosophe reconna&icirc;t &laquo;&nbsp;la permanence dans l&rsquo;&acirc;me humaine d&rsquo;un noyau d&rsquo;enfance, une enfance immobile mais toujours vivante<a href="#nbp27" id="footnoteref27_4uqcry4" name="liennbp27" title="Gaston Bachelard, La Poétique de la rêverie, op. cit., p. 85.">27</a> &raquo;. Il nous reste accessible gr&acirc;ce &agrave; l&rsquo;imagination qui se souvient lorsque nous rejoignons dans la r&ecirc;verie notre maison onirique. S&rsquo;&eacute;tablit alors une communication entre notre solitude de r&ecirc;veur et les solitudes de l&rsquo;enfance<a href="#nbp26b" id="footnoteref26_xp9rzcn" name="liennbp26b" title="Ibidem.">26</a>. Bachelard associe &eacute;galement &agrave; notre maison onirique une action bienfaitrice. En effet, nous attribuons aux images conserv&eacute;es dans celle-ci une valeur de protection parce que nous avons r&ecirc;v&eacute; prot&eacute;g&eacute;s dans ces espaces. Nous pourrons r&eacute;imaginer ces images tout au long de notre vie pour revivre des instants heureux que nous conservons en nous et qui deviennent v&eacute;ritablement constitutifs de notre &ecirc;tre. Les images de nos r&ecirc;veries deviennent des &laquo;&nbsp;fossiles de dur&eacute;e<a href="#nbp28" id="footnoteref28_3y1zk5n" name="liennbp28" title="Gaston Bachelard, La Poétique de l’espace, op. cit., p. 28.">28</a> &raquo;. Pour Bachelard, &laquo;&nbsp;l&rsquo;espace tient du temps comprim&eacute;. L&rsquo;espace sert &agrave; &ccedil;a<a href="#nbp29" id="footnoteref29_unl4ywf" name="liennbp29" title="Idem, p. 27.">29</a> &raquo;. La maison natale est primordiale dans ce processus de s&eacute;dimentation. Nous avons r&ecirc;v&eacute; enfant dans chacun de ses r&eacute;duits. Les images de ces r&ecirc;veries sont les plus profondes, les plus fossilis&eacute;es. De plus, la maison natale a un enjeu &eacute;ducatif majeur car c&rsquo;est dans celle-ci que nous prenons &laquo;&nbsp;des habitudes de r&ecirc;verie<a href="#nbp30" id="footnoteref30_f1fmspx" name="liennbp30" title="Idem, p. 33.">30</a> &raquo;.</p> <p>Nous pouvons &agrave; pr&eacute;sent saisir ce qu&rsquo;entend Bachelard lorsqu&rsquo;il s&rsquo;exprime au sujet du bienfait le plus pr&eacute;cieux de la maison&nbsp;: &laquo;&nbsp;la maison abrite la r&ecirc;verie, la maison prot&egrave;ge le r&ecirc;veur, la maison nous permet de r&ecirc;ver en paix<a href="#nbp31" id="footnoteref31_t5ek52h" name="liennbp31" title="Idem, p. 25-26.">31</a>.&nbsp;&raquo; Ces mots renvoient &agrave; la fois aux maisons r&eacute;elles dans lesquelles nous avons r&ecirc;v&eacute; mais &eacute;galement &agrave; la maison onirique que nous avons construite dans notre int&eacute;riorit&eacute;. Elle devient &laquo;&nbsp;la demeure de notre r&ecirc;verie<a href="#nbp32" id="footnoteref32_yjalg2u" name="liennbp32" title="Gaston Bachelard, La Poétique de la rêverie, op. cit., p. 104.">32</a> &raquo; et gr&acirc;ce &agrave; elle, &laquo;&nbsp;les demeures du pass&eacute; sont en nous imp&eacute;rissables<a href="#nbp33" id="footnoteref33_z87bun3" name="liennbp33" title="Gaston Bachelard, La Poétique de l’espace, op. cit., p. 26.">33</a> &raquo;. En effet, nous pourrons toujours les &laquo;&nbsp;habiter oniriquement<a href="#nbp34" id="footnoteref34_qou6cd5" name="liennbp34" title="Idem, p. 34.">34</a> &raquo; pour y trouver du r&eacute;confort&nbsp;: &laquo;&nbsp;habiter oniriquement la maison natale, c&rsquo;est plus que l&rsquo;habiter par le souvenir, c&rsquo;est vivre dans la maison disparue comme nous y avons r&ecirc;v&eacute;<a href="#nbp26c" id="footnoteref26_ljhdta1" name="liennbp26c" title="Ibidem.">26</a>.&nbsp;&raquo;</p> <h3><strong><em>&Eacute;tudier la topologie onirique de la maison </em></strong></h3> <p>Apr&egrave;s avoir &eacute;tudi&eacute; comment se construisaient les fondations de la maison onirique, Bachelard entreprend d&rsquo;&eacute;tudier son architecture. Il souligne ici l&rsquo;impact que peut avoir l&rsquo;&eacute;tude des images po&eacute;tiques de maison dans le chef des sciences humaines. Le philosophe voit dans la maison &laquo;&nbsp;un v&eacute;ritable principe d&rsquo;int&eacute;gration psychologique<a href="#nbp35" id="footnoteref35_my4w0m2" name="liennbp35" title="Idem, p. 18.">35</a> &raquo; d&eacute;riv&eacute; d&rsquo;un axiome fondamental&nbsp;: la particularit&eacute; des images de maison est qu&rsquo;elles marchent dans les deux sens, &laquo;&nbsp;elles sont en nous autant que nous sommes en elles<a href="#nbp36" id="footnoteref36_pzz5q6y" name="liennbp36" title="Idem, p. 19.">36</a>.&nbsp;&raquo; Il consid&egrave;re l&rsquo;image de la maison comme une &laquo;&nbsp;image-outil&nbsp;&raquo; qui pourrait &ecirc;tre mobilis&eacute;e par une s&eacute;rie de disciplines. &laquo;&nbsp;L&rsquo;image de la maison [devient] la topographie de notre &ecirc;tre intime<a href="#nbp37" id="footnoteref37_jflzryg" name="liennbp37" title="Idem, p. 18.">37</a>.&nbsp;&raquo; &Agrave; partir de l&rsquo;ensemble des images po&eacute;tiques de maisons qu&rsquo;il a collect&eacute;es, Bachelard r&eacute;alise &laquo;&nbsp;la topologie onirique&nbsp;&raquo; de la maison<a href="#nbp38" id="footnoteref38_8ibgtke" name="liennbp38" title="Gaston Bachelard, La Terre et les rêveries du repos, op. cit., p. 126.">38</a>. En les multipliant, il veut rendre compte d&rsquo;un ensemble de nuances psychologiques vis-&agrave;-vis des images de la maison tout en trouvant des lois qui permettent de distinguer et de classer les valeurs d&rsquo;intimit&eacute; que nous leur attribuons<a href="#nbp39" id="footnoteref39_6kd7e89" name="liennbp39" title="Nous avons évoqué une « valeur fondamentale » qui relie les images de maison, celle de la protection, mais il existe également d’autres valeurs d’intimité que nous leur attribuons.">39</a>. Montrer comment nous imaginons et valorisons ces images selon un sch&eacute;ma r&eacute;current &eacute;quivaut pour Bachelard &agrave; montrer comment nous nous donnons en r&ecirc;vant &laquo;&nbsp;des raisons ou des illusions de stabilit&eacute;<a href="#nbp40" id="footnoteref40_0n9pna3" name="liennbp40" title="Gaston Bachelard, La Poétique de l’espace, op. cit., p. 34.">40</a> &raquo; dans une r&eacute;alit&eacute; en devenir. Il ne s&rsquo;agit pas d&rsquo;arr&ecirc;ter la maison onirique en un mod&egrave;le fig&eacute; comme si nous avions une maison type dessin&eacute;e dans notre inconscient. Nous avons vu que la maison onirique &eacute;tait un corps d&rsquo;images dynamique qui continue d&rsquo;&ecirc;tre aliment&eacute; par nos r&ecirc;veries. Il s&rsquo;agit plut&ocirc;t de comprendre comment notre maison onirique nous donne des &laquo;&nbsp;conseils de continuit&eacute;<a href="#nbp41" id="footnoteref41_amqk2s2" name="liennbp41" title="Idem, p. 26.">41</a> &raquo;. La maison onirique agit ici comme une force de coh&eacute;rence sur notre conscience dispers&eacute;e<a href="#nbp42" id="footnoteref42_2fxxubd" name="liennbp42" title="Nous pourrions nous demander pourquoi la conscience peut ou doit bénéficier de l’action de forces de cohérence. Nous pouvons trouver des éléments de réponse dans les débats que Bachelard entretient avec Bergson au sujet de leurs conceptions respectives du temps. Bachelard refuse une conception continue du temps basée sur la durée (la position de Bergson) qui ne serait qu’une construction, et voit dans l’instant le caractère vraiment spécifique du temps. Nous ne pouvons pas selon Bachelard avoir une expérience de la durée mais seulement d’instants successifs. Par conséquent, il présente l’esprit dans L’Intuition de l’instant (1932) comme « une file d’instants nettement séparés ». Bachelard évoquera ultérieurement une « conscience kaléidoscopique » qu’il oppose à la conscience continue de Bergson. Selon sa conception, la conscience doit sans cesse conquérir son unité. La rêverie poétique peut l’y aider. C’est notamment ce que la série des Poétiques va essayer de montrer.">42</a>. Bachelard identifie ainsi &laquo;&nbsp;deux th&egrave;mes principaux de liaison&nbsp;&raquo; des images&nbsp;: celui de la verticalit&eacute; et celui de la centralit&eacute;<a href="#nbp43" id="footnoteref43_c3qoift" name="liennbp43" title="Idem, p. 34.">43</a>. Premi&egrave;rement, &laquo;&nbsp;la maison est imagin&eacute;e comme un &ecirc;tre vertical. Elle s&rsquo;&eacute;l&egrave;ve. Elle se diff&eacute;rencie dans le sens de sa verticalit&eacute;<a href="#nbp44" id="footnoteref44_195s3sh" name="liennbp44" title="Idem, p. 35.">44</a>.&nbsp;&raquo; Deuxi&egrave;mement, &laquo;&nbsp;la maison est imagin&eacute;e comme un &ecirc;tre concentr&eacute;. Elle nous appelle &agrave; une conscience de centralit&eacute;<a href="#nbp26d" id="footnoteref26_8zb5pr7" name="liennbp26d" title="Ibidem.">26</a>.