<div class="WordSection1">
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><span style="font-weight:bold">Introduction </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Notre recherche vient de manière tout à fait inopinée faire écho à l’appel à communications pour le colloque <i>Désir de langues<a name="_ftnref1"></a><a href="#_ftn1" title=""><b><span style="color:blue">[1]</span></b></a>, </i>lequel interroge notamment le processus d’enseignement/apprentissage, ses conditions, ses caractéristiques, le rôle de la dimension du « désir, de la fascination, de l’attrait ou du rejet » dans l’influence, la dynamisation ou l’entrave de l’apprentissage, etc. (Alcade, Denimal, Djordjevic et Pivot, paragr. 1). Les nombreuses questions posées dans l’argumentaire peuvent par ailleurs être classées en trois catégories, qui correspondent chacune aux trois axes proposés : 1) les moyens de décrire le processus d’apprentissage et les conditions dans lesquelles il s’opère ; 2) les rapports subjectifs aux savoirs ; 3) la didactique des langues à l’ère de la mondialisation. </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Nous allons donc voir dans ce qui suit en quoi notre contribution peut répondre à l’une ou à l’autre de ces questions, et selon quelle approche méthodologique ou didactique. Nous présenterons d’abord la notion de besoin, en la reliant, entre autres, aux notions de subjectivité, de désir, d’autonomie, et de réflexivité, puis l’outil que nous proposons dans le cadre de notre recherche, qui est le journal de bord d’apprentissage, et enfin une description détaillée du dispositif pédagogique et de recherche qui permettra, à travers l’utilisation du journal de bord, d’analyser les besoins subjectifs des apprenants concernés.</span></span></p>
<h1 style="text-align:justify;"><strong><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">1. A propos du concept de besoin</span></span></strong></h1>
<h2 style="text-align: justify;"><strong><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">1.2 « Rapport(s) subjectif(s) aux savoirs » : de l’importance de la prise en compte des besoins des apprenants</span></span></strong></h2>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Dans l’introduction de l’appel à communications (paragr. 1), deux questions intéressantes, entres autres, invitent à une réflexion nouvelle :</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><span style="font-size:11.0pt">L’enseignement institutionnel laisse-t-il une place à la prise en compte de la dimension subjective de l’appropriation linguistique ? Les orientations et les priorités de la didactique contemporaine sont-elles compatibles avec ce type de réflexion ? </span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Il s’agit de questions rhétoriques lesquelles, en dépit d’un tour affirmatif, ont, à notre sens du moins, une valeur négative. En effet, de par nos constats sur des méthodes de français qui n’ont pas produit l’effet attendu chez les apprenants<a name="_ftnref2"></a><a href="#_ftn2" title=""><span style="color:blue">[2]</span></a>, nous souhaitons remettre en cause la démarche didactique qui sous-tend l’élaboration de ces méthodes, et qui relève de la méthodologie du FOU. </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Arrêtons-nous un instant sur la démarche d’analyse des besoins telle qu’elle est habituellement mise en œuvre dans l’élaboration de méthodes ou de programmes d’enseignement du FOU. Cette démarche, qui s’appuie sur les outils d’analyse des besoins de la méthodologie du Français sur objectif(s) spécifique(s) (FOS), et tels que présentés dans l’ouvrage de Mangiante et Parpette, sont : l’expérience personnelle du concepteur, l’entourage, les méthodes de français existantes, le parcours professionnel et/ou scolaire/universitaire des apprenants, leur connaissance des situations cibles, de leur futur lieu de travail ou d’étude (2004). </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">On voit bien que cette démarche ne laisse pas beaucoup de place à la dimension subjective des besoins. Il est donc tout à fait légitime de se demander si la démarche d’analyse des besoins telle qu’elle est habituellement mise en œuvre pourrait en effet être biaisée, dans le sens où les besoins identifiés par le didacticien ne s’appuieraient pas suffisamment sur le ressenti de ces apprenants. D’où l’importance d’identifier autant les besoins objectifs que subjectifs des apprenants, mais aussi de confronter les premiers avec les seconds, ou de les faire se rapprocher, en vue d’atteindre une certaine objectivité perçue comme telle, aussi bien par les concepteurs que par les apprenants. Qu’en disent les chercheurs ?</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Dans une publication récente, Richer (2016) fait une critique de la didactique du FOS développée par Mangiante et Parpette. L’auteur met l’accent sur le risque que peut provoquer la focalisation sur l’objet, la langue, au détriment du sujet, l’apprenant, et au détriment de ses rythmes d’apprentissage :</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><span style="font-size:11.0pt">Quant aux besoins d’apprentissage, qui sont en relation avec le style cognitif, les stratégies d’apprentissage des apprenants et leur culture d’apprentissage, et lesquels sont une facette non négligeable des besoins, ils sont passés sous silence dans l’ouvrage de Mangiante et Parpette (2004). (2016 : 17)</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Les auteures de l’appel à communications soulignent quant à elles les limites de l’approche communicative, qui relèverait d’une certaine « vision utilitariste des apprentissages langagiers » en invitant à remettre en question la vision « marchande » développée dans les cadres communs de référence, dont le <i>Cadre européen commun de référence pour les langues</i> (CECRL). On n’en est pas à la première critique du CECRL (Maurer, 2011 ; Springer, 2016). Mais bien avant son apparition, les principes méthodologiques qui sous-tendront plus tard l’élaboration du <i>Cadre</i> ont fait l’objet de critiques, comme celle de Richterich, pour qui :</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">La formulation des objectifs qui procède par affirmation péremptoire (« peut » + « capacité ») ne laisse pas de place à la négociation et aux changements éventuels en cours d’apprentissage ; elle impose, tout y étant, par souci de rentabilité, strictement prévu, un système de formation extrêmement contraignant. (1985 : 72)</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Rappelons par ailleurs que les méthodes de FLE actuelles s’appuient toutes sur le CECRL, voire légitiment et font valoir l’intérêt et le sérieux de leur approche mentionnant de manière explicite cet outil.</span></span></p>
<h2 style="text-align: justify;"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">De notre côté, nous présupposons que l’analyse des besoins traditionnelle, qui s’effectue au moyen de questionnaires et d’entretiens (bien que Mangiante et Parpette proposent moins de procéder par questionnaires, mais par enquêtes ethnographiques), ne permet pas de répondre aux attentes ou besoins « subjectifs » des apprenants. Notre hypothèse principale est donc qu’une analyse des besoins effectuée autrement que par les techniques de questionnaires et d’entretiens permettrait d’élaborer un programme de français optimal. Mais quelle démarche méthodologique ou didactique serait la plus adaptée pour prendre en compte ce « rapport subjectif que l’apprenant a avec son apprentissage » (Alcade, Denimal, Djordjevic et Pivot, paragr. 5) ?</span></span></h2>
