<p class="Standard" style="margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:">&nbsp;</span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Dans le cadre de l&rsquo;atelier francophone de l&rsquo;acad&eacute;mie de la Culture de Lettonie (LKA) et&nbsp;&nbsp; durant l&rsquo;ann&eacute;e universitaire 2015-2016<i> Les r&egrave;gles du savoir-vivre</i> <i>dans la soci&eacute;t&eacute; moderne</i> de J.-L. Lagarce a &eacute;t&eacute; adapt&eacute; sous le titre d&rsquo;<i>Ainsi que cela continue</i>. Jonathan Durandin, enseignant-chercheur &agrave; LKA assist&eacute; d&rsquo;Aur&eacute;lie Saillard, &eacute;tudiante en Master II Fran&ccedil;ais Langue Etrang&egrave;re (FLE) &agrave; l&rsquo;Universit&eacute; de Franche-Comt&eacute; (UFC), &eacute;tait &agrave; la mise en sc&egrave;ne. Deux &eacute;tudiantes de 4<sup>&egrave;me</sup> ann&eacute;e de la section Relations interculturelles Lettonie/France, Agita et Ilze, jouaient le r&ocirc;le des deux personnages f&eacute;minins. <i>Ainsi que cela continue</i> a &eacute;t&eacute; jou&eacute; une premi&egrave;re fois le 13 mai 2016 &agrave; Riga puis le 27 mai &agrave; Besan&ccedil;on. L&rsquo;adaptation th&eacute;&acirc;trale de la pi&egrave;ce de Jean-Luc Lagarce a &eacute;t&eacute; men&eacute;e en parall&egrave;le d&rsquo;un projet international de recherche et de formation interrogeant les pratiques th&eacute;&acirc;trales dans l&rsquo;appropriation d&rsquo;une langue &eacute;trang&egrave;re port&eacute; par Rose-Marie Volle<a href="#_ftn1" name="_ftnref1" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">[1]</span></span></span></span></span></span></span></span></span></a>.&nbsp;&nbsp; </span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Jean-Luc Lagarce est un auteur de th&eacute;&acirc;tre contemporain, n&eacute; en Franche-Comt&eacute; et ayant acquis une renomm&eacute;e internationale. Mort pr&eacute;matur&eacute;ment en 1995, son &oelig;uvre conna&icirc;t un succ&egrave;s croissant au point qu&rsquo;il est reconnu comme un des auteurs de th&eacute;&acirc;tre contemporain les plus jou&eacute;s en France. Agita et Ilze, les deux &eacute;tudiantes qui ont jou&eacute; l&rsquo;adaptation, avaient d&eacute;but&eacute; leur apprentissage du fran&ccedil;ais quatre ann&eacute;es seulement avant d&rsquo;aborder l&rsquo;&oelig;uvre de Lagarce. Elles avaient particip&eacute; au cours de leur formation &agrave; la cr&eacute;ation collective d&rsquo;une pi&egrave;ce mais elles se confrontaient pour la premi&egrave;re fois &agrave; l&rsquo;adaptation d&rsquo;un texte de th&eacute;&acirc;tre.</span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Nous avons abord&eacute; la question de la pratique th&eacute;&acirc;trale dans l&rsquo;appropriation du fran&ccedil;ais langue &eacute;trang&egrave;re en postulant que l&rsquo;&eacute;criture dramatique, comme la litt&eacute;rature en g&eacute;n&eacute;ral, r&eacute;v&egrave;le de mani&egrave;re privil&eacute;gi&eacute;e ce que toute parole met en jeu. La parole ordinaire est une parole extraordinaire, &agrave; condition de ne pas cr&eacute;er les conditions d&rsquo;un rejet de l&rsquo;inconnu qu&rsquo;elle rec&egrave;le. En r&eacute;&eacute;crivant un manuel de savoir-vivre de la fin du XIX&deg; si&egrave;cle, Lagarce invente &laquo; sa propre langue &raquo; au sein de la langue fran&ccedil;aise dont il sonde &agrave; la fois les possibilit&eacute;s syst&eacute;miques et l&rsquo;&eacute;paisseur m&eacute;morielle. La confrontation &agrave; une langue &eacute;trang&egrave;re impose de cr&eacute;er sa propre &eacute;nonciation &agrave; partir d&rsquo;une langue dont les singularit&eacute;s syst&eacute;miques et la m&eacute;moire discursive apparaissent d&rsquo;abord comme radicalement autres. Notre r&eacute;flexion &eacute;tablit donc un parall&egrave;le entre la position dans le langage de l&rsquo;&eacute;crivain - ici l&rsquo;auteur de th&eacute;&acirc;tre -&nbsp; et celle du sujet qui passe d&rsquo;une langue &agrave; l&rsquo;autre. Comment la singularit&eacute; de l&rsquo;&eacute;criture de Lagarce va-t-elle jouer dans la possibilit&eacute; de s&rsquo;approprier pour les &eacute;tudiantes lettones des mots venus d&rsquo;ailleurs ? Nous verrons, notamment &agrave; travers la question des voix qui traversent toute &eacute;nonciation, que l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; est fondamentalement &agrave; l&rsquo;&oelig;uvre dans la parole et dans le travail d&rsquo;&eacute;criture. C&rsquo;est &agrave; partir de cette alt&eacute;rit&eacute; que chacun est appel&eacute; &agrave; forger sa propre &eacute;nonciation. Si la langue maternelle tend &agrave; la faire oublier, l&rsquo;&eacute;criture et l&rsquo;appropriation d&rsquo;une langue &eacute;trang&egrave;re ne cessent de la rappeler.