&nbsp;&raquo;</p> <p>La maison onirique s&rsquo;organise en hauteur. Sa verticalit&eacute; est assur&eacute;e par la polarit&eacute; de la cave et du grenier qui ne peuvent &ecirc;tre s&eacute;par&eacute;s que par au plus un &eacute;tage au risque de brouiller les r&ecirc;veries si la maison en comptait plus<a href="#nbp45" id="footnoteref45_cj4ziqk" name="liennbp45" title="Idem, p. 41.">45</a>. Si nous utilisons l&rsquo;image de la maison pour illustrer la psychologie humaine, les fonctions de la cave et du grenier sont diff&eacute;rentes. Le grenier correspond aux fonctions conscientes (le pendant rationnel) et la cave &agrave; l&rsquo;inconscient (le pendant irrationnel). Bachelard attribue cette bipartition &agrave; la r&ecirc;verie. Nous r&ecirc;vons rationnellement lorsque nous sommes au grenier tandis que lorsque nous nous rendons &agrave; la cave, nous participons aux puissances souterraines, nous nous accordons &agrave; l&rsquo;irrationalit&eacute; des profondeurs<a href="#nbp46" id="footnoteref46_30r8cx2" name="liennbp46" title="Idem, p. 35.">46</a>. Nous avons ici deux p&ocirc;les invers&eacute;s qui vont nous faire valoriser diff&eacute;remment les images de nos r&ecirc;veries. En r&ecirc;vant dans le grenier, nous voyons les formes nettes de la charpente qui nous &eacute;voquent directement un sentiment de protection contre les intemp&eacute;ries. Par contre, la cave est &laquo;&nbsp;l&rsquo;<em>&ecirc;tre obscur </em>de la maison<a href="#nbp47a" id="footnoteref47_5m50y1f" name="liennbp47a" title="Ibidem.">47</a> &raquo;. Nous sommes renvoy&eacute;s &agrave; une profondeur sans limites puisque cette pi&egrave;ce dans la p&eacute;nombre n&rsquo;est pas d&eacute;limit&eacute;e par des formes nettement identifiables. De plus, pour qu&rsquo;une maison soit &laquo;&nbsp;oniriquement compl&egrave;te<a href="#nbp48" id="footnoteref48_zr0fhxm" name="liennbp48" title="Idem, p. 41.">48</a> &raquo;, celle-ci doit bien &ecirc;tre enracin&eacute;e dans la terre, elle doit avoir une &laquo;&nbsp;racine cosmique<a href="#nbp49" id="footnoteref49_pnq5klp" name="liennbp49" title="Idem, p. 39.">49</a> &raquo;. Nous touchons ici &agrave; la cosmicit&eacute; de la maison bachelardienne. Elle est directement en contact avec l&rsquo;&eacute;l&eacute;ment terre ce qui nous permet de nous y enraciner et de nous stabiliser. Les images de maison rendent compte du &laquo;&nbsp;comment nous nous enracinons jour par jour dans un &ldquo;coin du monde&rdquo;<a href="#nbp50" id="footnoteref50_lbg9jkg" name="liennbp50" title="Idem, p. 24. Nous précisons ici que Bachelard s’oppose explicitement aux métaphysiques de l’être « jeté au monde ». Pour celui-ci, la maison « est le premier monde de l’être humain. […] La vie commence bien, elle commence enfermée, protégée, toute tiède dans le giron de la maison. » Nous pourrions cependant nous interroger sur le fait que l’enfance soit uniquement associée chez Bachelard à des souvenirs de protection comme si l’enfance était exclusivement heureuse. Bachelard ne rejette pas les peurs d’enfant liées à l’expérience de la maison. Elles sont même évoquées dans certaines des images littéraires qu’il étudie. Par exemple, les rêveries dans la cave peuvent susciter l’inquiétude et l’angoisse. Simplement, Bachelard a fixé un cadre d’étude – « les images de l’espace heureux » – qu’il entend respecter en laissant « à la psychanalyse le soin de guérir les enfances malmenées. » Voir Idem, p. 26 ; 17 ; 85.">50</a> &raquo;. Enfin, Bachelard insiste sur l&rsquo;importance de la pr&eacute;sence de l&rsquo;escalier pour marquer la verticalit&eacute; de la maison. Il marque architecturalement la &laquo;&nbsp;vie dynamique r&eacute;ciproque du grenier et de la cave, qui fixe l&rsquo;axe de la maison onirique<a href="#nbp51" id="footnoteref51_krwixyj" name="liennbp51" title="Gaston Bachelard, La Terre et les rêveries du repos, op. cit., p. 121.">51</a> &raquo;. Cette dynamique est caract&eacute;ris&eacute;e par le sens de parcours des escaliers. Descendre invite l&rsquo;inconscient &agrave; des r&ecirc;ves de profondeur, monter est un appel vers la tranquille solitude du grenier.</p> <p>Le principe de centralit&eacute; repose sur la notion de centre de solitude qui r&eacute;pond &agrave; un besoin&nbsp;: &laquo;&nbsp;tout r&ecirc;veur a besoin de retourner &agrave; sa cellule, il est appel&eacute; par une vie vraiment cellulaire<a href="#nbp52" id="footnoteref52_25uldd2" name="liennbp52" title="Idem, p. 118.">52</a>.&nbsp;&raquo; Les valeurs que nous attribuons &agrave; des petits espaces de la maison au sein desquels nous abritons nos r&ecirc;veries sont des valeurs de bien-&ecirc;tre et de protection car nous pouvons y r&ecirc;ver en paix. Ils nous donnent une impression de stabilit&eacute;. Bachelard observe que d&egrave;s l&rsquo;enfance, le fait que nous nous construisons des abris imaginaires au sein m&ecirc;me de la maison r&eacute;pond &agrave; ce principe. Tout comme l&rsquo;escalier est l&rsquo;&eacute;l&eacute;ment architectural qui marque l&rsquo;axe vertical de la maison onirique, la fen&ecirc;tre est celui qui marque dans les images litt&eacute;raires le caract&egrave;re central de la maison. Les images qui &eacute;voquent un contemplateur cach&eacute; dans une chambre sont un exemple de ce que Bachelard d&eacute;signe comme des &laquo;&nbsp;r&ecirc;veries encadr&eacute;es<a href="#nbp53" id="footnoteref53_cf8rowy" name="liennbp53" title="Idem, p. 131.">53</a> &raquo;. Dans ces images, plus grande est l&rsquo;intimit&eacute; d&rsquo;une chambre, plus le monde ext&eacute;rieur appara&icirc;t diff&eacute;rent. L&rsquo;image de l&rsquo;&ecirc;tre cach&eacute; dans sa chambre derri&egrave;re sa fen&ecirc;tre permet &agrave; Bachelard d&rsquo;introduire la question de la dialectique de l&rsquo;int&eacute;riorit&eacute; et de l&rsquo;univers. Celui-ci va s&rsquo;int&eacute;resser &agrave; la position de cet &ecirc;tre cach&eacute; et pr&eacute;cise que le r&ecirc;veur r&ecirc;ve derri&egrave;re sa fen&ecirc;tre et non pas &agrave; sa fen&ecirc;tre. Il n&rsquo;a pas besoin d&rsquo;&ecirc;tre &agrave; sa fen&ecirc;tre pour regarder dehors car il peut imaginer le monde &agrave; partir de sa propre int&eacute;riorit&eacute;. Il exp&eacute;rimente alors &laquo;&nbsp;une sorte de dialectique de l&rsquo;immensit&eacute; et de l&rsquo;intimit&eacute;, [dans laquelle il] trouve alternativement l&rsquo;expansion et la s&eacute;curit&eacute;<a href="#nbp26e" id="footnoteref26_uaz3ayb" name="liennbp26e" title="Ibidem.">26</a>.&nbsp;&raquo; Il y a un bienfait psychique li&eacute; &agrave; la r&ecirc;verie &agrave; la fen&ecirc;tre. Nous sommes tour &agrave; tour renvoy&eacute;s &agrave; l&rsquo;immensit&eacute; de notre &ecirc;tre intime et &agrave; l&rsquo;immensit&eacute; de l&rsquo;univers. Les images de &laquo;&nbsp;solitude centr&eacute;e<a href="#nbp54" id="footnoteref54_eytdfpq" name="liennbp54" title="Gaston Bachelard, La Poétique de l’espace, op. cit., p. 46.">54</a> &raquo; illustrent donc &eacute;galement l&rsquo;aspect cosmique de la maison.</p> <p>Arm&eacute;s de ces outils conceptuels, nous sommes &agrave; m&ecirc;me de commencer notre enqu&ecirc;te. Nous allons examiner trois pi&egrave;ces &agrave; conviction extraites de l&rsquo;ouvrage <em>Ch&acirc;teaux en Espagne&nbsp;</em>: la commande de la maison r&ecirc;v&eacute;e de Bachelard, la gravure de Flocon<a href="#nbp55" id="footnoteref55_ni78pkz" name="liennbp55" title="Nous reproduisons infra le second ermitage gravé par Flocon qui est repris dans l’ouvrage Châteaux en Espagne. Nous ne possédons pas de reproduction de sa première tentative (le bureau d’architecte dont Flocon fait mention dans le texte que nous avons cité dans notre introduction).">55</a> et la d&eacute;ception du philosophe &agrave; la livraison de sa maison.</p> <h2><strong>Deuxi&egrave;me partie&nbsp;: enqu&ecirc;ter </strong></h2> <h3><strong><em>Commande&nbsp;: la maison r&ecirc;v&eacute;e de Gaston Bachelard</em></strong></h3> <table border="1" cellpadding="1" cellspacing="1"> <tbody> <tr> <td><em>Pi&egrave;ce &agrave; conviction #1&nbsp;</em>: &laquo;&nbsp;Pour la premi&egrave;re fois, &agrave; cet Entrepreneur de Ch&acirc;teaux en Espagne, j&#39;ai pass&eacute; une commande. Je voulais, moi aussi, mon &ldquo;Ch&acirc;teau&rdquo;. Je voulais pour moi seul la demeure du vallon, pr&egrave;s de la for&ecirc;t&nbsp;; au bord du ruisseau, &agrave; la fois dans le ciel bleu et tout de m&ecirc;me enracin&eacute; dans la terre profonde. J&#39;ai tout dit &agrave; mon ami&nbsp;: j&#39;ai dit que j&#39;aimais la pierre pour les murs mais que je voulais du bois sous les pieds et du bois au plafond. Je lui ai dit qu&#39;&agrave; travers mon r&eacute;duit, non loin du foyer, je voulais voir la poutre &ndash; une poutre en c&oelig;ur de ch&ecirc;ne qui brise tout de suite la tari&egrave;re du ver &ndash;, la poutre avec son signe &eacute;norme de protection, la poutre qui tient le grenier, la poutre qui s&#39;incurve un peu, tr&egrave;s peu pour confesser doucement que la maison est vieille. Il me fallait aussi une fen&ecirc;tre &eacute;troite, car plus petite est la fen&ecirc;tre et plus cet &oelig;il de la maison voit loin, voit bien<a href="#nbp56" id="footnoteref56_10wma9m" name="liennbp56" title="Gaston Bachelard, « Châteaux en Espagne », Le Droit de rêver, op. cit., p. 111.">56</a>.&nbsp;&raquo;</td> </tr> </tbody> </table> <p>Nous pourrions assimiler ce petit texte &agrave; une image litt&eacute;raire de maison semblable &agrave; celles que Bachelard collecte dans ses lectures pour les examiner. Celui-ci y &eacute;voque sa maison r&ecirc;v&eacute;e, un type de maison qu&rsquo;il a &eacute;galement &eacute;tudi&eacute;&nbsp;: &laquo;&nbsp;&agrave; l&rsquo;oppos&eacute; de la maison natale travaille l&rsquo;image de<em> la maison r&ecirc;v&eacute;e</em><a href="#nbp57" id="footnoteref57_0f8hamp" name="liennbp57" title="Gaston Bachelard, La Poétique de l’espace, op. cit., p. 68.">57</a>.&nbsp;&raquo; Il ne faut cependant pas la confondre avec une &laquo;&nbsp;maison qui serait finale, sym&eacute;trique de la maison natale<a href="#nbp58" id="footnoteref58_w3xo3pl" name="liennbp58" title="Idem, p. 69.">58</a>.&nbsp;&raquo; Cette image doit continuer &agrave; &ecirc;tre une impulsion &agrave; une r&ecirc;verie heureuse&nbsp;; une image de maison finale &laquo;&nbsp;pr&eacute;parerait des pens&eacute;es [tristes] et non plus des songes<a href="#nbp47b" id="footnoteref47_jmk894g" name="liennbp47b" title="Ibidem.">47</a>.&nbsp;&raquo; C&rsquo;est une r&ecirc;verie qu&rsquo;il est bon de pratiquer car elle continue &agrave; travailler sur nous, m&ecirc;me tard dans la vie&nbsp;: &laquo;&nbsp;peut-&ecirc;tre est-il bon que nous gardions quelques songes vers une maison que nous habiterons plus tard, toujours plus tard, si tard que nous n&rsquo;aurons pas le temps de la r&eacute;aliser<a href="#nbp47c" id="footnoteref47_rt8rx7g" name="liennbp47c" title="Ibidem.">47</a>.