<h2 style="text-align: justify;"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><strong>1.2 </strong></span></span><strong><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Besoins objectifs vs besoins subjectifs</span></span></strong></h2>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">L’objectif - théorique - de notre recherche, qui est une recherche-action par plusieurs aspects, est d’identifier les besoins objectifs et subjectifs d’étudiants inscrits en première année de médecine à l’université de Tlemcen, en Algérie, lesquels, comme beaucoup d’étudiants des universités des pays du Maghreb, se sont trouvés confrontés souvent malgré eux, après une scolarisation entièrement arabophone, à un enseignement supérieur en français. </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">A ce stade de la recherche, il s’agit d’opérer une « triangulation des sources » (Lancereau-Forster, 2017), les trois sources étant : le didacticien de la langue, l’enseignant de langue et l’apprenant. L’enjeu théorique de cette triangulation des sources (que nous désignons aussi par « triangulation des besoins ») est de proposer une « modélisation » des besoins, en nous appuyant notamment sur les modèles qui existent déjà.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Sur le plan pratique, on se propose d’examiner la question d’ingénierie didactique suivante : quel dispositif méthodologique ou didactique nous permettrait d’identifier de manière optimale les besoins subjectifs des étudiants ?</span></span></p>
<h2 style="text-align: justify;"><strong><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">1.3 Le besoin, entre « subjectivité » et « désir » </span></span></strong></h2>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Pour revenir aux termes du colloque, nous allons interroger la notion de « désir », puis celle de « construction de la parole » (Alcade, Denimal, Djordjevic et Pivot, paragr. 1).</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Bien que la notion de désir fasse l’objet, dans l’appel à contributions, d’une approche à dominante psychanalytique, nous faisons le choix de partir de définitions tirées de dictionnaires usuelles. </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Ainsi, le désir peut être défini comme une « tendance vers un objet connu ou imaginé ; prise de conscience de cette tendance » (Le Petit Robert, 2018). Essayons de commenter cette brève définition du mot désir en la reliant au domaine de la didactique des langues.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">L’apprentissage d’une langue consisterait à ce que le sujet apprenant tisse consciemment certains liens avec cette langue. L’apprenant connait d’abord l’existence de la langue, puis commence, à l’intérieur d’un circuit qui évolue de manière indéfinie, à développer des compétences langagières, tout en construisant des représentations de cette langue. Pour cet apprenant, la langue représente, dans son ensemble, un objet connu, mais, dans ses nombreuses et diverses composantes, l’image d’une langue peut varier d’un individu à un autre, voire, chez un même individu, d’un moment à un autre et d’un lieu à un autre. Une langue, bien qu’elle puisse faire l’objet d’études descriptives extrêmement exhaustives, rigoureuses et précises, ne constitue jamais un système fixe pour l’apprenant. Le rapport de celui-ci avec la langue évolue toujours dans une certaine tension entre ce qu’il connait et ce qu’il croit connaître de cette langue, c’est-à-dire entre la langue « connue » et « imaginée », entre la « part d’inconnu » et « l’activité désirante », entre aussi un « univers de possibles » et un « monde maîtrisé ». </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Voyons maintenant les divers synonymes du terme « désir ». Dans la longue liste des mots suivants : <i>appétence</i>, <i>appétit</i>, <i>aspiration</i>, <i>attirance</i>, <i>attrait</i>, <i>besoin</i>, <i>convoitise</i>, <i>envie</i>, <i>faim</i>, <i>goût</i>,<i> inclination</i>, <i>intention</i>, <i>passion</i>, <i>penchant</i>, <i>soif</i>, <i>souhait</i>, <i>tendance</i>, <i>tentation</i>, <i>visée</i>, <i>vœu </i>(Le Petit Robert, 2018 : désir), il est plutôt facile de faire un tri, après avoir éliminé les mots dont le sens propre ou figuré ne convient pas à l’apprentissage d’une langue. Bien que l’on puisse avoir une certaine <i>inclination</i> ou un certain <i>penchant</i> pour une langue donnée, nous conserverons seulement les mots <i>besoin</i>, <i>intention</i>, <i>visée</i>.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Quoique les deux derniers termes soient sémantiquement très proches l’un de l’autre, ils renvoient tous deux à la notion d’<i>appropriation</i> qui signifie, dans la langue savante, le fait de « rendre propre à un usage, à une destination » (Le Petit Robert, 2018), et qui nous amène, de fil en aiguille, au mot <i>usage</i>, et donc au concept d’<i>utilité</i> que nous aborderons plus loin.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">La notion de désir est définie aussi comme un « mouvement instinctif qui traduit chez l'homme la prise de conscience d'un manque » (CNRTL) ; cette notion est, encore une fois, très liée à celle de « besoin », puisque le besoin signifie également une « prise de conscience d’un manque » (TLFi). Dans le premier axe de réflexion est d’ailleurs posée la question de la conception de la condition du sujet « non pleinement conscient de ses besoins, motivations et projets, donc non pleinement intentionnel », ainsi que la question des approches de la motivation à construire (Alcade, Denimal, Djordjevic et Pivot, paragr. 4). Or, vouloir satisfaire ses besoins renvoie à la notion de motivation : lorsque l’on fait quelque chose pour le plaisir, pour l’émotion, la motivation est alors maximale ; on parle de motivation intrinsèque. </span></span></p>
<h2 style="text-align: justify;"><strong><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">1.4 L’apprentissage en autonomie pour l’expression des besoins subjectifs</span></span></strong></h2>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Au concept de besoin subjectif est aussi associé celui d’ « apprentissage autodirigé » car, « en s’habituant à identifier ses besoins et à participer, l’individu apprend à apprendre et à devenir autonome (Holec, 1979, dans Richterich, 1985 : 30) ». </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">D’autre part, à la question « Est-ce que vous souhaitez que l’université propose des cours de français pour les étudiants en médecine ? » posée dans le cadre d’une recherche antérieure, les étudiants ont répondu que leur emploi du temps était « saturé », et qu’il leur fallait un enseignement d’un français « scientifique » en « relation avec [leurs] études ». Une nouvelle question d’ingénierie se pose à nous : comment concilier la mise en place d’un programme d’enseignement/apprentissage du français en lien avec les cours de médecine et les contraintes d’emploi du temps surchargé des étudiants ?</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">La réponse à cette question serait à chercher du côté de l’apprentissage autodirigé, qui permet une mise en œuvre d’une certaine stratégie sur la répartition du temps d’apprentissage : en respectant son propre rythme d’apprentissage, l’étudiant réussit à combiner le développement de ses compétences en français général au développement de ses compétences en français langue de spécialité.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Nous défendons la thèse selon laquelle un apprentissage optimal suppose une certaine attitude réflexive de la part de l’apprenant adulte. Paquay et Sirota parlent de « sujet réflexif », qui adopte une certaine « posture » ou « pratique » réflexive (2001 : 6), laquelle est liée à une démarche de « réflexion métacognitive » (Chateau et Zumbihl, 2010, paragr. 1).</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">En nous inspirant des quatre modèles d’enseignants répertoriés par M. Altet, nous avons dégagé les trois modèles d’apprenants suivants :</span></span></p>
