<p align="right" style="text-align:right"><span style="font-size:11pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:10.0pt"><q>&nbsp;[&hellip;] de toutes les mis&egrave;res qu&rsquo;on peut voir &agrave; Stamboul, il n&rsquo;y en a point dont la vue puisse affliger davantage l&rsquo;Europ&eacute;en. </q>(Joseph Michaud</span></span></span><a href="#_ftn1" id="_ftnref1" name="_ftnref1">1</a>])</p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">P&egrave;lerins, scientifiques, artistes, et enfin &laquo;&nbsp;touristes<i>&nbsp;&raquo;</i>, ont fait, au fil des si&egrave;cles, de la visite du &laquo;&nbsp;march&eacute; des esclaves</span></span></span><a href="#_ftn2" id="_ftnref2" name="_ftnref2">2</a>&nbsp;<span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">&raquo; ou &laquo;&nbsp;bazar des esclaves</span></span></span><a href="#_ftn3" id="_ftnref3" name="_ftnref3">3</a><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">&nbsp;&raquo; un incontournable du voyage en Orient. Dans le contexte plus particulier d&rsquo;un XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle o&ugrave; l&rsquo;<i>ailleurs </i>et l&rsquo;<i>autre </i>font le double objet d&rsquo;une fascination et d&rsquo;une r&eacute;pulsion, elle s&rsquo;est &eacute;tablie au rang des &laquo;&nbsp;curiosit&eacute;s</span></span></span><a href="#_ftn4" id="_ftnref4" name="_ftnref4">4</a><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">&nbsp;&raquo;. Curiosit&eacute; de voyageur, mais &eacute;galement curiosit&eacute; de lecteur&nbsp;: ins&eacute;r&eacute; par le comte de Forbin dans son <i>Voyage dans le Levant </i>(1819), repris par Marie-Th&eacute;odore Reno&uuml;ard de Bussierre dans ses <i>Lettres sur l&rsquo;Orient </i>(1829) ou encore par Joseph Michaud dans sa <i>Correspondance d&rsquo;Orient </i>(1833), cet &eacute;pisode s&rsquo;est int&eacute;gr&eacute; &agrave; l&rsquo;horizon d&rsquo;attente du r&eacute;cit de voyage. Progressivement, celui-ci a fait l&rsquo;objet d&rsquo;une s&eacute;quence autonome, compl&egrave;te et codifi&eacute;e, dont les <i>Voyage en Orient </i>de Lamartine (1835) et de Nerval (1851) offrent les exemples les plus aboutis. </span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">V&ecirc;tu &agrave; la turque et accompagn&eacute; par un guide, Lamartine visite le march&eacute; aux esclaves de Constantinople en mai 1833, par simple curiosit&eacute; de voyageur. La loi du 4 mars 1831 sur l&rsquo;abolition de la traite n&eacute;gri&egrave;re au sein de l&rsquo;Empire colonial ent&eacute;rine la condamnation morale de l&rsquo;esclavage qui tend &agrave; se g&eacute;n&eacute;raliser dans la soci&eacute;t&eacute; fran&ccedil;aise. C&rsquo;est Lamartine lui-m&ecirc;me qui signera le d&eacute;cret d&rsquo;abolition de l&rsquo;esclavage du 27 avril 1848. Seulement deux ann&eacute;es plus t&ocirc;t, en juillet 1846, Nerval fait para&icirc;tre, dans la <i>Revue des Deux Mondes</i>, le chapitre &laquo;&nbsp;Les Esclaves</span></span></span><a href="#_ftn5" id="_ftnref5" name="_ftnref5">5</a><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">&nbsp;&raquo; de son futur <i>Voyage en Orient. </i>G&eacute;rard, narrateur fictif que s&rsquo;est cr&eacute;&eacute; Nerval, se rend au bazar des esclaves du Caire pour acheter une &laquo;&nbsp;esclave-&eacute;pouse&nbsp;&raquo;, condition indispensable pour qu&rsquo;il puisse continuer &agrave; habiter en ville. Lorsque Nerval publie son r&eacute;cit de voyage, en 1851, le combat contre l&rsquo;esclavage est arriv&eacute; &agrave; son terme. C&rsquo;est en effet &agrave; partir de 1847 que les march&eacute;s aux esclaves sont interdits par les autorit&eacute;s ottomanes et &eacute;gyptiennes, sous l&rsquo;influence des mouvements abolitionnistes europ&eacute;ens. Les bazars de Constantinople et du Caire &eacute;taient des espaces de transits importants pour la traite orientale, organis&eacute;e sur la base d&rsquo;un esclavage &laquo;&nbsp;multiethnique&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;multicouleur</span></span></span><a href="#_ftn6" id="_ftnref6" name="_ftnref6">6</a><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">&nbsp;&raquo;. Des esclaves venus d&rsquo;Europe m&eacute;diterran&eacute;enne, d&rsquo;Afrique subsaharienne et des r&eacute;gions du Caucase y &eacute;taient vendus pour alimenter les harems ou servir les maisonn&eacute;es. En &Eacute;gypte comme dans la capitale de l&rsquo;Empire ottoman, les voyageurs europ&eacute;ens d&eacute;couvrent ces quartiers o&ugrave; les esclaves, regroup&eacute;s selon leur sexe, leur origine et leur couleur de peau, sont expos&eacute;s &agrave; la vente. Les march&eacute;s aux esclaves, lieu de convergence des &laquo;&nbsp;races&nbsp;&raquo;, sont organis&eacute;s selon les logiques de classification et de hi&eacute;rarchisation racialistes en voie de d&eacute;veloppement en Europe. Les esclaves, notamment femmes, offrent aux voyageurs un aper&ccedil;u de la diversit&eacute; de &laquo;&nbsp;types&nbsp;&raquo;, qui sont class&eacute;s sur une &eacute;chelle de valeurs proprement occidentale. Alors que les &laquo;&nbsp;N&eacute;gresses du Sennaar&nbsp;&raquo;, tax&eacute;es de &laquo;&nbsp;jolis monstres&nbsp;&raquo; par Nerval, sont &laquo;&nbsp;l&rsquo;esp&egrave;ce la plus &eacute;loign&eacute;e du type de la beaut&eacute; convenue parmi nous &raquo; (p. 221), Lamartine consid&egrave;re les Circassiennes, pour leur blancheur de peau et la d&eacute;licatesse de leurs traits, comme l&rsquo;incarnation d&rsquo;une &laquo;&nbsp;beaut&eacute; accomplie &raquo; (p. 730). </span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Ce mode de hi&eacute;rarchisation esth&eacute;tique et id&eacute;ologique, qui r&eacute;unit voyageurs occidentaux et marchands orientaux, se heurte pourtant &agrave; la question &eacute;pineuse de l&rsquo;esclavage. Si l&rsquo;organisation du march&eacute; aux esclaves r&eacute;pond &agrave; une logique proprement occidentale, la pratique de l&rsquo;esclavage en Orient permet aux voyageurs europ&eacute;ens de revendiquer une forme de sup&eacute;riorit&eacute; &laquo;&nbsp;civilisationnelle&nbsp;&raquo;. Dans le double contexte abolitionniste et colonialiste des ann&eacute;es 1830-1850, la publication d&rsquo;un tel &eacute;pisode exigeait de la part du voyageur occidental une r&eacute;action n&eacute;cessairement engag&eacute;e, dont la charge est tout autant litt&eacute;raire que politique ou id&eacute;ologique. Une telle situation de voyage et d&rsquo;&eacute;criture place le voyageur face &agrave; son lecteur et &agrave; lui-m&ecirc;me&nbsp;: ses &eacute;motions, son engagement, voire sa propre identit&eacute;.</span></span></span></p> <p align="center" style="text-align:center"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><img alt="tableau d'Horace Vernet représentant un marché aux esclaves" data-entity-type="file" data-entity-uuid="c1f5f3a1-fa02-4e67-8064-a711962fd1b3" src="https://www.alepreuve.org/sites/default/files/inline-images/Zeghdani_1.jpg" style="width:377px; height:441px" /></span></span></span></p> <p align="center" style="text-align:center"><span style="font-size:11pt"><span arial="" style="font-family:">Fig. 1&nbsp;: <i>Le March&eacute; d&rsquo;esclaves</i>, Horace Vernet, 1836, huile sur toile (65x54 cm), Alte Nationalgalerie, Berlin</span></span></p> <p style="text-align:justify">&nbsp;</p> <h2 style="text-align: justify;"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><b>Machine touristique, intertextualit&eacute; et &laquo;&nbsp;sensationnalisme&nbsp;&raquo; litt&eacute;raire </b></span></span></span></h2> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">La visite du march&eacute; aux esclaves s&rsquo;est impos&eacute;e comme un passage obligatoire, tant dans le cadre du voyage que dans celui de son &eacute;criture, le motif fonctionnant ainsi comme un v&eacute;ritable palimpseste<i>. </i>Roger Botte d&eacute;clare avoir rassembl&eacute; plus de 103 textes de voyageurs europ&eacute;ens ou am&eacute;ricains ayant visit&eacute; le march&eacute; aux esclaves entre le VII<sup>e</sup> si&egrave;cle et 1850</span></span></span><a href="#_ftn7" id="_ftnref7" name="_ftnref7">7</a>.