<h3>Axe 3 &ndash; &Eacute;crits, &eacute;criture et appropriations des langues</h3> <h1 class="MsoNoSpacing" style="text-align: justify;">&nbsp;</h1> <h1>Des pratiques collaboratives r&eacute;dactionnelles en (fran&ccedil;ais) langue &eacute;trang&egrave;re &agrave; l&rsquo;appropriation individuelle de l&rsquo;&eacute;crit</h1> <p align="center" class="MsoNoSpacing" style="text-align:center">&nbsp;</p> <p>Les recherches r&eacute;centes sur l&rsquo;&eacute;crit en langue &eacute;trang&egrave;re portent souvent sur le <em>feedback </em>correctif (Bitchener et Ferris, 2012) et sur la r&eacute;vision collaborative et son impact sur les productions d&rsquo;&eacute;tudiants (Do, 2011&nbsp;; Lindschouw, 2016&nbsp;; Hidden, 2018). La question du <em>feedback</em> correctif, ou <em>feedback</em> d&rsquo;erreur ou <em>retour sur erreur</em> ou encore <em>rep&eacute;rage d&rsquo;erreur </em>(cf. ci-dessous) est corr&eacute;l&eacute;e &agrave; celle du brouillon. Or le brouillon a beaucoup &eacute;t&eacute; travaill&eacute; en fran&ccedil;ais langue maternelle (cf. Fabre-Cols, 2002, 2004) mais dans une perspective en lien avec les travaux sur les brouillons d&rsquo;auteurs (cf. les travaux sur &laquo;&nbsp;l&rsquo;avant-texte&nbsp;&raquo;) et donc comme moyen d&rsquo;&eacute;clairer le processus d&rsquo;&eacute;criture. L&rsquo;id&eacute;e de prendre en consid&eacute;ration non plus seulement le produit fini mais aussi les &eacute;tapes de production a conduit &agrave; s&rsquo;int&eacute;resser &agrave; la &laquo;&nbsp;r&eacute;daction collaborative&nbsp;&raquo; (Bouchard et Mondada, 2005). Ces pratiques se d&eacute;veloppent, nous l&rsquo;avons vu, non seulement en langue &eacute;trang&egrave;re mais aussi en langue maternelle (cf. par exemple, la notion d&rsquo;atelier d&rsquo;&eacute;criture, Bucheton, 2014) et il serait int&eacute;ressant d&rsquo;&eacute;tudier comment chaque type de pratique peut informer l&rsquo;autre pour d&eacute;velopper le savoir-&eacute;crire comme l&rsquo;une des composantes des pratiques langagi&egrave;res.</p> <p>Dans ce cadre, nous avons d&eacute;cid&eacute; d&rsquo;analyser les pratiques collaboratives afin de voir si elles am&eacute;liorent ou non les pratiques individuelles mais aussi les habilet&eacute;s scripturales des individus. Nous avons donc mont&eacute; un protocole dans le but de nous fournir donn&eacute;es et r&eacute;sultats afin de r&eacute;pondre &agrave; cette question. Mais nous nous sommes vite aper&ccedil;u qu&rsquo;une telle &eacute;tude demandait de pr&eacute;ciser ce que l&rsquo;on entendait par &laquo;&nbsp;collaboration&nbsp;&raquo; au sein de pratiques d&rsquo;&eacute;criture et de s&eacute;lectionner un aspect des processus d&rsquo;am&eacute;lioration individuelle de l&rsquo;&eacute;crit. Nous avons alors choisi de porter plus pr&eacute;cis&eacute;ment notre attention sur &laquo;&nbsp;l&rsquo;engagement actif&nbsp;&raquo;, param&egrave;tre de l&rsquo;apprentissage comme action mis en avant par certains neuropsychologues comme Dehaene (2018). Par engagement actif, nous entendons le fait que l&rsquo;apprenant s&rsquo;implique dans son activit&eacute; au service de la r&eacute;ussite d&rsquo;un projet (la t&acirc;che en cours ou un objectif personnel), c&rsquo;est-&agrave;-dire tout &agrave; la fois une motivation, une fa&ccedil;on d&rsquo;envisager positivement la t&acirc;che, mais aussi la recherche et la mise en &oelig;uvre de moyens concrets (actions ou attitudes) pour atteindre son objectif. L&rsquo;engagement actif est vite apparu comme un pivot de tout activit&eacute; d&rsquo;apprentissage et donc de l&rsquo;apprentissage de l&rsquo;&eacute;criture non seulement individuel mais aussi collectif (cf. ci-dessous).</p> <p>Nous allons donc d&rsquo;abord nous interroger sur la notion de collaboration, notamment celle de collaboration conjointe qui caract&eacute;rise les pratiques d&rsquo;&eacute;criture collaborative que nous avons mises en place et analys&eacute;es. Nous pr&eacute;ciserons ensuite le cadre dans lequel s&rsquo;inscrit cette analyse, c&rsquo;est-&agrave;-dire celui des param&egrave;tres d&rsquo;apprentissage tels qu&rsquo;ils sont d&eacute;crits par les approches (neuro)cognitives, et parmi ces param&egrave;tres, tout particuli&egrave;rement celui d&rsquo;engagement actif[1]. Apr&egrave;s avoir d&eacute;crit notre dispositif ainsi que le corpus auquel nous avons abouti, nous pr&eacute;senterons une partie de l&rsquo;analyse du corpus, celle consacr&eacute;e &agrave; l&rsquo;engagement actif dont font preuve les apprenants, et nous proposerons une typologie de ce param&egrave;tre d&rsquo;apprentissage. Enfin, nous nous interrogerons sur les moyens d&rsquo;&eacute;valuer l&rsquo;appropriation des habilet&eacute;s scripturales par les apprenants.</p> <h2>1. Diversit&eacute; des notions de collaboration</h2> <p>On r&eacute;f&egrave;re g&eacute;n&eacute;ralement la notion de collaboration &agrave; Vygotski (1997-2013&nbsp;: 361-369). Il s&rsquo;agit alors d&rsquo;une relation binaire (deux acteurs)&nbsp;: un expert favorise la r&eacute;ussite d&rsquo;un &eacute;l&egrave;ve qui op&egrave;re au sein de sa zone de proche d&eacute;veloppement. Les d&eacute;finitions sont un peu circulaires puisque la zone de proche d&eacute;veloppement se d&eacute;finit par le fait que l&rsquo;&eacute;l&egrave;ve peut r&eacute;aliser une t&acirc;che, r&eacute;soudre un probl&egrave;me dans cette zone s&rsquo;il est aid&eacute; par un expert, et la collaboration se d&eacute;finit par le fait qu&rsquo;elle agit au sein d&rsquo;une zone de proche d&eacute;veloppement. Vygotski oppose ma&icirc;tre-expert et &eacute;l&egrave;ve. Dans les faits, l&rsquo;<em>apprenant</em> a pris la rel&egrave;ve de l&rsquo;<em>&eacute;l&egrave;ve</em> de l&rsquo;&eacute;poque de Vygotski[2], m&ecirc;me si le terme <em>apprenant</em> n&rsquo;est apparu que r&eacute;cemment[3] dans la litt&eacute;rature didactique[4]. Une autre diff&eacute;rence se manifeste entre la collaboration chez Vygotski et les conceptions actuelles&nbsp;: celui-ci la limitait &agrave; la relation ma&icirc;tre-&eacute;l&egrave;ve alors que cette notion a &eacute;t&eacute; &eacute;tendue &agrave; d&rsquo;autres r&ocirc;les. Portine (2001&nbsp;: 45) a propos&eacute; des sous-cat&eacute;gorisations de la notion de collaboration que nous reprenons (Figure 1). La collaboration verticale[5] est celle qui va de l&rsquo;enseignant(e)-expert &agrave; l&rsquo;apprenant&nbsp;; la collaboration transversale va d&rsquo;un co-apprenant localement reconnu comme expert par l&rsquo;enseignant(e) et par la classe (donc &laquo;&nbsp;distingu&eacute;&nbsp;&raquo;, <em>localement</em> r&eacute;f&eacute;rant ici &agrave; un domaine[6]) &agrave; un autre co-apprenant&nbsp;; la collaboration mixte correspond au cas o&ugrave; un(e) enseignant(e) s&rsquo;appuie sur un apprenant A dont il conna&icirc;t l&rsquo;expertise locale pour aider un apprenant B. Aujourd&rsquo;hui, nous pr&eacute;f&eacute;rons <em>collaboration oblique</em> (parce que cette d&eacute;nomination montre le mouvement en cause) &agrave; <em>collaboration mixte</em>. Ces trois modalit&eacute;s de collaboration sont asym&eacute;triques&nbsp;: un sujet poss&eacute;dant une expertise globale ou locale aide un sujet non-sachant, assume un r&ocirc;le de tuteur explicitement ou implicitement&nbsp;; il y a donc bien une forme de hi&eacute;rarchie institutionnelle (qui correspond aux trois cases de gauche dans la Figure 1).</p> <p style="text-align: center;"><img height="153" src="https://www.numerev.com/img/ck_229_6_image2.png" width="342" /></p> <p style="text-align: center;">Figure 1&nbsp;: Modalit&eacute;s de collaboration (inspir&eacute;e de Portine, 2001&nbsp;: 45)</p> <p>Pourtant, il existe un autre type de collaboration qui ne mobilise pas forc&eacute;ment une expertise m&ecirc;me locale, la <em>collaboration conjointe</em> (cf. case de droite de la Figure 1). C&rsquo;est le cas du travail soit &agrave; deux, soit en petits groupes r&eacute;duits (trois apprenants, quatre maximum sous certaines conditions). Nous laissons ici de c&ocirc;t&eacute; le travail &agrave; deux[7] (bien qu&rsquo;il rel&egrave;ve aussi de la collaboration conjointe) parce qu&rsquo;il a ses sp&eacute;cificit&eacute;s en pr&eacute;sentiel. Nous avons travaill&eacute; avec des groupes de trois apprenants. Dans ce cas, il peut y avoir des faits d&rsquo;expertise locale de la part d&rsquo;un(e) des apprenants sans toutefois &ecirc;tre reconnus ou consid&eacute;r&eacute;s comme hi&eacute;rarchisant les apprenants&nbsp;: une hypoth&egrave;se, une suggestion ou tout simplement une prise de parole peut d&eacute;clencher chez les deux autres un m&eacute;canisme de d&eacute;couverte et de progression sans instaurer pour autant une v&eacute;ritable hi&eacute;rarchie entre eux, d&rsquo;autant plus que chaque co-apprenant peut devenir &agrave; son tour &laquo;&nbsp;l&rsquo;expert&nbsp;&raquo;. Pour nous, c&rsquo;est toujours de la collaboration mais une modalit&eacute; sym&eacute;trique de collaboration[8].</p> <p>Du point de vue concret, la collaboration conjointe peut donner lieu &agrave; diff&eacute;rentes t&acirc;ches, &agrave; diff&eacute;rentes fonctions et &agrave; diff&eacute;rents objectifs&nbsp;:</p> <ul> <li>une collaboration &agrave; deux pour r&eacute;soudre un probl&egrave;me de type algorithmique (par exemple les dyades en math&eacute;matiques de Baudrit,1997) et ainsi am&eacute;liorer les performances de chaque apprenant dans la discipline,</li> <li>&nbsp;une collaboration &agrave; deux pour conforter et syst&eacute;matiser des constructions linguistiques en vue d&rsquo;une automatisation, comme dans les bin&ocirc;mes pr&ocirc;n&eacute;s en anglais langue &eacute;trang&egrave;re d&egrave;s le milieu des ann&eacute;es 1970 (<em>pairwork</em>),</li> <li>&nbsp;une collaboration &agrave; plusieurs pour r&eacute;soudre un probl&egrave;me en recourant &agrave; une heuristique,</li> <li>&nbsp;une collaboration &agrave; plusieurs pour &eacute;laborer une production orale (de type &laquo;&nbsp;communiqu&eacute; de presse&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;d&eacute;claration officielle&nbsp;&raquo;, etc.),</li> <li>&nbsp;une collaboration &agrave; plusieurs pour r&eacute;diger un texte (cette forme de collaboration est proche de ce que Saunders (1989) appelle <em>co-writing</em>[9]),</li> <li>&nbsp;etc.