<h1 style="text-align: center;"><span style="color:#993366;"><strong>Ang&eacute;lique de Saint-Jean (1624-1684)&nbsp;:&nbsp;forger la m&eacute;moire de Port-Royal, montages et strat&eacute;gies d&rsquo;&eacute;criture</strong></span></h1> <p style="text-align: center;"><strong>Sabria&nbsp;Chebli<sup><a href="#n*n" name="n*t">*</a></sup></strong></p> <p style="text-align: center;">&nbsp;</p> <p style="text-align: justify;">La moniale Ang&eacute;lique de Saint-Jean Arnauld d&rsquo;Andilly (1624-1684), fille de Robert Arnauld d&rsquo;Andilly, a jou&eacute; un r&ocirc;le crucial dans l&rsquo;histoire du monast&egrave;re de Port-Royal &agrave; plus d&rsquo;un titre. C&rsquo;est la ni&egrave;ce de la m&egrave;re Ang&eacute;lique qui restaura la cl&ocirc;ture et l&rsquo;&eacute;troite observance de la R&egrave;gle de saint Beno&icirc;t en 1609 et de sa s&oelig;ur, la m&egrave;re Agn&egrave;s. Elle prend l&rsquo;habit le 27 juin 1641 alors qu&rsquo;elle n&rsquo;a que dix-sept ans. Cette cons&eacute;cration pr&eacute;coce de sa vocation vient donner une illustration concr&egrave;te aux r&eacute;cits des t&eacute;moins du temps qui s&rsquo;accordent tous &agrave; d&eacute;crire une jeune fille &agrave; la foi solide, dot&eacute;e d&rsquo;une intelligence fine et dou&eacute;e pour l&rsquo;analyse rationnelle. Tr&egrave;s t&ocirc;t ces dispositions suscitent des craintes, Sainte-Beuve (<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span new="" roman="" times="">2004, p.981)</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span>&nbsp;en rend compte lorsqu&rsquo;il pr&eacute;sente Ang&eacute;lique de Saint-Jean dans son ouvrage&nbsp;Port-Royal&nbsp;:&nbsp;&laquo;&nbsp;Elle [&hellip;] &eacute;tait consid&eacute;r&eacute;e d&egrave;s l&#39;enfance comme d&eacute;j&agrave; en religion et n&#39;&eacute;tant plus du monde&nbsp;: &quot;Elle n&#39;avoit pas plus de douze ou treize ans, disent les Relations, que son esprit paroissoit si grand et si avanc&eacute; qu&#39;on craignoit &agrave; Port-Royal que cela ne lui f&ucirc;t plus dommageable qu&#39;utile&quot;&nbsp;&raquo;.</p> <p style="text-align: justify;">C&rsquo;est une des figures f&eacute;minines les plus embl&eacute;matiques du monast&egrave;re. Dans un article, F. Ellen Weaver (1985) applique &agrave; Port-Royal l&rsquo;analyse que fait Jean Leclercq (1976)&nbsp;&agrave; propos des fondateurs des ordres religieux. Il y aurait un premier fondateur qui cr&eacute;e quelque chose de nouveau, puis un second sup&eacute;rieur attach&eacute; au premier, cherchant &agrave; continuer son &oelig;uvre (il s&rsquo;agit pour Port-Royal de la m&egrave;re Ang&eacute;lique et de la m&egrave;re Agn&egrave;s). Enfin, &laquo;&nbsp;Leclerq distingue un &quot;troisi&egrave;me fondateur&quot; qui habituellement n&rsquo;a pas connu personnellement le premier sup&eacute;rieur, mais l&rsquo;admire et se consid&egrave;re comme responsable du maintien de la fondation (ou de la r&eacute;forme). C&rsquo;est souvent dans cette troisi&egrave;me g&eacute;n&eacute;ration [&hellip;] qu&rsquo;un esprit vigoureux &eacute;labore la th&eacute;ologie de l&rsquo;ordre, qu&rsquo;un biographe de talent &eacute;crit la l&eacute;gende du fondateur, et qu&rsquo;un grand l&eacute;gislateur compose les constitutions&nbsp;&raquo; (<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none">Ellen Weaver, 1985, p.97)</span></span></span></span></span></span></span></span></span>. Il est vrai qu&rsquo;&agrave; certaines &eacute;chelles, Ang&eacute;lique de Saint-Jean remplit tous ces r&ocirc;les. F. Ellen Weaver (<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none">1985, p.106)&nbsp;</span></span></span></span></span></span></span></span></span>souligne que toutes les sources &laquo;&nbsp;qui relatent l&rsquo;histoire du monast&egrave;re de Port-Royal semblent presque sans exception avoir pass&eacute; sous la plume d&rsquo;Ang&eacute;lique de Saint-Jean&nbsp;&raquo; et elle montre comment chez la moniale, raconter l&rsquo;histoire de la fondatrice permet de forger le mythe historique du monast&egrave;re, comme s&rsquo;il s&rsquo;agissait de tenir un si&egrave;ge symbolique contre les attaques&nbsp;: &laquo;&nbsp;L&rsquo;histoire de la fondatrice de la r&eacute;forme devient l&rsquo;histoire d&rsquo;une r&eacute;forme pers&eacute;cut&eacute;e. La diff&eacute;rence est importante. [&hellip;] Lorsque la r&eacute;forme devient l&rsquo;objet de controverse, et surtout lorsqu&rsquo;elle est soumise &agrave; la pers&eacute;cution, pour quelques raisons que ce soit, les &eacute;v&eacute;nements prennent facilement la couleur du martyre, et les&nbsp;<em>dramatis personae</em>&nbsp;acqui&egrave;rent des proportions h&eacute;ro&iuml;ques. Ainsi, l&rsquo;&oelig;uvre d&rsquo;Ang&eacute;lique de Saint-Jean, sans qu&rsquo;elle l&rsquo;ait consciemment voulu, &eacute;tait destin&eacute;e &agrave; devenir la source d&rsquo;un mythe culturel puissant et insinuant&nbsp;&raquo; (<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none">Ellen Weaver, 1985, p.103)</span></span></span></span></span></span></span></span></span>. Ce r&eacute;cit hagiographique s&rsquo;ancre dans une &oelig;uvre litt&eacute;raire consid&eacute;rable, la moniale &eacute;crit une correspondance, un r&eacute;cit de captivit&eacute; ou encore des commentaires de livres bibliques. Elle r&eacute;dige &eacute;galement de nombreux documents li&eacute;s au monast&egrave;re&nbsp;: des conf&eacute;rences, des commentaires, des notes vari&eacute;es ou encore des articles du&nbsp;<em>N&eacute;crolog</em>e.</p> <p style="text-align: justify;">Il s&rsquo;agit d&rsquo;une &oelig;uvre prot&eacute;iforme qui se construit pourtant &agrave; partir d&rsquo;un point perspectif g&eacute;n&eacute;ral&nbsp;: l&rsquo;histoire du monast&egrave;re. Philippe Sellier mentionne l&rsquo;engouement pour l&rsquo;anamorphose qui a accompagn&eacute; les recherches sur la perspective au milieu du XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle<sup><a href="#n1n" name="n1t">1</a></sup>. Il semblerait que l&rsquo;&oelig;uvre de la religieuse pr&eacute;sente des jeux optiques voire des montages anamorphotiques. Il s&rsquo;agira d&rsquo;analyser comment l&rsquo;&oelig;uvre d&rsquo;Ang&eacute;lique de Saint-Jean et son travail de cr&eacute;ation ou de collecte de sources historiques exploitent diff&eacute;rentes strat&eacute;gies d&rsquo;&eacute;criture, ce qui contribue &agrave; forger le mythe Port-Royal.</p> <p style="text-align: justify;">&nbsp;</p> <h3 style="text-align: justify;"><strong>Collecte des sources&nbsp;: des entreprises singuli&egrave;res entre hagiographie et plaidoyer</strong></h3> <p style="text-align: justify;">Lors de la querelle du Formulaire<sup><a href="#n2n" name="n2t">2</a></sup>, Ang&eacute;lique de Saint-Jean incarnera de mani&egrave;re plus saisissante encore ce portrait contrast&eacute; en devenant une figure essentielle de l&rsquo;opposition &agrave; la signature, notamment par son travail de t&eacute;moignage et de collecte d&rsquo;&eacute;crits. Mais pour comprendre la mise en &oelig;uvre de cette entreprise documentaire singuli&egrave;re, il faut rappeler un travail ant&eacute;rieur visant &agrave; constituer, en rassemblant diverses sources, un r&eacute;cit hagiographique en m&eacute;moire de la r&eacute;formatrice, la m&egrave;re Ang&eacute;lique&nbsp;: &laquo; Antoine Le Maistre [&hellip;] engagea d&egrave;s 1648 les religieuses &agrave; recueillir toutes les informations qu&rsquo;elles pourraient &agrave; propos de la m&egrave;re Ang&eacute;lique, afin de pr&eacute;server de l&rsquo;oubli une vie aussi &eacute;difiante&nbsp;&raquo; (Plazenet, 2012, p.55). Laurence Plazenet (2012, p.56), en introduction &agrave; son anthologie&nbsp;<em>Port-Royal</em>, mentionne plusieurs &eacute;l&eacute;ments qui conf&egrave;rent au projet un caract&egrave;re tr&egrave;s novateur&nbsp;:&nbsp;</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Il faut revenir sur <em>l&#39;<u>originalit&eacute;</u></em>&nbsp;de l&#39;op&eacute;ration