<p>Article</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:center"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><strong><span style="font-size:12.0pt">La didactique du grec et du latin &agrave; l&rsquo;&egrave;re de la mondialisation&nbsp;: refonder les enseignements par le d&eacute;sir de langues</span></strong></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:center">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><strong><span style="font-size:12.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; 1 Le probl&egrave;me</span></strong></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Dire que l&rsquo;enseignement des langues anciennes en France conna&icirc;t, ces derni&egrave;res ann&eacute;es, des heures difficiles serait un euph&eacute;misme &ndash; il serait plus juste de parler de l&rsquo;agonie de cet enseignement qui, comme chaque agonie, annonce la mort. Le tout r&eacute;cent rapport que &nbsp;P. Charvet et D. Bauduin ont remis &agrave; M. le ministre J.-M. Blanquer souligne bien l&rsquo;effondrement des effectifs constant depuis dix ans, accentu&eacute; au moment de la mise en place de la r&eacute;cente r&eacute;forme du coll&egrave;ge (Charvet et Bauduin, 2018&nbsp;: 24). En effet, nous, les enseignants de langues anciennes, avons perdu au cours des neuf derni&egrave;res ann&eacute;es plus de 40&nbsp;000 &eacute;l&egrave;ves, ph&eacute;nom&egrave;ne t&eacute;moignant bien de la d&eacute;saffection de nos disciplines (Charvet et Bauduin, 2018&nbsp;: 23). Est-il possible alors, dans un contexte aussi difficile, de mener une r&eacute;flexion autour du d&eacute;sir des langues et de la subjectivit&eacute;&nbsp;? Et si oui, de quelle mani&egrave;re peut-on introduire le principe du d&eacute;sir dans l&rsquo;enseignement du grec et du latin ? Autrement dit, quelles sont les pratiques didactiques susceptibles d&rsquo;&eacute;veiller le d&eacute;sir chez les apprenants&nbsp;? Contrairement &agrave; ce que l&rsquo;on pourrait croire, ces questions-l&agrave; sont, &agrave; notre sens, centrales pour une vraie refondation de nos enseignements. Nous allons ainsi chercher &agrave; mettre en &eacute;vidence certains probl&egrave;mes de la didactique actuelle, des solutions qui existent d&eacute;j&agrave;, et &agrave; proposer une approche fortement ancr&eacute;e dans l&rsquo;id&eacute;e du d&eacute;sir de langues. &nbsp;</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><strong><span style="font-size:12.0pt">1.1 Les origines du probl&egrave;me</span></strong></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">Revenons tout d&rsquo;abord rapidement sur les raisons de la d&eacute;saffection&nbsp;des langues anciennes &eacute;voqu&eacute;e plus haut. Elles sont multiples et se devinent, pour certaines, sans qu&rsquo;il soit n&eacute;cessaire de les expliciter. Par exemple, dans ce &laquo;&nbsp;march&eacute; des langues&nbsp;&raquo;, qui s&rsquo;est d&eacute;velopp&eacute; sous l&rsquo;impulsion du monde n&eacute;olib&eacute;ral, il n&rsquo;y a que peu de place pour le grec ancien et le latin, car si la mondialisation &ndash; et l&rsquo;ouverture &agrave; l&rsquo;Autre comme son corollaire &ndash; ont en effet amen&eacute; au premier plan la diversit&eacute; linguistique, elles l&rsquo;ont fait, bien entendu, surtout dans la synchronie. Ainsi, nous ne sommes pas surpris d&rsquo;apprendre, gr&acirc;ce &agrave; ce m&ecirc;me rapport Charvet, que l&rsquo;enseignement des langues anciennes ne se porte gu&egrave;re mieux dans d&rsquo;autres pays europ&eacute;ens et qu&rsquo;en Allemagne, par exemple, on a perdu 23% des effectifs durant les neuf derni&egrave;res ann&eacute;es, contre 8% en France pour la m&ecirc;me p&eacute;riode (Charvet et Bauduin 2018&nbsp;: 23)<a href="#_ftn1" name="_ftnref1" style="text-decoration:underline" title=""><span style="font-size:12.0pt">[1]</span></a>. </span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">D&rsquo;autres raisons encore tiennent &agrave; des probl&egrave;mes plus sp&eacute;cifiques &agrave; la soci&eacute;t&eacute; fran&ccedil;aise, comme une certaine volont&eacute; politique, pr&eacute;sente depuis de nombreuses d&eacute;cennies, d&rsquo;&eacute;liminer l&rsquo;enseignement du grec et du latin, consid&eacute;r&eacute; comme &eacute;litiste et d&eacute;pass&eacute; par les exigences du monde contemporain<a href="#_ftn2" name="_ftnref2" style="text-decoration:underline" title=""><span style="font-size:12.0pt">[2]</span></a>. Les cons&eacute;quences d&rsquo;une telle orientation de la politique &eacute;ducative se manifestent depuis quelques ann&eacute;es &agrave; plusieurs niveaux&nbsp;: l&rsquo;effondrement des effectifs dans le secondaire a entra&icirc;n&eacute; leur effondrement dans le sup&eacute;rieur &eacute;galement et ce fait, associ&eacute; &agrave; la disparition d&rsquo;un CAPES sp&eacute;cifique de lettres classiques, a provoqu&eacute; une crise grave du recrutement des professeurs de lettres anciennes (Charvet et Bauduin, 2018&nbsp;: 57). Et pourtant, le rapport Charvet se veut optimiste et consid&egrave;re que ce mouvement est r&eacute;versible, au prix d&rsquo;un certain nombre de changements qui doivent &ecirc;tre r&eacute;alis&eacute;s. Cependant, si l&rsquo;on regarde de pr&egrave;s ce que pr&eacute;conisent P. Charvet et D. Bauduin, on peut se demander si les approches didactiques pr&ocirc;n&eacute;es ne peuvent pas &ecirc;tre enrichies par l&rsquo;id&eacute;e du d&eacute;sir des langues et si cette derni&egrave;re peut r&eacute;ellement &ecirc;tre envisag&eacute;e dans le cadre d&rsquo;un enseignement institutionnalis&eacute; du grec et du latin. </span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><strong><span style="font-size:12.