</li> </ul> <p>Ce typage de la modalit&eacute; conjointe de collaboration (que nous avons restreinte ici aux petits groupes) nous permet de voir comment elle peut fonctionner.</p> <h2>2. De la collaboration asym&eacute;trique &agrave; la collaboration conjointe</h2> <p>Il nous faut maintenant pr&eacute;ciser le type &laquo;&nbsp;modalit&eacute; conjointe de collaboration en petits groupes&nbsp;&raquo; en en fournissant le r&eacute;seau de notions connexes. Cela est tr&egrave;s important pour les enseignant(e)s qui ont besoin de savoir sur quoi s&rsquo;appuyer pour mener &agrave; bien des t&acirc;ches en collaboration et notamment en collaboration conjointe et pour les chercheur(e)s qui doivent d&eacute;finir la notion de collaboration conjointe.</p> <h3>2.1. La collaboration asym&eacute;trique et ses notions connexes</h3> <p>Comme nous avons distingu&eacute; la modalit&eacute; conjointe en partant des modalit&eacute;s asym&eacute;triques, nous allons proc&eacute;der de m&ecirc;me&nbsp;: partir des notions connexes des &laquo;&nbsp;modalit&eacute;s asym&eacute;triques de collaboration&nbsp;&raquo; (Figure 2, qui se lit dans le sens horaire en partant du haut) pour en distinguer les notions connexes de &laquo;&nbsp;modalit&eacute; conjointe de collaboration&nbsp;&raquo; (Figure 3).</p> <p style="text-align: center;"><img height="196" src="https://www.numerev.com/img/ck_229_6_image3.png" width="323" /></p> <p style="text-align: center;">Figure 2&nbsp;: Notions connexes de la collaboration asym&eacute;trique</p> <p>Ce r&eacute;seau de notions connexes se divise en deux sous-ensembles&nbsp;: celui des notions en amont du processus de collaboration, c&rsquo;est-&agrave;-dire ce que ce processus pr&eacute;suppose comme acquis&nbsp;; celui des notions en aval, c&rsquo;est-&agrave;-dire ce qu&rsquo;implique ce processus pour bien fonctionner. &Eacute;non&ccedil;ons ces deux types de notions&nbsp;:</p> <ul> <li>&nbsp;en amont de l&rsquo;action collaborative asym&eacute;trique (ce qui est mobilis&eacute; par la collaboration)&nbsp;:- <ul> <li>attention&nbsp;: l&rsquo;attention a fait l&rsquo;objet de nombreuses recherches et observations en neuropsychologie (de Camus, 1996, &agrave; Lachaux[10], 2015) qui montrent qu&rsquo;elle suppose une s&eacute;lection&nbsp;; l&rsquo;apprenant doit donc focaliser son attention sur l&rsquo;objet qu&rsquo;on lui propose en inhibant d&rsquo;autres focus potentiels&nbsp;;</li> <li>&nbsp;engagement actif&nbsp;: une proposition ou un feedback provenant d&rsquo;un enseignant ou d&rsquo;un tuteur n&eacute;cessite, pour devenir op&eacute;ratoire, non seulement l&rsquo;attention mais aussi l&rsquo;engagement de l&rsquo;apprenant-r&eacute;cepteur&nbsp;;</li> </ul> </li> <li>&nbsp;en aval de l&rsquo;action collaborative asym&eacute;trique (les effets induits)&nbsp;: <ul> <li>feedback d&rsquo;erreur&nbsp;: la qualit&eacute; du feedback d&rsquo;erreur &mdash;&nbsp;ou <em>retour sur erreur</em>&nbsp;&mdash;, qu&rsquo;il soit le fait d&rsquo;un enseignant ou d&rsquo;un tuteur, est tr&egrave;s importante&nbsp;; elle doit &ecirc;tre opportune (ne pas brouiller l&rsquo;activit&eacute; d&rsquo;apprentissage) et pertinente (claire et adapt&eacute;e au niveau atteint par l&rsquo;apprenant)&nbsp;;</li> <li><em>language awareness</em> (nous conservons ici l&rsquo;appellation en anglais, parce que c&rsquo;est le nom d&rsquo;un mouvement p&eacute;dagogique britannique[11], appellation que l&rsquo;on peut traduire par &laquo;&nbsp;approche r&eacute;fl&eacute;chie de la langue&nbsp;&raquo;)&nbsp;: le dispositif m&ecirc;me de collaboration entra&icirc;ne l&rsquo;apprenant &agrave; prendre conscience de ses comportements et strat&eacute;gies linguistiques lorsqu&rsquo;il produit et apprend &agrave; produire des &eacute;nonc&eacute;s&nbsp;; cette notion croise celles de r&eacute;solution de probl&egrave;me, de m&eacute;tacognition et de &laquo;&nbsp;feedback d&rsquo;erreur&nbsp;&raquo;)&nbsp;;</li> <li>m&eacute;talangagier&nbsp;: ici, comme nom et non comme adjectif (le m&eacute;talinguistique se limite &agrave; l&rsquo;auto-observation des productions &mdash;&nbsp;cf. <em>language awareness</em> ci-dessus&nbsp;&mdash;, le m&eacute;talangagier englobe aussi l&rsquo;adaptation des productions &agrave; la situation)&nbsp;;</li> <li>autonomie&nbsp;: l&rsquo;acte et le processus de collaboration est cens&eacute; entra&icirc;ner l&rsquo;autonomie de l&rsquo;apprenant, mais cette &laquo;&nbsp;acquisition&nbsp;&raquo; d&rsquo;une autonomie est le produit d&rsquo;une injonction &laquo;&nbsp;deviens autonome&nbsp;!&nbsp;&raquo; ce qui fait que l&rsquo;obtention de l&rsquo;autonomie peut r&eacute;ussir ou &eacute;chouer[12].</li> </ul> </li> </ul> <h3>&nbsp;2.2. La collaboration conjointe et ses notions connexes</h3> <p>En collaboration conjointe, le groupe d&rsquo;apprenants doit se saisir d&rsquo;une posture autonome (sinon le travail ne peut se faire). L&rsquo;autonomie aura donc ici un statut radicalement diff&eacute;rent de celui qu&rsquo;elle a dans l&rsquo;acte/processus de collaboration asym&eacute;trique. Alors que dans ce dernier, elle est, au mieux, cons&eacute;quence, dans la collaboration conjointe elle est requise (mais se heurte souvent &agrave; l&rsquo;institution, cf. Albero, 2010&nbsp;: 75). Et l&rsquo;on voit bien ici ce que signifie <em>autonomie</em>. Ce n&rsquo;est pas le laisser-faire ou la spontan&eacute;it&eacute;. Dans un environnement donn&eacute; (contexte d&rsquo;apprentissage et objectif &agrave; atteindre), les apprenants sont en capacit&eacute; de d&eacute;finir la strat&eacute;gie qu&rsquo;ils entendent suivre et de faire les hypoth&egrave;ses et les inf&eacute;rences permettant de viser et, finalement, d&rsquo;atteindre l&rsquo;objectif poursuivi (nous en verrons des exemples lors de l&rsquo;analyse du corpus).</p> <p>D&egrave;s lors, le r&eacute;seau des notions connexes du processus de collaboration conjointe devient le suivant [13] (cf. Figure 3)&nbsp;:</p> <ul> <li>&nbsp;en amont de l&rsquo;action collaborative conjointe (ce qui est mobilis&eacute; par la collaboration)&nbsp;: <ul> <li>autonomie (pour rappel, cf. ci-avant)&nbsp;;</li> <li>attention&nbsp;: on reprend ici ce qui a &eacute;t&eacute; dit pour la collaboration asym&eacute;trique&nbsp;;</li> <li>engagement actif&nbsp;: en collaboration conjointe, l&rsquo;engagement actif n&rsquo;est pas de m&ecirc;me type qu&rsquo;en collaboration asym&eacute;trique parce que dans ce dernier cas l&rsquo;engagement se fait vis-&agrave;-vis de l&rsquo;enseignant(e) ou du tuteur et non vis-&agrave;-vis des co-apprenants&nbsp;; nous serons amen&eacute;s &agrave; pr&eacute;ciser ci-dessous les modalit&eacute;s de cet engagement actif&nbsp;;</li> <li>empathie&nbsp;: remarquons que cette notion n&rsquo;est pas pr&eacute;sente pour la collaboration asym&eacute;trique ou alors elle est diffuse&nbsp;; en collaboration conjointe, elle est basique et n&eacute;cessaire parce que sans empathie la r&eacute;action d&rsquo;autrui ne peut &ecirc;tre prise en consid&eacute;ration, interpr&eacute;t&eacute;e et int&eacute;gr&eacute;e&nbsp;;</li> </ul> </li> <li>&nbsp;en aval de l&rsquo;action collaborative conjointe (les effets induits)&nbsp;: <ul> <li>rep&eacute;rage de l&rsquo;erreur (et non <em>feedback d&rsquo;erreur </em>parce que le <em>feedback d&rsquo;erreur </em>caract&eacute;rise la collaboration asym&eacute;trique)&nbsp;: en collaboration conjointe, l&rsquo;erreur que produit un apprenant n&rsquo;est confront&eacute;e ni &agrave; une correction ni &agrave; un processus de rem&eacute;diation[14] propos&eacute;s par un enseignant ou un tuteur&nbsp;; l&rsquo;erreur doit &ecirc;tre auto-rep&eacute;r&eacute;e ou rep&eacute;r&eacute;e par un co-apprenant qui peut proposer une correction mais qui est n&eacute;anmoins incapable de sugg&eacute;rer un processus de rem&eacute;diation&nbsp;;</li> <li>planification&nbsp;: il y a responsabilisation des apprenants, ce qui implique une capacit&eacute; de planification, chaque apprenant doit planifier ses actions ult&eacute;rieures et les r&eacute;&eacute;valuer, voire les inhiber, si celles-ci ne sont pas convergentes avec celles du ou des co-apprenants.</li> </ul> </li> </ul> <p style="text-align: center;"><img height="209" src="https://www.numerev.com/img/ck_229_6_image4.png" width="344" /></p> <p style="text-align: center;">Figure 3&nbsp;: Notions connexes de la collaboration conjointe (sym&eacute;trique)</p> <p>Selon Piaget (1969&nbsp;: 98-99), mais aussi bien d&rsquo;autres (par exemple, Dehaene, 2018), tous les apprentissages linguistiques b&eacute;n&eacute;ficient des interactions sociales[15]. Les pratiques collaboratives conjointes se d&eacute;roulent sous la forme d&rsquo;interactions sociales et participent donc des apprentissages. Mais cela entra&icirc;ne-t-il automatiquement des progr&egrave;s individuels&nbsp;?</p> <p>Afin de r&eacute;pondre &agrave; cette question, nous avons mis en place un protocole de formation, recourant &agrave; la collaboration conjointe, qui nous a fourni un corpus et permis des observations sur le processus d&rsquo;apprentissage. Nous avons alors d&eacute;cid&eacute; de faire porter notre attention, quant aux notions connexes en amont de la collaboration conjointe (cf. Figure 3 et ce qui la pr&eacute;c&egrave;de), sur l&rsquo;engagement actif pour trois raisons&nbsp;:</p> <ul> <li>&nbsp;l&rsquo;engagement actif est un acte individuel&nbsp;; il constitue donc bien une bonne mesure de l&rsquo;efficacit&eacute; individuelle du processus&nbsp;;</li> <li>&nbsp;l&rsquo;engagement actif mobilise plusieurs aptitudes (s&eacute;lection, focalisation, etc.)