<p style="text-indent:-18pt; margin-left:48px; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:Symbol">· </span></span>L’apprenant autonome dans son apprentissage ;</span></span></p>
<p style="text-indent:-18pt; margin-left:48px; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:Symbol">· </span></span>L’apprenant qui coconstruit avec l’enseignant l’enseignement/apprentissage ;</span></span></p>
<p style="text-indent:-18pt; margin-left:48px; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:Symbol">· </span></span>L’apprenant réfléchi, qui est capable d’analyser ses propres stratégies d’apprentissage, de résoudre des problèmes que l’enseignant n’a pas « pu » résoudre, d’adapter et d’inventer des stratégies. La formation « vise à développer chez l’enseignant une approche de situations vécues de type action-savoir-problème en utilisant conjointement pratique et théorie pour construire chez l’enseignant des capacités d’analyse de ses pratiques et de métacognition. » (2001 : 30-31, dans Cadet, 2004) ».</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Nous avons vu les liens qui existent entre les notions de prise de conscience, de désir, de besoin, de motivation. Il s’agit maintenant de satisfaire les trois besoins psychologiques de base que sont les besoins d’autonomie, de compétence et d’être en relation avec autrui (Heutte, 2011), et notamment le besoin d’autonomie. Quel outil choisir ?</span></span></p>
<h2 style="text-align: justify;"><strong><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">1.5 De la réflexivité à la construction de la parole</span></span></strong></h2>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Andrade et Araujo e Sá mettent l’accent sur l’intérêt de proposer aux étudiants, dès le début de leur cursus, « des modèles de régulation de leurs pratiques, par la réflexion sur et dans l’action » (1994 : 195<a name="_msoanchor_1"></a><a href="#_msocom_1"><span style="font-size:8.0pt"><span style="color:blue">[MP1]</span></span></a> ). La notion de réflexivité chez les apprenants s’opérationnalise de différentes manières : travail des étudiants en groupe, tutorat par les pairs, vidéo astuces, publication via des blogs/sites/réseaux sociaux, tenue d’un journal de bord.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Revenons une dernière fois à l’argumentaire du colloque. Nous nous intéressons notamment aux moyens d’amener l’apprenant à construire sa parole et à partager son histoire personnelle qui rend compte de ce « processus complexe » que représente l’apprentissage de la langue étrangère, ainsi qu’à l’amener à découvrir « de nouvelles potentialités d’expression ». Une autre condition tout aussi importante est que cet outil doit permettre de recueillir des données suffisantes pour la recherche.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">L’outil qui assure ces fonctions est le journal de bord d’apprentissage parce qu’il remplit, comme le souligne Cadet, trois fonctions importantes : une fonction d’expression, une fonction d’introspection et une fonction de résistance (2004 : 186). </span></span></p>
<h1 style="text-align: justify;"><strong><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">2. Le journal de bord d’apprentissage</span></span></strong></h1>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Nous allons voir maintenant en quoi le journal de bord d’apprentissage peut nous être utile.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">On retrouve, dans la recherche anglo-saxonne, diverses appellations du journal de bord : <i>log, logbook<a name="_ftnref3"></a><a href="#_ftn3" title=""><b><span style="color:blue">[3]</span></b></a>, diary, journal, field notes</i> (Nunan, 1989 : 55)<a name="_ftnref4"></a><a href="#_ftn4" title=""><span style="color:blue">[4]</span></a>, <i>learning diary<a name="_ftnref5"></a><a href="#_ftn5" title=""><b><span style="color:blue">[5]</span></b></a></i> (Bailey, 1983, dans Cadet, 2004)<a name="_ftnref6"></a><a href="#_ftn6" title=""><span style="color:blue">[6]</span></a>. En français, le journal de bord renvoie aux désignations suivantes : autobiographie-projet, portefeuille de compétences, portfolio professionnel, mémoire professionnel, carnet de route, biographie langagière (portfolio européen des langues), histoire de vie (Cadet, 2007 : 190). Cadet (2004 : 155) mentionne l’emploi de l’expression <i>diary study</i> qui, littéralement, peut correspondre en français à l’expression <i>étude de journal</i>. </span></span></p>
<h2 style="text-align: justify;"><strong><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">2.1 Le journal de bord dans le champ de la didactique des langues</span></span></strong></h2>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">En didactique des langues, les premières recherches académiques sur l’utilisation du journal de bord nous amènent au concept de biographie langagière, tel qu’il a été développé dans les travaux de R. Richterich & J.-L. Chancerel (1977). </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">D’autres formes et appellations apparaissent par la suite : <i>portfolio</i>, <i>portefeuille européen des langues</i>, <i>portefeuille des compétences</i>. Dans la sphère anglophone, Broadfoot fait remonter à 1984 l’exploitation du portfolio dans l’enseignement-apprentissage (1990, dans<i> </i>Scallon, 2010 : 2). Scallon en propose la définition suivante : « document écrit dans lequel les acquis de formation d’une personne sont définis, démontrés et articulés en fonction d’un objectif » (Landry, dans Legendre, 1993). </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">En Europe, le concept de portfolio des langues apparaît pour la première fois en 1991, parallèlement au CECRL (Little, Goullier et Hughes, 2011). Dans les portfolios européens des langues, ce terme recouvre pour Molinié deux sens différents : le premier concerne la « prise en compte de la vie de l’apprenant » (loc. cit.), le second renvoie aux outils d’autoévaluation des compétences (2004, paragr. 2).</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Le portfolio, tel qu’il a été défini dans le CECRL (2003), offre toutefois une vision plutôt prescriptive, rigide et scolaire de son utilisation et de sa finalité. D’ailleurs, le type de journal de bord que nous proposons ne correspond à aucun des modèles proposés par le CECRL. En effet, la fonction du journal de bord d’apprentissage ne consiste pas seulement à constituer une biographie langagière de l’apprenant ; celle-ci est une composante du journal de bord, elle constitue une partie de cet ensemble que le journal de bord représente (Cadet, 2004 : 220). C’est pourquoi nous préférons l’appellation de journal de bord à celle de portfolio. </span></span></p>
<h2 style="text-align: justify;"><strong><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">2.2 Un journal, trois outils</span></span></strong></h2>
