<h2>Introduction&nbsp;: du besoin langagier</h2> <p style="text-align:justify">Malgr&eacute; son usage et l&rsquo;&eacute;vidence qu&rsquo;elle suppose, la notion de &laquo;&nbsp;besoin&nbsp;&raquo; corr&eacute;l&eacute;e avec celle de &laquo;&nbsp;motivation&nbsp;&raquo; ‒ constamment invoqu&eacute;e lorsqu&rsquo;il s&rsquo;agit d&rsquo;apprendre une langue &eacute;trang&egrave;re ‒ pose probl&egrave;me, ce que nous tenterons ici d&rsquo;explorer.</p> <p style="text-align:justify">Cette notion s&rsquo;apparente ou se confond avec celle d&rsquo;une demande, attente ou n&eacute;cessit&eacute;&nbsp;; d&rsquo;un int&eacute;r&ecirc;t, escompte ou utilit&eacute;&nbsp;; d&rsquo;un d&eacute;sir, souhait ou projet, et s&rsquo;associe le plus souvent &agrave; un objectif &laquo;&nbsp;<em>tant il est vrai qu&rsquo;un besoin incite l&rsquo;individu &agrave; le satisfaire, donc &agrave; agir, donc &agrave; atteindre un but. &Agrave; la source m&ecirc;me de la vie humaine, il n&rsquo;est pas &eacute;tonnant qu&rsquo;elle soit l&rsquo;objet d&rsquo;innombrables th&eacute;ories.</em>&nbsp;&raquo;<sup><a href="#_ftn3" name="_ftnref3">3</a></sup>&nbsp;Utilis&eacute;e aussi bien en psychologie, sociologie, &eacute;conomie ou psychanalyse, elle est, en &eacute;ducation, mise en rapport avec celle d&rsquo;objectifs &agrave; atteindre, ce que l&rsquo;on entend par <em>besoin d&rsquo;apprentissage</em>, que les sciences du langage et de l&rsquo;&eacute;ducation analysent, d&eacute;composent et objectivent dans une recherche rationnelle et m&eacute;thodique aid&eacute;e aujourd&rsquo;hui d&rsquo;une technologie &agrave; vis&eacute;e &eacute;ducative.</p> <p style="text-align:justify">Ainsi se forge en didactique des langues (DLE) le concept de &laquo;&nbsp;besoin langagier&nbsp;&raquo; o&ugrave; l&rsquo;adjectif <em>langagier</em> d&eacute;finit la nature m&ecirc;me du besoin ‒ contre l&rsquo;usage linguistique&nbsp;: <em>avoir besoin de quelque chose</em> ‒ et, de fait, une &laquo;&nbsp;forte proportion de plus d&rsquo;un &agrave; d&eacute;finir le &ldquo;besoin&rdquo; par l&rsquo;objet qui le comble&nbsp;&raquo;<sup><a href="#_ftn4" name="_ftnref4">4</a></sup>, mais encore&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align:justify">La p&eacute;dagogie et la didactique des langues &eacute;trang&egrave;res s&rsquo;approprient couramment des notions emprunt&eacute;es &agrave; d&rsquo;autres disciplines en leur donnant des sens r&eacute;ducteurs et parfois m&ecirc;me d&eacute;tourn&eacute;s afin qu&rsquo;ils soient imm&eacute;diatement applicables &agrave; l&rsquo;enseignement et &agrave; l&rsquo;apprentissage. Tel a &eacute;t&eacute; le cas pour structures, par exemple, pour comp&eacute;tence de communication, actes de parole, strat&eacute;gies d&rsquo;apprentissage. Quant aux besoins langagiers, l&rsquo;expression a &eacute;t&eacute; forg&eacute;e de toutes pi&egrave;ces avec une certaine d&eacute;sinvolture qui n&rsquo;a pas manqu&eacute; de provoquer des malentendus<a href="#_ftn5" name="_ftnref5"><sup>5</sup>.</a></p> </blockquote> <p style="text-align:justify">Et, indubitablement, besoin langagier s&rsquo;imposa sous l&rsquo;influence de l&rsquo;anglais <em>language need</em> pour s&rsquo;&eacute;tendre &agrave; toutes les situations possibles afin d&rsquo;<em>&ecirc;tre capable de</em>&nbsp;: se pr&eacute;senter, se d&eacute;placer, demander, acheter, raconter, argumenter, etc. ou pour r&eacute;pondre &agrave; des besoins/objectifs sp&eacute;cifiques (FOS&nbsp;: fran&ccedil;ais sur objectifs sp&eacute;cifiques) dans les domaines aussi divers que m&eacute;dical, commercial, touristique, du droit international, des &eacute;tudes ou de la recherche universitaire aussi bien. Tenter de d&eacute;finir les besoins de communication et les motifs qu&rsquo;on en a, c&rsquo;est se risquer &agrave; analyser, d&eacute;terminer et pr&eacute;voir tout ce dont des apprenants jeunes et adultes &laquo;&nbsp;auront besoin&nbsp;&raquo; pour &laquo;&nbsp;&ecirc;tre capables de&nbsp;&raquo;&nbsp;: id&eacute;al impossible qui n&rsquo;&eacute;chappa pas aux concepteurs du <em>Cadre</em> qu&rsquo;ils ramen&egrave;rent &agrave; &laquo;&nbsp;suffisamment exhaustif, transparent et coh&eacute;rent&nbsp;&raquo; (CECR&nbsp;: 1.6.1, p. 12). On remarquera pourtant que, si &laquo;&nbsp;avoir besoin de&nbsp;&raquo; implique sans aucun doute &laquo;&nbsp;&ecirc;tre capable de&nbsp;&raquo;, on s&rsquo;aper&ccedil;oit qu&rsquo;il faut encore &ecirc;tre capable d&rsquo;utiliser la langue dont on aura un besoin difficilement pr&eacute;dictible&hellip;</p> <p style="text-align:justify">D&rsquo;un autre c&ocirc;t&eacute;, consid&eacute;rant qu&rsquo;un projet d&rsquo;enseignement/apprentissage suppose de d&eacute;terminer ses objectifs, sp&eacute;cifier ses contenus, justifier sa pertinence, et de savoir traduire des besoins identifi&eacute;s en objectifs-contenus-actions-programmes, on remarque qu&rsquo;une latitude d&rsquo;interpr&eacute;tation s&rsquo;immisce entre motivations, besoins, objectifs et contenus. Car, si la d&eacute;finition des contenus est incontournable &agrave; tout programme et que des objectifs lui sont impos&eacute;s, le besoin de langue et sa motivation reconnue ne se formulent sans doute pas de la m&ecirc;me fa&ccedil;on selon la place que l&rsquo;on occupe (individus <em>versus</em> &Eacute;tats).</p> <h2>1. De quels besoins parle-t-on&nbsp;?</h2> <p style="text-align:justify">Dans son <em>Avertissement</em> introductif, le <em>Cadre europ&eacute;en de r&eacute;f&eacute;rence pour les langues</em> annonce qu&rsquo;il &laquo;&nbsp;a pour but de nous aider &agrave; utiliser le plus efficacement possible le <em>Cadre</em>&nbsp;&raquo;<sup><a href="#_ftn6" name="_ftnref6">6</a></sup>&nbsp;quel qu&rsquo;en soit l&rsquo;utilisateur&nbsp;: enseignant, apprenant, examinateur, formateur, auteur de manuel, administrateur, etc. et, qu&rsquo;il a deux objectifs principaux&nbsp;:</p> <ul> <li>Poser des questions comme : Que fait-on dans un &eacute;change avec autrui&nbsp;? Comment agir en langue, &eacute;valuer ses progr&egrave;s et pour quels objectifs&nbsp;? Que faire pour aider &agrave; mieux apprendre une langue&nbsp;?&nbsp;;</li> <li>Et, faciliter les &eacute;changes d&rsquo;informations entre praticiens et apprenants pour que les premiers disent aux seconds ce qu&rsquo;on attend d&rsquo;eux et la mani&egrave;re dont ils seront aid&eacute;s dans leur progression. (<em><span style="font-size:12.16px">ibid</span></em>.)</li> </ul> <p style="text-align:justify">On voit par l&agrave; qu&rsquo;&agrave; la question du comment apprendre-enseigner une langue &eacute;trang&egrave;re, le <em>Cadre</em> r&eacute;pond qu&rsquo;une langue est objet-outil dont il faut conna&icirc;tre les fonctions et emplois pour que l&rsquo;<em>acteur social</em> quel qu&rsquo;il soit&nbsp;: enseignant, apprenant, examinateur, etc., sache s&rsquo;en servir efficacement selon l&rsquo;objectif-but qu&rsquo;il a. Aussi, la vis&eacute;e d&rsquo;une LE (pour &ecirc;tre satisfaisante pour tous) passe en premier lieu par une repr&eacute;sentation objective et rationnelle du besoin et de la motivation qu&rsquo;on s&rsquo;en fait&nbsp;; la description de l&rsquo;objet-langue escompt&eacute; se con&ccedil;oit ensuite comme atteignable gr&acirc;ce &agrave; des moyens ou un ensemble de proc&eacute;dures jug&eacute;es pertinentes par des linguistes et des experts de renom&nbsp;; le <em>Cadre de r&eacute;f&eacute;rence</em> garantit l&rsquo;efficience et la rapidit&eacute; de la m&eacute;thode et, finalement, il encourage cette &laquo;&nbsp;approche totalement nouvelle&nbsp;&raquo; et la recommande pour tout le monde quand bien m&ecirc;me il se d&eacute;fend de vouloir &laquo;&nbsp;dicter&nbsp;&raquo; &agrave; quiconque ce qu&rsquo;il a &agrave; faire et comment.</p> <p style="text-align:justify">L&rsquo;argument se voit, par ailleurs, soutenu par l&rsquo;autorit&eacute; du Conseil de l&rsquo;Europe et son &laquo;&nbsp;souci&nbsp;&raquo; d&rsquo;am&eacute;liorer la communication entre Europ&eacute;ens avec des m&eacute;thodes d&rsquo;enseignement-apprentissage qui aident jeunes et moins jeunes &laquo;&nbsp;&agrave; se forger des savoirs, savoir-faire et attitudes dont ils ont besoin pour acqu&eacute;rir davantage d&rsquo;ind&eacute;pendance dans la r&eacute;flexion et dans l&rsquo;action afin de se montrer plus responsables et coop&eacute;ratifs&nbsp;&raquo; (<em>CECR</em>&nbsp;: p. 4). La conviction du bien-fond&eacute; de ces pratiques et ces habilet&eacute;s associ&eacute;es disqualifient tout atermoiement puisqu&rsquo;il en va de la citoyennet&eacute; d&eacute;mocratique europ&eacute;enne possiblement mise en danger sans le rempart du plurilinguisme comme objectif d&eacute;clar&eacute; contre la x&eacute;nophobie et l&rsquo;ultranationalisme (<em>ibid</em>.&nbsp;: 1.2.A.3, p. 10), sans compter qu&rsquo;il s&rsquo;agit, aussi, d&rsquo;&laquo;&nbsp;outiller tous les Europ&eacute;ens pour les d&eacute;fis de l&rsquo;intensification de la mobilit&eacute; internationale&nbsp;&raquo; (<em><span style="font-size:12.16px">ibid</span></em>.).</p> <p style="text-align:justify">Or, il n&rsquo;est pas certain que les besoin-motiv&eacute;s de l&rsquo;Europe en LE recouvrent ceux des apprenants jeunes et vieux qui, pour &ecirc;tre des sujets assujettis &agrave; la langue qui les fait exister, &eacute;prouveraient encore le besoin de s&rsquo;exposer &agrave; l&rsquo;&eacute;preuve d&rsquo;une version &eacute;trang&egrave;re. &Agrave; moins que l&rsquo;habitat-langue et le sujet qui l&rsquo;occupe ne soient devenus autre chose. D&rsquo;o&ugrave; le questionnement possible&nbsp;: un apprenant est-il un sujet&nbsp;? ce qu&rsquo;ignore la DLE et que le CECR transforme en utilisateur/apprenant (<em><span style="font-size:12.16px">ibid</span></em>.