&nbsp;;</li> <li>&nbsp;l&rsquo;engagement actif implique l&rsquo;attention, autre notion connexe en amont.</li> </ul> <p>Les deux autres notions connexes en amont nous sont apparues comme soit acquise (l&rsquo;autonomie du fait du travail en petit groupe), soit ind&eacute;pendante des autres (l&rsquo;empathie[16]).</p> <p>Notre focalisation sur l&rsquo;engagement actif n&eacute;cessite toutefois que nous placions d&rsquo;abord ce param&egrave;tre particulier au sein du panorama d&rsquo;ensemble des param&egrave;tres de l&rsquo;acte d&rsquo;apprentissage.</p> <h2>3. Param&egrave;tres de l&rsquo;acte d&rsquo;apprentissage</h2> <p>L&rsquo;engagement actif constitue un des quatre piliers de l&rsquo;apprentissage selon Dehaene qui a synth&eacute;tis&eacute; les travaux r&eacute;alis&eacute;s en psychologie cognitive, en sciences cognitives et en neuropsychologie (Dehaene, 2018)[17]&nbsp;:</p> <ul> <li>&nbsp;attention,</li> <li>engagement actif,</li> <li>retour sur erreur,</li> <li>consolidation.</li> </ul> <p>Reprenons bri&egrave;vement chacun de ces quatre &laquo;&nbsp;piliers&nbsp;&raquo; afin d&rsquo;obtenir le panorama dans lequel s&rsquo;inscriront nos observations et analyses ci-dessous.</p> <p>(a) L&rsquo;attention</p> <p>Dehaene commence par l&rsquo;attention pour la raison suivante&nbsp;: l&rsquo;attention est un domaine d&rsquo;&eacute;tude des neuropsychologues (et Dehaene est un neuropsychologue)[18] mais, contrairement aux trois autres &laquo;&nbsp;piliers&nbsp;&raquo; (nous pr&eacute;f&eacute;rerons dor&eacute;navant <em>param&egrave;tre</em>), ce n&rsquo;est pas un param&egrave;tre sp&eacute;cifique des apprentissages&nbsp;: elle est &agrave; l&rsquo;&oelig;uvre dans de nombreuses activit&eacute;s comme la m&eacute;moire, l&rsquo;inf&eacute;rence, la focalisation, ou la s&eacute;lection d&rsquo;information pour la prise de d&eacute;cision, etc. L&rsquo;attention est un ph&eacute;nom&egrave;ne complexe parce qu&rsquo;il prend diff&eacute;rentes formes dans le cadre de la perception (dois-je finir de lire les consignes ou &eacute;couter l&rsquo;enseignant qui fait une remarque aupr&egrave;s d&rsquo;un camarade&nbsp;? que l&rsquo;on songe aussi &agrave; la pluralit&eacute; des param&egrave;tres environnementaux &agrave; prendre en compte lorsqu&rsquo;on conduit une voiture). Il peut alors y avoir des conflits cognitifs qui n&eacute;cessitent d&rsquo;inhiber certaines perceptions (Houd&eacute;, 2018) ou de r&eacute;sister &agrave; la distraction (Lachaux, 2015&nbsp;: 42). L&rsquo;attention suppose donc une hi&eacute;rarchisation des informations &agrave; disposition et la s&eacute;lection de l&rsquo;information qui para&icirc;t la plus pertinente. Le si&egrave;ge de l&rsquo;attention est dans la partie frontale du cerveau, ce que l&rsquo;on appelle le si&egrave;ge des fonctions ex&eacute;cutives. Auparavant, on nommait souvent <em>concentration</em> (<em>&ecirc;tre/rester concentr&eacute;</em>) ce que l&rsquo;on appelle aujourd&rsquo;hui <em>attention</em>, surtout depuis que les IRMf[19] ont permis d&rsquo;op&eacute;rer des localisations.</p> <p>(b) L&rsquo;engagement actif (compl&eacute;ment &agrave; ce qui a &eacute;t&eacute; dit plus haut)</p> <p>Bien que mis en seconde position par Dehaene, l&rsquo;engagement actif est consid&eacute;r&eacute; aujourd&rsquo;hui comme le param&egrave;tre central des apprentissages. En effet, sans engagement de la part de l&rsquo;apprenant, il ne peut y avoir mobilisation critique de l&rsquo;attention (dois-je focaliser mon attention sur tel ou tel point&nbsp;? c&rsquo;est-&agrave;-dire savoir trouver les &eacute;l&eacute;ments saillants et pertinents dans un environnement cognitif), ni prise en consid&eacute;ration et analyse de ses propres erreurs. Un autre point plus didactique (donc n&rsquo;int&eacute;ressant pas les neuropsychologues qui ignorent souvent les productions des didacticiens) est le suivant&nbsp;: l&rsquo;engagement actif exige pour l&rsquo;apprenant une double s&eacute;curit&eacute;&nbsp;: s&eacute;curit&eacute; cognitive (la t&acirc;che &agrave; accomplir doit se situer dans ce que Vygotski a appel&eacute; &laquo;&nbsp;zone de proche d&eacute;veloppement&nbsp;&raquo;, cf. Vygotski, 1997&nbsp;: 361-371 de l&rsquo;&eacute;dition de 2013) et s&eacute;curit&eacute; affective (l&rsquo;apprenant doit avoir confiance en lui-m&ecirc;me et savoir que sa parole sera &eacute;cout&eacute;e et prise en consid&eacute;ration). Nous proposerons plus loin une typologie de l&rsquo;engagement actif.</p> <p>(c) Le retour sur erreur (ou plut&ocirc;t, dans notre cas, le <em>rep&eacute;rage d&rsquo;erreur</em>)</p> <p>Nous avons vu plus haut (cf. aussi Figures 2 et 3) que ce &laquo;&nbsp;retour sur erreur&nbsp;&raquo; concernait la collaboration asym&eacute;trique. Il est en effet important, dans ce cas, que l&rsquo;apprenant sache identifier ce que l&rsquo;on appelle souvent <em>feedback</em> ou <em>r&eacute;troaction </em>de la part de l&rsquo;enseignant ou d&rsquo;un co-apprenant plus avanc&eacute;. Mais cette identification ne suffit pas. L&rsquo;apprenant doit aussi &ecirc;tre capable de dynamiser ce retour sur erreur. C&rsquo;est pourquoi il doit savoir inf&eacute;rer ce qu&rsquo;il doit faire &agrave; partir d&rsquo;un discours &eacute;valuatif (le bon enseignant ne dit pas &laquo;&nbsp;il faut faire cela&nbsp;&raquo; mais &laquo;&nbsp;il y a un probl&egrave;me&nbsp;&raquo; ou &laquo;&nbsp;il faudrait revoir cela&nbsp;&raquo;) puis effectuer des pr&eacute;dictions (&laquo;&nbsp;si je fais cela, le r&eacute;sultat sera-t-il meilleur ou non&nbsp;?&nbsp;&raquo;). En collaboration conjointe, le retour sur erreur de l&rsquo;enseignant(e) est remplac&eacute; par un &laquo;&nbsp;rep&eacute;rage d&rsquo;erreur&nbsp;&raquo; effectu&eacute; par un co-apprenant mais qui peut l&rsquo;&ecirc;tre &agrave; tort ou &agrave; raison, d&rsquo;o&ugrave; un d&eacute;bat n&eacute;cessaire au sein du groupe (on voit que l&rsquo;empathie est alors une donn&eacute;e importante).</p> <p>(d) Consolidation</p> <p>Par ce terme, Dehaene entend ce que l&rsquo;on appelait auparavant <em>automatisation</em>. Cette consolidation suppose l&rsquo;inscription et le maintien des connaissances (savoirs et savoir-faire) en m&eacute;moire &agrave; long terme ou MLT (par opposition &agrave; <em>m&eacute;moire &agrave; court terme</em> ou MCT ou <em>m&eacute;moire de travail</em> ou MT)[20]. Elle suppose r&eacute;activation (par <em>tissage</em>, terme emprunt&eacute; &agrave; Houd&eacute;, 2018&nbsp;: 121) et r&eacute;organisation des savoirs et des savoir-faire. Elle doit permettre des synth&egrave;ses et des organisations en r&eacute;seau (par exemple, on sait qu&rsquo;un mot nouveau pour &ecirc;tre acquis doit entrer dans un r&eacute;seau m&eacute;moriel de synonymes, d&rsquo;antonymes, etc.). Ce param&egrave;tre, pas plus que le pr&eacute;c&eacute;dent, ne saurait entrer dans le cadre de cet article.</p> <p>Nous consid&eacute;rerons donc l&rsquo;engagement actif comme le pivot de tout acte d&rsquo;apprentissage. C&rsquo;est pourquoi nous allons focaliser notre attention sur ce param&egrave;tre. Afin d&rsquo;assurer une meilleure compr&eacute;hension de notre propos, nous devons cependant pr&eacute;senter d&rsquo;abord notre dispositif et les donn&eacute;es qu&rsquo;il nous a permis de recueillir.</p> <h2>4. Notre dispositif et le corpus obtenu</h2> <p>Notre dispositif a &eacute;t&eacute; mis en place au sein d&rsquo;un semestre (12 semaines) de cours de fran&ccedil;ais langue &eacute;trang&egrave;re visant &agrave; am&eacute;liorer les comp&eacute;tences &eacute;crites de 15 apprenants adultes provenant de 10 pays diff&eacute;rents, de niveau B1-B2. Il ob&eacute;it &agrave; trois principes&nbsp;:</p> <p>(a) lier processus de lecture / processus d&rsquo;&eacute;criture (remplacer deux comp&eacute;tences s&eacute;par&eacute;es par deux comp&eacute;tences imbriqu&eacute;es et donc substituer une unique &laquo;&nbsp;comp&eacute;tence en litt&eacute;ratie&nbsp;&raquo;[21], cf. Hidden et Portine, 2017, &agrave; deux comp&eacute;tences, lecture/&eacute;criture, distingu&eacute;es)&nbsp;;</p> <p>(b) recourir &agrave; des &eacute;critures collaboratives afin de tester l&rsquo;impact de celles-ci sur les productions &nbsp;individuelles&nbsp;;</p> <p>(c) recourir &agrave; des applications informatis&eacute;es et aux r&eacute;seaux (nous utilisons notamment le logiciel Framapad&reg;) pour cet apprentissage en collaboration.</p> <p>Le point (a) n&rsquo;intervient pas dans la pr&eacute;sente &eacute;tude. En revanche, les points (b) et (c) seront au c&oelig;ur de notre propos. Nous pouvons pr&eacute;ciser les param&egrave;tres constitutifs du dispositif&nbsp;:</p> <ul> <li>&nbsp;dimension[22] spatiale&nbsp;: le cours a lieu dans une salle o&ugrave; tous les si&egrave;ges sont mobiles et pourvus de rabats pour poser documents et ordinateur portable&nbsp;; cela permet de varier les dispositions en groupes mais aussi de faire r&eacute;aliser des travaux individuels&nbsp;;</li> <li>dimension communicationnelle&nbsp;: interventions de l&rsquo;enseignant (communication hi&eacute;rarchique) et interactions entre apprenants (communication transversale) alternent&nbsp;;</li> <li>dimension p&eacute;dagogique et temporelle[23]&nbsp;: tout au long du semestre, nous alternons, en les corr&eacute;lant (<em>litt&eacute;ratie</em>), t&acirc;ches de compr&eacute;hension &eacute;crite et t&acirc;ches de production &eacute;crite&nbsp;; ces activit&eacute;s de production sont tant&ocirc;t individuelles (5 par apprenant), tant&ocirc;t collaboratives (3)&nbsp;; d&rsquo;autres t&acirc;ches le plus souvent &eacute;crites ont pour objectif de manifester le travail m&eacute;tacognitif des apprenants (elles seront d&eacute;crites plus loin)&nbsp;;</li> <li>dimension technologique&nbsp;: nous avons choisi le logiciel Framapad&reg; pour l&rsquo;&eacute;criture collaborative mais en le faisant utiliser en pr&eacute;sentiel afin de pouvoir observer les interactions entre les &eacute;tudiants pendant la r&eacute;daction ainsi que les enregistrer en vue d&rsquo;une analyse d&eacute;taill&eacute;e. Ce logiciel pr&eacute;sente plusieurs avantages&nbsp;: il permet de savoir qui &eacute;crit, car &agrave; chaque scripteur est assign&eacute;e une couleur d&rsquo;&eacute;criture. D&rsquo;autre part, il comporte un historique original qui permet de visionner en acc&eacute;l&eacute;r&eacute; l&rsquo;&eacute;laboration du texte dans ses moindres d&eacute;tails. Gr&acirc;ce &agrave; ce petit film qui retrace l&rsquo;&eacute;volution du pad (espace d&rsquo;&eacute;criture) et gr&acirc;ce &agrave; l&rsquo;enregistrement audio des interactions entre les &eacute;tudiants lors de la r&eacute;daction, il est possible de suivre tr&egrave;s exactement l&rsquo;&eacute;laboration de chaque texte et de savoir qui fait quoi &agrave; chaque instant.