<h3 style="text-align: justify;"><strong><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">2.2.1 Un outil de recueil de données pour le chercheur</span></span></strong></h3>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">L’utilisation du journal de bord s’inscrit dans la tradition de recherche en didactique des langues-cultures, mais relève aussi des recherches dans les domaines de l’ethnographie et de la sociologie, et, plus largement, de l’anthropologie (Bailey, 1983 : 71-72, dans Cadet, 2004 : 160). Ainsi, en Sciences humaines et sociales, le bon chercheur est celui qui consigne systématiquement tout ce qui se rapporte, de près ou de loin, à son activité de recherche : « les situations vécues, les rencontres, les lectures, les impressions, les réflexions et les analyses » (Cadet, 2004 : 159). </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Comme le souligne aussi Porquier, le journal de bord constitue une technique d’introspection particulière dans le sens où il vient en complément d’autres techniques d’enquête, telles que « l’observation participante, les autoconfrontations, les entretiens ou les enquêtes » (1994 : 4, dans Cadet, 2004 : 168). </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Pour le chercheur, il représente une technique de recherche dont le fonctionnement s’appuie sur deux autres techniques bien distinctes : l’observation et l’introspection (Allwright, 1983 : 193, dans Cadet, 2004 : 154). En combinant ces deux techniques, le journal de bord se substitue donc au chercheur. Alors que l’observation fait appel à la capacité du chercheur à prendre des notes selon une grille d’analyse préétablie, et que l’introspection consiste, selon D. Allwright, à interroger les enquêtés, en leur demandant d’adopter une posture réflexive à propos de leur expérience d’apprentissage, la rédaction du journal de bord par l’apprenant implique que ce dernier fournisse, en temps réel et de manière rétrospective, un effort d’observation externe, et interne (introspection), sur ses propres stratégies d’apprentissage. Le principe de cette technique est aussi de « faire confiance » à l’enquêté, et permet enfin d’éviter les biais que pourrait provoquer l’observation directe seule, parmi lesquels : la modification possible du comportement suite à la présence de l’observateur ; le risque d’interprétation -erronée- des faits observés ; le recueil de faits non-répétitifs et donc non-pertinents. </span></span></p>
<h3 style="text-align: justify;"><strong><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">2.2.2 </span></span></strong><strong style="font-family: "Times New Roman", serif; font-size: 12pt;">Un outil de formation professionnelle</strong></h3>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Les <i>diary studies</i> ont donc bien profité à la recherche en didactique des langues. En parallèle, les formations des enseignants de langue étrangère ont permis le développement de la pratique de la rédaction des journaux de bord d’apprentissage. </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">C’est en 1980 que le premier journal d’apprentissage dans le cadre d’un cours de langue étrangère aurait été rédigé. Dans leur apprentissage du russe, les étudiants disposaient d’un « guide de réflexion » qui, sous forme de questionnaire, devait permettre d’aider les étudiants dans leur réflexion et rédaction du <i>journal d’activités</i> et du <i>compte-rendu</i>. </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><span style="font-size:11.0pt">Le journal en lui-même était un fascicule de six pages, composé de questions portant sur : le contenu de la leçon, les objectifs comportementaux, ce qui a été appris (par rapport à ce qui a été enseigné), les techniques utilisées pour apprendre ; toute espèce de remarque ou observation sur la manière dont le professeur conduit la leçon, sur le comportement verbal des autres participants, aussi bien que le sien propre, pouvant contribuer à sa propre formation d’enseignant de langues (Devitt et Czak, 1981 : 15 dans Cadet, 2004 : 170)</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Dans les années 1990, le journal d’apprentissage était, comme en témoignait Martinez (1993, dans Cadet, 2004), un outil de formation de choix pour les étudiants en licence mention FLE. L’intérêt de cet outil pour la formation est de favoriser l’introspection, la réflexion, la description, l’observation, ainsi qu’une attitude critique et de prise de recul par rapport à son expérience en tant qu’apprenant. Tout comme elle permet une prise de conscience de la diversité des stratégies et styles d’apprentissage, la mise en œuvre de compétences métalinguistiques, l’application des théories abordées en cours et, comme nous l’avons dit plus haut, une réflexion en temps réel et effectuée de manière rétrospective. Le journal d’apprentissage relève donc d’une approche didactique centrée sur l’apprenant. (Cadet, 2004 : 170-171).</span></span></p>
<h3 style="text-align: justify;"><strong style="font-family: "Times New Roman", serif; font-size: 12pt;">2.2.3 Un outil pour l’apprentissage des langues</strong></h3>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">En didactique des langues, Cadet attribue à l’ouvrage <i>L’art d’enseigner et d’étudier les langues</i> de Gouin, paru en 1880, la première tentative réussie de l’utilisation du journal de bord en situation concrète d’apprentissage d’une langue étrangère (2004 : 161, dans Porquier & Wagner, 1984 : 88). Presque un siècle plus tard, on voit se développer, vers 1976 (selon Allwright, 1983), les études des journaux de bord comme techniques de recherche visant l’introspection ; les premières publications de ce genre sont les <i>diary studies</i> de Schumann et Schumann (1977 et 1978) ou encore la <i>diary study</i> de Bailey concernant son apprentissage du français. Il ressort de ces deux comptes-rendus d’expériences d’apprentissage d’une langue étrangère des phénomènes dont les chercheurs n’avaient pas conscience lors de la rédaction du journal de bord. Ce constat est confirmé par Seliger et Shohamy :</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><span style="font-size:11.0pt">“In the examples above, which are drawn from everyday experience, there is no preconceived or deductive notion of what we should observe or record. Instead, a diary of experiences is kept, without focusing on any particular aspect or question.” (2001 : 47, dans Cadet, 2004)<a name="_ftnref7"></a><a href="#_ftn7" title=""><span style="color:blue">[7]</span></a></span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Nous résumons dans le tableau suivant les thèmes relevés par Schumann (1978) et Bailey (1980) (Cadet, 2004 : 163-164) dont l’impact sur l’apprentissage leur a semblé important à souligner :</span></span></p>
<table class="Table" style="border-collapse:collapse; border:none">
<tbody>
<tr>
<td style="padding:.100px .100px .100px .100px" valign="top">
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><i>Diary study</i> de F. Schumann (1978)</span></span></p>
</td>
<td style="padding:.100px .100px .100px .100px" valign="top">
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><i>Diary study</i> de K. M. Bailey (1980)</span></span></p>
</td>
</tr>
<tr>
<td style="padding:.100px .100px .100px .100px" valign="top">
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">les conditions d’apprentissage en relation avec l’installation à l’étranger </span></span></p>
</td>
<td style="padding:.100px .100px .100px .100px" valign="top">
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">les conditions d’apprentissage et son environnement </span></span></p>
</td>
</tr>
<tr>
<td style="padding:.100px .100px .100px .100px" valign="top">
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">les réactions aux matériels pédagogiques </span></span></p>
</td>
<td style="padding:.100px .100px .100px .100px" valign="top">
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">le style de conduite de classe (rôle du professeur)</span></span></p>
</td>
</tr>
<tr>
<td style="padding:.100px .100px .100px .100px" valign="top">
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">l’organisation de l’auto-apprentissage </span></span></p>
</td>
<td style="padding:.100px .100px .100px .100px" valign="top">
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">les éléments renforçant les acquisitions (feedback) </span></span></p>
</td>
</tr>
<tr>
<td style="padding:.100px .100px .100px .100px" valign="top">
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">les sentiments et les réactions éprouvés </span></span></p>
</td>
<td style="padding:.100px .100px .100px .100px" valign="top">
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">les interactions dans le groupe </span></span></p>
