<h2 align="justify"><font face="Times New Roman, serif">Introduction</font></h2> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">Alors que le masque de la com&eacute;die et de la trag&eacute;die convoque des identit&eacute;s aux contours relativement stables dans la tradition th&eacute;&acirc;trale classique, composant une unit&eacute;, (Ubersfeld, [1977<a class="sdfootnoteanc" href="#sdfootnote1sym" name="sdfootnote1anc"><sup>1</sup></a>] 1996&nbsp;: 150), la cr&eacute;ation contemporaine repose au contraire sur le brouillage de ces identit&eacute;s et sur la construction sc&eacute;nique de &laquo;&nbsp;figures&nbsp;&raquo; multiples (Ryngaert, 2014&nbsp;: 111) &nbsp;: acrobates qui se d&eacute;doublent, pantins d&eacute;sarticul&eacute;s, cr&eacute;atures sous-marines aux ondulations presque vivantes, etc. Une grande vari&eacute;t&eacute; de pratiques &eacute;merge de l&rsquo;utilisation du genre th&eacute;&acirc;tral en didactique du fran&ccedil;ais langue &eacute;trang&egrave;re<a class="sdfootnoteanc" href="#sdfootnote2sym" name="sdfootnote2anc"><sup>2</sup></a>(Rollinat-Levasseur, 2015&nbsp;: 248), ainsi qu&rsquo;une pluralit&eacute; de r&eacute;pertoires (<i>ibid.</i>&nbsp;: 258), or, les textes dramatiques contemporains occupent une place encore assez marginale malgr&eacute; leur int&eacute;r&ecirc;t au niveau de la langue (Ryngaert, 2013 : 236), dans l&rsquo;usage de l&rsquo;implicite par exemple ou dans la pluralit&eacute; des situations d&rsquo;&eacute;nonciation (<i>ibid</i>.). Exploiter la litt&eacute;rature en didactique du FLE implique une conception questionnant les approches utilitaristes de la langue, puisqu&rsquo;elle permet de d&eacute;passer la perspective communicative dominante pour proposer des d&eacute;marches interpr&eacute;tatives (Godard, 2015&nbsp;: 90), impliquant la rencontre entre la subjectivit&eacute; d&rsquo;un auteur et la subjectivit&eacute; du lecteur, et envisageant l&rsquo;individu autrement que dans sa dimension sociale<a class="sdfootnoteanc" href="#sdfootnote3sym" name="sdfootnote3anc"><sup>3</sup></a> (Anderson, 1999&nbsp;: 239). Dans la mesure o&ugrave; apprendre une langue &eacute;trang&egrave;re suppose &laquo;&nbsp;la mobilisation d&rsquo;investissements du sujet qui modifieront son rapport au monde&nbsp;&raquo; (Anderson, 1999&nbsp;: 256), l&rsquo;&oelig;uvre peut ainsi &ecirc;tre consid&eacute;r&eacute;e comme une exp&eacute;rience de l&rsquo;autre et du langage, impliquant une transformation de soi comme de l&rsquo;autre (Castellotti, 2015&nbsp;: 42). Dans l&rsquo;exp&eacute;rience de l&rsquo;&oelig;uvre, le rapport &agrave; l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; est central, Quelles formes prend cette alt&eacute;rit&eacute;, en particulier au th&eacute;&acirc;tre, o&ugrave; le jeu convoque la figure de l&rsquo;autre, &agrave; la fois dans l&rsquo;incarnation d&rsquo;un personnage mais &eacute;galement comme partenaire de jeu&nbsp;? Quelle place occupe le th&eacute;&acirc;tre contemporain dans cette approche, dans la mesure o&ugrave; l&rsquo;&eacute;criture dramatique contemporaine tend &agrave; questionner les conventions du personnage ? Enfin, comment les zones d&rsquo;ombre du personnage contemporain (Ryngaert, 2007&nbsp;: 110) peuvent-elles rencontrer la subjectivit&eacute; du lecteur et participer &agrave; la construction et &agrave; la transformation de son identit&eacute; en langue &eacute;trang&egrave;re&nbsp;?</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">Depuis peu consid&eacute;r&eacute;e comme un objet d&rsquo;&eacute;tudes dans le syst&egrave;me scolaire fran&ccedil;ais, participant &agrave; l&rsquo;&eacute;ducation &agrave; l&rsquo;image, (Rollinat-Levasseur, 2017), la repr&eacute;sentation th&eacute;&acirc;trale contemporaine n&rsquo;est que rarement exploit&eacute;e en didactique du FLE, malgr&eacute; quelques supports r&eacute;cents<a class="sdfootnoteanc" href="#sdfootnote4sym" name="sdfootnote4anc"><sup>4</sup></a>. Or, cette approche du th&eacute;&acirc;tre convoque plusieurs dimensions subjectives telles que l&rsquo;imaginaire, le rapport &agrave; soi et &agrave; l&rsquo;autre, les repr&eacute;sentations, la sensibilit&eacute; et les perceptions, la m&eacute;moire, et l&rsquo;exp&eacute;rience v&eacute;cue ou l&rsquo;exp&eacute;rience ant&eacute;rieure du lecteur/spectateur. Ce sont ces dimensions subjectives li&eacute;es &agrave; la repr&eacute;sentation que nous aimerions questionner, nous demandant quel(s) rapport(s) &agrave; l&rsquo;autre et &agrave; soi peu(ven)t &eacute;merger de la confrontation aux langages de la repr&eacute;sentation (langage du corps, des gestes, des mots, des objets, du d&eacute;cor, des costumes)? Comment le &laquo;&nbsp;texte sc&eacute;nique&nbsp;&raquo; que constitue la repr&eacute;sentation, c&rsquo;est-&agrave;-dire, un agencement d&rsquo;&eacute;l&eacute;ments sc&eacute;niques &agrave; la fois fixes et changeants (Benhamou, 1988&nbsp;: 20) et qui implique une interpr&eacute;tation, peut-il rencontrer la subjectivit&eacute; de l&rsquo;apprenant&nbsp;? Sur quelles d&eacute;marches s&rsquo;appuyer pour faire &eacute;merger ce rapport &agrave; l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; dans l&rsquo;interpr&eacute;tation&nbsp;? Quelles transformations seront &agrave; l&rsquo;&oelig;uvre, dans le rapport &agrave; soi et &agrave; ses langues&nbsp;? Il nous faudra &eacute;galement revenir sur les conceptions de l&rsquo;apprentissage et de l&rsquo;enseignement qu&rsquo;impliquent des d&eacute;marches d&rsquo;exp&eacute;rience de l&rsquo;&oelig;uvre dramatique. </font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">Les dispositifs<a class="sdfootnoteanc" href="#sdfootnote5sym" name="sdfootnote5anc"><sup>5</sup></a> du type &eacute;cole du spectateur<a class="sdfootnoteanc" href="#sdfootnote6sym" name="sdfootnote6anc"><sup>6</sup></a> (Loriol &amp; Lallias, 2009), en permettant une approche plus sensible que scolaire du th&eacute;&acirc;tre, et en favorisant la fr&eacute;quentation de la cr&eacute;ation contemporaine, envisagent le genre th&eacute;&acirc;tral comme une &laquo;&nbsp;pratique&nbsp;&raquo; cr&eacute;ative, se rapprochant de ce fait de la conception r&eacute;cente de l&rsquo;approche de la litt&eacute;rature par les ateliers d&rsquo;&eacute;criture cr&eacute;ative (Houdart-M&eacute;rot, 2018&nbsp;). Ces d&eacute;marches, en valorisant l&rsquo;interpr&eacute;tation subjective de l&rsquo;&oelig;uvre et en prenant en compte toute sa polys&eacute;mie dans l&rsquo;acte de lecture et de pratique, rencontrent les perspectives actionnelles qui &laquo;&nbsp;con&ccedil;oivent l&rsquo;apprenant comme un acteur et l&rsquo;apprentissage comme une action&nbsp;&raquo; (Rollinat-Levasseur, 2015&nbsp;: 220). Mais, qu&rsquo;entendre par acteur et action, en particulier dans la perspective th&eacute;&acirc;trale qui est la n&ocirc;tre et qui cherche &agrave; d&eacute;passer l&rsquo;id&eacute;e d&rsquo;acteur consid&eacute;r&eacute; exclusivement comme un acteur social (CECRL, 2001&nbsp;: 9)&nbsp;? Qu&rsquo;entendons-nous &eacute;galement par &laquo;&nbsp;pratique&nbsp;&raquo; de la repr&eacute;sentation&nbsp;? Quelle est la place du corps dans une d&eacute;marche prenant en compte la th&eacute;&acirc;tralit&eacute;&nbsp; sous toutes ces formes, c&rsquo;est-&agrave;-dire, les langages propres au th&eacute;&acirc;tre? Enfin, quels r&ocirc;les jouent les nouvelles &eacute;critures contemporaines dans le rapport &agrave; soi et &agrave; l&rsquo;autre&nbsp;? .</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">La question de l&rsquo;exploitation de la repr&eacute;sentation contemporaine en langue nous conduit dans un premier temps &agrave; &eacute;voquer l&rsquo;id&eacute;e de l&rsquo;exp&eacute;rience de la repr&eacute;sentation contemporaine dans ses dimensions subjectives, mais &eacute;galement comme &laquo;&nbsp;rencontre alt&eacute;ritaire&nbsp;&raquo; (Huver &amp; Lorilleux, 2018&nbsp;: 9), porteuse de processus de transformations dans l&rsquo;acte d&rsquo;interpr&eacute;tation. Nous abordons ensuite la d&eacute;marche de l&rsquo;&eacute;cole du spectateur consid&eacute;r&eacute;e comme une &laquo;&nbsp;pratique&nbsp;&raquo; de la th&eacute;&acirc;tralit&eacute; regroupant tout ce qui fait la sp&eacute;cificit&eacute; du th&eacute;&acirc;tre et centr&eacute;e sur l&rsquo;acte d&rsquo;interpr&eacute;tation de l&rsquo;&oelig;uvre, nous demandant ainsi comment construire, avec le th&eacute;&acirc;tre, &laquo;&nbsp;des situations p&eacute;dagogiques propres &agrave; accueillir l&rsquo;&eacute;l&egrave;ve dans sa singularit&eacute;&nbsp;&raquo; (Co&iuml;aniz, 2001&nbsp;: 253), enfin, et &agrave; travers deux pi&egrave;ces du r&eacute;pertoire contemporain&nbsp;: Barons Perch&eacute;s de Mathurin Bolze et Vingt mille lieues sous les mers de Christian Hecq et Val&eacute;rie Lesort, nous analysons comment les apprenants construisent leur subjectivit&eacute; dans le rapport aux nouvelles &eacute;critures contemporaines, en particulier dans la confrontation aux personnages et &agrave; leur(s) identit&eacute;(s) sc&eacute;niques, mais &eacute;galement dans le jeu consid&eacute;r&eacute; dans notre d&eacute;marche comme une &laquo;&nbsp;r&eacute;&eacute;criture du texte sc&eacute;nique&nbsp;&raquo;.