</li> </ul> <p>Le corpus obtenu est trimodal&nbsp;: papier, fichiers num&eacute;riques, enregistrements audio. Il comprend&nbsp;:</p> <ul> <li>&nbsp;les textes r&eacute;dig&eacute;s individuellement sur papier ou sous Word&reg;&nbsp;;</li> <li>les brouillons des textes r&eacute;dig&eacute;s individuellement&nbsp;;</li> <li>les textes r&eacute;dig&eacute;s en collaboration sur Framapad&reg; et export&eacute;s au format PDF&nbsp;;</li> <li>les enregistrements audio des interactions entre apprenants lors de l&rsquo;&eacute;criture collaborative&nbsp;;</li> <li>les historiques de l&rsquo;&eacute;criture des textes r&eacute;dig&eacute;s en collaboration sous forme de films (en acc&eacute;l&eacute;r&eacute;)&nbsp;;</li> <li>les textes manifestant les commentaires m&eacute;tacognitifs des apprenants&nbsp;;</li> <li>deux questionnaires remplis par les &eacute;tudiants&nbsp;: un questionnaire de d&eacute;but de cours sur leurs pratiques de lecture et d&rsquo;&eacute;criture en langue maternelle et en langue(s) &eacute;trang&egrave;re(s)&nbsp;; un questionnaire de fin de cours sur leurs pratiques de lecture et d&rsquo;&eacute;criture en fran&ccedil;ais&nbsp;;</li> <li>des observations r&eacute;alis&eacute;es <em>in vivo</em>&nbsp;;</li> <li>des fiches de r&eacute;vision collaborative.</li> </ul> <p>Nous allons maintenant pr&eacute;senter une partie de l&rsquo;analyse de ce corpus qui a &eacute;t&eacute; effectu&eacute;e en vue d&rsquo;&eacute;valuer l&rsquo;engagement actif de chaque apprenant dans la t&acirc;che r&eacute;dactionnelle. Pour ce faire, nous d&eacute;crivons tout d&rsquo;abord la forme de collaboration conjointe mise en place ainsi que la m&eacute;thodologie d&rsquo;analyse suivie.</p> <h2>5. Processus collaboratif d&rsquo;&eacute;criture et engagement actif</h2> <p>Dans la production &eacute;crite en collaboration conjointe, les pairs se partagent la responsabilit&eacute; du texte et collaborent dans toutes les t&acirc;ches&nbsp;: choix des th&egrave;mes, identification des destinataires, organisation de l&rsquo;activit&eacute; d&rsquo;&eacute;criture, corrections, diff&eacute;rentes &eacute;tapes de la r&eacute;daction, respect des conventions en mati&egrave;re d&rsquo;&eacute;criture, etc. Dans notre dispositif, aucun conseil n&rsquo;est donc donn&eacute; en mati&egrave;re d&rsquo;organisation et l&rsquo;utilisation du logiciel Framapad&reg; laisse une tr&egrave;s grande libert&eacute; aux apprenants, puisque chacun peut &eacute;crire sur le pad quand il le souhaite. Enfin, il est demand&eacute; aux apprenants de r&eacute;diger un texte comprenant au moins une s&eacute;quence argumentative&nbsp;; ceux-ci doivent donc &eacute;galement g&eacute;rer d&rsquo;&eacute;ventuelles divergences d&rsquo;opinion entre eux.</p> <p>Le corpus recueilli &eacute;tant tr&egrave;s important et l&rsquo;analyse des donn&eacute;es &eacute;tant encore en cours, nous allons pr&eacute;senter ici l&rsquo;analyse du travail collaboratif lors de la r&eacute;daction du premier texte. Apr&egrave;s avoir lu et expliqu&eacute; un article de presse pr&eacute;sentant un caf&eacute; qui emploie des personnes handicap&eacute;es, les apprenants se r&eacute;partissent en cinq groupes de trois pour r&eacute;diger une lettre au courrier des lecteurs, selon la consigne suivante&nbsp;: &laquo;&nbsp;Vous venez de lire dans le journal un article sur le caf&eacute; &ldquo;Joyeux&rdquo;. Pensez-vous que ce soit une bonne initiative ou non&nbsp;? Pourquoi&nbsp;? Ecrivez au courrier des lecteurs du journal pour donner votre opinion : commencez par r&eacute;sumer l&#39;article en quelques lignes puis dites ce que vous en pensez et pourquoi (environ 150 mots).&nbsp;&raquo;</p> <p>Au point de vue m&eacute;thodologique, nous avons d&rsquo;abord fait une analyse de contenu des enregistrements audio des interactions entre pairs lors de la r&eacute;daction collaborative (ce qui repr&eacute;sente 2h45 d&rsquo;enregistrement audio) et nous en avons transcrit des extraits[24]&nbsp;; d&rsquo;autre part, nous avons r&eacute;alis&eacute; un descriptif d&eacute;taill&eacute; de l&rsquo;&eacute;volution de chaque texte &agrave; partir de son historique. En croisant ces diff&eacute;rentes donn&eacute;es, nous avons pu reconstituer de fa&ccedil;on tr&egrave;s pr&eacute;cise comment s&rsquo;est d&eacute;roul&eacute; le processus de r&eacute;daction et notamment la collaboration sp&eacute;cifique de chaque pair au sein des groupes (qui &eacute;crit quoi&nbsp;; qui prend quelle initiative&nbsp;; qui propose quoi&nbsp;; etc.). Enfin, nous avons cherch&eacute; &agrave; rep&eacute;rer dans les descriptifs du processus r&eacute;dactionnel collaboratif des formes d&rsquo;engagement actif (soulign&eacute;es en gras ci-dessous), dont nous allons maintenant donner des exemples, puisque nous ne pouvons en pr&eacute;senter toutes les occurrences dans les limites de cet article. Nous avons &eacute;tiquet&eacute; les groupes auxquels nous r&eacute;f&eacute;rons ici de A &agrave; D.</p> <p>Dans le groupe A, c&rsquo;est Emma[25] qui <strong>&eacute;crit le plus</strong> sur le pad. Le fait de se charger de la r&eacute;daction nous semble bien une forme d&rsquo;engagement actif dans l&rsquo;activit&eacute; d&rsquo;&eacute;criture, puisque les &eacute;tudiants ont tous un ordinateur et peuvent donc &eacute;crire &agrave; tout moment. Gr&acirc;ce au visionnage des historiques, il est facile de comparer les apports de chaque &eacute;tudiant au texte commun&nbsp;: de fait, le plus souvent, tous les &eacute;tudiants du groupe participent &agrave; l&rsquo;&eacute;criture du texte (et parfois &eacute;crivent une phrase &agrave; deux voire &agrave; trois) ; dans un seul cas, une &eacute;tudiante du groupe B (Joyce) &eacute;crit tr&egrave;s peu sur le pad (seulement pour faire des corrections de d&eacute;tails). Emma <strong>prend</strong> aussi <strong>l&rsquo;initiative de lister les arguments</strong> sur le pad pendant la discussion qui pr&eacute;c&egrave;de la r&eacute;daction proprement dite de la partie argumentative de leur texte. C&rsquo;est le seul groupe qui a recours &agrave; cette strat&eacute;gie. Ces notes fonctionnent comme un brouillon puisqu&rsquo;elles restent durant la r&eacute;daction du texte, puis sont effac&eacute;es du pad. D&rsquo;autre part, lors de la recherche d&rsquo;id&eacute;es pour la partie argumentative, Emma <strong>propose d&rsquo;ajouter une partie</strong> sur les d&eacute;savantages&nbsp;: &laquo;&nbsp;on pense que c&rsquo;est [le caf&eacute;] une bonne id&eacute;e, mais peut-&ecirc;tre il y a aussi des d&eacute;savantages&nbsp;?&nbsp;&raquo; Apr&egrave;s la discussion sur ce point (recherche des d&eacute;savantages), elle <strong>propose une structure</strong> pour la suite de leur texte (un paragraphe avec les avantages puis un autre avec les d&eacute;savantages)&nbsp;: &laquo;&nbsp;En g&eacute;n&eacute;ral, on pense que c&rsquo;est une bonne id&eacute;e parce que bla bla bla, mais&hellip;&nbsp;&raquo;</p> <p>Un autre &eacute;tudiant du groupe, Nathan, s&rsquo;int&eacute;resse &eacute;galement &agrave; la structuration de leur texte et <strong>sugg&egrave;re de suivre les conventions du genre</strong> <em>essay</em> anglo-saxon (cet &eacute;tudiant est am&eacute;ricain)&nbsp;: &laquo;&nbsp;En anglais, quand j&rsquo;&eacute;cris un <em>essay</em>, je mets une introduction avec mon opinion et apr&egrave;s je mets les raisons&nbsp;&raquo;. Notons que cette suggestion donne lieu &agrave; une discussion assez longue entre les &eacute;tudiants et qu&rsquo;elle n&rsquo;est finalement pas retenue pour leur texte. Toujours dans le domaine de la rh&eacute;torique, Nathan <strong>propose</strong> aussi <strong>d&rsquo;ajouter des exemples</strong> pour &laquo;&nbsp;soutenir notre opinion&nbsp;&raquo;.</p> <p>La troisi&egrave;me &eacute;tudiante du groupe Cindy, elle, <strong>relance le processus de r&eacute;daction et/ou la recherche d&rsquo;id&eacute;es</strong>&nbsp;; au moins trois fois, elle dit&nbsp;: &laquo;&nbsp;Ensuite&hellip;&nbsp;&raquo; ou &laquo;&nbsp;Ensuite, quoi d&rsquo;autre&nbsp;?&nbsp;&raquo;. D&rsquo;autre part, quand la r&eacute;daction de la premi&egrave;re partie de leur texte est termin&eacute;e (la partie qui consiste &agrave; r&eacute;sumer l&rsquo;article), c&rsquo;est elle qui estime que cela suffit et qu&rsquo;il faut donc <strong>passer &agrave; la partie</strong> argumentative&nbsp;: &laquo;&nbsp;Ok, donc c&rsquo;est bon pour le r&eacute;sum&eacute; je pense&nbsp;&raquo;. Enfin, c&rsquo;est encore elle qui propose de <strong>passer &agrave; la r&eacute;daction </strong>du dernier paragraphe de leur texte, celui consacr&eacute; aux d&eacute;savantages du caf&eacute; &laquo;&nbsp;Joyeux&nbsp;&raquo;&nbsp;: &laquo;&nbsp;Peut-&ecirc;tre on peut mettre les d&eacute;savantages&nbsp;?&nbsp;&raquo;.