<p>La prison est une institution qui participe &agrave; la r&eacute;gulation sociale &agrave; travers la mise &agrave; l&rsquo;&eacute;cart par la soci&eacute;t&eacute; de ses membres qui enfreignent les normes pr&eacute;alablement &eacute;tablies. De prime abord, &laquo;&nbsp;la finalit&eacute; de la prison est de faire peur&nbsp;&raquo; si l&rsquo;on se r&eacute;f&egrave;re &agrave; sa fonction utilitariste comme l&rsquo;indique Chauvenet (2010&nbsp;: 44). Cette finalit&eacute; dissuasive de la prison est sous-tendue par les vis&eacute;es r&eacute;tributives de la peine selon la conception de l&rsquo;&eacute;cole classique. Dans un tel but, &laquo;&nbsp;l&rsquo;emprisonnement fonctionne selon le principe d&rsquo;une soustraction physique et symbolique de l&rsquo;individu du cours social ordinaire et de la visibilit&eacute; publique.&nbsp;&raquo; (Arti&egrave;res, Lascoumes et Salle, 2004&nbsp;: 1). Cette soustraction de l&rsquo;espace public ainsi que son impact sont diversement appr&eacute;ci&eacute;s. Pour certains auteurs, le s&eacute;jour carc&eacute;ral, au-del&agrave; de tout ce qui peut appara&icirc;tre comme n&eacute;gatif, porte en son sein des aspects positifs. Le passage dans ce milieu produit parfois des amiti&eacute;s, des solidarit&eacute;s ind&eacute;fectibles entre d&eacute;tenus, sur la base de leur malheur commun. Ces amiti&eacute;s qui naissent en prison s&rsquo;exportent au-del&agrave; des murs de l&rsquo;institution carc&eacute;rale lorsque les d&eacute;tenus sont libres apr&egrave;s leur p&eacute;riode de d&eacute;tention, selon Chamond et al. (2014).</p> <p>Toutefois pour certains, la prison laisse des stigmates sur l&rsquo;image des d&eacute;tenus, souvent per&ccedil;us comme des personnes dangereuses (Chauvenet, 2009) mais aussi sur celle de leurs familles selon Hannem (2019). Ces derni&egrave;res sont per&ccedil;ues comme responsables de leur sort ainsi que du crime commis, au m&ecirc;me titre que le d&eacute;tenu; d&rsquo;o&ugrave; cette stigmatisation de courtoisie. De m&ecirc;me, pour Sigouin (2016), l&rsquo;&eacute;tiquetage (personne criminelle) serait plus difficile &agrave; supporter pour les personnes issues d&rsquo;un monde&nbsp;plus &laquo;&nbsp;normalis&eacute;&nbsp;&raquo; que celles issues de milieux criminels, car ces derniers se percevant elles-m&ecirc;mes comme des criminels.</p> <p>Au-del&agrave; de la stigmatisation des individus qui y sont (d&eacute;tenus) ou qui y vont (familles), la prison elle-m&ecirc;me fait l&rsquo;objet d&rsquo;une perception n&eacute;gative des populations riveraines comme le souligne Van Diest (2019) et m&ecirc;me dans l&rsquo;opinion publique en g&eacute;n&eacute;ral (Del&eacute;tang, 2022). Si ces perceptions sont largement r&eacute;pandues dans le corps social, c&rsquo;est qu&rsquo;elles reposeraient plus ou moins sur des faits objectifs. A cet effet, pour Le Caisne (2007), le milieu carc&eacute;ral est par essence un milieu dangereux o&ugrave; des violences sont commises. Celles-ci sont le fait de d&eacute;tenus qui l&rsquo;exercent sur d&rsquo;autres d&eacute;tenus (Bony, 2015&nbsp;; Trina, 2014 et Chauvenet, 2006) mais des d&eacute;tenus &agrave; l&rsquo;endroit de surveillants, quoique rares comme le mentionnent Gomez del Prado (2012) ainsi que Vacheret et Milton (2007). Cependant, ces violences seraient g&eacute;n&eacute;r&eacute;es par le sentiment d&rsquo;injustice subie, la promiscuit&eacute;, l&rsquo;impunit&eacute; et la faiblesse des sanctions encourues comme l&rsquo;indique Chauvenet (op. cit., 2006). Par ailleurs, ces violences seraient de fa&ccedil;on dialectique (origine et cons&eacute;quences) en lien avec les peurs existantes en milieu carc&eacute;ral. Ces peurs se retrouvent au sein des cod&eacute;tenus (dans leurs rapports) mais aussi entre les agents de correction (gardes p&eacute;nitentiaires) et les d&eacute;tenus. Les peurs ressenties par les agents de correction vis-&agrave;-vis des d&eacute;tenus reposeraient moins sur de v&eacute;ritables exp&eacute;riences de victimisation que sur la vuln&eacute;rabilit&eacute; ressentie par rapport au lieu (quartiers de haute s&eacute;curit&eacute; avec de dangereux criminels) de m&ecirc;me qu&rsquo;avec la t&acirc;che &agrave; accomplir (recours &agrave; la force envers un d&eacute;tenu).</p> <p>Aussi, le milieu carc&eacute;ral est-il &eacute;galement per&ccedil;u comme un endroit de racket, de trafics de tous genres avec comme caract&eacute;ristique essentielle le r&egrave;gne de l&rsquo;omerta (Chamond et al., op. cit.). Outre des violences que l&rsquo;on rencontre dans les prisons, les cons&eacute;quences de l&rsquo;emprisonnement sont pr&eacute;gnantes dans la vie des ex-d&eacute;tenus. En effet, pour Chantraine (2003) la prison favorise un processus de d&eacute;saffiliation qui pr&eacute;dispose par la suite &agrave; un retour en prison. De m&ecirc;me pour de Beaurepaire (2012), &agrave; la sortie de prison, il faut du temps pour que l&rsquo;ex-d&eacute;tenu puisse restaurer sa situation administrative (nouveaux documents administratifs), d&eacute;crocher une formation, un emploi, un logement stable et renouer les liens affectifs avec sa famille. Ce faisant, la prison participe &agrave; la d&eacute;structuration de l&rsquo;&eacute;tat des d&eacute;tenus plut&ocirc;t qu&rsquo;&agrave; leur reconstruction comme le souligne Chauvenet (idem, 2009). Ainsi, la resocialisation des ex-d&eacute;tenus appara&icirc;t comme une v&eacute;ritable gageure pour la soci&eacute;t&eacute;.</p> <p>S&rsquo;il existe des similitudes au niveau de l&rsquo;exp&eacute;rience carc&eacute;rale des d&eacute;tenus (n&eacute;gative ou positive) selon les pays (d&eacute;velopp&eacute;s ou en voie de d&eacute;veloppement), celle-ci diff&egrave;re en prenant en compte les conditions de d&eacute;tention. Ces conditions sont difficiles dans les pays en voie de d&eacute;veloppement o&ugrave; promiscuit&eacute;, surpeuplement, mauvais traitements, insalubrit&eacute;&hellip; sont d&eacute;crits par nombre d&rsquo;auteurs comme Sahi, Gaulithy et Aboudou (2021), Morelle (2013) et Zady (2012).</p> <p>Ces conditions difficiles, dans le contexte ivoirien, constituent une des raisons qui am&egrave;nent fr&eacute;quemment, des individus, voire leurs familles &agrave; se mobiliser et &agrave; mettre tout en &oelig;uvre pour que l&rsquo;un des leurs n&rsquo;aille pas s&rsquo;acquitter de sa dette envers la soci&eacute;t&eacute; (emprisonnement). Partant de ce constat et au-del&agrave; de la peur, il convient de se demander s&rsquo;il n&rsquo;y aurait pas d&rsquo;autres raisons pour lesquelles ces personnes mettent tout en &oelig;uvre pour &eacute;viter la prison&nbsp;? Qui sont les acteurs cl&eacute;s et de quelles marges disposent-ils pour actionner ou interrompre l&rsquo;action publique&nbsp;? Quels sont les faits objets de tractations et les diff&eacute;rentes strat&eacute;gies mises en &oelig;uvre &agrave; cette fin&nbsp;? Cette &eacute;tude vise &agrave; expliquer les m&eacute;canismes dont se servent certaines personnes afin d&rsquo;&eacute;viter la prison.</p> <h2>1. M&eacute;thodologie</h2> <p>Le corpus m&eacute;thodologique autour duquel s&rsquo;est b&acirc;ti cette &eacute;tude repose essentiellement sur deux principaux axes&nbsp;: &agrave; savoir le terrain d&rsquo;&eacute;tude, la population et l&rsquo;&eacute;chantillon d&rsquo;une part et les techniques de recueil devant servir &agrave; l&rsquo;analyse de ces donn&eacute;es d&rsquo;autre part.