<span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"> Il attribue le premier r&eacute;cit europ&eacute;en faisant &eacute;tat d&rsquo;une vente d&rsquo;esclaves noirs au Caire en 1171-1172 au rabbin navarrais Benjamin de Tud&egrave;le. Compt&eacute;e au titre des curiosit&eacute;s<i>, </i>la visite du march&eacute; aux esclaves au XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle est &agrave; remettre dans le contexte du d&eacute;veloppement du tourisme, notamment sous l&rsquo;influence des premiers guides de voyage, qui, &agrave; partir des ann&eacute;es 1830, identifient des lieux incontournables<i>. </i>Au fil des textes, la visite du march&eacute; aux esclaves semble r&eacute;pondre &agrave; un v&eacute;ritable &laquo;&nbsp;protocole&nbsp;&raquo;, qui lui donne tous les airs d&rsquo;une attraction touristique. </span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">D&egrave;s l&rsquo;entr&eacute;e dans le bazar, l&rsquo;effet pittoresque est garanti par l&rsquo;impression donn&eacute;e au voyageur (et par-l&agrave; m&ecirc;me au lecteur) qu&rsquo;il vit l&rsquo;exp&eacute;rience privil&eacute;gi&eacute;e d&rsquo;une immersion totale. Pour cette visite, l&rsquo;Europ&eacute;en est accompagn&eacute; d&rsquo;un guide, initiateur, interpr&egrave;te et parfois n&eacute;gociateur&nbsp;: Lamartine est conduit&nbsp;au bazar des esclaves par un &laquo;&nbsp;jeune homme de Constantinople&nbsp;&raquo; et G&eacute;rard par son drogman Abdallah. Le &laquo;&nbsp;laissez-passer&nbsp;&raquo; est &eacute;galement obtenu, dans le cas de Lamartine, par le travestissement&nbsp;: il est &laquo;&nbsp;rev&ecirc;tu&nbsp;&raquo; du &laquo;&nbsp;costume turc&nbsp;&raquo;, de telle mani&egrave;re qu&rsquo;il passe pour &laquo;&nbsp;un Arabe ou un &Eacute;gyptien&nbsp;&raquo; (p. 725). Cette &laquo;&nbsp;couverture&nbsp;&raquo; est &eacute;galement celle adopt&eacute;e par le comte de Forbin, dans son <i>Voyage dans le Levant, </i>qui, traversant le bazar, dit &ecirc;tre pris pour &laquo;&nbsp;Osmanli Ch&acirc;h, ou Turc du nord</span></span></span><a href="#_ftn8" id="_ftnref8" name="_ftnref8">8</a>&nbsp;<span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">&raquo;. Symboliquement, le march&eacute; aux esclaves est un lieu difficile d&rsquo;acc&egrave;s&nbsp;: sa d&eacute;couverte est pr&eacute;c&eacute;d&eacute;e d&rsquo;un parcours p&eacute;rilleux &agrave; travers le labyrinthe des rues bond&eacute;es de Stamboul et du Caire. </span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">La suite de l&rsquo;&eacute;pisode est construite sur une matrice narrative&nbsp;qui suit la &laquo;&nbsp;promenade&nbsp;&raquo; des voyageurs (Lamartine utilise, p. 726, le g&eacute;rondif &laquo;&nbsp;en se promenant&nbsp;&raquo;)<i>. </i>Ils d&eacute;couvrent les diff&eacute;rentes &laquo;&nbsp;chambres&nbsp;&raquo; dans lesquelles sont expos&eacute;s<i> </i>les esclaves. Une telle d&eacute;ambulation place les voyageurs en posture de spectateurs&nbsp;: le r&eacute;cit d&eacute;ploie toute une isotopie de l&rsquo;exhibition, qui lui donne des airs de mus&eacute;e ou encore de magasin. Lamartine recourt &agrave; une comparaison animale qui fait &eacute;cho aux sc&egrave;nes de march&eacute; dans les campagnes fran&ccedil;aises. Elle rappelle &eacute;galement la pratique des zoos humains en France &agrave; la m&ecirc;me p&eacute;riod</span></span></span>e<a href="#_ftn9" id="_ftnref9" name="_ftnref9">9</a>&nbsp;<span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">: </span></span></span></p> <p class="Cit" style="margin-right: 56px; text-align: justify;"><q><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span arial="" style="font-family:">&nbsp;Assises sur leurs talons, immobiles, la t&ecirc;te appuy&eacute;e sur le revers de leur main ou sur le genou, elles nous regardaient d&rsquo;un &oelig;il aussi doux et aussi triste que l&rsquo;&oelig;il de la ch&egrave;vre ou de l&rsquo;agneau que la paysanne tient par la corde et marchande &agrave; la foire de nos villages [&hellip;]. (p. 727) </span></span></span></span></q></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Par ailleurs, le spectacle de &laquo;&nbsp;ce honteux commerce&nbsp;&raquo; (Lamartine, p. 730) se manifeste, dans les deux textes, par l&rsquo;insertion d&rsquo;une m&ecirc;me micro-sc&egrave;ne larmoyante et path&eacute;tique, mobilisant le motif universel de la <i>mater dolorosa. </i>Une femme portant son enfant appara&icirc;t au centre du march&eacute;&nbsp;: &laquo;&nbsp;Elle tenait le visage baiss&eacute; et pleurait [&hellip;].&nbsp;&raquo; (Lamartine, p. 728) ; &laquo; [&hellip;] une autre femme cependant, drap&eacute;e dans une couverture jaune, pleurait en cachant son visage contre une colonne du vestibule.&nbsp;&raquo; (Nerval, p. 240). Lamartine et G&eacute;rard, touch&eacute;s par cette sc&egrave;ne (et anticipant ainsi la r&eacute;action de leurs lecteurs), ont tous deux l&rsquo;honorable vell&eacute;it&eacute; d&rsquo;acheter cette esclave avec son enfant&nbsp;: </span></span></span></p> <p class="Cit" style="margin-right: 56px; text-align: justify;"><q><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span style="tab-stops:70.9pt 411.1pt"><span arial="" style="font-family:"><span arial="" style="font-family:">&nbsp;[&hellip;] touch&eacute; de son infortune, je priai M. Morlach, mon obligeant conducteur, de l&rsquo;acheter avec l&rsquo;enfant pour mon compte. Je les aurais emmen&eacute;s ensemble, et j&rsquo;aurais &eacute;lev&eacute; le bel enfant en le laissant aupr&egrave;s de la m&egrave;re. (Lamartine, p. 728) </span></span></span></span></span></q></p> <p class="Cit" style="margin-right: 56px; text-align: justify;"><q><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span style="tab-stops:70.9pt 411.1pt"><span arial="" style="font-family:"><span arial="" style="font-family:">&nbsp;Quoi qu&rsquo;on fasse pour accepter la vie orientale, on se sent Fran&ccedil;ais&hellip; et sensible dans de pareils moments. J&rsquo;eus un instant l&rsquo;id&eacute;e de la racheter si je pouvais, et de lui donner la libert&eacute;. (Nerval, p. 241) </span></span></span></span></span></q></p> <p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Prenant une part active au spectacle,<i> </i>les deux voyageurs se cr&eacute;ent un v&eacute;ritable <i>ethos </i>de bon Samaritain. Ce motif apparaissait d&eacute;j&agrave; dans la <i>Correspondance d&rsquo;Orient </i>de Joseph Michaud, o&ugrave; un geste d&rsquo;affranchissement symbolique permettait aux visiteurs de se d&eacute;tacher de leur sentiment de culpabilit&eacute;&nbsp;: </span></span></span></span></span></span></p> <p class="Cit" style="margin-right: 56px; text-align: justify;"><q><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span style="tab-stops:70.9pt"><span arial="" style="font-family:"><span arial="" style="font-family:">&nbsp;[&hellip;] &agrave; la porte du bazar des esclaves, on expose, dans des cages, des oiseaux que les passants ach&egrave;tent pour les d&eacute;livrer de leur prison&nbsp;; j&rsquo;ai achet&eacute; quelques-uns de ces oiseaux, qu&rsquo;on appelle <i>azad couchry, </i>et je leur ai rendu la libert&eacute; en pr&eacute;sence de la foule qui criait&nbsp;: <i>pekei, pekei&nbsp;</i>! tr&egrave;s-bien, tr&egrave;s-bien&nbsp;! Vous voyez qu&rsquo;au lieu m&ecirc;me o&ugrave; l&rsquo;humanit&eacute; semble bannie de tous les c&oelig;urs, on court apr&egrave;s son i</span></span></span></span></span>mage<a href="#_ftn10" id="_ftnref10" name="_ftnref10">10</a>. </q></p> <p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Ce jeu d&rsquo;acteur (Michaud ne manque pas de souligner une certaine forme d&rsquo;hypocrisie) appara&icirc;t &eacute;galement dans le motif du don de&nbsp;quelques piastres&nbsp;aux esclaves, r&eacute;pondant au devoir de charit&eacute; du bon chr&eacute;tien. </span></span></span></span></span></span></p> <p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Cette n&eacute;cessit&eacute; de pr&ocirc;ner des valeurs qui rappellent aux voyageurs leur identit&eacute; se manifeste &eacute;galement dans l&rsquo;usage du discours.