&nbsp;: chap. 4 et 5) d&rsquo;un v&eacute;hicule.</p> <h3>1.1 Taxonomies des besoins</h3> <p style="text-align:justify">De nombreuses classifications des besoins ont &eacute;t&eacute; r&eacute;alis&eacute;es pour tenter de les r&eacute;pertorier. Selon le <em>Grand Dictionnaire de la Psychologie</em>, c&rsquo;est &laquo;&nbsp;un &eacute;tat de l&rsquo;organisme r&eacute;sultant d&rsquo;un d&eacute;s&eacute;quilibre entre, d&rsquo;une part, des normes physiologiques et culturelles et, d&rsquo;autre part, des informations sur l&rsquo;&eacute;tat du milieu int&eacute;rieur ou ext&eacute;rieur, ou des repr&eacute;sentations.&nbsp;&raquo;<a href="#_ftn7" name="_ftnref7"><sup>7</sup></a></p> <p style="text-align:justify">Ces normes peuvent &ecirc;tre inn&eacute;es (fonctionnement des cellules et organisation nerveuse) ou bien acquises (physiologiques et totalit&eacute; des normes culturelles) et seront compar&eacute;es avec des informations de l&rsquo;activit&eacute; sensorielle ou du syst&egrave;me nerveux central. La discordance entre les deux constitue le besoin qui &eacute;veillera le syst&egrave;me nerveux central pour influer, via les populations neuroniques, des comportements compensateurs. Les normes sont n&eacute;anmoins susceptibles de varier au cours du temps, selon le milieu, la maturit&eacute; et l&rsquo;exp&eacute;rience individuelle. &laquo;&nbsp;Il n&rsquo;est donc pas possible de d&eacute;nombrer les besoins ni de les caract&eacute;riser de fa&ccedil;on d&eacute;finitive.&nbsp;&raquo; (<em>ibid</em>.) &Agrave; d&eacute;faut, on s&rsquo;en tient &agrave; deux grandes cat&eacute;gories&nbsp;:</p> <ul> <li><em>Les besoins organiques fondamentaux</em> appel&eacute;s aussi besoins primaires. Ils concernent la survie de l&rsquo;individu et de l&rsquo;esp&egrave;ce, sont li&eacute;s au maintien de l&rsquo;hom&eacute;ostasie du milieu int&eacute;rieur (eau, oxyg&egrave;ne, aliments, excr&eacute;tion, etc.), &agrave; l&rsquo;int&eacute;grit&eacute; corporelle et la perp&eacute;tuation de l&rsquo;esp&egrave;ce. Sont aussi consid&eacute;r&eacute;s comme primaires certains besoins li&eacute;s au d&eacute;veloppement physique et mental de l&rsquo;individu (contact, stimulation, sommeil).</li> <li>Les besoins secondaires viennent se greffer sur les besoins primaires par g&eacute;n&eacute;ralisation ou conditionnement et sont d&rsquo;autant plus nombreux et vari&eacute;s que le syst&egrave;me nerveux central est complexe&nbsp;: tels sont la plupart des besoins sociaux, cognitifs et culturels.</li> </ul> <p style="text-align:justify">Dans leur <em>Dictionnaire des th&eacute;ories &eacute;conomiques et sociales</em> (1981), Br&eacute;mond et Geledan ajoutent&nbsp;:</p> <ul> <li><em>Les besoins tertiaire</em>s&nbsp;: futilit&eacute;s, gadgets, luxe et tout le superflu.</li> </ul> <p style="text-align:justify">D&rsquo;autres classifications consid&egrave;rent&nbsp;:</p> <ul> <li><em>Les besoins physiologiques, psychologiques et sociaux</em>.</li> </ul> <p style="text-align:justify">David Cooper, psychiatre, ne fait pas de distinction entre ceux dits n&eacute;cessaires, cens&eacute;s &ecirc;tre primaires, et d&rsquo;autres simplement d&eacute;sirables, pr&eacute;sum&eacute;s n&rsquo;&ecirc;tre que secondaires, parce que selon lui &laquo;&nbsp;les besoins qui sont pr&eacute;sent&eacute;s comme secondaires sont aussi vitaux pour nous que l&rsquo;air que nous respirons&nbsp;: et ce, pas seulement dans la soci&eacute;t&eacute; capitaliste avanc&eacute;e, mais &agrave; travers le monde entier.&nbsp;&raquo;<sup><a href="#_ftn8" name="_ftnref8">8</a></sup></p> <p style="text-align:justify">Il con&ccedil;oit davantage une diff&eacute;rence entre&nbsp;:</p> <blockquote> <p>Les besoins d&rsquo;<em>avoir</em> (de poss&eacute;der)&nbsp;: besoins d&eacute;pendant de la nature et de la formation de notre soci&eacute;t&eacute;, besoins quantitatifs [&hellip;] En second lieu, apr&egrave;s ces besoins d&rsquo;avoir, il y a les besoins d&rsquo;<em>agir-pour-&ecirc;tre diff&eacute;rent</em>&nbsp;; c&rsquo;est la n&eacute;gation comme le d&eacute;passement vers une autre fa&ccedil;on de vivre. Le niveau de ces besoins d&rsquo;action est qualitatif. (<em>ibid</em>.&nbsp;: 47-49)</p> </blockquote> <p style="text-align:justify">Le CECR pour sa part souhaite r&eacute;pondre au(x)&nbsp;:</p> <ul> <li>&laquo;&nbsp;<em>Besoins r&eacute;els</em>&nbsp;&raquo; des apprenants, c&rsquo;est-&agrave;-dire d&rsquo;une langue &eacute;trang&egrave;re qui correspondra &agrave; leurs besoins et/ou leur motivation (d&eacute;clar&eacute;s ou suppos&eacute;s) conform&eacute;ment au descriptif du langage humain et de la langue con&ccedil;us comme une taxonomie&nbsp; de comp&eacute;tences et de composantes (1.1, p. 9) d&eacute;taill&eacute;es dans le CECR&nbsp;;</li> <li><em>Besoin d&rsquo;une Europe multilingue et multiculturelle</em>, et pour cette fin, &agrave; celui &laquo;&nbsp;d&rsquo;outiller&nbsp;&raquo; tous les Europ&eacute;ens en langues vivantes&nbsp;;</li> <li><em>Buts et objectifs de la politique linguistique du Conseil de l&rsquo;Europe</em>&nbsp;: &laquo;&nbsp;c&rsquo;est seulement par une meilleure connaissance des langues vivantes europ&eacute;ennes que l&rsquo;on parviendra &agrave; faciliter la communication et les &eacute;changes entre Europ&eacute;ens de langue maternelle diff&eacute;rente et, partant, &agrave; favoriser la mobilit&eacute;, la compr&eacute;hension r&eacute;ciproque et la coop&eacute;ration en Europe et &agrave; &eacute;liminer les pr&eacute;jug&eacute;s et la discrimination&nbsp;&raquo;<a href="#_ftn9" name="_ftnref9"><sup>9</sup></a></li> </ul> <p style="text-align:justify">Abandonnant l&rsquo;id&eacute;e d&rsquo;une recension exhaustive des d&eacute;finitions de la notion de &laquo;&nbsp;besoin-motivation&nbsp;&raquo;, nous retiendrons cependant la taxonomie d&rsquo;Abraham Maslow qui d&eacute;veloppe une th&eacute;orie de la personnalit&eacute; humaine &agrave; partir de cinq besoins de base, ce qui nous permettra de reprendre cette question sous un autre angle pour tenter d&rsquo;&eacute;clairer le propos diff&eacute;remment.<a href="#_ftn10" name="_ftnref10"><sup>10</sup></a></p> <h2>2. Ce que dit <em>La Pyramide des besoins</em></h2> <p style="text-align:justify">Le travail r&eacute;alis&eacute; par le psychologue am&eacute;ricain Abraham Maslow (1908-1970) sur l&rsquo;id&eacute;e d&rsquo;un ordonnancement des besoins humains ouvre une conception r&eacute;gl&eacute;e de l&rsquo;aspiration humaine.</p> <p style="text-align:justify">Maslow explique la <em>motivation</em> par un processus o&ugrave; va s&rsquo;engager l&rsquo;humain dans une activit&eacute; pr&eacute;cise. Selon lui, ce serait une r&eacute;ponse s&eacute;lective et hi&eacute;rarchis&eacute;e de l&rsquo;ordre des besoins, allant du <em>vital</em> &agrave; l&rsquo;<em>id&eacute;al</em>, qu&rsquo;il repr&eacute;sente sous la forme d&rsquo;une <em>Pyramide des besoins</em>. Cependant, &agrave; cause de son apparente simplicit&eacute; de lecture et de son &eacute;vidente efficacit&eacute; d&rsquo;interpr&eacute;tation, elle tend &agrave; effacer ce que Maslow y trouve&nbsp;: une dynamique complexe de l&rsquo;expression des besoins humains, c&rsquo;est-&agrave;-dire non r&eacute;ductibles &agrave; une progression logique, lisible et pr&eacute;visible dont on aimerait pourtant s&rsquo;emparer pour comprendre un processus qui nous &eacute;chappe plus qu&rsquo;on ne le gouverne.&nbsp;</p> <p style="text-align:justify">Reprenons donc <em>Une th&eacute;orie de la motivation</em><sup><a href="#_ftn11" name="_ftnref11">11</a></sup>, o&ugrave; l&rsquo;on suit la chronologie des cinq <em>Besoins fondamentaux</em> que retient A. Maslow dans l&rsquo;&eacute;laboration de sa th&eacute;orie et qu&rsquo;il organise comme suit&nbsp;:</p> <h3>2.1 Les besoins <em>dits</em> physiologiques</h3> <p style="text-align:justify">Suite aux apports de la recherche de l&rsquo;&eacute;poque (1943), Maslow revient sur la classe des <em>besoins physiologiques</em>, &agrave; la lumi&egrave;re du concept d&rsquo;<em>hom&eacute;ostasie</em> mis &agrave; jour par Claude Bernard (1813-1878, France) dans son <em>Introduction &agrave; l&rsquo;&eacute;tude de la m&eacute;decine</em> (1865) et repris par W. B. Cannon (1871-1945, &Eacute;tats-Unis) qui forgera le terme &agrave; partir de deux mots grecs&nbsp;: <em>stasis</em> (&eacute;tat, position) et <em>homoios</em> (&eacute;gal, semblable &agrave;) dans <em>The Wisdom of the Body</em> (1932).</p> <p style="text-align:justify">L&rsquo;hom&eacute;ostasie rep&egrave;re la stabilisation des &eacute;tats permettant les processus biologiques de la vie, c&rsquo;est-&agrave;-dire la maintenance de l&rsquo;ensemble des param&egrave;tres physico-chimiques de l&rsquo;organisme qui doivent rester constants&nbsp;: temp&eacute;rature, oxyg&eacute;nation, glyc&eacute;mie, teneur en eau, sel, graisses, prot&eacute;ines, sels min&eacute;raux, etc. De son c&ocirc;t&eacute;, P. T. Young, dans l&rsquo;article&nbsp;: &laquo;&nbsp;<em>The Experimental Analysis of Appetite</em>&nbsp;&raquo; (1941), propose une r&eacute;vision de la relation app&eacute;tit-besoins et d&eacute;montre qu&rsquo;en cas de manque d&rsquo;un composant chimique le corps va d&eacute;velopper un app&eacute;tit sp&eacute;cifique pour cet &eacute;l&eacute;ment nutritif particulier.</p> <p style="text-align:justify">Et Maslow d&rsquo;en conclure&nbsp;: &laquo;&nbsp;Ainsi appara&icirc;t-il tout aussi impossible qu&rsquo;inutile d&rsquo;&eacute;tablir une liste des <em>besoins physiologiques</em> fondamentaux puisqu&rsquo;ils peuvent &ecirc;tre aussi nombreux qu&rsquo;on le souhaite&nbsp;&raquo; (Maslow 2008&nbsp;: 20). Par ailleurs, il observe un ph&eacute;nom&egrave;ne singulier, &laquo;&nbsp;que tout besoin physiologique et le comportement d&rsquo;assouvissement qui lui est li&eacute; servent de canaux &agrave; toutes sortes d&rsquo;autres besoins&nbsp;&raquo; (<em>ibid</em>.