</p> <p>Dans le groupe B, Samir <strong>recadre</strong> en d&eacute;but de r&eacute;daction en rappelant &agrave; Zara qui voudrait donner tout de suite son opinion qu&rsquo;il faut d&rsquo;abord r&eacute;sumer l&rsquo;article. Un peu plus tard, il <strong>propose de discuter</strong> avant de commencer &agrave; r&eacute;diger la partie argumentative&nbsp;: &laquo;&nbsp;On va commencer &agrave; donner notre avis mais on va discuter avant.&nbsp;&raquo;. A la fin, il <strong>sugg&egrave;re de relire le texte </strong>dans son ensemble, avant de le rendre &agrave; l&rsquo;enseignante.</p> <p>Zara, elle, parvient parfois &agrave; <strong>faire changer des d&eacute;cisions</strong> prises par Samir par exemple quand elle lui sugg&egrave;re de changer de place une phrase qu&rsquo;il a r&eacute;dig&eacute;e.</p> <p>Dans le groupe C, Bich <strong>reformule </strong>la consigne de r&eacute;daction afin d&rsquo;orienter leur travail&nbsp;: &laquo;&nbsp;d&rsquo;abord on r&eacute;sume un peu, on &eacute;crit les avantages&hellip;&nbsp;&raquo; Elle discute ensuite avec une autre &eacute;tudiante, Laura, afin de<strong> choisir le genre textuel &agrave; adopter</strong> (un article ou une lettre), puis d<strong>&rsquo;identifier le destinataire</strong> de leur texte. Vers la fin de la r&eacute;daction, les trois &eacute;tudiantes de ce groupe d&eacute;cident de <strong>se r&eacute;partir les trois derniers paragraphes du texte </strong>et de les &eacute;crire simultan&eacute;ment (chacune &eacute;crit son opinion &agrave; un endroit du pad). C&rsquo;est le seul groupe &agrave; proc&eacute;der de cette fa&ccedil;on.</p> <p>Dans le groupe D, la question de la <strong>gestion des divergences entre les pairs</strong> (aussi bien en termes de formulation qu&rsquo;en termes de contenu) est clairement pos&eacute;e par Elena&nbsp;: &laquo;&nbsp;Quand on veut &eacute;crire, on continue ou on fait comment&nbsp;? Par exemple, moi je veux dire autre chose&hellip;&nbsp;&raquo; En cas de d&eacute;saccord persistant (apr&egrave;s discussion), Arman <strong>d&eacute;cide d&rsquo;&eacute;crire ce qui lui semble bien </strong>tout en laissant aux deux autres la possibilit&eacute; de modifier ensuite ce qu&rsquo;il a r&eacute;dig&eacute;. Vers la fin de la r&eacute;daction, Elena sugg&egrave;re de<strong> v&eacute;rifier que leur texte a bien la longueur attendue</strong>.</p> <p>Cet &eacute;chantillonnage de formes d&rsquo;engagement actif de la part des apprenants nous permet de pr&eacute;ciser ce que nous entendons par cette notion et nous fournit une base pour la sous-cat&eacute;goriser et proposer ainsi une typologie.</p> <h2>6. Analyse et typologie de la notion d&rsquo;engagement actif</h2> <p>Les exemples de formes d&rsquo;engagement actif d&eacute;crits ci-dessus se r&eacute;p&eacute;tant dans le corpus observ&eacute; aussi bien chez un m&ecirc;me apprenant que chez d&rsquo;autres, nous en proposons une typologie qui rendra mieux compte de ce qui se passe r&eacute;ellement lors du travail collaboratif observ&eacute;.</p> <p>L&rsquo;engagement actif peut se situer &agrave; diff&eacute;rents niveaux&nbsp;: au sein d&rsquo;un cadre pr&eacute;alable (son <em>environnement</em>, ici, la consigne de r&eacute;daction et la double appartenance culturelle des apprenants&nbsp;; tout &eacute;crit s&rsquo;inscrit dans un certain cadre, sauf peut-&ecirc;tre la cr&eacute;ation litt&eacute;raire), au sein du travail de groupe (comment s&rsquo;organiser &agrave; trois pour r&eacute;diger un texte commun) et enfin dans le processus d&rsquo;&eacute;laboration textuelle lui-m&ecirc;me.</p> <p style="text-align: center;"><img height="627" src="https://www.numerev.com/img/ck_229_6_image5.png" width="605" /></p> <p style="text-align: center;">Tableau 1&nbsp;: Formes d&rsquo;engagement actif</p> <p>Ces types d&rsquo;engagement actif ne les caract&eacute;risent qu&rsquo;imparfaitement. Il nous faut maintenant pr&eacute;ciser deux autres points&nbsp;: leurs modalit&eacute;s d&rsquo;effectuation et les configurations impliqu&eacute;es par ces formes d&rsquo;engagement actif.</p> <p>On a constat&eacute; que l&rsquo;engagement actif peut se manifester selon deux modalit&eacute;s&nbsp;: soit par la prise d&rsquo;initiative (par exemple, Emma qui commence &agrave; prendre des notes sur le pad sans le commenter &agrave; l&rsquo;oral) soit, le plus souvent, par la suggestion qui peut &ecirc;tre suivie par une discussion en cas de d&eacute;saccord. &Eacute;tant donn&eacute; que le travail collaboratif implique une n&eacute;gociation continuelle avec les pairs, les apprenants doivent se mettre d&rsquo;accord non seulement sur les id&eacute;es, la formulation et la structuration de leur texte, mais aussi sur la fa&ccedil;on de proc&eacute;der pour &eacute;crire un texte (faut-il ou non faire un plan pr&eacute;alable ou/et un brouillon&nbsp;? faut-il ou non se relire &agrave; la fin&nbsp;? etc.) et pour &eacute;crire &agrave; plusieurs (r&ocirc;les au sein du groupe[26]).</p> <p>Concernant ce dernier point, le relev&eacute; des formes d&rsquo;engagement permet de d&eacute;terminer quels apprenants sont le plus engag&eacute;s dans la t&acirc;che r&eacute;dactionnelle et d&rsquo;observer des configurations diff&eacute;rentes au sein des groupes.</p> <p>Le groupe A appara&icirc;t ainsi comme un groupe assez homog&egrave;ne (aucune prise de pouvoir ni assignation de r&ocirc;le particulier)&nbsp;: bien que Nathan prenne moins souvent la parole que les deux autres &eacute;tudiantes, il se montre autant impliqu&eacute; qu&rsquo;elles. Les trois &eacute;tudiants s&rsquo;av&egrave;rent en fait tr&egrave;s compl&eacute;mentaires, chacun s&rsquo;engageant dans un domaine diff&eacute;rent&nbsp;: Emma dans la prise de notes et l&rsquo;ajout d&rsquo;une autre partie, Cindy dans la relance de la r&eacute;daction et Nathan dans les aspects rh&eacute;toriques.</p> <p>L&rsquo;autre groupe o&ugrave; l&rsquo;engagement est assez bien partag&eacute; est le groupe C, m&ecirc;me si Bich est un peu plus impliqu&eacute;e que les deux autres. Comme on l&rsquo;a vu plus haut, ce groupe a la particularit&eacute; de d&eacute;cider d&rsquo;un commun accord une r&eacute;partition du travail entre elles, pendant les 15 derni&egrave;res minutes du travail en groupe. Si les &eacute;tudiantes ne disent pas pourquoi elles adoptent soudain cette strat&eacute;gie, on peut faire l&rsquo;hypoth&egrave;se que c&rsquo;est pour pallier le manque de temps (elles sont en effet en retard sur les autres groupes), ou/et pour permettre &agrave; chacune d&rsquo;exprimer son opinion.</p> <p>L&rsquo;engagement est au contraire tr&egrave;s in&eacute;gal dans le groupe B, car il est surtout le fait de Samir qui semble d&eacute;cider de tout (auto-assignation d&rsquo;un r&ocirc;le)&nbsp;; il faut dire qu&rsquo;il ma&icirc;trise l&rsquo;activit&eacute; d&rsquo;&eacute;criture (il &eacute;tait journaliste de la presse &eacute;crite dans son pays d&rsquo;origine) et qu&rsquo;il a un meilleur niveau en fran&ccedil;ais que les deux autres. Zara parvient cependant &agrave; s&rsquo;engager &agrave; certains moments, mais dans une moindre mesure. En revanche, Joyce s&rsquo;implique tr&egrave;s peu malgr&eacute; son bon niveau en fran&ccedil;ais &eacute;crit.</p> <p>Le groupe D pr&eacute;sente &eacute;galement une dissym&eacute;trie en mati&egrave;re d&rsquo;engagement, car Arman qui est le plus impliqu&eacute; a des difficult&eacute;s &agrave; faire des concessions&nbsp;; dans le questionnaire de fin de cours, on comprend d&rsquo;ailleurs que cet &eacute;tudiant n&rsquo;a pas beaucoup appr&eacute;ci&eacute; cette exp&eacute;rience d&rsquo;&eacute;criture &agrave; trois. Ces exemples d&rsquo;h&eacute;t&eacute;rog&eacute;n&eacute;it&eacute; concernant l&rsquo;implication des pairs au sein d&rsquo;un m&ecirc;me groupe nous am&egrave;nent &agrave; penser que l&rsquo;engagement actif d&rsquo;un apprenant ne d&eacute;pend pas seulement de son bon vouloir mais aussi en partie de la posture de ses co-apprenants qui font alors partie de son environnement&nbsp;: un apprenant trop dominant peut en arriver &agrave; dissuader ses pairs de s&rsquo;impliquer vraiment, ce qui expliquerait le faible engagement de Joyce dans le travail du groupe B mentionn&eacute; plus haut[27].</p> <p>Cette diversit&eacute; dans les configurations au sein des groupes d&rsquo;apprenants r&eacute;sulte sans aucun doute de la modalit&eacute; de collaboration que nous avons choisie, ainsi que des particularit&eacute;s de notre dispositif&nbsp;: nous avons en effet privil&eacute;gi&eacute; une collaboration conjointe o&ugrave; les r&ocirc;les des membres de chaque groupe ne sont pas pr&eacute;d&eacute;finis, laiss&eacute; une grande libert&eacute; d&rsquo;organisation aux co-apprenants et choisi un logiciel de r&eacute;daction collaborative gr&acirc;ce auquel chacun peut &eacute;crire quand il le veut. Cet environnement de travail tr&egrave;s peu d&eacute;terminant nous permet ainsi d&rsquo;observer comment les co-apprenants s&rsquo;acquittent de la t&acirc;che de r&eacute;daction.</p> <p>En r&eacute;sum&eacute;, l&rsquo;engagement actif peut prendre diff&eacute;rentes formes lors d&rsquo;une activit&eacute; en collaboration (ici, la r&eacute;daction d&rsquo;un texte), se manifester selon plusieurs modalit&eacute;s et mettre en &eacute;vidence des configurations diverses au sein des groupes d&rsquo;apprenants. Il ressort de plus de l&rsquo;analyse du corpus que la plupart des apprenants sont impliqu&eacute;s &mdash;&nbsp;voire fortement impliqu&eacute;s&nbsp;&mdash; dans l&rsquo;activit&eacute; d&rsquo;&eacute;criture, ce qui favorise certainement l&rsquo;appropriation du processus d&rsquo;&eacute;criture par les apprenants. De quels moyens disposons-nous pour le v&eacute;rifier&nbsp;?</p> <h2>7. Comment se manifeste l&rsquo;appropriation du processus d&rsquo;&eacute;criture&nbsp;?</h2> <p>La question de l&rsquo;appropriation d&rsquo;un processus d&rsquo;&eacute;criture efficace par les apprenants est loin d&rsquo;&ecirc;tre ais&eacute;e &agrave; r&eacute;soudre&nbsp;: comment savoir si les apprenants se sont appropri&eacute;s des habilet&eacute;s scripturales en (fran&ccedil;ais) langue &eacute;trang&egrave;re&nbsp;? Nous allons proposer trois voies possibles.