<p><strong>Résumé</strong> :</p>
<p>Au Québec, la question de l’accueil des personnes issues de l’immigration dépend, notamment, des ententes de régionalisation développées depuis le milieu des années 1990. En effet, les personnes réfugiées prises en charge par le gouvernement au sens de la convention de Genève sont sélectionnées pour s’installer dans les communautés québécoises locales, autrement dit en dehors de la région métropolitaine de Montréal.</p>
<p>Cette politique, dite de régionalisation, n’est pas sans conséquence sur la transformation progressive de l’école québécoise, ni sur la réponse éducative qui y est apportée par les intervenants scolaires. Les éducateurs doivent prendre en considération le besoin d’apprentissage du français qui caractérise les enfants allophones issus de l’immigration, ainsi que les niveaux scolaires qui sont les leurs à leur arrivée, et ce, dans le contexte d’une présence marquée d’enfants réfugiés.</p>
<p>Si le modèle d’accueil des élèves allophones privilégié à Montréal est la classe d’accueil – dans laquelle ces élèves sont regroupés pour apprendre le français – en région, c’est l’intégration dans les classes ordinaires qui est encore le modèle le plus souvent rencontré (De Koninck et Armand, 2012). Cette dernière offre de service implique que les élèves allophones assistent la plupart du temps aux cours disciplinaires en français aux côtés des élèves francophones, et qu’ils reçoivent du soutien linguistique à raison d’une à quelques heures par semaine. Ainsi, ce ne sont plus les seuls enseignants de français qui sont concernés par l’enseignement aux élèves allophones, mais bien l’ensemble de l’équipe-école, incluant les enseignants titulaires au primaire et les enseignants disciplinaires au secondaire. Ces derniers ne reçoivent à ce jour que très peu de formation, voire aucune, sur la question de l’intégration linguistique, socioscolaire ou socioculturelle des élèves allophones, en particulier les jeunes réfugiés.</p>
<p>Selon une récente méta-analyse des recherches sur la réussite des élèves issus de l’immigration au Québec (McAndrew et <em>al</em>., 2015), il n’existerait pas de preuve empirique qu’un modèle d’intégration prévale sur un autre en termes d’efficacité. Ce serait l’ouverture des intervenants scolaires à adopter une approche éducative répondant aux besoins particuliers des élèves allophones qui constituerait la clé de leur réussite. La capacité d’adaptation des enseignants deviendrait alors primordiale, notamment en ce qui concerne le soutien au développement du français comme langue des apprentissages scolaires chez des élèves présentant, dans un rapport d’un pour quatre, un retard scolaire important à leur arrivée au Québec (De Koninck et Querrien, 2015). Néanmoins, les recherches conduites dans le domaine de la formation des enseignants ont montré que les croyances de ces derniers constituaient la plus claire mesure de leur capacité d’adaptation (Borg, 2006 ; Korthagen, 2010).</p>
<p>Le but de cet article sera de rendre compte de l’influence d’un projet de formation continue universitaire d’enseignants et de conseillères pédagogiques ayant porté sur l’acquisition du français langue scolaire chez des élèves allophones. Au cours de ce projet, d’une durée de deux ans, des enseignants de la classe ordinaire et du Programme d’accueil et de soutien à l’apprentissage du français (PASAF) ont eu à collaborer pour développer des démarches pédagogiques permettant de rejoindre à la fois les besoins des élèves francophones, des élèves allophones scolarisés avant leur arrivée au Québec et des élèves allophones sous-scolarisés, et ce, dans le contexte de classes inclusives.</p>
<p>Afin d’évaluer si les enseignants et les conseillères pédagogiques impliqués dans ce projet de formation avaient opéré des changements dans leurs croyances et leurs représentations en faveur d’une meilleure intégration des élèves allophones, une recherche qualitative longitudinale a été conduite : des entrevues ont été menées auprès des participants au début et à l’issue du projet de formation et un suivi des activités a été réalisé tout au long du projet lors des journées de formation ainsi que sur un site Internet collaboratif impliquant les formatrices, les enseignants et les conseillères pédagogiques.</p>
<p>Les résultats de cette recherche suggèrent que la formation a fourni aux participants l’occasion de s’interroger sur leurs croyances à l’égard de l’acquisition de la langue scolaire, des modèles d’intégration des élèves allophones et de leur rôle envers ces derniers. Il en ressort un plus grand sentiment d’efficacité de la part des répondants envers les élèves allophones en fin de formation. Les résultats indiquent cependant une lacune dans leur formation initiale relativement à l’acquisition de la langue scolaire, particulièrement pour les élèves allophones sous-scolarisés. Les facteurs limitatifs de cette formation, tels que les contraintes de temps et les dynamiques professionnelles dans les milieux scolaires, sont explorés et des recommandations sont avancées pour améliorer la formation continue des enseignants sur l’acquisition de la langue scolaire en contexte d’inclusion francophone pour des élèves issus de l’immigration.</p>