dirig&eacute;e par Ang&eacute;lique de Saint-Jean. Quand elle fit d&eacute;cacheter les lettres de la m&egrave;re Ang&eacute;lique avant leur exp&eacute;dition pour en conserver des copies [&hellip;] un tel souci, et le projet qui le justifiait, &eacute;tait&nbsp;<u><em>sans exemple</em></u>. [&hellip;] Mais, ayant pris en note conf&eacute;rences et entretiens de la m&egrave;re Ang&eacute;lique, puis exigeant une vie de chaque religieuse, elle allait&nbsp;<u><em>bien plus loin</em></u>. Ces autobiographies&nbsp;<u><em>avant la lettre</em></u>, command&eacute;es par des personnes jouissant d&#39;une autorit&eacute; enti&egrave;re sur leurs auteurs ou compos&eacute;es apr&egrave;s un r&eacute;cit oral des int&eacute;ress&eacute;es, lorsqu&#39;elles &eacute;taient illettr&eacute;es ou trop simples pour &eacute;crire une telle relation, permirent la r&eacute;union d&#39;une s&eacute;rie de textes absolument&nbsp;<u><em>uniques</em></u>&nbsp;par leur nature [&hellip;]. De plus si les m&eacute;morialistes prirent la plume &agrave; la m&ecirc;me date, leurs ouvrages &eacute;taient encore inconnus du public. Ils ne pouvaient pas servir de mod&egrave;le. Les religieuses ob&eacute;irent &agrave;&nbsp;<u>une <em>impulsion qui leur &eacute;tait propre</em></u><em>&nbsp;</em><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none">(nous soulignons).</span></span></span></span></span></span></span></span></span></p> </blockquote> <p style="text-indent: 0px; -webkit-text-stroke-width: 0px; text-align: justify;">Laurence Plazenet convoque ici le projet hagiographique li&eacute; &agrave; la vie de la m&egrave;re Ang&eacute;lique, mais &eacute;galement les commandes de relations de captivit&eacute; et de r&eacute;cits vari&eacute;s durant les pers&eacute;cutions du Formulaire. Il est effectivement important d&rsquo;insister sur cet effort singulier pour cr&eacute;er puis collecter des sources en consid&eacute;ration de leur valeur historique de t&eacute;moignage. On peut cependant noter que Louis XIV lui-m&ecirc;me organise une collecte de sources dans le cadre de la r&eacute;daction de ses&nbsp;<em>M&eacute;moires</em>. Dans un article consacr&eacute; &agrave; ce&nbsp;corpus&nbsp;de textes &eacute;tonnant, Lucien B&eacute;ly (<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none">2015,&nbsp;p. 671)&nbsp;</span></span></span></span></span></span></span></span></span>explique que &laquo;&nbsp;dans les premi&egrave;res ann&eacute;es de son r&egrave;gne personnel, Louis XIV a supervis&eacute; la r&eacute;daction de textes connus comme ses&nbsp;<em>M&eacute;moires</em>&nbsp;&raquo;. Cette entreprise accompagne l&rsquo;&eacute;mergence d&rsquo;une r&eacute;flexion approfondie sur l&rsquo;importance id&eacute;ologique du document historique. Le document appara&icirc;t en effet comme une arme d&rsquo;autant plus redoutable qu&rsquo;elle est &agrave; double tranchant. Ainsi, Lucien B&eacute;ly&nbsp;(<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none">2015,&nbsp;p. 679)</span></span></span></span></span></span></span></span></span>&nbsp;indique que &laquo;&nbsp;Colbert cherche &agrave; regrouper une documentation encyclop&eacute;dique&nbsp;&raquo; et que &laquo;&nbsp;lors des conqu&ecirc;tes faites par Louis XIV, les agents du roi s&rsquo;emparent des archives de seigneuries et d&rsquo;abbayes&nbsp;&raquo; tandis que certaines personnalit&eacute;s influentes comme Jean Chapelain &eacute;mettent de s&eacute;rieuses r&eacute;serves, il &laquo;&nbsp;redoute les dangers d&rsquo;une histoire trop bien document&eacute;e car elle peut livrer des indications sur les desseins de la France et sur les amiti&eacute;s cach&eacute;es qu&rsquo;elle entretient un peu partout&nbsp;&raquo; (B&eacute;ly (<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none">2015,&nbsp;p. 679)</span></span></span></span></span></span></span></span></span>. Ce vaste projet des&nbsp;<em>M&eacute;moires</em>&nbsp;sert plusieurs desseins puisque le roi entend aussi &eacute;duquer le Dauphin par des exemples &eacute;difiants. On retrouve ici l&rsquo;ambition morale de la biographie de la m&egrave;re Ang&eacute;lique compos&eacute;e par Ang&eacute;lique de Saint-Jean. Stanis Perez insiste &eacute;galement sur la valeur de l&rsquo;exemple moral et sur le statut d&rsquo;&oelig;uvre &eacute;ducative de ces&nbsp;<em>M&eacute;moires</em>&nbsp;auxquels il consacre un article. Il cite l&rsquo;&eacute;loge de Louis XIV par Paul Pellison, prononc&eacute; en 1671 et centr&eacute; sur cette valeur d&rsquo;exemple moral et d&rsquo;&oelig;uvre &eacute;ducative&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Il choisit au contraire pour cette &eacute;ducation Royale tout ce qu&rsquo;il peut d&eacute;couvrir de plus &eacute;clair&eacute;, de plus sage, de plus droit, de plus ferme, de plus genereux, de plus honn&eacute;te, de plus capable, de plus s&ccedil;avant, comme s&rsquo;il ne devoit plus penser luy-m&ecirc;me. Il y pense, comme si personne ne le devoit seconder dans ce travail, jusqu&rsquo;&agrave; mettre par &eacute;crit pour ce cher fils, et de sa main, les secrets de la Royaut&eacute;, et les le&ccedil;ons &eacute;ternelles de ce qu&rsquo;il faut &eacute;viter ou suivre&nbsp;; non plus seulement pere de cet aimable Prince, ni pere des peuples m&ecirc;me&nbsp;; mais pere de tous les Rois &agrave; venir&nbsp;&nbsp;<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span new="" roman="" times="">(Pellisson-Fontanier,&nbsp;1698, p.149)</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span><sup><a href="#n3n" name="n3t">3</a></sup></p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Ce pan&eacute;gyrique de Pellisson multiplie les superlatifs pour qualifier ces&nbsp;<em>M&eacute;moires</em>, la gradation finale rend l&rsquo;&oelig;uvre universelle alors que l&rsquo;orateur affirme le caract&egrave;re personnel voire intime d&rsquo;une telle d&eacute;marche&nbsp;: &laquo;&nbsp;personne ne le devoit seconder dans ce travail&nbsp;&raquo; ou encore &laquo;&nbsp;mettre par &eacute;crit pour ce cher fils [&hellip;] de sa main.&nbsp;&raquo;</p> <p style="text-align: justify;">Mais alors comment expliquer que des travaux comparables, entrepris &agrave; Port-Royal, paraissent singuliers&nbsp;? Il convient de rappeler que Port-Royal est une abbaye de religieuses cisterciennes et que leur d&eacute;marche exc&egrave;de largement la constitution d&rsquo;archives. C&rsquo;est un &eacute;lan qui prend place dans un climat de controverse et de vive pol&eacute;mique. Ang&eacute;lique de Saint-Jean devient une figure de r&eacute;sistante qui per&ccedil;oit la pr&eacute;servation des sources &eacute;crites comme une mission. Elle conserve les billets qu&rsquo;on lui fait parvenir et tente de cacher en lieu s&ucirc;r les feuillets qu&rsquo;elle souhaite dissimuler aux Annonciades de Bologne lors de sa captivit&eacute;<sup><a href="#n4n" name="n4t">4</a></sup>. Plusieurs remarques notent sa d&eacute;ception face &agrave; la perte d&rsquo;un papier et son application &agrave; les conserver&nbsp;: &laquo;&nbsp;J&rsquo;avais toujours gard&eacute; cet &eacute;crit, que j&rsquo;esp&eacute;rais bien emporter si je sortais jamais, mais, comme je fus surprise en m&rsquo;en allant, je n&rsquo;eus le temps de rien prendre, et elles l&rsquo;ont &ocirc;t&eacute; de mon &eacute;critoire quand elles me l&rsquo;ont renvoy&eacute;&nbsp;&raquo; <span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span new="" roman="" times="">(Arnauld d&rsquo;Andilly,&nbsp;2005, p.129)</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span>. Cette attention particuli&egrave;re port&eacute;e aux &eacute;crits est tr&egrave;s pr&eacute;sente chez la moniale, certains lui permettent de travailler son argumentaire face aux tenants de la signature du Formulaire, d&rsquo;autres remplissent un r&ocirc;le consolatoire<sup><a href="#n5n" name="n5t">5</a></sup>.