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; 1.2 Du nouveau et de l&rsquo;ancien&nbsp;: le rapport Charvet</span></strong></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">Le rapport sur la valorisation des langues et cultures de l&rsquo;Antiquit&eacute; r&eacute;alis&eacute; par P. Charvet et D. Bauduin a le grand m&eacute;rite d&rsquo;assouplir un dogme qui a longtemps pr&eacute;valu dans la didactique des langues et cultures de l&rsquo;Antiquit&eacute;, &agrave; savoir le dogme des&nbsp;textes authentiques<a href="#_ftn3" name="_ftnref3" style="text-decoration:underline" title=""><span style="font-size:12.0pt">[3]</span></a>. En effet, l&rsquo;insistance sur la lecture des textes authentiques, c&rsquo;est-&agrave;-dire des&nbsp;plus grands auteurs grecs et romains, et cela d&egrave;s les premi&egrave;res heures d&rsquo;apprentissage, a caus&eacute; beaucoup de tort &agrave; nos enseignements. Les apprenants ayant d&eacute;j&agrave; du mal avec la compr&eacute;hension d&rsquo;un texte en fran&ccedil;ais, se retrouvaient confront&eacute;s &agrave; des textes de Tite-Live par exemple, dont il fallait non seulement saisir le sens, mais aussi le contexte culturel. Le rapport Charvet a enfin et fort heureusement assoupli cette exigence des programmes, en nous rappelant que les Anciens eux-m&ecirc;mes apprenaient le grec et le latin non pas &agrave; l&rsquo;aide de leurs propres chefs-d&rsquo;&oelig;uvre, mais &agrave; l&rsquo;aide des mat&eacute;riaux didactiques sp&eacute;cifiques &ndash; pourquoi alors se l&rsquo;interdire aujourd&rsquo;hui (Charvet et Bauduin, 2018&nbsp;: 106)&nbsp;? </span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">Cependant, ce rapport suit aussi, &agrave; bien des &eacute;gards, les pr&eacute;conisations qui reviennent r&eacute;guli&egrave;rement dans tous les programmes des langues et cultures de l&rsquo;Antiquit&eacute; (LCA), anciens et en vigueur, et d&rsquo;autres documents officiels &eacute;manant du Minist&egrave;re de l&rsquo;&Eacute;ducation nationale. En effet, les auteurs nous disent&nbsp;:</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt">L&rsquo;esprit de la mission de <em>Valorisation des langues et cultures de l&rsquo;Antiquit&eacute; </em>n&rsquo;est pas de privil&eacute;gier une discipline pour elle-m&ecirc;me, mais d&rsquo;ancrer une formation g&eacute;n&eacute;rale et fondamentale &agrave; la langue fran&ccedil;aise, ainsi qu&rsquo;&agrave; la culture actuelle, avec l&rsquo;objectif d&rsquo;assurer une meilleure ma&icirc;trise des outils de d&eacute;veloppement personnel et civique des &eacute;l&egrave;ves.&nbsp;(<span style="font-size:12.0pt">Charvet et Bauduin, 2018&nbsp;: 6</span>)</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">Ainsi, l&rsquo;on n&rsquo;apprend ni le latin ni le grec pour eux-m&ecirc;mes, mais parce que ces apprentissages permettent de consolider, par exemple, l&rsquo;apprentissage du fran&ccedil;ais. En cela, le rapport Charvet suit les nouveaux programmes, con&ccedil;us lors de la mise en place de la r&eacute;forme du coll&egrave;ge. Les nouveaux programmes pr&eacute;voient en effet un enseignement destin&eacute; surtout &agrave; am&eacute;liorer les comp&eacute;tences des &eacute;l&egrave;ves dans le domaine de la langue fran&ccedil;aise<a href="#_ftn4" name="_ftnref4" style="text-decoration:underline" title=""><span style="font-size:12.0pt">[4]</span></a>&nbsp;:</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt">La d&eacute;couverte du latin qui a fourni le substrat &agrave; partir duquel le fran&ccedil;ais s&#39;est constitu&eacute; au fil des &eacute;volutions et des emprunts &agrave; d&#39;autres langues, et du grec qui a servi de base au vocabulaire savant, favorise une meilleure compr&eacute;hension des fonctionnements de la langue fran&ccedil;aise et aide au d&eacute;veloppement de comp&eacute;tences lexicales et s&eacute;mantiques.&nbsp;</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">Autrement dit, l&rsquo;apprentissage du grec et du latin est toujours con&ccedil;u en tant qu&rsquo;<em>outil </em>pour un autre apprentissage et l&rsquo;on se garde bien de promouvoir l&rsquo;enseignement de ces langues pour elles-m&ecirc;mes. Cette frilosit&eacute; est certainement due, en bonne partie, &agrave; l&rsquo;histoire de l&rsquo;enseignement des lettres classiques en Europe d&rsquo;une mani&egrave;re g&eacute;n&eacute;rale et en France plus particuli&egrave;rement et &agrave; son statut de marqueur social. La &laquo;&nbsp;question du latin&nbsp;&raquo; rel&egrave;ve finalement plus de la sociologie que de la didactique, comme l&rsquo;ont d&eacute;j&agrave; soulign&eacute; entre autres l&rsquo;historienne Fran&ccedil;oise Waquet et le sociologue Philippe Cibois<a href="#_ftn5" name="_ftnref5" style="text-decoration:underline" title=""><span style="font-size:12.0pt">[5]</span></a>. D&rsquo;ailleurs, les d&eacute;tracteurs de ces enseignements les qualifient encore aujourd&rsquo;hui d&rsquo;&eacute;litistes, alors que l&rsquo;on sait qu&rsquo;il n&rsquo;en est plus rien et que la voie royale ne passe plus par les lettres classiques<a href="#_ftn6" name="_ftnref6" style="text-decoration:underline" title=""><span style="font-size:12.0pt">[6]</span></a>. L&rsquo;&eacute;litisme des langues anciennes doit aussi &ecirc;tre mis en lien avec le fait que ces langues donnent un acc&egrave;s direct aux <em>humanit&eacute;s gr&eacute;co-latines</em> En m&ecirc;me temps, le statut de <em>langues mortes</em> place l&rsquo;enseignement des langues anciennes dans une position d&rsquo;inf&eacute;riorit&eacute; par rapport aux autres langues, &eacute;tant donn&eacute; que l&rsquo;on ne peut pas les pratiquer, les parler, les rendre vivantes<a href="#_ftn7" name="_ftnref7" style="text-decoration:underline" title=""><span style="font-size:12.0pt">[7]</span></a>. Le rapport aux langues anciennes se montre ainsi comme assez ambivalent, puisque l&rsquo;on consid&egrave;re qu&rsquo;elles sont &agrave; la fois beaucoup plus et beaucoup moins qu&rsquo;une autre langue. En envisageant ce probl&egrave;me non pas du seul point de vue de l&rsquo;enseignement institutionnalis&eacute; des langues, mais du point de vue de la pr&eacute;sence des <em>&eacute;tudes classiques </em>dans la soci&eacute;t&eacute; contemporaine, Fran&ccedil;ois Hartog a r&eacute;cemment mis en &eacute;vidence ce caract&egrave;re double de nos &eacute;tudes, &agrave; la fois plus et moins qu&rsquo;une discipline (Hartog, 2011). </span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; </span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; <span style="font-size:12.0pt">Finalement, quels que soient les efforts des d&eacute;fenseurs des langues anciennes pour poser ces enseignements sur des bases nouvelles, r&eacute;guli&egrave;rement ils se retrouvent rattrap&eacute;s par la longue histoire de nos disciplines. Les enseignements sont peut-&ecirc;tre accessibles &agrave; tous, mais leur ambition est toujours bien diff&eacute;rente &ndash; et distincte &ndash; de celle de l&rsquo;enseignement des langues vivantes. Et au milieu de tous ces efforts, une v&eacute;rit&eacute; simple peut nous &eacute;chapper, comme le souligne Ch. Delattre en analysant la didactique des langues anciennes propos&eacute;e par A. Armand, &agrave; savoir l&rsquo;id&eacute;e que le grec et le latin sont avant tout des langues et &laquo;&nbsp;que ce n&rsquo;est que par un accident de l&rsquo;histoire qu&rsquo;on les r&eacute;duit &agrave; un ensemble de textes fig&eacute;s et accompagn&eacute;s d&rsquo;une grammaire elle-m&ecirc;me d&eacute;finitive&nbsp;&raquo; (Delattre, 2009&nbsp;: 59). Bien avant Ch. Delattre, les antiquisants