</p> <h3>1.1. Terrain d&rsquo;&eacute;tude, population et &eacute;chantillon</h3> <p>L&rsquo;enqu&ecirc;te s&rsquo;est d&eacute;roul&eacute;e dans le district d&rsquo;Abidjan, pr&eacute;cis&eacute;ment dans les communes de Cocody, Yopougon et celle de Bingerville durant la p&eacute;riode de mars &agrave; avril 2021. Le choix de ces communes repose essentiellement sur le fait que celles-ci nous permettaient d&rsquo;entrer en contact avec les populations de diff&eacute;rentes classes sociales (les populations vivant dans les quartiers d&eacute;favoris&eacute;s et les habitats pr&eacute;caires, celles logeant dans les cit&eacute;s dortoirs de m&ecirc;me que celles des zones r&eacute;sidentielles).</p> <p>Par ailleurs, c&rsquo;est la m&eacute;thode d&rsquo;&eacute;chantillonnage non al&eacute;atoire notamment l&rsquo;&eacute;chantillon de commodit&eacute; que nous avons choisi parce que nous ne disposions pas de base de donn&eacute;es exactes concernant cette population et aussi parce que ces personnes &eacute;taient facilement atteignables et dispos&eacute;es &agrave; participer &agrave; l&rsquo;enqu&ecirc;te. L&rsquo;&eacute;chantillon de 75 personnes, constitu&eacute; de quatre<a href="#_ftn1" name="_ftnref1" title="">[1]</a> officiers de police judiciaire (OPJ)<a href="#_ftn2" name="_ftnref2" title="">[2]</a> et de 71 justiciables, a &eacute;t&eacute; d&eacute;termin&eacute; en prenant en compte certaines sp&eacute;cificit&eacute;s<a href="#_ftn3" name="_ftnref3" title="">[3]</a> li&eacute;es &agrave; la taille de la population de chaque commune. Ainsi, en nous appuyant sur les diff&eacute;rentes cat&eacute;gories sociod&eacute;mographiques, l&rsquo;&eacute;chantillon se r&eacute;partit ainsi en nombre de personnes&nbsp;: Yopougon quarante-cinq, Cocody vingt et six pour la commune de Bingerville.</p> <h3>1.2. Techniques et recueil des donn&eacute;es</h3> <p>L&rsquo;&eacute;tude documentaire et l&rsquo;enqu&ecirc;te-interrogation sont les principales techniques de recueil des donn&eacute;es utilis&eacute;es au cours de cette &eacute;tude. Ainsi, pour ce qui concerne l&rsquo;&eacute;tude documentaire, nous avons eu recours &agrave; diverses sources d&rsquo;information (presse &eacute;crite et en ligne, les ouvrages et articles scientifiques). A travers cette documentation diversifi&eacute;e, nous avons voulu avoir le maximum d&rsquo;informations sur le sujet. Quant &agrave; l&rsquo;enqu&ecirc;te-interrogation, elle a consist&eacute; &agrave; administrer un questionnaire qui visait principalement &agrave; appr&eacute;hender les m&eacute;canismes qui sont mis en &oelig;uvre pour &eacute;viter, co&ucirc;te que co&ucirc;te, l&rsquo;incarc&eacute;ration. Aussi, avons-nous eu recours &agrave; des entretiens semi-dirig&eacute;s ax&eacute;s sur leurs diff&eacute;rentes exp&eacute;riences (directes ou indirectes), aussi bien du c&ocirc;t&eacute; des OPJ que des justiciables. En outre, au niveau de l&rsquo;analyse des donn&eacute;es, nous avons retenu l&rsquo;analyse quantitative &agrave; travers l&rsquo;usage des statistiques descriptives pour pr&eacute;senter de fa&ccedil;on chiffr&eacute;e les informations contenues dans les donn&eacute;es recueillies aupr&egrave;s des enqu&ecirc;t&eacute;s. Quant &agrave; l&rsquo;analyse qualitative, elle nous a permis de mettre l&rsquo;accent sur le discours des enqu&ecirc;t&eacute;s. Ces discours nous ont aid&eacute;s &agrave; mieux comprendre et analyser les marges offertes, par la proc&eacute;dure p&eacute;nale, aux diff&eacute;rents acteurs de m&ecirc;me que les diff&eacute;rentes strat&eacute;gies qui sont mobilis&eacute;es afin d&rsquo;&eacute;viter l&rsquo;emprisonnement.</p> <h2>2. R&eacute;sultats</h2> <p>L&rsquo;appr&eacute;hension de la criminalit&eacute; r&eacute;elle rel&egrave;ve aussi bien de la criminalit&eacute; apparente que du chiffre noir. Ainsi, en dehors des statistiques polici&egrave;res, il y a une dimension importante qui regroupe les cas n&rsquo;&eacute;tant pas parvenus &agrave; la police ou bien que l&rsquo;ayant &eacute;t&eacute;, n&rsquo;ont pas connu de suites. Aussi, bien qu&rsquo;une part des infractions peut &ecirc;tre appr&eacute;hend&eacute;e avant, nous voudrions prendre pour point de d&eacute;part de notre analyse, le d&eacute;clenchement de l&rsquo;action publique. L&rsquo;&eacute;vitement requiert que soient identifi&eacute;s les leviers pertinents du syst&egrave;me de justice sur lesquels l&rsquo;initiative ou l&rsquo;action d&rsquo;&eacute;vitement devrait porter. En d&rsquo;autres termes, il s&rsquo;agira d&rsquo;identifier les acteurs cl&eacute;s, les marges dont ils disposent dans la proc&eacute;dure p&eacute;nale, d&rsquo;analyser des faits et les strat&eacute;gies utilis&eacute;es pour &eacute;viter la prison.</p> <h3>2.1. Acteurs et marges de man&oelig;uvre dans la proc&eacute;dure menant &agrave; l&rsquo;incarc&eacute;ration</h3> <p>L&rsquo;incarc&eacute;ration est l&rsquo;aboutissement d&rsquo;un processus qui commence par l&rsquo;infraction (art. 2 du nouveau Code p&eacute;nal ivoirien<a href="#_ftn4" name="_ftnref4" title="">[4]</a>(NCPI)) suppos&eacute;e ou av&eacute;r&eacute;e. Pour &eacute;viter que ces infractions restent impunies, l&rsquo;action publique est activ&eacute;e par les personnes habilit&eacute;es. Or, tandis que cette action cherche &agrave; punir, la strat&eacute;gie d&rsquo;&eacute;vitement de la prison vise insidieusement, &agrave; interrompre la proc&eacute;dure ou en att&eacute;nuer les cons&eacute;quences de sorte qu&rsquo;il n&rsquo;y ait pas d&rsquo;incarc&eacute;ration. Toutes ces marges d&rsquo;actions mobilisent diff&eacute;rents acteurs du monde judiciaire et extrajudiciaire.</p> <h4>2.1.1. Le procureur de la R&eacute;publique&nbsp;</h4> <p>Le trouble &agrave; l&rsquo;ordre public et &agrave; la paix sociale suscite l&rsquo;action publique dont l&rsquo;exercice et la mise en mouvement sont d&eacute;volus aux magistrats ou aux fonctionnaires habilit&eacute;s (art. 6 du nouveau Code de proc&eacute;dure p&eacute;nale ivoirien<a href="#_ftn5" name="_ftnref5" title="">[5]</a> (NCPPI)), faisant office d&rsquo;autorit&eacute;s de police judiciaire (OPJ). Le procureur de la R&eacute;publique est l&rsquo;acteur central des officiers de police judiciaire. Ainsi, selon un magistrat c&rsquo;est &agrave; ce dernier, gardien des libert&eacute;s individuelles et collectives, qu&rsquo;il revient de d&eacute;fendre les justiciables contre les atteintes (infractions) &agrave; leurs droits l&eacute;gitimes. Toutefois, selon lui, le minist&egrave;re public est sous l&rsquo;autorit&eacute; directe du pouvoir ex&eacute;cutif, par le biais du garde des sceaux, ministre de la Justice, et son principal acteur, le procureur de la R&eacute;publique. Par cons&eacute;quent, ce dernier, &eacute;tant le d&eacute;tenteur exclusif de l&rsquo;opportunit&eacute; des poursuites, alors m&ecirc;me qu&rsquo;une infraction a &eacute;t&eacute; commise, il arrive qu&rsquo;une action ne soit d&eacute;clench&eacute;e. En jugeant de l&rsquo;opportunit&eacute; des poursuites, il dispose d&rsquo;un v&eacute;ritable pouvoir discr&eacute;tionnaire des suites &agrave; donner &agrave; une affaire. M&ecirc;me en cas de renonciation du p&eacute;nal en faveur de l&rsquo;action civile en r&eacute;paration du dommage caus&eacute; par l&rsquo;infraction, l&rsquo;action publique (art. 7 al. 2), n&rsquo;&eacute;tant pas suspendue, reste toujours comme une carte que le procureur d&eacute;tient dans la main. Aussi, lorsque la loi en dispose express&eacute;ment, la transaction peut &ecirc;tre une alternative possible en mati&egrave;re d&eacute;lictuelle et contraventionnelle jusqu&rsquo;au prononc&eacute; du jugement (art. 13 NCPPI). En cas de transaction (art. 14 NCPPI), c&rsquo;est encore au procureur qu&rsquo;incombe la responsabilit&eacute; de proposer le paiement de cette amende dans les limites de la peine d&rsquo;amende pr&eacute;vue par la loi pour l&rsquo;infraction constat&eacute;e et accept&eacute;e par le d&eacute;linquant (al. 1). Dans ce cas d&rsquo;esp&egrave;ce, un proc&egrave;s-verbal contenant l&rsquo;accord irr&eacute;vocable des parties et sign&eacute; par elles (al. 6) constate la transaction et &eacute;teint l&rsquo;action publique (al. 7).