</td>
</tr>
<tr>
<td style="padding:.100px .100px .100px .100px" valign="top">
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">les attitudes de compétition et de coopération</span></span></p>
</td>
<td style="padding:.100px .100px .100px .100px" valign="top">
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">l’influence des autres participants</span></span></p>
</td>
</tr>
</tbody>
</table>
<p align="center" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><i>Tableau 1. Rôle et effets du journal de bord dans l’apprentissage d’une langue étrangère</i></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Nous remarquons d’emblée que les deux chercheurs s’accordent sur l’importance des « conditions d’apprentissage », qui peuvent cependant recouvrir beaucoup de choses, dont « les réactions aux matériels pédagogiques ». Les autres grands thèmes qui se dégagent, au nombre de trois, concernent :</span></span></p>
<p style="text-indent:-18pt; margin-left:48px; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:Symbol">· </span></span>le rapport de l’apprenant avec luimême : « organisation de l’auto-apprentissage » ; « sentiments et réactions éprouvés », </span></span></p>
<p style="text-indent:-18pt; margin-left:48px; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:Symbol">· </span></span>le rapport apprenantapprenant(s) : « interactions dans le groupe » ; « attitudes de compétition et de coopération » ; « influence des autres participants », </span></span></p>
<p style="text-indent:-18pt; margin-left:48px; text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:Symbol">· </span></span>et enfin, le rapport apprenantenseignant : « style de conduite de classe » et « feedback ».</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Selon Seliger et Shohamy, les éléments enregistrés par l’apprenant dans son journal de bord permettent de prendre connaissance de ses attitudes à propos de son apprentissage, ainsi que de ses propres méthodes, techniques et stratégies, mais aussi de ses attitudes envers l’enseignant (2001 : 47, dans Cadet, 2004 : 158).</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Pour Bailey, la détermination des paramètres affectifs qui s’effectue généralement par l’observation -cette technique ayant recours à l’inférence- ne permet pas de disposer de données précises et absolument fiables ; afin d’éviter ce biais, les chercheurs interrogent directement les participants, au moyen de questionnaires ou d’entretiens. Cette auteure considère cependant que les enquêtés, surtout s’il s’agit d’adultes, ont tendance à dissimuler leurs sentiments, et expriment des réponses qu’ils croient correspondre à ce que l’enquêteur voudrait entendre. L’utilisation de journaux est alors la solution préconisée par l’auteure (Bailey, 1983 : 70-71 dans Cadet, 2004 : 167).</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">En guise de synthèse, la technique du journal de bord permet, pour le chercheur, d’accorder suffisamment de temps à l’enquêté pour que ce dernier puisse y exprimer ses besoins subjectifs. Pour les apprenants, il est d’une finalité heuristique. Quant à la recherche en didactique des langues :</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Celle-ci pourrait en effet confronter les hypothèses d’apprentissage sur lesquelles elle bâtit sa méthodologie à la représentation personnelle du processus vécu telle qu’elle est exprimée dans le journal. D'autre part, puisque par ce biais la recherche redonne la parole à l'apprenant lui-même, elle pourrait véritablement devenir « une didactique explicative et descriptive » non pas « centrée sur l’apprenant mais dont l’apprenant pourrait enfin être le centre (Martinez, 1994 : 54 dans Cadet, 2004 : 181).</span></span></p>
<h1 style="text-align: justify;"><strong><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">3. A propos du dispositif de recherche</span></span></strong></h1>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Les étudiants auxquels nous nous sommes adressé n’étaient guère préparés à un apprentissage de la langue française en autonomie. Si l’intérêt du journal de bord est de faciliter la prise de conscience par les étudiants de leurs difficultés, il a fallu alors accompagner les étudiants peu autonomes dans leur utilisation du journal de bord. Nous avons donc formulé une autre hypothèse selon laquelle les étudiants ne percevraient l’utilité du journal de bord que s’ils bénéficiaient d’un suivi personnalisé.</span></span></p>
<h2 style="text-align: justify;"><strong><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">3.1 Présentation du dispositif initial</span></span></strong></h2>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Aussi sommes-nous intervenu dans le cadre du dispositif de tutorat déjà existant. En tant que tuteur, il avait été possible d’accompagner les étudiants, avec la possibilité d’enregistrer aussi bien les besoins qu’ils exprimaient à l’écrit (dans le journal de bord) qu’à l’oral (au moyen d’entretiens individuels ou par focus group). </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Nous avons donc procédé de la façon suivante. Après avoir intégré la cellule du tutorat de la faculté de médecine, nous avons expliqué aux étudiants qu’ils pouvaient bénéficier, dans le cadre du tutorat, d’un accompagnement individualisé ou en petits groupes. Il y a eu beaucoup d’engouement au début ; sur 368 étudiants en première année de médecine, environ 90 étudiants se sont inscrits au tutorat. Nous avons invité les étudiants à noter sur le journal de bord (un cahier qui a été remis à chacun d’eux) toutes les difficultés et questions qui les empêchaient de comprendre le cours de médecine. </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Cependant, dès la deuxième semaine, le taux de participation a considérablement chuté. Quelques étudiants seulement se présentaient aux séances de tutorat, et sur les deux étudiantes qui ont tenté l’expérience, aucune n’a complété le journal comme nous l’avions prévu. Les séances de tutorat n’ont donc pas permis d’encadrer les étudiants dans leur utilisation du journal de bord. L’explication relève, selon nous, de la forme des évaluations en médecine, qui consistent en des questions à choix multiples, et qui ne sollicitent donc pas les compétences en expression écrite -encore moins en expression orale- des étudiants.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Nous avons ensuite tenté de recueillir d’autres données sous formes de productions écrites. La consigne était : « Au second semestre, les cours de médecine seront assurés par des enseignants venus de France. Les examens de spécialité ne seront plus sous forme de QCM, mais de questions ouvertes. Comment allez-vous faire pour améliorer votre niveau en français ? ».</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Les données recueillies, même si elles relèvent davantage des méthodes d’apprentissage des étudiants, renseignent sur certains aspects du rapport subjectif des étudiants à la langue française. </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Il est intéressant de noter que sur la trentaine de productions analysées, trois personnes ont fait référence à la fonction du journal de bord pour l’apprentissage du français :</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Etudiant 1 : « J’écrie avant que je dormie tous qui est passe dans ma journée en français » ; </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Etudiant 2 : « écrire chaque jour un texte pour cette langue » ;</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Etudiant 3 : « chercher les mots nouveaux et les écrivé dans un petit carné qui sera mon petit dictionnaire ».