britanniques et nord-am&eacute;ricains ont su d&eacute;velopper &agrave; partir de cette &eacute;vidence leurs propres m&eacute;thodes d&rsquo;apprentissage, mais en France leurs travaux sont rest&eacute;s longtemps sans &eacute;cho<a href="#_ftn8" name="_ftnref8" style="text-decoration:underline" title=""><span style="font-size:12.0pt">[8]</span></a>. </span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Revenons donc au point de d&eacute;part, c&rsquo;est-&agrave;-dire au constat que le grec et le latin ont &eacute;t&eacute; et sont toujours, m&ecirc;me si elles manquent de locuteurs, des langues. Sans chercher &agrave; am&eacute;liorer notre fran&ccedil;ais, sans chercher &agrave; devenir meilleur citoyen, sans chercher &agrave; rendre l&rsquo;apprentissage du grec et du latin utile, r&eacute;fl&eacute;chissons d&rsquo;abord seulement &agrave; ce fait simple&nbsp;: le grec et le latin sont des langues ayant une certaine sonorit&eacute; et une certaine sensualit&eacute;. De plus en plus d&rsquo;enseignants et d&rsquo;apprenants sont aujourd&rsquo;hui int&eacute;ress&eacute;s et m&ecirc;me s&eacute;duits par cette &eacute;vidence et il est ainsi possible d&rsquo;envisager de susciter le d&eacute;sir du grec et du latin &agrave; travers cette &laquo;&nbsp;vivification&nbsp;&raquo; des langues anciennes, pour ne pas dire mortes.</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><strong><span style="font-size:12.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; 2 Revenir en arri&egrave;re&nbsp;: le grec et le latin en tant que langues</span></strong></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">Cette &eacute;vidence simple &ndash; que le grec et le latin ne sont pas que des textes, que ce sont avant d&rsquo;&ecirc;tre des textes des langues &ndash; a permis &agrave; un certain nombre d&rsquo;antiquisants contemporains d&rsquo;&eacute;tablir un rapport diff&eacute;rent &agrave; l&rsquo;Antiquit&eacute;. Charles Delattre, professeur de langue et litt&eacute;rature grecques &agrave; l&rsquo;Universit&eacute; de Lille, qui anime depuis plus de dix ans d&eacute;j&agrave; un atelier de conversation en grec ancien connu sous le nom de &laquo;&nbsp;cercle grec&nbsp;&raquo; (&kappa;ύ&kappa;&lambda;&omicron;&sigmaf; ἑ&lambda;&lambda;&eta;&nu;&iota;&kappa;ό&sigmaf;), d&eacute;crit de la mani&egrave;re suivante sa propre (re)d&eacute;couverte de cette nouvelle dimension de la langue grecque&nbsp;:</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt">Pour un hell&eacute;niste classique, l&rsquo;apprentissage du grec moderne conduit souvent a un [...] choc linguistique [...] Une langue ancienne fig&eacute;e par un enseignement scripturaire est soudain r&eacute;vivifi&eacute;e, r&eacute;invent&eacute;e par une langue qui lui est apparent&eacute;e sans lui &ecirc;tre identique, et qui surtout s&rsquo;exp&eacute;rimente dans un rapport qui n&rsquo;avait jamais &eacute;t&eacute; con&ccedil;u pour le grec ancien. Alors que la lecture de textes antiques se r&eacute;sume le plus souvent &agrave; un processus de traduction, m&ecirc;me rapide, la lecture de textes en grec moderne non seulement prouve qu&rsquo;une langue &agrave; d&eacute;clinaisons peut &ecirc;tre ma&icirc;tris&eacute;e et non annon&eacute;e, mais am&egrave;ne aussi, en raison de ressemblances &eacute;videntes et de jeux d&rsquo;&eacute;cho &agrave; d&eacute;couvrir le plaisir de la lecture pour des textes en grec ancien.&nbsp;(Delattre, 2009&nbsp;: 60)</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">L&rsquo;aspect le plus important de la red&eacute;couverte de la langue grecque d&eacute;crite par Ch. Delattre, &agrave; notre sens du moins, r&eacute;side dans la notion du plaisir de la lecture, quoique l&rsquo;universitaire lillois insiste sur le fait qu&rsquo;il n&rsquo;entend pas r&eacute;volutionner par son approche orale l&rsquo;enseignement du grec&nbsp;(Delattre, 2009&nbsp;: 64). Ces r&eacute;serves se comprennent facilement, lorsque l&rsquo;on sait que l&rsquo;institution universitaire a pu &ecirc;tre m&eacute;fiante par le pass&eacute; envers les essais de parler le grec et le latin ou de les enseigner en utilisant les m&eacute;thodes venant des langues vivantes, comme s&rsquo;il s&rsquo;agissait d&rsquo;une entreprise subversive. On peut &eacute;voquer, &agrave; titre d&rsquo;exemple, la m&eacute;fiance des autorit&eacute;s universitaires et scolaires &agrave; l&rsquo;&eacute;gard de nos coll&egrave;gues ayant utilis&eacute; la m&eacute;thode de latin du professeur danois Hans Henning &Oslash;rberg (Rimbault, 2012). Et en effet, il y a sinon une subversion, du moins un possible renversement de perspective dans cette approche vivante des langues anciennes, puisqu&rsquo;elle ouvre la voie &agrave; une perception diff&eacute;rente de l&rsquo;Antiquit&eacute;, faite de plaisir et d&rsquo;imagination. Cependant, parmi ceux qui pratiquent le grec et le latin vivants, certains seulement cherchent &agrave; refonder compl&egrave;tement notre fa&ccedil;on d&rsquo;aborder l&rsquo;Antiquit&eacute;, alors que d&rsquo;autres mettent en avant des motivations strictement pragmatiques.</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><strong><span style="font-size:12.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; 2.1 Le latin et le grec oralis&eacute;s&nbsp;: le plaisir ou l&rsquo;utilit&eacute;&nbsp;?</span></strong></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Les enseignants pratiquant le grec et le latin vivants, s&rsquo;ils convoquent tous l&rsquo;id&eacute;e de redonner vie &agrave; ces langues, lib&eacute;rant ainsi la tradition classique de son c&ocirc;t&eacute; poussi&eacute;reux et empes&eacute;, n&rsquo;&eacute;voquent pas syst&eacute;matiquement les notions du plaisir ou du d&eacute;sir de langues et ne vont pas tous jusqu&rsquo;&agrave; chercher &agrave; rendre le pass&eacute; pr&eacute;sent &agrave; nous aujourd&rsquo;hui<a href="#_ftn9" name="_ftnref9" style="text-decoration:underline" title=""><span style="font-size:12.0pt">[9]</span></a>. La m&eacute;thode oralis&eacute;e n&rsquo;a souvent d&rsquo;autre but que de rendre l&rsquo;apprentissage des langues anciennes plus efficace, effet b&eacute;n&eacute;fique que tout le monde accorde d&eacute;sormais &agrave; la pratique oralis&eacute;e du grec et du latin. </span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Le latiniste Claude Fi&eacute;vet, professeur &agrave; l&rsquo;Universit&eacute; de Pau, fut parmi les premiers universitaires fran&ccedil;ais &agrave; reconna&icirc;tre les possibilit&eacute;s d&rsquo;un renouveau de la didactique des langues anciennes en passant par une m&eacute;thode d&rsquo;apprentissage s&rsquo;inspirant des celles de