&nbsp;: 21). C&rsquo;est pr&eacute;cis&eacute;ment ce qu&rsquo;expose, au sens de donner &agrave; voir, avec audace et franchise eu &eacute;gard &agrave; sa position d&rsquo;universitaire, la philosophe Michela Marzano, dans un petit ouvrage autobiographique <em>L&eacute;g&egrave;re comme un papillon</em> o&ugrave; elle d&eacute;voile son combat tragique et mortif&egrave;re avec l&rsquo;anorexie&nbsp;:</p> <p style="text-align:justify"><em>Tout avaler, imm&eacute;diatement, en &eacute;miettant le pr&eacute;sent. Tout vomir, imm&eacute;diatement, en effa&ccedil;ant le pass&eacute;. Non plus un contr&ocirc;le, mais une paralysie. Le charme discret de la mort. Du n&eacute;ant&hellip; Pour se punir de quelque chose. Se venger. Avaler ses propres incertitudes. Vomir des flots de rage. Jusqu&rsquo;&agrave; ce que le corps &eacute;puis&eacute; abandonne.</em><a href="#_ftn12" name="_ftnref12"><sup>12</sup></a></p> <p style="text-align:justify">Ce drame tenu secret la d&eacute;vora pendant plus de dix ans et l&rsquo;obs&eacute;da quarante ans pour en comprendre le sens. Dans son cas, le &laquo;&nbsp;besoin de nourriture&nbsp;&raquo; ne comble aucun besoin primaire&nbsp;: &laquo;&nbsp;une multitude de personnes utilisent la nourriture pour dire quelque chose&nbsp;&raquo; (<em>ibid</em>.&nbsp;: 81), il peut n&eacute;anmoins &ecirc;tre pris comme un <em>besoin dit physiologique</em> puisqu&rsquo;il passe par l&rsquo;alimentation et va jusqu&rsquo;&agrave; mettre la vie en danger tout en &ldquo;servant d&rsquo;autres faims&rdquo;.</p> <p style="text-align:justify">En r&eacute;alit&eacute;, selon Maslow, dans une soci&eacute;t&eacute; stable et organis&eacute;e, ce ne sont plus ces besoins qui dominent l&rsquo;organisme et par suite le comportement d&rsquo;un individu. Les conditions extr&ecirc;mes sont rares dans une soci&eacute;t&eacute; en paix et l&rsquo;&laquo;&nbsp;on oublie trop souvent que la culture elle-m&ecirc;me est un outil d&rsquo;adaptation, un outil dont la fonction principale est de r&eacute;duire les occurrences d&rsquo;urgence physiologiques&nbsp;&raquo;<sup><a href="#_ftn13" name="_ftnref13">13</a></sup>, ce qui lui permet d&rsquo;avancer que <em>les besoins humains fondamentaux sont organis&eacute;s en hi&eacute;rarchie de pr&eacute;pond&eacute;rance</em>.</p> <p style="text-align:justify">De sorte que, la repr&eacute;sentation que nous avons des &laquo;&nbsp;besoins physiologiques&nbsp;&raquo; associ&eacute;e &agrave; &laquo;&nbsp;menace de mort&nbsp;&raquo; qui s&rsquo;annoncent comme essentiels &agrave; la survie ‒ c&rsquo;est-&agrave;-dire qu&rsquo;&agrave; moins d&rsquo;y r&eacute;pondre nous n&rsquo;en n&rsquo;aurions pas d&rsquo;autres ‒ n&rsquo;est certes pas une illusion mais peut &ecirc;tre d&eacute;mentie comme en t&eacute;moigne M. Marzano. En contr&ocirc;lant la faim, l&rsquo;anorexique tente de ma&icirc;triser la vie <em>et</em> la mort, tout en &eacute;tant son otage. Paradoxalement, &laquo;&nbsp;c&rsquo;est une fa&ccedil;on de se prot&eacute;ger de tout ce qui &eacute;chappe au contr&ocirc;le [peur, amour, abandon, violence, col&egrave;re]. M&ecirc;me si, &agrave; force de se prot&eacute;ger, on risque d&rsquo;en mourir.&nbsp;&raquo;<sup><a href="#_ftn14" name="_ftnref14">14</a></sup>&nbsp;S&rsquo;attaquant aux besoins primaires, l&rsquo;anorexique d&eacute;montre par la n&eacute;gative l&rsquo;insuffisance radicale chez l&rsquo;humain d&rsquo;un besoin, quel qu&rsquo;il soit, qu&rsquo;il nie et vomit jusqu&rsquo;aux limites de la vie et la mort.</p> <h3>2.2 Les besoins de s&eacute;curit&eacute;</h3> <p style="text-align:justify">&Agrave; un moindre degr&eacute;, ce groupe peut dominer l&rsquo;organisme entier. Les besoins de s&eacute;curit&eacute; deviennent alors les gestionnaires quasi exclusifs du comportement et recrutent &agrave; leur service les capacit&eacute;s de l&rsquo;individu&nbsp;: &laquo;&nbsp;tout, ou presque, semble moins important que la s&eacute;curit&eacute; et jusqu&rsquo;aux besoins physiologiques, parfois, qui &eacute;tant assouvis sont &agrave; pr&eacute;sent sous-estim&eacute;s.&nbsp;&raquo;<a href="#_ftn15" name="_ftnref15"><sup>15</sup></a></p> <p style="text-align:justify">Maslow observe que le poids de cette cat&eacute;gorie est visible chez le petit enfant qui n&rsquo;a pas encore appris &agrave; inhiber ses r&eacute;actions. N&rsquo;importe quel incident ordinaire de la vie peut lui appara&icirc;tre comme un danger effrayant ou mena&ccedil;ant&nbsp;; il n&rsquo;est qu&rsquo;&agrave; voir comment il s&rsquo;accroche &agrave; ses parents par panique ou d&eacute;sespoir. De fait, les enfants pr&eacute;f&egrave;rent un monde s&ucirc;r, ordonn&eacute;, pr&eacute;visible et, dans tous les cas, un monde o&ugrave; des parents tout-puissants sont l&agrave; pour les secourir et les prot&eacute;ger.</p> <p style="text-align:justify">Les adultes, eux, se sentent &agrave; l&rsquo;abri de l&rsquo;agression, l&rsquo;arbitraire et la pers&eacute;cution dans une soci&eacute;t&eacute; organis&eacute;e et pacifique&nbsp;; chacun n&rsquo;y ressent plus, concr&egrave;tement, le besoin de s&eacute;curit&eacute; comme un objectif essentiel ou primordial. Mais il suffit d&rsquo;un bouleversement social, &eacute;conomique, politique ou simplement familial pour que cette inqui&eacute;tude resurgisse et r&eacute;oriente tous les engagements ant&eacute;rieurs&nbsp;: travail, r&eacute;sidence, investissements financier et affectif, voire culturel ou religieux. Et, de son c&ocirc;t&eacute;, la clinique des n&eacute;vros&eacute;s montre que, m&ecirc;me dans un univers prot&eacute;g&eacute;, la vie peut &ecirc;tre appr&eacute;hend&eacute;e comme une menace permanente qu&rsquo;il faut absolument ma&icirc;triser.</p> <p style="text-align:justify">D&rsquo;une certaine fa&ccedil;on, Maslow rel&egrave;ve la pr&eacute;gnance comme l&rsquo;instabilit&eacute; de ce besoin qui, de par sa porosit&eacute;, prend l&rsquo;allure et la cr&eacute;dibilit&eacute; d&rsquo;une question vitale.</p> <h3 style="text-align:justify">2.3 Les besoins d&rsquo;amour</h3> <p style="text-align:justify">Selon le principe soutenu par Maslow, si les besoins physiologiques et de s&eacute;curit&eacute; sont satisfaisants, ce sont les besoins <em>d&rsquo;amour, d&rsquo;affection et d&rsquo;appartenance</em> qui &eacute;mergent en r&eacute;p&eacute;tant le cycle sur ce nouveau pivot. &laquo;&nbsp;Dans notre soci&eacute;t&eacute;, des besoins d&rsquo;amour frustr&eacute;s constituent le noyau le plus fr&eacute;quemment observ&eacute; dans les cas d&rsquo;inadaptation et les pathologies plus graves.&nbsp;&raquo; (<em>ibid</em>.&nbsp;: 31)</p> <p style="text-align:justify">Maslow signale que le besoin d&rsquo;amour est celui que nous connaissons le mieux (avec les besoins physiologiques) mais qu&rsquo;il n&rsquo;est pas, pr&eacute;cise-t-il, uniquement circonscrit &agrave; la sph&egrave;re sexuelle &ndash; le comportement sexuel &eacute;tant multid&eacute;termin&eacute; &ndash; et implique de recevoir comme de donner.</p> <h3 style="text-align:justify">2.4 Les besoins d&rsquo;estime</h3> <p style="text-align:justify">&laquo;&nbsp;Tous les individus dans notre soci&eacute;t&eacute; (&agrave; quelques exceptions pathologiques pr&egrave;s) ont un besoin ou un d&eacute;sir d&rsquo;&eacute;valuation &eacute;lev&eacute;e (en g&eacute;n&eacute;ral), stable et fond&eacute;e, d&rsquo;eux-m&ecirc;mes, un besoin de respect de soi, ou d&rsquo;estime de soi, et de l&rsquo;estime des autres.&nbsp;&raquo; (<em>ibid</em>.&nbsp;: 32)</p> <p style="text-align:justify">Maslow d&eacute;compose alors ces besoins en deux sous-ensembles. D&rsquo;abord le d&eacute;sir de puissance associ&eacute; &agrave; ceux de performance, de confiance, d&rsquo;ind&eacute;pendance et de libert&eacute; puis le d&eacute;sir de r&eacute;putation combin&eacute; &agrave; ceux de reconnaissance, d&rsquo;importance et d&rsquo;appr&eacute;ciation&nbsp;; ces deux groupes ayant d&eacute;j&agrave; &eacute;t&eacute; d&eacute;fendus par Alfred Adler (1870-1937).</p> <p style="text-align:justify">Satisfaire au besoin d&rsquo;estime redonne confiance en soi, en sa valeur et sa propre utilit&eacute; tandis que sa carence g&eacute;n&egrave;re un sentiment d&rsquo;impuissance et d&rsquo;inf&eacute;riorit&eacute;. Et Maslow de souligner combien sont d&eacute;munis tous ceux qui, face au monde, en sont priv&eacute;s.&nbsp;</p> <h3 style="text-align:justify">2.5 Le besoin d&rsquo;accomplissement de soi&nbsp;</h3> <p style="text-align:justify">&Agrave; supposer que tous les besoins pr&eacute;c&eacute;dents soient combl&eacute;s, Maslow fait remarquer qu&rsquo;un m&eacute;contentement ou une nouvelle impatience ne tarde pas &agrave; poindre. &laquo;&nbsp;Un homme doit &ecirc;tre ce qu&rsquo;il peut &ecirc;tre. Ce besoin, nous lui donnons le nom d&rsquo;accomplissement de soi.&nbsp;&raquo; (<em>ibid</em>.&nbsp;: 33), expression emprunt&eacute;e &agrave; K. Goldstein r&eacute;orient&eacute;e dans la perspective d&rsquo;une r&eacute;alisation ou d&rsquo;une actualisation de soi pour advenir &agrave; tout ce qu&rsquo;on est capable d&rsquo;&ecirc;tre.</p> <p style="text-align:justify">Ainsi ce besoin prendra-t-il des formes aussi vari&eacute;es que la diversit&eacute; humaine, mais comme &laquo;&nbsp;les individus fonci&egrave;rement satisfaits sont l&rsquo;exception, nous ne savons que peu de choses de l&rsquo;accomplissement de soi&nbsp;&raquo;. (<em>ibid</em>.