</font></p> <h2>1. La repr&eacute;sentation th&eacute;&acirc;trale dans la construction du sujet en langue &eacute;trang&egrave;re</h2> <h3 align="justify"><font face="Times New Roman, serif">1.1. L&rsquo;exp&eacute;rience de la repr&eacute;sentation contemporaine et son interpr&eacute;tation</font></h3> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">En classe de langue, l&rsquo;&eacute;l&egrave;ve s&rsquo;inscrit souvent dans une &laquo;&nbsp;relation o&ugrave; l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; s&rsquo;absente&nbsp;&raquo;, relation qui est &laquo;&nbsp;priv&eacute;e ainsi de d&eacute;sir et de socialit&eacute;&nbsp;&raquo; (Co&iuml;aniz, 2001&nbsp;: 49). Or, la langue peut &ecirc;tre v&eacute;cue comme un &laquo;&nbsp;lieu d&rsquo;interpr&eacute;tation&nbsp;&raquo; (<i>ibid.</i>&nbsp;: 79) et l&rsquo;&oelig;uvre d&rsquo;art ou l&rsquo;&oelig;uvre litt&eacute;raire peut consister un support d&rsquo;exp&eacute;rience de l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; en constituant un mode d&rsquo;acc&egrave;s au monde (Godard, 2015&nbsp;: 6), et en impliquant un processus de transformation dans son interpr&eacute;tation. Mais de quelle interpr&eacute;tation parle-t-on et &agrave; travers quelle d&eacute;marche&nbsp;? Cela pose la question du statut de la litt&eacute;rature dans l&rsquo;enseignement, voire de la culture ainsi que du sujet. Le CECRL, en adoptant la perspective actionnelle qui incite &agrave; envisager l&rsquo;apprenant comme un acteur social, assigne &agrave; la litt&eacute;rature une &laquo;&nbsp;place ambigu&euml;&nbsp;&raquo; (Woerly, 2015&nbsp;: 133)&nbsp;: bien que consid&eacute;r&eacute;e comme un apport essentiel dans l&rsquo;utilisation esth&eacute;tique ou po&eacute;tique de la langue ainsi que comme une &laquo;&nbsp;contribution majeure au patrimoine culturel europ&eacute;en&nbsp;&raquo; (CECRL, 2001&nbsp;: 47), la litt&eacute;rature &laquo;&nbsp;fait figure de parent pauvre&nbsp;&raquo; (Woerly, 2015&nbsp;: 133). Le texte litt&eacute;raire implique pourtant des perspectives p&eacute;dagogiques nouvelles puisque c&rsquo;est l&rsquo;utilisation subjective et cr&eacute;atrice du langage qui est mise en avant (ibid.&nbsp;: 134). Le th&eacute;&acirc;tre peut d&egrave;s lors &ecirc;tre consid&eacute;r&eacute; comme une litt&eacute;rature &laquo;&nbsp;en acte&nbsp;&raquo; (Rollinat-Levasseur, 2015&nbsp;: 220) puisque le texte devient une &laquo;&nbsp;parole incarn&eacute;e&nbsp;&raquo; (<i>ibid</i>.: 221) par le jeu de l&rsquo;interpr&eacute;tation de l&rsquo;acteur&nbsp;: nous postulons que cette incarnation de la parole rend l&rsquo;exp&eacute;rience de la th&eacute;&acirc;tralit&eacute; sp&eacute;cifique et implique un nouveau regard sur la langue pour le lecteur/spectateur de langue &eacute;trang&egrave;re.</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">L&rsquo;interpr&eacute;tation qu&rsquo;un lecteur fait d&rsquo;un texte place l&rsquo;exp&eacute;rience de la litt&eacute;rature dans le paradigme des sensations, des perceptions et de l&rsquo;imaginaire, et permet aux apprenants &laquo;&nbsp;d&rsquo;&eacute;changer entre eux sur leur lecture, d&rsquo;&eacute;laborer ensemble une interpr&eacute;tation de l&rsquo;&oelig;uvre, de partager leurs &eacute;motions et leurs sensations &agrave; la lecture&nbsp;&raquo; (Rollinat-Levasseur, 2015&nbsp;: 221). La repr&eacute;sentation th&eacute;&acirc;trale contemporaine en tant que texte sc&eacute;nique peut se pr&ecirc;ter &eacute;galement aux jeux de l&rsquo;interpr&eacute;tation, sa polys&eacute;mie vient de la tension entre l&rsquo;intention de l&rsquo;auteur ou de l&rsquo;artiste et la r&eacute;ception du lecteur ou du spectateur, d&rsquo;autant plus dans le texte contemporain qui se m&eacute;fie des intentions et ne se livre pas facilement, d&rsquo;o&ugrave; un malentendu parfois durable entre ceux qui &eacute;crivent et ceux qui assistent aux pi&egrave;ces (Ryngaert, 2007&nbsp;: 5). Comment favoriser l&rsquo;interpr&eacute;tation des apprenants, &eacute;vitant une d&eacute;marche analytique sur la repr&eacute;sentation&nbsp;? Quelle est la place de la description par exemple, et la place du corps et du jeu dans l&rsquo;interpr&eacute;tation puisque nous sommes au th&eacute;&acirc;tre&nbsp;? Comment passer du spectateur passif, s&eacute;duit par les images, &agrave; une forme d&rsquo;&eacute;mancipation (Ranci&egrave;re, 2008)&nbsp;? Si l&rsquo;approche propos&eacute;e tente d&rsquo;offrir &agrave; l&rsquo;apprenant &laquo;&nbsp;un acc&egrave;s par lequel ce dernier puisse s&rsquo;inscrire comme sujet parlant et investir affectivement les mots de la langue nouvelle&nbsp;&raquo; (Vadot, 2012&nbsp;: 261), quelle sera alors la place du collectif dans l&rsquo;interpr&eacute;tation? Le th&eacute;&acirc;tre contemporain, envisageant de nouvelles fa&ccedil;ons de raconter, notamment sous des formes de partage des voix qui &laquo;&nbsp;s&rsquo;&eacute;cartent toujours du strict &eacute;change dialogu&eacute;&nbsp;&raquo; (Ryngaert, 2012&nbsp;: 10) et interrogeant de multiples fa&ccedil;ons le statut du personnage sur sc&egrave;ne et sa repr&eacute;sentation (Sermon, 2012), remet en cause nos habitudes de spectateurs &agrave; travers un &laquo;&nbsp;travail d&rsquo;opacification des signes&nbsp;&raquo; (Ubersfeld, [1977] 1996&nbsp;: 248). Nous postulons que c&rsquo;est dans ce rapport &agrave; la th&eacute;&acirc;tralit&eacute; contemporaine que r&eacute;side la possibilit&eacute; pour l&rsquo;apprenant de se consid&eacute;rer comme un acteur non plus exclusivement destin&eacute; &agrave; &laquo;&nbsp;accomplir des t&acirc;ches&nbsp;&raquo; dans une situation sp&eacute;cifique (CECRL, 2001&nbsp;: 15), mais &agrave; interroger de multiples fa&ccedil;ons son rapport &agrave; la langue et son rapport &agrave; l&rsquo;autre. La richesse herm&eacute;neutique de la repr&eacute;sentation contemporaine est provoqu&eacute;e par le plaisir de la repr&eacute;sentation et des diff&eacute;rentes formes d&rsquo; identification, &eacute;motion qui ne vient pas seulement de la po&eacute;sie des mots et de leur pouvoir &eacute;vocateur, mais de la po&eacute;sie de l&rsquo;image et du son, de la polys&eacute;mie du jeu des corps dans l&rsquo;espace, dans l&rsquo;imaginaire des nouvelles formes de repr&eacute;sentation, &agrave; travers le jeu des marionnettes par exemple. Cette richesse peut entrer en r&eacute;sonance avec notre v&eacute;cu, notre sensibilit&eacute;, nos craintes ou nos joies, et peut constituer un support de projection vers nos d&eacute;sirs, notamment le &laquo;&nbsp;d&eacute;sir de parole en langue &eacute;trang&egrave;re&nbsp;&raquo; (Pierra, 2006&nbsp;: 15), en particulier dans le jeu.</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">Contrairement &agrave; une conception de l&rsquo;apprentissage qui favorise une standardisation de la langue, ce type de pratique p&eacute;dagogique comporte une part d&rsquo;inconnu et se laisse difficilement ma&icirc;triser dans des grilles de comp&eacute;tences&nbsp;: dans la mesure o&ugrave; il s&rsquo;appuie sur l&rsquo;exp&eacute;rience individuelle, les &eacute;motions, l&rsquo;exp&eacute;rience du monde et l&rsquo;histoire de chacun, ainsi que sur sa cr&eacute;ativit&eacute;&nbsp;:</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">&laquo;&nbsp;L&rsquo;exp&eacute;rience herm&eacute;neutique, en effet, &ccedil;a ne se commande pas&nbsp;: en premier lieu, l&rsquo;enseignant ne sait pas s&rsquo;il ressortira quelque chose de la fr&eacute;quentation de l&rsquo;&oelig;uvre qu&rsquo;il propose. En second lieu, s&rsquo;il en ressort quelque chose, il est impossible d&rsquo;anticiper sur ce qui en ressortira&nbsp;&raquo; (Huver &amp; Lorilleux, 2018&nbsp;: 11).</font></p> <h3 align="justify"><font face="Times New Roman, serif">1.2. Le rapport &agrave; l&rsquo;autre dans la th&eacute;&acirc;tralit&eacute;</font></h3> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">Quels rapports &agrave; l&rsquo;autre implique l&rsquo;exp&eacute;rience de la repr&eacute;sentation contemporaine&nbsp;? &laquo;&nbsp;Interpr&eacute;tation&nbsp;&raquo; au th&eacute;&acirc;tre signifie &eacute;galement que le com&eacute;dien joue un personnage pour le rendre pr&eacute;sent sur sc&egrave;ne. Or, la notion de personnage dans le th&eacute;&acirc;tre contemporain est questionn&eacute;e en d&eacute;jouant ses pr&eacute;suppos&eacute;s (Ryngaert, 2014: 111), les &laquo;&nbsp;figures&nbsp;&raquo; que la repr&eacute;sentation contemporaine met en jeu (acrobates &agrave; l&rsquo;identit&eacute; floue, marionnettes, etc.) sont moins li&eacute;es &agrave; des r&eacute;f&eacute;rents du monde que &laquo;&nbsp;li&eacute;es &agrave; un univers d&rsquo;&eacute;criture&nbsp;&raquo; (<i>ibid.</i>&nbsp;: 112)&nbsp;: le rapport &agrave; l&rsquo;autre pour le spectateur et les proc&eacute;d&eacute;s d&rsquo;identification se complexifient. Le personnage est &agrave; la fois &laquo;&nbsp;sujet du discours et objet du discours&nbsp;&raquo; (<i>ibid.</i> : 118) et c&rsquo;est aussi dans la parole du spectateur qu&rsquo;il existe. C&rsquo;est dans les rapports &agrave; l&rsquo;identification aux personnages ou &laquo;&nbsp;figures&nbsp;&raquo; dans la nouvelle langue que se situe notre point d&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t, non pas pour savoir &agrave; qui l&rsquo;apprenant aimerait ressembler en &laquo;&nbsp;s&rsquo;&eacute;non&ccedil;ant dans cette langue&nbsp;&raquo; (Vadot, 2012&nbsp;: 262), mais plut&ocirc;t de quelle(s) mani&egrave;re(s) il se projette dans le personnage et comment cette projection s&rsquo;inscrit dans son langage. </font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">Ce type de d&eacute;marche serait proche d&rsquo;une conception &laquo;&nbsp;po&iuml;&eacute;tique&nbsp;&raquo; de la langue (Huver &amp; Lorilleux, 2018) qui propose de d&eacute;passer une vision &laquo;&nbsp;d&eacute;politis&eacute;e&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;technicis&eacute;e&nbsp;&raquo; de la cr&eacute;ativit&eacute; en langue (<i>ibid.