</p> <p style="text-align: justify;">&nbsp;</p> <h3 style="text-align: justify;"><strong>Ang&eacute;lique de Saint-Jean et les commanditaires des t&eacute;moignages</strong></h3> <p style="text-align: justify;">Ang&eacute;lique de Saint-Jean appara&icirc;t constamment lorsqu&rsquo;il est question de cette entreprise de cr&eacute;ation et de collecte de sources en tant qu&rsquo;auteur, commanditaire ou encore commentatrice. On peut noter cependant qu&rsquo;un flou persiste sur l&rsquo;importance des r&ocirc;les tenus par les premiers commanditaires des &eacute;crits, les directeurs spirituels et certains Messieurs de Port-Royal, et par Ang&eacute;lique de Saint-Jean. En effet, Agn&egrave;s Cousson (<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none">2012, p.16)&nbsp;</span></span></span></span></span></span></span></span></span>rappelle dans son &eacute;tude sur les &eacute;crits des moniales de Port-Royal, le paradoxe que constitue une religieuse auteur dans un couvent o&ugrave; r&egrave;gne la r&egrave;gle du silence, d&rsquo;autant plus que le monast&egrave;re est &laquo;&nbsp;impr&eacute;gn&eacute; d&rsquo;une culture augustinienne s&eacute;v&egrave;re &agrave; l&rsquo;encontre du &quot;moi&quot;, jug&eacute; corrompu et source de corruption depuis la Chute&nbsp;&raquo;. Ang&eacute;lique de Saint-Jean (<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none">2005,<i>&nbsp;</i>p.25)</span></span></span></span></span></span></span></span></span>&nbsp;ouvre sa&nbsp;Relation de captivit&eacute;&nbsp;sur le double rappel des ordres donn&eacute;s par ses sup&eacute;rieurs et du v&oelig;u d&rsquo;ob&eacute;issance&nbsp;:&nbsp;&laquo;&nbsp;Ce que l&rsquo;on demande de moi en m&rsquo;ordonnant d&rsquo;&eacute;crire une relation exacte de ce qui s&rsquo;est pass&eacute; dans ma captivit&eacute; me para&icirc;t une chose assez superflue. Si l&rsquo;ob&eacute;issance ne me la rendait n&eacute;cessaire, je croirais [qu&rsquo;il] ne serait point encore besoin de paroles pour apprendre &agrave; ceux qui ne l&rsquo;ont pas exp&eacute;riment&eacute; ce que c&rsquo;est qu&rsquo;une retraite de dix mois dans les circonstances qui ont accompagn&eacute; la mienne&nbsp;&raquo;.&nbsp;</p> <p style="text-align: justify;">Il ne s&rsquo;agit pas simplement ici du&nbsp;topos&nbsp;d&rsquo;humilit&eacute;, g&eacute;n&eacute;ralement pr&eacute;sent au seuil des ouvrages du XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle&nbsp;: l&rsquo;humilit&eacute; est une obligation sanctionn&eacute;e par un v&oelig;u pour une religieuse de l&rsquo;Ordre cistercien. Il faut donc essayer de d&eacute;samorcer les critiques d&egrave;s l&rsquo;ouverture du texte. Cette entr&eacute;e en mati&egrave;re remplit la fonction de bouclier, d&rsquo;autant plus que la moniale ne revendique pas l&rsquo;initiative de la r&eacute;daction de ce r&eacute;cit de captivit&eacute; qu&rsquo;elle attribue aux sup&eacute;rieurs, cependant l&rsquo;utilisation du pronom ind&eacute;fini pr&eacute;serve l&rsquo;ambigu&iuml;t&eacute;. Agn&egrave;s Cousson d&eacute;signe Nicolas Pavillon, &eacute;v&ecirc;que d&rsquo;Alet, et Antoine Arnauld comme commanditaires r&eacute;currents des&nbsp;Relations. Pour autant Laurence Plazenet semble placer Ang&eacute;lique de Saint-Jean directement &agrave; la t&ecirc;te de l&rsquo;entreprise historiographique. Elle &laquo;&nbsp;exige une vie de chaque religieuse&nbsp;&raquo; (<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none">Plazenet, 2012, p.56)&nbsp;</span></span></span></span></span></span></span></span></span>et d&eacute;veloppe une repr&eacute;sentation singuli&egrave;rement novatrice&nbsp;: &laquo;&nbsp;Sous l&rsquo;impulsion d&rsquo;Ang&eacute;lique de Saint-Jean, Port-Royal ne se con&ccedil;oit pas seulement dans l&rsquo;histoire, mais manifeste qu&rsquo;il s&rsquo;en forge une conception autonome&nbsp;&raquo; (<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none">Plazenet, 2012, p.57)</span></span></span></span></span></span></span></span></span>&nbsp;Comment d&eacute;passer cette contradiction&nbsp;?</p> <div id="edn1"> <p class="MsoEndnoteText" style="text-align:justify">&nbsp;</p> </div> <h3 style="text-align: justify;"><strong>Ang&eacute;lique de Saint-Jean, une figure ambigu&euml;</strong></h3> <p style="text-align: justify;">Ang&eacute;lique de Saint-Jean organise clandestinement son projet de biographie de la m&egrave;re Ang&eacute;lique. Elle le souligne &agrave; plusieurs reprises dans sa pr&eacute;sentation des&nbsp;<em>Relations sur la vie de la r&eacute;v&eacute;rende M&egrave;re Ang&eacute;lique de Sainte Magdelaine Arnauld</em> [&hellip;]&nbsp;: &laquo;&nbsp;j&rsquo;eus la commodit&eacute; de pouvoir entretenir toutes les S&oelig;urs anciennes qui me pouvoient apprendre quelque chose, sans leur dire n&eacute;anmoins pour quel sujet&nbsp;: car je travaillois &agrave; cette Relation dans un grand secret&nbsp;&raquo; (<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none">Arnauld d&rsquo;Andilly,<i>&nbsp;</i>1737, iv).</span></span></span></span></span></span></span></span></span>&nbsp;Elle craint que l&rsquo;humilit&eacute; de la m&egrave;re Ang&eacute;lique ne la pr&eacute;vienne de trop parler et qu&rsquo;elle ne puisse plus recueillir ses avis. La mise en place du projet demande donc &agrave; Ang&eacute;lique de Saint-Jean d&rsquo;user p&eacute;riodiquement de manipulation&nbsp;: elle doit par exemple trouver des exp&eacute;dients pour apprendre des choses en la &laquo;&nbsp;faisant parler&nbsp;&raquo; (<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none">Arnauld d&rsquo;Andilly,<i>&nbsp;</i>1737, iij)</span></span></span></span></span></span></span></span></span>. Selon elle, l&rsquo;objectif apolog&eacute;tique justifie cette duplicit&eacute;. C&rsquo;est une constante dans l&rsquo;&oelig;uvre et le caract&egrave;re d&rsquo;Ang&eacute;lique de Saint-Jean qui semble toujours agir pour un but transcendant, justifiant ainsi divers moyens d&rsquo;arriver &agrave; ses fins. La question de la parole, de l&rsquo;&eacute;crit et du t&eacute;moignage est fondamentale chez la moniale et sur son lit de mort, alors qu&rsquo;elle est entr&eacute;e en agonie, elle interpr&egrave;te sa difficult&eacute; &agrave; s&rsquo;exprimer de cette fa&ccedil;on&nbsp;: &laquo;&nbsp;Je ne s&ccedil;ais, disoit-elle, d&rsquo;o&ugrave; vient cette impuissance&nbsp;: avoir tant de choses &agrave; dire, &amp; ne pouvoir se faire entendre. Il faut se soumettre &agrave; Dieu, peut-&ecirc;tre que j&rsquo;ai trop parl&eacute; en ma vie, &amp; qu&rsquo;il m&rsquo;en a co&ucirc;t&eacute; la libert&eacute; &agrave; l&rsquo;heure de la mort pour en faire p&eacute;nitence&nbsp;&raquo; (<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none">Arnauld d&rsquo;Andilly, 1760, p. xxviij).</span></span></span></span></span></span></span></span></span>&nbsp;Ces&nbsp;<em>novissima verba</em>&nbsp;synth&eacute;tisent un enjeu majeur de son existence.</p> <p style="text-align: justify;">Dans sa&nbsp;<em>Relation de captivit&eacute;</em>, on rel&egrave;ve une citation o&ugrave; la moniale envisage l&rsquo;&eacute;ventualit&eacute; qu&rsquo;on puisse constituer&nbsp;<em>a posteriori</em>&nbsp;un r&eacute;cit de sa vie. Alors qu&rsquo;elle est captive au couvent des Annonciades, la pol&eacute;miste Madame de Rantzau se rend souvent aupr&egrave;s d&rsquo;elle pour la convaincre de signer le Formulaire. Ang&eacute;lique de Saint-Jean se trouve alors dans une situation invers&eacute;e qui rappelle les moments o&ugrave; elle recueillait clandestinement les propos de la m&egrave;re Ang&eacute;lique&nbsp;:&nbsp;&laquo;&nbsp;Je me souviens que, dans ce commencement, Mme de Rantzau, qui ne cherchait que de me&nbsp;<em>faire parler</em>, prit occasion de quelque chose que je disais, &ndash; je ne sais plus quoi &ndash; de me dire agr&eacute;ablement&nbsp;: &quot;Mais, ma M&egrave;re, je vous prie,&nbsp;<em>contez-moi toute votre histoire&nbsp;!