&nbsp;: 34)</p> <h2 style="text-align:justify">3. Pr&eacute;alables et d&eacute;passements</h2> <p style="text-align:justify">Maslow postule cependant que la satisfaction des besoins fondamentaux n&rsquo;est possible que si certaines conditions pr&eacute;alables sont r&eacute;unies, telles que&nbsp;: la libert&eacute; de parole et d&rsquo;expression, de justice, d&rsquo;enqu&ecirc;te et de recherche principalement, &agrave; d&eacute;faut desquelles on observera des r&eacute;flexes de d&eacute;fense ou d&rsquo;agression. En d&eacute;pit du fait qu&rsquo;elles ne sont pas des fins en soi, il faut veiller &agrave; les prot&eacute;ger et les d&eacute;fendre parce qu&rsquo;elles entretiennent des liens &eacute;troits avec les besoins fondamentaux &laquo;&nbsp;seuls &agrave; constituer des fins en eux-m&ecirc;mes.&nbsp;&raquo; (<em>ibid</em>.&nbsp;: 34) Si les conditions pr&eacute;alables sont menac&eacute;es, alors les besoins fondamentaux le sont aussi.</p> <p style="text-align:justify">De plus, il ajoute qu&rsquo;on ne doit pas oublier que nos capacit&eacute;s de perception, d&rsquo;intelligence et d&rsquo;apprentissage sont &eacute;galement des outils dont la principale fonction est de r&eacute;pondre aux besoins fondamentaux et, que toute menace ou entrave &agrave; leur usage est &agrave; prendre comme un danger s&eacute;rieux. Ce qui &eacute;claire et retentit sur la question &laquo;&nbsp;plus g&eacute;n&eacute;ral[e] de la curiosit&eacute;, de la qu&ecirc;te de savoir, de la v&eacute;rit&eacute; et de la sagesse, et du d&eacute;sir jamais assouvi de r&eacute;soudre les myst&egrave;res de l&rsquo;univers.&nbsp;&raquo; (<em>ibid</em>.&nbsp;: 35)</p> <p style="text-align:justify">Reconnaissant qu&rsquo;on achoppe alors sur cette question ‒ parce qu&rsquo;il n&rsquo;y a pas de r&eacute;ponses d&eacute;finitives au &laquo;&nbsp;r&ocirc;le motivationnel de la curiosit&eacute;, de l&rsquo;apprentissage, de l&rsquo;exercice de la philosophie, de l&rsquo;exp&eacute;rimentation, etc.&nbsp;&raquo; (<em>ibid</em>.&nbsp;: 36), et ce d&rsquo;autant que les buts vis&eacute;s peuvent se payer au prix de la s&eacute;curit&eacute; ‒,&nbsp; Maslow se range sur ce point aux c&ocirc;t&eacute;s de M. Wertheimer qui postule un d&eacute;sir &laquo;&nbsp;de voir plut&ocirc;t que d&rsquo;&ecirc;tre aveugle&nbsp;&raquo;, mais l&rsquo;estime insuffisant pour rendre compte du fait que, m&ecirc;me quand nous savons, nous sommes pouss&eacute;s &agrave; vouloir conna&icirc;tre toujours plus. &laquo;&nbsp;Ce processus a pu &ecirc;tre qualifi&eacute; par certains de qu&ecirc;te de &ldquo;sens&rdquo;.&nbsp;&raquo; (<em>ibid</em>.&nbsp;: 37)</p> <p style="text-align:justify">Cela admis, ces d&eacute;sirs tendent l&agrave; encore &agrave; s&rsquo;organiser&nbsp;: le d&eacute;sir de conna&icirc;tre pr&eacute;c&egrave;de celui de comprendre et l&rsquo;on retrouve &agrave; nouveau une hi&eacute;rarchie de pr&eacute;pond&eacute;rance. Mais il faut &laquo;&nbsp;se garder de tomber dans le pi&egrave;ge facile de s&eacute;parer ces d&eacute;sirs des besoins fondamentaux, c&#39;est-&agrave;-dire d&rsquo;&eacute;tablir une stricte dichotomie entre les besoins &ldquo;cognitifs&rdquo; et les besoins &ldquo;conatifs&rdquo; [effort, volont&eacute;, action]&nbsp;&raquo; (<em>ibid</em>.). Conna&icirc;tre et comprendre sont eux aussi conatifs parce qu&rsquo;ils sont imp&eacute;rieux et &laquo;&nbsp;autant des besoins de la personnalit&eacute; que les &ldquo;besoins fondamentaux&rdquo;&nbsp;&raquo; (<em>ibid</em>.).</p> <p style="text-align:justify">Ce qui pond&egrave;re l&rsquo;ordonnancement et la hi&eacute;rarchisation des besoins fondamentaux et suppose une faille o&ugrave; peuvent s&rsquo;engouffrer, &agrave; tout instant, des besoins essentiels &agrave; la vie alors qu&rsquo;ils sont impr&eacute;dictibles&nbsp;; ce que l&rsquo;on peut, pour cette raison et &agrave; juste titre, appeler des &laquo;&nbsp;d&eacute;sirs&nbsp;&raquo; comme le fait lui-m&ecirc;me Maslow.</p> <h3 style="text-align:justify">3.1 Limites</h3> <p style="text-align:justify">Si la hi&eacute;rarchie des besoins et sa sch&eacute;matisation sous forme d&rsquo;une <em>Pyramide des besoins</em> parviennent &agrave; nous en donner une repr&eacute;sentation claire, elle n&rsquo;en est pas moins victime de son &eacute;vidence dans ce qu&rsquo;elle laisse imaginer d&rsquo;un processus ascensionnel r&eacute;gl&eacute; et fix&eacute; comme le sont les barreaux d&rsquo;une &eacute;chelle. Maslow lui-m&ecirc;me en d&eacute;nonce les travers et d&eacute;clare que cette hi&eacute;rarchie &laquo;&nbsp;est loin d&rsquo;&ecirc;tre aussi rigide que nous avons pu le laisser entendre.&nbsp;&raquo; (<em>ibid</em>.&nbsp;: 38) et fournit &agrave; l&rsquo;appui quelques exemples.</p> <p style="text-align:justify">Si chez certains l&rsquo;<em>estime de soi</em> semble plus importante que l&rsquo;<em>amour</em>, cette inversion hi&eacute;rarchique montre que les moyens employ&eacute;s servent souvent une autre fin que celle d&eacute;clar&eacute;e. Il n&rsquo;est pas rare non plus que l&rsquo;<em>accomplissement de soi</em> passe chez les cr&eacute;ateurs avant la satisfaction des besoins fondamentaux. De m&ecirc;me chez ceux qui, au nom d&rsquo;un besoin sup&eacute;rieur, se mettent en danger ou se privent d&rsquo;un besoin <em>physiologique</em>. On trouve aussi des individus qui attestent ind&eacute;niablement d&rsquo;une &laquo;&nbsp;tol&eacute;rance accrue &agrave; la frustration&nbsp;&raquo; gr&acirc;ce &agrave; une capacit&eacute; de r&eacute;sistance exceptionnelle sans doute acquise dans la prime enfance.</p> <p style="text-align:justify">Maslow d&eacute;samorce &eacute;galement l&rsquo;id&eacute;e que les cinq besoins sont dans une relation s&eacute;quentielle les uns avec les autres donnant &laquo;&nbsp;l&rsquo;impression erron&eacute;e qu&rsquo;un besoin doit &ecirc;tre satisfait &agrave; 100% avant que le besoin suivant &eacute;merge.&nbsp;&raquo; (<em>ibid</em>.&nbsp;: 42) Si une description fine de la hi&eacute;rarchie permet de l&rsquo;interpr&eacute;ter en termes de pourcentage d&eacute;croissant &agrave; mesure que l&rsquo;on monte dans la classification de pr&eacute;pond&eacute;rance, elle n&rsquo;implique pas un taux de satisfaction n&eacute;cessaire pour voir l&rsquo;&eacute;mergence d&rsquo;un besoin sup&eacute;rieur.</p> <p style="text-align:justify">Et, finalement, la restriction la plus s&eacute;rieuse de Maslow appara&icirc;t dans ce qu&rsquo;il reconna&icirc;t du <em>caract&egrave;re inconscient des besoins</em>. &laquo;&nbsp;On peut consid&eacute;rer, sur la base d&rsquo;<em>a priori</em>, que les motivations inconscientes sont au total beaucoup plus importantes que les motivations conscientes. <em>Ce que nous avons appel&eacute; les besoins fondamentaux sont tr&egrave;s souvent largement inconscients</em>&nbsp;&raquo;<sup><a href="#_ftn16" name="_ftnref16">16</a></sup>.&nbsp;</p> <h3 style="text-align:justify">3.2 Incertitude</h3> <p style="text-align:justify">Car si, en effet, les besoins <em>sont tr&egrave;s largement inconscients</em>, on peut l&eacute;gitimement en d&eacute;duire que ce qui s&rsquo;exprime dans l&rsquo;expression du besoin et se formule comme&nbsp;: &laquo;&nbsp;j&rsquo;ai besoin / il me faut&nbsp;&raquo;, peut &ecirc;tre tenu pour non-essentiel, secondaire et possiblement n&eacute;gligeable. Dans tous les cas, cela discr&eacute;dite la notion m&ecirc;me de besoin (exprim&eacute;) comme un imp&eacute;ratif et une n&eacute;cessit&eacute; puisqu&rsquo;issu d&rsquo;une m&eacute;connaissance.</p> <p style="text-align:justify">Mais encore, cela laisse supposer qu&rsquo;un besoin ‒ m&ecirc;me revendiqu&eacute; ‒ est susceptible d&rsquo;&ecirc;tre interpr&eacute;t&eacute; &agrave; l&rsquo;aune d&rsquo;un jugement qui s&rsquo;annoncerait comme mieux &eacute;clair&eacute; (enseignant, expert, sp&eacute;cialiste, institution, gouvernement), ouvrant la voie (et les voix) &agrave; des traductions autoris&eacute;es, possiblement invasives, voire &agrave; des interpr&eacute;tations restrictives qui para&icirc;tront parfaitement rigoureuses et assur&eacute;es donc cr&eacute;dibles.</p> <p style="text-align:justify">Dans son r&eacute;capitulatif (<em>ibid</em>.&nbsp;: 17), Maslow exclut &laquo;&nbsp;le moteur de la faim (ou tout autre moteur physiologique)&nbsp;&raquo; comme pivot central ou mod&egrave;le de sa th&eacute;orie de la motivation. Cette derni&egrave;re vise &laquo;&nbsp;des buts supr&ecirc;mes ou fondamentaux&nbsp;&raquo;, des fins plut&ocirc;t que des moyens, ce qui &laquo;&nbsp;implique d&rsquo;accorder une place plus centrale aux motivations inconscientes qu&rsquo;aux motivations conscientes&nbsp;&raquo; (<em>ibid</em>.). Et, il ajoute qu&rsquo;une liste des besoins ne m&egrave;ne nulle part parce qu&rsquo;aucune action ne r&eacute;sulte d&rsquo;une seule motivation et que par d&eacute;finition &laquo;&nbsp;l&rsquo;homme est un animal en &eacute;tat de d&eacute;sir permanent&nbsp;&raquo; (<em>ibid</em>.&nbsp;: 18).</p> <p style="text-align:justify">Ce qui nous oblige &agrave; revenir sur la compr&eacute;hension habituelle de la th&eacute;orie de la motivation &ndash; ici celle de Maslow, mais d&rsquo;autres reposent tout autant sur les m&ecirc;mes <em>a priori</em> logiques ‒ et &agrave; reconsid&eacute;rer la repr&eacute;sentation que l&rsquo;on s&rsquo;en fait.