</i>&nbsp;: 5) pour l&rsquo;ins&eacute;rer dans un champ plus exp&eacute;rientiel, inscrivant les langages et langue comme &laquo;&nbsp;exp&eacute;riences du monde&nbsp;&raquo; (<i>ibid.</i> &nbsp;: 6). L&rsquo;interpr&eacute;tation d&rsquo;une &oelig;uvre peut participer de ce chemin, offrant la possibilit&eacute; d&rsquo;une &laquo;&nbsp;v&eacute;ritable rencontre alt&eacute;ritaire&nbsp;&raquo; (<i>ibid.</i>&nbsp;: 9) dans l&rsquo;id&eacute;e que, dans l&rsquo;apprentissage de la langue, &laquo;&nbsp;s&rsquo;op&egrave;re une appropriation de sens qui , d&rsquo;&eacute;trangers, adviennent en propre &agrave; celui qui apprend&nbsp;; &agrave; celui qui, dans son effort d&rsquo;apprentissage, se (trans-)forme&nbsp;&raquo; (<i>ibid</i>.). En questionnant la notion de personnage, en envisageant d&rsquo;autres mani&egrave;res de le repr&eacute;senter, en ouvrant les interpr&eacute;tations du texte sc&eacute;nique, la sc&egrave;ne contemporaine offre une rencontre avec l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; bas&eacute;e sur le sensible et l&rsquo;imaginaire, o&ugrave; la langue devient le lieu de l&rsquo;exploration de cette rencontre. Dans la mesure o&ugrave; le th&eacute;&acirc;tre peut &laquo;&nbsp;offrir un espace de m&eacute;diation entre l&rsquo;identit&eacute; et l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; aux apprenants&nbsp;&raquo; (Rollinat-Levasseur, 2013&nbsp;: 31), nous proposons une d&eacute;marche d&rsquo;accompagnement au spectacle, une &laquo;&nbsp;&eacute;cole du spectateur&nbsp;&raquo; (Loriol &amp; Lallias, 2009) dans une double perspective&nbsp;: une r&eacute;ception collective de l&rsquo;&oelig;uvre sous forme d&rsquo;&nbsp;&laquo;&nbsp;analyse chorale&nbsp;&raquo;, et, dans un second temps, une r&eacute;&eacute;criture du texte sc&eacute;nique dans la pratique du jeu dramatique. Ces deux temps de l&rsquo;exp&eacute;rience de l&rsquo;&oelig;uvre peuvent engager une interpr&eacute;tation &agrave; plusieurs niveaux&nbsp;: dans le discours qui d&eacute;crit et compare et cherche &agrave; donner un sens, puis, dans l&rsquo;interpr&eacute;tation cr&eacute;ative du corps et de l&rsquo;imaginaire, impliquant une forme d&rsquo;appropriation du personnage par l&rsquo;apprenant. L&rsquo;&eacute;cole du spectateur que nous proposons en langue &eacute;trang&egrave;re cherche &agrave; favoriser une exploration des langages de la th&eacute;&acirc;tralit&eacute; en activant les diff&eacute;rents r&eacute;seaux du texte sc&eacute;nique et en mobilisant le &laquo;&nbsp;re-travail&nbsp;&raquo; de l&rsquo;&oelig;uvre (Martin, 2005), re-travail qui implique, dans notre d&eacute;marche, les dimensions th&eacute;&acirc;trales du corps et de l&rsquo;espace&nbsp;: qu&rsquo;apportent ces dimensions dans le rapport &agrave; la langue de l&rsquo;apprenant&nbsp;? Comment seront-elles envisag&eacute;es par les apprenants&nbsp;? Nous utilisons l&rsquo;appellation &laquo;&nbsp;&eacute;cole du spectateur&nbsp;&raquo; pour notre d&eacute;marche p&eacute;dagogique en didactique des langues, tout en &eacute;cartant une approche trop acad&eacute;mique de la repr&eacute;sentation th&eacute;&acirc;trale centr&eacute;e sur une approche textuelle et patrimoniale, que le terme &laquo;&nbsp;&eacute;cole&nbsp;&raquo; pourrait induire. Nous souhaitons au contraire privil&eacute;gier les dimensions esth&eacute;tiques, imaginaires et cr&eacute;atives du th&eacute;&acirc;tre &agrave; travers ce qui conviendrait plut&ocirc;t d&rsquo;appeler &laquo;&nbsp;atelier du spectateur&nbsp;&raquo;, en pla&ccedil;ant au c&oelig;ur de notre dispositif r&eacute;ception et pratique artistique (Dulibine &amp; Grosjean, 2013). Le jeu dramatique tel que nous le concevons permet de retravailler le texte sc&eacute;nique en l&rsquo;exp&eacute;rimentant dans son propre corps et dans son propre langage, le th&eacute;&acirc;tre devenant alors une forme de connaissance sensible et corporelle sur le monde et les autres (Aden, 2015&nbsp;: 436). Il ne s&rsquo;agit pas uniquement d&rsquo;explorer la rencontre alt&eacute;ritaire dans le travail de r&eacute;ception mais de rejouer cette rencontre, de la transformer, dans son propre corps, le rejeu cr&eacute;atif permettant une forme de &laquo;&nbsp;transfert&nbsp;&raquo; laissant des traces s&rsquo;inscrivant dans le corps de chacun (Lecoq, [1997] 2016&nbsp;: 69). Nous postulons une rencontre du sujet avec lui-m&ecirc;me et avec l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; au cours de ce re-travail esth&eacute;tique du texte sc&eacute;nique dans le jeu&nbsp;:</font></p> <blockquote> <p>&laquo;&nbsp;C&rsquo;est dans des mouvements pluriels de langues, de langages et de cultures, par une subjectivation positive des pratiques linguistiques obtenue gr&acirc;ce &agrave; la cr&eacute;ation sc&eacute;nique langagi&egrave;re de nature esth&eacute;tique et par ses relations &agrave; d&rsquo;autres, que le sujet se verra reconnu dans son corps et dans son identit&eacute; mouvante&nbsp;&raquo; (Pierra, 2006&nbsp;: 19).</p> </blockquote> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">Quelle sera alors la place de l&rsquo;enseignant dans ce type de d&eacute;marche, partant du principe qu&rsquo;il n&rsquo;est pas sp&eacute;cialiste de dramaturgie et que ses apprenants n&rsquo;ont pas vocation &agrave; l&rsquo;&ecirc;tre&nbsp;? Quelle conception de l&rsquo;enseignement et du rapport &agrave; l&rsquo;&oelig;uvre est impliqu&eacute;e par cette approche&nbsp;? Quelles formes de langages appara&icirc;tront de cette rencontre avec l&rsquo;&oelig;uvre dramatique contemporaine&nbsp;?</font></p> <h2 align="justify"><font face="Times New Roman, serif">2. Donn&eacute;es de terrain et m&eacute;thodologie</font></h2> <h3 align="justify"><font face="Times New Roman, serif">2.1. Objectifs et d&eacute;roulement des ateliers</font></h3> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">Quatre ateliers d&rsquo;&eacute;cole du spectateur ont &eacute;t&eacute; propos&eacute;s &agrave; un groupe de quatorze apprenants de l&rsquo;universit&eacute; de Cergy-Pontoise de niveau A2/B1 pendant l&rsquo;ann&eacute;e universitaire 2016-2017. Ces apprenants suivaient un dipl&ocirc;me universitaire de fran&ccedil;ais intensif au centre de langue fran&ccedil;aise (CLF) de cette universit&eacute; avec comme objectif l&rsquo;obtention du niveau B2. Ces ateliers s&rsquo;int&eacute;graient aux cours de fran&ccedil;ais g&eacute;n&eacute;ral et &agrave; objectifs universitaires en proposant d&rsquo;articuler aux comp&eacute;tences linguistiques et interculturelles une exploration des dimensions po&eacute;tiques et dramatiques de la langue &agrave; travers les diff&eacute;rents types de langages sc&eacute;niques, propres &agrave; la dramaturgie des spectacles. A chaque atelier d&rsquo;&eacute;cole du spectateur correspondent des objectifs sp&eacute;cifiques li&eacute;s &agrave; cette dramaturgie, consid&eacute;r&eacute;e comme &laquo;&nbsp;ce qui anime, proprement, la sc&egrave;ne th&eacute;&acirc;trale, qu&rsquo;elle proc&egrave;de d&rsquo;un texte dramatique ou pas&nbsp;&raquo; (Danan, 2010&nbsp;: 67). Dans le cadre de notre r&eacute;flexion sur le sujet en langue et ses rapports &agrave; l&rsquo;autre, nous avons souhait&eacute; privil&eacute;gier deux repr&eacute;sentations dans la mesure o&ugrave; ces cr&eacute;ations ont provoqu&eacute; une exp&eacute;rience particuli&egrave;re de la relation aux personnages et &agrave; soi. Il s&rsquo;agit du spectacle Barons Perch&eacute;s de Mathurin Bolze, m&ecirc;lant les langages du cirque et du th&eacute;&acirc;tre, repr&eacute;sent&eacute; le mercredi 1e mars 2017 &agrave; La Sc&egrave;ne Nationale de Cergy<a class="sdfootnoteanc" href="#sdfootnote7sym" name="sdfootnote7anc"><sup>7</sup></a>, et de Vingt Mille Lieues sous les mers de Christian Hecq et Val&eacute;rie Lesort, spectacle de marionnettes cr&eacute;&eacute; &agrave; partir du roman de Jules Verne, repr&eacute;sent&eacute; le mardi 31 janvier 2017 &agrave; la Com&eacute;die Fran&ccedil;aise. Les spectacles ont &eacute;t&eacute; choisis en fonction de leur int&eacute;r&ecirc;t dramaturgique&nbsp;: hybridit&eacute; des diff&eacute;rents langages sc&eacute;niques pour Barons Perch&eacute;s, &agrave; mi-chemin entre th&eacute;&acirc;tre et acrobatie, et &laquo;&nbsp;dramaturgie marionnettique&nbsp;&raquo; dans le cas de Vingt Mille Lieues sous les mers (Sermon, 2012&nbsp;: 80), un type de dramaturgie qui autorise &agrave; &laquo;&nbsp;d&eacute;passer les champs du possible&nbsp;&raquo;et &agrave; &laquo;&nbsp;hybrider les niveaux d&rsquo;&eacute;nonciation et les types de pr&eacute;sence&nbsp;&raquo; (<i>ibid.