</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Une autre explication aux résultats négatifs obtenus a été avancée par Knoerr dans une recherche récente :</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><span style="font-size:11.0pt">Les étudiants ne perçoivent pas l’utilité de la tâche d’écriture dans un journal de bord pour le transfert dans le cours de discipline des stratégies d’apprentissage vues dans le CEL. Cependant, leurs commentaires semblent indiquer qu’ils pourraient l’apprécier si l’exercice était plus encadré (par exemple, s’ils devaient remettre une entrée de journal chaque semaine au lieu de remettre l’ensemble du journal à la fin de la session, et s’ils avaient cinq minutes à la fin de chaque cours pour noter dans leur journal ce qu’ils ont fait en classe, afin de ne pas l’oublier). (2016, paragr. 44).</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Il faudrait donc faire en sorte que les étudiants remettent une entrée du journal chaque semaine au lieu de remettre l’ensemble du journal à la fin de la session, et leur laisser le temps de le faire en classe.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">La mise en épreuve du dispositif basé sur l’encadrement du journal de bord dans le cadre de séances de tutorat nous a donc conduit à revoir notre dispositif, et à formuler l’hypothèse suivante.</span></span></p>
<h2 style="text-align: justify;"><strong><span style="font-family: "Times New Roman", serif; font-size: 12pt;">3.2 La séance de français, pour un accompagnement à l’apprentissage en autonomie</span></strong></h2>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Au vu des contraintes liées à l’emploi du temps surchargé des étudiants et à leur absence massive lors des séances de tutorat, il nous semble d’autant plus nécessaire de mettre en place un moyen différent et efficace afin d’encourager les étudiants à utiliser de manière régulière leur journal de bord d’apprentissage. Pour les besoins de notre recherche, le tutorat n’étant par ailleurs pas obligatoire, les séances de TD de français constitueront ce moment de rencontre régulière avec les étudiants, nécessaire au suivi du journal de bord : à la fois orienter les étudiants dans le remplissage du journal mais aussi garantir le recueil des données. </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Ce qui nous amène à cette dernière hypothèse : les étudiants perçoivent l’utilité du journal de bord lorsque celui-ci est intégré à la séance de français (ou, de manière générale, au CEL).</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">A propos de l’idée d’encadrer l’étudiant dans sa pratique du journal de bord, R. Pantanella montre que la proposition par les enseignants de grilles et de tableaux susceptibles d’aider les élèves a produit l’effet inverse. En effet, d’après Pantanella, le constat établi par l’Académie de Rouen nous apprend que :</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><span style="font-size:11.0pt">La tenue des carnets de bord, par chaque élève, s’est avérée parfois incertaine […]. Les mentions sont généralement chronologiques, imprécises, sans rubriques et dépourvues de références aux difficultés rencontrées. Certains carnets n’ont été renseignés qu’au terme du travail. Les élèves ont manifesté des réticences à le montrer aux professeurs, soit parce qu’il était insuffisamment rempli, soit parce qu’ils se trouvaient désorientés par ce type de travail. (2000 : 70)</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Si l’Académie de Rouen suggère qu’« il y a un apprentissage de l’usage de cet outil à effectuer » (ibid.), nous sommes alors en droit de nous interroger sur la nécessité, ou non, de guider nos étudiants dans leur utilisation du journal de bord dans leur apprentissage du français. Et si oui, dans quelle mesure ?</span></span></p>
<h2 style="text-align: justify;"><strong><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">3.3 Proposition didactique (ou deuxième période de recherche de terrain)</span></span></strong></h2>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Après cette première expérience qui n’a pas abouti, nous avons réfléchi à la nécessité d’organiser une seconde descente sur le terrain, en septembre prochain, d’une durée d’un trimestre. Au lieu de nous appuyer sur le tutorat, nous profiterons de notre position d’enseignant de français pour « obliger » en quelque sorte les étudiants à compléter le journal de bord. La version finale du dispositif suivra donc un processus récursif en quatre étapes, comme le montre le schéma suivant.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><img height="459" src="https://www.numerev.com/img/ck_273_6_Colloque désir de langues image 1.PNG" width="430" /></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><i>Schéma 1. Dispositif pédagogique et de recherche pour l’analyse des besoins langagiers et d’apprentissage du français langue de spécialité à l’université</i></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Nous allons maintenant décrire la méthodologie suivie lors de notre recherche de terrain.<a name="_Toc535685312"></a></span></span></p>
<h4 style="text-align: justify;"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><a name="_Toc535862694"><span style="color:#000000;"><b><i>Etape 1 : notation des difficultés de français dans le journal de bord</i></b></span></a><span style="color:#000000;"><b><i> </i></b></span></span></span></h4>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Nous avons dit que la réussite de notre dispositif dépend de la collaboration étroite avec l’enseignant de médecine qui devrait mettre à disposition aux étudiants son cours à l’avance.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Lors de la séance introductive de français, nous expliquerons aux étudiants la démarche à suivre, qui sera présentée en tant que dispositif pédagogique (et non de recherche). Les étudiants sont donc invités à préparer le cours de médecine qui leur a déjà été remis par l’enseignant de ce cours, en notant sur un formulaire que nous leur remettrons les difficultés qui les empêchent de comprendre le cours de médecine. Le journal de bord est remplacé par un formulaire pour faciliter son ramassage et sa restitution et pour orienter les étudiants avec des questions générales sur la compréhension du cours de médecine. Les questions et consignes seront sujettes à modification. </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Les formulaires, nominalisés et datés, seront regroupés à la fin de la session pour constituer le journal de bord.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Lors de la même séance, il sera demandé aux étudiants de rédiger un texte dont le sujet sera une mise en situation portant sur la planification de leurs propres méthodes d’études en médecine. La consigne pourrait être : « Au second semestre, les cours de médecine seront assurés par des enseignants venus de France. Les examens de spécialité ne seront plus sous forme de questions à choix multiples (QCM), mais de questions ouvertes. Comment allez-vous faire pour améliorer votre niveau en français ? ». Cette projection dans l’avenir, qui constitue une première évaluation diagnostique, amène l’étudiant à faire un retour sur lui-même et à faire ressortir d’une part des besoins langagiers subjectifs, et d’autre part les stratégies d’apprentissage qu’il mettrait en œuvre pour combler et surmonter ses lacunes en français.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">A deux autres reprises, en cours et en fin de session, chaque étudiant rédigera un texte en s’appuyant sur le même sujet. La comparaison des productions écrites de l’étudiant permettra d’analyser sa progression dans l’apprentissage du français. Cette approche longitudinale permettrait d’apprécier aussi l’évolution ou la variation de la perception de ses besoins langagiers (auto-définis) et de ses stratégies d’apprentissage.</span></span></p>