</em>&quot; [&hellip;] Je lui r&eacute;pondis de m&ecirc;me, pour m&rsquo;en d&eacute;faire&nbsp;: &quot;Attendez, s&rsquo;il-vous-pla&icirc;t, ma M&egrave;re, qu&rsquo;elle soit achev&eacute;e, car&nbsp;<em>nous voil&agrave; au plus bel endroit</em>, et, quand on aura vu la fin,&nbsp;<em>il sera temps d&rsquo;en faire l&rsquo;histoire</em>&quot;&nbsp;&raquo; (<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none">Arnauld d&rsquo;Andilly<i>, </i>2005,<i>&nbsp;</i>p. 72. C&rsquo;est nous qui soulignons).</span></span></span></span></span></span></span></span></span></p> <p style="text-align: justify;">La moniale n&rsquo;exclut pas de se trouver un jour dans la position de la m&egrave;re Ang&eacute;lique&nbsp;: sujet d&rsquo;un travail hagiographique. Elle d&eacute;veloppe aussi l&rsquo;id&eacute;e d&rsquo;une destin&eacute;e qui puisse faire sens. La vie quotidienne appara&icirc;t comme un mat&eacute;riau composite dont la mort seule peut r&eacute;v&eacute;ler l&rsquo;architecture secr&egrave;te. Louis Marin (<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none">1997, p.395)</span></span></span></span></span></span></span></span></span>&nbsp;a d&eacute;montr&eacute;, dans un article sur un &eacute;crit de la m&egrave;re Ang&eacute;lique Arnauld, le rapport entre r&eacute;cit autobiographique et acte de fondation, fr&eacute;quent dans les textes li&eacute;s au monast&egrave;re de Port-Royal&nbsp;: &laquo;&nbsp;l&rsquo;&eacute;criture autobiographique, la Relation des &eacute;v&eacute;nements de la vie de la M&egrave;re, depuis sa vraie naissance (l&rsquo;histoire de sa conversion) jusqu&rsquo;&agrave; l&rsquo;imminence de sa mort n&rsquo;a d&rsquo;autre fonction que de convertir les &eacute;v&eacute;nements en signes dont cette &eacute;criture de soi vise &agrave; agencer l&rsquo;ordonnancement en en reconstituant le texte transcendant&nbsp;&raquo;. C&rsquo;est la premi&egrave;re &eacute;tape pour que le r&eacute;cit puisse &ecirc;tre le lieu d&rsquo;une fondation&nbsp;: &laquo;&nbsp;Aussi peut-on risquer l&rsquo;hypoth&egrave;se que le corps institu&eacute; [Port-Royal] est &quot;fond&eacute;&quot; par la biographie (les biographies, autobiographies, m&eacute;moires, histoires, portraits, etc.) comme m&eacute;moire, comme m&eacute;morial et comme monument du fondateur&nbsp;&raquo; (Marin,&nbsp;<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none">1997, p.<span new="" roman="" times="">397-398.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span>). Raconter, consigner, collecter, commenter, autant d&rsquo;actes qui constituent pour Ang&eacute;lique de Saint-Jean une mani&egrave;re de forger la m&eacute;moire de Port-Royal et de poser les fondations d&rsquo;un mythe.</p> <p style="text-align: justify;">&nbsp;</p> <div style="text-align:start; text-indent:0px; -webkit-text-stroke-width:0px"> <h3 style="text-align: justify;"><strong>Strat&eacute;gies d&rsquo;&eacute;criture</strong></h3> <p style="text-align: justify;"><u><em>Collecte des sources&nbsp;: une s&eacute;lection arbitraire&nbsp;? L&rsquo;affaire Genevi&egrave;ve de Saint-Augustin Le Tardif</em></u></p> <p style="text-align: justify;">H&eacute;l&egrave;ne Bouchard (<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none">2018, p.74)</span></span></span></span></span></span></span></span></span>, dans sa synth&egrave;se intitul&eacute;e&nbsp;Pascal et la mystique&nbsp;qualifie sans ambages Ang&eacute;lique de Saint-Jean d&rsquo;antimystique en rappelant qu&rsquo;elle a d&eacute;truit les lettres et certains &eacute;crits d&rsquo;une ancienne abbesse de Port-Royal, Genevi&egrave;ve de Saint-Augustin Le Tardif&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Durant la p&eacute;riode de la direction oratorienne (1633-1636), M&egrave;re Ang&eacute;lique rentra dans l&rsquo;ombre. [&hellip;] C&rsquo;est la jeune religieuse M&egrave;re Genevi&egrave;ve de Saint-Augustin Le Tardif qui devient le centre du rayonnement spirituel de Port-Royal. Abbesse de 1630 &agrave; 1636, elle est consult&eacute;e comme une femme inspir&eacute;e de Dieu. &quot;Cela lui fit du tort, &eacute;crit Ang&eacute;lique de Saint-Jean, car on &eacute;coutait toutes ses pens&eacute;es comme des mouvements du Saint-Esprit, et on la consultait sur les desseins que l&rsquo;on formait alors de l&rsquo;Institut du Saint-Sacrement, comme si elle e&ucirc;t d&ucirc; avoir r&eacute;v&eacute;lation de tout ce qui s&rsquo;y devait faire<sup><a href="#n6n" name="n6t">6</a></sup>.&quot;Cette deuxi&egrave;me Ang&eacute;lique, excessivement [sic] antimystique, le lui fera payer cher, puisqu&rsquo;elle br&ucirc;lera tous ses &eacute;crits, estimant &quot;qu&rsquo;on n&rsquo;en pouvait faire aucun usage&quot;.</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">La duret&eacute; des propos d&rsquo;H&eacute;l&egrave;ne Bouchard montre combien la figure d&rsquo;Ang&eacute;lique de Saint-Jean a connu une r&eacute;ception contrast&eacute;e, la post&eacute;rit&eacute; litt&eacute;raire et artistique a largement contribu&eacute; &agrave; former l&rsquo;image d&rsquo;une r&eacute;sistante inflexible et froide. On trouve dans la notice du&nbsp;<em>Dictionnaire de Port-Royal</em>&nbsp;(<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none">Lesaulnier &amp; Mc Kenna, 2004, p.662</span></span></span></span></span></span></span></span></span>) consacr&eacute;e &agrave; la m&egrave;re Le Tardif, les propos &eacute;crits &agrave; son sujet par Ang&eacute;lique de Saint-Jean dans le&nbsp;<em>N&eacute;crologe</em>&nbsp;: &laquo;&nbsp;L&rsquo;aveuglement de son corps fut suivi de celui de son esprit car Dieu permit qu&rsquo;elle tomb&acirc;t dans des peines int&eacute;rieures si violentes, qu&rsquo;elle perdit toute la lumi&egrave;re et le discernement qu&rsquo;elle avoit eu jusqu&rsquo;alors sur l&rsquo;&eacute;tat de son &acirc;me&nbsp;: ce qui la jettoit dans d&rsquo;extr&ecirc;mes perplexitez et dans un besoin continuel de conseil en toutes choses&nbsp;&raquo;. Ces propos sont cruels car la m&egrave;re Le Tardif &eacute;tait effectivement devenue progressivement aveugle. Ang&eacute;lique de Saint-Jean livre une interpr&eacute;tation unilat&eacute;rale de la fin de sa vie, sans consid&eacute;rer que l&rsquo;&eacute;preuve puisse &ecirc;tre un signe d&rsquo;&eacute;lection, ce qu&rsquo;elle ne manque pas de souligner d&egrave;s qu&rsquo;elle est elle-m&ecirc;me assaillie par le doute et l&rsquo;angoisse spirituelle, notamment dans sa&nbsp;<em>Relation de captivit&eacute;</em>. Ang&eacute;lique de Saint-Jean reproche entre autres &agrave; l&rsquo;abbesse les op&eacute;rations de son directeur S&eacute;bastien Zamet qui a contribu&eacute; &agrave; soustraire Port-Royal de la juridiction des C&icirc;teaux pour imprimer &agrave; l&rsquo;abbaye une influence carm&eacute;litaine. Par ailleurs, Ang&eacute;lique de Saint-Jean, dont la position est affermie par des &eacute;crits de Pierre Nicole comme le&nbsp;Trait&eacute; de l&rsquo;Oraison&nbsp;ou encore les&nbsp;Essais, critique de mani&egrave;re r&eacute;currente les personnalit&eacute;s mystiques de l&rsquo;abbaye. Dans son &eacute;tude sur les&nbsp;Esth&eacute;tiques de Port-Royal, &Eacute;va Martin (<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none">2018, p.345)</span></span></span></span></span></span></span></span></span>&nbsp;consid&egrave;re l&rsquo;injustice m&eacute;morielle qui a &eacute;t&eacute; faite &agrave; la m&egrave;re Le Tardif et note que &laquo;&nbsp;la plupart des relations des moniales semblent rester volontairement silencieuses &agrave; son sujet&nbsp;&raquo;. Est-ce &agrave; cause d&rsquo;une relecture post&eacute;rieure des relations par Ang&eacute;lique de Saint-Jean&nbsp;? &Eacute;va Martin explique la ranc&oelig;ur de la moniale &agrave; l&rsquo;encontre de la m&egrave;re Le Tardif par une peine d&rsquo;enfance&nbsp;: ses tantes la m&egrave;re Ang&eacute;lique et la m&egrave;re Agn&egrave;s s&eacute;journaient ailleurs alors que la m&egrave;re Le Tardif &eacute;tait &agrave; la t&ecirc;te de Port-Royal, elle aurait alors &eacute;t&eacute; per&ccedil;ue par la jeune Ang&eacute;lique comme une usurpatrice (Martin,&nbsp;<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none">2018, p.347)</span></span></span></span></span></span></span></span></span><sup><a href="#n7n" name="n7t">7</a></sup>. Ainsi, le projet mythographique d&rsquo;Ang&eacute;lique de Saint-Jean met en avant certaines figures pour en &eacute;clipser presque compl&egrave;tement d&rsquo;autres, ce qui constitue un montage strat&eacute;gique. L&rsquo;un des objectifs affich&eacute;s de cette entreprise m&eacute;morielle &eacute;tait d&rsquo;obtenir la canonisation de la m&egrave;re Ang&eacute;lique&nbsp;: &laquo;&nbsp;C&rsquo;&eacute;tait la m&egrave;re Ang&eacute;lique la r&eacute;formatrice au monast&egrave;re. C&rsquo;est pourquoi [&hellip;] le peu de cas que les&nbsp;M&eacute;moires&nbsp;d&rsquo;Utrecht font de Genevi&egrave;ve Le Tardif semble &ecirc;tre d&rsquo;ordre punitif&nbsp;: &quot;La seconde g&eacute;n&eacute;ration de Port-Royal [&hellip;] lui fera payer cher ce moment d&rsquo;&eacute;clat, et d&rsquo;avoir os&eacute;, ne f&ucirc;t-ce qu&rsquo;un instant, &eacute;clipser la grande r&eacute;formatrice&quot;&nbsp;&raquo; (Martin,&nbsp;<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none">2018, p.347).