</i>&nbsp;: 79), dimensions propres &agrave; la repr&eacute;sentation contemporaine. Ces deux spectacles pr&eacute;sentent l&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t de questionner les codes de la construction du personnage en questionnant les identit&eacute;s, dans le premier cas, et en proposant d&rsquo;autres types de figuration dans le deuxi&egrave;me&nbsp;: comment les apprenants parleront-ils de ces pi&egrave;ces, quels liens pourront-ils tisser et quel sera le r&ocirc;le de l&rsquo;enseignant dans cette perspective&nbsp;? Le niveau de langue des apprenants a &eacute;galement constitu&eacute; un crit&egrave;re de s&eacute;lection&nbsp;: Barons Perch&eacute;s est un spectacle questionnant le langage des corps dans l&rsquo;espace et comporte, de ce fait, peu de difficult&eacute; li&eacute;e &agrave; la compr&eacute;hension de l&rsquo;oral (en tout cas a priori<a class="sdfootnoteanc" href="#sdfootnote8sym" name="sdfootnote8anc"><sup>8</sup></a>)&nbsp;; le roman de Jules Verne &eacute;tait d&eacute;j&agrave; connu par les apprenants, ce qui a pu faciliter, pour certains, la compr&eacute;hension de la pi&egrave;ce. , </font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">Les deux ateliers pr&eacute;sent&eacute;s comportaient trois &eacute;tapes&nbsp;:</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">1. Une &eacute;tape de r&eacute;ception collective du spectacle cherchant &agrave; recueillir les impressions spontan&eacute;es des apprenants imm&eacute;diatement apr&egrave;s la repr&eacute;sentation et souvent dans le hall du th&eacute;&acirc;tre ou dans des salles de r&eacute;p&eacute;tition. La forme de conversation libre qui s&rsquo;ensuit fait &eacute;merger les premi&egrave;res &eacute;motions vives. Dans cet exercice, l&rsquo;enseignant relance les d&eacute;bats &agrave; travers un questionnement tr&egrave;s ouvert, favorisant une approche sensible du spectacle.</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">2. Une seconde &eacute;tape de r&eacute;ception collective est propos&eacute;e quelques jours plus tard, plus structur&eacute;e et impliquant une &laquo;&nbsp;&eacute;cole du regard&nbsp;&raquo; (Mancel, 2009). Appel&eacute;e &laquo;&nbsp;analyse chorale&nbsp;&raquo; de la repr&eacute;sentation (Mancel, 2009), il s&rsquo;agit d&rsquo;une &eacute;tape au cours de laquelle l&rsquo;enseignant cherche &agrave; concentrer l&rsquo;attention des apprenants sur tous les signes de la repr&eacute;sentation, favorisant une forme de distanciation. Ce travail de description, plus objectif, incite les participants &agrave; d&eacute;passer les premiers jugements de valeur pour s&rsquo;int&eacute;resser pr&eacute;cis&eacute;ment &agrave; ce qu&rsquo;ils ont vu et proposer des hypoth&egrave;ses de sens &agrave; partir de ces signes. Il s&rsquo;agit par cons&eacute;quent d&rsquo;un premier travail d&rsquo;interpr&eacute;tation, dans une forme d&rsquo;approche sensible de la repr&eacute;sentation. L&rsquo;&eacute;mancipation du spectateur peut commencer lorsque l&rsquo;acte de regarder est con&ccedil;u comme une action, lorsque le spectateur &laquo;&nbsp;compose son propre po&egrave;me avec les &eacute;l&eacute;ments du po&egrave;me en face de lui&nbsp;&raquo; (Ranci&egrave;re, 2008&nbsp;: 19).</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">Au cours de ces deux &eacute;tapes de r&eacute;ception, le rapport au personnage se construit de mani&egrave;re &agrave; la fois individuelle et collective dans une premi&egrave;re interpr&eacute;tation &eacute;mergeant des interactions, qui ne sont donc pas consid&eacute;r&eacute;es de mani&egrave;re exclusivement linguistique, ce qui &laquo;&nbsp;engendre encore une fois la disparition du sujet en tant que tel&nbsp;&raquo; (Anderson, 1999&nbsp;: 20). A contrario, les traces subjectives du rapport &agrave; soi et &agrave; l&rsquo;autre apparaissent &agrave; travers des formes de r&eacute;sonances ou d&rsquo;associations qui &eacute;mergent de l&rsquo;exp&eacute;rience de la repr&eacute;sentation</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">3. Enfin, une derni&egrave;re &eacute;tape de pratiques th&eacute;&acirc;trale comportant dans un premier temps le mime ou &laquo;&nbsp;rejeu cr&eacute;atif&nbsp;&raquo; (Lecoq, [1997] 2016) &laquo;&nbsp;acte fondamental&nbsp;&raquo; pour la cr&eacute;ation dramatique (<i>ibid.</i>&nbsp;: 39) car il permet de &laquo;&nbsp;faire corps avec et donc comprendre mieux&nbsp;&raquo; (<i>ibid.</i>), et, dans un deuxi&egrave;me temps, une improvisation avec une contrainte de jeu articulant objectifs linguistiques et dramaturgiques, engageant l&rsquo;apprenant dans une forme de cr&eacute;ation sc&eacute;nique collective. Le mod&egrave;le de jeu dramatique vers lequel nous tendons ne cherche pas &agrave; imiter un th&eacute;&acirc;tre professionnel o&ugrave; seul le r&eacute;sultat compte<a class="sdfootnoteanc" href="#sdfootnote9sym" name="sdfootnote9anc"><sup>9</sup></a>, mais se pr&eacute;occupe en premier lieu du processus mis en &oelig;uvre et de l&rsquo;autonomisation des participants dans le jeu (Dulibine &amp; Grosjean, 2013&nbsp;: 4). Ces deux pratiques de jeu dramatique offrent aux apprenants la possibilit&eacute; d&rsquo;explorer dans leur corps la th&eacute;&acirc;tralit&eacute; et les langages propres &agrave; la dramaturgie des deux spectacles propos&eacute;s. Elles d&eacute;passent la recherche d&rsquo;une &laquo;&nbsp;production&nbsp;&raquo; dans la mesure o&ugrave; elles constituent une forme d&rsquo;interpr&eacute;tation incarn&eacute;e de l&rsquo;&oelig;uvre et laissent le champ libre &agrave; l&rsquo;apprenant pour s&rsquo;engager en tant que sujet cr&eacute;ateur en langue &eacute;trang&egrave;re dans le jeu, &agrave; travers l&rsquo;acc&egrave;s esth&eacute;tique au langage et les formes de relation &agrave; l&rsquo;autre (Pierra, 2006&nbsp;: 19). Elles permettent en outre une forme d&rsquo;exploration du &laquo;&nbsp;fonds po&eacute;tique commun&nbsp;&raquo; (Lecoq, [1997] 2016&nbsp;: 70) qui engage l&rsquo;apprenant dans son corps et dans son imaginaire &agrave; partir des traces que nos diverses exp&eacute;riences, notamment l&rsquo;exp&eacute;rience de l&rsquo;&oelig;uvre, laissent en nous. De quelles mani&egrave;res ces traces &eacute;mergeront dans la langue de l&rsquo;apprenant, comment envisagera-t-il ce &laquo;&nbsp;fonds po&eacute;tique commun&nbsp;&raquo; dans le rapport &agrave; la th&eacute;&acirc;tralit&eacute;&nbsp;? </font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">L&rsquo;objectif principal de l&rsquo;atelier autour du spectacle de Christian Lesort et de Val&eacute;rie Hecq est une exploration de l&rsquo;adaptation sc&eacute;nique du roman de Jules Verne, en particulier &agrave; travers l&rsquo;atmosph&egrave;re de l&rsquo;art marionnettique et l&rsquo;int&eacute;gration du r&eacute;cit dans la dramaturgie. Comment adapter sur sc&egrave;ne le genre romanesque, en particulier &agrave; partir d&rsquo;une &oelig;uvre traitant de la mer et des explorations marines&nbsp;? Comment parler de cette exp&eacute;rience de spectateur en langue &eacute;trang&egrave;re&nbsp;? En ce qui concerne le spectacle de Mathurin Bolze, l&rsquo;atelier est consacr&eacute; au travail des corps dans l&rsquo;espace et &agrave; l&rsquo;exploration de l&rsquo;identit&eacute; des personnages, personnages s&rsquo;approchant davantage de &laquo;&nbsp;figures&nbsp;&raquo; &agrave; l&rsquo;identit&eacute; floue et souvent multiple. En quoi cette polys&eacute;mie permise par le brouillage des identit&eacute;s et par les nouvelles figurations de l&rsquo;art marionnettique peut-elle engager l&rsquo;apprenant dans un nouveau rapport &agrave; soi et &agrave; l&rsquo;autre, ainsi qu&rsquo;au langage&nbsp;? . </font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">Quelle est la place de l&rsquo;enseignant dans cette perspective&nbsp;? Son r&ocirc;le, lors des trois &eacute;tapes de la d&eacute;marche, est essentiel&nbsp;: il laisse libre cours &agrave; la parole et veille &agrave; ce que cette parole circule entre tous les participants, il structure par la suite le regard lors de l&rsquo;analyse chorale, tout en accordant &laquo;&nbsp;la pr&eacute;s&eacute;ance &agrave; la parole chorale de l&rsquo;auditoire&nbsp;&raquo; (Mancel, 2009), il peut, ainsi, &ecirc;tre consid&eacute;r&eacute; comme un animateur qui guide l&rsquo;apprenant vers l&rsquo;&oelig;uvre et une forme d&rsquo;interpr&eacute;tation. Une forme de &laquo;&nbsp;ma&iuml;eutique&nbsp;&raquo; se met alors en place entre l&rsquo;animateur et les spectateurs, ou accouchement d&rsquo;une pens&eacute;e sur le spectacle, une &laquo;&nbsp;m&eacute;moire sensible de spectateur&nbsp;&raquo; (<i>ibid.</i> ), qui devient progressivement m&eacute;moire collective. Enfin, c&rsquo;est &agrave; lui que revient la responsabilit&eacute; de proposer des contraintes de jeu permettant aux apprenants &agrave; la fois d&rsquo;investir la parole sc&eacute;nique dans leur corps et leur voix, mais &eacute;galement de cr&eacute;er une nouvelle proposition artistique &agrave; partir de leur imaginaire et de leurs exp&eacute;riences de vie<a class="sdfootnoteanc" href="#sdfootnote10sym" name="sdfootnote10anc"><sup>10</sup></a>. Un des r&ocirc;les de l&rsquo;enseignant dans cette activit&eacute; consiste &agrave; &laquo;&nbsp;faire d&eacute;sirer la lecture ou l&rsquo;interpr&eacute;tation des textes&nbsp;&raquo; (Dulibine &amp; Grosjean, 2013&nbsp;: 7) en permettant de tisser des liens entre l&rsquo;&oelig;uvre et le spectateur/joueur, en partant de deux crit&egrave;res&nbsp;: un travail dramaturgique pr&eacute;alable et une adaptation &agrave; la r&eacute;alit&eacute; de la classe (<i>ibid.