<h4 style="text-align: justify;"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><a name="_Toc535685313"></a><a name="_Toc535862695"></a><b><i>Etape 2 : reconstitution du cours de médecine par les étudiants</i></b></span></span></h4>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">En classe de français, les étudiants travailleront, lors des premières séances, de manière individuelle. Nous alternerons ensuite entre le travail individuel et le travail collaboratif, en sous-groupes de quatre à six étudiants. Il sera demandé aux étudiants de relever tous les mots-clés et les mots difficiles du cours de médecine, et de les classer selon qu’il s’agisse du vocabulaire courant ou de spécialité. </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Les étudiants seront invités à reconstituer à l’écrit le cours de médecine à partir des mots-clés qu’ils auraient relevés. Pour construire les définitions, nous travaillerons sur les procédés définitoires (hyperonymes, hyponymes, synonymes, etc.), sur la description, l’exemplification, etc. Les reconstitutions écrites du cours, partielles ou totales, ainsi que les formulaires complétés auparavant, seront récupérés en fin de séance.</span></span></p>
<h4 style="text-align: justify;"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><a name="_Toc535685314"></a><a name="_Toc535862696"></a><b><i>Etape 3 : traitement des données et élaboration didactique</i></b></span></span></h4>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Entre deux séances de français, nous analyserons et annoterons les reconstitutions du cours de médecine et les formulaires, après en avoir fait une copie. Les erreurs ainsi analysées et catégorisées, elles serviront à construire des séquences et séances didactiques adaptées. <a name="_Toc535862697"></a><a name="_Toc535685315"></a></span></span></p>
<h4 style="text-align: justify;"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><b><i>Etape 4 : correction des reconstitutions du cours de médecine</i></b></span></span></h4>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Les activités consisteront à faire travailler de nouveau les étudiants en sous-groupes (de manière collaborative) sur leur propre reconstitution du cours de médecine, pour qu’ils se corrigent mutuellement.</span></span></p>
<h1 style="text-align: justify;"><strong><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">4. Evaluation du dispositif</span></span></strong></h1>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">A trois reprises, en début, en cours et en fin de session, chaque étudiant rédigera un texte en s’appuyant sur le même sujet, qui est une mise en situation portant sur la planification de leurs propres méthodes d’études en médecine. La consigne serait la même que celle présentée pour le recueil des productions libres des étudiants.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Cette projection dans l’avenir, qui représente une évaluation diagnostique, amène l’étudiant à faire un retour sur lui-même et à faire ressortir d’une part ses besoins langagiers, et d’autre part les méthodes d’apprentissage qu’il mettrait en œuvre pour surmonter ses lacunes en français. La comparaison des productions écrites de l’étudiant permettra d’analyser sa progression dans l’apprentissage du français. Cette approche longitudinale permettrait d’apprécier aussi l’évolution ou la variation de la perception de ses besoins langagiers (auto-définis) et de ses méthodes d’apprentissage.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Outre l’analyse des journaux de bord que constituent le regroupement chronologique des formulaires, le dispositif sera évalué par les étudiants eux-mêmes en début, en cours et en fin de session, au moyen de discours déclaratifs : entretiens individuels et entretiens par focus group en guise de séances d’expression orale. Les mêmes étudiants seront interrogés quelques mois après, en fin d’année universitaire, pour vérifier s’ils auraient continué à préparer leur cours en autonomie. </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Le journal de bord de l’enseignant : la consignation par l’apprenant de ses propres difficultés conduit l’enseignant à s’effacer ; or, il est important que l’enseignant de langue fournisse un effort conscient d’observation de son groupe-classe, en consignant à son tour ses impressions et réflexions sur ce qu’on peut appeler le journal de bord de l’enseignant. Cela conduit l’enseignant de langue à adopter une posture réflexive continue sur ses propres pratiques pédagogiques, qu’il devrait noter également.</span></span></p>
<p class="MsoNoSpacing" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><span style="font-weight:bold">Conclusion</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Nous avons vu comment, à partir des diverses questions posées dans l’argumentaire du colloque, il devient important de prendre -de nouveau- en compte la dimension subjective des besoins des apprenants dans toute démarche d’élaboration de matériel didactique en didactique du FOU. Cette prise en compte des désirs des apprenants, de leurs besoins subjectifs, donc de leur subjectivité, va de pair avec une attitude réflexive et un apprentissage en autonomie qu’ils sont invités à développer. Le journal de bord d’apprentissage peut par ailleurs représenter un outil efficace en vue d’encourager ces apprenants à exprimer leurs besoins subjectifs.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Notre dispositif que nous avons déjà mis à l’épreuve sur le terrain a montré ses limites ; la nouvelle version de celui-ci, que nous envisageons de mettre en œuvre dans les mois à venir pourrait donner des résultats intéressants, et permettre de ce fait d’améliorer la démarche traditionnelle de l’analyse de besoins pour l’enseignement-apprentissage du français langue de spécialité à l’université.</span></span></p>
<p class="MsoNoSpacing" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><span style="font-weight:bold">Bibliographie</span></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">ALCADE, Céline, DENIMAL, Amandine, DJORDJEVIC, Ksenija, et PIVOT, Bénédicte (2018). Argumentaire de l’appel à communications pour le colloque « Désirs de langues, subjectivité, rapport au savoir : les langues n’ont-elles pour vocation que d’être utiles ? ». </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Besoin. Dans Dictionnaire Le Petit Robert de la langue française. (2018). [En ligne]. </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Besoin. Dans <i>TLFi : Trésor de la langue Française informatisé</i>, ATILF - CNRS & Université de Lorraine. (2019). [En ligne]. Repéré à l’adresse : <a href="http://stella.atilf.fr/Dendien/scripts/tlfiv5/visusel.exe?11;s=417813165;r=1;nat=;sol=0;"><span style="color:blue">http://stella.atilf.fr/Dendien/scripts/tlfiv5/visusel.exe?11;s=417813165;r=1;nat=;sol=0;</span></a> </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">CADET, Lucie (2004). Entre parcours d’apprentissage et formation à l’enseignement : le journal de bord d’apprentissage, analyse d’un objet textuel complexe, Thèse de didactologie des langues et des cultures, Université Paris III.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">CHATEAU, Anne, et ZUMBIHL, Hélène (2010). Le carnet de bord, un outil permettant le cheminement vers l'autonomisation dans un dispositif d'apprentissage de l'anglais en ligne?.<i> Alsic. Apprentissage des Langues et Systèmes d'Information et de Communication, 13.</i></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">DE L'EUROPE, Conseil (2003). Cadre européen commun de référence pour les langues: apprendre, enseigner, évaluer. Council of Europe.