&nbsp;&raquo;</p> <p>Sous cette forme &eacute;crite, il s&rsquo;agit en quelque sorte d&rsquo;un instantan&eacute; de r&ecirc;verie pris dans le corps d&rsquo;images de la maison onirique de Bachelard. Nous avons sous les yeux la retranscription d&rsquo;un instant de r&ecirc;verie, une image &eacute;crite &agrave; partir d&rsquo;une image imagin&eacute;e &agrave; laquelle nous sommes nous-m&ecirc;mes, lecteurs, invit&eacute;s &agrave; r&ecirc;ver. Il ne s&rsquo;agit pas du mod&egrave;le id&eacute;al de maison onirique puisque comme nous l&rsquo;avons d&eacute;j&agrave; soulign&eacute; celle-ci ne peut &ecirc;tre consid&eacute;r&eacute;e comme un mod&egrave;le fig&eacute;. N&eacute;anmoins, cette image est pr&eacute;cieuse pour notre propos. Elle condense en un paragraphe un ensemble d&rsquo;&eacute;l&eacute;ments que Bachelard d&eacute;veloppe dans <em>La Terre et les R&ecirc;veries de la volont&eacute;</em> et <em>La Po&eacute;tique de l&rsquo;espace</em>. Elle est &eacute;galement int&eacute;ressante dans une perspective temporelle car elle marque la jonction entre ces deux ouvrages. Elle a en effet &eacute;t&eacute; &eacute;crite aux alentours de l&rsquo;ann&eacute;e 1953 soit &agrave; mi-parcours entre ceux-ci. Elle est donc plus qu&rsquo;un simple instantan&eacute; de r&ecirc;verie, elle est la saisie d&rsquo;une pens&eacute;e bachelardienne sur l&rsquo;image de la maison en train de se faire, une pens&eacute;e qui ne peut se faire que par la pratique de l&rsquo;image<a href="#nbp59" id="footnoteref59_k27wh9l" name="liennbp59" title="« L’image ne peut être étudiée que par l’image, en rêvant des images telles qu’elles s’assemblent dans la rêverie », Gaston Bachelard, La Poétique de la rêverie, op. cit., p. 46.">59</a>. L&rsquo;image de la maison r&ecirc;v&eacute;e de Bachelard ne s&rsquo;arr&ecirc;te pas dans sa signification tel un concept, elle est constamment en d&eacute;passement d&rsquo;elle-m&ecirc;me puisqu&rsquo;elle a dynamis&eacute; &agrave; la fois la r&ecirc;verie philosophique de Bachelard et continue &agrave; agir sur nous en animant notre propre cheminement.</p> <p>Nous allons &agrave; pr&eacute;sent d&eacute;composer cette image en une s&eacute;rie d&rsquo;&eacute;l&eacute;ments constitutifs afin de les examiner et de r&eacute;aliser une &laquo;&nbsp;expertise d&rsquo;onirisme<a href="#nbp60" id="footnoteref60_35wmlnt" name="liennbp60" title="Gaston Bachelard, La Poétique de l’espace, op. cit., p. 52.">60</a> &raquo; de notre premi&egrave;re pi&egrave;ce &agrave; conviction.&nbsp;</p> <h3><strong><em>Expertise d&rsquo;onirisme</em></strong></h3> <p><em>L&rsquo;entrepreneur</em>&nbsp;: Nous remarquons tout d&rsquo;abord que Bachelard s&rsquo;adresse &agrave; un &laquo;&nbsp;Entrepreneur de Ch&acirc;teaux&nbsp;&raquo; sp&eacute;cialis&eacute; dans la construction de &laquo;&nbsp;Ch&acirc;teaux en Espagne&nbsp;&raquo; soit des b&acirc;timents qui sont des produits de l&rsquo;imagination et qui ne verront pas le jour dans la r&eacute;alit&eacute;. Flocon est un constructeur d&rsquo;irr&eacute;alit&eacute;. Nous allons voir que contrairement &agrave; ce que Bachelard annonce, sa commande ne correspond pas &agrave; celle d&rsquo;un ch&acirc;teau mais &agrave; une chaumi&egrave;re. Celle-ci a &laquo;&nbsp;un sens humain beaucoup plus profond que tous les ch&acirc;teaux en Espagne. Le <em>ch&acirc;teau</em> est inconsistant, la <em>chaumi&egrave;re</em> est enracin&eacute;e<a href="#nbp61" id="footnoteref61_eapc9dk" name="liennbp61" title="Gaston Bachelard, La Terre et les rêveries du repos, op. cit., p. 115.">61</a>.&nbsp;&raquo;</p> <p><em>Le ruisseau et la for&ecirc;t&nbsp;</em>: Bachelard indique l&rsquo;environnement dans lequel doit se situer sa maison. L&rsquo;eau du ruisseau et les arbres de la for&ecirc;t ne sont pas loin. La description qu&rsquo;il fait de cet environnement s&rsquo;apparente aux descriptions de sa r&eacute;gion natale, la Champagne&nbsp;:</p> <p><q>&nbsp;Je suis n&eacute; dans un pays de ruisseaux et de rivi&egrave;res, dans un coin de la Champagne vallonn&eacute;e, dans le Vallage, ainsi nomm&eacute; &agrave; cause du grand nombre de ses vallons. La plus belle des demeures serait pour moi au creux d&rsquo;un vallon, au bord d&rsquo;une eau vive, dans l&rsquo;ombre courte des saules et des osi&egrave;res. Et quand octobre viendrait, avec ses brumes sur la rivi&egrave;re<a href="#nbp62" id="footnoteref62_q30eeo1" name="liennbp62" title="Gaston Bachelard, L’Eau et les Rêves, Paris, Le livre de Poche, coll. « Biblio essais », 1942, p. 15.">62</a>&hellip; </q></p> <p>Nous voyons ici que les souvenirs de l&rsquo;enfance de Bachelard viennent directement contaminer sa r&ecirc;verie. L&rsquo;image de 1953 est une variation de cette image de 1942 puisque Bachelard y &eacute;voquait d&eacute;j&agrave; sa demeure r&ecirc;v&eacute;e. Nous avons ici une trace du fait que l&rsquo;image de la maison n&rsquo;a pas cess&eacute; de le travailler.</p> <p><em>La verticalit&eacute; de la maison&nbsp;</em>: Celle-ci est &eacute;voqu&eacute;e non pas par un escalier qui relierait la cave et le grenier mais par l&rsquo;&eacute;vocation de la cosmicit&eacute; de la maison. La maison r&ecirc;v&eacute;e de Bachelard s&rsquo;&eacute;tire tel un arbre depuis ses racines dans la terre profonde jusqu&rsquo;au ciel bleu. Elle est un &ecirc;tre de la nature et lui permet bien d&rsquo;habiter l&rsquo;univers avec lequel elle va jusqu&rsquo;&agrave; se confondre. L&rsquo;image de l&rsquo;arbre a &eacute;galement fortement travaill&eacute; Bachelard. Dans son travail, la maison et l&rsquo;arbre deviennent progressivement deux images indissociables. L&rsquo;ann&eacute;e qui pr&eacute;c&egrave;de son d&eacute;c&egrave;s, Bachelard, malade, regrette dans une lettre adress&eacute;e &agrave; son ami Henri Bosco<a href="#nbp63" id="footnoteref63_olc3nsk" name="liennbp63" title="Auquel il dédie La Flamme d’une chandelle.">63</a> de ne pouvoir quitter Paris pour retourner dans sa maison de Dijon. La maison est &eacute;voqu&eacute;e mais l&rsquo;arbre est au c&oelig;ur de cette tristesse&nbsp;: &laquo;&nbsp;Je ne vois plus mon tilleul que lorsque je lis des livres<a href="#nbp64" id="footnoteref64_d3pu1oq" name="liennbp64" title="Henri Bosco, Gaston Bachelard, « Correspondance 1957-1962 », in Cahiers Henri Bosco, 47/48, 2011/2012, p. 44. Lettre écrite à Paris et datée du 13 avril 1961.">64</a>.&nbsp;&raquo;</p> <p><em>Les mat&eacute;riaux&nbsp;(pierre et bois)</em>&nbsp;: Bachelard d&eacute;crit ensuite les mat&eacute;riaux qui doivent &ecirc;tre utilis&eacute;s&nbsp;: la pierre et le bois. La maison doit donner &agrave; Bachelard des conseils de stabilit&eacute; et de r&eacute;sistance pour lui permettre d&rsquo;habiter le monde. Les murs sont en pierre pour que la maison puisse stabiliser le monde a&eacute;rien. Le bois utilis&eacute; au sol contraste avec la pierre et renvoie &agrave; la fois &agrave; la verticalit&eacute; et &agrave; la mat&eacute;rialit&eacute; de l&rsquo;arbre vivant&nbsp;:</p> <p><q>&nbsp;Dans ses fibres, le bois garde toujours le souvenir de sa vigueur verticale, et l&rsquo;on ne lutte pas sans habilet&eacute; contre le sens du bois, contre ses fibres. Aussi, pour certains psychismes, le bois est une sorte de cinqui&egrave;me &eacute;l&eacute;ment &ndash; de cinqui&egrave;me mati&egrave;re &ndash;, et il n&rsquo;est pas rare, par exemple, de rencontrer, dans les philosophies orientales, le bois au rang des &eacute;l&eacute;ments fondamentaux<a href="#nbp65" id="footnoteref65_8ytif6o" name="liennbp65" title="Gaston Bachelard, L’Air et les Songes, Paris, Le livre de Poche, coll. « Biblio essais », 1943, p. 265.">65</a>. </q></p> <p>Si des murs solides le prot&egrave;gent, Bachelard pourra s&rsquo;imaginer dans sa maison r&ecirc;v&eacute;e fr&ocirc;ler le bois de ses pieds et &ecirc;tre intime avec cette mati&egrave;re qu&rsquo;il p&eacute;n&egrave;tre par l&rsquo;imagination jusque dans la profondeur de ses fibres.</p> <p><em>Le r&eacute;duit&nbsp;</em>: Bachelard se r&eacute;serve au sein m&ecirc;me de la maison une pi&egrave;ce plus petite dans laquelle il va pouvoir tour &agrave; tour r&ecirc;ver et travailler. Il s&rsquo;agit d&rsquo;un centre de solitude qui renvoie au principe de concentration et &agrave; la vie cellulaire du r&ecirc;veur.</p> <p><em>Le foyer&nbsp;</em>: Le foyer n&rsquo;est pas loin. Il fait bon dans la maison. &Agrave; nouveau, un souvenir vient contaminer l&rsquo;image. La maison natale va venir habiter dans la maison r&ecirc;v&eacute;e. Bachelard l&rsquo;&eacute;voque en 1938&nbsp;:</p> <p><q>&nbsp;Quand j&rsquo;&eacute;tais malade, mon p&egrave;re faisait du feu dans ma chambre. Il apportait un tr&egrave;s grand soin &agrave; dresser les b&ucirc;ches sur le petit bois, &agrave; glisser entre les chen&ecirc;ts la poign&eacute;e de copeaux. Manquer un feu e&ucirc;t &eacute;t&eacute; une insigne sottise. Je n&rsquo;imaginais pas que mon p&egrave;re p&ucirc;t avoir d&rsquo;&eacute;gal dans cette fonction qu&rsquo;il ne d&eacute;l&eacute;guait jamais &agrave; personne. En fait, je ne crois pas avoir allum&eacute; un feu avant l&rsquo;&acirc;ge de dix-huit ans. C&rsquo;est seulement quand je v&eacute;cus dans la solitude que je fus le ma&icirc;tre de ma chemin&eacute;e<a href="#nbp66" id="footnoteref66_c69sxy3" name="liennbp66" title="Gaston Bachelard, La Psychanalyse du feu, Paris, Gallimard, coll. « Folio essais », 1938, p. 25.">66</a>. </q></p> <p>Cette r&ecirc;verie associe maison natale, foyer, chambre et solitude. Si l&rsquo;image de l&rsquo;arbre est devenue indissociable de l&rsquo;image de la maison, l&rsquo;image du foyer a &eacute;t&eacute; la toute premi&egrave;re image &agrave; lui &ecirc;tre associ&eacute;e. Nous notons que le terme foyer peut &ecirc;tre d&eacute;fini tout aussi bien comme un &laquo;&nbsp;espace sp&eacute;cialement am&eacute;nag&eacute; pour y faire du feu<a href="#nbp67" id="footnoteref67_wymarpo" name="liennbp67" title="« Foyer », dans Le Trésor de la Langue Française informatisé, [En ligne]. https://www.le-tresor-de-la-langue.fr/definition/foyer (consulté le 3 décembre 2018).">67</a> &raquo;, comme le feu lui-m&ecirc;me et comme le &laquo;&nbsp;lieu o&ugrave; habite, o&ugrave; vit une famille<a href="#nbp47d" id="footnoteref47_g2matr6" name="liennbp47d" title="Ibidem.">47</a>.&nbsp;&raquo; &Agrave; m&ecirc;me le langage, le feu et l&rsquo;espace de la maison sont intrins&egrave;quement li&eacute;s comme s&rsquo;ils ne faisaient qu&rsquo;un.