</i>&nbsp;: 12). L&rsquo;enseignant peut par cons&eacute;quent &ecirc;tre consid&eacute;r&eacute; comme un passeur de langue et de langage &agrave; travers le texte sc&eacute;nique et ses potentialit&eacute;s langagi&egrave;res et imaginaires, </font></p> <h3 align="justify"><font face="Times New Roman, serif">2.2. M&eacute;thodologie d&rsquo;analyse</font></h3> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">Nous avons observ&eacute; pendant deux semestres universitaires la construction des langages &agrave; la fois verbaux et non verbaux de l&rsquo;apprenant dans sa relation aux repr&eacute;sentations dramatiques. Le point de vue que nous avons retenu pour l&rsquo;analyse de nos donn&eacute;es articule analyse dramaturgique de la repr&eacute;sentation contemporaine (Ryngaert, 2007, Sermon &amp; Ryngaert, 2012) et approche imaginaire et po&eacute;tique de la langue &eacute;trang&egrave;re (Huver &amp; Lorilleux, 2018), &agrave; travers l&rsquo;exploration de la th&eacute;&acirc;tralit&eacute;, notamment les pratiques th&eacute;&acirc;trales en tant que construction du sujet apprenant (Pierra, 2006). Notre recueil de donn&eacute;es est constitu&eacute; de vid&eacute;os des entretiens apr&egrave;s repr&eacute;sentations et des ateliers d&rsquo;&eacute;cole du spectateur, d&rsquo;entretiens semi-guid&eacute;s en fin de parcours et de carnets num&eacute;riques. Nous avons ainsi pu croiser des donn&eacute;es &agrave; la fois collectives et individuelles, orales et &eacute;crites, verbales et non-verbales. Une dimension r&eacute;flexive est apport&eacute;e dans notre approche dans la mesure o&ugrave; les apprenants ont &eacute;t&eacute; incit&eacute;s &agrave; revenir sur leurs productions au cours des entretiens, dimension importante puisque permettant de d&eacute;passer le produit (Huver &amp; Lorilleux, 2018&nbsp;: 10) pour ouvrir sur l&rsquo;exp&eacute;rience. Si le sujet peut &eacute;galement &ecirc;tre d&eacute;fini comme un sujet de recherche, ce n&rsquo;est pas en tant que &laquo;&nbsp;cobaye&nbsp;&raquo; dans une d&eacute;marche innovante que nous envisageons l&rsquo;apprenant de langue &eacute;trang&egrave;re, mais comme un sujet collaboratif qui co-construit son savoir et les connaissances que le chercheur doit ensuite chercher &agrave; interpr&eacute;ter. En outre, notre d&eacute;marche s&rsquo;inscrit dans la recherche-action impliquant le chercheur comme praticien et r&eacute;alisant sur le terrain l&rsquo;objet de sa recherche en lien avec un contexte qui lui est familier. Ce type de recherche questionne des certitudes telles que &laquo;&nbsp;la s&eacute;paration de son objet de recherche&nbsp;&raquo; (Pierra, 2011&nbsp;: 107), ce qui peut poser probl&egrave;me dans une d&eacute;marche abordant &agrave; la fois l&rsquo;&oelig;uvre dramatique &ndash; qui peut influencer le chercheur-praticien par les &eacute;motions qu&rsquo;elle v&eacute;hicule-, et la pratique th&eacute;&acirc;trale. Or, impliqu&eacute;e depuis quelques ann&eacute;es dans l&rsquo;apprentissage du FLE &agrave; travers le langage th&eacute;&acirc;tral, nous envisageons notre travail de recherche dans une articulation entre pratiques personnelles de spectatrice et participation &agrave; de nombreuses formations d&rsquo;&eacute;cole du spectateur avec l&rsquo;ANRAT<a class="sdfootnoteanc" href="#sdfootnote11sym" name="sdfootnote11anc"><sup>11</sup></a>, formations qui nous ont incit&eacute;e &agrave; r&eacute;fl&eacute;chir &agrave; une adaptation de cette d&eacute;marche &agrave; la didactique du FLE. Pour mener &agrave; bien une d&eacute;marche d&rsquo;&eacute;cole du spectateur, un engagement physique proche de celui du plateau est n&eacute;cessaire (Mancel, 2009), l&rsquo;exp&eacute;rience venant &laquo;&nbsp;d&rsquo;une vie au th&eacute;&acirc;tre et non pas d&rsquo;une vie de th&eacute;&acirc;tre&nbsp;&raquo; (<i>ibid.</i>), l&rsquo;enseignant trouvant ainsi toute sa l&eacute;gitimit&eacute;, m&ecirc;me s&rsquo;il n&rsquo;est pas lui-m&ecirc;me artiste, en &eacute;tant lui-m&ecirc;me impliqu&eacute; et parti-prenante de sa d&eacute;marche (Pierra, 2011&nbsp;: 108). Nous adoptons, enfin, une perspective transversale d&rsquo;analyse des donn&eacute;es, &agrave; la fronti&egrave;re de diff&eacute;rentes disciplines (sciences du langage et perspective interactionniste, analyses dramaturgiques, pratiques th&eacute;&acirc;trales en didactique des langues, etc.).</font></p> <h2 align="justify"><font face="Times New Roman, serif">3. Le th&eacute;&acirc;tre, &ccedil;a change la vie</font></h2> <h3 align="justify"><font face="Times New Roman, serif">3.1. Du sujet spectateur</font></h3> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">La d&eacute;marche de r&eacute;ception des spectacles, qui part des perceptions subjectives et de l&rsquo;imaginaire de chacun, engage des formes d&rsquo;identification aux personnages et favorise la construction d&rsquo;un discours collectif sur l&rsquo;&oelig;uvre. Les zones d&rsquo;ombre laiss&eacute;es dans la construction des personnages au cours des deux spectacles, et le statut fragmentaire de la parole dans Barons Perch&eacute;s, invitent &agrave; la recherche de signification. Les apprenants donnent en groupe une identit&eacute; aux personnages&nbsp;: qui sont-ils (sosie, m&ecirc;me personne avec un double mort ou un double qui r&ecirc;ve ou encore une ombre, personnage schizophr&egrave;ne, fr&egrave;res), quelle est la nature de leurs relations (familiale, amicale, amoureuse), quels sens peut-on donner &agrave; leurs mouvements, etc., et s&rsquo;identifient parfois &agrave; eux. La dramaturgie de ce spectacle est li&eacute;e &agrave; la gestuelle des acrobates dans l&rsquo;espace, puisqu&rsquo;ils explorent un dispositif complexe d&rsquo;&eacute;chelles, de portes, et d&rsquo;escaliers, articul&eacute; &agrave; un trampoline au sol, permettant de nombreuses variations autour des mouvements de chute et de relev&eacute;. Ce type de dramaturgie contemporaine, inscrivant plusieurs langages dans le texte sc&eacute;nique, incite les spectateurs &agrave; s&rsquo;approprier les sens de la repr&eacute;sentation&nbsp;: &laquo;&nbsp;j&rsquo;ai impression de Barons Perch&eacute;s parce que les gens rien dire<a class="sdfootnoteanc" href="#sdfootnote12sym" name="sdfootnote12anc"><sup>12</sup></a> et donc heu il y a beaucoup de espace que je peux imaginer<a class="sdfootnoteanc" href="#sdfootnote13sym" name="sdfootnote13anc"><sup>13</sup></a>&nbsp;&raquo; (X. Chine, entretien). Cette apprenante compare les mouvements des acrobates &agrave; ses propres difficult&eacute;s dans la langue &eacute;trang&egrave;re&nbsp;: &laquo;&nbsp; je pense heu les gens peut-&ecirc;tre heu tombaient levaient tombaient levaient il y a beaucoup de fois et ce moment je pense heu comment parce que en France j&rsquo;ai beaucoup de choses qui n&rsquo;est pas bien et il y a beaucoup de fois j&rsquo;ai eu tomb&eacute; donc j&rsquo;ai imagin&eacute; de moi&nbsp;&raquo;, et dans le pays &eacute;tranger&nbsp;: &laquo;&nbsp;les amis heu la banque le* CAF&nbsp;&raquo;. C&rsquo;est par cons&eacute;quent &agrave; travers un processus d&rsquo;identification qui ne s&rsquo;appuie pas sur une conception classique du personnage vu comme une unit&eacute; mais plut&ocirc;t comme une construction artistique, d&eacute;pendante d&rsquo;une &eacute;criture sc&eacute;nique (Ryngaert, 2014&nbsp;: 112), que l&rsquo;apprenante entre en relation avec l&rsquo;&oelig;uvre. C&rsquo;est dans son identit&eacute; en tant qu&rsquo;&eacute;trang&egrave;re vivant dans une autre culture et en tant qu&rsquo;apprenante de langue que se tisse la relation &agrave; l&rsquo;autre. La dramaturgie hybride de ce spectacle pousse les apprenants &agrave; envisager diverses hypoth&egrave;ses de sens pour l&rsquo;&eacute;voquer, en particulier &agrave; propos d&rsquo;une sc&egrave;ne au cours de laquelle les acrobates cherchent en vain &agrave; attraper une lampe, trop haute pour &ecirc;tre touch&eacute;e&nbsp;:</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">Extrait de l&rsquo;analyse chorale de Barons Perch&eacute;s</font></p> <p align="justify" style="margin-left: 40px;"><font face="Times New Roman, serif">119. Z&nbsp;: oui et une moment c&rsquo;est plus touch&eacute; moi (<i>se frappe la poitrine</i>) c&rsquo;est il touch&eacute; le lampe (<i>fait le geste de toucher quelque chose</i>) et lampe se (<i>fait le geste de quelque chose qui va vers le haut</i>)</font></p> <p align="justify" style="margin-left: 40px;"><font face="Times New Roman, serif">120. P&nbsp;: se l&egrave;ve &uarr;</font></p> <p align="justify" style="margin-left: 40px;"><font face="Times New Roman, serif">121. Z&nbsp;: oui se l&egrave;ve et enfin il il il n&rsquo;a pas touch&eacute; le lampe (<i>main au plafond bras tendu</i>) le lampe se (<i>geste vers le bas</i>)</font></p> <p align="justify" style="margin-left: 40px;"><font face="Times New Roman, serif">122. P&nbsp;: baisse</font></p> <p align="justify" style="margin-left: 40px;"><font face="Times New Roman, serif">123. Z&nbsp;: baisse et mais (<i>secoue la t&ecirc;te</i>) il ne peut pas aussi toucher le lampe</font></p> <p align="justify" style="margin-left: 40px;"><font face="Times New Roman, serif">124. P&nbsp;: et pourquoi &ccedil;a vous a touch&eacute;e &uarr;</font></p> <p align="justify" style="margin-left: 40px;"><font face="Times New Roman, serif">125. V&nbsp;: ou peut-&ecirc;tre c&rsquo;est parfois comme notre r&ecirc;ve c&rsquo;est tr&egrave;s proche (<i>deux mains se touchent</i>) c&rsquo;est presque tu touches mais (<i>gestes vers le haut pour toucher quelque chose</i>) c&rsquo;est loin loin loin et apr&egrave;s tu</font></p> <p align="justify" style="margin-left: 40px;"><font face="Times New Roman, serif">126. A&nbsp;: tu annules</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">Le verbatim ci-dessus, extrait de l&rsquo;analyse chorale de Barons Perch&eacute;s, montre comment la parole est co-construite par les apprenants, explorant les signes de la repr&eacute;sentation. L&rsquo;apprenante Z (Chine) &eacute;voque la sc&egrave;ne de la lampe qui