langues vivantes. En effet, ce dernier a d&eacute;velopp&eacute; une m&eacute;thode audio-orale destin&eacute;e aux grands d&eacute;butants qui s&rsquo;est av&eacute;r&eacute;e comme particuli&egrave;rement efficace et a finalement &eacute;t&eacute; appliqu&eacute;e &agrave; tous les &eacute;tudiants, d&eacute;butants comme sp&eacute;cialistes<a href="#_ftn10" name="_ftnref10" style="text-decoration:underline" title=""><span style="font-size:12.0pt">[10]</span></a>. De nos jours, on assiste &agrave; un d&eacute;veloppement sans pr&eacute;c&eacute;dent de m&eacute;thodes vivantes dans l&rsquo;enseignement des langues anciennes &agrave; l&rsquo;Universit&eacute;, en France comme &agrave; l&rsquo;&eacute;tranger<a href="#_ftn11" name="_ftnref11" style="text-decoration:underline" title=""><span style="font-size:12.0pt">[11]</span></a>. Les propositions p&eacute;dagogiques adapt&eacute;es aux &eacute;l&egrave;ves du secondaire qui prennent appui sur la m&eacute;thode du professeur Fi&eacute;vet se multiplient &eacute;galement ces derni&egrave;res ann&eacute;es au sein des groupes de travail dans les diff&eacute;rentes acad&eacute;mies. Il est toutefois &agrave; souligner que les enseignants pr&ocirc;nant cette m&eacute;thode se gardent bien d&rsquo;&eacute;voquer le plaisir, l&rsquo;imagination ou encore l&rsquo;amour pour les langues anciennes et mettent en exergue leur volont&eacute; d&rsquo;approcher le latin oralement tout simplement pour qu&rsquo;ensuite les apprenants puissent lire les textes authentiques plus rapidement et plus facilement<a href="#_ftn12" name="_ftnref12" style="text-decoration:underline" title=""><span style="font-size:12.0pt">[12]</span></a>. Cela est &eacute;videmment tout &agrave; fait l&eacute;gitime, mais nous voudrions insister sur une approche orale qui a pour vocation non seulement de faciliter la lecture des&nbsp;textes authentiques, mais aussi de rapprocher l&rsquo;apprentissage des langues anciennes d&rsquo;une nouvelle mani&egrave;re d&rsquo;aborder l&rsquo;histoire, qui s&rsquo;efforce de recr&eacute;er les mondes anciens dans tous leurs aspects et de les rendre vivants pour l&rsquo;apprenant du XXI<sup>e </sup>si&egrave;cle.</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Parmi les enseignants qui soulignent la part du plaisir induite par une pratique vivante des langues anciennes se trouve Paula Saffire, qui a enseign&eacute; le grec ancien par le biais de la conversation pendant plus de vingt ans aux Etats-Unis. Cette longue exp&eacute;rience lui a permis de comprendre l&rsquo;importance du plaisir dans le processus de l&rsquo;apprentissage&nbsp;:</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt">Experience shows me that students enjoy very much communicating out loud in ancient Greek. Why? Because it makes Greek come alive and, as William Blake said, &ldquo;Life delights in life.&rdquo; Genuine communication is simply enjoyable for humans. Enjoyment is no trivial matter; we ought not to underrate it. If relaxation conserves energy, enjoyment generates it. And an enormous amount of energy is needed for students to absorb the patterns of ancient Greek. We teachers will be asking students to learn, for example, a verb that has about 120 forms. If we can boost their energy for learning by giving them an enjoyable experience, they will have a far better chance of success.&nbsp;(Saffire, 2006&nbsp;: 160)</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">Au del&agrave; de ces remarques tr&egrave;s int&eacute;ressantes sur l&rsquo;importance du plaisir dans l&rsquo;apprentissage du grec ancien, on peut s&rsquo;interroger sur le changement de paradigme que sugg&egrave;re la mise en voix du grec et du latin. Car l&rsquo;insistance m&ecirc;me avec laquelle certains adeptes du grec et du latin vivants reviennent sur un seul r&eacute;sultat recherch&eacute;, &agrave; savoir une meilleure compr&eacute;hension du texte authentique, sous-entend que les r&eacute;sultats pourraient &ecirc;tre bien plus riches, mais que l&rsquo;on se refuse de les poursuivre. En effet, le latiniste allemand J&uuml;rgen Leonhardt, en r&eacute;fl&eacute;chissant sur l&rsquo;avenir du latin, insiste sur la n&eacute;cessit&eacute; absolue de d&eacute;velopper une approche plus imm&eacute;diate des langues anciennes. Il s&rsquo;agit en r&eacute;alit&eacute; d&rsquo;inscrire la pratique du grec et du latin vivants dans une d&eacute;marche plus g&eacute;n&eacute;rale, qui se manifeste d&eacute;j&agrave; dans une approche diff&eacute;rente de l&rsquo;histoire :</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Ce nouvel int&eacute;r&ecirc;t pour la pratique active du latin correspond &eacute;galement &agrave; une mani&egrave;re &nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; fondamentalement diff&eacute;rente d&rsquo;aborder l&rsquo;histoire. La conception de l&rsquo;analyse du pass&eacute; que le XIX<sup>e </sup>si&egrave;cle a &eacute;labor&eacute; en mettant l&rsquo;accent sur sa dimension th&eacute;orique et scientifique a certes &nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; influenc&eacute; durablement de nombreuses disciplines telles que la philologie, l&rsquo;histoire de l&rsquo;art ou &nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; la sociologie historique, mais elle est d&eacute;sormais concurrenc&eacute;e par une approche beaucoup plus &nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; imm&eacute;diate de l&rsquo;histoire&nbsp;: cette nouvelle optique s&rsquo;efforce de rendre pr&eacute;sents, presque palpable, &nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; la vie des hommes qui nous ont pr&eacute;c&eacute;d&eacute;s sur cette terre en la pr&eacute;sentant sous forme de films, &nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; de reconstitutions, de reconstructions virtuelles, ou m&ecirc;me par le truchement des jeux de r&ocirc;les, &nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; au cours duquel chaque participant compose son propre personnage du pass&eacute;.