</p> <p>Tout d&rsquo;abord, nous avons v&eacute;rifi&eacute; dans les productions textuelles des apprenants si les derniers textes r&eacute;dig&eacute;s individuellement &eacute;taient de meilleure qualit&eacute; que les premiers. Pour ce faire, nous avons compar&eacute; les textes individuels r&eacute;dig&eacute;s au d&eacute;but, au milieu et en fin de semestre selon les crit&egrave;res suivants&nbsp;: la structuration et la coh&eacute;sion, la syntaxe et la correction plus locale (morphologie, lexique et orthographe). Il s&rsquo;av&egrave;re que les huit apprenants qui ont fait preuve d&rsquo;un engagement actif fort pendant l&rsquo;&eacute;laboration du texte font tous des progr&egrave;s, plus ou moins, selon un ou plusieurs des crit&egrave;res observ&eacute;s.</p> <p>Une seconde voie pour &eacute;valuer l&rsquo;appropriation consiste &agrave; recueillir et analyser les &laquo;&nbsp;commentaires m&eacute;tacognitifs&nbsp;&raquo; des apprenants sur l&rsquo;&eacute;criture collaborative. En effet, la m&eacute;tacognition[28] pouvant &ecirc;tre d&eacute;finie comme la connaissance, l&rsquo;analyse mais aussi l&rsquo;autocontr&ocirc;le, l&rsquo;autor&eacute;gulation ainsi que la planification par un individu de ses processus cognitifs (dont ses strat&eacute;gies d&rsquo;apprentissage), la verbalisation de cette activit&eacute; sous forme de commentaires m&eacute;tacognitifs, t&eacute;moigne d&rsquo;une prise en main des processus d&rsquo;apprentissage. Dans notre dispositif, les apprenants ont &eacute;t&eacute; interrog&eacute;s sur ce point &agrave; plusieurs reprises, comme le montre le tableau 2&nbsp;:</p> <p style="text-align: center;"><img height="249" src="https://www.numerev.com/img/ck_229_6_image6.png" width="605" /></p> <p style="text-align: center;">Tableau 2&nbsp;: Recueil des commentaires m&eacute;tacognitifs</p> <p>Nous ne pouvons pas entrer ici dans tous les d&eacute;tails de l&rsquo;analyse des r&eacute;ponses, mais nous allons en esquisser les grandes lignes. Presque tous les &eacute;tudiants (sauf Bich) avaient d&eacute;j&agrave; pratiqu&eacute; l&rsquo;&eacute;criture collaborative avant de participer &agrave; notre dispositif, soit en langue maternelle, soit en langue &eacute;trang&egrave;re, soit dans les deux. En tout d&eacute;but de semestre, la plupart sont d&rsquo;avis que l&rsquo;&eacute;criture collaborative peut faciliter l&rsquo;&eacute;criture individuelle. Par la suite, l&rsquo;opinion de d&eacute;part &eacute;volue diff&eacute;remment selon les apprenants. On observe quatre cas de figure&nbsp;: certains sont confort&eacute;s dans leur bonne opinion sur l&rsquo;&eacute;criture collaborative&nbsp;; d&rsquo;autres qui &eacute;taient sceptiques changent d&rsquo;avis en faveur de l&rsquo;&eacute;criture &agrave; plusieurs&nbsp;; chez d&rsquo;autres au contraire, on observe un revirement contre l&rsquo;&eacute;criture collaborative et le dernier groupe enfin garde une opinion mitig&eacute;e, voire d&eacute;favorable. Malgr&eacute; ces diff&eacute;rences[29] d&rsquo;un apprenant &agrave; l&rsquo;autre, on peut relever dans leurs propos un grand nombre d&rsquo;avantages de l&rsquo;&eacute;criture &agrave; plusieurs&nbsp;:</p> <ul> <li>on profite des id&eacute;es des autres (5 apprenants)&nbsp;;</li> <li>le texte est plus complet que si on l&rsquo;avait r&eacute;dig&eacute; seul&nbsp;;</li> <li>on partage, on compare ses id&eacute;es&nbsp;;</li> <li>cela permet de renforcer ses id&eacute;es&nbsp;;</li> <li>cela permet de r&eacute;fl&eacute;chir&nbsp;;</li> <li>cela permet d&rsquo;apprendre la grammaire ou de nouveaux mots qu&rsquo;une autre personne du groupe conna&icirc;t (4 apprenants)&nbsp;;</li> <li>on d&eacute;couvre de nouvelles fa&ccedil;ons d&rsquo;&eacute;crire (3 apprenants)&nbsp;;</li> <li>&nbsp;il est plus facile de corriger les erreurs &agrave; plusieurs.</li> </ul> <p>On note que les apprenants soulignent avant tout comme avantages l&rsquo;apport d&rsquo;id&eacute;es et de savoirs sur la langue &eacute;trang&egrave;re (grammaire, lexique), mais beaucoup moins une r&eacute;elle aide pour &eacute;crire. Ils n&rsquo;ont donc pas pris conscience des habilet&eacute;s scripturales que leurs pairs ont mises en &oelig;uvre lors de l&rsquo;&eacute;laboration du texte, souvent en les sugg&eacute;rant avant de les effectuer et m&ecirc;me parfois en leur en expliquant la n&eacute;cessit&eacute;, comme on l&rsquo;a vu lors du rep&eacute;rage des formes d&rsquo;engagement actif (cf. &sect;&nbsp;5 et &sect;&nbsp;6). Il s&rsquo;agit l&agrave; d&rsquo;une troisi&egrave;me voie pour &eacute;valuer l&rsquo;appropriation du processus par les apprenants.</p> <p>Le dispositif mis en place (enregistrement des interactions entre apprenants et historiques de l&rsquo;&eacute;volution des pads) permet de mettre au jour les comp&eacute;tences r&eacute;dactionnelles des apprenants, telles qu&rsquo;elles ont &eacute;t&eacute; list&eacute;es dans le tableau 1, notamment les lignes (a) et (c) (engagement dans un cadre et engagement dans l&rsquo;&eacute;laboration du texte). M&ecirc;me si toutes ces formes d&rsquo;engagement actif ne sont pas pr&eacute;sentes dans chaque groupe d&rsquo;apprenants (il faudrait faire un relev&eacute; par groupe), ce tableau montre que chaque apprenant ma&icirc;trise plusieurs phases du processus r&eacute;dactionnel et qu&rsquo;&agrave; eux tous, ils les ma&icirc;trisent toutes[30]. De plus, au sein de chaque groupe, on a vu que les formes d&rsquo;engagement actif se manifestent soit par l&rsquo;initiative d&rsquo;un apprenant, soit par la suggestion. Autrement dit, chaque apprenant b&eacute;n&eacute;ficie des initiatives et des suggestions de ses pairs, voire des explications de ces derniers en cas de discussion&nbsp;: par exemple, lorsque Samir sugg&egrave;re de relire le texte dans son ensemble avant de le rendre &agrave; l&rsquo;enseignante, il attire l&rsquo;attention des deux autres apprenantes sur une pratique qu&rsquo;elles n&rsquo;auraient peut-&ecirc;tre pas mise en &oelig;uvre si elles avaient r&eacute;dig&eacute; le texte individuellement (sur les cinq groupes observ&eacute;s, il s&rsquo;agit du seul &agrave; faire une r&eacute;vision du texte &agrave; la fin).</p> <h3>Conclusion</h3> <p>On h&eacute;site aujourd&rsquo;hui &agrave; distinguer &laquo;&nbsp;engagement actif&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;motivation&nbsp;&raquo;. Cependant, pour nous, ce qui pr&eacute;c&egrave;de permet d&rsquo;&eacute;tablir une diff&eacute;rence. En effet, on a longtemps consid&eacute;r&eacute; que l&rsquo;apprenant devait &ecirc;tre motiv&eacute; soit en choisissant ses domaines d&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t, soit en activant ses circuits de la r&eacute;compense&nbsp;: <em>ainsi, tu seras un bon &eacute;l&egrave;ve&nbsp;; ainsi, tu seras meilleur que X&nbsp;; ainsi, tu feras plaisir &agrave; tes parents&nbsp;; ainsi, tu auras un bon travail par la suite</em>. Tr&egrave;s populaire dans les ann&eacute;es 1970-1980, cette conception a perdu de l&rsquo;importance aujourd&rsquo;hui dans les discours dominants en didactique et on insiste plus sur les capacit&eacute;s et les aspirations de l&rsquo;apprenant, ce qui est plus en phase avec les travaux actuels en neuropsychologie&nbsp;: l&rsquo;engagement actif est fond&eacute; sur une pr&eacute;misse que l&rsquo;on peut &eacute;noncer comme &laquo;&nbsp;l&rsquo;&ecirc;tre humain a naturellement le d&eacute;sir d&rsquo;apprendre&nbsp;&raquo;. Que devient alors le r&ocirc;le de l&rsquo;enseignant(e) s&rsquo;il ne s&rsquo;agit plus de motiver les apprenants&nbsp;?</p> <p>Cette interrogation nous a conduits &agrave; mettre en place un dispositif reposant sur une collaboration conjointe et donc non hi&eacute;rarchisante de sorte que l&rsquo;environnement d&rsquo;apprentissage n&rsquo;entrave pas l&rsquo;aspiration profonde &agrave; apprendre et, m&ecirc;me, l&rsquo;encourage le plus possible. Nous avons pu ainsi montrer que l&rsquo;engagement actif de l&rsquo;apprenant favorise ses apprentissages dans la sph&egrave;re de l&rsquo;&eacute;criture (savoir r&eacute;diger un v&eacute;ritable texte avec un d&eacute;but, un d&eacute;veloppement et une fin&nbsp;; savoir articuler diff&eacute;rents arguments&nbsp;; savoir r&eacute;sumer un point de vue ou un autre texte&nbsp;; savoir &eacute;laborer un texte homog&egrave;ne et coh&eacute;rent). Du point de vue des pratiques des apprenants, nous avons aussi pu mettre en &eacute;vidence diff&eacute;rentes formes d&rsquo;engagement actif, c&rsquo;est-&agrave;-dire diff&eacute;rents types, diff&eacute;rentes modalit&eacute;s et diff&eacute;rentes configurations d&rsquo;effectuation. Un(e) enseignant(e) peut donc essayer de favoriser ces fa&ccedil;ons de faire pour am&eacute;liorer les apprentissages de ses apprenants.</p> <p>Cette notion d&rsquo;engagement actif nous a conduits &agrave; nous interroger sur l&rsquo;appropriation d&rsquo;habilet&eacute;s scripturales ad&eacute;quates par les apprenants (ceux-ci visent en effet soit la poursuite d&rsquo;&eacute;tudes en fran&ccedil;ais, soit une insertion professionnelle en France ou dans leur pays mais avec l&rsquo;usage du fran&ccedil;ais). Ce terme d&rsquo;<em>appropriation</em> est &agrave; la fois dangereux et utile. Il est dangereux parce qu&rsquo;il est hautement polys&eacute;mique, m&ecirc;me si on le restreint au sens de <em>s&rsquo;approprier</em> (un objet, un savoir, un savoir-faire), c&rsquo;est-&agrave;-dire le faire sien (sens qui nous concerne). Selon les agents de cette action de s&rsquo;approprier (une institution peut s&rsquo;approprier un dispositif &eacute;ducatif&nbsp;; un(e) enseignant(e) peut s&rsquo;approprier une m&eacute;thodologie&nbsp;; etc.), les modalit&eacute;s et les r&eacute;sultats de cette appropriation seront diff&eacute;rents. Bien &eacute;videmment, dans notre cas, l&rsquo;agent est un apprenant&nbsp;: il s&rsquo;approprie &agrave; la fois un savoir (d&eacute;claratif) et un savoir-faire (proc&eacute;dural). Et l&rsquo;on voit alors combien ce terme, restreint &agrave; ce sens, devient utile parce qu&rsquo;il montre bien quelle est la question ultime&nbsp;: comment faire pour qu&rsquo;un apprenant fasse sien, en quelque sorte s&rsquo;incorpore (au sens de l&rsquo;&eacute;naction), les savoirs et savoir-faire qui lui sont propos&eacute;s&nbsp;? Encore fallait-il trouver des crit&egrave;res pour appr&eacute;hender cette forme d&rsquo;appropriation par un agent donn&eacute;, l&rsquo;apprenant. Nous avons fourni trois voies.