</p> <p>3.3 Sch&eacute;matisation de la th&eacute;orie de Maslow</p> <table style="width:700px"> <tbody> <tr> <th style="height:14px; width:201px">Besoins/Motivations</th> <th style="height:14px; width:215px">Actions</th> <th style="height:14px; width:221px">Buts</th> </tr> <tr> <td style="height:30.975px; vertical-align:middle; width:201px">* <strong>1<sup>er</sup></strong> <em>dits &laquo;&nbsp;physiologiques&nbsp;&raquo;</em></td> <td style="height:30.975px; text-align:center; vertical-align:middle; width:201px">Moteurs et&nbsp;moyens indiff&eacute;rents</td> <td rowspan="5" style="height:30.975px; text-align:center; vertical-align:middle; width:201px">Essentiellement&nbsp;inconscients&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;</td> </tr> <tr> <td style="background-color:#bff5fa; height:18px; vertical-align:middle; width:201px">*<strong> 2<sup>e</sup></strong> <em>de s&eacute;curit&eacute;</em></td> <td style="background-color:#bff5fa; height:18px; text-align:center; vertical-align:middle; width:201px"><em>Idem</em></td> </tr> <tr> <td style="height:15px; vertical-align:middle; width:201px">* <strong>3</strong><strong><sup>e</sup></strong>&nbsp;<em>d&rsquo;amour</em></td> <td style="height:15px; text-align:center; vertical-align:middle; width:201px"><em>Idem</em></td> </tr> <tr> <td style="background-color:#bff5fa; height:15px; vertical-align:middle; width:201px">* <strong>4</strong><strong><sup>e</sup></strong>&nbsp;<em>d&rsquo;estime</em></td> <td style="background-color:#bff5fa; height:15px; text-align:center; vertical-align:middle; width:201px"><em>Idem</em></td> </tr> <tr> <td style="height:15px; vertical-align:middle; width:201px">* <strong>5</strong><strong><sup>e</sup></strong>&nbsp;<em>d&rsquo;accomplissement</em></td> <td style="height:15px; text-align:center; vertical-align:middle; width:201px"><em>Idem</em></td> </tr> <tr> <td style="background-color:#bff5fa; height:63px; vertical-align:middle; width:201px">Fondamentaux &ne; partiels</td> <td style="background-color:#bff5fa; height:63px; vertical-align:middle; width:201px">&nbsp;</td> <td style="background-color:#bff5fa; height:63px; vertical-align:middle; width:201px"> <p>&nbsp;Fondamentaux &ne; partiels<br /> + inconscients que conscients&nbsp;</p> </td> </tr> </tbody> </table> <ul> <li style="text-align:justify">Ainsi les <em>besoins dits physiologique</em>s ne sont pas significatifs de la motivation parce qu&rsquo;atypiques et exceptionnels chez l&rsquo;&ecirc;tre humain&nbsp;;</li> <li style="text-align:justify">Les <em>3 besoins&nbsp;suivants</em> ob&eacute;issent &agrave; une hi&eacute;rarchie, c&#39;est-&agrave;-dire que l&rsquo;apparition d&rsquo;un besoin d&eacute;pend &laquo;&nbsp;g&eacute;n&eacute;ralement&nbsp;&raquo; de la satisfaction du besoin pr&eacute;c&eacute;dent, mais les entorses &agrave; ce principe sont nombreuses (inversion, saut, retour, substitution, etc.)&nbsp;;</li> <li style="text-align:justify">Sch&eacute;matiquement, l&rsquo;id&eacute;e commune voudrait que les besoins assur&eacute;s ou combl&eacute;s&nbsp;:</li> <li style="text-align:justify">physiologiques (faim, soif, sommeil, sexualit&eacute;) &ndash; de s&eacute;curit&eacute; (paix, protection, stabilit&eacute;) &ndash; d&rsquo;amour (re&ccedil;u et donn&eacute;, affection, appartenance) &ndash; d&rsquo;estime (reconnaissance, comp&eacute;tence, ind&eacute;pendance), garantissent le besoin d&rsquo;accomplissement de soi.</li> </ul> <p style="text-align:justify">Or&nbsp;:</p> <ul> <li>Les besoins physiologiques ne sont qu&rsquo;exceptionnellement d&eacute;terminants&nbsp;;</li> <li>Les 3 besoins suivants (s&eacute;curit&eacute;, amour, estime) sont fluctuants et parfois absents&nbsp;;</li> <li>La satisfaction des 4 premiers besoins n&rsquo;implique pas la r&eacute;alisation du 5<sup>e</sup>&nbsp;;</li> <li>Les 5 besoins peuvent &ecirc;tre tous v&eacute;cus comme une menace vitale.</li> </ul> <p style="text-align:justify">En associant &eacute;troitement la notion de besoin &agrave; celle de motivation la th&eacute;orie de Maslow signifie que sans la perception ou la pression d&rsquo;un besoin il n&rsquo;y aurait aucun motif substantiel &agrave; l&rsquo;action. Mais en consid&eacute;rant que les besoins ont un <em>caract&egrave;re inconscient</em> &ndash; les plus visibles ou ceux d&eacute;clar&eacute;s ne sont pas les plus cr&eacute;dibles ou les plus actifs &ndash; en cons&eacute;quence&nbsp;: &laquo;&nbsp;les motivations inconscientes sont au total beaucoup plus importantes que les motivations conscientes.&nbsp;&raquo; (cf. <em>supra</em>&nbsp;: 3.1)</p> <p style="text-align:justify">D&rsquo;autre part, une action n&rsquo;est pas l&rsquo;expression d&rsquo;un seul besoin car &laquo;&nbsp;tout comportement tend &agrave; &ecirc;tre d&eacute;termin&eacute; par plusieurs ou tous les besoins fondamentaux simultan&eacute;ment&nbsp;&raquo;. Ceux-ci &eacute;tant plus inconscients que conscients, l&rsquo;action est plus aveugle que cibl&eacute;e. De plus, au regard des &laquo;&nbsp;buts comme principe central de la th&eacute;orie de la motivation&nbsp;&raquo; (<em>ibid</em>.&nbsp;: 46), les moyens sont parfaitement indiff&eacute;rents, et surtout &laquo;&nbsp;on observera que le principe premier de notre classification n&rsquo;est ni l&rsquo;instigation ni le comportement motiv&eacute; mais plut&ocirc;t les fonctions, effets, desseins ou buts du comportement&nbsp;&raquo; (<em>ibid</em>.). En d&rsquo;autres termes, les actions (buts du comportement) ne reposent pas ou ne d&eacute;pendent pas d&rsquo;une influence &eacute;trang&egrave;re ou ext&eacute;rieure (influence et persuasion) ni d&rsquo;un choix volontaire (comportement motiv&eacute;), mais visent des buts, fonction, r&ocirc;le, r&eacute;sultat (buts fondamentaux) largement m&eacute;connus, tout simplement parce que le besoin-motivation qui mobilise l&rsquo;action l&rsquo;est aussi.</p> <p style="text-align:justify">De fait, un comportement-action n&rsquo;est pas le fruit d&rsquo;une injonction ext&eacute;rieure ni m&ecirc;me personnelle (comme effort ou volont&eacute;) dans la mesure o&ugrave; il est guid&eacute; par des mobiles dont la majorit&eacute; n&rsquo;est pas per&ccedil;ue. C&rsquo;est dans ce sens qu&rsquo;il faut entendre <em>besoins fondamentaux</em> et <em>buts fondamentaux</em> que Maslow distingue des <em>buts partiels ou superficiels</em> (cf. <em>supra</em>&nbsp;: 3.3 Sch&eacute;matisation de la th&eacute;orie de Maslow).</p> <h3>3.4 Effondrement</h3> <p style="text-align:justify">De sorte que la repr&eacute;sentation de la motivation ‒ comme fonction agissante qui voudrait que sous la pouss&eacute;e d&rsquo;un besoin, l&rsquo;action ainsi motiv&eacute;e atteigne son but, tarisse ou comble le besoin ‒, est une interpr&eacute;tation totalement r&eacute;ductrice et m&eacute;caniste d&rsquo;un processus beaucoup plus complexe.</p> <p style="text-align:justify">Maslow lui-m&ecirc;me mettait d&eacute;j&agrave; en garde contre une imagerie de la motivation construite &agrave; partir des recherches men&eacute;es en laboratoire et d&eacute;non&ccedil;ait dans le m&ecirc;me mouvement un b&eacute;haviorisme qui &laquo;&nbsp;consid&eacute;rait comme n&eacute;cessaire, ou &agrave; tout le moins plus &ldquo;scientifique&rdquo;, de juger les &ecirc;tres humains &agrave; l&rsquo;aune de normes animales.&nbsp;&raquo; (<em>ibid</em>.&nbsp;: 47), ce qui ne manque pas d&rsquo;inqui&eacute;ter dans ce qu&rsquo;elle nous laisse imaginer. Car, ne trouvera-t-on pas aujourd&rsquo;hui (ou demain) de nouvelles mesures de l&rsquo;humain autrement plus rigoureuses et scientifiques donc incontestables&nbsp;?</p> <p style="text-align:justify">Nous ajouterons que la vertu de toute-puissance de l&rsquo;action est s&eacute;rieusement compromise par Maslow puisque, &agrave; l&rsquo;&eacute;vidence, son pouvoir n&rsquo;est pas consubstantiel &agrave; l&rsquo;action elle-m&ecirc;me, mais <em>vient d&rsquo;ailleurs</em>. Invitation, s&rsquo;il en est, &agrave; m&eacute;diter quant &agrave; l&rsquo;efficience d&rsquo;une &laquo;&nbsp;perspective actionnelle&nbsp;&raquo;<sup><a href="#_ftn17" name="_ftnref17">17</a></sup>&nbsp;dans l&rsquo;apprentissage des langues &agrave; laquelle viendrait s&rsquo;adjoindre une &laquo;&nbsp;perspective culturelle&nbsp;&raquo;<sup><a href="#_ftn18" name="_ftnref18">18</a></sup>&nbsp;pour plus de rendement et une meilleure ad&eacute;quation &agrave; l&rsquo;objectif vis&eacute;&nbsp;: &laquo;&nbsp;mettre en &oelig;uvre une culture d&rsquo;action commune&nbsp;&raquo; (<em>ibid</em>.).</p> <p style="text-align:justify">Sur cette question de la pertinence d&rsquo;une concorde culturelle, Maslow remarquait incidemment que si &laquo;&nbsp;le contenu motivationnel conscient d&rsquo;un individu appartenant &agrave; une culture donn&eacute;e sera en g&eacute;n&eacute;ral extr&ecirc;mement diff&eacute;rent du contenu motivationnel conscient d&rsquo;un individu d&rsquo;une autre culture [&hellip;] nous nous apercevons que les diff&eacute;rences les plus frappantes sont plus superficielles que fondamentales [et que] les besoins fondamentaux sont plus communs aux &ecirc;tres humains que les d&eacute;sirs ou comportements superficiels.&nbsp;&raquo; (<em>ibid</em>.&nbsp;: 43-44) Ce qui revient &agrave; dire que si l&rsquo;humanit&eacute; s&rsquo;exprime dans la variation, ses buts fondamentaux sont lest&eacute;s du <em>m&ecirc;me poid</em>s, commun <em>et</em> ignor&eacute;, c&rsquo;est-&agrave;-dire inconscients.</p> <h3>3.5 Motivation <em>versus</em> comportement</h3> <p style="text-align:justify">Pour Maslow &laquo;&nbsp;la th&eacute;orie de la motivation n&rsquo;est pas synonyme de la th&eacute;orie du comportement&nbsp;&raquo; (<em>ibid</em>.&nbsp;: 19). Un comportement tend &agrave; &ecirc;tre <em>d&eacute;termin&eacute;</em> par plusieurs ou m&ecirc;me tous les besoins fondamentaux simultan&eacute;ment plut&ocirc;t que par un seul.</p> <p style="text-align:justify">Th&eacute;oriquement on pourrait effectivement analyser l&rsquo;acte d&rsquo;un individu et y voir l&rsquo;expression de tous ses besoins fondamentaux, ce qui va &agrave; l&rsquo;encontre de l&rsquo;id&eacute;e qu&rsquo;une action rend compte d&rsquo;une seule motivation (manger peut exprimer la faim comme bien d&rsquo;autres besoins ‒ cas de Marzano ‒ ou toucher la question de survivre chez Mizubayashi &eacute;voqu&eacute;e plus loin). Pour autant, les comportements ne sont pas tous d&eacute;termin&eacute;s par les besoins fondamentaux, autrement dit&nbsp;: ils ne sont pas tous <em>motiv&eacute;s</em>. Il existe d&rsquo;autres d&eacute;terminants du comportement, comme ceux &laquo;&nbsp;&ldquo;contextuels&rdquo; ou du champ&nbsp;&raquo; (<em>ibid</em>.