<i> </i>La visite du march&eacute; aux esclaves se pr&eacute;sente en effet sous la forme d&rsquo;une<i> </i>s&eacute;quence construite sur une alternance entre r&eacute;cit et discours&nbsp;: quand l&rsquo;horreur et la barbarie sont &agrave; leur paroxysme, le narrateur se doit de prendre la parole, en son propre nom. On trouve dans les textes une m&ecirc;me rh&eacute;torique lyrique et path&eacute;tique, laissant &eacute;clater la sensibilit&eacute; du voyageur europ&eacute;en. Si Lamartine est tr&egrave;s &eacute;loquent, exprimant ainsi, &agrave; la sortie du bazar, son d&eacute;sarroi&nbsp;: &laquo;&nbsp;Nous sort&icirc;mes le c&oelig;ur fl&eacute;tri et les yeux humides de cette sc&egrave;ne, qui se renouvelle tous les jours et &agrave; toutes les heures dans les villes de l&rsquo;Orient&nbsp;&raquo; (p. 730), Nerval reprend ce langage du c&oelig;ur avec plus de r&eacute;serve, mais non moins de po&eacute;sie&nbsp;: &laquo;&nbsp;La morne s&eacute;r&eacute;nit&eacute; du ciel et les lumineuses broderies que tra&ccedil;aient les rayons du soleil jetant de longs angles dans la cour protestaient en vain contre cet &eacute;loquent d&eacute;sespoir&nbsp;; je m&rsquo;en sentais le c&oelig;ur navr&eacute;.&nbsp;&raquo; (p. 240). De tels passages, programm&eacute;s par un horizon d&rsquo;attente &agrave; la fois litt&eacute;raire et moral, semblent directement adress&eacute;s au lecteur europ&eacute;en, garantissant &agrave; l&rsquo;&eacute;pisode sa part de sensationnalisme. Paru en premier lieu dans la <i>Revue des Deux Mondes </i>le 1<sup>er</sup> juillet 1846, sous le titre &laquo;&nbsp;Les Femmes du Caire &ndash; Sc&egrave;nes de la vie &eacute;gyptienne &ndash; Les Esclaves&nbsp;&raquo;, il fait r&eacute;sonner l&rsquo;actualit&eacute; br&ucirc;lante d&rsquo;un abolitionnisme triomphant. Le discours g&eacute;n&eacute;ral sur l&rsquo;esclavage fait donc partie des invariants d&rsquo;un <i>topos </i>que les deux voyageurs traitent avec plus ou moins de distance. </span></span></span></span></span></span></p> <h2 style="text-align: justify;"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><b>&laquo;&nbsp;Ce bazar, o&ugrave; l&rsquo;on vend la vie, [&hellip;] comme nous vendons le b&oelig;uf ou le cheval</b></span></span></span><a href="#_ftn11" id="_ftnref11" name="_ftnref11">11</a><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><b>&nbsp;&raquo;&nbsp;: esclavagisme et eurocentrisme en question </b></span></span></span></h2> <p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">La plupart des &eacute;crivains-voyageurs de la premi&egrave;re moiti&eacute; du XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle reprennent le discours abolitionniste des penseurs des Lumi&egrave;res</span></span></span></span></span></span><a href="#_ftn12" id="_ftnref12" name="_ftnref12">12</a><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">&nbsp;: &agrave; l&rsquo;occasion de leur visite du march&eacute; aux esclaves, de Bussierre, Forbin ou encore Michaud, expriment leur positionnement en faveur de la libert&eacute;. Claude Pichois &eacute;voque, dans les notes de son &eacute;dition du <i>Voyage en Orient </i>de Nerval<i>, </i>&laquo;&nbsp;la notion de responsabilit&eacute; morale</span></span></span></span></span></span><a href="#_ftn13" id="_ftnref13" name="_ftnref13">13</a><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">&nbsp;&raquo;. </span></span></span></span></span></span></p> <p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Le positionnement de Lamartine est univoque &agrave; ce sujet&nbsp;et le r&eacute;cit de voyage porte les germes de son engagement politique et id&eacute;ologique. Deux s&eacute;quences discursives, plac&eacute;es strat&eacute;giquement au d&eacute;but et &agrave; la fin de l&rsquo;&eacute;pisode, annoncent en effet le discours sur l&rsquo;&eacute;mancipation des esclaves qu&rsquo;il prononcera &agrave; la Chambre le 22 avril 1835&nbsp;; le propos est d&eacute;j&agrave; enflamm&eacute;, le ton emphatique et les convictions profondes&nbsp;: </span></span></span></span></span></span></p> <p class="Cit" style="margin-right: 56px; text-align: justify;"><q><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span style="tab-stops:70.9pt 411.1pt"><span arial="" style="font-family:"><span arial="" style="font-family:">&nbsp;Combien il a fallu de temps et de r&eacute;v&eacute;lations successives &agrave; la raison de l&rsquo;homme, pour que la force ait cess&eacute; d&rsquo;&ecirc;tre un droit &agrave; ses yeux, et pour que l&rsquo;esclavage soit devenu un crime et un blasph&egrave;me &agrave; son intelligence&nbsp;! Quel progr&egrave;s&nbsp;! et combien n&rsquo;en promet-il pas&nbsp;! Qu&rsquo;il y a de choses dont nous ne sommes pas choqu&eacute;s, et qui seront des crimes incompr&eacute;hensibles aux yeux de nos descendants&nbsp;! Je pensais &agrave; cela en entrant dans ce bazar o&ugrave; l&rsquo;on vend la vie, l&rsquo;&acirc;me, le corps, la libert&eacute; d&rsquo;autrui, comme nous vendons le b&oelig;uf ou le cheval, et o&ugrave; l&rsquo;on se croit l&eacute;gitime possesseur de ce qu&rsquo;on a achet&eacute; ainsi&nbsp;! Que de l&eacute;gitimit&eacute;s de ce genre dont nous ne nous rendons pas compte&nbsp;! Elles le sont cependant, car on ne peut pas demander &agrave; l&rsquo;homme plus qu&rsquo;il ne sait. Ses convictions sont ses v&eacute;rit&eacute;s&nbsp;; il n&rsquo;en poss&egrave;de pas d&rsquo;autres. Dieu seul les a toutes &agrave; lui, et nous les distribue &agrave; proportion et &agrave; mesure de nos intelligences progressives. (p. 726) </span></span></span></span></span></q></p> <p class="Cit" style="margin-right: 56px; text-align: justify;"><q><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span style="tab-stops:70.9pt 411.1pt"><span arial="" style="font-family:"><span arial="" style="font-family:">&nbsp;Nous sort&icirc;mes le c&oelig;ur fl&eacute;tri et les yeux humides de cette sc&egrave;ne, qui se renouvelle tous les jours et &agrave; toutes les heures dans les villes de l&rsquo;Orient, et nous rev&icirc;nmes pensifs au bazar de Stamboul. Voil&agrave; ce que c&rsquo;est que les l&eacute;gislations immobiles&nbsp;! Elles consacrent les barbaries s&eacute;culaires, et donnent le droit d&rsquo;antiquit&eacute; et de l&eacute;gitimit&eacute; &agrave; tous les crimes. Les fanatiques du pass&eacute; sont aussi coupables et aussi funestes &agrave; l&rsquo;humanit&eacute; que les fanatiques de l&rsquo;avenir. Les uns immolent l&rsquo;homme &agrave; leurs ignorances et &agrave; leurs souvenirs&nbsp;; les autres &agrave; leurs esp&eacute;rances et &agrave; leur pr&eacute;cipitation. Si l&rsquo;homme faisait, pensait, croyait ce que faisaient et croyaient ses p&egrave;res, le genre humain tout entier en serait au f&eacute;tichisme et &agrave; l&rsquo;esclavage. La raison est le soleil de l&rsquo;humanit&eacute;&nbsp;: c&rsquo;est l&rsquo;infaillible et perp&eacute;tuelle r&eacute;v&eacute;lation des lois divines, applicable aux soci&eacute;t&eacute;s. Il faut marcher pour la suivre, sous peine de demeurer dans le mal et dans les t&eacute;n&egrave;bres&nbsp;; mais il ne faut pas la devancer, sous peine de tomber dans des pr&eacute;cipices. Comprendre le pass&eacute; sans le regretter&nbsp;; tol&eacute;rer le pr&eacute;sent en l&rsquo;am&eacute;liorant&nbsp;; esp&eacute;rer l&rsquo;avenir en le pr&eacute;parant&nbsp;: voil&agrave; la loi des hommes sages et des institutions bienfaisantes. Le p&eacute;ch&eacute; contre l&rsquo;Esprit-Saint, c&rsquo;est ce combat de certains hommes contre l&rsquo;am&eacute;lioration des choses&nbsp;; c&rsquo;est cet effort &eacute;go&iuml;ste et stupide pour rappeler toujours