</p> <p>Aux dires de l&rsquo;OPJ GG, dans la pratique, le procureur de la R&eacute;publique peut laisser la latitude aux OPJ de g&eacute;rer &agrave; l&rsquo;amiable, dans les commissariats de police et brigades de gendarmerie, certaines infractions qualifi&eacute;es de &lsquo;mineures&rsquo;. Toutefois, &eacute;tant donn&eacute; que le r&egrave;glement &agrave; l&rsquo;amiable peut avoir diverses cons&eacute;quences, il requiert donc de la prudence. C&rsquo;est pourquoi, le r&egrave;glement &agrave; l&rsquo;amiable engag&eacute; par l&rsquo;OPJ, doit se faire avec l&rsquo;aval ou l&rsquo;accord pr&eacute;alable du procureur. C&rsquo;est ce qu&rsquo;illustrent les propos de l&rsquo;OPJ CD&nbsp;: &laquo;&nbsp;Surtout pour les cas de r&egrave;glement &agrave; l&rsquo;amiable, il peut toujours avoir des rebondissements qui peuvent vous rattraper, donc il est toujours bon d&rsquo;avoir un certain type de rapport avec le procureur&hellip;&nbsp;&raquo;. De ce fait, un plaignant non satisfait de la fa&ccedil;on dont son affaire a &eacute;t&eacute; r&eacute;gl&eacute;e en amont au commissariat de police ou &agrave; la brigade de gendarmerie par l&rsquo;OPJ en charge du dossier, peut saisir le procureur. Ce dernier demandera donc des comptes &agrave; cet OPJ. &laquo;&nbsp;C&rsquo;est vraiment la personne avec qui mieux vaut avoir de bons rapports dans notre m&eacute;tier&nbsp;&raquo; nous confie l&rsquo;OPJ GG. &laquo;&nbsp;En mati&egrave;re de proc&eacute;dure, quand on t&rsquo;envoie, il faut savoir t&rsquo;envoyer<a href="#_ftn6" name="_ftnref6" title="">[6]</a>. Et nous demandons toujours son avis sur les dossiers complexes, dans lesquels parfois notre hi&eacute;rarchie directe semble nous embarrasser. Cela nous couvre&nbsp;&raquo;, ajoute, l&rsquo;OPJ MI En cas d&rsquo;entorses ou de manquement &agrave; la proc&eacute;dure judiciaire de la part d&rsquo;un OPJ de son ressort, le procureur dispose d&rsquo;un pouvoir de suspension de ce dernier de l&rsquo;exercice de ses fonctions pour une dur&eacute;e de 2 mois (art. 28 NCPPI).</p> <h4>2.1.2. L&rsquo;officier de police judiciaire (OPJ)</h4> <p>Le policier ou le gendarme &agrave; qui le dossier est confi&eacute;, ayant en charge de constater les infractions &agrave; la loi p&eacute;nale, d&rsquo;en rassembler les preuves et d&rsquo;en rechercher les auteurs (art. 25 NCPPI), re&ccedil;oit les plaintes et d&eacute;nonciations et proc&egrave;de &agrave; l&rsquo;enqu&ecirc;te pr&eacute;liminaire dans les conditions pr&eacute;vues par les articles 60 &agrave; 76 du NCPPI. Il entend les personnes susceptibles de fournir des renseignements sur les faits et toutes celles qui pr&eacute;tendent avoir &eacute;t&eacute; l&eacute;s&eacute;es par l&rsquo;infraction et proc&egrave;dent aux constations utiles (art. 61 NCPPI). Dans les usages, &laquo;&nbsp;on peut mentionner sur la convocation remise au mis en cause qu&rsquo;il vienne dans nos locaux d&egrave;s r&eacute;ception de la convocation, ou par appel t&eacute;l&eacute;phonique convenir d&rsquo;un jour et d&rsquo;une heure de rendez-vous selon la disponibilit&eacute; de l&rsquo;OPJ&nbsp;&raquo; pr&eacute;cise l&rsquo;OPJ DC. Cette convocation ou cet appel constitue une pression psychologique sur l&rsquo;individu surtout quand il se reproche quelque chose et parfois lui et son entourage commencent &agrave; paniquer puisque la personne convoqu&eacute;e par l&rsquo;OPJ est tenue de compara&icirc;tre et de d&eacute;poser. Et si elle ne satisfait pas &agrave; cette obligation, avis en est donn&eacute; au procureur de la R&eacute;publique qui peut la contraindre &agrave; compara&icirc;tre par la force publique (art 62 al. 1). Ce pouvoir de contrainte physique dont dispose l&rsquo;OPJ peut, pour les n&eacute;cessit&eacute;s de l&rsquo;enqu&ecirc;te, amener &agrave; placer en garde &agrave; vue une ou plusieurs personnes contre qui existent des indices concordants de participation &agrave; l&rsquo;infraction.</p> <p>Au-del&agrave; des instructions du procureur de la R&eacute;publique, l&rsquo;OPJ peut parfois agir d&rsquo;office tout en &eacute;tant tenu de l&rsquo;en informer imm&eacute;diatement dans ce dernier cas (art. 60 NCPPI). Dans les usages, il dispose du pouvoir d&rsquo;appr&eacute;ciation de la &laquo;&nbsp;la gravit&eacute; ou non&nbsp;&raquo; des faits de sorte &agrave; d&eacute;f&eacute;rer le mis en cause au parquet ou d&rsquo;essayer un r&egrave;glement &agrave; l&rsquo;amiable sous ses auspices.</p> <p>Au total, ces pouvoirs d&rsquo;enqu&ecirc;te pr&eacute;liminaire, d&rsquo;audition du plaignant et du mis en cause, de r&eacute;daction des proc&egrave;s-verbaux de retrait de la plainte et du rapport de synth&egrave;se, conf&egrave;rent &agrave; un OPJ, un ensemble de pr&eacute;rogatives qui peuvent influencer les suites du dossier.</p> <h4>2.1.3. Le plaignant</h4> <p>Etant la partie l&eacute;s&eacute;e, le plaignant a aussi l&rsquo;initiative de mise en mouvement de l&rsquo;action publique par le d&eacute;p&ocirc;t de sa plainte (art. 6 al. 2 NCPPI). Autant le d&eacute;p&ocirc;t de cette plainte d&eacute;clenche l&rsquo;action publique, autant son retrait pourrait l&rsquo;&eacute;teindre (art. 11 al. 1), dans les limites de la loi, lorsque la plainte est une condition n&eacute;cessaire de la poursuite (art. 11. al. 3). Il devient la personne puissante qui tient un levier majeur (la plainte) de la poursuite de la proc&eacute;dure, vers qui le mis en cause et toute personne qui voudrait voir la proc&eacute;dure s&rsquo;interrompre, se tournent pour des tractations de tout genre. L&rsquo;OPJ CN relate&nbsp;: &laquo;&nbsp;j&rsquo;ai &eacute;t&eacute; confront&eacute; &agrave; un cas o&ugrave; c&rsquo;&eacute;tait le fils d&rsquo;un coll&egrave;gue qui &eacute;tait le mis en cause. On a tout essay&eacute; mais la plaignante ne voulait rien savoir. Et mon chef a d&ucirc; s&rsquo;agenouiller devant cette derni&egrave;re pour supplier, avant qu&rsquo;elle n&rsquo;accepte de retirer sa plainte&nbsp;&raquo;.</p> <h3>2.2. Analyse factuelle des cas &eacute;voqu&eacute;s par les enqu&ecirc;t&eacute;s</h3> <p>Les d&eacute;m&ecirc;l&eacute;s avec le syst&egrave;me de justice, tiennent au motif de plainte ou de d&eacute;nonciation impliquant le mis en cause et les faits qui lui sont r&eacute;ellement reproch&eacute;s.