</p> <p><em>La poutre et le grenier&nbsp;</em>: La poutre qu&rsquo;il aper&ccedil;oit de son r&eacute;duit lui rappelle qu&rsquo;il est prot&eacute;g&eacute;. La maison est son refuge. Cette poutre est en c&oelig;ur de ch&ecirc;ne. Le ch&ecirc;ne est synonyme de puissance&nbsp;: il brise la tari&egrave;re du ver. Il est un &ecirc;tre &laquo;&nbsp;viril et paternel<a href="#nbp68" id="footnoteref68_zksy6qd" name="liennbp68" title="Gaston Bachelard, L’Air et les Songes, p. 273.">68</a> &raquo;. Il est &eacute;galement &laquo;&nbsp;le p&egrave;re du feu<a href="#nbp69" id="footnoteref69_umcd1qw" name="liennbp69" title="Idem, p. 264.">69</a> &raquo;. La poutre s&rsquo;incurve &ndash; un peu &ndash; sous le poids du grenier. Elle t&eacute;moigne sans doute du fait que le grenier est un espace onirique dense. Il a abrit&eacute; et continue &agrave; abriter de nombreuses r&ecirc;veries. La poutre nous rappelle que la maison est vieille. Dans la maison r&ecirc;v&eacute;e se comp&eacute;n&egrave;trent toutes les demeures du pass&eacute;.</p> <p><em>La fen&ecirc;tre&nbsp;</em>: Enfin, Bachelard mentionne qu&rsquo;il lui faut juste une toute petite fen&ecirc;tre, la plus petite possible. Elle devient l&rsquo;&oelig;il de la maison et le conforte dans l&rsquo;id&eacute;e que cette maison voit loin et bien. Il est ainsi rassur&eacute; et peut r&ecirc;ver derri&egrave;re sa fen&ecirc;tre sans avoir besoin de regarder dehors. Du centre de son r&eacute;duit, il peut exp&eacute;rimenter successivement la s&eacute;curit&eacute; et l&rsquo;expansion, se sentir prot&eacute;g&eacute; tout en s&rsquo;ouvrant au monde.</p> <p>Nous terminons cette expertise d&rsquo;onirisme en ajoutant que l&rsquo;image de la maison r&ecirc;v&eacute;e de Bachelard resserre les liens entre trois images centrales dans son travail, celles de la maison, de l&rsquo;arbre et du feu. Si l&rsquo;on souligne souvent l&rsquo;importance de l&rsquo;image du feu car elle est le point de d&eacute;part de ses ouvrages consacr&eacute;s &agrave; l&rsquo;imagination<a href="#nbp70" id="footnoteref70_8jiloo6" name="liennbp70" title="La Psychanalyse du feu (1938) occupe une place singulière dans l’œuvre de Bachelard. En effet, cet ouvrage se situe dans la continuité de son œuvre épistémologique et pourtant il est désigné comme le premier ouvrage du Cycle des éléments dédié à l’étude de l’imagination. Bachelard annonce vouloir y montrer les dangers des rêveries de l’homme pensif devant son foyer pour une connaissance scientifique c’est-à-dire objective de l’élément feu. Cependant on observe que le philosophe va commencer ponctuellement à s’exprimer à la première personne. Des rêveries et des souvenirs personnels vont venir se mêler à cette production à vocation épistémologique comme si Bachelard se laissait prendre malgré lui à la rêverie. C’est ce phénomène qui explique pourquoi ce livre a été répertorié a posteriori dans son œuvre poétique.">70</a>, celles de la maison et de l&rsquo;arbre sont &eacute;galement centrales dans son parcours. Elles partagent toutes la m&ecirc;me verticalit&eacute;, ce sont des images qui &eacute;l&egrave;vent et inspirent. La maison qui se confond ici avec l&rsquo;arbre offre la stabilit&eacute; indispensable pour abriter &agrave; la fois la chaleur du foyer et la chandelle du r&ecirc;veur. Bachelard distingue foyer et chandelle&nbsp;: &laquo;&nbsp;on s&rsquo;endort devant le feu. On ne s&rsquo;endort pas devant la flamme d&rsquo;une chandelle<a href="#nbp71" id="footnoteref71_w7fmclg" name="liennbp71" title="Gaston Bachelard, La Flamme d’une chandelle, Paris, PUF, Quadrige, 1961, p. 10.">71</a>.&nbsp;&raquo; Le foyer renvoie &agrave; la chaleur premi&egrave;re de la maison natale&nbsp;; la chandelle est ambivalente, elle renvoie &agrave; la fois &agrave; la r&ecirc;verie et au travail du philosophe solitaire.</p> <p>Nous en venons maintenant &agrave; l&rsquo;examen de nos deux derni&egrave;res pi&egrave;ces &agrave; conviction.&nbsp;</p> <h3><strong><em>R&eacute;ception et d&eacute;ception&nbsp;: la cellule et l&rsquo;appartement parisien</em></strong></h3> <figure> <p style="text-align: center;"><img alt="deWitte.JPG" data-entity-type="" data-entity-uuid="" height="477" src="http://www.alepreuve.org/sites/alepreuve.org/files/pictures/deWitte.JPG" width="726" /></p> <p style="text-align: center;"><em>Pi&egrave;ce &agrave; conviction #2</em></p> <figcaption>&nbsp;</figcaption> </figure> <table border="1" cellpadding="1" cellspacing="1"> <tbody> <tr> <td> <p><em>Pi&egrave;ce &agrave; conviction #3&nbsp;</em>: &laquo;&nbsp;Mais Flocon me classe parmi les philosophes qui travaillent et non pas au rang des hommes qui s&#39;en vont r&ecirc;vant, des hommes qui s&#39;endorment doucement dans leurs souvenirs. Et comme s&#39;il voulait, cet opini&acirc;tre, que je travaille davantage et que je r&ecirc;ve moins, il a b&acirc;ti une cellule de g&eacute;om&eacute;trie !</p> <p>Sans doute, Flocon m&#39;a fait la gr&acirc;ce de quelques solives, mais avec quelle indiff&eacute;rence il en a vein&eacute; le bois ! Le travail du bois, Flocon le n&eacute;glige. Il lui faut la pierre, il lui faut le marbre, il lui faut des murs qui refl&egrave;tent le soleil. Il me condamne &agrave; la cellule de la pens&eacute;e claire.</p> <p>Allons, je le vois bien, pour que j&#39;aie un jour &ldquo;une hutte en Espagne&rdquo;, il faudra que j&#39;aille moi-m&ecirc;me &agrave; la for&ecirc;t prochaine, que j&#39;&eacute;quarrisse mon arbre, que je cuise les briques de mon mur, que je creuse le trou de ma cave, que je tresse le chaume de mon toit, que je fasse moi-m&ecirc;me le tabouret de bois &agrave; trois pieds. Les tr&eacute;pieds narguent la g&eacute;om&eacute;trie&nbsp;: ils sont toujours d&#39;aplomb. Ce sont les solides assises pour un philosophe qui s&#39;accorde le droit de r&ecirc;ver<a href="#nbp72" id="footnoteref72_q7ausoz" name="liennbp72" title="Gaston Bachelard, « Châteaux en Espagne », Le Droit de rêver, op. cit., p. 112.">72</a>.&nbsp;&raquo;</p> </td> </tr> </tbody> </table> <p>Nous pourrions supposer que le probl&egrave;me de Bachelard r&eacute;side dans le fait que sa maison r&ecirc;v&eacute;e ait &eacute;t&eacute; effectivement r&eacute;alis&eacute;e en &eacute;tant repr&eacute;sent&eacute;e sur le support mat&eacute;riel de la gravure (deuxi&egrave;me pi&egrave;ce &agrave; conviction). Elle pourrait s&rsquo;apparenter alors &agrave; une maison finale. Or la maison r&ecirc;v&eacute;e doit rester un r&ecirc;ve&nbsp;: &laquo;&nbsp;Si ces r&ecirc;ves doivent se r&eacute;aliser, ils quittent le domaine de notre enqu&ecirc;te. Ils entrent dans le domaine de la psychologie des projets<a href="#nbp73" id="footnoteref73_8qce0be" name="liennbp73" title="Gaston Bachelard, La Poétique de l’espace, op. cit., p. 68.">73</a>.&nbsp;&raquo; &Agrave; ce titre, Bachelard aurait peut-&ecirc;tre trouv&eacute; plus de satisfaction dans une image de po&egrave;te qui refuse la description et oriente l&rsquo;onirisme de son lecteur sans l&rsquo;accomplir<a href="#nbp74" id="footnoteref74_fc6mwf8" name="liennbp74" title="Idem, p. 31.">74</a>. Pourtant, Bachelard ne s&rsquo;oppose pas &agrave; une r&ecirc;verie de maison dont l&rsquo;impulsion aurait &eacute;t&eacute; donn&eacute;e par une &oelig;uvre picturale. Il remarque dans <em>La Po&eacute;tique de l&rsquo;espace</em> qu&rsquo;il aimerait &laquo;&nbsp;habiter une maison comme on en voit dans les estampes<a href="#nbp75" id="footnoteref75_52url64" name="liennbp75" title="Idem, p. 60.">75</a> &raquo;. Si une maison a &eacute;t&eacute; bien dessin&eacute;e, sa repr&eacute;sentation devient invitante&nbsp;: &laquo;&nbsp;La r&ecirc;verie revient habiter le dessin exact. La repr&eacute;sentation d&rsquo;une maison ne laisse pas longtemps un r&ecirc;veur indiff&eacute;rent<a href="#nbp47e" id="footnoteref47_62rwu7s" name="liennbp47e" title="Ibidem.">47</a>.&nbsp;&raquo; Ainsi une maison repr&eacute;sent&eacute;e par le trait peut solliciter le d&eacute;sir d&rsquo;y habiter. Le n&oelig;ud du probl&egrave;me se situe ailleurs que dans une alternative entre image litt&eacute;raire et image dessin&eacute;e.</p> <p>L&rsquo;examen de la troisi&egrave;me pi&egrave;ce &agrave; conviction nous r&eacute;v&egrave;le une revendication de Bachelard&nbsp;: celle d&rsquo;un droit de r&ecirc;ver. Or la r&eacute;alisation de Flocon le condamne selon lui &agrave; la pens&eacute;e claire. Bachelard avait d&eacute;j&agrave; formul&eacute; une protestation de ce type &agrave; l&rsquo;encontre d&rsquo;une construction r&eacute;elle, son appartement parisien&nbsp;:</p> <p><q>&nbsp;Je ne r&ecirc;ve pas &agrave; Paris, dans ce cube g&eacute;om&eacute;trique, dans cet alv&eacute;ole de ciment, dans cette chambre aux volets de fer si hostiles &agrave; la mati&egrave;re nocturne. Quand les r&ecirc;ves me sont propices, je vais l&agrave;-bas, dans une maison de Champagne, ou dans quelques maisons o&ugrave; se condensent les myst&egrave;res du bonheur<a href="#nbp76" id="footnoteref76_38dsqa8" name="liennbp76" title="Gaston Bachelard, La Terre et les rêveries du repos, op. cit., p. 110.">76</a>. </q></p> <p>Nous observons que la cellule de g&eacute;om&eacute;trie qu&rsquo;a construite Flocon semble directement renvoyer &agrave; cet appartement que Bachelard consid&egrave;re comme un &laquo;&nbsp;cube g&eacute;om&eacute;trique&nbsp;&raquo; d&eacute;di&eacute; au travail. Le graveur se souvient dans ses m&eacute;moires du deux pi&egrave;ces que le philosophe partageait avec sa fille Suzanne. Chacun de ces deux &laquo;&nbsp;cubes&nbsp;&raquo; &eacute;tait d&eacute;di&eacute; au travail de l&rsquo;un des habitants&nbsp;: &laquo;&nbsp;L&rsquo;une &eacute;tait pour sa fille Suzanne vou&eacute;e, elle, selon les mots de son p&egrave;re, &agrave; la partie la plus ardue de la philosophie, la logique&nbsp;&raquo;&nbsp;; l&rsquo;autre, pour Bachelard, comportait &laquo;&nbsp;un lit assez &eacute;troit, [&hellip;] une table, des chaises et les murs &eacute;taient garnis de rayonnages o&ugrave;, pour entasser plus de livres, il les rangeait &agrave; l&rsquo;horizontale, par piles<a href="#nbp77" id="footnoteref77_huj3por" name="liennbp77" title="Albert Flocon, « Avec Bachelard », Points de fuite, 1933-1994, Tome II, op. cit., p. 190-191.">77</a>.&nbsp;&raquo;</p> <p>Bachelard regrette l&rsquo;absence de maisons &agrave; Paris&nbsp;: &laquo;&nbsp;&Agrave; Paris, il n&rsquo;y a pas de maisons. Dans des bo&icirc;tes superpos&eacute;es vivent les habitants de la grand&rsquo;ville<a href="#nbp78" id="footnoteref78_0jyww47" name="liennbp78" title="Gaston Bachelard, La Poétique de l’espace, op. cit., p. 42.">78</a>.