l&rsquo;a marqu&eacute;e (les marqueurs de son &eacute;motion sont &agrave; la fois langagiers et corporels), elle co-construit son &eacute;nonc&eacute; gr&acirc;ce aux &eacute;tayages linguistiques de l&rsquo;enseignante (P), l&rsquo;apprenante V (Russie) r&eacute;pond ensuite &agrave; la place de Z &agrave; la question de P pour &eacute;laborer une hypoth&egrave;se sur le sens de la sc&egrave;ne en utilisant les pronoms de la deuxi&egrave;me personne du singulier et du pluriel&nbsp;: &laquo;&nbsp;notre r&ecirc;ve&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;tu touches&nbsp;&raquo;. Cette utilisation des pronoms de la deuxi&egrave;me personne cr&eacute;e, pour cette apprenante, une communaut&eacute; de spectateurs vivant la m&ecirc;me exp&eacute;rience sensible qu&rsquo;elle, dimension qui peut &ecirc;tre favoris&eacute;e par l&rsquo;analyse chorale. L&rsquo;apprenant A poursuit l&rsquo;&eacute;nonc&eacute; de V et cl&ocirc;t la discussion en trouvant un sens &agrave; la gestuelle des personnages et en utilisant le m&ecirc;me syst&egrave;me de pronom de la deuxi&egrave;me personne que V. L&rsquo;analyse chorale prend alors un sens et une forme de ch&oelig;ur antique &agrave; travers la polyphonie des voix des apprenants qui entrent en relation avec l&rsquo;&oelig;uvre par la parole mais &eacute;galement par le corps (Mancel, 2009). En outre, les interactions prennent une forme cr&eacute;ative &laquo;&nbsp;qui va cristalliser un sens auquel on n&rsquo;avait pas acc&egrave;s&nbsp;&raquo;, et c&rsquo;est un deuxi&egrave;me spectacle qui s&rsquo;&eacute;crit alors dans l&rsquo;analyse chorale (Mancel, 2009).</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">La sc&egrave;ne contemporaine enclenche &eacute;galement une prise de conscience de ses repr&eacute;sentations, voire, une remise en question de ses go&ucirc;ts et de sa personnalit&eacute;, donc, une forme de distanciation, peut-&ecirc;tre salutaire dans une approche o&ugrave; la prise de risque est forte, tant au niveau de la r&eacute;ception que du jeu. Ainsi, une apprenante compare le spectacle de Mathurin Bolze avec Trois Grandes Fugues, un spectacle de danse pr&eacute;sent&eacute; au mois de d&eacute;cembre &agrave; La Sc&egrave;ne Nationale de Cergy et dans lequel appara&icirc;t une pi&egrave;ce de Maguy Marin qu&rsquo;elle juge tr&egrave;s &eacute;loign&eacute;e de ses propres repr&eacute;sentations de la danse&nbsp;: &laquo;&nbsp;pour moi c&rsquo;&eacute;tait danse moderne et peut-&ecirc;tre je je suis tr&egrave;s carr&eacute;e et j&rsquo;accepte pas le danse moderne c&rsquo;est c&rsquo;est trop diff&eacute;rent pour moi c&rsquo;est peut-&ecirc;tre je suis trop ferm&eacute;e pour heu pour voir heu + quand je compare avec le ballet classique bien s&ucirc;r &ccedil;a me donne heu + &ccedil;a provoque je sais pas ce que &ccedil;a provoque (rires)&nbsp;&raquo; (V. Russie, entretien semi-guid&eacute;). L&rsquo;apprenante articule ainsi son rejet de cette pi&egrave;ce &agrave; sa formation professionnelle de patineuse artistique et &agrave; son propre d&eacute;sir de perfectionnisme&nbsp;:</font></p> <blockquote> <p>&laquo;&nbsp;La fin c&rsquo;&eacute;tait tr&egrave;s moderne c&rsquo;&eacute;tait la partie que j&rsquo;ai pas aim&eacute;e du tout pour &ecirc;tre honn&ecirc;te et pour moi aussi c&rsquo;est important qu&rsquo;on comment on dit par exemple quand quand vous allez au cin&eacute;ma vous &ecirc;tes pr&ecirc;t pour voir les beaux paysages heu les les beaux gens tout le monde est je sais pas joli et tout &ccedil;a le m&ecirc;me heu pour moi c&rsquo;est pareil avec le spectacle avec heu le th&eacute;&acirc;tre cirque je viens pour voir le perfectionnisme qui peut-&ecirc;tre je manque heu le perfectionnisme dans ma vie et quand je vois le ballet c&rsquo;est tr&egrave;s heu c&rsquo;est parfait&nbsp;&raquo; (V. Russie, entretien semi-guid&eacute;).</p> </blockquote> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">Dans cette pi&egrave;ce de la chor&eacute;graphe, un quatuor de femmes dialogue de mani&egrave;re d&eacute;cal&eacute;e et d&eacute;sarticul&eacute;e avec la pi&egrave;ce de Beethoven, cassant les codes du ballet classique dans leurs mouvements qui les rapprochent du pantin, de la marionnette. L&rsquo;apprenante compare dans un premier temps l&rsquo;exp&eacute;rience de la danse &agrave; celle du cin&eacute;ma, exp&eacute;rience qu&rsquo;elle relie &agrave; travers le prisme de ses propres repr&eacute;sentations&nbsp;: la recherche d&rsquo;une beaut&eacute; classique, d&rsquo;une &laquo;&nbsp;perfection&nbsp;&raquo; issue de sa propre exp&eacute;rience de vie et d&rsquo;&eacute;ducation. La rencontre avec l&rsquo;&oelig;uvre de Maguy Marin d&eacute;clenche un discours d&rsquo;ordre r&eacute;flexif qui l&rsquo;incite &agrave; prendre de la distance par rapport &agrave; ses repr&eacute;sentations et qui la pousse &agrave; explorer sa propre personnalit&eacute; &laquo;&nbsp;je manque le perfectionnisme&nbsp;&raquo;. La construction subjective se joue donc &agrave; travers le type d&rsquo;&eacute;criture de la sc&egrave;ne contemporaine, provoquant des ph&eacute;nom&egrave;nes d&rsquo;identification dans la recherche de sens ou une prise de distance du sujet.</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">L&rsquo;analyse des donn&eacute;es indique par ailleurs que la construction du sujet se r&eacute;alise dans une dimension corporelle propre au th&eacute;&acirc;tre et aux ph&eacute;nom&egrave;nes de mim&eacute;sis ou imitation, puisque, dans les phases de r&eacute;ception, les apprenants &eacute;voquent, en les d&eacute;crivant ou en les mimant, les sensations physiques procur&eacute;es par l&rsquo;identification aux com&eacute;diens ou par les diff&eacute;rentes perceptions li&eacute;es aux marionnettes dans Vingt mille lieues sous les mers par exemple (impression de chute, de &laquo;&nbsp;chair de poule&nbsp;&raquo;, impression d&rsquo;immersion sous l&rsquo;eau, etc.). La gestuelle du com&eacute;dien est alors appropri&eacute;e par les apprenants et devient un des langages pour parler du spectacle, elle pr&eacute;figure l&rsquo;&eacute;tape de mime propos&eacute;e dans les ateliers, et, s&rsquo;av&egrave;re, &agrave; nos yeux, essentielle pour aborder la th&eacute;&acirc;tralit&eacute;. </font></p> <h3 align="justify"><font face="Times New Roman, serif">3.2. Au sujet acteur en langue &eacute;trang&egrave;re </font></h3> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">L&rsquo;&eacute;mancipation du spectateur (Ranci&egrave;re, 2008) se joue ainsi dans l&rsquo;imitation des com&eacute;diens mais &eacute;galement dans la projection sur sc&egrave;ne. Ainsi, dans la phase de r&eacute;ception, les apprenants &eacute;voquent leur impression d&rsquo;&ecirc;tre sur sc&egrave;ne avec les acteurs, produisant le spectacle &agrave; leur tour, non plus en tant que spectateurs qui collaborent pour trouver un sens, mais en tant que com&eacute;diens &agrave; part enti&egrave;re jouant eux-m&ecirc;mes dans le spectacle&nbsp;: &laquo;&nbsp;j&rsquo;ai oubli&eacute; que c&rsquo;&eacute;tait le spectacle j&rsquo;ai vraiment heu j&rsquo;&eacute;tais le partie de l&rsquo;histoire&nbsp;&raquo; (V. Russie, entretien semi-guid&eacute;&nbsp;&raquo;. Une autre forme de transfert a alors lieu entre le corps de l&rsquo;acteur et le corps de l&rsquo;apprenant, le jeu peut s&rsquo;engager dans la phase de r&eacute;ception avant m&ecirc;me l&rsquo;atelier de pratiques, &agrave; travers l&rsquo;identification aux com&eacute;diens. </font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">Le re-travail cr&eacute;atif du texte sc&eacute;nique, d&eacute;j&agrave; enclench&eacute; dans l&rsquo;analyse chorale puisque le travail de description est une forme de r&eacute;&eacute;criture, de &laquo;&nbsp;r&eacute;&eacute;nonciation&nbsp;&raquo; du texte (Martin, 2005&nbsp;: 71), se poursuit dans les phases de rejeu. Dans l&rsquo;atelier sur Barons Perch&eacute;s, les propositions ont envisag&eacute; d&rsquo;autres relations entre les personnages et ont ajout&eacute; une trame narrative&nbsp;: un homme d&rsquo;affaire au bord du burn-out se suicide et son double fantomatique, exclu du monde des vivants, erre dans une forme d&rsquo;enfer o&ugrave; il rencontre un autre personnage qui n&rsquo;a plus acc&egrave;s &agrave; la parole. Boulevers&eacute; par cette rencontre, le personnage d&eacute;cide de r&eacute;int&eacute;grer le monde des vivants et de rejoindre sa premi&egrave;re enveloppe corporelle. Le trampoline, &eacute;l&eacute;ment dramaturgique central dans la pi&egrave;ce de Mathurin Bolze, est figur&eacute; par un matelas de DOJO dans le rejeu, et devient un lieu de passage entre les deux espaces-temps. A travers le travail de variation du texte sc&eacute;nique et en incarnant eux-m&ecirc;mes les personnages &agrave; qui ils donnent une autre signification, les apprenants trouvent un acc&egrave;s &agrave; la parole en explorant les potentialit&eacute;s cr&eacute;atives du jeu dramatique. </font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">En ce qui concerne l&rsquo;atelier de jeu sur le spectacle Vingt mille lieues sous les mers, chaque acteur dans le groupe repr&eacute;sente un &eacute;l&eacute;ment diff&eacute;rent du Nautilus, espace o&ugrave; se d&eacute;roule la pi&egrave;ce de Christian Hecq et Val&eacute;rie Lesort&nbsp;: l&rsquo;h&eacute;lice, l&rsquo;ampoule, le canap&eacute;, le hublot, autant d&rsquo;&eacute;l&eacute;ments auxquels une voix ainsi qu&rsquo;une parole est donn&eacute;e, d&eacute;multipliant ainsi le