</p> <h4>2.2.1. Les faits et chefs d&rsquo;accusation</h4> <p>L&rsquo;&eacute;l&eacute;ment, motif de plainte, d&rsquo;accusation ou l&#39;arrestation ayant cr&eacute;&eacute; les d&eacute;m&ecirc;l&eacute;s avec le syst&egrave;me de justice, peut &ecirc;tre cat&eacute;goris&eacute; et regroup&eacute; en divers chefs d&rsquo;accusation&nbsp;:</p> <div> <p><img src="https://www.numerev.com/img/ck_3290_33_image4.png" /></p> <p>De toutes les cat&eacute;gories d&rsquo;infractions ayant fait l&rsquo;objet de tractations, 60,5 % des cas (le plus significatifs) concernent les infractions contre les biens, 18,3 % contre la personne et 21,2 % sont li&eacute;s &agrave; d&rsquo;autres infractions (vente et consommation de drogue, etc.). Toutefois, prises individuellement, les modalit&eacute;s, les plus significatives sont&nbsp;: la fraude&nbsp;18,3 %, les voies de faits 17 %, l&rsquo;abus de confiance 14 %, le vol 12,7 %, l&rsquo;escroquerie 11,3 %, les infractions au Code de la route 8,5 %, la vente et consommation de drogue ou d&rsquo;alcool 4 %. Cette cat&eacute;gorisation se d&eacute;cline en faits et t&eacute;moignages suivants&nbsp;:</p> <p>- Concernant les fraudes, elles portent sur&nbsp;: l&rsquo;&eacute;lectricit&eacute; et l&rsquo;eau, les examens scolaires, les fausses identit&eacute;s, les fausses d&eacute;clarations&hellip; Entre autres faits, on peut retenir : &laquo;&nbsp;J&rsquo;ai utilis&eacute; l&#39;extrait de naissance de son fr&egrave;re pour l&rsquo;&eacute;tablissement d&rsquo;une carte nationale d&rsquo;identit&eacute; &raquo;&nbsp;; &laquo;&nbsp;J&rsquo;ai &eacute;t&eacute; pris avec le portable en salle d&#39;examen&nbsp;&raquo;. Outre ces faits &agrave; caract&egrave;re administratif, une r&eacute;alit&eacute; majeure est la fraude sur l&rsquo;&eacute;lectricit&eacute; et l&rsquo;eau courante. &laquo;&nbsp;J&rsquo;ai vol&eacute; du courant, on m&rsquo;a attrap&eacute;&hellip;&nbsp;&raquo;. L&rsquo;acc&egrave;s &agrave; &eacute;lectricit&eacute;, &agrave; l&rsquo;eau potable est reconnu comme &eacute;tant des droits humains fondamentaux. Les op&eacute;rations frauduleuses les concernant sont, certes passibles de condamnation, mais trait&eacute;es de fa&ccedil;on sp&eacute;ciale. A ce propos, l&rsquo;OPJ MI explique : &laquo;&nbsp;Pour ce qui est de la fraude sur l&rsquo;&eacute;lectricit&eacute;, un compromis avec la Compagnie ivoirienne d&rsquo;&eacute;lectricit&eacute;, privil&eacute;gie le d&eacute;sint&eacute;ressement de l&rsquo;entreprise. Quand nous appr&eacute;hendons les fraudeurs, nous privil&eacute;gions le paiement de la consommation frauduleuse estim&eacute;e par les techniciens de la structure. C&rsquo;est &agrave; d&eacute;faut de paiement qu&rsquo;ils sont souvent d&eacute;f&eacute;r&eacute;s, tout en privil&eacute;giant toujours l&rsquo;option de paiement, ce, jusqu&rsquo;au parquet, voire au proc&egrave;s&nbsp;&raquo;.</p> <p>- Relativement aux voies de faits, il s&rsquo;agit des coups et blessures (volontaires ou involontaires), li&eacute;s g&eacute;n&eacute;ralement aux bagarres et autres agressions physiques ou verbales. L&rsquo;on note&nbsp;: &laquo;&nbsp;Bagarre avec un Haoussa (Nig&eacute;rien), il l&#39;a assomm&eacute; avec un tabouret. Les faits se sont d&eacute;roul&eacute;s en 1998&nbsp;&raquo;&nbsp;; &laquo;&nbsp;En 2012, une bagarre (r&egrave;glement de compte) &agrave; la machette o&ugrave; l&#39;un des membres du camp adverse a &eacute;t&eacute; d&eacute;couvert par mon ami&nbsp;&raquo; relatent les enqu&ecirc;t&eacute;s YZ et BD. Pour ces cas, &laquo;&nbsp;d&egrave;s que le mis en cause opte pour assurer les frais m&eacute;dicaux et tout ce qui est en lien avec le certificat m&eacute;dical, on s&rsquo;en tient &agrave; la gestion amiable pourvu qu&rsquo;il n&rsquo;y ait pas mort d&rsquo;homme ou de cons&eacute;quences plus graves&nbsp;&raquo; ajoute l&rsquo;OPJ GZ.</p> <p>-&nbsp;En ce qui concerne le vol, mentions a &eacute;t&eacute; faites sur l&rsquo;argent, les motos, le t&eacute;l&eacute;phone, les c&acirc;bles &eacute;lectriques, le bris de pare-brise&hellip; cependant, parfois le vol est &eacute;voqu&eacute; sans aucune pr&eacute;cision. Entre autres t&eacute;moignages, peut-on retenir&nbsp;: &laquo; Je travaillais dans un restaurant et c&#39;est moi qui gardais les cl&eacute;s de la caisse. C&#39;est &agrave; ce moment que l&#39;argent a disparu de la caisse. C&#39;est ainsi que le g&eacute;rant m&#39;a conduit &agrave; la police pour enqu&ecirc;te&nbsp;&raquo;. Face &agrave; de tels cas, l&rsquo;OPJ GG r&eacute;agit&nbsp;: &laquo;&nbsp;Pour les cas de vol, nous d&eacute;ferons en g&eacute;n&eacute;ral le mis en cause, toutefois l&rsquo;objet vol&eacute; peut &ecirc;tre tellement insignifiant que l&rsquo;initiative de restitution de l&rsquo;objet vol&eacute; peut nous amener &agrave; opter pour un r&egrave;glement &agrave; l&rsquo;amiable&nbsp;&raquo;.</p> <p>- Pour ce qui est des cas d&rsquo;abus de confiance, ils sont souvent li&eacute;s aux activit&eacute;s de petits m&eacute;tiers<a href="#_ftn1" name="_ftnref1" title="">[7]</a> o&ugrave; nombre de personnes abusent de la bonne foi de leurs clients&nbsp;: &laquo;&nbsp;Il a pris l&#39;argent et n&#39;a pas respect&eacute; ses engagements&nbsp;&raquo;&nbsp;; &laquo;&nbsp;Il a pris de l&#39;argent pour un travail qu&#39;il n&#39;a pas fait&nbsp;&raquo; ou la question cruciale de vente de terrains en C&ocirc;te d&rsquo;Ivoire&nbsp;: &laquo;&nbsp;vente d&#39;un m&ecirc;me terrain &agrave; plusieurs personnes le 01/02/2017&nbsp;&raquo;&nbsp;; &laquo;&nbsp;vente d&#39;une parcelle litigieuse en 2012&nbsp;&raquo;. Quant &agrave; cette autre infraction &laquo;&nbsp;voisine&nbsp;&raquo; qu&rsquo;est l&rsquo;escroquerie, un enqu&ecirc;t&eacute; relate&nbsp;: &laquo;&nbsp;Le pr&eacute;sident d&#39;une association de la soci&eacute;t&eacute; civile nous a associ&eacute; dans le recrutement des enseignants volontaires moyennant de l&#39;argent pour le compte du MEN<a href="#_ftn2" name="_ftnref2" title="">[8]</a>. Mon neveu a travaill&eacute; avec cette ONG. Afin d&#39;atteindre le pr&eacute;sident de l&#39;ONG, ils ont arr&ecirc;t&eacute; mon prot&eacute;g&eacute;&nbsp;&raquo;. Selon l&rsquo;OPJ GG, pour ces cas d&rsquo;abus de confiance et d&rsquo;escroquerie, qui touchent aux questions d&rsquo;argent&nbsp;: &laquo;&nbsp;nous privil&eacute;gions la r&eacute;paration du pr&eacute;judice souffert par la restitution de l&rsquo;argent&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;il en est de m&ecirc;me pour les infractions contre la propri&eacute;t&eacute; o&ugrave; la r&eacute;paration du bien d&eacute;truit ou endommag&eacute; est mise au-devant, g&eacute;n&eacute;ralement &agrave; l&rsquo;initiative du mis en cause&nbsp;&raquo;. &laquo;&nbsp;Toutefois lorsqu&rsquo;il s&rsquo;agit de sommes importantes surtout quand le dossier concerne un particulier ou une personne morale, le mis en cause est d&eacute;f&eacute;r&eacute; au parquet&nbsp;&raquo; pr&eacute;cise l&rsquo;OPJ MI.</p> <p>- Quant aux infractions au Code de la route avec d&eacute;faut de permis de conduire ou d&rsquo;assurance automobile et ayant cr&eacute;&eacute; accident, on observe souvent le retrait du permis.