&nbsp;&raquo; En nous aidant du reproche fait aux appartements parisiens dans <em>La Po&eacute;tique de l&rsquo;espace</em>, nous pouvons &eacute;valuer &laquo;&nbsp;la diff&eacute;rence de richesse onirique<a href="#nbp79" id="footnoteref79_yyxa19j" name="liennbp79" title="Gaston Bachelard, La Terre et les rêveries du repos, op. cit., p. 127.">79</a> &raquo; entre la cellule de Flocon et la maison r&ecirc;v&eacute;e de Bachelard. Le d&eacute;faut majeur de la cellule r&eacute;side dans l&rsquo;absence de verticalit&eacute;. Elle n&rsquo;a ni grenier, ni escalier, ni cave. &laquo;&nbsp;La maison n&rsquo;a pas de racine. Chose inimaginable pour un r&ecirc;veur de maison&nbsp;; les gratte-ciel n&rsquo;ont pas de cave<a href="#nbp80" id="footnoteref80_n1bs8mw" name="liennbp80" title="Gaston Bachelard, La Poétique de l’espace, op. cit., p. 42.">80</a>.&nbsp;&raquo; Comme dans un appartement citadin, &laquo;&nbsp;le <em>chez soi</em> n&rsquo;est plus qu&rsquo;une simple horizontalit&eacute;<a href="#nbp81" id="footnoteref81_ace0zjp" name="liennbp81" title="Idem, p. 52.">81</a>.&nbsp;&raquo; Bachelard reproche &eacute;galement aux immeubles des grandes villes leur manque de cosmicit&eacute;. Parce qu&rsquo;ils n&rsquo;ont pas de racine dans la terre mais &eacute;galement parce qu&rsquo;il n&rsquo;y a pas d&rsquo;espace autour d&rsquo;eux. &laquo;&nbsp;Les maisons n&rsquo;y sont plus dans la nature. Les rapports de la demeure et de l&rsquo;espace y deviennent factices. Tout y est machine et la vie intime y fuit de toute part<a href="#nbp82" id="footnoteref82_jkry1hz" name="liennbp82" title="Idem, p. 43.">82</a>.&nbsp;&raquo; Les bo&icirc;tes superpos&eacute;es de la ville ne sont plus le lieu de l&rsquo;intimit&eacute;. &Agrave; travers la fen&ecirc;tre et la porte ouverte de la cellule de Flocon, nous n&rsquo;apercevons pas la nature mais des immeubles g&eacute;om&eacute;triques. Bachelard ne peut rencontrer l&rsquo;immensit&eacute; du monde &agrave; partir d&rsquo;une cellule dans laquelle il ne peut pas vivre les r&ecirc;veries de l&rsquo;intimit&eacute;. Il se plaint en outre de son &eacute;clairage qui en fait une cellule de la pens&eacute;e claire c&rsquo;est-&agrave;-dire un endroit exclusivement consacr&eacute; au travail. Ses murs faits de pierre renvoient la forte lumi&egrave;re d&rsquo;un soleil int&eacute;rieur plac&eacute; au centre de la composition. Or le r&eacute;duit de Bachelard doit &ecirc;tre &eacute;clair&eacute; par la lumi&egrave;re d&rsquo;une chandelle. Celle-ci peut bien s&ucirc;r &eacute;clairer le livre du philosophe travailleur mais aussi, si celui-ci la contemple, susciter des images sans limite<a href="#nbp83" id="footnoteref83_3swj029" name="liennbp83" title="Gaston Bachelard, La Flamme d’une chandelle, op. cit., p. 19.">83</a>. L&rsquo;image de l&rsquo;homme assis &agrave; sa table &eacute;clair&eacute;e par une chandelle est ambivalente&nbsp;: elle renvoie &agrave; la fois &agrave; l&rsquo;&ecirc;tre travaillant et &agrave; l&rsquo;&ecirc;tre r&ecirc;vant. Une forte solitude les anime tous deux. Le r&ecirc;veur et le travailleur ne sont cependant qu&rsquo;une seule et m&ecirc;me personne dont la vie est marqu&eacute;e par des rythmes vari&eacute;s mais harmonis&eacute;s.</p> <p>Enfin, qu&rsquo;entend exactement Bachelard lorsqu&rsquo;il projette de construire un tabouret &agrave; trois pieds pour &laquo;&nbsp;narguer la g&eacute;om&eacute;trie&nbsp;&raquo;&nbsp;? L&rsquo;&eacute;vocation de la g&eacute;om&eacute;trie renvoie &agrave; la question de la forme. &laquo;&nbsp;La maison est de prime abord un objet &agrave; forte g&eacute;om&eacute;trie. On est tent&eacute; de l&rsquo;analyser rationnellement<a href="#nbp84" id="footnoteref84_b9a1uxa" name="liennbp84" title="Gaston Bachelard, La Poétique de l’espace, op. cit., p. 59.">84</a>.&nbsp;&raquo; Le risque qui est pr&eacute;gnant ici est que le r&ecirc;veur soit &laquo;&nbsp;arr&ecirc;t&eacute; dans son &eacute;vasion [&hellip;] par la r&eacute;alit&eacute; g&eacute;om&eacute;trique des formes<a href="#nbp85" id="footnoteref85_8jmsj5d" name="liennbp85" title="Idem, p. 105.">85</a>.&nbsp;&raquo; En narguant la g&eacute;om&eacute;trie, Bachelard veut &eacute;viter que &laquo;&nbsp;l&rsquo;imagination [soit] vaincue par la r&eacute;alit&eacute;<a href="#nbp47f" id="footnoteref47_5cfsf7p" name="liennbp47f" title="Ibidem.">47</a> &raquo; pour permettre au r&ecirc;veur d&rsquo;acc&eacute;der &agrave; un espace onirique dont les dimensions &ndash; non mesurables &ndash; sont celles de la profondeur qui enracine, de la hauteur qui &eacute;l&egrave;ve et de l&rsquo;intimit&eacute; qui prot&egrave;ge. La mention de la g&eacute;om&eacute;trie dans cette image annonce le d&eacute;veloppement de la notion de &laquo;&nbsp;g&eacute;om&eacute;trie r&ecirc;veuse&nbsp;&raquo; qui est l&rsquo;un des &eacute;l&eacute;ments importants de <em>La Po&eacute;tique de l&rsquo;espace</em>. Avant de passer &agrave; la conclusion de notre enqu&ecirc;te, nous pourrions encore nous demander si la g&eacute;om&eacute;trie de Flocon n&rsquo;est pas &agrave; sa mani&egrave;re une forme de &laquo;&nbsp;g&eacute;om&eacute;trie r&ecirc;veuse&nbsp;&raquo;&nbsp;? Pour r&eacute;pondre &agrave; cette question, nous devons remonter dans le pass&eacute; du graveur. On apprend dans ses m&eacute;moires que celui-ci voulait devenir architecte en entrant au Bauhaus en 1927 &agrave; l&rsquo;&acirc;ge de 18 ans. Cependant, sa rencontre avec Oskar Schlemmer, peintre, d&eacute;corateur de th&eacute;&acirc;tre et sc&eacute;nographe de ballet, et la d&eacute;cision de rejoindre l&rsquo;atelier th&eacute;&acirc;tral dirig&eacute; par celui-ci l&rsquo;ont d&eacute;tourn&eacute; de ce projet. M&ecirc;me s&rsquo;il ne passe que trois ann&eacute;es au sein de l&rsquo;&eacute;tablissement, Flocon reconna&icirc;t que cette exp&eacute;rience &laquo;&nbsp;lui a coll&eacute; &agrave; la peau et a orient&eacute; ses fa&ccedil;ons de voir, de ressentir, de travailler, de vivre<a href="#nbp86" id="footnoteref86_1oj4qwj" name="liennbp86" title="Albert Flocon, Scénographies au Bauhaus, Dessau 1927-1930, Paris, Klincksieck – Archimbaud, 1987, p. 11.">86</a> &raquo;. Paul Klee lui enseigne &laquo;&nbsp;&agrave; mieux percevoir l&rsquo;approche po&eacute;tique du monde des formes<a href="#nbp87" id="footnoteref87_ijkixnt" name="liennbp87" title="Albert Flocon, « Rationalismes », Points de fuite, 1909-1933, Tome I, Neuchâtel, Ides et Calendes, coll. « La bibliothèque des arts », p. 178.">87</a> &raquo;. Aupr&egrave;s de Schlemmer, il joue avec les formes g&eacute;om&eacute;triques dans l&rsquo;espace tridimensionnel de la sc&egrave;ne de th&eacute;&acirc;tre pour interroger la place de l&rsquo;homme dans l&rsquo;espace. En quittant le Bauhaus, il d&eacute;cide de devenir &laquo;&nbsp;dessinateur, peintre, graveur, perspectiviste [et] de traduire l&rsquo;espace schlemmerien en perspectives<a href="#nbp88" id="footnoteref88_rcygn5p" name="liennbp88" title="Albert Flocon, Scénographies au Bauhaus, Dessau 1927-1930, op. cit., p. 138.">88</a> &raquo;. Pour le dessiner, il part d&rsquo;un &laquo;&nbsp;mod&egrave;le onirique [&hellip;] compos&eacute; d&rsquo;ingr&eacute;dients multiples&nbsp;: m&eacute;moire pr&eacute;cise, m&eacute;moire floue, m&eacute;moire &eacute;labor&eacute;e&nbsp;; mythes et contre-mythes&nbsp;; documents &eacute;crits, images dessin&eacute;es et photographi&eacute;es<a href="#nbp89" id="footnoteref89_xjprlzx" name="liennbp89" title="Idem, p. 140. Flocon oppose le modèle onirique au réalisme photographique.">89</a> &raquo;. Ces ingr&eacute;dients sont ensuite convertis en formes &agrave; l&rsquo;aide du crayon puis du burin. Cet espace est toujours habit&eacute;&nbsp;; des personnages sont ins&eacute;r&eacute;s dans les compositions pour g&eacute;n&eacute;rer un &laquo;&nbsp;jeu r&eacute;ciproque des humains et des formes&nbsp;&raquo;. Ce m&eacute;canisme doit stimuler l&rsquo;imagination de celui qui contemple les dessins de Flocon pour l&rsquo;emmener dans &laquo;&nbsp;l&rsquo;espace l&eacute;ger du r&ecirc;ve &eacute;veill&eacute;<a href="#nbp47g" id="footnoteref47_yypzhs0" name="liennbp47g" title="Ibidem.">47</a> &raquo;. Au vu de ces quelques &eacute;l&eacute;ments, nous pouvons avancer que nous sommes &eacute;galement ici en pr&eacute;sence d&rsquo;une &laquo;&nbsp;g&eacute;om&eacute;trie r&ecirc;veuse&nbsp;&raquo;. Et le graveur avait bien pour intention d&rsquo;inviter son ami &agrave; venir habiter oniriquement l&rsquo;espace imaginaire qu&rsquo;il avait dessin&eacute;.</p> <h2><strong>Conclusion&nbsp;: r&eacute;soudre l&rsquo;&eacute;nigme</strong></h2> <p>Nous pouvons maintenant expliquer la d&eacute;ception de Bachelard par la conjugaison d&rsquo;une s&eacute;rie de facteurs&nbsp;: le manque de verticalit&eacute; et de cosmicit&eacute; de la cellule, un &eacute;clairage aveuglant, l&rsquo;absence de la chandelle et enfin, la pr&eacute;gnance trop importante des formes g&eacute;om&eacute;triques. La cellule de Flocon ancre Bachelard &agrave; une exp&eacute;rience r&eacute;elle dont il voulait se d&eacute;tacher et qui l&rsquo;emp&ecirc;che de r&ecirc;ver, celle de son appartement parisien. Le graveur et sa po&eacute;tique g&eacute;om&eacute;trique n&rsquo;ont pas pu satisfaire &agrave; la requ&ecirc;te du philosophe. Si cet &eacute;pisode de leur amiti&eacute; est peu connu du public, il semble avoir fortement marqu&eacute; Flocon. En t&eacute;moigne l&rsquo;allusion &agrave; son propos lors d&rsquo;un hommage qu&rsquo;il rend &agrave; Bachelard quelques ann&eacute;es apr&egrave;s sa disparition&nbsp;:</p> <p><q>&nbsp;Mes projets de chaumi&egrave;re manquaient de chaleur, de douceur, de certitude protectrice. Par deux fois, j&rsquo;ai remis l&rsquo;ouvrage sur le m&eacute;tier. C&rsquo;est apr&egrave;s le re&ccedil;u de ma deuxi&egrave;me gravure et &agrave; la vue de son texte que j&rsquo;ai compris tout le malentendu<a href="#nbp90" id="footnoteref90_al0ceem" name="liennbp90" title="Albert Flocon, « Le philosophe et le graveur », dans Gouhier Henri et René Poirier (dir.), Bachelard, Colloque de Cerisy, Paris, Union Générale d’Editions, 1974, p. 276-277.">90</a>. </q></p> <p>Flocon saisit pr&eacute;cis&eacute;ment ici ce qu&rsquo;il manquait &agrave; son ami&nbsp;: la &laquo;&nbsp;certitude protectrice&nbsp;&raquo; de la maison imaginaire qui permet au r&ecirc;veur d&rsquo;y habiter oniriquement et d&rsquo;y r&ecirc;ver en paix. La commande du philosophe pouvait cependant pr&ecirc;ter &agrave; confusion. Celui-ci avait demand&eacute; express&eacute;ment un ch&acirc;teau &agrave; son entrepreneur alors que &laquo;&nbsp;dans un palais, &ldquo;il n&rsquo;y a pas un coin pour l&rsquo;intimit&eacute;&rdquo;<a href="#nbp91" id="footnoteref91_prb0ww4" name="liennbp91" title="Gaston Bachelard (citant Baudelaire), La Poétique de l’espace, op. cit., p. 44.">91</a> &raquo;. Bachelard &eacute;tait en fait &agrave; la recherche d&rsquo;une simple hutte. En l&rsquo;&eacute;voquant dans sa d&eacute;ception, il est d&eacute;j&agrave; en train de r&ecirc;ver et est parti l&rsquo;habiter&nbsp;: &laquo;&nbsp;Dans la plupart de nos r&ecirc;ves de hutte, nous souhaitons vivre ailleurs, loin de la maison encombr&eacute;e, loin des soucis citadins. Nous fuyons en pens&eacute;e pour chercher un vrai refuge<a href="#nbp92" id="footnoteref92_7oacpq9" name="liennbp92" title="Idem, p. 45-46.">92</a>.