<p align="right" style="text-align:right"><span style="font-size:11pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:10.0pt"><q> […] de toutes les misères qu’on peut voir à Stamboul, il n’y en a point dont la vue puisse affliger davantage l’Européen. </q>(Joseph Michaud</span></span></span><a href="#_ftn1" id="_ftnref1" name="_ftnref1">1</a>])</p>
<p style="text-align:justify"> </p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Pèlerins, scientifiques, artistes, et enfin « touristes<i> »</i>, ont fait, au fil des siècles, de la visite du « marché des esclaves</span></span></span><a href="#_ftn2" id="_ftnref2" name="_ftnref2">2</a> <span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">» ou « bazar des esclaves</span></span></span><a href="#_ftn3" id="_ftnref3" name="_ftnref3">3</a><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"> » un incontournable du voyage en Orient. Dans le contexte plus particulier d’un XIX<sup>e</sup> siècle où l’<i>ailleurs </i>et l’<i>autre </i>font le double objet d’une fascination et d’une répulsion, elle s’est établie au rang des « curiosités</span></span></span><a href="#_ftn4" id="_ftnref4" name="_ftnref4">4</a><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"> ». Curiosité de voyageur, mais également curiosité de lecteur : inséré par le comte de Forbin dans son <i>Voyage dans le Levant </i>(1819), repris par Marie-Théodore Renoüard de Bussierre dans ses <i>Lettres sur l’Orient </i>(1829) ou encore par Joseph Michaud dans sa <i>Correspondance d’Orient </i>(1833), cet épisode s’est intégré à l’horizon d’attente du récit de voyage. Progressivement, celui-ci a fait l’objet d’une séquence autonome, complète et codifiée, dont les <i>Voyage en Orient </i>de Lamartine (1835) et de Nerval (1851) offrent les exemples les plus aboutis. </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Vêtu à la turque et accompagné par un guide, Lamartine visite le marché aux esclaves de Constantinople en mai 1833, par simple curiosité de voyageur. La loi du 4 mars 1831 sur l’abolition de la traite négrière au sein de l’Empire colonial entérine la condamnation morale de l’esclavage qui tend à se généraliser dans la société française. C’est Lamartine lui-même qui signera le décret d’abolition de l’esclavage du 27 avril 1848. Seulement deux années plus tôt, en juillet 1846, Nerval fait paraître, dans la <i>Revue des Deux Mondes</i>, le chapitre « Les Esclaves</span></span></span><a href="#_ftn5" id="_ftnref5" name="_ftnref5">5</a><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"> » de son futur <i>Voyage en Orient. </i>Gérard, narrateur fictif que s’est créé Nerval, se rend au bazar des esclaves du Caire pour acheter une « esclave-épouse », condition indispensable pour qu’il puisse continuer à habiter en ville. Lorsque Nerval publie son récit de voyage, en 1851, le combat contre l’esclavage est arrivé à son terme. C’est en effet à partir de 1847 que les marchés aux esclaves sont interdits par les autorités ottomanes et égyptiennes, sous l’influence des mouvements abolitionnistes européens. Les bazars de Constantinople et du Caire étaient des espaces de transits importants pour la traite orientale, organisée sur la base d’un esclavage « multiethnique » et « multicouleur</span></span></span><a href="#_ftn6" id="_ftnref6" name="_ftnref6">6</a><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"> ». Des esclaves venus d’Europe méditerranéenne, d’Afrique subsaharienne et des régions du Caucase y étaient vendus pour alimenter les harems ou servir les maisonnées. En Égypte comme dans la capitale de l’Empire ottoman, les voyageurs européens découvrent ces quartiers où les esclaves, regroupés selon leur sexe, leur origine et leur couleur de peau, sont exposés à la vente. Les marchés aux esclaves, lieu de convergence des « races », sont organisés selon les logiques de classification et de hiérarchisation racialistes en voie de développement en Europe. Les esclaves, notamment femmes, offrent aux voyageurs un aperçu de la diversité de « types », qui sont classés sur une échelle de valeurs proprement occidentale. Alors que les « Négresses du Sennaar », taxées de « jolis monstres » par Nerval, sont « l’espèce la plus éloignée du type de la beauté convenue parmi nous » (p. 221), Lamartine considère les Circassiennes, pour leur blancheur de peau et la délicatesse de leurs traits, comme l’incarnation d’une « beauté accomplie » (p. 730). </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Ce mode de hiérarchisation esthétique et idéologique, qui réunit voyageurs occidentaux et marchands orientaux, se heurte pourtant à la question épineuse de l’esclavage. Si l’organisation du marché aux esclaves répond à une logique proprement occidentale, la pratique de l’esclavage en Orient permet aux voyageurs européens de revendiquer une forme de supériorité « civilisationnelle ». Dans le double contexte abolitionniste et colonialiste des années 1830-1850, la publication d’un tel épisode exigeait de la part du voyageur occidental une réaction nécessairement engagée, dont la charge est tout autant littéraire que politique ou idéologique. Une telle situation de voyage et d’écriture place le voyageur face à son lecteur et à lui-même : ses émotions, son engagement, voire sa propre identité.</span></span></span></p>
<p align="center" style="text-align:center"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><img alt="tableau d'Horace Vernet représentant un marché aux esclaves" data-entity-type="file" data-entity-uuid="c1f5f3a1-fa02-4e67-8064-a711962fd1b3" src="https://www.alepreuve.org/sites/default/files/inline-images/Zeghdani_1.jpg" style="width:377px; height:441px" /></span></span></span></p>
<p align="center" style="text-align:center"><span style="font-size:11pt"><span arial="" style="font-family:">Fig. 1 : <i>Le Marché d’esclaves</i>, Horace Vernet, 1836, huile sur toile (65x54 cm), Alte Nationalgalerie, Berlin</span></span></p>
<p style="text-align:justify"> </p>