</p> <p>Outre les cas relat&eacute;s, certains mis en cause se sont vus accus&eacute;s de deux faits d&rsquo;infraction&nbsp;: Ainsi a-t-on&nbsp;observ&eacute; : Vol + viol&nbsp;; vol + abus de confiance&nbsp;; abus de confiance + escroquerie&nbsp;; escroquerie + concurrence d&eacute;loyale, refus d&rsquo;obtemp&eacute;rer + corruption&nbsp;; bris de pare-brise + corruption&nbsp;; accident avec d&eacute;faut d&rsquo;assurance + vente ill&eacute;gale de v&eacute;hicule. Il ressort des donn&eacute;es que pour les personnes dont les d&eacute;m&ecirc;l&eacute;s avec le syst&egrave;me de justice ont fait l&rsquo;objet d&rsquo;au moins deux accusations concomitamment ou s&eacute;par&eacute;ment, les infractions comme le vol, l&rsquo;abus de confiance et l&rsquo;escroquerie sont r&eacute;guli&egrave;rement associ&eacute;es &agrave; d&rsquo;autres infractions.</p> <h4>2.2.2. Les phases d&rsquo;interventions des d&eacute;marches dans la proc&eacute;dure judiciaire</h4> <p>La ou les &eacute;tape(s) de la proc&eacute;dure judiciaire o&ugrave; les interventions sont constat&eacute;es se pr&eacute;sentent comme suit&nbsp;:</p> <div> <p><img src="https://www.numerev.com/img/ck_3290_33_image5.png" /></p> <p>Au regard des donn&eacute;es du tableau, les d&eacute;marches en vue d&rsquo;&eacute;viter la prison repr&eacute;sentent une proportion de (45,1 %) &agrave; la phase de d&eacute;p&ocirc;t de plainte, (23,9 %) &agrave; la phase de l&rsquo;enqu&ecirc;te judiciaire et (26,8 %) au jugement. Selon l&rsquo;OPJ GG&nbsp;: &laquo; D&egrave;s la plainte ou la d&eacute;nonciation, l&rsquo;action publique est mise en mouvement, les proches des mis en cause sont pr&ecirc;ts &agrave; tout pour ne pas que la proc&eacute;dure aille loin. A cette phase, il nous est recommand&eacute; de g&eacute;rer les affaires mineures pour &eacute;viter l&rsquo;engorgement des tribunaux qui ne souhaitent s&rsquo;occuper que des dossiers plus complexes. Cependant, nous sommes tenus d&rsquo;envoyer le dossier en renseignement judiciaire au niveau du procureur au parquet pour laisser&nbsp;des traces de l&rsquo;affaire afin de nous couvrir en cas d&rsquo;&eacute;ventuels rebondissements &raquo;. &laquo;&nbsp;Toutefois pour les cas de meurtre ou viol, des infractions publiques qui font souvent le buzz, il est plus sage de d&eacute;f&eacute;rer le mis en cause au parquet pour que le procureur lui-m&ecirc;me s&rsquo;en charge. En effet, de lui-m&ecirc;me il peut demander que l&rsquo;affaire lui soit transmise dans certains cas majeurs. M&ecirc;me dans les cas d&rsquo;abus de confiance qui touchent aux personnes morales surtout les ambassades, consulats et autres, les parties peuvent s&rsquo;entendre pour d&eacute;f&eacute;rer le dossier devant le procureur au parquet&nbsp;&raquo;.</p> <h3>2.3. Strat&eacute;gies d&rsquo;&eacute;vitement de la prison</h3> <p>L&rsquo;acte mat&eacute;riel de convocation ou de plainte oblige le mis en cause &agrave; rentrer en contact avec le syst&egrave;me judiciaire, &agrave; se rendre dans une brigade de gendarmerie ou un commissariat de police pour se faire entendre ou r&eacute;pondre de ses actes. L&agrave;, interviennent un ensemble de d&eacute;marches et d&rsquo;actions, au prix de sacrifices et d&rsquo;interventions de personnalit&eacute;s.</p> <h4>2.3.1. D&eacute;marches entreprises</h4> <p>Les cas factuels ant&eacute;rieurement &eacute;voqu&eacute;s (2-3) ont plus ou moins fait l&rsquo;objet de diverses d&eacute;marches.</p> <p>- Ampleur des d&eacute;marches et actions</p> <p>L&rsquo;ampleur rend compte de l&rsquo;effectivit&eacute; et de la mesure de la dimension officieuse de pratiques tendant &agrave; &eacute;viter l&rsquo;incarc&eacute;ration.</p> <p><img src="https://www.numerev.com/img/ck_3290_33_image6.png" /></p> <p>Les donn&eacute;es du tableau montrent que si dans environ 20 % des cas, les mis en cause et leurs proches n&rsquo;ont entrepris aucune d&eacute;marche, cependant, environ 75 % d&rsquo;autres cas concern&eacute;s, ont fait l&rsquo;objet de d&eacute;marches et actions officieuses aux fins d&rsquo;&eacute;vitement de la prison. Comme dans les usages, en C&ocirc;te d&rsquo;Ivoire, en de telles situations, les proches du mis en cause se mobilisent et activent tout leur r&eacute;seau de connaissances directes ou indirectes.</p> <p>- Inventaires des d&eacute;marches et actions entreprises</p> <p>Les actions ou d&eacute;marches concr&egrave;tes entreprises pour &eacute;viter la prison au mis en cause peuvent ainsi se regrouper selon le tableau suivant&nbsp;:</p> <p><img src="https://www.numerev.com/img/ck_3290_33_image7.png" /></p> <p>Des donn&eacute;es du tableau, il ressort que 20 % des enqu&ecirc;t&eacute;s n&rsquo;ont rien entrepris d&rsquo;officieux. De m&ecirc;me, 85 %, de cette cat&eacute;gorie d&rsquo;enqu&ecirc;t&eacute;s disent avoir suivi la proc&eacute;dure normale. Cette d&eacute;marche a consist&eacute; &agrave; l&rsquo;assistance d&rsquo;un avocat (art. 4, al. 2 et art. 90 NCPPI), des rencontres avec le procureur, les juges d&rsquo;instruction ou des enfants, des explications aux postes... Et concernant les autres 15 %, de cette m&ecirc;me cat&eacute;gorie, tandis que les uns ont choisi de r&eacute;unir les &eacute;l&eacute;ments de preuve &agrave; d&eacute;charge, les autres ont plut&ocirc;t cherch&eacute; &agrave; d&eacute;noncer les &laquo;&nbsp;vrais&nbsp;auteurs&nbsp;&raquo; pour disculper le mis en cause. Toutefois, pour ce qui est des honoraires d&rsquo;avocat, des cotisations familiales ont &eacute;t&eacute; initi&eacute;es. La destination de cet argent mobilis&eacute; va au-del&agrave; des honoraires d&rsquo;avocat et peut couvrir d&rsquo;autres frais (amendes, pots-de-vin&hellip;).</p> <p>Ainsi, l&rsquo;option du r&egrave;glement &agrave; l&rsquo;amiable (80 %) et des interventions (78&nbsp;%), sont les principaux m&eacute;canismes d&rsquo;&eacute;vitement de l&rsquo;incarc&eacute;ration. Au regard des chiffres, les deux options sont en g&eacute;n&eacute;ral, concomitamment utilis&eacute;es. Le champ s&eacute;mantique des mots et expressions utilis&eacute;s pour traduire ce r&egrave;glement &agrave; l&rsquo;amiable est constitu&eacute; de &laquo;&nbsp;Conciliations, consensus, n&eacute;gociations, demande d&rsquo;excuse ou de pardon&nbsp;&raquo; dans le sens de l&rsquo;objectif vis&eacute;&nbsp;; &laquo;&nbsp;D&eacute;l&eacute;gations de la famille pour conciliation, intervention d&rsquo;autorit&eacute;s traditionnelles et coutumi&egrave;res, d&rsquo;alliance interethnique&nbsp;&raquo; dans les sens d&rsquo;actions concr&egrave;tes, et &laquo;&nbsp;Rembourser l&rsquo;argent, r&eacute;parer le d&eacute;g&acirc;t ou l&rsquo;engin abim&eacute;&nbsp;&raquo; dans l&rsquo;optique de r&eacute;paration du tort caus&eacute;.</p> <h4>2.3.2. Sacrifices consentis et/ou &agrave; consentir</h4> <p>Les d&eacute;marches visant &agrave; &eacute;viter l&rsquo;incarc&eacute;ration aux mis en cause s&rsquo;opposent &agrave; la dynamique de punition de l&rsquo;action publique, d&rsquo;o&ugrave; un lourd tribut auquel consentent les mis en cause et/ou ou leurs proches. A divers &eacute;chelons, ce sacrifice est la contrepartie du prix &agrave; payer qui peut &ecirc;tre de leur propre initiative, explicitement requis ou subtilement sugg&eacute;r&eacute;e par l&rsquo;OPJ &agrave; son b&eacute;n&eacute;fice personnel ou &agrave; celui d&rsquo;autres acteurs du syst&egrave;me de justice. Ainsi, aux questions de savoir&nbsp;: &laquo;&nbsp;Est-il arriv&eacute; qu&#39;on vous demande quelque chose pour interrompre la proc&eacute;dure&nbsp;?