&nbsp;&raquo; Quelques ann&eacute;es plus tard, le philosophe &eacute;tudie l&rsquo;image litt&eacute;raire de la hutte de l&rsquo;ermite dans <em>La Po&eacute;tique de l&rsquo;espace</em>&nbsp;:</p> <p><q>&nbsp;La <em>hutte de l&rsquo;ermite</em>, voil&agrave; bien une gravure princeps&nbsp;! Les vraies images sont des gravures. L&rsquo;imagination les grave dans notre m&eacute;moire. Elles approfondissent des souvenirs v&eacute;cus, elles d&eacute;placent des souvenirs v&eacute;cus pour devenir des souvenirs de l&rsquo;imagination<a href="#nbp93" id="footnoteref93_e1zgid0" name="liennbp93" title="Idem, p. 46.">93</a>. </q></p> <p>L&rsquo;imagination de Bachelard se souvient probablement ici de l&rsquo;&eacute;pisode que nous venons de relater. Elle constate qu&rsquo;elle avait fait en r&eacute;alit&eacute; elle-m&ecirc;me le travail du graveur en gravant une hutte dans la m&eacute;moire du philosophe r&ecirc;veur.</p> <p>Cet &eacute;pisode a &eacute;t&eacute; l&rsquo;occasion pour nous d&rsquo;introduire de mani&egrave;re ludique la pens&eacute;e de l&rsquo;habiter chez Gaston Bachelard. Si celle-ci se construit sur une &eacute;tude du langage po&eacute;tique, elle &eacute;volue progressivement vers une anthropologie qui place la r&ecirc;verie au c&oelig;ur d&rsquo;un &laquo;&nbsp;habiter heureux&nbsp;&raquo; du monde&nbsp;: &laquo;&nbsp;La r&ecirc;verie nous aide &agrave; habiter le monde, &agrave; habiter le bonheur du monde<a href="#nbp94" id="footnoteref94_hu30b6c" name="liennbp94" title="Gaston Bachelard, La Poétique de la rêverie, op. cit., p. 20.">94</a>.&nbsp;&raquo; La maison joue ici un r&ocirc;le essentiel puisque habiter oniriquement des maisons nous permet de nous enraciner dans le monde et de nous y sentir prot&eacute;g&eacute; avant de s&rsquo;ouvrir progressivement &agrave; celui-ci. Enfin, nous esp&eacute;rons avoir &eacute;galement rendu compte du fait que &laquo;&nbsp;la maison r&ecirc;v&eacute;e de Gaston Bachelard&nbsp;&raquo; est plus qu&rsquo;un &eacute;pisode anecdotique dans le parcours du philosophe. Outre la trace d&rsquo;une profonde amiti&eacute;, il atteste de l&rsquo;importance que peut rev&ecirc;tir la r&ecirc;verie dans le travail philosophique.</p> <p>&nbsp;</p> <p>&nbsp;</p> <hr /> <p><b>Notes et r&eacute;f&eacute;rences</b></p> <p><strong>Bibliographie</strong></p> <p><strong><em>Ouvrages cit&eacute;s&nbsp;</em></strong></p> <p>Bachelard, Gaston, <em>La Psychanalyse du feu,</em> Paris, Gallimard, coll. &laquo;&nbsp;Folio essais&nbsp;&raquo;, 1938.</p> <p>&ndash;, <em>L&rsquo;Eau et les R&ecirc;ves</em>, Paris, Le livre de Poche, coll. &laquo;&nbsp;Biblio essais&nbsp;&raquo;, 1942.</p> <p>&ndash;, <em>L&rsquo;Air et les Songes</em>, Paris, Le livre de Poche, coll. &laquo;&nbsp;Biblio essais&nbsp;&raquo;, 1943.</p> <p>&ndash;, <em>La Terre et les r&ecirc;veries de la volont&eacute;</em>, Paris, Corti, coll. &laquo;&nbsp;Les Massicot&egrave;s&nbsp;&raquo;, 1948.</p> <p>&ndash;, <em>La Terre et les r&ecirc;veries du repos</em>, Paris, Corti, coll. &laquo;&nbsp;Les Massicot&egrave;s&nbsp;&raquo;, 1948.</p> <p>&ndash;, <em>La Po&eacute;tique de l&rsquo;espace</em>, Paris, PUF, coll. &laquo;&nbsp;Quadrige&nbsp;&raquo;, 1957.</p> <p>&ndash;, <em>La Po&eacute;tique de la r&ecirc;verie</em>, Paris, PUF, coll. &laquo;&nbsp;Quadrige&nbsp;&raquo;, 1960.</p> <p>&ndash;, <em>La Flamme d&rsquo;une chandelle</em>, Paris, PUF, coll. &laquo;&nbsp;Quadrige&nbsp;&raquo;, 1961.</p> <p>&ndash;, &laquo;&nbsp;Ch&acirc;teaux en Espagne&nbsp;&raquo;,<em> Le Droit de r&ecirc;ver</em>, Paris, PUF, coll. &laquo;&nbsp;Quadrige&nbsp;&raquo;, 1970.</p> <p>&ndash;, <em>L&rsquo;Engagement rationaliste</em>, Paris, PUF, coll. &laquo;&nbsp;Biblioth&egrave;que de philosophie contemporaine&nbsp;&raquo;, 1972.</p> <p>&ndash;, &laquo;&nbsp;Nous sommes des dormeurs &eacute;veill&eacute;s, des r&ecirc;veurs lucides&nbsp;&raquo;, &eacute;mission radio diffus&eacute;e le 19 janvier 1954 sur Paris Inter, <em>France Culture</em>, [En ligne]&nbsp;<a href="https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/gaston-bachelard-nous-sommes-des-dormeurs-eveilles-des-reveurs">https://www.franceculture.fr/emissions/les-nuits-de-france-culture/gaston-bachelard-nous-sommes-des-dormeurs-eveilles-des-reveurs</a>&nbsp;(consult&eacute; le 15 avril 2017).</p> <p>Bachelard, Gaston et Suzanne Bachelard, <em>Fragments d&rsquo;une Po&eacute;tique du Feu</em>, Paris, PUF, 1988.</p> <p>Bosco, Henri et Gaston Bachelard, &laquo;&nbsp;Correspondance 1957-1962&nbsp;&raquo;, <em>Cahiers Henri Bosco</em>, 47/48 (2011/2012).</p> <p>Flocon, Albert, &laquo;&nbsp;Le philosophe et le graveur&nbsp;&raquo;, dans Gouhier Henri et Ren&eacute; Poirier (dir.), <em>Bachelard, Colloque de Cerisy</em>, Paris, Union G&eacute;n&eacute;rale d&rsquo;Editions, 1974.</p> <p>&ndash;, <em>Sc&eacute;nographies au Bauhaus, Dessau 1927-1930</em>, Paris, Klincksieck &ndash; Archimbaud, 1987.</p> <p>&ndash;, &laquo;&nbsp;Bauhaus&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;Rationalismes&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;Oscar Schlemmer, homme de th&eacute;&acirc;tre&nbsp;&raquo;, <em>Points de fuite, 1909-1933, Tome I</em>, Neuch&acirc;tel, Ides et Calendes, coll. &laquo;&nbsp;La biblioth&egrave;que des arts&nbsp;&raquo;, 1994.</p> <p>&ndash;, &laquo;&nbsp;Paysages. Le trait&eacute; du burin&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;Avec Bachelard&nbsp;&raquo;,<em> Points de fuite, 1933-1994, Tome II</em>, Neuch&acirc;tel, Ides et Calendes, coll. &laquo;&nbsp;La biblioth&egrave;que des arts&nbsp;&raquo;, 1995.</p> <p><strong><em>Pour aller plus loin </em></strong></p> <p>Costa, Vincenzo, &laquo;&nbsp;Habiter les images&nbsp;: la parole po&eacute;tique chez Heidegger et Bachelard&nbsp;&raquo;, <em>Cahiers Gaston Bachelard</em>, n&deg;&nbsp;11 (2009), p.&nbsp;151-164.</p> <p>Rheinberger, Hans-J&ouml;rg, <em>Le Graveur et le Philosophe&nbsp;: Albert Flocon rencontre Gaston Bachelard</em>, Paris, Hermann, 2017.</p> <p>Wunenburger, Jean-Jacques, &laquo;&nbsp;La ph&eacute;nom&eacute;nologie bachelardienne de l&rsquo;imagination, &eacute;carts et variations&nbsp;&raquo;, in <em>Cahiers Gaston Bachelard</em>, <em>Bachelard et la ph&eacute;nom&eacute;nologie</em>, n&deg;&nbsp;8 (2006), p.&nbsp;68-78.</p> <p>&ndash;, <em>Gaston Bachelard, po&eacute;tique des images</em>, Paris, Mim&eacute;sis, coll. &laquo;&nbsp;l&rsquo;&oelig;il et l&rsquo;esprit&nbsp;&raquo;, 2012.</p> <p>&ndash;, &laquo;&nbsp;Pour une po&eacute;tique de la maison&nbsp;&raquo;, <em>L&rsquo;imagination g&eacute;opo&iuml;&eacute;tique</em>, Paris, Mim&eacute;sis, coll. &laquo;&nbsp;l&rsquo;&oelig;il et l&rsquo;esprit&nbsp;&raquo;, 2012, p.&nbsp;201-210.</p> <p>Youn&egrave;s, Chris, &laquo;&nbsp;La m&eacute;taphore de la maison dans <em>La Po&eacute;tique de l&rsquo;espace</em>&nbsp;&raquo;, dans Jean-Jacques Wunenberger (dir.), <em>Gaston Bachelard, Science et po&eacute;tique, une nouvelle &eacute;thique&nbsp;?</em>, Paris, Hermann, 2013, p.&nbsp;141-149.</p> <hr /> <p><strong>Cr&eacute;dits photographiques</strong></p> <p><img alt="deWitte.JPG" data-entity-type="" data-entity-uuid="" height="66" src="http://www.alepreuve.org/sites/alepreuve.org/files/pictures/deWitte.JPG" width="100" />Flocon, Albert, Planche V, reproduction gravure V issue de Bachelard, Gaston et Albert Flocon, <em>Ch&acirc;teaux en Espagne</em>, Paris, Cercle Grolier, Les amis du livre moderne, 1957. Collection personnelle.</p> <hr /> <p><a href="#liennbp1" name="nbp1">1 </a>N&eacute; &agrave; K&ouml;penick en 1909 et d&eacute;c&eacute;d&eacute; &agrave; Paris en 1994. Pour une &eacute;tude approfondie de la relation entre Flocon et Bachelard, voir Hans-J&ouml;rg Rheinberger, <em>Le Graveur et le philosophe</em>, trad. A. Lochmann, Paris, Hermann, 2017, p.&nbsp;88.</p> <p><a href="#liennbp2" name="nbp2">2</a> Albert Flocon, &laquo;&nbsp;Paysages. Le trait&eacute; du burin &raquo;, <em>Points de fuite, 1933-1994, Tome&nbsp;II</em>, Neuch&acirc;tel, Ides et Calendes, coll. &laquo;&nbsp;La biblioth&egrave;que des arts&nbsp;&raquo;, 1995, p.&nbsp;144.</p> <p><a href="#liennbp3" name="nbp3">3</a> L&rsquo;ensemble de ces commentaires ainsi que le texte introductif de <em>&Agrave; la gloire de la main</em> et du <em>Trait&eacute; du burin</em> sont repris dans Gaston Bachelard, <em>Le Droit de r&ecirc;ver</em>, Paris, PUF, coll. &laquo;&nbsp;Quadrige&nbsp;&raquo;, 1970, p.&nbsp;252.</p> <p><a href="#liennbp4" name="nbp4">4</a> Albert Flocon, &laquo;&nbsp;Paysages. Le trait&eacute; du burin&nbsp;&raquo;, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;182.</p> <p><a href="#liennbp5" name="nbp5">5</a> Gaston Bachelard, &laquo;&nbsp;Ch&acirc;teaux en Espagne&nbsp;&raquo;, <em>Le Droit de r&ecirc;ver</em>, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;99.</p> <p><a href="#liennbp6" name="nbp6">6</a> Entre les deux para&icirc;t &eacute;galement <em>Le Trait&eacute; du burin </em>(1952) dont Bachelard r&eacute;dige la pr&eacute;face.