<h2 style="text-align: justify;"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><b>Machine touristique, intertextualité et « sensationnalisme » littéraire </b></span></span></span></h2>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">La visite du marché aux esclaves s’est imposée comme un passage obligatoire, tant dans le cadre du voyage que dans celui de son écriture, le motif fonctionnant ainsi comme un véritable palimpseste<i>. </i>Roger Botte déclare avoir rassemblé plus de 103 textes de voyageurs européens ou américains ayant visité le marché aux esclaves entre le VII<sup>e</sup> siècle et 1850</span></span></span><a href="#_ftn7" id="_ftnref7" name="_ftnref7">7</a>.<span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"> Il attribue le premier récit européen faisant état d’une vente d’esclaves noirs au Caire en 1171-1172 au rabbin navarrais Benjamin de Tudèle. Comptée au titre des curiosités<i>, </i>la visite du marché aux esclaves au XIX<sup>e</sup> siècle est à remettre dans le contexte du développement du tourisme, notamment sous l’influence des premiers guides de voyage, qui, à partir des années 1830, identifient des lieux incontournables<i>. </i>Au fil des textes, la visite du marché aux esclaves semble répondre à un véritable « protocole », qui lui donne tous les airs d’une attraction touristique. </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Dès l’entrée dans le bazar, l’effet pittoresque est garanti par l’impression donnée au voyageur (et par-là même au lecteur) qu’il vit l’expérience privilégiée d’une immersion totale. Pour cette visite, l’Européen est accompagné d’un guide, initiateur, interprète et parfois négociateur : Lamartine est conduit au bazar des esclaves par un « jeune homme de Constantinople » et Gérard par son drogman Abdallah. Le « laissez-passer » est également obtenu, dans le cas de Lamartine, par le travestissement : il est « revêtu » du « costume turc », de telle manière qu’il passe pour « un Arabe ou un Égyptien » (p. 725). Cette « couverture » est également celle adoptée par le comte de Forbin, dans son <i>Voyage dans le Levant, </i>qui, traversant le bazar, dit être pris pour « Osmanli Châh, ou Turc du nord</span></span></span><a href="#_ftn8" id="_ftnref8" name="_ftnref8">8</a> <span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">». Symboliquement, le marché aux esclaves est un lieu difficile d’accès : sa découverte est précédée d’un parcours périlleux à travers le labyrinthe des rues bondées de Stamboul et du Caire. </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">La suite de l’épisode est construite sur une matrice narrative qui suit la « promenade » des voyageurs (Lamartine utilise, p. 726, le gérondif « en se promenant »)<i>. </i>Ils découvrent les différentes « chambres » dans lesquelles sont exposés<i> </i>les esclaves. Une telle déambulation place les voyageurs en posture de spectateurs : le récit déploie toute une isotopie de l’exhibition, qui lui donne des airs de musée ou encore de magasin. Lamartine recourt à une comparaison animale qui fait écho aux scènes de marché dans les campagnes françaises. Elle rappelle également la pratique des zoos humains en France à la même périod</span></span></span>e<a href="#_ftn9" id="_ftnref9" name="_ftnref9">9</a> <span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">: </span></span></span></p>
<p class="Cit" style="margin-right: 56px; text-align: justify;"><q><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span arial="" style="font-family:"> Assises sur leurs talons, immobiles, la tête appuyée sur le revers de leur main ou sur le genou, elles nous regardaient d’un œil aussi doux et aussi triste que l’œil de la chèvre ou de l’agneau que la paysanne tient par la corde et marchande à la foire de nos villages […]. (p. 727) </span></span></span></span></q></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Par ailleurs, le spectacle de « ce honteux commerce » (Lamartine, p. 730) se manifeste, dans les deux textes, par l’insertion d’une même micro-scène larmoyante et pathétique, mobilisant le motif universel de la <i>mater dolorosa. </i>Une femme portant son enfant apparaît au centre du marché : « Elle tenait le visage baissé et pleurait […]. » (Lamartine, p. 728) ; « […] une autre femme cependant, drapée dans une couverture jaune, pleurait en cachant son visage contre une colonne du vestibule. » (Nerval, p. 240). Lamartine et Gérard, touchés par cette scène (et anticipant ainsi la réaction de leurs lecteurs), ont tous deux l’honorable velléité d’acheter cette esclave avec son enfant : </span></span></span></p>
<p class="Cit" style="margin-right: 56px; text-align: justify;"><q><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span style="tab-stops:70.9pt 411.1pt"><span arial="" style="font-family:"><span arial="" style="font-family:"> […] touché de son infortune, je priai M. Morlach, mon obligeant conducteur, de l’acheter avec l’enfant pour mon compte. Je les aurais emmenés ensemble, et j’aurais élevé le bel enfant en le laissant auprès de la mère. (Lamartine, p. 728) </span></span></span></span></span></q></p>
<p class="Cit" style="margin-right: 56px; text-align: justify;"><q><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span style="tab-stops:70.9pt 411.1pt"><span arial="" style="font-family:"><span arial="" style="font-family:"> Quoi qu’on fasse pour accepter la vie orientale, on se sent Français… et sensible dans de pareils moments. J’eus un instant l’idée de la racheter si je pouvais, et de lui donner la liberté. (Nerval, p. 241) </span></span></span></span></span></q></p>
<p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Prenant une part active au spectacle,<i> </i>les deux voyageurs se créent un véritable <i>ethos </i>de bon Samaritain. Ce motif apparaissait déjà dans la <i>Correspondance d’Orient </i>de Joseph Michaud, où un geste d’affranchissement symbolique permettait aux visiteurs de se détacher de leur sentiment de culpabilité : </span></span></span></span></span></span></p>
<p class="Cit" style="margin-right: 56px; text-align: justify;"><q><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span style="tab-stops:70.9pt"><span arial="" style="font-family:"><span arial="" style="font-family:"> […] à la porte du bazar des esclaves, on expose, dans des cages, des oiseaux que les passants achètent pour les délivrer de leur prison ; j’ai acheté quelques-uns de ces oiseaux, qu’on appelle <i>azad couchry, </i>et je leur ai rendu la liberté en présence de la foule qui criait : <i>pekei, pekei </i>! très-bien, très-bien ! Vous voyez qu’au lieu même où l’humanité semble bannie de tous les cœurs, on court après son i</span></span></span></span></span>mage<a href="#_ftn10" id="_ftnref10" name="_ftnref10">10</a>. </q></p>
<p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Ce jeu d’acteur (Michaud ne manque pas de souligner une certaine forme d’hypocrisie) apparaît également dans le motif du don de quelques piastres aux esclaves, répondant au devoir de charité du bon chrétien. </span></span></span></span></span></span></p>