&nbsp;&raquo;, ou &laquo;&nbsp;Avez-vous propos&eacute; quelque chose pour interrompre la proc&eacute;dure ou &eacute;viter la prison au mis en cause&nbsp;?&nbsp;&raquo;, les r&eacute;ponses contenues dans les tableaux ci-dessous ont &eacute;t&eacute; enregistr&eacute;es.</p> <p><img src="https://www.numerev.com/img/ck_3290_33_image8.png" /></p> <p>Il ressort des donn&eacute;es du tableau n&deg; 5 que 43,7 % des enqu&ecirc;t&eacute;s ont d&ucirc; donner, sans que l&rsquo;initiative vienne d&rsquo;eux, une contrepartie pour interrompre la proc&eacute;dure. En d&rsquo;autres termes 40,9 % n&rsquo;ont pas subi de demande, soit sont rest&eacute;s passifs, soit ont plut&ocirc;t pris le devant des choses sans attendre qu&rsquo;on le leur demande. A contrario, dans le tableau n&deg; 6, 32,4 % contre 53,5 % ont fait des propositions &agrave; l&rsquo;OPJ ou au plaignant en vue d&rsquo;un r&egrave;glement satisfaisant.</p> <p>Par ailleurs, la premi&egrave;re demande est g&eacute;n&eacute;ralement la r&eacute;paration du tort caus&eacute; &agrave; la victime&nbsp;: soins m&eacute;dicaux pour coups et blessures, r&eacute;paration du bien endommag&eacute; ou restitution du bien mat&eacute;riel (vol&eacute;), de l&rsquo;argent (abus de confiance, escroquerie), ou une reconnaissance de dette. Ainsi, pour 75 % des enqu&ecirc;t&eacute;s, il s&rsquo;est agi d&rsquo;argent. Ce montant prend un &laquo;&nbsp;aspect sacrificiel&nbsp;&raquo; quand la somme requise semble exorbitante sans que les concern&eacute;s n&rsquo;en comprennent grande chose. Des enqu&ecirc;t&eacute;s disent avoir vers&eacute; respectivement&nbsp;: 250&nbsp;000&nbsp;Frs CFA, 350&nbsp;000 Frs CFA et 800&nbsp;000&nbsp;Frs CFA pour que le mis en cause soit lib&eacute;r&eacute;, sans toutefois pr&eacute;ciser si ces montants vers&eacute;s l&rsquo;&eacute;taient aux fins de r&eacute;paration du tort caus&eacute; au plaignant ou de pots de vins &agrave; l&rsquo;OPJ.</p> <p>Aussi, la garde &agrave; vue qui est assimil&eacute;e &agrave; un emprisonnement dans l&rsquo;entendement commun, est parfois utilis&eacute;e par certains OPJ pour mettre plus de pression sur le mis en cause et ses proches en vue de faire diligence pour d&eacute;canter la situation. En la mati&egrave;re, la menace de d&eacute;f&eacute;rer le mis en cause est ce qui est g&eacute;n&eacute;ralement brandi. L&rsquo;enqu&ecirc;t&eacute; JJ mart&egrave;le&nbsp;: &laquo;&nbsp;je me suis retrouv&eacute; au mauvais endroit &agrave; c&ocirc;t&eacute; d&rsquo;un fumoir o&ugrave; la police a fait une descente et nous a tous embarqu&eacute;s. J&rsquo;ai &eacute;t&eacute; mis en garde &agrave; vue et d&eacute;pouill&eacute; de tout. Apr&egrave;s, ils nous ont pass&eacute; un t&eacute;l&eacute;phone afin que chacun informe sa famille de son arrestation. Apr&egrave;s quoi, ils nous ont dit que chacun serait lib&eacute;r&eacute; moyennant une somme d&rsquo;argent sinon ils vont nous d&eacute;f&eacute;rer au parquet&nbsp;&raquo;. Ainsi, devant la menace de d&eacute;f&eacute;rer le mis en cause, l&rsquo;OPJ suscite l&rsquo;acte positif des proches &agrave; proposer avec diligence quelque chose aux acteurs cl&eacute;s du dossier pour une issue moins d&eacute;favorable. Des abus sont beaucoup observ&eacute;s &agrave; cette phase. Aux dires de l&rsquo;OPJ GG, &laquo;&nbsp;Le r&egrave;glement &agrave; l&rsquo;amiable ne devrait pas avoir lieu quand le mis en cause est en garde &agrave; vue. Puisqu&rsquo;il est d&eacute;j&agrave; sous pression. Dans ce cas de figure, son accord en vue d&rsquo;un r&egrave;glement &agrave; l&rsquo;amiable peut n&rsquo;avoir pas &eacute;t&eacute; de son libre arbitre. Or nombre d&rsquo;OPJ s&rsquo;en servent pour faire infl&eacute;chir le mis en cause qui, malheureusement, peut faire rebondir le dossier devant le procureur s&rsquo;il n&rsquo;est d&rsquo;accord&nbsp;&raquo;. Il ajoute&nbsp;: &laquo;&nbsp;C&rsquo;est pourquoi, le r&egrave;glement &agrave; l&rsquo;amiable exige la reconnaissance des faits par le mis en cause, et qui volontairement prend l&rsquo;initiative du r&egrave;glement &agrave; l&rsquo;amiable en esp&eacute;rant l&rsquo;accord du plaignant. Il peut aussi refuser. Par ailleurs ce dernier peut souhaiter le r&egrave;glement &agrave; l&rsquo;amiable s&rsquo;il ne veut pas que le dossier aille plus loin. Dans ce cas l&rsquo;OPJ ne devrait en rien &ecirc;tre associ&eacute; &agrave; ces tractations. Malheureusement ce n&rsquo;est pas toujours le cas&nbsp;&raquo; ajoute l&rsquo;OPJ MI A ce propos, un enqu&ecirc;t&eacute; n&rsquo;&eacute;tant pas favorable &agrave; cette option n&eacute;goci&eacute;e avoue&nbsp;: &laquo;&nbsp;La police voulait un r&egrave;glement &agrave; l&#39;amiable et j&#39;ai refus&eacute;, parce que je n&rsquo;&eacute;tais pas coupable&nbsp;&raquo;. &laquo;&nbsp;Il ne devrait pas avoir aussi de r&egrave;glement sans audition, &agrave; cause des rebondissements. Cependant certains OPJ peuvent ne pas transmettre le dossier et garder par devers eux et ne le faire qu&rsquo;en cas de rebondissement&nbsp;&raquo;, pr&eacute;cise l&rsquo;OPJ MI.</p> <h4>2.3.3. &laquo;&nbsp;Personnalit&eacute;s&nbsp;&raquo; sollicit&eacute;es et issue de ces tractations officieuses</h4> <p>Dans la dynamique des d&eacute;marches officieuses pour d&eacute;canter la situation, des personnalit&eacute;s ont plus ou moins &eacute;t&eacute; sollicit&eacute;es. 43,6 % des enqu&ecirc;t&eacute;s ont sollicit&eacute; des personnalit&eacute;s parmi lesquelles des autorit&eacute;s administratives (agents de l&rsquo;inspection du travail), militaires (parents policiers, officiers de gendarmerie) coutumi&egrave;res ou traditionnelles (chefferie). &laquo; &hellip; Je me suis retrouv&eacute; en garde &agrave; vue &agrave; la police&hellip; Ma m&egrave;re est all&eacute;e voir le commissaire. Elle a appel&eacute; ma tante qui est sous-pr&eacute;fet et mon oncle qui est juge au Plateau&nbsp;&raquo; relate l&rsquo;enqu&ecirc;t&eacute; KL. In fine, toutes ces tractations devraient avoir des issues plus satisfaisantes ou heureuses.</p> <p><img src="https://www.numerev.com/img/ck_3290_33_image9.png" /></p> <p>Des donn&eacute;es issues du tableau, il ressort que 35,2 % des affaires &eacute;voqu&eacute;es ont connu une interruption, 11,3 % ont suivi leur cours normal, environ 35 % ont fait objet d&rsquo;un proc&egrave;s dont 17 % de relaxe et environ 18 % de condamnation.</p> <p>En dehors des cas de non-r&eacute;ponses, les affaires ayant les modalit&eacute;s les plus importantes sont celles qui ont connu une interruption de la proc&eacute;dure (35/93), du fait des interventions respectives de&nbsp;: gendarmes et policiers (18/93), personnalit&eacute;s civiles de l&rsquo;administration (11/93) et autres connaissances influentes (politiques, artistes, religieuses) (9/93). Toutefois, en mati&egrave;re de relaxe, les personnalit&eacute;s du syst&egrave;me judiciaire (4/16), les policiers et gendarmes (4/16) ont eu les m&ecirc;mes importances. Par ailleurs, pris de fa&ccedil;on globale, l&rsquo;intervention des personnalit&eacute;s du syst&egrave;me judiciaire est la cat&eacute;gorie recueillant la plus grande modalit&eacute; (13/93) apr&egrave;s l&rsquo;intervention de policiers et de gendarmes (18/93).