en arri&egrave;re le monde moral et social, que Dieu et la nature poussent toujours en avant&nbsp;: le pass&eacute; est le s&eacute;pulcre de l&rsquo;humanit&eacute; &eacute;croul&eacute;e&nbsp;; il faut le respecter, mais il ne faut pas s&rsquo;y enfermer et vouloir y vivre. (p. 730) </span></span></span></span></span></q></p> <p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Dans le contexte d&rsquo;une France post-r&eacute;volutionnaire, Lamartine construit sa critique de l&rsquo;esclavage sur une apologie du progr&egrave;s&nbsp;: la prise en compte de la nature criminelle et immorale de l&rsquo;esclavage est le produit d&rsquo;une longue marche vers le triomphe de la raison. Certains hommes ont &eacute;t&eacute; &laquo;&nbsp;choisis&nbsp;&raquo; par Dieu pour recevoir les lumi&egrave;res de l&rsquo;intelligence et de l&rsquo;esprit (l&rsquo;Occident). L&rsquo;immobilisme des autres (Orient) explique l&rsquo;enracinement de pratiques telles que l&rsquo;esclavage et leur aveuglement &agrave; l&rsquo;&eacute;gard de sa nature barbare et immorale. Une telle r&eacute;flexion d&eacute;montre par ailleurs &agrave; quel point le discours abolitionniste est li&eacute; &agrave; un engagement pr&eacute;colonial&nbsp;: l&rsquo;Occident, fort de ses lumi&egrave;res et de sa propension naturelle au progr&egrave;s, s&rsquo;arroge une mission civilisatrice envers l&rsquo;Orient. </span></span></span></span></span></span></p> <p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Nerval ne peut se dispenser de faire mention du discours dominant sur l&rsquo;esclavage. G&eacute;rard confie lui-m&ecirc;me, lors d&rsquo;une pr&eacute;c&eacute;dente discussion avec le consul de France, &ecirc;tre &laquo;&nbsp;encore tout rempli des pr&eacute;jug&eacute;s de l&rsquo;Europe&nbsp;&raquo; (p. 212). Par des allusions flagrantes &agrave; son hypotexte, le narrateur reconna&icirc;t l&rsquo;emprise d&rsquo;un d&eacute;terminisme moral et id&eacute;ologique qui &eacute;clatera lorsque, face &agrave; son &eacute;pouse-esclave, il sera rattrap&eacute; par ses propres principes moraux et rong&eacute; de l&rsquo;int&eacute;rieur par sa bonne conscience. N&eacute;anmoins, le dispositif complexe sur lequel repose le r&eacute;cit de voyage de Nerval (recours &agrave; un narrateur fictif qui l&eacute;gitime une certaine prise de distance &agrave; l&rsquo;&eacute;gard de la r&eacute;alit&eacute; du voyage) autorise ce que Sarga Moussa appelle une &laquo;&nbsp;pluralit&eacute; des discours</span></span></span></span></span></span><a href="#_ftn14" id="_ftnref14" name="_ftnref14">14</a><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">&nbsp;&raquo;. &Agrave; plusieurs reprises, G&eacute;rard se d&eacute;tache du discours abolitionniste dominant, revendiquant une ouverture plus authentique et tol&eacute;rante &agrave; la culture orientale&nbsp;: </span></span></span></span></span></span></p> <p class="Cit" style="margin-right: 56px; text-align: justify;"><q><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span style="tab-stops:70.9pt"><span arial="" style="font-family:"><span arial="" style="font-family:">&nbsp;Il faut vivre un peu en Orient pour s&rsquo;apercevoir que l&rsquo;esclavage n&rsquo;est l&agrave; en principe qu&rsquo;une sorte d&rsquo;adoption. La condition de l&rsquo;esclave y est certainement meilleure que celle du fellah ou du rayah libres. Je comprenais d&eacute;j&agrave; en outre, d&rsquo;apr&egrave;s ce que j&rsquo;avais appris sur les mariages, qu&rsquo;il n&rsquo;y avait pas grande diff&eacute;rence entre l&rsquo;&Eacute;gyptienne vendue par ses parents et l&rsquo;Abyssienne expos&eacute;e au bazar. [&hellip;]&nbsp;l&rsquo;esclave m&eacute;content d&rsquo;un ma&icirc;tre peut toujours le contraindre &agrave; le faire revendre au bazar. Ce d&eacute;tail est un de ceux qui expliquent le mieux la douceur de l&rsquo;esclavage en Orient. (p. 213) </span></span></span></span></span></q></p> <p class="Cit" style="margin-right: 56px; text-align: justify;"><q><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span style="tab-stops:70.9pt"><span arial="" style="font-family:"><span arial="" style="font-family:">&nbsp;Ainsi la seule esclave qui pleurait l&agrave; pleurait &agrave; la pens&eacute;e de perdre son ma&icirc;tre&nbsp;; les autres ne paraissaient s&rsquo;inqui&eacute;ter que de&nbsp;la crainte de rester trop longtemps sans en trouver. Voil&agrave; qui parle, certes, en faveur du caract&egrave;re des musulmans. Comparez &agrave; cela le sort des esclaves dans les pays am&eacute;ricains&nbsp;! Il est vrai qu&rsquo;en &Eacute;gypte, c&rsquo;est le fellah seul qui travaille &agrave; la terre. On m&eacute;nage les forces de l&rsquo;esclave, qui co&ucirc;te cher, et on ne l&rsquo;occupe gu&egrave;re qu&rsquo;&agrave; des services domestiques. Voil&agrave; l&rsquo;immense diff&eacute;rence qui existe entre l&rsquo;esclave des pays turcs et celui des pays chr&eacute;tiens. (p. 241) </span></span></span></span></span></q></p> <p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Ce discours d&eacute;centr&eacute;<i> </i>apparaissait d&eacute;j&agrave; chez Michaud dont le regard port&eacute; sur les march&eacute;s aux esclaves turcs et &eacute;gyptiens avait une valeur presque ethnographique&nbsp;: s&rsquo;int&eacute;ressant au fonctionnement interne de l&rsquo;esclavage dans les soci&eacute;t&eacute;s orientales (conditions de vie des esclaves, &eacute;ducation, possibilit&eacute; d&rsquo;affranchissement ou d&rsquo;&eacute;l&eacute;vation sociale&hellip;), il en venait &agrave; la conclusion que &laquo;&nbsp;la servitude&nbsp;&raquo; n&rsquo;&eacute;tait &laquo;&nbsp;insupportable que pour les chr&eacute;tiens</span></span></span></span></span></span><a href="#_ftn15" id="_ftnref15" name="_ftnref15">15</a><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">&nbsp;&raquo;. En d&eacute;pla&ccedil;ant son point de vue, le voyageur qui se pr&ecirc;te &agrave; l&rsquo;immersion d&eacute;couvre en effet l&rsquo;esclavage oriental, tel qu&rsquo;il est r&eacute;gl&eacute; par la loi sainte. Le Coran autorise l&rsquo;institution de l&rsquo;esclavage, mais rappelle que l&rsquo;esclave est un &ecirc;tre humain, qui doit, d&egrave;s lors, &ecirc;tre trait&eacute; convenablement. L&rsquo;esclave poss&egrave;de un statut religieux et social, ainsi que certains droits et avantages, de m&ecirc;me que les ma&icirc;tres ont des devoirs envers leurs esclaves</span></span></span></span></span></span><a href="#_ftn16" id="_ftnref16" name="_ftnref16">16</a><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">. Bien qu&rsquo;il t&eacute;moigne d&rsquo;une ouverture d&rsquo;esprit et d&rsquo;un int&eacute;r&ecirc;t sinc&egrave;re pour l&rsquo;<i>autre, </i>un tel discours est une n&eacute;cessit&eacute; pour G&eacute;rard&nbsp;: il ne peut continuer &agrave; louer le logement qu&rsquo;il occupe au Caire s&rsquo;il vit seul, c&rsquo;est-&agrave;-dire sans &eacute;pouse ou sans esclave. Dans un souci d&rsquo;&eacute;conomie, il pr&eacute;f&egrave;re l&rsquo;esclavage au mariage&nbsp;: </span></span></span></span></span></span></p> <p class="Cit" style="margin-right: 56px; text-align: justify;"><q><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span style="tab-stops:70.9pt"><span arial="" style="font-family:"><span arial="" style="font-family:">&nbsp;Moi, je veux tenter un projet que je crois meilleur. J&rsquo;ach&egrave;terai une esclave, puisqu&rsquo;aussi bien il me faut une femme, et j&rsquo;arriverai peu &agrave; peu &agrave; remplacer par elle le drogman, le barbarin peut-&ecirc;tre, et &agrave; faire mes comptes clairement avec le cuisinier. [&hellip;] il est clair que j&rsquo;atteins un but d&rsquo;&eacute;conomie. En me mariant, j&rsquo;eusse fait le contraire. (p. 220) &nbsp;</span></span></span></span></span></q></p> <p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Bien que cet &eacute;pisode soit l&eacute;g&egrave;rement fictionnalis&eacute; (en r&eacute;alit&eacute;, ce n&rsquo;est pas Nerval, mais Joseph de Fonfride, son compagnon de voyage, qui avait fait l&rsquo;acquisition d&rsquo;une esclave), il fait &eacute;cho &agrave; une pratique r&eacute;pandue au d&eacute;but du XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle. Selon Roger Botte, la plupart des Europ&eacute;ens r&eacute;sidant en &Eacute;gypte achetaient, par l&rsquo;interm&eacute;diaire d&rsquo;un musulman, des esclaves pour en faire des domestiques, des concubines, ou parfois m&ecirc;me des &eacute;pouses. Il pointe du doigt cet &laquo;&nbsp;aspect ignor&eacute;, insolite et troublant de l&rsquo;orientalisme</span></span></span></span></span></span><a href="#_ftn17" id="_ftnref17" name="_ftnref17">17</a><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">&nbsp;&raquo;. La posture de Nerval &agrave; l&rsquo;&eacute;gard de l&rsquo;esclavage est ainsi ambigu&euml;&nbsp;: tente-t-il de l&eacute;gitimer son propre recours &agrave; l&rsquo;esclavage pour anticiper la r&eacute;ception critique de son texte&nbsp;? Son d&eacute;sir d&rsquo;immersion est-il, au contraire, motiv&eacute; par un altruisme curieux et tol&eacute;rant&nbsp;?