<p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Cette nécessité de prôner des valeurs qui rappellent aux voyageurs leur identité se manifeste également dans l’usage du discours.<i> </i>La visite du marché aux esclaves se présente en effet sous la forme d’une<i> </i>séquence construite sur une alternance entre récit et discours : quand l’horreur et la barbarie sont à leur paroxysme, le narrateur se doit de prendre la parole, en son propre nom. On trouve dans les textes une même rhétorique lyrique et pathétique, laissant éclater la sensibilité du voyageur européen. Si Lamartine est très éloquent, exprimant ainsi, à la sortie du bazar, son désarroi : « Nous sortîmes le cœur flétri et les yeux humides de cette scène, qui se renouvelle tous les jours et à toutes les heures dans les villes de l’Orient » (p. 730), Nerval reprend ce langage du cœur avec plus de réserve, mais non moins de poésie : « La morne sérénité du ciel et les lumineuses broderies que traçaient les rayons du soleil jetant de longs angles dans la cour protestaient en vain contre cet éloquent désespoir ; je m’en sentais le cœur navré. » (p. 240). De tels passages, programmés par un horizon d’attente à la fois littéraire et moral, semblent directement adressés au lecteur européen, garantissant à l’épisode sa part de sensationnalisme. Paru en premier lieu dans la <i>Revue des Deux Mondes </i>le 1<sup>er</sup> juillet 1846, sous le titre « Les Femmes du Caire – Scènes de la vie égyptienne – Les Esclaves », il fait résonner l’actualité brûlante d’un abolitionnisme triomphant. Le discours général sur l’esclavage fait donc partie des invariants d’un <i>topos </i>que les deux voyageurs traitent avec plus ou moins de distance. </span></span></span></span></span></span></p>
<h2 style="text-align: justify;"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><b>« Ce bazar, où l’on vend la vie, […] comme nous vendons le bœuf ou le cheval</b></span></span></span><a href="#_ftn11" id="_ftnref11" name="_ftnref11">11</a><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><b> » : esclavagisme et eurocentrisme en question </b></span></span></span></h2>
<p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">La plupart des écrivains-voyageurs de la première moitié du XIX<sup>e</sup> siècle reprennent le discours abolitionniste des penseurs des Lumières</span></span></span></span></span></span><a href="#_ftn12" id="_ftnref12" name="_ftnref12">12</a><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"> : à l’occasion de leur visite du marché aux esclaves, de Bussierre, Forbin ou encore Michaud, expriment leur positionnement en faveur de la liberté. Claude Pichois évoque, dans les notes de son édition du <i>Voyage en Orient </i>de Nerval<i>, </i>« la notion de responsabilité morale</span></span></span></span></span></span><a href="#_ftn13" id="_ftnref13" name="_ftnref13">13</a><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"> ». </span></span></span></span></span></span></p>
<p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Le positionnement de Lamartine est univoque à ce sujet et le récit de voyage porte les germes de son engagement politique et idéologique. Deux séquences discursives, placées stratégiquement au début et à la fin de l’épisode, annoncent en effet le discours sur l’émancipation des esclaves qu’il prononcera à la Chambre le 22 avril 1835 ; le propos est déjà enflammé, le ton emphatique et les convictions profondes : </span></span></span></span></span></span></p>
<p class="Cit" style="margin-right: 56px; text-align: justify;"><q><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span style="tab-stops:70.9pt 411.1pt"><span arial="" style="font-family:"><span arial="" style="font-family:"> Combien il a fallu de temps et de révélations successives à la raison de l’homme, pour que la force ait cessé d’être un droit à ses yeux, et pour que l’esclavage soit devenu un crime et un blasphème à son intelligence ! Quel progrès ! et combien n’en promet-il pas ! Qu’il y a de choses dont nous ne sommes pas choqués, et qui seront des crimes incompréhensibles aux yeux de nos descendants ! Je pensais à cela en entrant dans ce bazar où l’on vend la vie, l’âme, le corps, la liberté d’autrui, comme nous vendons le bœuf ou le cheval, et où l’on se croit légitime possesseur de ce qu’on a acheté ainsi ! Que de légitimités de ce genre dont nous ne nous rendons pas compte ! Elles le sont cependant, car on ne peut pas demander à l’homme plus qu’il ne sait. Ses convictions sont ses vérités ; il n’en possède pas d’autres. Dieu seul les a toutes à lui, et nous les distribue à proportion et à mesure de nos intelligences progressives. (p. 726) </span></span></span></span></span></q></p>
<p class="Cit" style="margin-right: 56px; text-align: justify;"><q><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span style="tab-stops:70.9pt 411.1pt"><span arial="" style="font-family:"><span arial="" style="font-family:"> Nous sortîmes le cœur flétri et les yeux humides de cette scène, qui se renouvelle tous les jours et à toutes les heures dans les villes de l’Orient, et nous revînmes pensifs au bazar de Stamboul. Voilà ce que c’est que les législations immobiles ! Elles consacrent les barbaries séculaires, et donnent le droit d’antiquité et de légitimité à tous les crimes. Les fanatiques du passé sont aussi coupables et aussi funestes à l’humanité que les fanatiques de l’avenir. Les uns immolent l’homme à leurs ignorances et à leurs souvenirs ; les autres à leurs espérances et à leur précipitation. Si l’homme faisait, pensait, croyait ce que faisaient et croyaient ses pères, le genre humain tout entier en serait au fétichisme et à l’esclavage. La raison est le soleil de l’humanité : c’est l’infaillible et perpétuelle révélation des lois divines, applicable aux sociétés. Il faut marcher pour la suivre, sous peine de demeurer dans le mal et dans les ténèbres ; mais il ne faut pas la devancer, sous peine de tomber dans des précipices. Comprendre le passé sans le regretter ; tolérer le présent en l’améliorant ; espérer l’avenir en le préparant : voilà la loi des hommes sages et des institutions bienfaisantes. Le péché contre l’Esprit-Saint, c’est ce combat de certains hommes contre l’amélioration des choses ; c’est cet effort égoïste et stupide pour rappeler toujours en arrière le monde moral et social, que Dieu et la nature poussent toujours en avant : le passé est le sépulcre de l’humanité écroulée ; il faut le respecter, mais il ne faut pas s’y enfermer et vouloir y vivre. (p. 730) </span></span></span></span></span></q></p>