</p> <h3>2.4. Autres motifs et raisons des actions</h3> <p>Toutes ces attitudes ont certes pour principale raison la peur de l&rsquo;inc&eacute;ration. Toutefois, cela laisse entrevoir d&rsquo;autres motifs pour leur agir.</p> <p><img src="https://www.numerev.com/img/ck_3290_33_image10.png" /></p> <p>Outre l&rsquo;&eacute;vidence de la peur, 31&nbsp;% des avis des enqu&ecirc;t&eacute;s rel&egrave;vent qu&rsquo;ils ne croient pas au syst&egrave;me de justice dans sa neutralit&eacute; et sa capacit&eacute; &agrave; mettre les vrais coupables en prison ou &agrave; les laisser en libert&eacute;. D&egrave;s lors, pour 22,5 % tout se g&egrave;re sous nos tropiques, pourvu que l&rsquo;on frappe &agrave; la bonne porte ou sache y mettre les moyens. En effet, certains OPJ, pour &eacute;viter la prison &agrave; une personne, requalifient les faits en les faisant passer pour des infractions de moindre gravit&eacute;. Ainsi, &agrave; l&rsquo;audition et dans le proc&egrave;s-verbal, ils peuvent d&eacute;former les faits pour y glisser des biais dans l&rsquo;analyse &agrave; l&rsquo;avantage du mis en cause. &laquo;&nbsp;On requalifie les faits pour amener &agrave; reconsid&eacute;rer leur gravit&eacute;&hellip;&nbsp;&raquo; r&eacute;v&egrave;le l&rsquo;OPJ GG. &laquo;&nbsp;On sait qu&#39;il a pris, mais on ne voulait pas qu&#39;il parte en prison&nbsp;&raquo;, confesse JD. &laquo;&nbsp;Parce que les plaignants &eacute;taient pr&ecirc;ts &agrave; tout pour condamner l&#39;accus&eacute;&nbsp;&raquo; pr&eacute;cise GH. Pour KJ ils ont agi pour un &laquo;&nbsp;r&egrave;glement rapide de l&rsquo;affaire, acc&eacute;l&eacute;rer et arranger mon le dossier&nbsp;&raquo;. Madame Yao, m&egrave;re d&rsquo;ex-d&eacute;tenu avoue&nbsp;; &laquo;&nbsp;on voulait abr&eacute;ger sa peine qui d&eacute;passait six mois, il a &eacute;t&eacute; au bout de 6 mois avec l&#39;aide du juge&nbsp;&raquo;. &laquo;&nbsp;Pour &eacute;viter de g&acirc;ter<a href="#_ftn1" name="_ftnref1" title="">[9]</a> son casier judiciaire&nbsp;&raquo; confesse, ZY.</p> <p>L&rsquo;importance des acteurs impliqu&eacute;s notamment du mis en cause mais aussi du plaignant peut aussi &ecirc;tre un motif de d&eacute;marches et d&rsquo;action. A ce propos l&rsquo;OPJ GG rel&egrave;ve le caract&egrave;re international que pourrait prendre les affaires impliquant les multinationales ou ambassades. Il en est de m&ecirc;me des affaires qui concernent certaines entreprises dont l&rsquo;affaire pourrait &eacute;clabousser l&rsquo;image et la notori&eacute;t&eacute;. &laquo;&nbsp;Nous avons protest&eacute; en vue de pressions sur l&#39;employeur afin de lib&eacute;rer un ami&nbsp;&raquo; confie un employeur d&rsquo;une entreprise. &laquo;&nbsp;On voulait les (entreprise)&nbsp;amener &agrave; &eacute;viter le scandale&nbsp;&raquo; avoue un autre licenci&eacute; d&rsquo;une entreprise. Les affaires &agrave; caract&egrave;re trop public ou qui font le &laquo;&nbsp;buzz&nbsp;&raquo; suscitent beaucoup d&rsquo;observations sur les suites de l&rsquo;affaire.</p> <p>Dans le sens de preuves &agrave; d&eacute;charge et d&eacute;marches officielles, il s&rsquo;agissait de &laquo;&nbsp;montrer le caract&egrave;re infond&eacute; de la plainte ou des chefs d&#39;accusations&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;d&eacute;montrer l&#39;innocence, pour r&eacute;tablir la justice&nbsp;&raquo;.</p> <h2>3. Discussion conclusion</h2> <p>L&rsquo;objectif de cette &eacute;tude &eacute;tait d&rsquo;analyser les strat&eacute;gies dont se servent les acteurs impliqu&eacute;s dans une infraction &agrave; la loi p&eacute;nale. Elle a d&rsquo;abord fait un aper&ccedil;u des leviers sur lesquels les acteurs principaux impliqu&eacute;s notamment&nbsp;; l&rsquo;OPJ, le plaignant et le mis en cause ou ses proches ont des marges de man&oelig;uvres formelles ou informelles pour &eacute;viter la prison &agrave; ce dernier. Au-del&agrave; de la peur de la prison, l&rsquo;&eacute;tude a montr&eacute; d&rsquo;autres raisons li&eacute;es &agrave; la non gravit&eacute; des faits, au fait de ne pas croire en l&rsquo;impartialit&eacute; de la justice, &agrave; l&rsquo;id&eacute;e que tout peut s&rsquo;arranger, pourvu qu&rsquo;on sache frapper &agrave; la bonne porte, &agrave; l&rsquo;impunit&eacute;, aux injustices que Chauvenet (2006) a tant&ocirc;t relev&eacute; dans ses &eacute;tudes. En sous-entendant la corruption comme moyen principal de r&eacute;solution positive de l&rsquo;affaire, il est bon de pr&eacute;ciser que le fait de donner l&rsquo;argent pour se tirer d&rsquo;affaire n&rsquo;induit pas syst&eacute;matiquement la corruption puisque les dommages et int&eacute;r&ecirc;ts, les amendes et la conciliation impliquent des sorties d&rsquo;argent. En d&rsquo;autres termes, si le r&eacute;pondant n&rsquo;est pas suffisamment instruit sur le motif ou la destination de l&rsquo;argent pay&eacute;, l&rsquo;analyse simpliste pourrait induire des biais.</p> <p>La qualit&eacute; des acteurs impliqu&eacute;s est aussi un facteur d&eacute;terminant. Le statut social des acteurs impliqu&eacute;s : personnes morales internationales (ambassade, consulat, multinationale), entreprises nationales, acteur public ou priv&eacute;. La qualit&eacute; du mis en cause, (notamment un chef traditionnel, personnage public ou politique), avec sa stature sociale et sa plus ou moins forte capacit&eacute; de mobilisation, peut aussi &ecirc;tre une dimension &agrave; explorer. Par ailleurs, la solidarit&eacute;, cette mobilisation communautaire ou familiale autour du mis en cause, souligne des pesanteurs socioculturelles interventionnistes constat&eacute;es dans bien des secteurs comme le service administratif (intervention d&rsquo;une connaissance en vue de l&rsquo;acquisition d&rsquo;un document), la sant&eacute; (intervention d&rsquo;une connaissance m&eacute;decin ou infirmier), que l&rsquo;on pourrait corr&eacute;ler &agrave; l&rsquo;action judiciaire.</p> <p>Dans une approche juridique, l&rsquo;&eacute;tude interpelle sur la culture juridique des justiciables dans la juridiction o&ugrave; l&rsquo;OPJ est saisi de l&rsquo;affaire et des acteurs impliqu&eacute;s. Selon que l&rsquo;affaire est dans un commissariat ou une brigade de la banlieue ou dans des contr&eacute;es tr&egrave;s &eacute;loign&eacute;es ou que ce soit quand dans les quartiers des affaires (Plateaux) ou &agrave; population &agrave; fort taux d&rsquo;instruction comme Cocody, le traitement et/ou l&rsquo;issue pourrait &ecirc;tre diff&eacute;rent.</p> <p>Mais au-del&agrave; des acteurs, l&rsquo;incarc&eacute;ration, au sens strict supposant le s&eacute;jour en milieu carc&eacute;ral, m&eacute;riterait une approche juridique plus approfondie. Cela permettrait de savoir si le s&eacute;jour en milieu carc&eacute;ral est d&ucirc; &agrave; une arrestation, une condamnation avec des statuts de pr&eacute;venu ou d&eacute;tenu ou de condamnation d&eacute;finitive (autorit&eacute; de la chose jug&eacute;e) avec toutes les voies de recours &eacute;puis&eacute;es. Une autre nuance juridique tient au prononc&eacute; d&rsquo;une peine privative de libert&eacute;, la condamnation avec sursis, la libert&eacute; provisoire ou les mesures de restriction de libert&eacute; ou de libert&eacute; conditionnelle. Des r&eacute;flexions pourraient aussi &ecirc;tre men&eacute;es sur la pratique du r&egrave;glement &agrave; l&rsquo;amiable et son impact sur la criminalit&eacute; et le syst&egrave;me.