&nbsp;(Leonhardt, &nbsp; 2010&nbsp;: 442-443)</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">Une approche r&eacute;ellement vivifiante des langues anciennes peut donc &ecirc;tre mise au service de cette fa&ccedil;on nouvelle d&rsquo;aborder l&rsquo;histoire, qui repose sur l&rsquo;effort de rendre les faits pass&eacute;s sensibles, &laquo;&nbsp;palpables&nbsp;&raquo; pour reprendre le mot de J. Leonhardt. Il s&rsquo;agit bien l&agrave; de r&eacute;pondre &agrave; un d&eacute;sir, celui qui cherche &agrave; rendre l&rsquo;Antiquit&eacute; sensible &agrave; travers la sonorit&eacute; de ses langues par exemple. Les d&eacute;sirs de langues anciennes sont, bien &eacute;videmment, divers et r&eacute;investir les sons grecs et latins peut relever d&rsquo;autres subjectivit&eacute;s encore. En France, une voix a r&eacute;cemment d&eacute;fendue avec beaucoup de conviction et force arguments une approche tout &agrave; fait originale du latin vivant, mais elle n&rsquo;a pas &eacute;t&eacute; suffisamment bien entendue par les Antiquisants. Nous pensons aux travaux d&rsquo;Olivier Rimbault, latiniste perpignanais et agr&eacute;g&eacute; de grammaire qui a enseign&eacute; pendant de longues ann&eacute;es dans le secondaire. Il a publi&eacute;, en 2011, un livre intitul&eacute; <em>L&rsquo;avenir des langues anciennes. Repenser les humanit&eacute;s classiques</em>, une r&eacute;ponse critique au livre de P. Judet de La Combe et H. Wismann <em>L&rsquo;Avenir des langues. Repenser les Humanit&eacute;s</em>. P. Judet de La Combe et H. Wismann ont &eacute;t&eacute; charg&eacute;s, d&rsquo;abord par J. Lang et ensuite par L. Ferry, d&rsquo;une mission sur l&rsquo;avenir des &eacute;tudes classiques en France&nbsp;: leur r&eacute;ponse &eacute;tait celle d&rsquo;une analyse r&eacute;flexive qui prend appui dans les textes, s&rsquo;int&eacute;ressant peu &agrave; ce fait simple qui pourtant nous semble primordial &ndash; que le grec et le latin furent tout d&rsquo;abord des langues, langues normales, langues comme toute autre langue. Leur approche est solidement ancr&eacute;e dans la philologie du XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle et c&rsquo;est en effet une approche qui a fait ses preuves, mais qui correspond bien &agrave; certains temp&eacute;raments seulement et &agrave; certaines situations seulement, alors que la proposition d&rsquo;Olivier Rimbault nous semble autrement plus riche. Ce&nbsp;latiniste choisit une approche fondamentalement diff&eacute;rente, sans consid&eacute;rer pour autant que ce soit la seule possible. En effet, O. Rimbault d&eacute;fend avant tout le droit de chaque enseignant d&rsquo;aborder le grec et le latin comme bon lui semble, avant de proposer une didactique des langues anciennes fond&eacute;e sur un imaginaire qui lui est propre. Nous allons donc, dans cette derni&egrave;re partie, explorer ses r&eacute;flexions qui, comme on le verra, mettent au centre des apprentissages pr&eacute;cis&eacute;ment le d&eacute;sir des langues et la subjectivit&eacute;, &agrave; travers les notions du plaisir et du jeu.</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><strong><span style="font-size:12.0pt">&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; 2.2 Le d&eacute;sir, la subjectivit&eacute; et les langues anciennes</span></strong></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">Nous l&rsquo;aurons assez dit, par sa pratique enseignante et par sa r&eacute;flexion, O. Rimbault s&rsquo;inscrit dans un mouvement cherchant &agrave; renouveler la didactique du grec et du latin, &agrave; la lib&eacute;rer de l&rsquo;emprise de la &laquo;&nbsp;science philologique&nbsp;&raquo; trop aride pour sa sensibilit&eacute;, qui aborde le texte grec ou latin comme un cadavre &agrave; diss&eacute;quer. En m&ecirc;me temps, il n&rsquo;est pas de ceux qui oralisent le latin uniquement pour se rapprocher ainsi des m&eacute;thodes utilis&eacute;es dans l&rsquo;enseignement des langues vivantes, avec le but d&rsquo;arriver rapidement &agrave; un r&eacute;sultat concret qui, dans le cas qui nous occupe, n&rsquo;est &eacute;videmment pas une compr&eacute;hension orale ais&eacute;e, mais une meilleure compr&eacute;hension du texte litt&eacute;raire. Cela en effet n&rsquo;est pas le but premier d&rsquo;O. Rimbault, qui cherche plut&ocirc;t &agrave; susciter le d&eacute;sir du latin, &agrave; le sortir de sa condition de &laquo;&nbsp;langue morte&nbsp;&raquo;, &agrave; le rendre pr&eacute;sent aux apprenants et &agrave; cr&eacute;er un imaginaire autour de cette langue. Voici ce qu&rsquo;il dit de sa propre pratique du latin vivant&nbsp;:</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt">Le latin ou le grec [...] sont alors [...] des langues [...] bien vivantes puisque le locuteur peut [...] s&rsquo;assurer que son interlocuteur l&rsquo;a bien compris (le professeur qui s&rsquo;adresse en latin ou en grec au groupe classe interpellera &agrave; un moment ou &agrave; un autre chaque &eacute;l&egrave;ve ou &eacute;tudiant et entrera avec lui dans un &eacute;change vraiment personnel et ancr&eacute; dans la situation pr&eacute;sente). Il y a donc un complet renversement par rapport &agrave; l&rsquo;approche philologique traditionnelle&nbsp;: &agrave; la gravit&eacute; et aux efforts patients que celle-ci requiert, l&rsquo;enseignant substitue une &laquo;&nbsp;nouvelle&nbsp;&raquo; m&eacute;thode, inductive et orale, gr&acirc;ce &agrave; laquelle l&rsquo;apprentissage devrait se faire dans la &laquo;&nbsp;joie&nbsp;&raquo; et avec &laquo;&nbsp;facilit&eacute;&nbsp;&raquo;&nbsp;; dans cette approche centr&eacute;e sur la communication, la dimension historique de la langue est effac&eacute;e&nbsp;; ce qui &eacute;tait pass&eacute; devient pr&eacute;sent, ce qui semblait mort devient vivant&nbsp;; d&rsquo;objet d&rsquo;&eacute;tude ext&eacute;rieur, la langue est totalement int&eacute;rioris&eacute;e.&nbsp;(Rimbault, 2011&nbsp;: 80)</span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">Une telle approche peut r&eacute;pondre, nous semble-t-il, aux exigences des temps que nous vivons, o&ugrave; il ne peut vraiment plus &ecirc;tre question de revenir &agrave; l&rsquo;aust&egrave;re philologie du XIX<sup>e</sup> si&egrave;cle, o&ugrave; l&rsquo;on cherche &agrave; approcher l&rsquo;histoire d&rsquo;une fa&ccedil;on&nbsp;beaucoup plus imm&eacute;diate, comme nous l&rsquo;avons d&eacute;j&agrave; soulign&eacute;.