&nbsp; Quoi qu&rsquo;il en soit, il revendique une posture d&eacute;cal&eacute;e par rapport au discours europ&eacute;en dominant, qui tranche avec le positionnement unilat&eacute;ral de Lamartine dans les ann&eacute;es 1830. </span></span></span></span></span></span></p> <p class="Cit" style="text-align:justify">&nbsp;</p> <h2 style="text-align: justify;"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><b>Au-del&agrave;, le racialisme&nbsp;: entre savoir anthropologique et implications id&eacute;ologiques </b></span></span></span></h2> <p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">La visite de ce &laquo;&nbsp;magasin d&rsquo;hommes et de femmes &raquo; (Lamartine, p. 727) soul&egrave;ve des questionnements anthropologiques et id&eacute;ologiques qui d&eacute;passent les enjeux d&rsquo;un engagement circonstanciel. &Agrave; Constantinople comme au Caire, les march&eacute;s aux esclaves sont de v&eacute;ritables lieux d&rsquo;exposition des races.<i> </i>Ils offrent aux voyageurs un aper&ccedil;u de la diversit&eacute; de types, d&eacute;finis &agrave; partir de crit&egrave;res pr&eacute;cis. Le sexe, l&rsquo;origine et la couleur de peau permettent de les classer sur une &eacute;chelle de valeur d&eacute;terminant leur prix de vente. Cette classification raciale est &eacute;tablie par les marchands orientaux eux-m&ecirc;mes selon une v&eacute;ritable strat&eacute;gie de <i>marketing</i>&nbsp;: sont successivement propos&eacute;es aux voyageurs les &laquo;&nbsp;n&eacute;gresses&nbsp;&raquo; (en provenance de Nubie), les &laquo;&nbsp;Abyssiniennes&nbsp;&raquo; (en provenance d&rsquo;&Eacute;thiopie) et les &laquo;&nbsp;Circassiennes&nbsp;&raquo; (en provenance du nord-ouest du Caucase). La progression spatiale dans le march&eacute; suit ainsi un mouvement ascensionnel dont la logique est &eacute;galement tarifaire&nbsp;: alors que les n&eacute;gresses sont directement expos&eacute;es dans des &laquo;&nbsp;chambres&nbsp;&raquo; &agrave; l&rsquo;entr&eacute;e du bazar, les Circassiennes sont pr&eacute;serv&eacute;es dans des lieux dont l&rsquo;acc&egrave;s est restreint. &Agrave; l&rsquo;&eacute;gard du prix, Lamartine donne les pr&eacute;cisions suivantes&nbsp;: &laquo;&nbsp;Le prix de ces belles cr&eacute;atures va jusqu&rsquo;&agrave; douze ou vingt mille piastres (de trois &agrave; cinq mille francs), tandis que les esclaves noires d&rsquo;une beaut&eacute; ordinaire ne se vendent que cinq ou six cents francs, et les plus belles mille &agrave; douze cents.&nbsp;&raquo; (p. 730).</span></span></span> <span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Ces logiques de classification et de hi&eacute;rarchisation des races sont &agrave; remettre dans le contexte des th&eacute;ories racialistes en voie de d&eacute;veloppement sous l&rsquo;influence de penseurs europ&eacute;ens tels que le docteur Julien Joseph Virey dans son <i>Histoire naturelle du genre humain </i>(1800), ou plus tard Gobineau dans son <i>Essai sur l&rsquo;in&eacute;galit&eacute; des races humaines </i>(1853-1855). En Europe au XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle, le d&eacute;bat sur l&rsquo;origine de l&rsquo;humanit&eacute; fait encore rage&nbsp;: le monog&eacute;nisme est remis en question par une conception polyg&eacute;niste fond&eacute;e sur l&rsquo;id&eacute;e selon laquelle il existerait plusieurs esp&egrave;ces<i> </i>humaines, distingu&eacute;es notamment par la couleur de peau, mais &eacute;galement par l&rsquo;angle facial&nbsp;: plus ce dernier est aigu, plus l&rsquo;homme se rapprocherait du singe. Les crit&egrave;res esth&eacute;tiques sont associ&eacute;s &agrave; une &eacute;chelle de civilisation, dans laquelle les &laquo;&nbsp;races primitives &raquo; (p. 243) sont animalis&eacute;es, bestialis&eacute;es. Au centre de l&rsquo;&eacute;pisode, G&eacute;rard propose l&rsquo;&laquo;&nbsp;examen&nbsp;&raquo; rapide d&rsquo;un groupe de n&eacute;gresses &laquo;&nbsp;aux airs sauvages fort curieux&nbsp;&raquo;. Surpris, voire &laquo;&nbsp;&eacute;c&oelig;ur&eacute;&nbsp;&raquo;<i>, </i>par leur chevelure &eacute;paisse et graisseuse, ainsi que par leurs corps noirs tatou&eacute;s et incis&eacute;s, il les situe aux fronti&egrave;res m&ecirc;mes de l&rsquo;humanit&eacute; et mobilise la comparaison avec le singe&nbsp;: &nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;</span></span></span></span></span></span></p> <p class="Cit" style="margin-right: 56px; text-align: justify;"><q><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span style="tab-stops:70.9pt"><span arial="" style="font-family:"><span arial="" style="font-family:">&nbsp;&Agrave; voir ces formes malheureuses, qu&rsquo;il faut bien s&rsquo;avouer humaines, on se reproche philanthropiquement d&rsquo;avoir pu quelquefois manquer d&rsquo;&eacute;gards pour le singe, ce parent m&eacute;connu que notre orgueil de race s&rsquo;obstine &agrave; repousser. Les gestes et les attitudes ajoutaient encore &agrave; ce rapprochement, et je remarquai m&ecirc;me que leur pied, allong&eacute; et d&eacute;velopp&eacute; sans doute par l&rsquo;habitude de monter aux arbres, se rattachait sensiblement &agrave; la famille des quadrumanes. (p. 224) </span></span></span></span></span></q></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Ces crit&egrave;res sont d&eacute;terminants dans le choix de l&rsquo;esclave, le futur propri&eacute;taire allant jusqu&rsquo;&agrave; r&eacute;clamer une &laquo;&nbsp;teinte noire moins prononc&eacute;e&nbsp;&raquo; (p. 222). Se conformant aux canons esth&eacute;tiques occidentaux, il m&egrave;ne une v&eacute;ritable &laquo;&nbsp;qu&ecirc;te de la blancheur&nbsp;&raquo; dans ce march&eacute; qui &laquo;&nbsp;offr[e] toutes les nuances possibles de couleur et de forme&nbsp;&raquo; (p. 220). Par ailleurs, la perfection artistique semble &eacute;galement s&rsquo;&ecirc;tre nich&eacute;e dans la d&eacute;licatesse des traits, se r&eacute;f&eacute;rant ainsi &agrave; l&rsquo;id&eacute;al antique de la statuaire&nbsp;:&nbsp;&nbsp; &nbsp;</span></span></span></p> <p class="Cit" style="margin-right: 56px; text-align: justify;"><q><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span style="tab-stops:70.9pt"><span arial="" style="font-family:"><span arial="" style="font-family:">&nbsp;Dans une grande salle aux lambris sculpt&eacute;s qu&rsquo;enrichissaient encore des restes d&rsquo;arabesques peintes et dor&eacute;es, je vis rang&eacute;es contre le mur cinq femmes assez belles, dont le teint rappelait l&rsquo;&eacute;clat du bronze de Florence&nbsp;; leurs figures &eacute;taient r&eacute;guli&egrave;res, leur nez droit, leur bouche petite&nbsp;; l&rsquo;ovale parfait de leur t&ecirc;te, l&rsquo;emmanchement gracieux de leur col, la s&eacute;r&eacute;nit&eacute; de leur physionomie leur donnaient l&rsquo;air de ces madones peintes d&rsquo;Italie donc la