<p>Cet exposé me permet de revisiter 25 années de recherche, à partir de ma thèse tardive – celle-ci devant préférablement être une étude de cas – jusqu’à de possibles perspectives transversales, qu’il convient de toujours manier avec précaution.</p>
<p>À travers l’autodénomination <em>melandjao</em> surgit l’affirmation voire la revendication de l’hybridité linguistique – dans une certaine mesure, également, d’une hybridité sociale – qui est celle du migrant, en l’occurrence celle du migrant économique en France, et plus précisément en Catalogne Nord. Un tel entre-deux est par nature ambivalent : il se révèle inclusif et en tant que tel, identitaire, mais aussi excluant et signe d’altérité. Il peut certes sembler créatif, mais il n’en est pas moins contraint et stigmatisé. Et l’on hésite à nommer ces productions langagières interlecte, à savoir variété autonome, ou interlangue, qui suppose pour les acquisitionnistes une étape transitoire. L’enjeu sociolinguistique est donc entre intégration et fossilisation/extranéité.</p>
<p>Cette approche binaire s’avère néanmoins inadéquate à plusieurs titres. Tout d’abord parce que les individus, aussi bien que les groupes et les sociétés, sont et deviennent de plus en plus complexes. Ensuite, parce que les formes de migration, au-delà des exils, ne se limitent pas aux flux de main d’œuvre peu ou pas formée, chez qui l’hybride est signe d’absence de choix faute de compétences. En revanche, les migrations d’individus davantage formés, entre autres, au bi- plurilinguisme, changent et complexifient la donne : ainsi se multiplient les acteurs, travailleurs qualifiés ou expatriés cosmopolites et polyglottes, capables de jouer intentionnellement du switch et des marques transcodiques. Mais l’hybridité <em>bas de gamme</em> a-t-elle pour autant disparu ?...</p>