syst&egrave;me de &laquo;&nbsp;partages des voix&nbsp;&raquo; questionn&eacute; dans le th&eacute;&acirc;tre contemporain (Ryngaert, 2012&nbsp;: 9). Le dialogue est construit dans l&rsquo;interaction entre le Nautilus et les diff&eacute;rents &eacute;l&eacute;ments qui le composent, &eacute;tablissant ainsi une forme de parole m&eacute;tonymique. Chaque participant prend dans cette cr&eacute;ation une nouvelle identit&eacute; de machine et module sa parole dramatique &agrave; travers cette nouvelle identit&eacute; Ce re-travail du texte sc&eacute;nique dans le jeu fait intervenir une forme de &laquo;&nbsp;fonds po&eacute;tique&nbsp;&raquo; compos&eacute; des exp&eacute;riences diverses de lectures et d&rsquo;interpr&eacute;tation&nbsp;: la lecture de l&rsquo;&oelig;uvre de Jules Verne, la lecture de son adaptation th&eacute;&acirc;trale et ses diverses interpr&eacute;tations, enfin, l&rsquo;imaginaire li&eacute; &agrave; l&rsquo;exploration des mers. </font></p> <h2 align="justify"><font face="Times New Roman, serif">Conclusion</font></h2> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">&laquo;&nbsp;Le th&eacute;&acirc;tre &ccedil;a change la vie&nbsp;&raquo;, comme le dit une apprenante vietnamienne (T) &agrave; la sortie du spectacle Barons Perch&eacute;s. Les variations et r&eacute;&eacute;criture du texte sc&eacute;nique que permet l&rsquo;&eacute;cole du spectateur impliquent, pour l&rsquo;apprenant de langue &eacute;trang&egrave;re, d&rsquo;aborder l&rsquo;&oelig;uvre dramatique contemporaine en tissant des liens avec son propre v&eacute;cu, notamment &agrave; travers les ph&eacute;nom&egrave;nes divers d&rsquo;identification et de transfert, de construire un discours collectif sur l&rsquo;&oelig;uvre compos&eacute; d&rsquo; interpr&eacute;tations diverses et d&rsquo;un tissage de voix, d&rsquo;envisager la complexit&eacute; des langages th&eacute;&acirc;traux, de se confronter &agrave; des formes d&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; multiples dans les zones d&rsquo;ombre des personnages et les formes de repr&eacute;sentations contemporaines, enfin, de renouveler son rapport &agrave; la langue &eacute;trang&egrave;re en explorant le dialogue th&eacute;&acirc;tral et ses diff&eacute;rentes formes de transposition po&eacute;tique. Les formes cr&eacute;atives produites par cette transposition (personnages d&eacute;doubl&eacute;s voire d&eacute;multipli&eacute;s, espaces-temps pluriels, parole m&eacute;tonymique o&ugrave; le tout parle aux &eacute;l&eacute;ments qui le composent, repr&eacute;sentation d&rsquo;objets humanis&eacute;s et construction de leur identit&eacute; &agrave; travers leur parole, etc.) d&eacute;clenchent la constitution d&rsquo;une mati&egrave;re po&eacute;tique qui se pr&ecirc;te &agrave; d&rsquo;autres interpr&eacute;tations et d&rsquo;autres rejeux, dans l&rsquo;activit&eacute; inachev&eacute;e de l&rsquo;&oelig;uvre et de son texte<a class="sdfootnoteanc" href="#sdfootnote14sym" name="sdfootnote14anc"><sup>14</sup></a> (Martin, 2005&nbsp;: 73). Les perspectives actionnelles du CECRL peuvent alors prendre une dimension plus ouvertes dans l&rsquo;exploration des langages du th&eacute;&acirc;tre&nbsp;: l&rsquo;apprenant, engag&eacute; par le jeu dans des situations d&rsquo;&eacute;nonciation plurielles, qu&rsquo;il cr&eacute;&eacute;es lui-m&ecirc;me, interroge le statut de l&rsquo;action et la notion d&rsquo;acteur. Les d&eacute;marches d&rsquo;&eacute;cole du spectateur tendent &agrave; rendre le spectateur actif, dans une conception du th&eacute;&acirc;tre comme un lieu o&ugrave; &laquo;&nbsp;une action est conduite &agrave; son accomplissement par des corps en mouvement face &agrave; des corps vivants &agrave; mobiliser&nbsp;&raquo; (Ranci&egrave;re, 2008&nbsp;: 9).</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">La d&eacute;marche sensible autour du langage th&eacute;&acirc;tral que nous proposons dans une &eacute;cole du spectateur se rapprochant davantage d&rsquo;une pratique de l&rsquo;&oelig;uvre dramatique plut&ocirc;t que d&rsquo;une &laquo;&nbsp;&eacute;cole&nbsp;&raquo; o&ugrave; le rapport &agrave; l&rsquo;&oelig;uvre serait &agrave; enseigner, o&ugrave; les sens seraient transmis, implique une r&eacute;ception du dispositif diverse selon les apprenants. La pluralit&eacute; des interpr&eacute;tations engag&eacute;e peut d&eacute;stabiliser, voire exclure, en particulier des apprenants de langue &eacute;trang&egrave;re, tout comme l&rsquo;&oelig;uvre dramatique contemporaine et ses interrogations sur le langage: L&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; d&rsquo;un personnage trop opaque ou bien trop en d&eacute;calage par rapport aux repr&eacute;sentations, ou encore, engageant le spectateur dans un trop-plein &eacute;motif<a class="sdfootnoteanc" href="#sdfootnote15sym" name="sdfootnote15anc"><sup>15</sup></a>, est &agrave; envisager et &agrave; travailler. Le jeu dramatique peut &eacute;galement &ecirc;tre v&eacute;cu comme une prise de risque identitaire, m&ecirc;me si incarner un personnage (de &laquo;&nbsp;persona&nbsp;&raquo; le masque d&rsquo;acteur) sur sc&egrave;ne tend &agrave; r&eacute;duire ce risque. Le r&ocirc;le de l&rsquo;enseignant dans cette approche est alors central puisque c&rsquo;est dans sa connaissance des langages de la sc&egrave;ne, dans sa capacit&eacute; &agrave; guider les apprenants vers l&rsquo;&oelig;uvre, notamment dans les questions qu&rsquo;il pose ou les contraintes de rejeu qu&rsquo;il donne, enfin, dans sa mani&egrave;re de rendre la parole &agrave; ceux qui l&rsquo;auraient perdu &agrave; travers une exploration collective des langages corporels, qu&rsquo;il pourra permettre &agrave; ses apprenants d&rsquo;&eacute;tablir un rapport ludique &agrave; la nouvelle langue et de tisser des liens entre la voix d&rsquo;un auteur, celle d&rsquo;un artiste et la sienne propre.</font></p> <p align="justify"><br /> &nbsp;</p> <h2 align="justify"><font face="Times New Roman, serif">R&eacute;f&eacute;rences bibliographiques</font></h2> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">ADEN, Jo&euml;lle, &laquo;&nbsp;La cr&eacute;ativit&eacute; artistique &agrave; l&rsquo;&eacute;cole&nbsp;: refonder l&rsquo;acte d&rsquo;apprendre&nbsp;&raquo;, <i>La cr&eacute;ativit&eacute; dans tous ses &eacute;tats&nbsp;: enjeux et potentialit&eacute;s en &eacute;ducation</i>, Synergies Europe, 4, 2009a, p. 173-180.</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">ADEN, J&ouml;elle, &laquo;&nbsp;Th&eacute;&acirc;tre et didactique des langues&nbsp;&raquo;, dans Blanchet P. &amp; Chardenet P. (Dir.), <i>Guide pour la recherche en didactique des langues et des cultures,</i> Paris: &Eacute;dition des archives contemporaines, 2015, p. 422-237.</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">ANDERSON, Patrick, <i>La didactique des langues &agrave; l&rsquo;&eacute;preuve du sujet,&nbsp;</i> Presses Universitaires Franc-Comtoises, 1999. </font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">CO&Iuml;ANIZ, Alain, <i>Apprentissage des langues et subjectivit&eacute;</i>, Paris: L&rsquo;Harmattan, 2001.</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">DULIBINE, Chantal. &amp; GROSJEAN, Bernard, &laquo;&nbsp;Former les enseignants &agrave; la transmission du langage th&eacute;&acirc;tral : d&eacute;placer des &laquo; repr&eacute;sentations &raquo; ?.&raquo;, <i>Le fran&ccedil;ais aujourd&#39;hui</i>, 180(1), 2013, p. 121-135.</font></p> <p>HOUDART-MEROT, Violaine, La cr&eacute;ation litt&eacute;raire &agrave; l&rsquo;universit&eacute;, Paris : Presses universitaires de Vincennes, 2018.</p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">HUVER, Emmanuelle, LORILLEUX, Joanna, </font><strong><font face="Times New Roman, serif">&laquo;&nbsp;</font></strong><font face="Times New Roman, serif">D&eacute;marches cr&eacute;atives en DDdL&nbsp;: cr&eacute;ativit&eacute; ou </font><em><font face="Times New Roman, serif">po&iuml;esis</font></em><font face="Times New Roman, serif">&nbsp;?&nbsp;&raquo;&nbsp;, </font><em><font face="Times New Roman, serif">Lidil</font></em><font face="Times New Roman, serif"> [En ligne], 57&nbsp;|&nbsp;2018 . URL&nbsp;: </font><font color="#000080"><u><a href="http://journals.openedition.org/lidil/4885"><font face="Times New Roman, serif">http://journals.openedition.org/lidil/4885</font></a></u></font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">LECOQ, Jacques, <em>Le corps po&eacute;tique</em>, Paris&nbsp;: Actes Sud Papiers, [1997] 2016.</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">LORIOL, Jean-Pierre; &amp; LALLIAS, Jean-Claude, &laquo;&nbsp;L&#39;&eacute;cole du spectateur, c&#39;est quoi au juste&nbsp;?&nbsp;&raquo;, <em>Trait d&#39;Union</em>, 17/2009. Paris&nbsp;: ANRAT, p. 11-12.</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">MANCEL, Yannick, Entretien avec Claire Rannou,<em>Trait d&rsquo;Union</em> 16/2009, Paris : ANRAT, p.6-13.</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">MARTIN, Serge, Faire &oelig;uvre avec les &oelig;uvres, <em>Le fran&ccedil;ais aujourd&rsquo;hui</em> 2005/2 N&deg;149. (PP. 67-73). </font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">PIERRA, Gis&egrave;le, <em>Le Corps, la Voix, le Texte: Arts du langage en langue &eacute;trang&egrave;re</em>, Paris&nbsp;: L&#39;Harmattan, 2006.</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">PIERRA, Gis&egrave;le, &laquo;&nbsp;Pratiques th&eacute;&acirc;trales en FLE&nbsp;: sp&eacute;cificit&eacute;s d&rsquo;une recherche action en didactique&nbsp;&raquo; <em>Synergies Chine</em> n&deg;6/2011, 105-114.