</p> <p><a href="#liennbp7" name="nbp7">7</a> Gaston Bachelard, &laquo;&nbsp;Ch&acirc;teaux en Espagne&nbsp;&raquo;, <em>Le Droit de r&ecirc;ver</em>, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;136.</p> <p><a href="#liennbp8" name="nbp8">8</a> Albert Flocon, &laquo;&nbsp;Avec Bachelard&nbsp;&raquo;, <em>Points de fuite, 1933-1994, Tome II</em>, <em>op. cit</em>., p.&nbsp;198-199.</p> <p><a href="#liennbp9" name="nbp9">9</a> Gaston Bachelard, <em>La Po&eacute;tique de l&rsquo;espace</em>, Paris, PUF, coll. &laquo;&nbsp;Quadrige&nbsp;&raquo;, 1957, p.&nbsp;19.</p> <p><a href="#liennbp10" name="nbp10">10 </a>Cette appellation &oelig;uvre diurne/&oelig;uvre nocturne est fr&eacute;quemment utilis&eacute;e par les sp&eacute;cialistes de Bachelard. Elle d&eacute;rive des propos du philosophe qui s&rsquo;exprime sur son travail et sur la double nature de sa conscience&nbsp;: &laquo;&nbsp;Trop tard, j&rsquo;ai connu la bonne conscience dans le travail altern&eacute; des images et des concepts, deux bonnes consciences qui seraient celle du plein jour, et celle qui accepte le c&ocirc;t&eacute; nocturne de l&rsquo;&acirc;me&nbsp;&raquo; in Gaston Bachelard, <em>La Po&eacute;tique de la r&ecirc;verie</em>, Paris, PUF, coll. &laquo;&nbsp;Quadrige&nbsp;&raquo;, 1960, p.&nbsp;47. Il est int&eacute;ressant d&rsquo;observer que si certains sp&eacute;cialistes se concentrent sur l&rsquo;un des deux pans de l&rsquo;&oelig;uvre de Bachelard, d&rsquo;autres cherchent &agrave; lier les deux en s&rsquo;interrogeant par exemple sur l&rsquo;imaginaire du scientifique ou sur la dimension &eacute;pist&eacute;mologique de l&rsquo;imaginaire.</p> <p><a href="#liennbp11" name="nbp11">11</a> L&rsquo;ouvrage <em>Lautr&eacute;amont</em> (1939) occupe une place singuli&egrave;re dans son &oelig;uvre nocturne. Nous ne l&rsquo;abordons pas ici.</p> <p><a href="#liennbp12" name="nbp12">12</a> Gaston Bachelard, <em>Fragments d&rsquo;une Po&eacute;tique du Feu</em>, Paris, PUF, 1988, p.&nbsp;28.</p> <p><a href="#liennbp13" name="nbp13">13</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;29.</p> <p><a href="#liennbp14" name="nbp14">14</a> Bachelard identifie dans <em>La Terre et les r&ecirc;veries de la volont&eacute;</em> ses &laquo;&nbsp;adversaires&nbsp;&raquo;&nbsp;: ce sont le philosophe r&eacute;aliste et le commun des psychologues. Cependant, il n&rsquo;identifie pas clairement qui est le philosophe r&eacute;aliste qu&rsquo;il avait d&eacute;j&agrave; &eacute;t&eacute; amen&eacute; &agrave; rencontrer dans le cadre de sa philosophie des sciences. Il pourrait &agrave; la fois faire r&eacute;f&eacute;rence &agrave; une certaine tradition philosophique qui donne &agrave; l&rsquo;image un statut mim&eacute;tique mais peut-&ecirc;tre &eacute;galement &agrave; certains &eacute;gards &agrave; des courants plus contemporains comme la ph&eacute;nom&eacute;nologie fran&ccedil;aise pour laquelle la vis&eacute;e perceptive de la conscience reste premi&egrave;re. Voir notamment &agrave; ce sujet Jean-Jacques Wunenberger, &laquo;&nbsp;La ph&eacute;nom&eacute;nologie bachelardienne de l&rsquo;imagination, &eacute;carts et variations&nbsp;&raquo;, <em>Cahiers Gaston Bachelard</em>, <em>Bachelard et la ph&eacute;nom&eacute;nologie</em>, n&deg;&nbsp;8 (2006), p.&nbsp;68-78.</p> <p><a href="#liennbp15" name="nbp15">15</a> C&rsquo;est la notion de &laquo;&nbsp;retentissement&nbsp;&raquo; que Bachelard d&eacute;veloppe &agrave; partir de sa lecture d&rsquo;Eug&egrave;ne Minkowski.</p> <p><a href="#liennbp16" name="nbp16">16 </a>Gaston Bachelard, <em>L&rsquo;Engagement rationaliste</em>, Paris, PUF, coll. &laquo;&nbsp;Biblioth&egrave;que de philosophie contemporaine&nbsp;&raquo;, 1972, p.&nbsp;47. &laquo;&nbsp;Si j&#39;avais &agrave; faire le plan g&eacute;n&eacute;ral des r&eacute;flexions d&#39;un philosophe &agrave; l&#39;automne de sa vie, je dirais que j&#39;ai maintenant la nostalgie d&#39;une certaine anthropologie. Et s&#39;il fallait &ecirc;tre complet, il me semble que j&#39;aimerais &agrave; discuter d&#39;un th&egrave;me qui n&#39;est pas celui d&#39;aujourd&#39;hui, th&egrave;me que j&#39;appellerai &ldquo;l&#39;homme des vingt-quatre heures&rdquo;. Il me semble, par cons&eacute;quent, que si l&#39;on voulait donner &agrave; l&#39;ensemble de l&#39;anthropologie ses bases philosophiques ou m&eacute;taphysiques, il faudrait et il suffirait de d&eacute;crire un homme dans vingt-quatre heures de sa vie&nbsp;&raquo;.</p> <p><a href="#liennbp17" name="nbp17">17</a> Gaston Bachelard, &laquo;&nbsp;Nous sommes des dormeurs &eacute;veill&eacute;s, des r&ecirc;veurs lucides&nbsp;&raquo;, &eacute;mission radio diffus&eacute;e le 19 janvier 1954 sur Paris Inter.</p> <p><a href="#liennbp18" name="nbp18">18</a> Gaston Bachelard, <em>La Po&eacute;tique de l&rsquo;espace</em>, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;12.</p> <p><a href="#liennbp19" name="nbp19">19</a> Gaston Bachelard, <em>Fragments d&rsquo;une Po&eacute;tique du Feu</em>, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;35.</p> <p><a href="#liennbp20" name="nbp20">20</a><em> La Po&eacute;tique de l&rsquo;espace</em> est publi&eacute;e en 1957&nbsp;; <em>La Po&eacute;tique de la r&ecirc;verie</em> en 1960.</p> <p><a href="#liennbp21" name="nbp21">21</a> Gaston Bachelard, <em>La Po&eacute;tique de l&rsquo;espace</em>, <em>op. cit</em>.,p.&nbsp;17.</p> <p><a href="#liennbp22" name="nbp22">22</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;59.</p> <p><a href="#liennbp23" name="nbp23">23</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;25.</p> <p><a href="#liennbp24" name="nbp24">24</a> Gaston Bachelard, <em>La Terre et les r&ecirc;veries du repos</em>, Paris, Corti, coll. &laquo;&nbsp;Les Massicot&egrave;s&nbsp;&raquo;, 1971, p.&nbsp;111-112.</p> <p><a href="#liennbp25" name="nbp25">25</a> Gaston Bachelard, <em>La Po&eacute;tique de l&rsquo;espace</em>, <em>op. cit</em>., p.&nbsp;25.</p> <p>26 <a href="#liennbp26a" name="nbp26a">a</a> <a href="#liennbp26b" name="nbp26b">b</a> <a href="#liennbp26c" name="nbp26c">c</a> <a href="#liennbp26d" name="nbp26d">d</a> <a href="#liennbp26e" name="nbp26e">e</a> <em>Ibidem</em>.</p> <p><a href="#liennbp27" name="nbp27">27</a> Gaston Bachelard, <em>La Po&eacute;tique de la r&ecirc;verie</em>, <em>op. cit</em>., p.&nbsp;85.</p> <p><a href="#liennbp28" name="nbp28">28</a> Gaston Bachelard, <em>La Po&eacute;tique de l&rsquo;espace</em>, <em>op. cit</em>., p.&nbsp;28.</p> <p><a href="#liennbp29" name="nbp29">29</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;27.</p> <p><a href="#liennbp30" name="nbp30">30</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;33.</p> <p><a href="#liennbp31" name="nbp31">31</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;25-26.</p> <p><a href="#liennbp32" name="nbp32">32 </a>Gaston Bachelard, <em>La Po&eacute;tique de la r&ecirc;verie</em>, <em>op. cit</em>., p.&nbsp;104.</p> <p><a href="#liennbp33" name="nbp33">33</a> Gaston Bachelard, <em>La Po&eacute;tique de l&rsquo;espace</em>, <em>op. cit</em>., p.&nbsp;26.</p> <p><a href="#liennbp34" name="nbp34">34</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;34.</p> <p><a href="#liennbp35" name="nbp35">35</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;18.</p> <p><a href="#liennbp36" name="nbp36">36</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;19.</p> <p><a href="#liennbp37" name="nbp37">37</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;18.</p> <p><a href="#liennbp38" name="nbp38">38 </a>Gaston Bachelard, <em>La Terre et les r&ecirc;veries du repos</em>, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;126.</p> <p><a href="#liennbp39" name="nbp39">39</a> Nous avons &eacute;voqu&eacute; une &laquo;&nbsp;valeur fondamentale&nbsp;&raquo; qui relie les images de maison, celle de la protection, mais il existe &eacute;galement d&rsquo;autres valeurs d&rsquo;intimit&eacute; que nous leur attribuons.</p> <p><a href="#liennbp40" name="nbp40">40</a> Gaston Bachelard, <em>La Po&eacute;tique de l&rsquo;espace</em>, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;34.</p> <p><a href="#liennbp41" name="nbp41">41</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;26.</p> <p><a href="#liennbp42" name="nbp42">42</a> Nous pourrions nous demander pourquoi la conscience peut ou doit b&eacute;n&eacute;ficier de l&rsquo;action de forces de coh&eacute;rence. Nous pouvons trouver des &eacute;l&eacute;ments de r&eacute;ponse dans les d&eacute;bats que Bachelard entretient avec Bergson au sujet de leurs conceptions respectives du temps. Bachelard refuse une conception continue du temps bas&eacute;e sur la dur&eacute;e (la position de Bergson) qui ne serait qu&rsquo;une construction, et voit dans l&rsquo;instant le caract&egrave;re vraiment sp&eacute;cifique du temps. Nous ne pouvons pas selon Bachelard avoir une exp&eacute;rience de la dur&eacute;e mais seulement d&rsquo;instants successifs. Par cons&eacute;quent, il pr&eacute;sente l&rsquo;esprit dans <em>L&rsquo;Intuition de l&rsquo;instant</em> (1932) comme &laquo;&nbsp;une file d&rsquo;instants nettement s&eacute;par&eacute;s&nbsp;&raquo;. Bachelard &eacute;voquera ult&eacute;rieurement une &laquo;&nbsp;conscience kal&eacute;idoscopique&nbsp;&raquo; qu&rsquo;il oppose &agrave; la conscience continue de Bergson. Selon sa conception, la conscience doit sans cesse conqu&eacute;rir son unit&eacute;. La r&ecirc;verie po&eacute;tique peut l&rsquo;y aider. C&rsquo;est notamment ce que la s&eacute;rie des <em>Po&eacute;tiques</em> va essayer de montrer.</p> <p><a href="#liennbp43" name="nbp43">43</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;34.</p> <p><a href="#liennbp44" name="nbp44">44</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;35.</p> <p><a href="#liennbp45" name="nbp45">45</a><em> Idem,</em> p.&nbsp;41.</p> <p><a href="#liennbp46" name="nbp46">46</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;35.</p> <p>47 <a href="#liennbp47a" name="nbp47a">a</a> <a href="#liennbp47b" name="nbp47b">b</a> <a href="#liennbp47c" name="nbp47c">c</a> <a href="#liennbp47d" name="nbp47d">d</a> <a href="#liennbp47e" name="nbp47e">e</a> <a href="#liennbp47f" name="nbp47f">f</a> <a href="#liennbp47g" name="nbp47g">g</a> <em>Ibidem.