&nbsp;: 45), en d&rsquo;autres termes ceux qui viennent du milieu, des stimuli ext&eacute;rieurs, des associations d&rsquo;id&eacute;es ou des r&eacute;flexes conditionn&eacute;s, ce qui &laquo;&nbsp;n&rsquo;a clairement rien &agrave; voir avec [les] besoins fondamentaux.&nbsp;&raquo; (<em>ibid</em>.)</p> <p style="text-align:justify">Avec le comportement, il est donc question de plus ou de moins d&rsquo;affinit&eacute;, ce que Maslow appelle le &laquo;&nbsp;degr&eacute; de proximit&eacute; avec les besoins fondamentaux&nbsp;&raquo; ou &laquo;&nbsp;degr&eacute; de motivation&nbsp;&raquo; (<em>ibid</em>.).</p> <p style="text-align:justify">Cependant, nous observerons que si la motivation ignore ses motifs mais pousse &agrave; l&rsquo;action, le comportement dit &laquo;&nbsp;non-motiv&eacute;&nbsp;&raquo; mais n&eacute;anmoins &laquo;&nbsp;d&eacute;termin&eacute;&nbsp;&raquo; rejoint la motivation sur un point essentiel, celui de l&rsquo;inconscience. Car si la motivation est ignorante, le comportement l&rsquo;est tout autant et, nous ajouterons, &agrave; un plus fort degr&eacute;.</p> <p style="text-align:justify">En fait, la distinction de Maslow ne se fait pas entre motivation et comportement mais entre la possibilit&eacute; ou l&rsquo;impossibilit&eacute; d&rsquo;action de la motivation. M&ecirc;me si la motivation ignore ses mobiles (les besoins fondamentaux inconscients), elle invite l&rsquo;agent &agrave; agir tandis que le comportement (champ, contexte, milieu, r&eacute;flexes conditionn&eacute;s) le traverse et lui &eacute;chappe. C&rsquo;est pourquoi nous dirions qu&rsquo;il est davantage question de degr&eacute; d&rsquo;ignorance entre les deux que d&rsquo;une s&eacute;paration entre l&rsquo;agent-acteur inconnu de la motivation et la r&eacute;ponse <em>agissante</em> du conditionnement.</p> <p style="text-align:justify">Par ailleurs, on peut aussi s&rsquo;interroger sur l&rsquo;usage r&eacute;current du concept d&rsquo;acteur et brusquement&nbsp; s&rsquo;arr&ecirc;ter sur l&rsquo;ambigu&iuml;t&eacute; qu&rsquo;il ne laisse pas d&rsquo;&eacute;voquer. Si la linguistique et la didactique le r&eacute;f&egrave;rent &agrave; son origine latine <em>actor</em> &laquo;&nbsp;<em>agere</em> celui qui agit&nbsp;&raquo;, la premi&egrave;re pens&eacute;e &agrave; laquelle on l&rsquo;associe, comme la premi&egrave;re d&eacute;finition qu&rsquo;en donne tout dictionnaire, est celle d&rsquo;un &laquo;&nbsp;artiste dont la profession est de jouer un r&ocirc;le &agrave; la sc&egrave;ne ou &agrave; l&rsquo;&eacute;cran&nbsp;&raquo; (<em>Petit Robert</em> 2013), ce qui creuse l&rsquo;embarras. Dans le domaine qui nous occupe, l&rsquo;apprenant-acteur serait-il l&rsquo;agent et ma&icirc;tre de son dire et de son agir ou bien le<em> lieu r&eacute;-actif</em> d&rsquo;une parole ou d&rsquo;une action perdue&nbsp;? Ou encore serait-il l&rsquo;interpr&egrave;te d&rsquo;un texte qu&rsquo;il n&rsquo;aurait plus qu&rsquo;&agrave; jouer&nbsp;? Sur cette question, rien moins que oiseuse, la didactique fait la sourde oreille, cependant qu&rsquo;&agrave; lire Maslow on comprend que la motivation n&rsquo;est pas synonyme de ma&icirc;trise ou de contr&ocirc;le pas plus qu&rsquo;elle ne vise une cible certaine.</p> <p style="text-align:justify">Associ&eacute;s dans leur relation &agrave; l&rsquo;inconscience, il n&rsquo;est donc pas totalement impensable que l&rsquo;ignorance du comportement s&rsquo;allie &agrave; la m&eacute;connaissance de la motivation, d&rsquo;autant que le comportement peut &ecirc;tre soutenu par l&rsquo;environnement. La motivation, recouverte aussi bien d&rsquo;inconscience, n&rsquo;a pourtant pas exactement la m&ecirc;me position parce qu&rsquo;elle est flottante &ndash; elle peut s&rsquo;enraciner ici ou l&agrave; tout en parlant d&rsquo;autre chose. Flottante donc, ni certifi&eacute;e ni attest&eacute;e, non valid&eacute;e ou reconnue de l&rsquo;ext&eacute;rieur, elle est, d&rsquo;une certaine fa&ccedil;on, peu audible. Il est donc possible de la capter, lui d&eacute;signer quelque chose en lui faisant croire qu&rsquo;il s&rsquo;agit de la m&ecirc;me chose &ndash; dans l&rsquo;ind&eacute;cidable donner le change ‒ troquer un comportement, une conformit&eacute;, une adaptation contre une motivation.</p> <p style="text-align:justify">Se profile alors un questionnement dans un champ hautement strat&eacute;gique&nbsp;:&nbsp;celui de l&rsquo;action. Ne serait-il pas pensable d&rsquo;imaginer une action vide de toute motivation et d&rsquo;en exclure ainsi l&rsquo;agent-acteur ? Ou, pour le dire autrement, ne pourrait-on pas spolier le sujet&nbsp; inconscient de ses actions pour lui fournir d&rsquo;autres motifs &agrave; agir&nbsp;? On passerait alors, sans &ldquo;bruit&rdquo; et <em>in-cognito</em>, de la motivation ignor&eacute;e au comportement conditionn&eacute;, dans un silence absolu. Subs&eacute;quemment, on pourrait se demander &agrave; quoi ressemblerait un acteur sans motif et s&rsquo;interroger sur la croyance d&rsquo;un &laquo;&nbsp;sujet&nbsp;&raquo; ma&icirc;tre de son dire et de son agir, enfin d&eacute;lest&eacute; d&rsquo;un inconscient f&acirc;cheux&nbsp;: un apprenant sans trouble. Or, &laquo;&nbsp;Il n&rsquo;est point de sujet sans d&eacute;pendance affirm&eacute;e &agrave; l&rsquo;&eacute;gard d&rsquo;une puissance dont ce sujet rel&egrave;ve.&nbsp;&raquo;<a href="#_ftn19" name="_ftnref19"><sup>19</sup></a></p> <h2>4. Du motif &agrave; la langue &eacute;trang&egrave;re</h2> <h3>4.1 Comme lieu d&rsquo;habitation</h3> <blockquote> <p style="text-align:justify">J&rsquo;errais dans Tokyo avec un sentiment d&rsquo;&eacute;touffement qui ne me l&acirc;chait pas&nbsp;: o&ugrave; que j&rsquo;aille, partout je me sentais emmur&eacute;&nbsp;; l&rsquo;espace de la prison n&rsquo;en finissait pas de s&rsquo;&eacute;tendre. J&rsquo;&eacute;tais traqu&eacute; dans une sorte d&rsquo;inflation linguistique g&eacute;n&eacute;ralis&eacute;e. Il fallait que j&rsquo;entreprenne une tentative d&rsquo;&eacute;vasion. Le fran&ccedil;ais m&rsquo;est apparu alors comme le seul choix possible, ou plut&ocirc;t la seule parade&hellip;<a href="#_ftn20" name="_ftnref20"><sup>20</sup></a></p> </blockquote> <p style="text-align:justify">Ainsi Akira Mizubayashi s&rsquo;explique-t-il les raisons qui l&rsquo;oblig&egrave;rent &agrave; entrer dans un autre univers que le sien&nbsp;: le fran&ccedil;ais, langue qu&rsquo;il ignore compl&egrave;tement. Son japonais rendu impossible &agrave; vivre pour cause d&rsquo;<em>inflation linguistique g&eacute;n&eacute;ralis&eacute;e</em> se mit soudainement &agrave; retentir comme&nbsp;: &laquo;&nbsp;Des mots<em> inad&eacute;quats</em>, <em>d&eacute;coll&eacute;s</em>. [&hellip;] <em>L&rsquo;insoutenable l&eacute;g&egrave;ret&eacute; des mot</em>s, le sentiment que les mots n&rsquo;atteignent pas le plus profond des &ecirc;tres et des choses&nbsp;&raquo;<sup><a href="#_ftn21" name="_ftnref21">21</a></sup>&nbsp;et l&rsquo;enjoint d&rsquo;aller habiter ailleurs, dans une contr&eacute;e inconnue, au risque d&rsquo;y &ecirc;tre toujours un &eacute;tranger.</p> <p style="text-align:justify">Akira, jeune adulte perdu dans une langue qui ne lui parle plus, capte sur la Radio nationale japonaise un cours de fran&ccedil;ais anim&eacute; par deux invit&eacute;s natifs. Ce fut comme <em>un r&eacute;cital &agrave; deux voix</em> &laquo;&nbsp;o&ugrave; la voix de l&rsquo;homme et celle de la femme se cherchaient, se r&eacute;pondaient, se confondaient, s&rsquo;entrela&ccedil;aient dans leur mouvement phonique d&eacute;licat et soigneusement d&eacute;fini.&nbsp;&raquo; (<em><span style="font-size:12.16px">ibid</span></em>.&nbsp;: 21) Autant dire, comme une musique envo&ucirc;tante qui semblait, enfin, &ldquo;&eacute;voquer&rdquo; quelque chose, &ldquo;r&eacute;sonner&rdquo; quelque part ‒ m&ecirc;me si on ne sait pas o&ugrave; ni pourquoi ‒, incontestablement des voix qui renvoyaient et agissaient ici dans le registre envo&ucirc;tant du d&eacute;sir.</p> <p style="text-align:justify">La souffrance ressentie de ne plus savoir comment s&rsquo;incarner dans la langue maternelle, v&eacute;cue comme un emmurement, une prison, privation d&rsquo;&ecirc;tre &agrave; soi-m&ecirc;me tout ce qu&rsquo;on est capable de concevoir de soi, d&rsquo;&eacute;prouver et de traduire en langue, touche &agrave; l&rsquo;essentiel de ce que l&rsquo;on a-per&ccedil;oit d&rsquo;&ecirc;tre vivant et ex-istant comme humain. Aussi la parole ne peut se r&eacute;duire &agrave; une <em>fonction de communication</em> puisque le &laquo;&nbsp;je&nbsp;&raquo; sujet du vivre n&rsquo;existe tout simplement pas sans elle.</p> <p style="text-align:justify">En cons&eacute;quence, le choix de vouloir re-na&icirc;tre, &laquo;&nbsp;le luxe ou le risque d&rsquo;une deuxi&egrave;me naissance, d&rsquo;une seconde vie [&hellip;] Ma r&eacute;ponse fut, sans une seconde d&rsquo;h&eacute;sitation, oui.&nbsp;&raquo; (<em><span style="font-size:12.16px">ibid</span></em>.&nbsp;: 30). Cette &eacute;lection s&rsquo;affirme comme un &ldquo;oui&rdquo; performatif qui engage bien au-del&agrave; de ce qu&rsquo;on peut esp&eacute;rer&nbsp;: &laquo;&nbsp;J&rsquo;ai <em>adh&eacute;r&eacute;</em> &agrave; cette langue et elle m&rsquo;a adopt&eacute;&hellip; C&rsquo;est une question d&rsquo;amour. Je l&rsquo;aime et elle m&rsquo;aime&hellip; si j&rsquo;ose dire&hellip;&nbsp;&raquo;<sup><a href="#_ftn22" name="_ftnref22">22</a></sup>, ou imaginer de r&eacute;confort.