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">Désir. Dans <i>Centre National des Ressources Textuelles et Lexicales</i>. (2018). [En ligne]. Repéré à l’adresse <a href="http://www.cnrtl.fr/definition/d%C3%A9sir"><span style="color:blue">http://www.cnrtl.fr/definition/d%C3%A9sir</span></a></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">HEUTTE, Jean (2011). <i>La théorie des besoins psychologiques de base : clarifier les sources du climat motivationnel (Decy et Ryan, 2002, 2008). </i>Repéré à l’adresse :<i> </i><a href="http://jean.heutte.free.fr/spip.php?article160"><span style="color:blue">http://jean.heutte.free.fr/spip.php?article160</span></a> </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">KNOERR, Hélène (2016). « Perception de l’utilité du carnet d’apprentissage comme outil de conscientisation des transferts stratégiques et linguistiques entre le cours d’encadrement linguistique et le cours de discipline dans un programme universitaire de type EMILE », <i>Recherche et pratiques pédagogiques en langues de spécialité</i>. [En ligne], Vol. 35 N° 1 | 2016, mis en ligne le 26 janvier 2016. Repéré à l’adresse <a href="http://apliut.revues.org/5358"><span style="color:blue">http://apliut.revues.org/5358</span></a> Consulté le 04 juin 2017.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">LANCEREAU-FORSTER, Nicole (2014). « Variation de la perception de besoins langagiers dans un contexte d’IUT (Institut Universitaire de Technologie) », <i>Recherche et pratiques pédagogiques en langues de spécialité</i>, Vol. XXXIII N° 1 | 2014, 151-167.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">LEGENDRE, Renald (1993). <i>Dictionnaire actuel de l'éducation</i>. Guérin.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">LITTLE, David, GOULLIER, Francis et HUGHES, Gareth (2011). <i>Le portfolio européen des langues : rétrospective (1991-2011)</i>. Repéré à l’adresse : <a href="http://www.coe.int/fr/web/portfolio/the-european-language-portfolio-the-story-so-far-1991-2011-executive-summary"><span style="color:blue">http://www.coe.int/fr/web/portfolio/the-european-language-portfolio-the-story-so-far-1991-2011-executive-summary</span></a> Consulté le 14/06/2017.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">MANGIANTE, Jean-Marc et PARPETTE, Chantal (2004). Le français sur objectif spécifique : de l’analyse des besoins à l’élaboration d’un cours. Paris : Hachette.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">MANGIANTE, Jean-Marc et PARPETTE, Chantal (2011). <i>Le français sur objectif universitaire</i>. Grenoble : Presses Universitaires de Grenoble.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">MAURER, Bruno (2011). Enseignement des langues et construction européenne – Le plurilinguisme, nouvelle idéologie dominante, Éditions des Archives Contemporaines, Paris. </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">MOLINIE, Murielle (2004). Finalités du « biographique » en didactique des langues. <i>Le français aujourd'hui</i>, 147, (4), 87-95. doi:10.3917/lfa.147.0087.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">PANTANELLA, Raoul (2000). « Le carnet de débordements », <i>Cahiers pédagogiques</i>, n° 388-389, pp. 70-72.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">PAQUAY, Léopold, & SIROTA, Régine (2001). Le praticien réflexif, la diffusion d'un modèle de formation. <i>Recherche et formation-pour les professions de l'éducation, 36.</i></span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">RICHER, Jean Jacques (2016). Pour une reconceptualisation de la didactique du Français sur Objectifs Spécifiques. <i>Didactique du français sur objectifs spécifiques: Nouvelles recherches, nouveaux modèles</i>, 11.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">RICHTERICH, René, CHANCEREL, Jean-Louis, & de L'EUROPE, Conseil (1977). L'identification des besoins des adultes apprenant une langue étrangère: le recueil d'informations pour prendre en compte les besoins de l'apprenant dans un système européen d'unités capitalisables pour l'apprentissage des langues par les adultes. Conseil de l'Europe.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">RICHTERICH, René (1985). Besoins langagiers et objectifs d’apprentissage. Paris : Hachette. </span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">SCALLON, Gérard (2010). <i>Le portfolio ou dossier d’apprentissage : propos et réflexions</i>. Université de Laval. Repéré à l’adresse : <a href="http://www.fse.ulaval.ca/gerard.scallon/fascicules/portfolio.pdf"><span style="color:blue">http://www.fse.ulaval.ca/gerard.scallon/fascicules/portfolio.pdf</span></a> Consulté le 14/06/2017.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif">SPRINGER, Claude (2011). Le CECR : outil de diversification ou de standardisation ? <i>Cadre Européen Commun de Référence et Enseignement du Français en Corée</i>, Suwon/Seoul, Corée du Sud. [En ligne]. Repéré à l’adresse <a href="https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01377900"><span style="color:blue">https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01377900</span></a> </span></span></p>
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<hr align="center" size="3" width="100%" /></div>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><a name="_ftn1"></a><a href="#_ftnref1" title=""><span style="color:blue">[1]</span></a> Pour faire référence à l’appel à communications (en lien avec l’appel à contributions pour le numéro spécial de la revue TD FLE dont cet article est destiné), nous mentionnerons désormais les noms des auteures (Alcade, Denimal, Djordjevic et Pivot) ainsi que le numéro de paragraphe correspondant.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><a name="_ftn2"></a><a href="#_ftnref2" title=""><span style="color:blue">[2]</span></a> La première méthode s’intitule : « Réussir ses études de médecine », éditée en 2008 et destinée aux étudiants de la faculté de médecine d’Alger (Algérie). La seconde méthode s’intitule « J’étudie les sciences », éditée en 2017 et destinée aux étudiants des filières scientifiques de l’université Al Aasriya de Nouakchott (Mauritanie).</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><a name="_ftn3"></a><a href="#_ftnref3" title=""><span style="color:blue">[3]</span></a> Cette appellation a été notamment utilisée par Anne Chateau et Hélène Zumbihl (2010), que ces auteurs traduisent par « carnet de bord »</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><a name="_ftn4"></a><a href="#_ftnref4" title=""><span style="color:blue">[4]</span></a> Nunan (D.), 1989, Understanding language classrooms. A guide for teacherinitiated action, Prentice Hall international English Language teaching, coll. «Teacher Education and Development ».</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><a name="_ftn5"></a><a href="#_ftnref5" title=""><span style="color:blue">[5]</span></a> Traduit en français par « journal de bord d’apprentissage ». L’expression <i>learning diary </i>a été confirmée par D. Nunan (1989)</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><a name="_ftn6"></a><a href="#_ftnref6" title=""><span style="color:blue">[6]</span></a> Bailey (K.-M.), 1983, « Competitiveness and anxiety in adult second language learning : looking at and through the diary studies », Seliger (H.W.) & Long (M.H.) (éds.), <i>Classroom oriented research in second language acquisition</i>, Cambridge, Newbury House Publishers, pp. 67-103.</span></span></p>
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><a name="_ftn7"></a><a href="#_ftnref7" title=""><span style="color:blue">[7]</span></a> Traduction de Cadet (2007 : 158) : « Dans les exemples ci-dessus, tirés de l’expérience de tous les jours, il n’existe pas de notion préconstruite ou déductive de ce qu’on devrait observer ou enregistrer. Au contraire, un journal d’expériences est tenu sans se centrer sur un point de vue ou une question précise. »</span></span></p>
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