</p> <p>En ce qui concerne l&rsquo;&eacute;criture collaborative, nous avons vu qu&rsquo;elle permet aux co-apprenants de b&eacute;n&eacute;ficier des habilet&eacute;s scripturales de leurs pairs (m&ecirc;me si ces derniers n&rsquo;en sont pas toujours conscients), ce qui repr&eacute;sente un avantage ind&eacute;niable. Nous ne pouvons pas omettre cependant d&rsquo;&eacute;voquer ici une limite de l&rsquo;&eacute;criture &agrave; plusieurs&nbsp;: elle n&eacute;cessite en effet une certaine ma&icirc;trise du fran&ccedil;ais oral de la part des apprenants, afin qu&rsquo;ils puissent se faire comprendre de leurs pairs et s&rsquo;engager activement dans le processus d&rsquo;&eacute;criture. On retrouve ici une probl&eacute;matique connue depuis longtemps[31]: la compr&eacute;hension et la production de l&rsquo;&eacute;crit et de l&rsquo;oral vont-elles de pair ou peut-on les dissocier&nbsp;?</p> <p>Pour terminer, nous voudrions souligner combien il est important de prendre la personne de l&rsquo;apprenant comme un tout&nbsp;: <q>L&rsquo;imaginaire, les repr&eacute;sentations, le symbolique participent pleinement &agrave; la construction des usages.</q> [y compris au sein des petits groupes de travail, ajouterons-nous.] (Paquelin, 2009&nbsp;: 37).</p> <p>&nbsp;</p> <h3><strong>Bibliographie</strong></h3> <p>Albero, B. (2010). &laquo;&nbsp;De l&rsquo;id&eacute;el au v&eacute;cu&nbsp;: le dispositif confront&eacute; &agrave; ses pratiques&nbsp;&raquo;. Dans Albero, B. et Poteaux, N. (dir). <em>Enjeux et dilemmes de l&rsquo;autonomie</em>. Paris&nbsp;: &Eacute;ditions de la Maison des sciences de l&rsquo;homme, pp. 67-94.</p> <p>Andler, D. (dir). 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(2018). <em>Apprendre&nbsp;! Les talents du cerveau, le d&eacute;fi des machines</em>. Paris&nbsp;: Odile Jacob.</p> <p>Do, T. B. T. (2011). &laquo;&nbsp;Les impacts de la r&eacute;vision collaborative &eacute;tay&eacute;e&nbsp;: une recherche-action en didactique de la production &eacute;crite en fran&ccedil;ais langue &eacute;trang&egrave;re&nbsp;&raquo;. Th&egrave;se de doctorat, Universit&eacute; d&rsquo;Aix-Marseille 1.</p> <p>Eustache, F. et Guillery-Girard B. (2016). <em>La neuro&eacute;ducation. La m&eacute;moire au c&oelig;ur des apprentissages</em>. Paris&nbsp;: Odile Jacob.</p> <p>Fabre-Cols, C. (2002). <em>R&eacute;&eacute;crire &agrave; l&#39;&eacute;cole et au coll&egrave;ge : de l&#39;analyse des brouillons &agrave; l&#39;&eacute;criture accompagn&eacute;e</em>. Issy-les-Moulineaux&nbsp;: ESF.</p> <p>Fabre-Cols, C. (2004). &laquo;&nbsp;Brouillons scolaires et critique g&eacute;n&eacute;tique&nbsp;: nouveaux regards, nouveaux &eacute;gards&nbsp;?&nbsp;&raquo;. <em>Linx</em>, 51, pp.13-24.</p> <p>Flavell, J. H. (1976). &laquo;&nbsp;Metacognitive aspects of problem solving&nbsp;&raquo;. Dans Resnick L. B. (dir). <em>The nature of intelligence</em>. Hillsdale NJ: LEA, pp. 231-235.</p> <p>Flavell, J. H. (1985). &laquo;&nbsp;D&eacute;veloppement m&eacute;tacognitif&nbsp;&raquo;. Dans Bideaud J. et Richelle M.(dir). <em>Psychologie d&eacute;veloppementale&nbsp;: Probl&egrave;mes et r&eacute;alit&eacute;s</em>. Bruxelles&nbsp;: Mardaga, pp. 29-41.</p> <p>Fuchs, C. (2004). &laquo;&nbsp;Pour introduire &agrave; la linguistique cognitive&nbsp;&raquo;. Dans Fuchs, C. (dir). <em>La linguistique cognitive</em>. Paris&nbsp;: Ophrys, pp. 1-24.</p> <p>Gardner, R. C. (1985). <em>Social psychology and second language learning: the role of attitudes and motivation</em>, Londres, Edward Arnold.</p> <p>Hidden M.-O. 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Traduction de l&rsquo;ouvrage de 1934. &Eacute;dition de r&eacute;f&eacute;rence&nbsp;: 2013.</p> <p>&nbsp;</p> <p>[1] Nous avons repris &laquo;&nbsp;engagement actif&nbsp;&raquo; (Dehaene, 2018) parce que cette d&eacute;nomination nous para&icirc;t convenir le mieux au travail que nous avons men&eacute;. Ce que nous visons ici rel&egrave;ve, bien entendu, d&rsquo;une tradition d&rsquo;engagement de l&rsquo;apprenant qui a re&ccedil;u le nom de <em>motivation intrins&egrave;que</em> (Gardner, 1985), de <em>self-determination</em> (intraduisible en fran&ccedil;ais, Ryan et Edward, 2000). <em>Motivation intrins&egrave;que</em> s&rsquo;inscrit bien en psychologie sociale, <em>self-determination</em> en psychologie de l&rsquo;&eacute;ducation. <em>Engagement actif</em> a, pour nous, le m&eacute;rite de ne pas nous inscrire dans une tradition disciplinaire et d&rsquo;&ecirc;tre utilis&eacute; actuellement en fran&ccedil;ais. On trouve aussi <em>proactivit&eacute;</em>.</p> <p>[2] Distinguer &laquo;&nbsp;posture d&rsquo;&eacute;l&egrave;ve&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;posture d&rsquo;apprenant&nbsp;&raquo; suppose une individualisation. Il y a l&agrave; une question &eacute;pist&eacute;mo-historique&nbsp;: &agrave; l&rsquo;&eacute;poque de Vygotski, cette individualisation &eacute;tait difficile &agrave; faire parce que le marxisme de l&rsquo;&eacute;poque (ann&eacute;es 1930, aujourd&rsquo;hui le marxisme a &eacute;volu&eacute;) ne le permettait pas (Volo&scaron;inov et Bakhtine ont eu des ennuis pour cette raison). Si <em>apprenant</em> est apparu en didactique du fran&ccedil;ais langue &eacute;trang&egrave;re (didactique g&eacute;n&eacute;ralement pour adultes), c&rsquo;est donc du fait d&rsquo;une configuration &eacute;pist&eacute;mologique donn&eacute;e (cf. les deux notes suivantes). La posture d&rsquo;&eacute;l&egrave;ve est multidimensionnelle puisqu&rsquo;elle se caract&eacute;rise par le fait d&rsquo;&ecirc;tre membre de la classe, par le fait d&rsquo;&ecirc;tre en position d&rsquo;apprendre mais aussi d&rsquo;&eacute;ventuellement r&ecirc;ver pendant le cours ou de bavarder. Le Fran&ccedil;ais langue maternelle ne semble pas s&rsquo;&ecirc;tre appropri&eacute; cette question.</p> <p>[3] Cela s&rsquo;est fait en deux &eacute;tapes. Fin des ann&eacute;es 1970&nbsp;: du fait de l&rsquo;&eacute;mergence des approches communicatives, on utilise indiff&eacute;remment <em>&eacute;l&egrave;ve</em> ou <em>apprenant </em>pour souligner la centration sur le processus d&rsquo;apprentissage. Au cours des ann&eacute;es 1980, la notion s&rsquo;affine&nbsp;: <em>apprenant</em> est un r&ocirc;le dans le processus d&rsquo;apprentissage&nbsp;; <em>&eacute;l&egrave;ve</em> est une posture institutionnelle (cf. note pr&eacute;c&eacute;dente). La configuration &eacute;pist&eacute;mologique anglo-saxonne &eacute;tant un peu diff&eacute;rente (pragmatisme et individualisme), <em>learning</em> (apprentissage) est apparu plus t&ocirc;t au Royaume Uni, au d&eacute;but des ann&eacute;es 1970.</p> <p>[4] Nous nous situons ici dans le cadre du fran&ccedil;ais. En anglais, <em>learner</em> est assez rare (comme <em>teacher</em> ou <em>teaching</em> d&rsquo;ailleurs)&nbsp;: c&rsquo;est <em>learning</em> et donc le processus d&rsquo;apprentissage qui est plut&ocirc;t au c&oelig;ur des d&eacute;bats.</p> <p>[5] <em>Stricto sensu</em>, il faudrait parler de &laquo;&nbsp;modalit&eacute; verticale de collaboration&nbsp;&raquo;, nous abr&eacute;gerons la formulation.</p> <p>[6] Une classe n&rsquo;est jamais totalement homog&egrave;ne, mais un apprenant peut aussi ne pas l&rsquo;&ecirc;tre, pr&eacute;sentant une certaine expertise sur des &eacute;l&eacute;ments de savoir et de savoir-faire mais ne b&eacute;n&eacute;ficiant pas de cette expertise pour d&rsquo;autres &eacute;l&eacute;ments. Nous appelons ce type d&rsquo;expertise partielle une &laquo;&nbsp;expertise locale&nbsp;&raquo;.</p> <p>[7] Dyades, bin&ocirc;mes, <em>pairwork</em> en anglais.</p> <p>[8] Lors de l&rsquo;analyse du corpus, nous verrons que m&ecirc;me en collaboration conjointe, une certaine forme de dissym&eacute;trie dans les &eacute;changes peut s&rsquo;instaurer entre les pairs, comme au sein de tout groupe social (et avoir des effets positifs ou n&eacute;gatifs), mais qu&rsquo;il ne s&rsquo;agit pas alors d&rsquo;une v&eacute;ritable hi&eacute;rarchie, car les r&ocirc;les au sein du groupe ne sont pas d&eacute;finis &agrave; l&rsquo;avance.</p> <p>[9] Saunders d&eacute;crit cinq types d&rsquo;&eacute;criture collaborative&nbsp;: le <em>co-writing</em> (collaboration dans toutes les phases du processus d&rsquo;&eacute;criture)&nbsp;; le <em>co-publishing</em> (r&eacute;partition des parties du texte &agrave; r&eacute;diger entre pairs, concertation an amont et en aval de cette r&eacute;daction individuelle pour &eacute;laborer le texte commun)&nbsp;; le <em>co-responding </em>(r&eacute;vision par un groupe de pairs d&rsquo;un texte r&eacute;dig&eacute; individuellement)&nbsp;; <em>le co-editing</em> (r&eacute;vision par un pair d&rsquo;un texte r&eacute;dig&eacute; individuellement, puis &eacute;change avec l&rsquo;auteur du texte)&nbsp;; le <em>writing-helping</em> (appel &agrave; l&rsquo;aide ponctuelle d&rsquo;un pair lors d&rsquo;une r&eacute;daction individuelle).</p> <p>[10]Le programme ATOLE (ATtentif &agrave; l&#39;&eacute;cOLE, https://project.crnl.fr/atole/attentif-ecole/presentation-0), financ&eacute; par l&rsquo;ANR a &eacute;t&eacute; lanc&eacute; par Jean-Philippe Lachaux (Inserm) en 2014.