</span></span></span></span></span></span></span></span></span>&nbsp;Dans les&nbsp;<em>M&eacute;moires</em>&nbsp;d&rsquo;Utrecht justement, Ang&eacute;lique de Saint-Jean assume enti&egrave;rement la destruction des &eacute;crits de la m&egrave;re en 1672 et s&rsquo;en explique en ces termes&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">J&rsquo;ai br&ucirc;l&eacute; depuis peu plusieurs de ses lettres qu&rsquo;elle adressait &agrave; M. Le F&eacute;ron, qui &eacute;tait pour lors &agrave; Rome pour solliciter les Bulles de l&rsquo;&eacute;tablissement de ce nouvel ordre [1627]&nbsp;; dans lesquelles elle lui mandait des id&eacute;es qui lui venaient chaque jour comme des preuves du dessein de Dieu, et cela d&rsquo;une mani&egrave;re si pitoyable que j&rsquo;ai cru qu&rsquo;on n&rsquo;en pouvait faire aucun usage, sinon celui qu&rsquo;on inf&egrave;re assez de tout ce qui se verra dans la suite, qui est d&rsquo;y apprendre qu&rsquo;il faut laisser les personnes dans leur place, et que le silence et la retraite est celle d&rsquo;une religieuse. (Ang&eacute;lique de Saint-Jean,&nbsp;M&eacute;moires d&rsquo;Utrecht, t. 1, p. 125 in <span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none">Martin, 2018, p.348).</span></span></span></span></span></span></span></span></span></p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Cet argument condamnant la religieuse qui outrepasse son emploi en &eacute;crivant des lettres et en s&rsquo;int&eacute;ressant &agrave; la th&eacute;ologie est tout de m&ecirc;me tr&egrave;s &eacute;tonnant sous la plume d&rsquo;Ang&eacute;lique de Saint-Jean, ayant &eacute;t&eacute; elle-m&ecirc;me fort sujette &agrave; ces pratiques au cours de son existence. Cet exemple r&eacute;v&egrave;le donc combien l&rsquo;entreprise mythographique n&rsquo;est pas exempte de distorsions et de manipulations diverses afin de cr&eacute;er un cheminement coh&eacute;rent&nbsp;a posteriori&nbsp;centr&eacute; sur la vie de la m&egrave;re Ang&eacute;lique et sur la p&eacute;riode des pers&eacute;cutions&nbsp;: ce travail est orient&eacute; dans le but de pr&eacute;senter une certaine image construite du monast&egrave;re et d&rsquo;&oelig;uvrer &agrave; la canonisation de la r&eacute;formatrice.</p> <p style="text-align: justify;"><u><em>Une tra&icirc;tresse au temps des pers&eacute;cutions, l&rsquo;affaire de la s&oelig;ur de Sainte-Flavie Passart</em></u></p> <p style="text-align: justify;">Lors du mouvement d&rsquo;opposition des religieuses captives contre la signature du Formulaire, le nom d&rsquo;une s&oelig;ur revient constamment comme meneuse des s&oelig;urs dites &laquo;&nbsp;signeuses&nbsp;&raquo; et ouvertement per&ccedil;ues comme des tra&icirc;tresses&nbsp;: il s&rsquo;agit de la s&oelig;ur Catherine de Sainte-Flavie Passart<sup><a href="#n8n" name="n8t">8</a></sup>. Cette religieuse avait &eacute;galement un profil mystique et apportait notamment une grande attention &agrave; r&eacute;v&eacute;rer les reliques des saints modernes. Selon plusieurs t&eacute;moignages, ce serait &eacute;galement la s&oelig;ur Sainte-Flavie Passart qui aurait intim&eacute; &agrave; la petite Marguerite P&eacute;rier d&rsquo;apposer la Sainte-&Eacute;pine sur son &oelig;il, ce qui est &agrave; la source du miracle que l&rsquo;on connait<sup><a href="#n9n" name="n9t">9</a></sup>. Ang&eacute;lique de Saint-Jean a contribu&eacute; &agrave; cr&eacute;er un climat de m&eacute;fiance g&eacute;n&eacute;ralis&eacute;e &agrave; l&rsquo;&eacute;gard des s&oelig;urs signeuses et Sainte-Flavie Passart en particulier a fait l&rsquo;objet d&rsquo;une violente campagne &eacute;crite et orale de discr&eacute;dit et d&rsquo;ostracisme. Dans sa&nbsp;<em>Relation de captivit&eacute;</em>, Ang&eacute;lique de Saint-Jean utilise l&rsquo;on&eacute;irocritie comme une arme contre la s&oelig;ur, elle y raconte ainsi l&rsquo;un de ses songes&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">Je croyais &ecirc;tre &agrave; Port-Royal de Paris dans un lieu o&ugrave; il y avait une fen&ecirc;tre qui regardait dans la galerie d&#39;en bas, qui m&egrave;ne &agrave; la porte du couvent, et&nbsp;&nbsp;j&#39;y voyais nos S&oelig;urs de Paris marcher processionnellement, tenant toutes des branches de roses fleuries de roses incarnates les plus belles du monde, et ma S&oelig;ur Flavie qui marchait au milieu en rang de sup&eacute;rieure, qui portait entre les mains une maison d&#39;argent que je prenais pour une ch&acirc;sse, et qui conduisait &agrave; la porte de la cl&ocirc;ture [&hellip;]. Or je dis que cette comparaison est juste, car il est vrai &agrave; la lettre que ma S&oelig;ur Flavie nous a toutes men&eacute;es &agrave; la porte par ses intrigues et ses trahisons, et qu&#39;elle s&#39;est attribu&eacute;e la qualit&eacute; de sup&eacute;rieure pour dominer nos S&oelig;urs, que, nous laissant la participation des souffrances de J&eacute;sus-Christ pour notre ornement et nos richesses, elle n&#39;a eu l&#39;ambition que de conserver une maison temporelle, o&ugrave; elle p&ucirc;t commander et qu&#39;elle p&ucirc;t rendre &eacute;clatante et florissante d&#39;une prosp&eacute;rit&eacute; mondaine, comme M. l&#39;Archev&ecirc;que l&#39;a dit souvent [&hellip;].&nbsp;<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span new="" roman="" times="">(Arnauld d&rsquo;Andilly<i>, </i>2005, p.274-275).</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">Ici, le r&eacute;cit du songe et son interpr&eacute;tation fournissent une arme redoutable &agrave; la moniale, venant constituer une preuve irr&eacute;futable de la trahison de la s&oelig;ur Sainte-Flavie Passart, puisque c&rsquo;est le Saint-Esprit lui-m&ecirc;me qui vient lui &ocirc;ter son masque par l&rsquo;inspiration du r&ecirc;ve. Comme les orateurs antiques qui faisaient parler les morts dans les proc&egrave;s gr&acirc;ce aux prosopop&eacute;es, Ang&eacute;lique de Saint-Jean op&egrave;re une sorte de&nbsp;<em>Deus ex machina</em>&nbsp;rh&eacute;torique qui transforme une certitude personnelle en argument d&rsquo;autorit&eacute;. C&rsquo;est une autre strat&eacute;gie d&rsquo;&eacute;criture qui joue sur la confusion des r&eacute;alit&eacute;s pour accuser la tra&icirc;tresse sur la base de pr&eacute;somptions.</p> <p style="text-align: justify;"><u><em>D&eacute;bats th&eacute;ologiques et pol&eacute;miques oratoires&nbsp;: une retranscription fid&egrave;le&nbsp;?