<p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Dans le contexte d’une France post-révolutionnaire, Lamartine construit sa critique de l’esclavage sur une apologie du progrès : la prise en compte de la nature criminelle et immorale de l’esclavage est le produit d’une longue marche vers le triomphe de la raison. Certains hommes ont été « choisis » par Dieu pour recevoir les lumières de l’intelligence et de l’esprit (l’Occident). L’immobilisme des autres (Orient) explique l’enracinement de pratiques telles que l’esclavage et leur aveuglement à l’égard de sa nature barbare et immorale. Une telle réflexion démontre par ailleurs à quel point le discours abolitionniste est lié à un engagement précolonial : l’Occident, fort de ses lumières et de sa propension naturelle au progrès, s’arroge une mission civilisatrice envers l’Orient. </span></span></span></span></span></span></p>
<p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Nerval ne peut se dispenser de faire mention du discours dominant sur l’esclavage. Gérard confie lui-même, lors d’une précédente discussion avec le consul de France, être « encore tout rempli des préjugés de l’Europe » (p. 212). Par des allusions flagrantes à son hypotexte, le narrateur reconnaît l’emprise d’un déterminisme moral et idéologique qui éclatera lorsque, face à son épouse-esclave, il sera rattrapé par ses propres principes moraux et rongé de l’intérieur par sa bonne conscience. Néanmoins, le dispositif complexe sur lequel repose le récit de voyage de Nerval (recours à un narrateur fictif qui légitime une certaine prise de distance à l’égard de la réalité du voyage) autorise ce que Sarga Moussa appelle une « pluralité des discours</span></span></span></span></span></span><a href="#_ftn14" id="_ftnref14" name="_ftnref14">14</a><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"> ». À plusieurs reprises, Gérard se détache du discours abolitionniste dominant, revendiquant une ouverture plus authentique et tolérante à la culture orientale : </span></span></span></span></span></span></p>
<p class="Cit" style="margin-right: 56px; text-align: justify;"><q><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span style="tab-stops:70.9pt"><span arial="" style="font-family:"><span arial="" style="font-family:"> Il faut vivre un peu en Orient pour s’apercevoir que l’esclavage n’est là en principe qu’une sorte d’adoption. La condition de l’esclave y est certainement meilleure que celle du fellah ou du rayah libres. Je comprenais déjà en outre, d’après ce que j’avais appris sur les mariages, qu’il n’y avait pas grande différence entre l’Égyptienne vendue par ses parents et l’Abyssienne exposée au bazar. […] l’esclave mécontent d’un maître peut toujours le contraindre à le faire revendre au bazar. Ce détail est un de ceux qui expliquent le mieux la douceur de l’esclavage en Orient. (p. 213) </span></span></span></span></span></q></p>
<p class="Cit" style="margin-right: 56px; text-align: justify;"><q><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span style="tab-stops:70.9pt"><span arial="" style="font-family:"><span arial="" style="font-family:"> Ainsi la seule esclave qui pleurait là pleurait à la pensée de perdre son maître ; les autres ne paraissaient s’inquiéter que de la crainte de rester trop longtemps sans en trouver. Voilà qui parle, certes, en faveur du caractère des musulmans. Comparez à cela le sort des esclaves dans les pays américains ! Il est vrai qu’en Égypte, c’est le fellah seul qui travaille à la terre. On ménage les forces de l’esclave, qui coûte cher, et on ne l’occupe guère qu’à des services domestiques. Voilà l’immense différence qui existe entre l’esclave des pays turcs et celui des pays chrétiens. (p. 241) </span></span></span></span></span></q></p>
<p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Ce discours décentré<i> </i>apparaissait déjà chez Michaud dont le regard porté sur les marchés aux esclaves turcs et égyptiens avait une valeur presque ethnographique : s’intéressant au fonctionnement interne de l’esclavage dans les sociétés orientales (conditions de vie des esclaves, éducation, possibilité d’affranchissement ou d’élévation sociale…), il en venait à la conclusion que « la servitude » n’était « insupportable que pour les chrétiens</span></span></span></span></span></span><a href="#_ftn15" id="_ftnref15" name="_ftnref15">15</a><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"> ». En déplaçant son point de vue, le voyageur qui se prête à l’immersion découvre en effet l’esclavage oriental, tel qu’il est réglé par la loi sainte. Le Coran autorise l’institution de l’esclavage, mais rappelle que l’esclave est un être humain, qui doit, dès lors, être traité convenablement. L’esclave possède un statut religieux et social, ainsi que certains droits et avantages, de même que les maîtres ont des devoirs envers leurs esclaves</span></span></span></span></span></span><a href="#_ftn16" id="_ftnref16" name="_ftnref16">16</a><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">. Bien qu’il témoigne d’une ouverture d’esprit et d’un intérêt sincère pour l’<i>autre, </i>un tel discours est une nécessité pour Gérard : il ne peut continuer à louer le logement qu’il occupe au Caire s’il vit seul, c’est-à-dire sans épouse ou sans esclave. Dans un souci d’économie, il préfère l’esclavage au mariage : </span></span></span></span></span></span></p>
<p class="Cit" style="margin-right: 56px; text-align: justify;"><q><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span style="tab-stops:70.9pt"><span arial="" style="font-family:"><span arial="" style="font-family:"> Moi, je veux tenter un projet que je crois meilleur. J’achèterai une esclave, puisqu’aussi bien il me faut une femme, et j’arriverai peu à peu à remplacer par elle le drogman, le barbarin peut-être, et à faire mes comptes clairement avec le cuisinier. […] il est clair que j’atteins un but d’économie. En me mariant, j’eusse fait le contraire. (p. 220) </span></span></span></span></span></q></p>
<p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Bien que cet épisode soit légèrement fictionnalisé (en réalité, ce n’est pas Nerval, mais Joseph de Fonfride, son compagnon de voyage, qui avait fait l’acquisition d’une esclave), il fait écho à une pratique répandue au début du XIX<sup>e</sup> siècle. Selon Roger Botte, la plupart des Européens résidant en Égypte achetaient, par l’intermédiaire d’un musulman, des esclaves pour en faire des domestiques, des concubines, ou parfois même des épouses. Il pointe du doigt cet « aspect ignoré, insolite et troublant de l’orientalisme</span></span></span></span></span></span><a href="#_ftn17" id="_ftnref17" name="_ftnref17">17</a><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"> ». La posture de Nerval à l’égard de l’esclavage est ainsi ambiguë : tente-t-il de légitimer son propre recours à l’esclavage pour anticiper la réception critique de son texte ? Son désir d’immersion est-il, au contraire, motivé par un altruisme curieux et tolérant ? Quoi qu’il en soit, il revendique une posture décalée par rapport au discours européen dominant, qui tranche avec le positionnement unilatéral de Lamartine dans les années 1830. </span></span></span></span></span></span></p>