</p> <p>[11] <em>Language Awareness</em> d&eacute;signe en effet un mouvement didactique britannique qui cherche &agrave; pallier le fait que la grammaire ne joue pas un r&ocirc;le important en Grande Bretagne, ce qui provoque souvent une faiblesse linguistique (en langue maternelle et en langues &eacute;trang&egrave;res) chez les &eacute;l&egrave;ves. Une meilleure traduction que celle que nous donnons ici (mais qui demanderait des commentaires) serait&nbsp;: &laquo;&nbsp;sensibilisation au fait langagier&nbsp;&raquo;. Pour des d&eacute;veloppements sur <em>language awareness,</em> voir notamment James et Garrett, 1992.</p> <p>[12] Voir Linard, 2003&nbsp;: 242 ( <q>Le fait de l&rsquo;imposer [l&rsquo;autonomie] comme mod&egrave;le ordinaire entra&icirc;ne une cascade de questions.</q>).</p> <p>[13] Nous invitons le lecteur &agrave; comparer chaque item aux items pr&eacute;c&eacute;dents, cf. Figure 2.</p> <p>[14] Depuis qu&rsquo;elle est &agrave; la mode dans les circuits de formation des enseignants, la rem&eacute;diation est souvent confondue avec la correction. C&rsquo;est une erreur. Alors qu&rsquo;une correction peut &ecirc;tre une r&eacute;ponse &agrave; une erreur unique, la rem&eacute;diation suppose une r&eacute;currence de l&rsquo;erreur. Alors qu&rsquo;une correction est imm&eacute;diate (ou diff&eacute;r&eacute;e &agrave; la fin de la le&ccedil;on), la rem&eacute;diation est un processus qui prend du temps. Alors que la correction est constat d&rsquo;une erreur et remplacement de cette erreur par la forme correcte, la rem&eacute;diation repose sur une analyse (pourquoi cette erreur&nbsp;?) et fournit une strat&eacute;gie et un chemin pour la surmonter.</p> <p>[15]&nbsp;<q> L&rsquo;&oelig;uvre remarquable de Freinet [&hellip;] a rejoint les deux v&eacute;rit&eacute;s sans doute les plus centrales de la psychologie des fonctions cognitives&nbsp;: que le d&eacute;veloppement des op&eacute;rations intellectuelles proc&egrave;de de l&rsquo;action effective [&hellip;]&nbsp;; que [la] coordination g&eacute;n&eacute;rale des actions comporte n&eacute;cessairement une dimension sociale [&hellip;]. </q></p> <p>[16] L&rsquo;empathie m&eacute;riterait une analyse sp&eacute;cifique, certainement en rapport avec les dissym&eacute;tries &eacute;ventuelles au sein de chaque groupe (cette question sera &eacute;voqu&eacute;e ci-dessous).</p> <p>[17] La question du ou des apprentissages int&eacute;resse les neuropsychologues depuis d&eacute;j&agrave; plusieurs ann&eacute;es, en t&eacute;moignent, par exemple&nbsp;: deux num&eacute;ros de la <em>Revue de neuropsychologie, neurosciences cognitives et cliniques</em>, les num&eacute;ros 3&nbsp;: 1 (2001) et 4&nbsp;: 1 (2012), mais aussi le fait qu&rsquo;un psychologue cognitif soucieux des apprentissages comme Olivier Houd&eacute; se soit ralli&eacute; au courant de la &laquo;&nbsp;neuro&eacute;ducation&nbsp;&raquo; (cf. Houd&eacute;, 2018).</p> <p>[18] Dans un premier temps, on a pu r&eacute;f&eacute;rer les questions d&rsquo;apprentissage aux sciences cognitives (psychologie, philosophie de l&rsquo;esprit, informatique, linguistique &mdash;&nbsp;voir Fuchs, 2004&nbsp;&mdash;, intelligence artificielle) puis les neurosciences sont devenues &agrave; la mode mais ce terme repr&eacute;sente un conglom&eacute;rat (neuropsychologie, neurophysiologie, neurobiologie, etc.), le point commun &eacute;tant l&rsquo;&eacute;tude des r&eacute;seaux de neurones, donc d&rsquo;atomes constitutifs du fonctionnement humain. Cela a une implication&nbsp;: le fait de privil&eacute;gier g&eacute;n&eacute;ralement les processus <em>bottom &gt; up</em> et de rel&eacute;guer au second plan les processus <em>top &gt; down</em>. Notons aussi que les sciences cognitives continuent d&rsquo;exister mais alors qu&rsquo;elles &eacute;taient auparavant centr&eacute;es sur la psychologie cognitive, elles le sont de plus en plus sur les neurosciences (Andler, 2004&nbsp;: 664-672). Or ces comp&eacute;titions disciplinaires ne sont pas sans effets (montants des subventions, contrats de recherche, publicit&eacute; journalistique notamment) et influencent les discours dominants&nbsp;; il faut donc conserver un regard critique.</p> <p>[19] On nomme IRMf, <em>imagerie par r&eacute;sonance magn&eacute;tique fonctionnelle</em>, l&rsquo;utilisation de l&rsquo;IRM pour &eacute;tudier le fonctionnement (normal) du cerveau, par opposition &agrave; l&rsquo;IRMa qui &eacute;tudie les dysfonctionnements anatomiques. L&rsquo;EEG (&eacute;lectroenc&eacute;phalographie) et l&rsquo;IRMf sont les deux principales sources de connaissance actuellement utilis&eacute;es pour la compr&eacute;hension des m&eacute;canismes c&eacute;r&eacute;braux.</p> <p>[20] La question de la m&eacute;moire et la distinction entre MCT/MT (mobilisation ponctuelle pour fixer l&rsquo;attention et recueillir l&rsquo;information) et MLT (m&eacute;morisation durable de l&rsquo;information) ont sans doute fait l&rsquo;objet de trop peu de travaux en fran&ccedil;ais langue &eacute;trang&egrave;re. La MCT/MT est plus accessible que la MLT dont on conna&icirc;t encore mal le fonctionnement. Pour une pr&eacute;sentation g&eacute;n&eacute;rale de la probl&eacute;matique de la m&eacute;moire et des apprentissages, voir Eustache &amp; Guillery-Girard, 2016.</p> <p>[21] Nous reprendrons notre d&eacute;finition du concept de <em>litt&eacute;ratie</em> (ou <em>litt&eacute;racie</em>) donn&eacute;e dans Hidden &amp; Portine, 2017. Le concept de litt&eacute;ratie est r&eacute;cent en fran&ccedil;ais (environ une vingtaine d&rsquo;ann&eacute;es) et est calqu&eacute; sur l&rsquo;anglais (<em>literacy</em> qui globalise l&rsquo;activit&eacute; &eacute;crite, comme le faisait d&rsquo;ailleurs le grec classique entre le 6&egrave;me si&egrave;cle et le 2&egrave;me si&egrave;cle av. J.-C. avec <em>grammatikē technē</em>). Il a &eacute;t&eacute; traduit par &laquo;&nbsp;entr&eacute;e dans l&rsquo;&eacute;crit&nbsp;&raquo; pour l&rsquo;&eacute;cole primaire en France, pas toujours avec succ&egrave;s.</p> <p>[22] Nous nommons ici <em>dimension</em> ce qui est souvent nomm&eacute; <em>design</em> ou <em>conception</em> au Qu&eacute;bec.</p> <p>[23] Nous avons conjoint &laquo;&nbsp;dimension p&eacute;dagogique&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;dimension temporelle&nbsp;&raquo;, parce que cela convient &agrave; notre dispositif, mais nous savons que ce n&rsquo;est pas toujours le cas (exemple aujourd&rsquo;hui historique&nbsp;: le SGAV qui distinguait clairement les deux pour des raisons de m&eacute;thodologie).</p> <p>[24] L&rsquo;analyse de contenu consiste &agrave; d&eacute;crire le corpus de fa&ccedil;on tr&egrave;s pr&eacute;cise (X propose telle chose, prend telle position) et &agrave; r&eacute;sumer les passages-cl&eacute;s. La transcription (pour une analyse de discours) donne &laquo;&nbsp;le mot &agrave; mot&nbsp;&raquo; produit. Chaque m&eacute;thode a son utilit&eacute;. L&rsquo;analyse de contenu permet de suivre l&rsquo;activit&eacute; de chaque pair au sein du groupe et de d&eacute;couvrir ses connaissances et ses doutes ainsi que ses arguments. L&rsquo;analyse de discours, en donnant les &laquo;&nbsp;fa&ccedil;ons de dire&nbsp;&raquo; fournit des donn&eacute;es interpr&eacute;tables (par exemple, une interron&eacute;gative peut &ecirc;tre soit une question un peu alambiqu&eacute;e soit une affirmation d&eacute;guis&eacute;e). Nous utiliserons des donn&eacute;es d&rsquo;analyse de contenu et des donn&eacute;es d&rsquo;analyse de discours. Il est &agrave; noter que la proc&eacute;dure de transcription est tr&egrave;s lourde et demande plusieurs niveaux de v&eacute;rification.</p> <p>[25] Les pr&eacute;noms des apprenants ont &eacute;t&eacute; chang&eacute;s.</p> <p>[26] Ces r&ocirc;les peuvent &ecirc;tre sym&eacute;triques (tous les membres fonctionnent sur un pied d&rsquo;&eacute;galit&eacute;) ou non (un(e) membre du groupe prend le pouvoir et impose ses points de vue&nbsp;; un r&ocirc;le de secr&eacute;taire est impos&eacute; &agrave; un(e) membre du groupe&nbsp;; etc.). Mais s&rsquo;il y a dissym&eacute;trie, il ne faut pas confondre celle-ci avec les modalit&eacute;s asym&eacute;triques de la collaboration qui le sont institutionnellement (cf. la Figure 1 et son commentaire). Cette dissym&eacute;trie au sein d&rsquo;un groupe n&rsquo;est en effet pas institutionnelle mais organisationnelle&nbsp;: dans tout groupe humain (classe, section locale d&rsquo;un parti ou d&rsquo;un syndicat, groupe d&rsquo;amis, etc.), il peut y avoir ou non des assignations de r&ocirc;les non institutionnelles. C&rsquo;est bien entendu la m&ecirc;me chose ici.</p> <p>[27] On observe ici un effet plut&ocirc;t n&eacute;gatif de l&rsquo;asym&eacute;trie au sein d&rsquo;un groupe&nbsp;; dans d&rsquo;autres cas, une prise d&rsquo;initiative importante de la part d&rsquo;un co-apprenant peut au contraire avoir un effet positif d&rsquo;entra&icirc;nement ou de guidage du groupe.</p> <p>[28] Notion propos&eacute;e par le psychologue (psychologie d&eacute;veloppementale) John Flavell (1976, 1985).</p> <p>[29] Les changements d&rsquo;avis peuvent tenir &agrave; deux causes&nbsp;: le constat d&rsquo;une am&eacute;lioration de ses propres comp&eacute;tences&nbsp;; le v&eacute;cu au sein du groupe (dans ce cas, le changement d&rsquo;avis tient &agrave; une bonne ou &agrave; une mauvaise exp&eacute;rience).</p> <p>[30] Ce qui correspond bien au fait, d&eacute;j&agrave; mentionn&eacute;, qu&rsquo;un premier objectif d&rsquo;une &eacute;criture collaborative peut &ecirc;tre l&rsquo;am&eacute;lioration des textes produits, ce qui rend les apprenants plus fiers de leur production et accro&icirc;t donc leur motivation (ce n&rsquo;&eacute;tait pas, rappelons-le, le but de la recherche pr&eacute;sent&eacute;e ici).</p> <p>[31] Rappelons qu&rsquo;aux d&eacute;buts de l&rsquo;&eacute;criture, et vraisemblablement jusqu&rsquo;au 8&egrave;me si&egrave;cle, pour comprendre un texte &eacute;crit il fallait l&rsquo;oraliser d&rsquo;abord &agrave; haute voix puis en le subvocalisant.</p> <p class="MsoNoSpacing" style="text-align:justify">&nbsp;</p>