</em></u></p> <p style="text-align: justify;">Enfin, Ang&eacute;lique de Saint-Jean est tr&egrave;s t&ocirc;t reconnue pour sa ma&icirc;trise de l&rsquo;&eacute;loquence. En tant que religieuse, elle peut difficilement faire des portraits &agrave; charge dans ses &eacute;crits, mais elle utilise toutes les ressources de l&rsquo;ironie pour tourner l&rsquo;opposant en ridicule. Elle relaie les paroles, les gestes et les anecdotes de chacun pour permettre aux caract&egrave;res de parler d&rsquo;eux-m&ecirc;mes. L&rsquo;ironie de la moniale se manifeste surtout dans le cadre des d&eacute;bats et des discussions. Christian Belin, dans un article enti&egrave;rement consacr&eacute; &agrave; la&nbsp;<em>Relation de captivit&eacute;</em>&nbsp;d&rsquo;Ang&eacute;lique de Saint-Jean, insiste sur ce ton particulier&nbsp;:&nbsp;&laquo;&nbsp;Le&nbsp;<em>Je</em>&nbsp;de l&rsquo;&eacute;crivain n&rsquo;est donc pas toujours un&nbsp;Je&nbsp;confessant la puret&eacute; ou l&rsquo;orthodoxie, mais un&nbsp;Je&nbsp;qui observe, r&eacute;fl&eacute;chit et s&rsquo;amuse.</p> <p style="text-align: justify;">L&rsquo;ironie en effet, n&rsquo;est pas absente d&rsquo;un texte que l&rsquo;on estimerait &agrave; tort vou&eacute; &agrave; la d&eacute;ploration ou &agrave; la vindicte. Les remarques moqueuses fusent &agrave; l&rsquo;encontre de l&rsquo;archev&ecirc;que ou de Madame de Rantzau, convertie du luth&eacute;ranisme et interlocutrice attitr&eacute;e d&rsquo;Ang&eacute;lique. Argumentant &agrave; grand renfort de citations emprunt&eacute;es aux P&egrave;res ou aux Conciles, lors des conversations impos&eacute;es par Mme de Rantzau, Ang&eacute;lique donne toute latitude &agrave; un g&eacute;nie de la controverse qui est tout autant chez elle une marque familiale qu&rsquo;une tournure fr&eacute;quente chez les amis de Port-Royal&nbsp;&raquo; (<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span new="" roman="" times="">Belin, 2014, p.552).</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></p> <p style="text-align: justify;">De nombreuses piques fustigent l&rsquo;ignorance manifeste de ses contradicteurs concernant les mati&egrave;res convoqu&eacute;es&nbsp;: elle raille &agrave; plusieurs reprises les erreurs de Madame de Rantzau sur des noms de personnes, &laquo;&nbsp;Moulina&nbsp;&raquo; au lieu de Molina ou encore &laquo;&nbsp;saint Anastase&nbsp;&raquo; au lieu de saint Athanase&nbsp;(<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span new="" roman="" times="">Belin, 2014, p.53 et 79)</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span>. L&#39;humour appara&icirc;t souvent dans cette&nbsp;<em>Relation de captivit&eacute;</em>, notamment quand la moniale apprend que les religieuses per&ccedil;oivent pour elle une pension de la part du roi Louis XIV&nbsp;(<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span new="" roman="" times="">Belin, 2014, p.147)</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span><sup><a href="#n10n" name="n10t">10</a></sup>. Elle d&eacute;peint &eacute;galement des sayn&egrave;tes tr&egrave;s dr&ocirc;les v&eacute;cues au couvent des Annonciades, par exemple lorsqu&#39;elle assiste &agrave; une &laquo;&nbsp;messe de chasseur&nbsp;&raquo;&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align: justify;">J&#39;entendais toujours cette premi&egrave;re messe &agrave; la chapelle, mais ma d&eacute;votion y diminua depuis qu&#39;elles eurent, en la place d&#39;un pr&ecirc;tre de Saint-Paul qui la disait fort bien, un chapelain qu&#39;elles reprirent, qui la disait avec une pr&eacute;cipitation &eacute;pouvantable, et un gar&ccedil;on qui y r&eacute;pondait, qui prenait t&acirc;che de ne rien dire que les deux derniers mots de ce qu&#39;il devait r&eacute;pondre, ce qui me donnait une distraction d&#39;impatience, plus contre le pr&ecirc;tre qui le souffrait que contre ce pauvre gar&ccedil;on qui croyait, je m&#39;assure, &ecirc;tre fort habile d&#39;avoir trouv&eacute; cette invention d&#39;aller plus vite&nbsp;; car je m&#39;apercevais qu&#39;il l&#39;apprenait &agrave; d&#39;autres petits gar&ccedil;ons, qui se donnaient bien de la peine &agrave; imiter cette bredouillerie, &agrave; quoi ils ne pouvaient presque atteindre, quelque diligence qu&#39;ils fissent. Je le dis un jour aux M&egrave;res, qui ne le pouvaient pas tant remarquer de leur ch&oelig;ur, mais elles en rirent et me dirent que ce pr&ecirc;tre venait de l&#39;arm&eacute;e o&ugrave; il &eacute;tait aum&ocirc;nier de quelque personne de cour, et que cela l&#39;avait accoutum&eacute; &agrave; exp&eacute;dier sa messe, que l&#39;on appelait cela une messe de chasseur&nbsp;(<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span new="" roman="" times="">Belin, 2014, p.108)</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span>.&nbsp;</p> </blockquote> <p style="text-align: justify;">La moniale d&eacute;peint ici une sc&egrave;ne grotesque sous les yeux du lecteur qui voit cette &eacute;trange assembl&eacute;e s&#39;animer. L&#39;emploi de termes familiers comme &laquo;&nbsp;bredouillerie&nbsp;&raquo; n&#39;est pas innocent et vient encore souligner le caract&egrave;re absurde de la sayn&egrave;te, surtout dans un cadre sacr&eacute;. Souvent l&#39;ironie vire au path&eacute;tique lorsque l&#39;absurdit&eacute; du temps pr&eacute;sent devient trop difficile &agrave; porter. &Agrave; une m&egrave;re qui lui demande de signer le Formulaire pour v&eacute;rifier si effectivement elle s&#39;en trouve plus mal dans son rapport &agrave; Dieu, elle r&eacute;pond&nbsp;:&nbsp;&laquo;&nbsp;Il est vrai que cette bonne M&egrave;re me faisait le d&eacute;fi un peu en riant. Je ne lui r&eacute;pondis autre chose, sinon qu&#39;il &eacute;tait dangereux de s&#39;enfoncer un poignard dans le sein pour voir si cela faisait mourir, et que je laissais ces exp&eacute;riences &agrave; d&#39;autres&nbsp;&raquo; (<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span new="" roman="" times="">Belin, 2014, p.173).</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span>&nbsp;Dans la&nbsp;<em>Relation de captivit&eacute;</em>,&nbsp;d&rsquo;autres exemples pr&eacute;sentent au lecteur les talents d&rsquo;Ang&eacute;lique de Saint-Jean, notamment dans le domaine de l&rsquo;&eacute;loquence judiciaire, il est donc l&eacute;gitime de se demander quelle est la part de composition dans les r&eacute;cits qu&rsquo;elle fait&nbsp;a posteriori&nbsp;de tous ces &eacute;changes. Op&egrave;re-t-elle une s&eacute;lection pour mettre en avant les morceaux de bravoure&nbsp;? Ajoute-t-elle des &eacute;l&eacute;ments&nbsp;? On peut remarquer que ses contradicteurs commettent souvent des erreurs grossi&egrave;res, ce qui invite &agrave; consid&eacute;rer ces transcriptions avec prudence. Il pourrait alors s&rsquo;agir d&rsquo;une autre forme de montage&nbsp;: jouer sur la lumi&egrave;re et la position du spectateur-lecteur pour grossir certains traits et en estomper d&rsquo;autres afin de pr&eacute;senter au regard un tout autre tableau.</p> <p style="text-align: justify;">Pour conclure, il convient de questionner l&rsquo;utilit&eacute; des montages et de diverses strat&eacute;gies d&rsquo;&eacute;criture pour forger la m&eacute;moire de Port-Royal. Ang&eacute;lique de Saint-Jean per&ccedil;oit les &eacute;v&eacute;nements et les faits &agrave; l&rsquo;aune d&rsquo;une histoire qui s&rsquo;articule sur un autre temps, le temps sacr&eacute; du Salut. Elle s&rsquo;ancre donc dans une perspective tr&egrave;s nettement eschatologique. Cela appara&icirc;t dans son affirmation d&eacute;j&agrave; cit&eacute;e en d&eacute;but d&rsquo;article&nbsp;: &laquo;&nbsp;Attendez, s&rsquo;il-vous-pla&icirc;t, ma M&egrave;re, qu&rsquo;elle soit achev&eacute;e, car nous voil&agrave; au plus bel endroit, et, quand on aura vu la fin, il sera temps d&rsquo;en faire l&rsquo;histoire&nbsp;&raquo; (<span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span new="" roman="" times="">Belin, 2014, p.42)</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span>. Ce &laquo;&nbsp;plus bel endroit&nbsp;&raquo;, c&rsquo;est le temps des pers&eacute;cutions et il est possible d&rsquo;imaginer qu&rsquo;Ang&eacute;lique de Saint-Jean, dans son caract&egrave;re inflexible aspire au martyr. Cette mort sacrificielle viendrait en effet recomposer toute l&rsquo;histoire de sa vie et op&eacute;rer la&nbsp;<em>m&eacute;tamorphose</em>&nbsp;tant esp&eacute;r&eacute;e de la religieuse en sainte. Mais &agrave; d&eacute;faut, <em>l&rsquo;anamorphose</em>&nbsp;m&eacute;morielle est rendue possible par le travail de composition litt&eacute;raire. C&rsquo;est l&rsquo;occasion de rappeler l&rsquo;&eacute;tymologie du terme &laquo;&nbsp;martyr&nbsp;&raquo;, du grec &laquo;&nbsp;<em>marturein</em>&nbsp;&raquo; signifiant &laquo;&nbsp;t&eacute;moigner&nbsp;&raquo;.