</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">Notons en m&ecirc;me temps que la didactique pr&ocirc;n&eacute;e par O. Rimbault n&rsquo;est pas totalement nouvelle, sortie de nulle part &ndash; il le dit lui-m&ecirc;me, il s&rsquo;agit de m&eacute;thodes qui &laquo;&nbsp;r&eacute;veillent de tr&egrave;s anciennes pratiques&nbsp;&raquo; (Rimbault, 2011&nbsp;: 138). En effet, comme le savant perpignanais nous le rappelle, une didactique de la langue latine fond&eacute;e sur le plaisir et le jeu appara&icirc;t d&eacute;j&agrave; &agrave; la Renaissance, dans les travaux d&rsquo;&Eacute;rasme, alors qu&rsquo;au XVII<sup>e</sup> si&egrave;cle Jan Amos Comenius d&eacute;fend l&rsquo;apprentissage &laquo;&nbsp;naturel&nbsp;&raquo; de la langue latine. Plus pr&egrave;s de nous, l&rsquo;Anglais W. H. D. Rouse, fondateur de Linguaphone Institute, d&eacute;veloppe d&egrave;s 1932 une m&eacute;thode qu&rsquo;il appelle directe et dont l&rsquo;essence est <em>la spontan&eacute;it&eacute;, le naturel et la vie</em>, alors que le danois Hans H. &Oslash;rberg con&ccedil;oit dans les ann&eacute;es 50 une m&eacute;thode de latin inspir&eacute;e par celle de Rouse. Toutes ces m&eacute;thodes n&rsquo;ont pas pour but premier de faire d&eacute;couvrir aux apprenants la culture gr&eacute;co-latine &agrave; travers ses textes, mais de faire d&eacute;couvrir tout simplement la langue grecque ou latine, qui est consid&eacute;r&eacute;e, en elle-m&ecirc;me, comme v&eacute;hiculant un certain imaginaire. Voici ce qu&rsquo;en dit O. Rimbault&nbsp;:</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">Nous avons sugg&eacute;r&eacute; que ces langues anciennes, charg&eacute;es d&rsquo;histoire, de culture et d&rsquo;imaginaire, fonctionnent m&ecirc;me symboliquement et non pas seulement s&eacute;miologiquement quand on en fait des langues de communication &eacute;crite ou orale, m&ecirc;me rudimentaires. On ne peut les r&eacute;duire &agrave; servir par-dessus tout d&rsquo;outils pour une prise de conscience&nbsp;[...] de la mani&egrave;re dont l&rsquo;individu construit sa compr&eacute;hension du monde &agrave; travers les mots et pour une prise de conscience&nbsp;[...] de la mani&egrave;re dont les mots et les id&eacute;es d&rsquo;une communaut&eacute; ont &eacute;volu&eacute; avec le temps. [...] Bien d&rsquo;autres pratiques p&eacute;dagogiques sont possibles et recommandables, qui ne seront d&rsquo;ailleurs pas forc&eacute;ment des innovations. Le th&eacute;&acirc;tre scolaire, par exemple, que l&rsquo;&eacute;l&egrave;ve s&rsquo;exprime en latin ou avec une traduction, associe &agrave; <em>la pens&eacute;e l&rsquo;intuition, la sensation et le sentiment</em> en impliquant totalement le corps dans l&rsquo;apprentissage. Il y a l&agrave; des avantages didactiques (au regard de l&rsquo;acquisition de la langue) mais aussi, au-del&agrave;, &eacute;ducatifs au sens plus large, et tout &agrave; fait personnels &agrave; l&rsquo;apprenant.&nbsp;(Rimbault, 2011&nbsp;: 134-135)</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">A la lecture de ces lignes on constate une fois de plus qu&rsquo;O. Rimbault conf&egrave;re une place tr&egrave;s importante &agrave; la subjectivit&eacute; dans sa didactique des langues anciennes&nbsp;&ndash; subjectivit&eacute; de l&rsquo;enseignant, mais aussi subjectivit&eacute; de l&rsquo;apprenant. C&rsquo;est cela qui nous a paru essentiel pour un renouvellement de la didactique du grec et du latin&nbsp;: sortir enfin de l&rsquo;approche &nbsp;utilitariste&nbsp; cherchant &agrave; la fois &agrave; justifier l&rsquo;existence m&ecirc;me de nos enseignements et &agrave; les raccrocher &agrave; l&rsquo;apprentissage de la langue maternelle ou encore de l&rsquo;&eacute;ducation morale et civique, pour oser enseigner le grec et le latin pour eux-m&ecirc;mes, les valoriser pour eux-m&ecirc;mes, en tant que langues &agrave; part enti&egrave;re. Un tel enseignement de langues anciennes est int&eacute;ressant parce qu&rsquo;il peut cr&eacute;er l&rsquo;espace pour la construction d&rsquo;une nouvelle identit&eacute;, d&rsquo;une nouvelle subjectivit&eacute; et non pas parce qu&rsquo;il nous rappelle nos &laquo;&nbsp;racines&nbsp;&raquo;.</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><strong><span style="font-size:12.0pt">3 Conclusion</span></strong></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">La pratique orale des langues anciennes n&rsquo;est certes pas le seul moyen de rendre l&rsquo;Antiquit&eacute; &laquo;&nbsp;palpable&nbsp;&raquo; et nombreux sont les hell&eacute;nistes et les latinistes qui y arrivent tr&egrave;s bien sans passer par les conversations en grec ou en latin. Toutefois, dans le cadre d&rsquo;un enseignement institutionnalis&eacute; qui s&rsquo;av&egrave;re &ecirc;tre peu efficace actuellement, les <em>colloquia </em>en latin et en grec nous semblent &ecirc;tre le chemin le plus rapide vers l&rsquo;&eacute;veil de l&rsquo;imagination qui devrait permettre aux apprenants de se rapprocher des mondes anciens. Il est certain, en tout cas, que la voie qui permet de sortir le grec et le latin de la crise dans laquelle l&rsquo;enseignement de ces deux langues se trouve actuellement en France et en Europe passe par une ouverture vers non pas la subjectivit&eacute;, mais les subjectivit&eacute;s, aussi bien des enseignants que des apprenants. Les propositions fond&eacute;es sur une subjectivit&eacute; forte et surtout sur un d&eacute;sir de langues, telles que celle d&rsquo;O. Rimbault, devraient &ecirc;tre mises en valeur et servir de point de rep&egrave;re pour l&rsquo;&eacute;tablissement de nouvelles pratiques. </span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">Le cadre institutionnalis&eacute; au sein duquel nes enseignements se d&eacute;roulent impose &ndash; nous en sommes bien consciente &ndash; une certaine rigidit&eacute; et un minimum de pr&eacute;conisations officielles. D&rsquo;un autre c&ocirc;t&eacute;, le syst&egrave;me scolaire fran&ccedil;ais conna&icirc;t ces derni&egrave;res ann&eacute;es des probl&egrave;mes syst&eacute;miques qui d&eacute;passent largement la &laquo;&nbsp;question&nbsp;&raquo; du grec ou du latin. &nbsp;Cependant, m&ecirc;me dans ce contexte difficile, il est possible d&rsquo;envisager une autre approche pour le grec et le latin qui ne sera plus fond&eacute;e sur la notion d&rsquo;<em>utilit&eacute; </em>de ces langues, mais sur celle du d&eacute;sir de l&rsquo;Autre, sur une nouvelle perception de l&rsquo;Antiquit&eacute; permettant non pas de retrouver nos &laquo;&nbsp;racines&nbsp;&raquo;, mais de se construire une identit&eacute; nouvelle &agrave; travers une pratique nouvelle de langues anciennes.</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm">&nbsp;</p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">BIBLIOGRAPHIE</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">CHARVET, Pascal et BAUDUIN, David, <em>Les humanit&eacute;s au c&oelig;ur de l&rsquo;&eacute;cole. Rapport sur la valorisation des langues et cultures de l&rsquo;Antiquit&eacute;</em>, remis le lundi 29 janvier 2018 au ministre de l&rsquo;&Eacute;ducation, Jean-Michel Blanquer (</span><a href="https://www.education.gouv.fr/cid125849/remise-du-rapport-sur-la-valorisation-des-langues-et-cultures-de-l-antiquite.html" style="text-decoration:underline">https://www.education.gouv.fr/cid125849/remise-du-rapport-sur-la-valorisation-des-langues-et-cultures-de-l-antiquite.html</a><span style="font-size:12.0pt">).</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">CIBOIS, Philippe, &laquo;&nbsp;La question du latin&nbsp;: des critiques du 18<sup>e </sup>au <em>revival </em>du 19<sup>e</sup>&nbsp;&raquo;, <em>L&rsquo;information litt&eacute;raire </em>n&deg;52 (1), 2000, p. 7-28.