</p> <p style="text-align:justify">Sceller ses noces avec la langue de l&rsquo;autre n&rsquo;est pas une simple accumulation d&rsquo;actes &agrave; accomplir et de faits v&eacute;cus&nbsp;: &laquo;&nbsp;l&rsquo;exp&eacute;rience fondatrice de la parole authentique, m&rsquo;est apparue d&rsquo;embl&eacute;e, au contraire, comme pr&eacute;supposant une dimension <em>sacrificielle</em> exigeant un effort asc&eacute;tique, sans concession<sup><a href="#_ftn23" name="_ftnref23">23</a></sup>.&nbsp;&raquo; Alors, bien s&ucirc;r, l&rsquo;acte qui intime l&rsquo;ordre d&rsquo;aller vivre ailleurs pour cause d&rsquo;un japonais r&eacute;tr&eacute;ci jusqu&rsquo;&agrave; la suffocation et la d&eacute;possession de soi co&ucirc;te cher. Mais c&rsquo;est <em>une question d&rsquo;amour</em> r&eacute;veill&eacute;e par des voix qui ont chuchot&eacute; dans un d&eacute;dale sans mots et trouv&eacute; l&rsquo;&eacute;cho d&rsquo;un d&eacute;sir&nbsp;: sans prix.</p> <p style="text-align:justify">C&rsquo;est aussi, une question vitale en ce qu&rsquo;elle traduit un <em>besoin fondamental plus inconscient que conscient</em> (Maslow) qui s&rsquo;appareille aux conditions de possibilit&eacute; du vivre ou mourir dans un territoire, terre-humus qui n&rsquo;est autre que celle de la langue chez l&rsquo;humain ‒ consid&eacute;rant que l&rsquo;humus latin comme &laquo;&nbsp;homme&nbsp;&raquo; provient de la racine indo-europ&eacute;enne ghyom qui signifie terre.</p> <h3>4.2 Ou comme moyen de transport</h3> <p style="text-align:justify">On objectera ais&eacute;ment qu&rsquo;on n&rsquo;en demande pas tant &agrave; une langue &eacute;trang&egrave;re puisqu&rsquo;il ne s&rsquo;agirait que d&rsquo;en conna&icirc;tre juste assez pour &laquo;&nbsp;&ecirc;tre capable de &raquo; et &laquo;&nbsp;avoir de la motivation&nbsp;&raquo; suffisante pour l&rsquo;entreprendre ‒ sans compter le prix exorbitant qu&rsquo;il faudrait payer pour poss&eacute;der le fran&ccedil;ais d&rsquo;un Mizubayashi. De fait, et plus simplement de mani&egrave;re efficace et pragmatique&nbsp;: savoir-dire, savoir-faire, savoir-&ecirc;tre ‒, apprendre &agrave; nommer et &agrave; d&eacute;signer autrement les objets du monde pour savoir s&rsquo;en servir &agrave; bon escient suffisent. Pour autant, cela ne saurait cong&eacute;dier la pertinence de l&rsquo;extra-ordinaire exemplaire Mizubayashi et de sa &ldquo;d&eacute;-mesure&rdquo; justement. Parce qu&rsquo;il exhibe, montre dans un effet de grossissement, ce qui &eacute;chappe &agrave; l&rsquo;enseignement-apprentissage en g&eacute;n&eacute;ral et &agrave; la didactique des langues singuli&egrave;rement&nbsp;: une question d&rsquo;amour et d&rsquo;inconscient forclose.</p> <p style="text-align:justify">Si des faits et gestes joints &agrave; quelques habilet&eacute;s peuvent toujours faire langage et possiblement servir &agrave; &laquo;&nbsp;bien communiquer&nbsp;&raquo;, cela ne peut se confondre avec une langue-terre habit&eacute;e par un sujet parlant puisque, de sa langue-humus, le sujet advient &agrave; lui-m&ecirc;me dans la m&eacute;connaissance de ce qui le fait parler&nbsp;: un d&eacute;sir perdu. En ce sens, la langue d&eacute;borde de toute part la communication et ses moyens pour un <em>&ecirc;tre-au-monde</em> qui le signifie.</p> <p style="text-align:justify">Reprenant Michela Marzano et son <em>Come l&rsquo;anoressia mi ha ensegnato a vivere</em> paru d&rsquo;abord en italien et non en fran&ccedil;ais, langue o&ugrave; elle choisit pourtant de vivre, d&rsquo;aimer et de travailler&nbsp;:</p> <blockquote> <p style="text-align:justify">Le choix de la langue s&rsquo;est impos&eacute;. Je voulais &eacute;crire ce livre en italien. Je ne pouvais pas faire autrement. Apr&egrave;s des ann&eacute;es pass&eacute;es &agrave; &ldquo;oublier&rdquo; ma langue, elle a r&eacute;apparu. Elle n&rsquo;&eacute;tait plus seulement ma &ldquo;langue paternelle&rdquo;. Elle &eacute;tait redevenue ma &ldquo;langue maternelle&rdquo;.<a href="#_ftn24" name="_ftnref24"><sup>24</sup></a></p> </blockquote> <p style="text-align:justify">D&rsquo;un italien associ&eacute; aux injonctions paternelles du <em>devoir</em> et des <em>normes</em> de l&rsquo;enfance et de l&rsquo;adolescence, au devoir-&ecirc;tre celle que l&rsquo;on attendait, ce faisant, on en meurt quasiment. Marzano se reconquiert alors ailleurs, en fran&ccedil;ais&nbsp;: &laquo;&nbsp;L&rsquo;apprendre n&rsquo;est pas suffisant. Je veux l&rsquo;avaler, l&rsquo;assimiler, le devenir, l&rsquo;&ecirc;tre.&nbsp;&raquo; (<em><span style="font-size:12.16px">ibid</span></em>.&nbsp;: 206), jusqu&rsquo;&agrave; ce qu&rsquo;elle abandonne le sacrifice d&rsquo;une part d&rsquo;elle-m&ecirc;me et accepte de reprendre le chemin d&rsquo;un italien rel&eacute;gu&eacute; dans l&rsquo;obscurit&eacute;. Mais comment expliquer&nbsp;? &laquo;&nbsp;Car il ne suffit pas de savoir comment dire. Il faut trouver la nuance juste. Briser la distance qui existe entre les mots et la chose. Se glisser dans les signes. R&eacute;ussir &agrave; les habiter.&nbsp;&raquo; (<em><span style="font-size:12.16px">ibid</span></em>.&nbsp;: 205)</p> <p style="text-align:justify">Ou, comment mieux dire que la langue n&rsquo;est pas seulement un outil dont on aurait besoin pour quelque motif&nbsp;; un v&eacute;hicule dont il faudrait apprendre &agrave; se servir pour atteindre l&rsquo;objectif-destination qu&rsquo;on s&rsquo;est fix&eacute;. Apprendre et parler une LE, serait-ce comparable &agrave; &laquo;&nbsp;la conduite automobile devenue par l&rsquo;accoutumance et l&rsquo;exp&eacute;rience un encha&icirc;nement quasi automatique de proc&eacute;dures &raquo;<sup><a href="#_ftn25" name="_ftnref25">25</a></sup>&nbsp;? Sauf que l&rsquo;<em>oubliable</em> de la langue n&rsquo;est pas non-agissant et que l&rsquo;&ecirc;tre qui en vient est sans rapport aucun avec un <em>savoir-dire-&ecirc;tre</em> qui en tiendrait lieu.</p> <p style="text-align:justify">La question est donc de savoir&nbsp;: de quoi r&ecirc;ve l&rsquo;Europe&nbsp;? d&rsquo;apprenants auto-mobiles modulables &agrave; toutes les conditions et adaptables &agrave; tout le territoire ou bien &agrave; des citoyens europ&eacute;ens parlants dans des diff&eacute;rences qui les authentifient&nbsp;?</p> <h2>Conclusion</h2> <p style="text-align:justify">N&rsquo;aurait-on pas remarqu&eacute; que, concernant le langage chez les hommes, on ne peut ais&eacute;ment s&eacute;parer l&rsquo;objet-langue du sujet-humain en deux territoires distincts&nbsp;: un sujet <em>agent</em> et un <em>outil</em> langage dont le premier aura <em>besoin</em> d&rsquo;apprendre &agrave; savoir se servir du second pour agir sur le monde et interagir avec autrui.</p> <p style="text-align:justify">Totalement assujetti &agrave; la langue qu&rsquo;il parle ‒ quand bien m&ecirc;me ce serait en langue &eacute;trang&egrave;re ou seconde ‒ le <em>sujet</em> homme n&rsquo;est que de ce qui le fait &ecirc;tre, il s&rsquo;appara&icirc;t &agrave; lui-m&ecirc;me et au monde qu&rsquo;en tant qu&rsquo;il parle, ce pour quoi Lacan l&rsquo;appellera le<em> parl&ecirc;tre</em>. Si la r&eacute;f&eacute;rence lacanienne risque de fermer la r&eacute;flexion dans des pr&eacute;jug&eacute;s pr&ecirc;t-&agrave;-porter, elle peut aussi bien cr&eacute;er un saisissement qui suit son cours pour re-penser l&rsquo;&eacute;vidence.</p> <p style="text-align:justify">Suffirait-il en effet d&rsquo;avoir besoin d&rsquo;une LE et d&rsquo;une motivation &agrave; hauteur des besoins r&eacute;pertori&eacute;s pour s&rsquo;engager &agrave; &ldquo;la prendre&rdquo; pour viatique d&rsquo;une nouvelle voix&nbsp;? Nous osons en douter m&ecirc;me si le <em>Cadre</em> inclut&nbsp;: description, &eacute;talonnage et utilisation de la langue et des diff&eacute;rents types de connaissances et de comp&eacute;tences que cette utilisation requiert (<em>CECR</em>&nbsp;: 4<sup>e</sup> de couv.) ‒ et pr&eacute;tend y parvenir. En r&eacute;alit&eacute;, cette <em>approche totalement nouvelle</em> transforme la langue &ecirc;tre-habitat humain en un v&eacute;hicule de communication tout terrain dont le conducteur acquerra la ma&icirc;trise progressive. Or, quand bien m&ecirc;me la langue s&rsquo;objective, s&rsquo;&eacute;tudie, s&rsquo;analyse et se d&eacute;compose, on ne peut la r&eacute;duire &agrave; un objet dont on use <em>&agrave; sa guise</em> (<em><span style="font-size:12.16px">ibid</span></em>.&nbsp;: p. 4) parce qu&rsquo;elle exc&egrave;de l&rsquo;usage qu&rsquo;on en fait pour nous soumettre &agrave; une loi port&eacute;e disparue mais n&eacute;anmoins agissante &agrave; notre insu.</p> <p style="text-align:justify">&Agrave; supposer m&ecirc;me que l&rsquo;objet puisse se d&eacute;tacher du sujet qui l&rsquo;emploie, cela impliquerait qu&rsquo;il est possible d&rsquo;envisager la langue comme un outil, moyen ou v&eacute;hicule de la pens&eacute;e et de l&rsquo;&ecirc;tre-soi et, qu&rsquo;en cons&eacute;quence, la pens&eacute;e-&ecirc;tre pr&eacute;existerait avant les mots pour le dire ‒ repr&eacute;sentation qu&rsquo;en avaient Arnauld et Lancelot dans leur <em>Grammaire</em> dite <em>de Port-Royal</em> en 1660<sup><a href="#_ftn26" name="_ftnref26">26</a></sup>. Or, depuis Saussure, on sait qu&rsquo;il n&rsquo;en est rien&hellip; et, que la langue n&rsquo;est pas r&eacute;ductible &agrave; une nomenclature transposable en fran&ccedil;ais, en allemand, en russe ou en chinois.</p> <p style="text-align:justify">C&rsquo;est pourquoi les transfuges en langues&nbsp;: Mizubayashi, Marzano, Djebar, Cheng, Kundera, Cioran, Beckett, Canetti et tant d&rsquo;autres, cherchent avec <em>passion</em> un nouvel habitat pour &ecirc;tre-au-monde et non un simple moyen de communication pour se faire entendre. Le langage chez l&rsquo;humain implique une parole qui le signifie tout entier. Deviendrait-il indiff&eacute;rent de confondre aujourd&rsquo;hui entre les &ecirc;tres parlants et les communicants&nbsp;?