couleur a jauni par le temps. C&rsquo;&eacute;taient des Abyssiennes catholiques, des descendantes peut-&ecirc;tre du pr&ecirc;tre Jean ou de la reine Candace. (p. 243) </span></span></span></span></span></q></p> <p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Lamartine, ayant lui aussi recours &agrave; la comparaison, invoquait d&eacute;j&agrave; cette beaut&eacute; antique&nbsp;: &nbsp;</span></span></span></span></span></span></p> <p class="Cit" style="margin-right: 56px; text-indent: -0.05pt; text-align: justify;"><q><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span style="tab-stops:70.9pt"><span arial="" style="font-family:"><span arial="" style="font-family:">&nbsp;Le plus remarquable &eacute;tait une troupe de jeunes filles d&rsquo;Abyssinie, au nombre de douze ou quinze&nbsp;; adoss&eacute;es les unes aux autres comme ces figures antiques de cariatides qui soutiennent un vase sur leurs t&ecirc;tes [&hellip;]. Ces visages &eacute;taient en g&eacute;n&eacute;ral d&rsquo;une grande beaut&eacute;&nbsp;: les yeux en amande, le nez aquilin, les l&egrave;vres minces, le contour ovale et d&eacute;licat des joues, les longs cheveux noirs luisants comme des ailes de corbeaux. (p.&nbsp;726-727) </span></span></span></span></span></q></p> <p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Alors que G&eacute;rard semble se d&eacute;tacher difficilement de ses propres rep&egrave;res, confondant sa qu&ecirc;te du F&eacute;minin dans une &eacute;ternelle qu&ecirc;te du <i>m&ecirc;me, </i>Lamartine, moins influenc&eacute; par les th&eacute;ories racialistes encore en gestation, valorise l&rsquo;authenticit&eacute; et le pittoresque&nbsp;: </span></span></span></span></span></span></p> <p class="Cit" style="margin-right: 56px; text-align: justify;"><q><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span style="tab-stops:70.9pt"><span arial="" style="font-family:"><span arial="" style="font-family:">&nbsp;Une de ces G&eacute;orgiennes &eacute;tait d&rsquo;une beaut&eacute; accomplie&nbsp;: les traits d&eacute;licats et sensibles, l&rsquo;&oelig;il doux et pensif, la peau d&rsquo;une blancheur et d&rsquo;un &eacute;clat admirables. Mais la physionomie des femmes de ce pays est loin du charme et de la puret&eacute; de celles des Arabes&nbsp;: on sent trop le Nord dans ces figures. (p. 730) </span></span></span></span></span></q></p> <p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Poursuivant sa qu&ecirc;te incessante d&rsquo;une beaut&eacute; absolue et &laquo;&nbsp;pure&nbsp;&raquo;, Lamartine pr&eacute;figure ici la posture d&eacute;centr&eacute;e, antimoderniste et primitiviste d&rsquo;un Th&eacute;ophile Gautier</span></span></span></span></span></span><a href="#_ftn18" id="_ftnref18" name="_ftnref18">18</a><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">. &nbsp;</span></span></span></span></span></span></p> <p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Dans son rapport au discours dominant, le texte de Nerval semble n&eacute;anmoins plus complexe&nbsp;: son fonctionnement polyphonique invite &agrave; d&eacute;passer un premier niveau de lecture qui consisterait &agrave; identifier dans cet &eacute;pisode les &laquo;</span></span></span>&nbsp;<span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">premi&egrave;res manifestations d&rsquo;[un] racisme litt&eacute;raire&nbsp;&raquo; dont Nerval serait, selon Roger Botte, &laquo;&nbsp;le pr&eacute;curseur en France</span></span></span></span></span></span><a href="#_ftn19" id="_ftnref19" name="_ftnref19">19</a> <span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">&raquo;. Conscient de ses implications id&eacute;ologiques, Nerval semble utiliser la notion de race pour imposer, <i>a contrario, </i>sa posture d&eacute;cal&eacute;e et d&eacute;centr&eacute;e. Contre toute attente (lui-m&ecirc;me &eacute;voque son &laquo;&nbsp;go&ucirc;t de l&rsquo;&eacute;trange et de l&rsquo;impr&eacute;vu&nbsp;&raquo;), il choisit d&rsquo;acheter une esclave javanaise, appartenant &agrave; &laquo;&nbsp;la race jaune&nbsp;&raquo;. Par ce geste, il refuse toute position extr&ecirc;me qui consisterait &agrave; choisir entre le noir (acheter une n&eacute;gresse) et le blanc (acheter une circassienne). Selon Sarga Moussa, ce choix r&eacute;v&egrave;le le refus d&rsquo;un &laquo;&nbsp;exotisme de la puret&eacute; ethnique&nbsp;&raquo;, au profit d&rsquo;une &laquo;&nbsp;anthropologie imaginaire fond&eacute;e sur l&rsquo;id&eacute;e de m&eacute;lang</span></span></span></span></span></span>e<a href="#_ftn20" id="_ftnref20" name="_ftnref20">20</a><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">&nbsp;&raquo;. La confrontation des positionnements racialistes respectifs de Lamartine et de Nerval r&eacute;v&egrave;le une divergence de postures (entre m&eacute;tissage et primitivisme) manifestant une volont&eacute; commune de se d&eacute;tacher du discours dominant. </span></span></span></span></span></span></p> <p class="Cit" style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">La visite du march&eacute; aux esclaves r&eacute;pond ainsi, dans la premi&egrave;re moiti&eacute; du XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle, &agrave; un certain nombre de conventions. Malgr&eacute; l&rsquo;aversion pour les touristes que les voyageurs romantiques expriment &agrave; l&rsquo;unisson, les r&eacute;cits de voyage, et plus tardivement les guides, ont fait de ce lieu un espace et une attraction touristique, au m&ecirc;me titre que l&rsquo;excursion dans les pyramides de Gizeh. Cette curieuse fascination pour un lieu o&ugrave; l&rsquo;on &laquo;&nbsp;trafiqu[e] la chair humain</span></span></span></span></span></span>e<a href="#_ftn21" id="_ftnref21" name="_ftnref21">21</a>&nbsp;<span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">&raquo; est tant bien que mal rattrap&eacute;e par les imp&eacute;ratifs moraux et politiques qui d&eacute;terminent le discours du voyageur dans un contexte majoritairement abolitionniste. Si cet aspect &laquo;&nbsp;convenu&nbsp;&raquo; se manifeste au niveau du <i>contexte, </i>il faut &eacute;galement prendre en compte le <i>cotexte&nbsp;: </i>chaque texte repose sur des effets de reprise et des jeux de variation. En tant que dispositif litt&eacute;raire, le r&eacute;cit de voyage autorise la distanciation et la polyphonie. Ainsi l&rsquo;&eacute;crivain-voyageur peut-il se d&eacute;tacher des conventions litt&eacute;raires, morales et politiques pour ouvrir la voie &agrave; un discours plus tol&eacute;rant et altruiste qui pourrait porter les germes d&rsquo;un journalisme ethnographique &agrave; la Kesse</span></span></span></span></span></span>l<a href="#_ftn22" id="_ftnref22" name="_ftnref22">22</a><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">. </span></span></span></span></span></span></p> <p class="Cit" style="text-align:center"><img alt="Une du journal Le Matin 8 juin 1930" data-entity-type="file" data-entity-uuid="3956e08f-ea6b-4919-8447-ec81d8fa167a" src="https://www.alepreuve.org/sites/default/files/inline-images/Zeghdani_2.jpg" /></p> <p class="Cit" style="text-align:center"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><i><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Le Matin, </span></span></span></i><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">8 juin 1930 </span></span></span></span></span></span></p> <p class="Cit" style="text-align:center">&nbsp;</p> <hr /> <p class="Cit" style="text-align:justify"><b>Notes et r&eacute;f&eacute;rences :</b></p> <p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><b><span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Bibliographie indicative</span></span></span></b></span></span></span></p> <p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><b><span style="font-size:11.0pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Corpus primaire&nbsp;: </span></span></span></b></span></span></span></p> <p class="Cit" style="text-indent:35.4pt; text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Alphonse de Lamartine, <i>Voyage en Orient </i>[1835], Paris, Gallimard, 2011. </span></span></span></span></span></span></p> <p class="Cit" style="text-indent:35.4pt; text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">G&eacute;rard de Nerval, <i>Voyage en Orient </i>[1851], Paris, Gallimard, 1998. </span></span></span></span></span></span></p> <p class="Cit" style="text-align:justify">&nbsp;</p> <p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><b><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Autres textes cit&eacute;s&nbsp;: </span></span></span></b></span></span></span></p> <p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Marie-Th&eacute;odore Reno&uuml;ard de Bussierre, <i>Lettres sur l&rsquo;Orient &eacute;crites pendant les ann&eacute;es 1827 et 1828, </i>Paris, Levrault, 1829, 3 tomes.