</p> <p style="text-align: justify;">&nbsp;</p> </div> <div style="text-align:start; text-indent:0px; -webkit-text-stroke-width:0px"> <hr align="left" size="1" width="33%" /> <div id="edn1"> <h3 style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span style="line-height:24px"><span new="" roman="" times=""><b>Bibliographie&nbsp;</b></span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></h3> <ul> <li style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span style="line-height:24px"><span new="" roman="" times="">Arnauld d&rsquo;Andilly, Ang&eacute;lique de Saint-Jean (2005).&nbsp;<i>Aux Portes des t&eacute;n&egrave;bres. Relation de captivit&eacute;.</i>&nbsp;Paris :&nbsp;La Table ronde.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></li> <li style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span new="" roman="" times=""><i>---&nbsp;</i>(</span><span style="line-height:150%"><span new="" roman="" times="">1737).</span></span><span new="" roman="" times=""><i>&nbsp;Relations sur la vie de la r&eacute;v&eacute;rende M&egrave;re Ang&eacute;lique de Sainte Magdelaine Arnauld ou Recueil de la m&egrave;re Ang&eacute;lique de Saint-Jean Arnauld d&rsquo;Andilly sur la vie de sa tante la m&egrave;re Marie-Ang&eacute;lique de Sainte-Magdelaine Arnauld et sur la r&eacute;forme des abbayes de Port-Royal, Maubuisson et autres, faite par cette sainte abbesse</i></span><span style="line-height:150%"><span new="" roman="" times="">s.l., s.n.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></li> <li style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span style="line-height:150%"><span new="" roman="" times="">--- (1760).&nbsp;Abr&eacute;g&eacute; de la vie d&rsquo;Ang&eacute;lique de Saint-Jean. In :&nbsp;<i>Conf&eacute;rences de la m&egrave;re Ang&eacute;lique de Saint-Jean, </i></span></span><i>abbesse, sur les constitutions du monast&egrave;re de Port-Royal du Saint-Sacremen</i>t,<span style="line-height:150%"><span new="" roman="" times="">&nbsp;s.l., s.n., vol. 1.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></li> <li style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span style="line-height:24px"><span new="" roman="" times="">Bouchard, H. (2018). <i>Pascal et la mystique</i>. Paris :&nbsp;L&rsquo;Harmattan.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></li> <li style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span style="line-height:24px"><span new="" roman="" times=""><i>Chroniques de Port-Royal&nbsp;</i>(1985), no.&nbsp;34, La M&egrave;re Ang&eacute;lique de Saint-Jean (1624 &ndash; 1684).&nbsp;Paris :&nbsp;Biblioth&egrave;que Mazarine.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></li> <li style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span style="line-height:24px"><span new="" roman="" times="">Belin, C. (2014).&nbsp;Une &quot;fastueuse singularit&eacute;&quot;&nbsp;:&nbsp;<i>La Relation de captivit&eacute;</i>&nbsp;d&rsquo;Ang&eacute;lique de Saint-Jean.&nbsp;<i>Rivista di Storia e Letteratura Religiosa</i>, no.&nbsp;3, 547-561.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></li> <li style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span style="line-height:24px"><span new="" roman="" times=""><span style="background-color:white">B&eacute;ly, L.&nbsp;(2015). Louis&nbsp;XIV et le plaisir de l&rsquo;information.&nbsp;<i>Dix-septi&egrave;me si&egrave;cle</i>, vol.4, no.269,&nbsp;671-684.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></li> <li style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span style="line-height:24px"><span new="" roman="" times="">Cousson, A. (2012). <i>L&rsquo;&Eacute;criture de soi. Lettres et r&eacute;cits autobiographiques des religieuses de Port-Royal</i>. Paris :&nbsp;Honor&eacute; Champion, coll. &laquo;&nbsp;Lumi&egrave;re classique&nbsp;&raquo; no.94.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></li> <li style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none">Ellen Weaver, F. (1985).&nbsp;Ang&eacute;lique de Saint-Jean, abbesse et &quot;mythographe&quot; de Port-Royal.&nbsp;<i>Chroniques de Port-Royal, n&deg;34, La M&egrave;re Ang&eacute;lique de Saint-Jean (1624 &ndash; 1684)</i>.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></li> <li style="text-align: justify;">Leclercq, J. (1976).&nbsp;<i>Nouveau visage de saint Bernard de Clairvaux, Approches psycho-historiques</i>. Paris :&nbsp;Cerf.</li> <li style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span style="line-height:24px"><span new="" roman="" times="">Lesaulnier, J.,&nbsp;Mc Kenna, A. (dir.) (2004).&nbsp;<i>Dictionnaire de Port-Royal</i>.&nbsp;Paris :&nbsp;Honor&eacute; Champion.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></li> <li style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span style="line-height:24px"><span new="" roman="" times="">Marin, L. (1997). <i>Pascal et Port-Royal</i>, dir. Alain Cantillon.&nbsp;Paris :&nbsp;PUF.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></li> <li style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span style="line-height:24px"><span new="" roman="" times="">Martin, &Eacute;. (2018).&nbsp;<i>Esth&eacute;tiques de Port-Royal</i>. Paris :&nbsp;Classiques Garnier.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></li> <li style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span style="line-height:24px"><span new="" roman="" times="">Pellisson-Fontanier, P. (1698).&nbsp;<i>Pan&eacute;gyrique du Roy Louis Quatorzi&egrave;me</i>&nbsp;(1671)<i>&nbsp;dans Recueil des harangues prononc&eacute;es par Messieurs de l&rsquo;Acad&eacute;mie fran&ccedil;oise dans leurs r&eacute;ceptions [&hellip;].</i>&nbsp;Paris :&nbsp;Jean-Baptiste Coignard.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></li> <li style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span style="line-height:24px"><span new="" roman="" times="">Perez,&nbsp;S. (2004).&nbsp;Les brouillons de l&rsquo;absolutisme&nbsp;: les &quot;m&eacute;moires&quot; de Louis XIV en question.&nbsp;<i>Dix-septi&egrave;me si&egrave;cle</i>, vol. 1, no.&nbsp;222,&nbsp;<span style="background-color:white">25-50.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></li> <li style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span style="line-height:24px"><span new="" roman="" times="">Plazenet, L. (2012).&nbsp;<i>Port-Royal, une anthologie.&nbsp;</i>Paris : Flammarion.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></li> <li style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span style="line-height:24px"><span new="" roman="" times="">Sainte-Beuve, C.-A. (2004).&nbsp;P<i>ort-Royal,&nbsp;</i>t. I.&nbsp;Paris :&nbsp;Robert Laffont.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></li> <li style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span style="line-height:24px"><span new="" roman="" times="">Sellier,&nbsp;P. (2012).&nbsp;L&rsquo;anamorphose des grands hommes.&nbsp;<i>Port-Royal et la litt&eacute;rature</i>, vol.&nbsp;2.&nbsp;Paris :&nbsp;Honor&eacute; Champion, 311-326.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></li> </ul> <h3 class="MsoEndnoteText" style="text-align: justify;">&nbsp;</h3> <h3 class="MsoEndnoteText" style="text-align: justify;"><strong>Notes</strong></h3> <p class="MsoEndnoteText" style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span new="" roman="" times=""><sup><a href="#n1t" name="n1n">1</a></sup>&nbsp;Dans un article du second tome de son &eacute;tude&nbsp;<i>Port-Royal et la litt&eacute;rature</i>&nbsp;intitul&eacute; &laquo;&nbsp;L&rsquo;anamorphose des grands hommes&nbsp;&raquo;, Philippe Sellier (2012, p.324) rappelle que &laquo;&nbsp;le milieu du XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle a connu en France une v&eacute;ritable vogue de l&rsquo;anamorphose. Les signes en sont extr&ecirc;mement nombreux. Les jeux anamorphotiques s&rsquo;&eacute;taient d&eacute;velopp&eacute;s en m&ecirc;me temps que les recherches sur la perspective&nbsp;&raquo;.