<p>Dans son <em>Histoire littéraire du sentiment religieux en France</em>, Henri Bremond écrit « je n’en connais pas de plus silencieuse que Madame Acarie et c’est là, me semble-t-il, le trait le plus original de sa merveilleuse histoire ». Si la relative absence d’œuvres publiées en ce premier XVII<sup>e </sup>siècle rend les carmélites discrètes, elles ne sont pas totalement silencieuses : en témoignent les <em>Vies</em> et autres récits conservés dans les archives des couvents. La question se pose toutefois de pouvoir situer ces écrits fragmentaires, recomposés et éternellement mouvants, dans ce qu’on désigne comme la littérature spirituelle. L’exemple de Louise de Jésus permet d’aborder cette question de la transmission des traces au carmel au moyen de trois temps et trois formes d’écriture distinctes, toutes trois manuscrites : un récit de voyage, une <em>Vie</em>, un abrégé de vie intégré au récit des fondations. Refusant d’être autrice ou sujet, revendiquant leur indignité en tant qu’objet, se défiant du langage qui trahit toujours par son insuffisance la réalité à énoncer, comment ces femmes tentent-elles, malgré tout, de communiquer l’expérience silencieuse de l’anéantissement en Dieu ?</p>