<p class="Cit" style="text-align:justify"> </p>
<h2 style="text-align: justify;"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><b>Au-delà, le racialisme : entre savoir anthropologique et implications idéologiques </b></span></span></span></h2>
<p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">La visite de ce « magasin d’hommes et de femmes » (Lamartine, p. 727) soulève des questionnements anthropologiques et idéologiques qui dépassent les enjeux d’un engagement circonstanciel. À Constantinople comme au Caire, les marchés aux esclaves sont de véritables lieux d’exposition des races.<i> </i>Ils offrent aux voyageurs un aperçu de la diversité de types, définis à partir de critères précis. Le sexe, l’origine et la couleur de peau permettent de les classer sur une échelle de valeur déterminant leur prix de vente. Cette classification raciale est établie par les marchands orientaux eux-mêmes selon une véritable stratégie de <i>marketing</i> : sont successivement proposées aux voyageurs les « négresses » (en provenance de Nubie), les « Abyssiniennes » (en provenance d’Éthiopie) et les « Circassiennes » (en provenance du nord-ouest du Caucase). La progression spatiale dans le marché suit ainsi un mouvement ascensionnel dont la logique est également tarifaire : alors que les négresses sont directement exposées dans des « chambres » à l’entrée du bazar, les Circassiennes sont préservées dans des lieux dont l’accès est restreint. À l’égard du prix, Lamartine donne les précisions suivantes : « Le prix de ces belles créatures va jusqu’à douze ou vingt mille piastres (de trois à cinq mille francs), tandis que les esclaves noires d’une beauté ordinaire ne se vendent que cinq ou six cents francs, et les plus belles mille à douze cents. » (p. 730).</span></span></span> <span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Ces logiques de classification et de hiérarchisation des races sont à remettre dans le contexte des théories racialistes en voie de développement sous l’influence de penseurs européens tels que le docteur Julien Joseph Virey dans son <i>Histoire naturelle du genre humain </i>(1800), ou plus tard Gobineau dans son <i>Essai sur l’inégalité des races humaines </i>(1853-1855). En Europe au XIX<sup>e</sup> siècle, le débat sur l’origine de l’humanité fait encore rage : le monogénisme est remis en question par une conception polygéniste fondée sur l’idée selon laquelle il existerait plusieurs espèces<i> </i>humaines, distinguées notamment par la couleur de peau, mais également par l’angle facial : plus ce dernier est aigu, plus l’homme se rapprocherait du singe. Les critères esthétiques sont associés à une échelle de civilisation, dans laquelle les « races primitives » (p. 243) sont animalisées, bestialisées. Au centre de l’épisode, Gérard propose l’« examen » rapide d’un groupe de négresses « aux airs sauvages fort curieux ». Surpris, voire « écœuré »<i>, </i>par leur chevelure épaisse et graisseuse, ainsi que par leurs corps noirs tatoués et incisés, il les situe aux frontières mêmes de l’humanité et mobilise la comparaison avec le singe : </span></span></span></span></span></span></p>
<p class="Cit" style="margin-right: 56px; text-align: justify;"><q><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span style="tab-stops:70.9pt"><span arial="" style="font-family:"><span arial="" style="font-family:"> À voir ces formes malheureuses, qu’il faut bien s’avouer humaines, on se reproche philanthropiquement d’avoir pu quelquefois manquer d’égards pour le singe, ce parent méconnu que notre orgueil de race s’obstine à repousser. Les gestes et les attitudes ajoutaient encore à ce rapprochement, et je remarquai même que leur pied, allongé et développé sans doute par l’habitude de monter aux arbres, se rattachait sensiblement à la famille des quadrumanes. (p. 224) </span></span></span></span></span></q></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Ces critères sont déterminants dans le choix de l’esclave, le futur propriétaire allant jusqu’à réclamer une « teinte noire moins prononcée » (p. 222). Se conformant aux canons esthétiques occidentaux, il mène une véritable « quête de la blancheur » dans ce marché qui « offr[e] toutes les nuances possibles de couleur et de forme » (p. 220). Par ailleurs, la perfection artistique semble également s’être nichée dans la délicatesse des traits, se référant ainsi à l’idéal antique de la statuaire : </span></span></span></p>
<p class="Cit" style="margin-right: 56px; text-align: justify;"><q><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span style="tab-stops:70.9pt"><span arial="" style="font-family:"><span arial="" style="font-family:"> Dans une grande salle aux lambris sculptés qu’enrichissaient encore des restes d’arabesques peintes et dorées, je vis rangées contre le mur cinq femmes assez belles, dont le teint rappelait l’éclat du bronze de Florence ; leurs figures étaient régulières, leur nez droit, leur bouche petite ; l’ovale parfait de leur tête, l’emmanchement gracieux de leur col, la sérénité de leur physionomie leur donnaient l’air de ces madones peintes d’Italie donc la couleur a jauni par le temps. C’étaient des Abyssiennes catholiques, des descendantes peut-être du prêtre Jean ou de la reine Candace. (p. 243) </span></span></span></span></span></q></p>
<p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Lamartine, ayant lui aussi recours à la comparaison, invoquait déjà cette beauté antique : </span></span></span></span></span></span></p>
<p class="Cit" style="margin-right: 56px; text-indent: -0.05pt; text-align: justify;"><q><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span style="tab-stops:70.9pt"><span arial="" style="font-family:"><span arial="" style="font-family:"> Le plus remarquable était une troupe de jeunes filles d’Abyssinie, au nombre de douze ou quinze ; adossées les unes aux autres comme ces figures antiques de cariatides qui soutiennent un vase sur leurs têtes […]. Ces visages étaient en général d’une grande beauté : les yeux en amande, le nez aquilin, les lèvres minces, le contour ovale et délicat des joues, les longs cheveux noirs luisants comme des ailes de corbeaux. (p. 726-727) </span></span></span></span></span></q></p>