</span></span></span></span></span></span></p> <p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Auguste-Louis, comte de Forbin, <i>Voyage dans le Levant en 1817 et 1818</i>, Paris, Imprimerie royale, 1819.</span></span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Alphonse de Lamartine, <i>La France parlementaire (1834-1851), &OElig;uvres oratoires et &eacute;crits politiques, </i>Paris, A. Lacroix, 1864.&nbsp; </span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span style="tab-stops:35.45pt"><span style="text-autospace:none"><span arial="" style="font-family:">Joseph Michaud et Joseph Poujoulat, <i>Correspondance d&rsquo;Orient 1830-1831, </i>Paris, Ducollet, 1833, 7 tomes.</span></span></span></span></span></p> <p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><b><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Corpus secondaire&nbsp;: </span></span></span></b></span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Mouna Alsaid, &laquo;&nbsp;L&rsquo;image de l&rsquo;Orient chez quelques &eacute;crivains fran&ccedil;ais (Lamartine, Nerval, Barr&egrave;s, Benoit). Naissance, &eacute;volution, d&eacute;clin d&rsquo;un mythe orientaliste de l&rsquo;&egrave;re coloniale&nbsp;&raquo;, th&egrave;se de doctorat, Universit&eacute; Lumi&egrave;re, Lyon 2, soutenue en 2009. </span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Mina Apic, &laquo;&nbsp;Le<i> Voyage en Orient</i> de G&eacute;rard de Nerval en tant que remise en question de la perspective eurocentriste&nbsp;&raquo;, <i>Revista de Filologia Romanica, </i>n&deg;33, 2, 2016, p. 257-275. </span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Pascal Blanchard (dir.), Nicolas Bancel (dir.), Gilles Bo&euml;tsch (dir.), Christelle Taraud (dir.) et Dominic Thomas (dir.), <i>Sexe, race et colonies. La domination des corps du XV<sup>e</sup> si&egrave;cle &agrave; nos jours, </i>Paris, La D&eacute;couverte, 2018.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="background:white"><span style="color:black">Roger Botte</span></span><span style="background:white"><span style="color:black">, &laquo;&nbsp;Des europ&eacute;ens au march&eacute; aux esclaves&nbsp;: stade supr&ecirc;me de l&rsquo;exotisme&nbsp;? &Eacute;gypte, premi&egrave;re moiti&eacute; du XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle&nbsp;&raquo;,&nbsp;<i>Journal des africanistes</i>&nbsp;[En ligne], 86-2, 2016. URL&nbsp;: </span></span><a href="http://journals.openedition.org/africanistes/5061" style="color:#0563c1; text-decoration:underline"><span style="background:white">http://journals.openedition.org/africanistes/5061</span></a><span style="background:white"><span style="color:black"> (derni&egrave;re consultation&nbsp;: 31 mai 2021).</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="background:white"><span style="color:black">Jean-Michel Deveau, <i>Femmes esclaves, d&#39;hier &agrave; aujourd&#39;hui</i>, Paris, France Empire, 1998. </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span style="text-autospace:none"><span arial="" style="font-family:">Fr&eacute;d&eacute;ric Hitzel, &laquo;&nbsp;L&rsquo;esclavage en territoire ottoman &agrave; l&rsquo;&eacute;poque moderne&nbsp;&raquo;, <i>Couleurs de l&rsquo;esclavage sur les deux rives de la M&eacute;diterran&eacute;e (Moyen &Acirc;ge &ndash; XX<sup>e</sup> si&egrave;cle), </i>sous la direction de Roger Botte et Alessandro Stella, Paris, Karthala, 2012, p. 263-282. </span></span></span></span></p> <p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Daniel Lan&ccedil;on (dir.) et Sarga Moussa (dir.), <i>L&rsquo;Esclavage oriental et africain au regard des litt&eacute;ratures, des arts et de l&rsquo;histoire </i>(XVIII<sup>e</sup>-XX<sup>e</sup> si&egrave;cles), Paris, Presses de la Sorbonne Nouvelle, 2019. </span></span></span></span></span></span></p> <p class="Cit" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:">Bernard Lewis, <i>Race et esclavage au Proche Orient </i>[1990], trad. de l&rsquo;anglais. par Rose Saint-James, Paris, Gallimard, &laquo;&nbsp;Biblioth&egrave;que des Histoires&nbsp;&raquo;, 1993.</span></span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="background:white"><span style="color:black">Sarga Moussa, &laquo;&nbsp;V. La sc&egrave;ne du march&eacute; aux esclaves dans le&nbsp;<i>Voyage en Orient</i>&nbsp;et dans un discours politique de Lamartine en 1835&nbsp;&raquo;, &eacute;d. Aur&eacute;lie Foglia,&nbsp;<i>Lamartine ou la vie lyrique, </i>Paris, Hermann, 2018, p. 81-90.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="background:white"><span style="color:black">Sarga Moussa (dir.), <i>Litt&eacute;rature et esclavage, </i>Paris, Desjonqu&egrave;res, 2010. </span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="background:white"><span style="color:black">Sarga Moussa</span></span> &laquo;&nbsp;La couleur des esclaves dans le <i>Voyage en Orient </i>de Nerval&nbsp;&raquo;, <i>La Perspective interdisciplinaire des &eacute;tudes fran&ccedil;aises et francophone</i>s, Anna Kieliszczyk (dir.) et Ewa Pilecka (dir.), Pruszk&oacute;w, Leksem, 2009, p. 213-221.</span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span style="vertical-align:baseline"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span arial="" style="border:none windowtext 1.0pt; font-family:">Fr&eacute;d&eacute;ric Regent,&nbsp;<em><span arial="" style="font-family:">La France et ses esclaves, de la colonisation aux abolitions (1620-1848)</span></em>, Paris, Grasset et Fasquelle, 2007.</span></span></span></span></span></p> <p style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:150%"><span arial="" style="font-family:"><span style="background:white"><span style="color:black">Nelly Schmidt, <i>L&#39;abolition de l&#39;esclavage : 5 si&egrave;cles de combats&nbsp;(XVI<sup>e</sup>/XX<sup>e</sup> si&egrave;cles),</i> Paris, Fayard, 2008.</span></span></span></span></span></p> <div> <hr /> <p class="MsoFootnoteText"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref1" id="_ftn1" name="_ftn1" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">1</a> Joseph Michaud, <i>Correspondance d&rsquo;Orient, </i>t. II,<i> </i>Paris, Ducollet, 1833, p. 392. </span></span></p> <div id="ftn2"> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref2" id="_ftn2" name="_ftn2" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">2</a> Alphonse de Lamartine, <i>Voyage en Orient, </i>Paris, Gallimard<i>, </i>2011, p. 725. L&rsquo;&eacute;pisode en question appara&icirc;t dans la section intitul&eacute;e &laquo;&nbsp;Constantinople&nbsp;&raquo; du tome III (p. 725-731). Toutes les r&eacute;f&eacute;rences &agrave; cette &oelig;uvre renverront d&eacute;sormais &agrave; cette &eacute;dition&nbsp;; elles seront indiqu&eacute;es dans le texte.</span></span></p> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref3" id="_ftn3" name="_ftn3" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">3</a><span arial="" style="font-family:"> G&eacute;rard de Nerval, </span><i><span arial="" style="font-family:">Voyage en Orient, </span></i><span arial="" style="font-family:">Paris, Gallimard, 1998, p. 220. L&rsquo;&eacute;pisode en question occupe l&rsquo;int&eacute;gralit&eacute; du chapitre intitul&eacute; &laquo;&nbsp;Les Esclaves&nbsp;&raquo; de la section <i>Les Femmes du Caire </i>(p. 212-245).