</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">DELATTRE, Charles, &laquo;&nbsp;<em>Kuklos Hellenikos</em>&nbsp;: une pratique orale du grec ancien&nbsp;&raquo;, dans Pascale Hummel (dir.), <em>Translatio. La transmission du grec entre tradition et modernit&eacute;</em>, Paris, Vrin, 2009, p. 53-65.</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">HARTOG, Fran&ccedil;ois, &laquo;&nbsp;Plus et moins qu&rsquo;une discipline&nbsp;: le cas des &eacute;tudes classiques&nbsp;&raquo;, <em>Fabula-LhT</em> n&deg;&nbsp;8, &laquo;&nbsp;Le Partage des disciplines&nbsp;&raquo;, mai 2011, URL : http://www.fabula.org/lht/8/hartog.html, page consult&eacute;e le 25 avril 2019.</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">LEONHARDT, J&uuml;rgen, <em>La grande histoire du latin</em>, traduction fran&ccedil;aise B. Vacher, Paris, CNRS &eacute;ditions, 2010.</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">RICO, Christophe, <em>Polis. Parler le grec ancien comme une langue vivante</em>, Paris, Les &eacute;ditions du Cerf, 2009.</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">RICO, Christophe, &laquo;&nbsp;La m&eacute;thode <em>Polis</em>&nbsp;&raquo;, dans Malika Bastin-Hammou, Filippo Fonio, Pascale Par&eacute;-Rey (dir.), <em>Fabula agitur. Pratiques th&eacute;&acirc;trales, oralisation et didactiques des langues et cultures de l&rsquo;Antiquit&eacute;</em>, Grenoble, UGA &eacute;ditions, 2019.</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">RIMBAULT, Olivier, <em>L&rsquo;avenir des langues anciennes. Repenser les humanit&eacute;s classiques</em>, Perpignan, Presses Universitaires de Perpignan, 2011.</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">RIMBAULT, Olivier, &laquo;&nbsp;Au sujet de la m&eacute;thode de latin du Professeur &Oslash;rberg (Remarques sur la didactique des langues anciennes)&nbsp;&raquo;, <em>R&eacute;flexion(s)</em>, avril 2012, URL&nbsp;: http://reflexions.univ-perp.fr/)</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">SAFFIRE, Paula, &laquo; Ancient Greek in Classroom Conversation&nbsp;&raquo;,&nbsp; dans John Gruber-Miller (dir.), <em>When Dead Tongues Speak. Teaching beginning Greek and Latin</em>, Oxford, Oxford University Press, 2006, p.158-189.</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><span style="font-size:12.0pt">WAQUET, Fran&ccedil;oise, <em>Le latin ou l&rsquo;empire d&rsquo;un signe. XVI<sup>e</sup>-XX<sup>e </sup>si&egrave;cle</em>, Paris, Albin Michel, 1998.</span></span></span></p> <div>&nbsp; <hr /> <div id="ftn1"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:10pt"><a href="#_ftnref1" name="_ftn1" style="text-decoration:underline" title=""><span style="font-size:10.0pt">[1]</span></a> Il faut souligner n&eacute;anmoins que les langues anciennes font toujours partie, dans certains pays europ&eacute;ens, des enseignements obligatoires pour tous les &eacute;l&egrave;ves ou pour les &eacute;l&egrave;ves ayant choisi une fili&egrave;re sp&eacute;cifique, ce qui rend les comparaisons entre les pays difficiles (Charvet et Bauduin, 2018&nbsp;: 26).</span></span></p> </div> <div id="ftn2"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:10pt"><a href="#_ftnref2" name="_ftn2" style="text-decoration:underline" title=""><span style="font-size:10.0pt">[2]</span></a> Lorsqu&rsquo;il supprime en 1968 le latin en sixi&egrave;me, Edgar Faure rappelle que cette langue &laquo;&nbsp;n&rsquo;est ais&eacute;ment accessible qu&rsquo;aux h&eacute;ritiers de la culture&nbsp;&raquo; et constate que le latin &laquo;&nbsp;freine la d&eacute;mocratisation&nbsp;&raquo; (Waquet, 1998&nbsp;: 247). La date de cette suppression n&rsquo;est pas anodine, &eacute;videmment, et Fran&ccedil;oise Waquet insiste &agrave; juste titre sur l&rsquo;ampleur de ce changement, qui vient abolir le latin, un des moyens depuis le XVII<sup>e </sup>si&egrave;cle de &laquo;&nbsp;classer &raquo; les hommes (Waquet, 1998&nbsp;: 272).</span></span></p> </div> <div id="ftn3"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:10pt"><a href="#_ftnref3" name="_ftn3" style="text-decoration:underline" title=""><span style="font-size:10.0pt">[3]</span></a> Dans son ouvrage consacr&eacute; &agrave; la didactique des langues anciennes, Anne Armand rappelle que les programmes parus en 1996 demandent de former les &eacute;l&egrave;ves &agrave; la lecture des textes authentiques (Armand, 1997&nbsp;: 79). Les programmes de langues et cultures de l&rsquo;Antiquit&eacute;, publi&eacute;s dans le Bulletin officiel n. 31 du 27 ao&ucirc;t 2009, p. 2, stipulent d&egrave;s le d&eacute;part que &laquo;&nbsp;l&rsquo;objectif de l&rsquo;enseignement des langues et cultures de l&rsquo;Antiquit&eacute; est de permettre &agrave; chaque &eacute;l&egrave;ve, en fin de classe de Troisi&egrave;me, de lire et comprendre de mani&egrave;re autonome un texte authentique simple&nbsp;&raquo;. Le probl&egrave;me qui se pose toutefois est celui de l&rsquo;existence de textes authentiques simples, car si l&rsquo;on consid&egrave;re comme textes authentiques uniquement ceux dot&eacute;s d&rsquo;une valeur litt&eacute;raire certaine, on aura beaucoup de mal &agrave; trouver &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur de ce corpus des textes simples, puisque leurs auteurs n&rsquo;ont pas du tout vis&eacute; la simplicit&eacute;. </span></span></p> </div> <div id="ftn4"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:10pt"><a href="#_ftnref4" name="_ftn4" style="text-decoration:underline" title=""><span style="font-size:10.0pt">[4]</span></a> Le programme de l&rsquo;enseignement de compl&eacute;ment de langues et cultures de l&rsquo;Antiquit&eacute; a &eacute;t&eacute; publi&eacute; dans l&rsquo;annexe de l&rsquo;arr&ecirc;t&eacute; du 8 f&eacute;vrier 2016&nbsp;: <a href="https://www.education.gouv.fr/pid285/bulletin_officiel.html?cid_bo=99531" style="text-decoration:underline">https://www.education.gouv.fr/pid285/bulletin_officiel.html?cid_bo=99531</a>.</span></span></p> </div> <div id="ftn5"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:10pt"><a href="#_ftnref5" name="_ftn5" style="text-decoration:underline" title=""><span style="font-size:10.0pt">[5]</span></a> Fran&ccedil;oise Waquet, qui a consacr&eacute; une &eacute;tude importante &agrave; l&rsquo;histoire de l&rsquo;enseignement du latin entre le XVI<sup>e </sup>et le XX<sup>e</sup> si&egrave;cles, &eacute;tudie l&rsquo;&eacute;volution de cet enseignement qui en a fait un instrument pour &laquo;&nbsp;classer&nbsp;&raquo; les hommes (Waquet, 1998, 246-272). Le sociologue Philippe Cibois a montr&eacute; qu&rsquo;une cassure importante s&rsquo;est produite au moment de la R&eacute;volution, avec l&rsquo;id&eacute;e que les sciences doivent devenir l&rsquo;assise d&rsquo;une &eacute;ducation en phase avec son temps, au d&eacute;triment du latin et des &eacute;tudes classiques (Cibois, 2000).