<p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Alors que Gérard semble se détacher difficilement de ses propres repères, confondant sa quête du Féminin dans une éternelle quête du <i>même, </i>Lamartine, moins influencé par les théories racialistes encore en gestation, valorise l’authenticité et le pittoresque : </span></span></span></span></span></span></p>
<p class="Cit" style="margin-right: 56px; text-align: justify;"><q><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span style="tab-stops:70.9pt"><span arial="" style="font-family:"><span arial="" style="font-family:"> Une de ces Géorgiennes était d’une beauté accomplie : les traits délicats et sensibles, l’œil doux et pensif, la peau d’une blancheur et d’un éclat admirables. Mais la physionomie des femmes de ce pays est loin du charme et de la pureté de celles des Arabes : on sent trop le Nord dans ces figures. (p. 730) </span></span></span></span></span></q></p>
<p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Poursuivant sa quête incessante d’une beauté absolue et « pure », Lamartine préfigure ici la posture décentrée, antimoderniste et primitiviste d’un Théophile Gautier</span></span></span></span></span></span><a href="#_ftn18" id="_ftnref18" name="_ftnref18">18</a><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">. </span></span></span></span></span></span></p>
<p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Dans son rapport au discours dominant, le texte de Nerval semble néanmoins plus complexe : son fonctionnement polyphonique invite à dépasser un premier niveau de lecture qui consisterait à identifier dans cet épisode les «</span></span></span> <span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">premières manifestations d’[un] racisme littéraire » dont Nerval serait, selon Roger Botte, « le précurseur en France</span></span></span></span></span></span><a href="#_ftn19" id="_ftnref19" name="_ftnref19">19</a> <span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">». Conscient de ses implications idéologiques, Nerval semble utiliser la notion de race pour imposer, <i>a contrario, </i>sa posture décalée et décentrée. Contre toute attente (lui-même évoque son « goût de l’étrange et de l’imprévu »), il choisit d’acheter une esclave javanaise, appartenant à « la race jaune ». Par ce geste, il refuse toute position extrême qui consisterait à choisir entre le noir (acheter une négresse) et le blanc (acheter une circassienne). Selon Sarga Moussa, ce choix révèle le refus d’un « exotisme de la pureté ethnique », au profit d’une « anthropologie imaginaire fondée sur l’idée de mélang</span></span></span></span></span></span>e<a href="#_ftn20" id="_ftnref20" name="_ftnref20">20</a><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"> ». La confrontation des positionnements racialistes respectifs de Lamartine et de Nerval révèle une divergence de postures (entre métissage et primitivisme) manifestant une volonté commune de se détacher du discours dominant. </span></span></span></span></span></span></p>
<p class="Cit" style="text-align:justify"> </p>
<p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">La visite du marché aux esclaves répond ainsi, dans la première moitié du XIX<sup>e</sup> siècle, à un certain nombre de conventions. Malgré l’aversion pour les touristes que les voyageurs romantiques expriment à l’unisson, les récits de voyage, et plus tardivement les guides, ont fait de ce lieu un espace et une attraction touristique, au même titre que l’excursion dans les pyramides de Gizeh. Cette curieuse fascination pour un lieu où l’on « trafiqu[e] la chair humain</span></span></span></span></span></span>e<a href="#_ftn21" id="_ftnref21" name="_ftnref21">21</a> <span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">» est tant bien que mal rattrapée par les impératifs moraux et politiques qui déterminent le discours du voyageur dans un contexte majoritairement abolitionniste. Si cet aspect « convenu » se manifeste au niveau du <i>contexte, </i>il faut également prendre en compte le <i>cotexte : </i>chaque texte repose sur des effets de reprise et des jeux de variation. En tant que dispositif littéraire, le récit de voyage autorise la distanciation et la polyphonie. Ainsi l’écrivain-voyageur peut-il se détacher des conventions littéraires, morales et politiques pour ouvrir la voie à un discours plus tolérant et altruiste qui pourrait porter les germes d’un journalisme ethnographique à la Kesse</span></span></span></span></span></span>l<a href="#_ftn22" id="_ftnref22" name="_ftnref22">22</a><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">. </span></span></span></span></span></span></p>
<p class="Cit" style="text-align:center"><img alt="Une du journal Le Matin 8 juin 1930" data-entity-type="file" data-entity-uuid="3956e08f-ea6b-4919-8447-ec81d8fa167a" src="https://www.alepreuve.org/sites/default/files/inline-images/Zeghdani_2.jpg" /></p>
<p class="Cit" style="text-align:center"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><i><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Le Matin, </span></span></span></i><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">8 juin 1930 </span></span></span></span></span></span></p>
<p class="Cit" style="text-align:center"> </p>
<hr />
<p class="Cit" style="text-align:justify"><b>Notes et références :</b></p>
<p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><b><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Bibliographie indicative</span></span></span></b></span></span></span></p>
<p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><b><span style="font-size:11.0pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Corpus primaire : </span></span></span></b></span></span></span></p>
<p class="Cit" style="text-indent:35.4pt; text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Alphonse de Lamartine, <i>Voyage en Orient </i>[1835], Paris, Gallimard, 2011. </span></span></span></span></span></span></p>
<p class="Cit" style="text-indent:35.4pt; text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Gérard de Nerval, <i>Voyage en Orient </i>[1851], Paris, Gallimard, 1998. </span></span></span></span></span></span></p>
<p class="Cit" style="text-align:justify"> </p>
<p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><b><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Autres textes cités : </span></span></span></b></span></span></span></p>
<p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Marie-Théodore Renoüard de Bussierre, <i>Lettres sur l’Orient écrites pendant les années 1827 et 1828, </i>Paris, Levrault, 1829, 3 tomes.</span></span></span></span></span></span></p>