&nbsp;Philippe Sellier consid&egrave;re cette technique picturale comme une m&eacute;taphore int&eacute;ressante pour qualifier les portraits des hommes dans certains extraits des&nbsp;<i>Maximes</i>&nbsp;de La Rochefoucauld.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></p> <div id="edn4"> <div id="edn1"> <p class="MsoEndnoteText" style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span new="" roman="" times=""><sup><a href="#n2t" name="n2n">2</a></sup>&nbsp;Le 1<sup>er</sup>&nbsp;f&eacute;vrier 1661, l&rsquo;assembl&eacute;e du clerg&eacute; rend obligatoire la signature d&rsquo;un formulaire pour tous les eccl&eacute;siastiques, les r&eacute;gents, les ma&icirc;tres d&rsquo;&eacute;cole, les religieux et les religieuses. Ce formulaire reconnait le caract&egrave;re h&eacute;r&eacute;tique des Cinq propositions attribu&eacute;es &agrave; Jans&eacute;nius par la bulle papale&nbsp;<i>Cum occasione&nbsp;</i>(Innocent X) du 31 mai 1653. Ang&eacute;lique de Saint-Jean, ainsi que d&rsquo;autres religieuses de Port-Royal, refusent de signer ce formulaire.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></p> </div> <div id="edn2"> <p class="MsoEndnoteText" style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span new="" roman="" times=""><sup><a href="#n3t" name="n3n">3</a></sup>&nbsp;Cit&eacute; par Perez (2004,&nbsp;p.43).</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></p> <div style="text-align:start; text-indent:0px; -webkit-text-stroke-width:0px"> <div id="edn1"> <div id="edn3"> <div id="edn1"> <p class="MsoEndnoteText" style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span new="" roman="" times=""><sup><a href="#n4t" name="n4n">4</a></sup>&nbsp;Le 26 ao&ucirc;t 1664, les religieuses qui refusent de signer le Formulaire, dont Ang&eacute;lique de Saint-Jean, sont arr&ecirc;t&eacute;es par l&rsquo;Archev&ecirc;que de Paris Hardouin de P&eacute;r&eacute;fixe accompagn&eacute; d&rsquo;archers. Elles sont exil&eacute;es et retenues captives dans diff&eacute;rents monast&egrave;res. Ang&eacute;lique est d&eacute;tenue au couvent des Annonciades de Bologne jusqu&rsquo;au 3 juillet 1665.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></p> </div> <div id="edn3"> <p class="MsoEndnoteText" style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span new="" roman="" times=""><sup><a href="#n5t" name="n5n">5</a></sup>&nbsp;Arnauld d&rsquo;Andilly, 2005,&nbsp;p. 63-64&nbsp;: &laquo; J&rsquo;avais presque r&eacute;duit toutes mes pri&egrave;res &agrave; celle d&rsquo;Esther, que j&rsquo;&eacute;crivis dans ma douleur derri&egrave;re notre diurnal, et que je r&eacute;p&eacute;tais sans cesse&nbsp;&raquo;. En captivit&eacute;, la religieuse consigne des pri&egrave;res consolatoires.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></p> <div id="edn2"> <p class="MsoEndnoteText" style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span new="" roman="" times=""><sup><a href="#n6t" name="n6n">6</a></sup>&nbsp;<i>M&eacute;moires d&rsquo;Utrecht,&nbsp;</i>1742, t. 2, p. 316.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></p> </div> <div id="edn3"> <div id="edn2"> <p class="MsoEndnoteText" style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span new="" roman="" times=""><sup><a href="#n7t" name="n7n">7</a></sup>&nbsp;&laquo;&nbsp;Entre neuf et douze ans, Ang&eacute;lique de Saint-Jean fut donc forc&eacute;e d&rsquo;accepter le gouvernement d&rsquo;une &eacute;trang&egrave;re qui avait pris la place de sa tante r&eacute;v&eacute;r&eacute;e dans la maison. Comme le remarque Ellen Weaver, le retour, en 1636, d&rsquo;Agn&egrave;s et d&rsquo;Ang&eacute;lique &agrave; Port-Royal et le d&eacute;part de Genevi&egrave;ve Le Tardif durent s&ucirc;rement &ecirc;tre des &eacute;v&eacute;nements longuement et impatiemment attendus par Ang&eacute;lique de Saint-Jean&nbsp;&raquo;.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="MsoEndnoteText" style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span new="" roman="" times=""><sup><a href="#n8t" name="n8n">8</a></sup>&nbsp;Catherine de Sainte-Flavie Passart (1609-1670) est accus&eacute;e entre autres d&rsquo;avoir permis la constitution d&rsquo;une liste des religieuses contre la signature du Formulaire. Cette liste aurait &eacute;t&eacute; utilis&eacute;e lors de leur arrestation le 26 ao&ucirc;t 1664. Jean Orcibal publie un ouvrage consacr&eacute; au conflit qui oppose Catherine de Sainte-Flavie Passart et Ang&eacute;lique de Saint-Jean&nbsp;:&nbsp;<i>Port-Royal entre le miracle et l&rsquo;ob&eacute;issance&nbsp;: Flavie Passart et Ang&eacute;lique de Saint-Jean Arnauld d&rsquo;Andilly</i>, Paris, Descl&eacute;e de Brouwer, 1957.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></p> <div style="text-align:start; text-indent:0px; -webkit-text-stroke-width:0px"> <div id="edn4"> <div id="edn2"> <p class="MsoEndnoteText" style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span new="" roman="" times=""><sup><a href="#n9t" name="n9n">9</a></sup>&nbsp;Voir le dossier &laquo;&nbsp;Information sur la sainte &eacute;pine&nbsp;&raquo;, publi&eacute; par Jean Mesnard dans son &eacute;dition des&nbsp;<em>&OElig;uvres compl&egrave;tes de Blaise Pascal,</em>&nbsp;Paris, Descl&eacute;e de Brouwer, t.&nbsp;III, 1991, p.&nbsp;891-940.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="MsoEndnoteText" style="text-align: justify;"><span style="caret-color:#000000"><span style="font-style:normal"><span style="font-variant-caps:normal"><span style="font-weight:normal"><span style="letter-spacing:normal"><span style="text-transform:none"><span style="white-space:normal"><span style="word-spacing:0px"><span style="text-decoration:none"><span new="" roman="" times=""><sup><a href="#n10t" name="n10n">10</a></sup>&nbsp;&laquo;&nbsp;[&hellip;] j&rsquo;avais cru leur &ecirc;tre tout &agrave; fait &agrave; charge. Elle me r&eacute;pondit fort civilement qu&rsquo;elles n&rsquo;avaient jamais pens&eacute; en aucune sorte &agrave; rien recevoir pour moi et que je ne leur avais point &eacute;t&eacute; &agrave; charge, que tout au plus j&rsquo;avais pris la place d&rsquo;une de leurs s&oelig;urs qui avait &eacute;t&eacute; enterr&eacute;e la veille que j&rsquo;entrai chez elles, mais qu&rsquo;elles avaient &eacute;t&eacute; surprises quand on leur avait port&eacute; deux cent livres au mois de f&eacute;vrier de la part de M. l&rsquo;Archev&ecirc;que, qui leur fit dire que le roi leur envoyait cela pour ma pension&nbsp;:&nbsp;<i>j&rsquo;appris ainsi que j&rsquo;&eacute;tais pensionnaire du roi&nbsp;!</i>&nbsp;&raquo; C&rsquo;est nous qui soulignons.</span></span></span></span></span></span></span></span></span></span></p> </div> </div> </div> <p style="text-indent: 0px; -webkit-text-stroke-width: 0px; text-align: justify;">&nbsp;</p> </div> </div> <h3 style="text-align: justify;"><strong style="font-size: 13px;"><sup><a href="#n*t" name="n*n">*</a></sup> Biographie</strong></h3> <p style="text-align: justify;"><meta charset="UTF-8" />Agr&eacute;g&eacute;e de lettres modernes en 2017, et doctorante-contractuelle charg&eacute;e de cours en litt&eacute;rature fran&ccedil;aise depuis septembre 2018 &agrave; l&rsquo;universit&eacute; Paul-Val&eacute;ry Montpellier 3, Sabria Chebli pr&eacute;pare une th&egrave;se sous la direction de Christian Belin (IRCL) interrogeant la construction d&rsquo;une po&eacute;tique sacrificielle dans les &eacute;crits d&rsquo;Ang&eacute;lique de Saint-Jean Arnauld d&rsquo;Andilly, moniale de Port-Royal au XVII<sup>e</sup>&nbsp;si&egrave;cle.</p> <p style="text-align: justify;">&nbsp;</p> </div> </div> </div> </div> <div style="text-indent: 0px; -webkit-text-stroke-width: 0px; text-align: justify;">&nbsp;</div> </div> </div> </div> </div>