</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">RANCIERE, Jacques, <em>Le spectateur &eacute;mancip&eacute;</em>, Paris&nbsp;: La Fabrique, 2008.</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">ROLLINAT-LEVASSEUR, Eve-Marie, &laquo;&nbsp;Pratiques th&eacute;&acirc;trales en FLE&nbsp;: du jeu de l&rsquo;imitation et des repr&eacute;sentations dans l&rsquo;apprentissage&nbsp;&raquo;, dans Christophe Alix, Dominique Lagorgette, Eve-Marie Rollinat-Levasseur, <i>Didactique du fran&ccedil;ais langue &eacute;trang&egrave;re par la pratique th&eacute;&acirc;trale</i>, Universit&eacute; de Savoie, 2013.</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">ROLLINAT-LEVASSEUR, Eve-Marie, &laquo;&nbsp;La litt&eacute;rature en acte&nbsp;: voir, entendre, ressentir&nbsp;&raquo;, dans Anne Godard (Dir.), <i>La litt&eacute;rature dans l&rsquo;enseignement du FLE</i>, Paris&nbsp;: Didier, 2015.</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">ROLLINAT-LEVASSEUR, Eve-Marie, &laquo;&nbsp;Textes et images&nbsp;: le th&eacute;&acirc;tre en contexte &eacute;ducatif ou l&rsquo;&acirc;ge des possibles&nbsp;&raquo;, Dans Eve-Marie Rollinat-Levasseur, Florence Ferran, et Fran&ccedil;ois Vanoosthuyse (dir.), <i>Image et enseignement: perspectives historiques et didactiques</i>, Paris&nbsp;: Champion, 2017.</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">RYNGAERT, Jean-Pierre, <i>Lire le th&eacute;&acirc;tre contemporain</i>, Paris&nbsp;: Armand Colin, 2007.</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">RYNGAERT, Jean-Pierre. Parler avec le r&eacute;pertoire dramatique contemporain&nbsp;? Ou Avoir un th&eacute;&acirc;tre sur la langue, dans Alix, C., Lagorgette, D., Rollinat-Levasseur, E-M. (Dir.) <i>Didactique du Fran&ccedil;ais Langue Etrang&egrave;re par la pratique th&eacute;&acirc;trale</i>, Universit&eacute; de Savoie. 2013. </font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">RYNGAERT, Jean-Pierre, <i>Introduction &agrave; l&rsquo;analyse du th&eacute;&acirc;tre</i>, Paris&nbsp;: Armand Colin, 2014.</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">SERMON, Julie &amp; RYNGAERT, Jean-Pierre, <i>Th&eacute;&acirc;tres du XXIe si&egrave;cle&nbsp;: commencements</i>, Armand Colin&nbsp;: Paris&nbsp;: 2012.</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">UBERSFELD, Anne, <i>Lire le th&eacute;&acirc;tre II. L&rsquo;&eacute;cole du spectateur</i>, Paris&nbsp;: Belin, [1977] 1996.</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">VADOT. Maude,&nbsp; &laquo;&nbsp;Propositions didactiques pour une prise en compte du sujet en didactique du FLE&nbsp;&raquo;, <i>Travaux de didactique du fran&ccedil;ais langue &eacute;trang&egrave;re</i>, Universit&eacute; Paul Val&eacute;ry, Montpellier III, 2012.</font></p> <p align="justify"><font face="Times New Roman, serif">WOERLY, Donatienne, &laquo;&nbsp;Discours et pratiques d&rsquo;enseignement du FLE&nbsp;: &eacute;tat des lieux et perspectives&nbsp;&raquo;, dans Anne Godard (Dir.), <i>La litt&eacute;rature dans l&rsquo;enseignement du FLE,</i> Paris&nbsp;: Didier, 2015.</font></p> <hr /> <div id="sdfootnote1"> <p><small><a href="#sdfootnote1anc" name="sdfootnote1sym">1</a> Les dates de premi&egrave;re &eacute;dition sont indiqu&eacute;es entre crochet. </small></p> </div> <div id="sdfootnote2"> <p><small><a href="#sdfootnote2anc" name="sdfootnote2sym">2</a> D&eacute;sormais FLE. </small></p> </div> <div id="sdfootnote3"> <p><small><a href="#sdfootnote3anc" name="sdfootnote3sym">3</a> M&ecirc;me si l&rsquo;identit&eacute; a une composante &agrave; la fois sociale et individuelle. </small></p> </div> <div id="sdfootnote4"> <p><small><a href="#sdfootnote4anc" name="sdfootnote4sym">4</a> Le r&eacute;seau Canop&eacute; par exemple propose une exploitation d&rsquo;extraits de mises en sc&egrave;ne, notamment contemporaines, dans une perspective FLM et parfois FLE&nbsp;: https://www.reseau-canope.fr/edutheque-theatre-en-acte/</small></p> </div> <div id="sdfootnote5"> <p><small><a href="#sdfootnote5anc" name="sdfootnote5sym">5</a> Nous employons volontairement le pluriel dans la mesure o&ugrave; l&rsquo;&eacute;cole du spectateur recouvre de multiples d&eacute;marches p&eacute;dagogiques autour du th&eacute;&acirc;tre et de sa repr&eacute;sentation. Nous expliciterons au cours de ce travail notre positionnement et le justifierons, en lien avec les objectifs de la classe de langue.</small></p> </div> <div id="sdfootnote6"> <p><small><a href="#sdfootnote6anc" name="sdfootnote6sym">6</a> N&eacute;e dans les ann&eacute;es 1970 des mouvements de d&eacute;centralisation th&eacute;&acirc;trale et d&rsquo;&eacute;ducation th&eacute;&acirc;trale &agrave; Avignon notamment avec Jean Vilar, l&rsquo;&eacute;cole du spectateur est une d&eacute;marche p&eacute;dagogique d&rsquo;accompagnement au spectacle vivant et d&rsquo;incitation &agrave; la rencontre avec les &oelig;uvres, elle vise, comme le souhaitait Jean Vilar, &agrave; &laquo;&nbsp;&eacute;largir le cercle des amateurs&nbsp;&raquo; par la rencontre artistique (Loriol &amp; Lallias, 2009), cf La Charte de l&rsquo;&eacute;cole du spectateur (2009)&nbsp;: http://www.anrat.net/pages/ecole-du-spectateur</small></p> </div> <div id="sdfootnote7"> <p><small><a href="#sdfootnote7anc" name="sdfootnote7sym">7</a> Depuis janvier 2019&nbsp;: Pojnts Communs. </small></p> </div> <div id="sdfootnote8"> <p><small><a href="#sdfootnote8anc" name="sdfootnote8sym">8</a> Nous avons constat&eacute; au cours de notre travail de recherche que malgr&eacute; l&rsquo;absence de difficult&eacute;s li&eacute;es &agrave; la compr&eacute;hension orale du spectacle, la dimension hybride, l&rsquo;absence de trame narrative ainsi que la construction ambigu&euml; des personnages de ce spectacle avaient constitu&eacute; des obstacles pour les apprenants&nbsp;: &laquo;&nbsp;le th&eacute;&acirc;tre raconte encore mais de moins en moins sur le mode de l&#39;adh&eacute;sion et de la prescription&nbsp;&raquo; (Ryngaert, 2007&nbsp;: 66), d&rsquo;o&ugrave; de nombreux questionnements des &eacute;tudiants sur l&rsquo;absence de r&eacute;cit.</small></p> </div> <div id="sdfootnote9"> <p><small><a href="#sdfootnote9anc" name="sdfootnote9sym">9</a> M&ecirc;me si la sayn&egrave;te produite dans l&rsquo;improvisation est pr&eacute;sent&eacute;e au public d&rsquo;apprenants, c&rsquo;est en particulier la recherche, l&rsquo;inachev&eacute;, les variations, les r&eacute;&eacute;critures qui nous int&eacute;ressent dans notre travail. </small></p> </div> <div id="sdfootnote10"> <p><small><a href="#sdfootnote10anc" name="sdfootnote10sym">10</a> Au cours de l&rsquo;atelier, l&rsquo;enseignant accompagne les apprenants tout au long de leur cr&eacute;ation en leur rappelant les dimensions sc&eacute;niques du corps dans l&rsquo;espace, de la relation &agrave; l&rsquo;autre et au public, en travaillant la voix et le souffle. </small></p> </div> <div id="sdfootnote11"> <p><small><a href="#sdfootnote11anc" name="sdfootnote11sym">11</a> Association Nationale de Recherche et d&rsquo;Action Th&eacute;&acirc;trale&nbsp;: <a href="http://www.anrat.net/">www.</a><a href="http://www.anrat.net/">anrat</a><a href="http://www.anrat.net/">.net</a>.</small></p> </div> <div id="sdfootnote12"> <p><small><a href="#sdfootnote12anc" name="sdfootnote12sym">12</a> Les d&eacute;calages entre la production langagi&egrave;re du locuteur et la norme linguistique attendue n&rsquo;ont pas &eacute;t&eacute; corrig&eacute;es afin de conserver l&rsquo;authenticit&eacute; de la parole du sujet.</small></p> </div> <div id="sdfootnote13"> <p><small><a href="#sdfootnote13anc" name="sdfootnote13sym">13</a> Les paroles des apprenants se d&eacute;marquent par l&rsquo;italique dans notre texte.</small></p> </div> <div id="sdfootnote14"> <p><small><a href="#sdfootnote14anc" name="sdfootnote14sym">14</a> Il aurait fallu achever chaque atelier par un retour r&eacute;flexif syst&eacute;matique des joueurs ainsi que du public sur les productions, permettant une entreprise de &laquo;&nbsp;double traduction, d&rsquo;une compr&eacute;hension en &oelig;uvre et d&rsquo;une &oelig;uvre en discours&nbsp;&raquo; (Huver &amp; Lorilleux, 2018), ce qui n&rsquo;a pas toujours &eacute;t&eacute; r&eacute;alis&eacute; dans notre travail, faute de temps.</small></p> </div> <div id="sdfootnote15"> <p><small><a href="#sdfootnote15anc" name="sdfootnote15sym">15</a> A la sortie de Barons Perch&eacute;s, beaucoup d&rsquo;apprenants se sont interrog&eacute;s sur l&rsquo;histoire&nbsp;: &laquo;&nbsp;de quoi &ccedil;a parle&nbsp;?&nbsp;&raquo; et ont &eacute;t&eacute; tr&egrave;s destabilis&eacute;s par l&rsquo;absence de trame narrative (qu&rsquo;ils ont d&rsquo;ailleurs ajout&eacute;s pour la plupart dans leur cr&eacute;ation). En ce qui concerne Vingt mille lieues sous les mers, le r&eacute;alisme des marionnettes et l&rsquo;impression forte d&rsquo;immersion ont donn&eacute; la &laquo;&nbsp;chair de poule&nbsp;&raquo; &agrave; certains. Si le risque identitaire reste moindre dans les deux cas, il faut garder &agrave; l&rsquo;esprit que de nombreuses pi&egrave;ces contemporaines peuvent d&eacute;ranger, bousculer, voire bouleverser tr&egrave;s fortement les spectateurs, et porter &eacute;ventuellement atteinte &agrave; leur identit&eacute;, d&rsquo;o&ugrave; l&rsquo;importance &agrave; nos yeux d&rsquo;un accompagnement du type &eacute;cole du spectateur. Comme le dit T, se rendre au th&eacute;&acirc;tre laisse difficilement indemne...</small></p> </div>