<p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Auguste-Louis, comte de Forbin, <i>Voyage dans le Levant en 1817 et 1818</i>, Paris, Imprimerie royale, 1819.</span></span></span></span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Alphonse de Lamartine, <i>La France parlementaire (1834-1851), Œuvres oratoires et écrits politiques, </i>Paris, A. Lacroix, 1864. </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span style="tab-stops:35.45pt"><span style="text-autospace:none"><span arial="" style="font-family:">Joseph Michaud et Joseph Poujoulat, <i>Correspondance d’Orient 1830-1831, </i>Paris, Ducollet, 1833, 7 tomes.</span></span></span></span></span></p>
<p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><b><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Corpus secondaire : </span></span></span></b></span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Mouna Alsaid, « L’image de l’Orient chez quelques écrivains français (Lamartine, Nerval, Barrès, Benoit). Naissance, évolution, déclin d’un mythe orientaliste de l’ère coloniale », thèse de doctorat, Université Lumière, Lyon 2, soutenue en 2009. </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Mina Apic, « Le<i> Voyage en Orient</i> de Gérard de Nerval en tant que remise en question de la perspective eurocentriste », <i>Revista de Filologia Romanica, </i>n°33, 2, 2016, p. 257-275. </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Pascal Blanchard (dir.), Nicolas Bancel (dir.), Gilles Boëtsch (dir.), Christelle Taraud (dir.) et Dominic Thomas (dir.), <i>Sexe, race et colonies. La domination des corps du XV<sup>e</sup> siècle à nos jours, </i>Paris, La Découverte, 2018.</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="background:white"><span style="color:black">Roger Botte</span></span><span style="background:white"><span style="color:black">, « Des européens au marché aux esclaves : stade suprême de l’exotisme ? Égypte, première moitié du XIX<sup>e</sup> siècle », <i>Journal des africanistes</i> [En ligne], 86-2, 2016. URL : </span></span><a href="http://journals.openedition.org/africanistes/5061" style="color:#0563c1; text-decoration:underline"><span style="background:white">http://journals.openedition.org/africanistes/5061</span></a><span style="background:white"><span style="color:black"> (dernière consultation : 31 mai 2021).</span></span></span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="background:white"><span style="color:black">Jean-Michel Deveau, <i>Femmes esclaves, d'hier à aujourd'hui</i>, Paris, France Empire, 1998. </span></span></span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span style="text-autospace:none"><span arial="" style="font-family:">Frédéric Hitzel, « L’esclavage en territoire ottoman à l’époque moderne », <i>Couleurs de l’esclavage sur les deux rives de la Méditerranée (Moyen Âge – XX<sup>e</sup> siècle), </i>sous la direction de Roger Botte et Alessandro Stella, Paris, Karthala, 2012, p. 263-282. </span></span></span></span></p>
<p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Daniel Lançon (dir.) et Sarga Moussa (dir.), <i>L’Esclavage oriental et africain au regard des littératures, des arts et de l’histoire </i>(XVIII<sup>e</sup>-XX<sup>e</sup> siècles), Paris, Presses de la Sorbonne Nouvelle, 2019. </span></span></span></span></span></span></p>
<p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Bernard Lewis, <i>Race et esclavage au Proche Orient </i>[1990], trad. de l’anglais. par Rose Saint-James, Paris, Gallimard, « Bibliothèque des Histoires », 1993.</span></span></span></span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="background:white"><span style="color:black">Sarga Moussa, « V. La scène du marché aux esclaves dans le <i>Voyage en Orient</i> et dans un discours politique de Lamartine en 1835 », éd. Aurélie Foglia, <i>Lamartine ou la vie lyrique, </i>Paris, Hermann, 2018, p. 81-90.</span></span></span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="background:white"><span style="color:black">Sarga Moussa (dir.), <i>Littérature et esclavage, </i>Paris, Desjonquères, 2010. </span></span></span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="background:white"><span style="color:black">Sarga Moussa</span></span> « La couleur des esclaves dans le <i>Voyage en Orient </i>de Nerval », <i>La Perspective interdisciplinaire des études françaises et francophone</i>s, Anna Kieliszczyk (dir.) et Ewa Pilecka (dir.), Pruszków, Leksem, 2009, p. 213-221.</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span style="vertical-align:baseline"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="border:none windowtext 1.0pt; font-family:">Frédéric Regent, <em><span arial="" style="font-family:">La France et ses esclaves, de la colonisation aux abolitions (1620-1848)</span></em>, Paris, Grasset et Fasquelle, 2007.</span></span></span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="background:white"><span style="color:black">Nelly Schmidt, <i>L'abolition de l'esclavage : 5 siècles de combats (XVI<sup>e</sup>/XX<sup>e</sup> siècles),</i> Paris, Fayard, 2008.</span></span></span></span></span></p>
<div>
<hr />
<p class="MsoFootnoteText"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref1" id="_ftn1" name="_ftn1" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">1</a> Joseph Michaud, <i>Correspondance d’Orient, </i>t. II,<i> </i>Paris, Ducollet, 1833, p. 392. </span></span></p>
<div id="ftn2">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref2" id="_ftn2" name="_ftn2" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">2</a> Alphonse de Lamartine, <i>Voyage en Orient, </i>Paris, Gallimard<i>, </i>2011, p. 725. L’épisode en question apparaît dans la section intitulée « Constantinople » du tome III (p. 725-731). Toutes les références à cette œuvre renverront désormais à cette édition ; elles seront indiquées dans le texte.</span></span></p>
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref3" id="_ftn3" name="_ftn3" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">3</a><span arial="" style="font-family:"> Gérard de Nerval, </span><i><span arial="" style="font-family:">Voyage en Orient, </span></i><span arial="" style="font-family:">Paris, Gallimard, 1998, p. 220. L’épisode en question occupe l’intégralité du chapitre intitulé « Les Esclaves » de la section <i>Les Femmes du Caire </i>(p. 212-245). </span><span arial="" style="font-family:">Toutes les références à cette œuvre renverront désormais à cette édition ; elles seront indiquées dans le texte.</span></span></span></p>