</p> <p style="text-align:justify">En 1755, un citoyen peu ordinaire, Jean-Jacques Rousseau, eut l&rsquo;audace de penser par pure imagination<em> l&rsquo;Origine des langues</em> et d&rsquo;en conclure&nbsp;: &laquo;&nbsp;Il est donc &agrave; croire que les besoins dict&egrave;rent les premiers gestes et que les passions arrach&egrave;rent les premi&egrave;res voix&nbsp;&raquo;<sup><a href="#_ftn27" name="_ftnref27">27</a></sup>&nbsp;; &agrave; croire que notre &eacute;poque r&eacute;gresse ou qu&rsquo;elle soit d&eacute;pourvue de toute imagination comme de m&eacute;moire.</p> <h2>Bibliographie</h2> <p style="text-align:justify">ARNAULD &amp; LANCELOT, [1660],&nbsp;<em>Grammaire g&eacute;n&eacute;rale et raisonn&eacute;e</em>, Paris, Allia, 2010.</p> <p style="text-align:justify"><em>Cadre europ&eacute;en commun de r&eacute;f&eacute;rence pour les langues</em>, Conseil de l&rsquo;Europe/ Didier, Paris, 2005.</p> <p style="text-align:justify">COOPER, D.,&nbsp;<em>Le Langage de la folie</em>, Paris, Seuil, coll. &laquo;&nbsp;Combats&nbsp;&raquo;, 1979.</p> <p style="text-align:justify">DAGUES, V., th&egrave;se&nbsp;:&nbsp;<em>Savoir &ecirc;tre qu&rsquo;est-ce &agrave; dire&nbsp;? Du m&eacute;tier d&rsquo;homme d&rsquo;</em>Emile&nbsp;<em>de J.-J. Rousseau au savoir-&ecirc;tre des apprenants d&rsquo;aujourd&rsquo;hui</em>, dir. P. Anderson, Universit&eacute; Franche-Comt&eacute;, 2013.</p> <p style="text-align:justify">FLAHAULT, F.,&nbsp;<em>La Parole interm&eacute;diaire</em>, Paris, Seuil, 1978.</p> <p style="text-align:justify"><em>Grand Dictionnaire de la Psychologie</em>, Paris, Larousse-Bordas, 1999.</p> <p style="text-align:justify">JUDET DE LA COMBE, P. / WISMANN, H.,&nbsp;<em>L&rsquo;avenir des langues - Repenser les Humanit&eacute;s</em>, Paris, Cerf, 2004.</p> <p style="text-align:justify">MARZANO, M.,&nbsp;<em>L&eacute;g&egrave;re comme un papillon</em>, Mondadori, Milan, 2011, trad. C. Paul, Paris, Grasset &amp; Fasquelle, coll. &laquo;&nbsp;Le Livre de Poche&nbsp;&raquo;, 2012.</p> <p style="text-align:justify">MASLOW, A., &laquo;&nbsp;Une th&eacute;orie de la motivation&nbsp;&raquo;, (1943), dans&nbsp;<em>L&rsquo;Accomplissement de soi. De la motivation &agrave; la pl&eacute;nitude</em>, trad. E. Borgeaud, Paris, Groupe Eyrolles, 6e &eacute;dit. 2008.</p> <p style="text-align:justify">MIZUBAYASHI, A.,&nbsp;<em>Une langue venue d&rsquo;ailleurs</em>, Paris, Gallimard, coll. &laquo;&nbsp;l&rsquo;un et l&rsquo;autre&nbsp;&raquo;, 2011.</p> <p style="text-align:justify">PUREN, C., &laquo;&nbsp;L&rsquo;Interculturel&nbsp;&raquo; dans Langues modernes, juil.-ao&ucirc;t-sept. 2002, en ligne&nbsp;:&nbsp;<a href="http://www.aplv-languesmodernes.org/spip.php?article844">http://www.aplv-languesmodernes.org/spip.php?article844</a>.</p> <p style="text-align:justify">RICHTERICH, R.,&nbsp;<em>Besoins langagiers et objectifs d&rsquo;apprentissage</em>, Paris, Hachette, 1985.</p> <p style="text-align:justify">ROUSSEAU, J.-J., [1755, posth. 1781],&nbsp;<em>Essai sur l&rsquo;origine des langues</em>, Paris GF Flammarion, 1993.</p> <p style="text-align:justify">SAINT GIRONS, B., &laquo;&nbsp;Sujet&raquo; dans&nbsp;<em>Encyclop&aelig;dia Universalis</em>, Paris, Encyclop&aelig;dia Universalis Editeur, 2002.</p> <hr /> <h2 style="text-align:justify">Notes</h2> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref1" name="_ftn1" style="font-size: 12.16px;">1</a>&nbsp;&laquo;&nbsp;<em>Amaguiz</em>&nbsp;&raquo;, autrement dit&nbsp;: <em>ce que je veux, quand je veux et juste la quantit&eacute; souhait&eacute;e</em>, spot publicitaire d&rsquo;une compagnie d&rsquo;assurance automobile r&eacute;alis&eacute;e pour la t&eacute;l&eacute;vision et mise en sc&egrave;ne par l&rsquo;acteur Jean Rochefort, 2011-2012.</p> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref2" name="_ftn2">2</a>&nbsp;&nbsp;Pierre Judet de La Combe, Heinz Wismann, <em>L&rsquo;avenir des langues Repenser les Humanit&eacute;s</em>, Paris, Cerf, 2004, p. 90.</p> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref3" name="_ftn3">3</a>&nbsp;&nbsp;Ren&eacute; Richterich, <em>Besoins langagiers et objectifs d&rsquo;apprentissage</em>, Paris, Hachette, 1985, p. 22.</p> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref4" name="_ftn4">4</a>&nbsp;&nbsp;Fran&ccedil;ois Flahaut, <em>La parole interm&eacute;diaire</em>, Paris, Seuil, 1978, p. 87-88.</p> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref5" name="_ftn5">5</a>&nbsp;&nbsp;<em>Besoins langagiers et objectifs d&rsquo;apprentissage</em>, <em>op. cit</em>., p. 24.</p> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref6" name="_ftn6">6</a>&nbsp;&laquo;&nbsp;Avertissement&nbsp;&raquo; dans <em>Cadre europ&eacute;en commun de r&eacute;f&eacute;rence pour les langues</em>, Conseil de l&rsquo;Europe/ Didier, Paris, 2005, p. 4.</p> <div id="ftn6"> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref7" name="_ftn7">7</a>&nbsp;&laquo;&nbsp;Besoin&nbsp;&raquo;, J.-M. Cruanes dans <em>Grand Dictionnaire de la Psychologie</em>, Paris, Larousse-Bordas, 1999.</p> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref8" name="_ftn8">8</a>&nbsp;David Cooper, <em>Le langage de la folie</em>, Paris, 1979, Seuil, coll. &laquo;&nbsp;Combats&nbsp;&raquo;, (soulign&eacute;s dans le texte), p. 47.</p> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref9" name="_ftn9">9</a>&nbsp;Pr&eacute;ambule de la <em>Recommandation</em> R (82) 18 du Comit&eacute; des Ministres du Conseil de l&rsquo;Europe, repris dans CECR, <em>op. cit</em>.,1.2, p. 10.</p> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref10" name="_ftn10">10</a>&nbsp;Cette &eacute;tude reprend partiellement et r&eacute;oriente le Chap. II.4 de notre th&egrave;se&nbsp;: <em>Savoir &ecirc;tre qu&rsquo;est-ce &agrave; dire&nbsp;? Du m&eacute;tier d&rsquo;homme d&rsquo;</em>Emile<em> de J.-J. Rousseau au savoir-&ecirc;tre des apprenants d&rsquo;aujourd&rsquo;hui</em>, dir. P. Anderson, Universit&eacute; de Franche-Comt&eacute;, 2013.</p> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref11" name="_ftn11">11</a>&nbsp;Abraham Maslow, &laquo;&nbsp;Une th&eacute;orie de la motivation&nbsp;&raquo; (1943), dans <em>L&rsquo;accomplissement de soi. De la motivation &agrave; la pl&eacute;nitude</em>, trad. E. Borgeaud, Paris, 2004, Groupe Eyrolles, 6e &eacute;dit., 2008.</p> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref12" name="_ftn12">12</a>&nbsp;Michela Marzano, <em>L&eacute;g&egrave;re comme un papillon</em>, &Eacute;d. Mondadori, Milan, 2011, trad. C. Paul, Paris, &eacute;dit. Grasset &amp; Fasquelle, coll. &laquo;&nbsp;Le Livre de Poche&nbsp;&raquo;, 2012, (en italique dans le texte), p.70.</p> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref13" name="_ftn13">13</a>&nbsp;<em>Une th&eacute;orie de la motivation</em>, <em>op. cit.</em>, p. 23.</p> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref14" name="_ftn14">14</a>&nbsp;<em>L&eacute;g&egrave;re comme un papillon</em>, p. 11.</p> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref15" name="_ftn15">15</a>&nbsp;<em>Une th&eacute;orie de la motivation</em>,&nbsp;<em>op. cit.</em>, p. 25.</p> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref16" name="_ftn16">16</a>&nbsp;&nbsp;<em>L&rsquo;accomplissement de soi</em>,&nbsp;<em>op. cit.</em>, (nous soulignons), p. 43.</p> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref17" name="_ftn17">17</a>&nbsp;<em>CECR</em>,&nbsp;<em>op. cit.</em>, Chap. 2.1, p. 15.</p> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref18" name="_ftn18">18</a>&nbsp;Christain Puren, &laquo;&nbsp;L&rsquo;Interculturel&nbsp;&raquo; dans <em>Langues modernes</em>, juil.-ao&ucirc;t-sept. 2002, p. 55-71. En ligne&nbsp;: <a href="http://www.aplv-languesmodernes.org/spip.php?article844" rel="noopener noreferrer" target="_blank">http://www.aplv-languesmodernes.org/spip.php?article844</a>.</p> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref19" name="_ftn19">19</a>&nbsp;Baladine Saint Girons, &laquo;&nbsp;Sujet&nbsp;&raquo;, dans <em>Encyclop&aelig;dia Universalis</em>, Paris, Encyclop&aelig;dia Universalis Editeur, 2002.</p> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref20" name="_ftn20">20</a>&nbsp;Akira Mizubayashi, <em>Une langue venue d&rsquo;ailleurs</em>, Paris, 2011, Gallimard, coll. &laquo;&nbsp;l&rsquo;un et l&rsquo;autre&nbsp;&raquo;, p. 23.</p> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref21" name="_ftn21">21</a>&nbsp;<em>Ibid</em>., (soulign&eacute; dans le texte), p. 22.</p> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref22" name="_ftn22">22</a>&nbsp;<em>Ibid</em>., (soulign&eacute; dans le texte), p. 17.</p> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref23" name="_ftn23">23</a>&nbsp;<em>Ibid</em>., (soulign&eacute; dans le texte), p. 28.</p> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref24" name="_ftn24">24</a>&nbsp;Michela Marzano, <em>L&eacute;g&egrave;re comme un papillon</em>, <em>op. cit</em>., p.13.</p> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref25" name="_ftn25">25</a>&nbsp;CECR, <em>op. cit</em>., 2.1.1, p. 16.</p> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref26" name="_ftn26">26</a>&nbsp;Arnauld &amp; Lancelot, <em>Grammaire g&eacute;n&eacute;rale et raisonn&eacute;e</em>, (1660), Paris, Allia, 1997, 2010.</p> <p style="text-align:justify"><a href="#_ftnref27" name="_ftn27">27</a><span style="font-size:10pt">&nbsp;Jean-Jacques Rousseau, [1755, posth. 1781], <em>Essai sur l&rsquo;origine des langues</em>, Paris GF Flammarion, 1993, Chap. II, p. 60.</span></p> </div>