<p><strong>Mots-clés</strong> : <span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">formation des enseignants, éducation inclusive, scolarisation des enfants réfugiés, langue scolaire, enseignement du français langue étrangère ou seconde</span></span></p>
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<p><strong>Abstract</strong> :</p>
<p>In Quebec, the issue of welcoming people of immigrant origin depends, in particular, on the regionalization agreements developed since the mid-1990s. Indeed, refugees taken in charge by the government under the Geneva Convention are selected to settle in local Quebec communities, in other words, outside the metropolitan Montréal area.</p>
<p>This policy, known as regionalization, is not without consequences for the gradual transformation of Quebec schools and the educational response provided by school stakeholders. Educators must take into consideration the need for learning French that characterizes allophone children of immigrant origin, as well as their educational levels upon arrival, in the context of a marked presence of refugee children.</p>
<p>While the preferred model for welcoming allophone students in Montreal is the reception class - in which these students are grouped together to learn French - in the regions, integration into regular classes is still the model most often encountered (De Koninck and Armand, 2012). The latter service involves allophone students attending disciplinary classes in French most of the time alongside francophone students, and receiving language support for one to a few hours a week. Thus, it is no longer just French teachers who are involved in teaching allophone students, but the entire school team, including tenured teachers at the elementary level and disciplinary teachers at the secondary level. To date, the latter receive very little, if any, training on the issue of the linguistic, socioschool or sociocultural integration of allophone students, particularly young refugees.</p>
<p>According to a recent meta-analysis of research on the success of immigrant students in Quebec (McAndrew et al., 2015), there is no empirical evidence that one integration model prevails over another in terms of effectiveness. It would be the openness of school stakeholders to adopt an educational approach that meets the special needs of allophone students that would be the key to their success. Teachers' ability to adapt would then become crucial, particularly in terms of supporting the development of French as the language of instruction for students who, by a ratio of one to four, are significantly behind academically when they arrive in Quebec (De Koninck and Querrien, 2015). Nevertheless, research conducted in the area of teacher training has shown that teachers' beliefs are the clearest measure of their adaptability (Borg, 2006; Korthagen, 2010).</p>
<p>The purpose of this article is to report on the influence of a university in-service teacher training project on the acquisition of French as a school language by allophone students. Over the course of this two-year project, teachers from the regular class and the Programme d'accueil et de soutien à l'apprentissage du français (PASAF) had to work together to develop pedagogical approaches to meet the needs of Francophone students, allophone students who were in school before arriving in Quebec, and undereducated allophone students in the context of inclusive classes.</p>
<p>In order to evaluate whether the teachers and pedagogical advisors involved in this training project had made changes in their beliefs and representations in favour of better integration of allophone students, a longitudinal qualitative research study was conducted: interviews were conducted with participants at the beginning and end of the training project and a follow-up of activities was carried out throughout the project during training days and on a collaborative Web site involving the trainers, teachers and pedagogical advisors.</p>
<p>The results of this research suggest that the training provided participants with an opportunity to question their beliefs about school language acquisition, integration models for allophone students, and their role towards them. The results show a greater sense of effectiveness on the part of the respondents towards allophone students at the end of the training. However, the results indicate a gap in their initial training with respect to school language acquisition, particularly for undereducated Allophone students. The limiting factors of this training, such as time constraints and professional dynamics in the school environment, are explored and recommendations are made.</p>
<p><strong>Keywords</strong> : teacher training, inclusive education, schooling of refugee children, school language, teaching of French as a foreign language or as a second language</p>
<p><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Diane Querrien - Université Concordia, Montréal (Canada)</span></span></p>
<p><span lang="FR" style="font-size:12.0pt"><span style="font-family:"Times New Roman",serif"><a href="mailto:diane.querrien@concordia.ca" style="color:#0563c1; text-decoration:underline">diane.querrien@concordia.ca</a></span></span></p>