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref4" id="_ftn4" name="_ftn4" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">4</a> C’est un <i>topos </i>qui s’est également répandu en peinture, on pense notamment au célèbre « Marché d’esclaves » d’Horace Vernet. Voir Fig. 1.</span></span></p>
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref5" id="_ftn5" name="_ftn5" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">5</a> « Scènes de la vie égyptienne. — Les Femmes du Caire. — II. — Les Esclaves, par M. Gérard de Nerval », <i>La Revue des Deux Mondes, </i>t. 15, 1846, p. 5-38.</span></span></p>
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref6" id="_ftn6" name="_ftn6" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">6</a> Sur la diversité des couleurs de l’esclavage méditerranéen, voir Bernard Lewis, <i>Race et esclavage au Proche Orient </i>[1990], trad. de l’anglais. par Rose Saint-James, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque des Histoires », 1993.</span></span></p>
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref7" id="_ftn7" name="_ftn7" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">7</a> <span style="font-size:10.0pt"><span style="background:white"><span style="color:black">Roger Botte, « Des européens au marché aux esclaves : stade suprême de l’exotisme ? Égypte, première moitié du XIX<sup>e</sup> siècle », <i>Journal des africanistes</i> [En ligne], 86-2, 2016. URL : </span></span></span><a href="http://journals.openedition.org/africanistes/5061" style="color:#0563c1; text-decoration:underline"><span style="font-size:10.0pt"><span style="background:white">http://journals.openedition.org/africanistes/5061</span></span></a><span style="font-size:10.0pt"><span style="background:white"><span style="color:black"> (dernière consultation : 31 mai 2021).</span></span></span></span></span></p>
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref8" id="_ftn8" name="_ftn8" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">8</a> Comte de Forbin, <i>Voyage dans le Levant, </i>Paris, Imprimerie royale, 1819, p. 80.</span></span></p>
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref9" id="_ftn9" name="_ftn9" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">9</a> Sur les zoos humains, voir Nicolas Bancel, Pascal Blanchard, Gilles Boëtsch, Éric Deroo et Sandrine Lemaire (dir.), <i>Zoos humains : Au temps des exhibitions humaines, </i>Paris, La Découverte, « Poche/Sciences humaines et sociales », 2004.</span></span></p>
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref10" id="_ftn10" name="_ftn10" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">10</a> Joseph Michaud, <i>Correspondance d’Orient, op. cit., </i>p. 396.</span></span></p>
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref11" id="_ftn11" name="_ftn11" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">11</a> Alphonse de Lamartine, <i>Voyage en Orient, op. cit.</i>, p. 726.</span></span></p>
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref12" id="_ftn12" name="_ftn12" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">12</a> Voir Sarga Moussa, « La chaîne de l’esclavage dans les <i>Lettres persanes », Littérature et esclavage, </i>Paris, Desjonquères, p. 50-59.</span></span></p>
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref13" id="_ftn13" name="_ftn13" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">13</a> Notes au <i>Voyage en Orient </i>de Nerval, <i>op.cit., </i>p. 874.</span></span></p>
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref14" id="_ftn14" name="_ftn14" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">14</a> Sarga Moussa, « La couleur des esclaves dans le <i>Voyage en Orient </i>de Nerval », <i>La Perspective interdisciplinaire des études françaises et francophones</i>, Leksem, 2009, p. 213-221.</span></span></p>
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref15" id="_ftn15" name="_ftn15" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">15</a> Joseph Michaud, <i>Correspondance d’Orient, op. cit., </i>p. 407.</span></span></p>
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref16" id="_ftn16" name="_ftn16" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">16</a> Voir Malek Chebel, <i>L’esclavage en terre d’islam, </i>Paris, Fayard, 2007.</span></span></p>
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref17" id="_ftn17" name="_ftn17" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">17</a> <span style="background:white"><span style="color:black">Roger Botte, « Des européens au marché aux esclaves : stade suprême de l’exotisme ? Égypte, première moitié du XIX<sup>e</sup> siècle », art. cit.</span></span></span></span></p>
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref18" id="_ftn18" name="_ftn18" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">18</a> Si Théophile Gautier pose les bases de cette « quête esthétique » dans sa très célèbre préface à <i>Mademoiselle de Maupin </i>[1835]<i>, </i>il la poursuit dans un certain nombre de ses récits de voyage. Voir notamment <i>Constantinople </i>[1853], éd. Sarga Moussa, Paris, La Boîte à Documents, 1990. On peut également se référer à un article de Sarga Moussa, « Éloge du divers : anthropologie et esthétique dans les voyages méditerranéens de Gautier », <i>Romantisme, </i>n°114, « L’expérience du relatif », 2001, p. 51-60.</span></span></p>
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref19" id="_ftn19" name="_ftn19" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">19</a> <i><span style="background:white"><span style="color:black">Ibid.</span></span></i></span></span></p>
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref20" id="_ftn20" name="_ftn20" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">20</a> Sarga Moussa, « La couleur des esclaves dans le <i>Voyage en Orient </i>de Nerval », <i>op. cit.</i></span></span></p>
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref21" id="_ftn21" name="_ftn21" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">21</a> Expression empruntée à Renoüard de Bussierre, <i>Lettres sur l’Orient pendant les années 1827 et 1828, </i>Paris, Levreau, 1829, p. 308.</span></span></p>
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref22" id="_ftn22" name="_ftn22" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">22</a> Entre mai et juin 1930, Joseph Kessel publie une série de reportages dans <i>Le Matin </i>sur le commerce d’esclaves dans la Corne de l’Afrique et en Arabie. </span></span></p>
</div>
</div>