&nbsp; </span><span arial="" style="font-family:">Toutes les r&eacute;f&eacute;rences &agrave; cette &oelig;uvre renverront d&eacute;sormais &agrave; cette &eacute;dition&nbsp;; elles seront indiqu&eacute;es dans le texte.</span></span></span></p> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref4" id="_ftn4" name="_ftn4" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">4</a> C&rsquo;est un <i>topos </i>qui s&rsquo;est &eacute;galement r&eacute;pandu en peinture, on pense notamment au c&eacute;l&egrave;bre &laquo;&nbsp;March&eacute; d&rsquo;esclaves&nbsp;&raquo; d&rsquo;Horace Vernet. Voir Fig. 1.</span></span></p> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref5" id="_ftn5" name="_ftn5" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">5</a> &laquo;&nbsp;Sc&egrave;nes de la vie &eacute;gyptienne. &mdash; Les Femmes du Caire. &mdash; II. &mdash; Les Esclaves, par M. G&eacute;rard de Nerval&nbsp;&raquo;, <i>La Revue des Deux Mondes, </i>t. 15, 1846, p. 5-38.</span></span></p> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref6" id="_ftn6" name="_ftn6" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">6</a> Sur la diversit&eacute; des couleurs de l&rsquo;esclavage m&eacute;diterran&eacute;en, voir Bernard Lewis, <i>Race et esclavage au Proche Orient </i>[1990], trad. de l&rsquo;anglais. par Rose Saint-James, Paris, Gallimard, coll. &laquo;&nbsp;Biblioth&egrave;que des Histoires&nbsp;&raquo;, 1993.</span></span></p> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:11pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref7" id="_ftn7" name="_ftn7" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">7</a> <span style="font-size:10.0pt"><span style="background:white"><span style="color:black">Roger Botte, &laquo;&nbsp;Des europ&eacute;ens au march&eacute; aux esclaves&nbsp;: stade supr&ecirc;me de l&rsquo;exotisme&nbsp;? &Eacute;gypte, premi&egrave;re moiti&eacute; du XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle&nbsp;&raquo;,&nbsp;<i>Journal des africanistes</i>&nbsp;[En ligne], 86-2, 2016. URL&nbsp;: </span></span></span><a href="http://journals.openedition.org/africanistes/5061" style="color:#0563c1; text-decoration:underline"><span style="font-size:10.0pt"><span style="background:white">http://journals.openedition.org/africanistes/5061</span></span></a><span style="font-size:10.0pt"><span style="background:white"><span style="color:black"> (derni&egrave;re consultation&nbsp;: 31 mai 2021).</span></span></span></span></span></p> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref8" id="_ftn8" name="_ftn8" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">8</a> Comte de Forbin, <i>Voyage dans le Levant, </i>Paris, Imprimerie royale, 1819, p. 80.</span></span></p> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref9" id="_ftn9" name="_ftn9" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">9</a> Sur les zoos humains, voir Nicolas Bancel, Pascal Blanchard, Gilles Bo&euml;tsch, &Eacute;ric Deroo et Sandrine Lemaire (dir.), <i>Zoos humains&nbsp;: Au temps des exhibitions humaines, </i>Paris, La D&eacute;couverte, &laquo;&nbsp;Poche/Sciences humaines et sociales&nbsp;&raquo;, 2004.</span></span></p> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref10" id="_ftn10" name="_ftn10" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">10</a> Joseph Michaud, <i>Correspondance d&rsquo;Orient, op. cit., </i>p. 396.</span></span></p> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref11" id="_ftn11" name="_ftn11" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">11</a> Alphonse de Lamartine, <i>Voyage en Orient, op. cit.</i>, p. 726.</span></span></p> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref12" id="_ftn12" name="_ftn12" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">12</a> Voir Sarga Moussa, &laquo;&nbsp;La cha&icirc;ne de l&rsquo;esclavage dans les <i>Lettres persanes&nbsp;&raquo;, Litt&eacute;rature et esclavage, </i>Paris, Desjonqu&egrave;res, p. 50-59.</span></span></p> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref13" id="_ftn13" name="_ftn13" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">13</a> Notes au <i>Voyage en Orient </i>de Nerval, <i>op.cit., </i>p. 874.</span></span></p> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref14" id="_ftn14" name="_ftn14" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">14</a> Sarga Moussa, &laquo;&nbsp;La couleur des esclaves dans le <i>Voyage en Orient </i>de Nerval&nbsp;&raquo;, <i>La Perspective interdisciplinaire des &eacute;tudes fran&ccedil;aises et francophones</i>, Leksem, 2009, p. 213-221.</span></span></p> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref15" id="_ftn15" name="_ftn15" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">15</a> Joseph Michaud, <i>Correspondance d&rsquo;Orient, op. cit., </i>p. 407.</span></span></p> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref16" id="_ftn16" name="_ftn16" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">16</a> Voir Malek Chebel, <i>L&rsquo;esclavage en terre d&rsquo;islam, </i>Paris, Fayard, 2007.</span></span></p> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref17" id="_ftn17" name="_ftn17" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">17</a> <span style="background:white"><span style="color:black">Roger Botte, &laquo;&nbsp;Des europ&eacute;ens au march&eacute; aux esclaves&nbsp;: stade supr&ecirc;me de l&rsquo;exotisme&nbsp;? &Eacute;gypte, premi&egrave;re moiti&eacute; du XIX<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle&nbsp;&raquo;,&nbsp;art. cit.</span></span></span></span></p> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref18" id="_ftn18" name="_ftn18" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">18</a> Si Th&eacute;ophile Gautier pose les bases de cette &laquo;&nbsp;qu&ecirc;te esth&eacute;tique&nbsp;&raquo; dans sa tr&egrave;s c&eacute;l&egrave;bre pr&eacute;face &agrave; <i>Mademoiselle de Maupin </i>[1835]<i>, </i>il la poursuit dans un certain nombre de ses r&eacute;cits de voyage. Voir notamment <i>Constantinople </i>[1853], &eacute;d. Sarga Moussa, Paris, La Bo&icirc;te &agrave; Documents, 1990. On peut &eacute;galement se r&eacute;f&eacute;rer &agrave; un article de Sarga Moussa, &laquo;&nbsp;&Eacute;loge du divers&nbsp;: anthropologie et esth&eacute;tique dans les voyages m&eacute;diterran&eacute;ens de Gautier&nbsp;&raquo;, <i>Romantisme, </i>n&deg;114, &laquo;&nbsp;L&rsquo;exp&eacute;rience du relatif&nbsp;&raquo;, 2001, p. 51-60.</span></span></p> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref19" id="_ftn19" name="_ftn19" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">19</a> <i><span style="background:white"><span style="color:black">Ibid.</span></span></i></span></span></p> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref20" id="_ftn20" name="_ftn20" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">20</a> Sarga Moussa, &laquo;&nbsp;La couleur des esclaves dans le <i>Voyage en Orient </i>de Nerval&nbsp;&raquo;, <i>op. cit.</i></span></span></p> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref21" id="_ftn21" name="_ftn21" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">21</a> Expression emprunt&eacute;e &agrave; Reno&uuml;ard de Bussierre, <i>Lettres sur l&rsquo;Orient pendant les ann&eacute;es 1827 et 1828, </i>Paris, Levreau, 1829, p. 308.</span></span></p> <p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span arial="" style="font-family:"><a href="#_ftnref22" id="_ftn22" name="_ftn22" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">22</a> Entre mai et juin 1930, Joseph Kessel publie une s&eacute;rie de reportages dans <i>Le Matin </i>sur le commerce d&rsquo;esclaves dans la Corne de l&rsquo;Afrique et en Arabie. </span></span></p> </div> </div>