</p> <p>&nbsp;</p> <p>&nbsp;</p> <h2>Bibliographie</h2> <p>&nbsp;</p> <p>-&nbsp;Arti&egrave;res P., Lascoumes P. et Salle G. (2004). &laquo;&nbsp;Prison et r&eacute;sistances politiques. Le grondement de la bataille&nbsp;&raquo;. Culture &amp; Conflits, 55, 5-14. Consult&eacute; le 02/05/2022 sur https://doi.org/10.4000/conflits.1555.</p> <p>-&nbsp;Beaurepaire C. de (2012). La vuln&eacute;rabilit&eacute; sociale et psychique des d&eacute;tenus et des sortants de prison. Revue du MAUSS, La D&eacute;couverte, 40(2), 125-146. Doi&nbsp;: 10.3917/rdm.040.0125.</p> <p>-&nbsp;Bony L. (2015). &laquo;&nbsp;La prison, une &laquo;&nbsp;cit&eacute; avec des barreaux&nbsp;&raquo;&nbsp;? Continuum socio-spatial par-del&agrave; les murs&nbsp;&raquo;. Annales de g&eacute;ographie, 702-703, 275-299. Consult&eacute; le 02/05/2022 sur https://www.cairn.info.</p> <p>-&nbsp;Chamond J., Moreira V., Decoq F. et Leroy-Vi&eacute;mon B. (2014). &laquo;&nbsp;La d&eacute;naturation carc&eacute;rale. Pour une psychologie et une ph&eacute;nom&eacute;nologie du corps en prison&nbsp;&raquo;. L&rsquo;information psychiatrique, 90(8), 673-682. Doi&nbsp;: 10.1684/ipe.2014.1252.</p> <p>-&nbsp;Chantraine G. (2003). &laquo;&nbsp;Prison, d&eacute;saffiliation, stigmates. L&rsquo;engrenage carc&eacute;ral de l&rsquo;&laquo;&nbsp;inutile au monde&nbsp;&raquo; contemporain&nbsp;&raquo;. D&eacute;viance et Soci&eacute;t&eacute;, 27(4), 363-387. Doi&nbsp;: 10.3917/ds.274.0363.</p> <p>-&nbsp;Chauvenet A. (2010). &laquo;&nbsp;&lsquo;Les prisonniers&rsquo;&nbsp;: construction et d&eacute;construction d&rsquo;une nation&nbsp;&raquo;. Pouvoirs, Seuil, 135(4), 41-52. Doi&nbsp;:10.3917/pouv.135.0041.</p> <p>-&nbsp;Chauvenet A. (2009). &laquo;&nbsp;Les longues peines&nbsp;: le &laquo;&nbsp;principe&nbsp;&raquo; de la peine&nbsp;&raquo;. Champ p&eacute;nal, [En ligne]. S&eacute;minaire GERN &ldquo;Longues peines et peines ind&eacute;finies. Punir la dangerosit&eacute;&rdquo;, Paris, 21 Mars 2008. Consult&eacute; le 02/05/2022 sur https://doi.org/10.4000/champpenal.7556.</p> <p>-&nbsp;Chauvenet A. (2006).&nbsp;&laquo;&nbsp;Privation de libert&eacute; et violence&nbsp;: le despotisme ordinaire en prison&nbsp;&raquo;. D&eacute;viance et Soci&eacute;t&eacute;, 30(3), 373-388. Doi&nbsp;: 10.3917/ds.303.0373.</p> <p>-&nbsp;Del&eacute;tang C. (2022). &laquo;&nbsp;1832&nbsp;: le chol&eacute;ra en prison, peur de l&rsquo;invasion, strat&eacute;gies de lutte et bilan&nbsp;&raquo;. Epid&eacute;mies, crimes et justice. Consult&eacute; le 23/07/2022 sur Criminocorpus.&nbsp;&nbsp;https://doi.org/10.4000/criminocorpus.11838.</p> <p>-&nbsp;Gomez del Prado G. (2012). &laquo;&nbsp;Intimidation en milieu carc&eacute;ral&nbsp;: effet sur les pratiques professionnelles des agents correctionnels du Qu&eacute;bec&nbsp;&raquo;. Criminologie, 45(2), 301-322. Consult&eacute; le 09/07/2022 sur https://doi.org/10.7202/1013729ar.</p> <p>-&nbsp;Hannem S. (2019). &laquo;&nbsp;D&eacute;construire la stigmatisation des familles dans le discours sur les familles affect&eacute;es par l&rsquo;incarc&eacute;ration&nbsp;&raquo;. Criminologie, 52(1), 221-245. Consult&eacute; le 08/07/2021 sur https://doi.org/10/7202/1059547ar.</p> <p>-&nbsp;Le Caisne L. (2007). &laquo;&nbsp;De si dangereux condamn&eacute;s&nbsp;&raquo;. Journal des anthropologues [En ligne], 108-109. Consult&eacute; le 20/04/2022 sur https://journals.openedition.org/jda/1101.</p> <p>-&nbsp;Morelle M. 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A l&rsquo;int&eacute;rieur des murs&nbsp;: comprendre la violence en milieu carc&eacute;ral &agrave; partir du point de vue d&rsquo;hommes incarc&eacute;r&eacute;s &agrave; l&rsquo;unit&eacute; sp&eacute;ciale de d&eacute;tention. M&eacute;moire de Master, Ecole de criminologie, Montr&eacute;al.</p> <p>-&nbsp;Vacheret M. et Milton M. (2007). &laquo;&nbsp;Peurs en milieu carc&eacute;ral&nbsp;: quand sentiments et exp&eacute;riences diff&egrave;rent&nbsp;&raquo;. Criminologie, 40(1), 185-211. Consult&eacute; le 01/03/2022 sur https://doi.org/10.7202/016020ar.</p> <p>-&nbsp;Van Diest C. (2019). &laquo;&nbsp;Habiter l&rsquo;environnement de la prison, s&rsquo;approprier sa requalification culturelle&nbsp;: m&eacute;moires habitantes &agrave; l&rsquo;&eacute;preuve des transformations urbaines &agrave; Valparaiso (Chili)&nbsp;&raquo;. Cahiers de g&eacute;ographie du Qu&eacute;bec, 63(178), 9-19. Consult&eacute; le 15/05/2022 sur https://doi.org/10.7202/1075774ar.</p> <p>-&nbsp;Zady C. (2012). &laquo;&nbsp;Milieu carc&eacute;ral ivoirien et r&eacute;cidive&nbsp;&raquo;. Revue Africaine de Criminologie, 12(1), p. 43-77.</p> <div> <div id="ftn1"> <p><a href="#_ftnref1" name="_ftn1" title="">[1]</a> Ces quatre OPJ sont constitu&eacute;s de&nbsp;: un magistrat, un gendarme et de deux policiers.</p> </div> </div> </div> <div id="ftn2"> <p><a href="#_ftnref2" name="_ftn2" title="">[2]</a> Parmi ceux-ci on peut citer (art. 7 NCPP), le procureur de la R&eacute;publique et ses substituts, les juges d&rsquo;instruction ou des enfants, les commissaires, les officiers de police ou de gendarmerie, les commandants de brigade ou chefs de postes, etc.</p> </div> <div id="ftn3"> <p><a href="#_ftnref3" name="_ftn3" title="">[3]</a> Il s&rsquo;agit du nombre d&rsquo;habitants par commune qui, selon le recensement g&eacute;n&eacute;ral de la population et de l&rsquo;habitat (RGPH, 2021), est de 204656, soit 8,30 %, &agrave; Bingerville&nbsp;; 692583, soit 28,06 %, &agrave; Cocody et 1&nbsp;571065, soit 63,64&nbsp;%, &agrave; Yopougon.</p> </div> <div id="ftn4"> <p><a href="#_ftnref4" name="_ftn4" title="">[4]</a> Il s&rsquo;agit de la loi n&deg; 2019-574 du 26 juin 2019&nbsp;portant Code p&eacute;nal ivoirien.</p> </div> <div id="ftn5"> <p><a href="#_ftnref5" name="_ftn5" title="">[5]</a> L&rsquo;article 2 de la loi n&deg; 2018-975 du 27 d&eacute;cembre 2018 portant Code de proc&eacute;dure p&eacute;nale ivoirien &eacute;nonce&nbsp;:&nbsp;&laquo;&nbsp;constitue une infraction, tout fait, action ou omission qui trouble ou est susceptible de troubler l&rsquo;ordre public ou la paix sociale en portant ou non atteinte aux droits des personnes et qui comme tel est l&eacute;galement sanctionn&eacute;&nbsp;&raquo;.</p> </div> <div id="ftn6"> <p><a href="#_ftnref6" name="_ftn6" title="">[6]</a> Expression signifiant en C&ocirc;te d&rsquo;Ivoire qu&rsquo;il faut &ecirc;tre prudent quand on est amen&eacute; &agrave; ex&eacute;cuter une mission, un ordre ou une t&acirc;che qui pourrait nous compromettre.</p> </div> <div id="ftn1"> <p><a href="#_ftnref1" name="_ftn1" title="">[7]</a> Par petits m&eacute;tiers, on entend un ensemble d&rsquo;activit&eacute;s artisanales de d&eacute;brouille &agrave; caract&egrave;re g&eacute;n&eacute;ralement informel.</p> </div> <div id="ftn2"> <p><a href="#_ftnref2" name="_ftn2" title="">[8]</a> Minist&egrave;re de l&rsquo;Education nationale (de C&ocirc;te d&rsquo;Ivoire).</p> <p>&nbsp;<a href="#_ftnref1" name="_ftn1" title="">[9]</a> Pour &eacute;viter d&rsquo;entacher le casier judiciaire du mis en cause.</p> </div> </div>