</span></span></p> </div> <div id="ftn6"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:10pt"><a href="#_ftnref6" name="_ftn6" style="text-decoration:underline" title=""><span style="font-size:10.0pt">[6]</span></a> Sur la derni&egrave;re &laquo;&nbsp;offensive&nbsp;&raquo; politique contre les &eacute;tudes anciennes justifi&eacute;e par l&rsquo;id&eacute;e qu&rsquo;il s&rsquo;agit d&rsquo;enseignements &eacute;litistes, lors de la mise en place de la r&eacute;forme du coll&egrave;ge en 2015, l&rsquo;on peut consulter le texte &laquo;&nbsp;Rapport Charvet-Bauduin (2/2)&nbsp;: pour en finir avec la question de l&rsquo;&eacute;litisme&nbsp;&raquo; de Ph. Cibois sur son site <a href="https://enseignement-latin.hypotheses.org/10523#more-10523" style="text-decoration:underline">https://enseignement-latin.hypotheses.org/10523#more-10523</a>.</span></span></p> </div> <div id="ftn7"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><a href="#_ftnref7" name="_ftn7" style="text-decoration:underline" title=""><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-size:10.0pt">[7]</span></span></a><span style="font-size:10.0pt"> Nous nous permettons de citer <em>in extenso </em>le rapport Charvet, car ce point est essentiel &agrave; nos yeux&nbsp;: &laquo;&nbsp;[...] il ne s&rsquo;agit pas de rechercher une expertise et une ma&icirc;trise linguistique strictes &agrave; la fin de la scolarit&eacute; du coll&egrave;ge ou de la terminale, du type de celle qu&rsquo;on peut attendre en langues vivantes, mais de viser un niveau, en fonction des moments du cursus et des formules d&rsquo;enseignement, qui permette de remplir des objectifs g&eacute;n&eacute;raux &ndash; au service d&rsquo;une ma&icirc;trise intellectuelle (et progressive) de la langue fran&ccedil;aise, des modes de communication et des enjeux sociaux. En somme, les &eacute;tudes classiques se caract&eacute;risent aujourd&rsquo;hui autant par leur objet (la culture antique et m&eacute;di&eacute;vale) que par une certaine conception de la formation intellectuelle, nourrie par l&rsquo;ensemble des sciences humaines.&nbsp;&raquo;&nbsp;(Charvet et Baudouin, 2018&nbsp;: 100)&nbsp;</span></span></span></p> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm">&nbsp;</p> </div> <div id="ftn8"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:10pt"><a href="#_ftnref8" name="_ftn8" style="text-decoration:underline" title=""><span style="font-size:10.0pt">[8]</span></a> On peut trouver les r&eacute;f&eacute;rences &agrave; ces travaux dans Fi&eacute;vet, 1989&nbsp;: 216. </span></span></p> </div> <div id="ftn9"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:10pt"><a href="#_ftnref9" name="_ftn9" style="text-decoration:underline" title=""><span style="font-size:10.0pt">[9]</span></a> Dans le domaine universitaire fran&ccedil;ais commencent &agrave; apparaitre maintenant des m&eacute;thodes de langues anciennes vivantes, telles que la m&eacute;thode <em>Polis </em>de Christophe Rico, qui insiste bien sur tous les b&eacute;n&eacute;fices qu&rsquo;on peut tirer d&rsquo;un enseignement oral du grec, sans pour autant convoquer le plaisir ou le d&eacute;sir de langues (Rico, 2009).</span></span></p> </div> <div id="ftn10"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:11pt"><a href="#_ftnref10" name="_ftn10" style="text-decoration:underline" title=""><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-size:10.0pt">[10]</span></span></a><span style="font-size:10.0pt"> D&egrave;s 1989, Cl. Fi&eacute;vet insiste sur l&rsquo;importance et m&ecirc;me la n&eacute;cessit&eacute; de transformer les pratiques d&rsquo;apprentissage de langues anciennes et de s&rsquo;appuyer sur les m&eacute;thodes de l&rsquo;apprentissage d&rsquo;une langue seconde, ce qu&rsquo;il a fait lui-m&ecirc;me en introduisant sa propre m&eacute;thode audio-orale de latin &agrave; l&rsquo;Universit&eacute; de Pau. En m&ecirc;me temps, Cl. Fi&eacute;vet, tout comme Ch. Delattre, n&rsquo;est pas un militant du latin vivant et n&rsquo;entend pas faire autre chose que permettre aux &eacute;tudiants d&rsquo;acc&eacute;der le plus rapidement possible &agrave; la lecture des textes en latin (Fi&eacute;vet, 1989&nbsp;: 215). </span></span></span></p> </div> <div id="ftn11"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><span style="font-size:10pt"><a href="#_ftnref11" name="_ftn11" style="text-decoration:underline" title=""><span style="font-size:10.0pt">[11]</span></a> Pour avoir une id&eacute;e du succ&egrave;s que rencontrent actuellement ces initiatives de parler le latin et parfois aussi le grec ancien, on peut consulter le tout r&eacute;cent article de Christophe Rico, qui &eacute;voque m&ecirc;me l&rsquo;id&eacute;e d&rsquo;une &laquo;&nbsp;sixi&egrave;me renaissance&nbsp;&raquo;, tant les initiatives de rendre les langues anciennes vivantes sont actuellement nombreuses et vivaces partout dans le monde (Rico, 2019&nbsp;: 193-217).</span></span></p> </div> <div id="ftn12"> <p style="margin-left:0cm; margin-right:0cm; text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:Calibri,sans-serif"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif"><a href="#_ftnref12" name="_ftn12" style="text-decoration:underline" title=""><span style="font-size:10.0pt">[12]</span></a> On peut consulter, &agrave; titre d&rsquo;exemple, le document &laquo;&nbsp;Le latin langue vivante&nbsp;: parler latin pour lire le latin&nbsp;&raquo;, que l&rsquo;on peut trouver en ligne, dans la base de donn&eacute;e EDUSCOL, &agrave; l&rsquo;adresse suivante&nbsp;<a href="http://cache.media.eduscol.education.fr/file/LCA/58/6/RA16_C4_LCA_oraliser_latin_724586.pdf" style="text-decoration:underline">http://cache.media.eduscol.education.fr/file/LCA/58/6/RA16_C4_LCA_oraliser_latin_724586.pdf</a> ou encore une proposition &eacute;manant de l&rsquo;Acad&eacute;mie de Bordeau intitul&eacute;e &laquo;&nbsp;Oraliser le latin pour mieux le comprendre en classe de LCA&nbsp;&raquo; qu&rsquo;on peut &eacute;galement lire en ligne, &agrave; l&rsquo;adresse </span><a href="http://disciplines.ac-bordeaux.fr/lettres/uploads/news/60/file/CR-Atelier-oralisation.pdf" style="text-decoration:underline"><span style="font-family:&quot;Times New Roman&quot;,&quot;serif&quot;"><span style="font-family:Times New Roman,Times,serif">http://disciplines.ac-bordeaux.fr/lettr</span>es/uploads/news/60/file/CR-Atelier-oralisation.pdf</span></a></span></span></p> </div> </div>