</em></p> <p><a href="#liennbp48" name="nbp48">48 </a><em>Idem</em>, p.&nbsp;41.</p> <p><a href="#liennbp49" name="nbp49">49</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;39.</p> <p><a href="#liennbp50" name="nbp50">50</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;24. Nous pr&eacute;cisons ici que Bachelard s&rsquo;oppose explicitement aux m&eacute;taphysiques de l&rsquo;&ecirc;tre &laquo;&nbsp;jet&eacute; au monde&nbsp;&raquo;. Pour celui-ci, la maison &laquo;&nbsp;est le premier monde de l&rsquo;&ecirc;tre humain. [&hellip;] La vie commence bien, elle commence enferm&eacute;e, prot&eacute;g&eacute;e, toute ti&egrave;de dans le giron de la maison.&nbsp;&raquo; Nous pourrions cependant nous interroger sur le fait que l&rsquo;enfance soit uniquement associ&eacute;e chez Bachelard &agrave; des souvenirs de protection comme si l&rsquo;enfance &eacute;tait exclusivement heureuse. Bachelard ne rejette pas les peurs d&rsquo;enfant li&eacute;es &agrave; l&rsquo;exp&eacute;rience de la maison. Elles sont m&ecirc;me &eacute;voqu&eacute;es dans certaines des images litt&eacute;raires qu&rsquo;il &eacute;tudie. Par exemple, les r&ecirc;veries dans la cave peuvent susciter l&rsquo;inqui&eacute;tude et l&rsquo;angoisse. Simplement, Bachelard a fix&eacute; un cadre d&rsquo;&eacute;tude &ndash; &laquo;&nbsp;les images de l&rsquo;<em>espace heureux</em>&nbsp;&raquo; &ndash; qu&rsquo;il entend respecter en laissant &laquo;&nbsp;&agrave; la psychanalyse le soin de gu&eacute;rir les enfances malmen&eacute;es.&nbsp;&raquo; Voir <em>Idem</em>, p.&nbsp;26&nbsp;; 17&nbsp;; 85.</p> <p><a href="#liennbp51" name="nbp51">51</a> Gaston Bachelard, <em>La Terre et les r&ecirc;veries du repos</em>, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;121.</p> <p><a href="#liennbp52" name="nbp52">52</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;118.</p> <p><a href="#liennbp53" name="nbp53">53</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;131.</p> <p><a href="#liennbp54" name="nbp54">54</a> Gaston Bachelard, <em>La Po&eacute;tique de l&rsquo;espace</em>, <em>op. cit</em>., p.&nbsp;46.</p> <p><a href="#liennbp55" name="nbp55">55</a> Nous reproduisons infra le second ermitage grav&eacute; par Flocon qui est repris dans l&rsquo;ouvrage Ch&acirc;teaux en Espagne. Nous ne poss&eacute;dons pas de reproduction de sa premi&egrave;re tentative (le bureau d&rsquo;architecte dont Flocon fait mention dans le texte que nous avons cit&eacute; dans notre introduction).</p> <p><a href="#liennbp56" name="nbp56">56</a> Gaston Bachelard, &laquo;&nbsp;Ch&acirc;teaux en Espagne&nbsp;&raquo;, <em>Le Droit de r&ecirc;ver</em>, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;111.</p> <p><a href="#liennbp57" name="nbp57">57 </a>Gaston Bachelard, <em>La Po&eacute;tique de l&rsquo;espace</em>, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;68.</p> <p><a href="#liennbp58" name="nbp58">58</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;69.</p> <p><a href="#liennbp59" name="nbp59">59</a> &laquo;&nbsp;L&rsquo;image ne peut &ecirc;tre &eacute;tudi&eacute;e que par l&rsquo;image, en r&ecirc;vant des images telles qu&rsquo;elles s&rsquo;assemblent dans la r&ecirc;verie&nbsp;&raquo;, Gaston Bachelard, <em>La Po&eacute;tique de la r&ecirc;verie</em>, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;46.</p> <p><a href="#liennbp60" name="nbp60">60</a> Gaston Bachelard, <em>La Po&eacute;tique de l&rsquo;espace</em>, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;52.</p> <p><a href="#liennbp61" name="nbp61">61</a> Gaston Bachelard, <em>La Terre et les r&ecirc;veries du repos</em>, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;115.</p> <p><a href="#liennbp62" name="nbp62">62</a> Gaston Bachelard, <em>L&rsquo;Eau et les R&ecirc;ves</em>, Paris, Le livre de Poche, coll. &laquo;&nbsp;Biblio essais&nbsp;&raquo;, 1942, p.&nbsp;15.</p> <p><a href="#liennbp63" name="nbp63">63</a> Auquel il d&eacute;die <em>La Flamme d&rsquo;une chandelle</em>.</p> <p><a href="#liennbp64" name="nbp64">64</a> Henri Bosco, Gaston Bachelard, &laquo;&nbsp;Correspondance 1957-1962&nbsp;&raquo;, in <em>Cahiers Henri Bosco</em>, 47/48, 2011/2012, p.&nbsp;44. Lettre &eacute;crite &agrave; Paris et dat&eacute;e du 13 avril 1961.</p> <p><a href="#liennbp65" name="nbp65">65</a> Gaston Bachelard, <em>L&rsquo;Air et les Songes</em>, Paris, Le livre de Poche, coll. &laquo;&nbsp;Biblio essais&nbsp;&raquo;, 1943, p.&nbsp;265.</p> <p><a href="#liennbp66" name="nbp66">66</a> Gaston Bachelard, <em>La Psychanalyse du feu</em>, Paris, Gallimard, coll. &laquo;&nbsp;Folio essais&nbsp;&raquo;, 1938, p.&nbsp;25.</p> <p><a href="#liennbp67" name="nbp67">67</a> &laquo;&nbsp;Foyer&nbsp;&raquo;, dans <em>Le Tr&eacute;sor de la Langue Fran&ccedil;aise informatis&eacute;</em>, [En ligne]. <a href="https://www.le-tresor-de-la-langue.fr/definition/foyer">https://www.le-tresor-de-la-langue.fr/definition/foyer</a>&nbsp;(consult&eacute; le 3 d&eacute;cembre 2018).</p> <p><a href="#liennbp68" name="nbp68">68 </a>Gaston Bachelard, <em>L&rsquo;Air et les Songes</em>, p.&nbsp;273.</p> <p><a href="#liennbp69" name="nbp69">69</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;264.</p> <p><a href="#liennbp70" name="nbp70">70</a><em> La Psychanalyse du feu</em> (1938) occupe une place singuli&egrave;re dans l&rsquo;&oelig;uvre de Bachelard. En effet, cet ouvrage se situe dans la continuit&eacute; de son &oelig;uvre &eacute;pist&eacute;mologique et pourtant il est d&eacute;sign&eacute; comme le premier ouvrage du <em>Cycle des &eacute;l&eacute;ments</em> d&eacute;di&eacute; &agrave; l&rsquo;&eacute;tude de l&rsquo;imagination. Bachelard annonce vouloir y montrer les dangers des r&ecirc;veries de l&rsquo;homme pensif devant son foyer pour une connaissance scientifique c&rsquo;est-&agrave;-dire objective de l&rsquo;&eacute;l&eacute;ment feu. Cependant on observe que le philosophe va commencer ponctuellement &agrave; s&rsquo;exprimer &agrave; la premi&egrave;re personne. Des r&ecirc;veries et des souvenirs personnels vont venir se m&ecirc;ler &agrave; cette production &agrave; vocation &eacute;pist&eacute;mologique comme si Bachelard se laissait prendre malgr&eacute; lui &agrave; la r&ecirc;verie. C&rsquo;est ce ph&eacute;nom&egrave;ne qui explique pourquoi ce livre a &eacute;t&eacute; r&eacute;pertori&eacute; <em>a posteriori</em> dans son &oelig;uvre po&eacute;tique.</p> <p><a href="#liennbp71" name="nbp71">71</a> Gaston Bachelard, <em>La Flamme d&rsquo;une chandelle</em>, Paris, PUF, Quadrige, 1961, p.&nbsp;10.</p> <p><a href="#liennbp72" name="nbp72">72</a> Gaston Bachelard, &laquo;&nbsp;Ch&acirc;teaux en Espagne&nbsp;&raquo;, <em>Le Droit de r&ecirc;ver</em>, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;112.</p> <p><a href="#liennbp73" name="nbp73">73</a> Gaston Bachelard, <em>La Po&eacute;tique de l&rsquo;espace</em>, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;68.</p> <p><a href="#liennbp74" name="nbp74">74</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;31.</p> <p><a href="#liennbp75" name="nbp75">75</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;60.</p> <p><a href="#liennbp76" name="nbp76">76</a> Gaston Bachelard, <em>La Terre et les r&ecirc;veries du repos</em>, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;110.</p> <p><a href="#liennbp77" name="nbp77">77</a> Albert Flocon, &laquo;&nbsp;Avec Bachelard&nbsp;&raquo;, <em>Points de fuite, 1933-1994, Tome II</em>, <em>op. cit</em>., p.&nbsp;190-191.</p> <p><a href="#liennbp78" name="nbp78">78</a> Gaston Bachelard, <em>La Po&eacute;tique de l&rsquo;espace</em>, <em>op. cit</em>., p.&nbsp;42.</p> <p><a href="#liennbp79" name="nbp79">79</a> Gaston Bachelard, <em>La Terre et les r&ecirc;veries du repos</em>, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;127.</p> <p><a href="#liennbp80" name="nbp80">80</a> Gaston Bachelard, <em>La Po&eacute;tique de l&rsquo;espace</em>, <em>op. cit</em>., p.&nbsp;42.</p> <p><a href="#liennbp81" name="nbp81">81</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;52.</p> <p><a href="#liennbp82" name="nbp82">82</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;43.</p> <p><a href="#liennbp83" name="nbp83">83</a> Gaston Bachelard, <em>La Flamme d&rsquo;une chandelle</em>, <em>op. cit</em>., p.&nbsp;19.</p> <p><a href="#liennbp84" name="nbp84">84 </a>Gaston Bachelard, <em>La Po&eacute;tique de l&rsquo;espace</em>, <em>op. cit</em>., p.&nbsp;59.</p> <p><a href="#liennbp85" name="nbp85">85</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;105.</p> <p><a href="#liennbp86" name="nbp86">86</a> Albert Flocon, <em>Sc&eacute;nographies au Bauhaus, Dessau 1927-1930</em>, Paris, Klincksieck &ndash; Archimbaud, 1987, p.&nbsp;11.</p> <p><a href="#liennbp87" name="nbp87">87</a> Albert Flocon, &laquo;&nbsp;Rationalismes&nbsp;&raquo;, <em>Points de fuite, 1909-1933, Tome I</em>, Neuch&acirc;tel, Ides et Calendes, coll. &laquo;&nbsp;La biblioth&egrave;que des arts&nbsp;&raquo;, p.&nbsp;178.</p> <p><a href="#liennbp88" name="nbp88">88</a> Albert Flocon, <em>Sc&eacute;nographies au Bauhaus, Dessau 1927-1930,</em> <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;138.</p> <p><a href="#liennbp89" name="nbp89">89</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;140. Flocon oppose le mod&egrave;le onirique au r&eacute;alisme photographique.</p> <p><a href="#liennbp90" name="nbp90">90</a> Albert Flocon, &laquo;&nbsp;Le philosophe et le graveur&nbsp;&raquo;, dans Gouhier Henri et Ren&eacute; Poirier (dir.), <em>Bachelard, Colloque de Cerisy</em>, Paris, Union G&eacute;n&eacute;rale d&rsquo;Editions, 1974, p.&nbsp;276-277.</p> <p><a href="#liennbp91" name="nbp91">91 </a>Gaston Bachelard (citant Baudelaire), <em>La Po&eacute;tique de l&rsquo;espace</em>, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;44.</p> <p><a href="#liennbp92" name="nbp92">92</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;45-46.</p> <p><a href="#liennbp93" name="nbp93">93</a><em> Idem</em>, p.&nbsp;46.</p> <p><a href="#liennbp94" name="nbp94">94 </a>Gaston Bachelard, <em>La Po&eacute;tique de la r&ecirc;verie</em>, <em>op. cit.</em>, p.&nbsp;20.</p>