&nbsp;&nbsp; </span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><b>&nbsp;</b></span></span></span></p> <h2>I. L&rsquo;&eacute;criture dramatique : les voix entrem&ecirc;l&eacute;es de la Baronne de Staffe et de Jean-Luc Lagarce&nbsp;</h2> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><i><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Les r&egrave;gles du savoir-vivre dans la soci&eacute;t&eacute; moderne</span></span></span></span></i><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black"> de Jean-Luc Lagarce est une r&eacute;&eacute;criture d&rsquo;un manuel de savoir-vivre de la Baronne Staffe paru en 1891 sous le titre <i>Usages du monde : r&egrave;gles de savoir-vivre dans la soci&eacute;t&eacute; moderne</i>. Dans ce volumineux manuel de 483 pages, la Baronne &eacute;crit &agrave; l&rsquo;attention des jeunes filles et jeunes hommes de haute lign&eacute;e un code de bonne conduite qui doit permettre de faire bonne figure dans toutes les occasions de la vie mondaine, de la naissance &agrave; la mort. En r&eacute;alit&eacute;, la Baronne Staffe n&rsquo;est pas une aristocrate, l&rsquo;&eacute;criture de ses manuels de savoir-vivre qui connaissent un certain succ&egrave;s est le seul moyen pour elle d&rsquo;&eacute;chapper &agrave; une existence &eacute;triqu&eacute;e et rigide, celle de la petite bourgeoisie provinciale &agrave; laquelle elle appartient et celle d&rsquo;une vie sans homme et sans enfant &agrave; tenir dans ses bras. Son manuel de savoir-vivre est ainsi une &oelig;uvre de langage dans laquelle elle fantasme un monde o&ugrave; chaque parole, chaque geste seraient r&eacute;gl&eacute;s d&rsquo;avance afin de &laquo; rendre ceux avec lesquels nous vivons contents d&rsquo;eux-m&ecirc;mes et de nous &raquo; (Baronne Staffe, 1891 : V).&nbsp; </span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">En 1994, un si&egrave;cle plus tard, Jean-Luc Lagarce r&eacute;&eacute;crit <i>Usages du monde</i> sous la forme d&rsquo;une pi&egrave;ce de th&eacute;&acirc;tre. Les r&egrave;gles de savoir-vivre prennent la forme d&rsquo;un monologue &eacute;nonc&eacute; par le seul personnage de &laquo; la dame &raquo; et adress&eacute; &agrave; un public d&egrave;s lors mis &agrave; la place des jeunes gens &agrave; &eacute;duquer. Lagarce s&eacute;lectionne certains passages &eacute;crits par la Baronne, y int&egrave;gre sa propre voix, en invente enti&egrave;rement d&rsquo;autres et projette ainsi le manuel dans une nouvelle sph&egrave;re de discours : le th&eacute;&acirc;tre contemporain.&nbsp; </span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Dans la pi&egrave;ce de Lagarce, l&rsquo;&eacute;nonc&eacute; du code de bonne conduite est en prise avec une parole intempestive<a href="#_ftn2" name="_ftnref2" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">[2]</span></span></span></span></span></span></span></span></span></a>, impr&eacute;vue, dont les jeux de mots, les <i>non-co&iuml;ncidences du dire</i>, les d&eacute;rapages sur le th&egrave;me de la mort, de la jalousie, de l&rsquo;envie, de l&rsquo;avarice, du d&eacute;sir ne cessent de faire &eacute;chouer la tentative de la Baronne d&rsquo;enfermer le langage dans un code propre &agrave; r&eacute;gir la totalit&eacute; de l&rsquo;existence. Ce faisant, Lagarce interroge le fonctionnement-m&ecirc;me du langage. Ne nous y trompons pas, cette tension entre l&rsquo;&eacute;nonc&eacute; du code de bonne conduite et la parole intempestive travaillait d&eacute;j&agrave; &ndash; involontairement - le manuel de la Baronne Staffe, Lagarce s&rsquo;est amus&eacute; &agrave; forcer le trait.</span></span></span></span></span></span></span></p> <h3 class="Standard" style="text-align: justify; margin-bottom: 11px;"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">I.1 L&rsquo;&eacute;criture dramatique comme r&eacute;-&eacute;nonciation&nbsp; </span></span></span></span></span></span></span></h3> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">L&rsquo;&eacute;tude de l&rsquo;incipit renseigne d&rsquo;embl&eacute;e sur les enjeux du texte de Lagarce comme une r&eacute;-&eacute;nonciation du manuel de la Baronne Staffe.&nbsp; </span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:-0.5pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><i><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Le manuel de la Baronne Staffe&nbsp; </span></span></span></span></i></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:-0.5pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><i><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">1<sup>er</sup> chapitre : Naissance&nbsp; </span></span></span></span></i></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:-0.5pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><i><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">&laquo; La d&eacute;claration doit &ecirc;tre faite dans les trois jours de l&rsquo;accouchement. Ce d&eacute;lai est absolument rigoureux. Apr&egrave;s, il serait trop tard, et l&rsquo;on obtiendrait l&rsquo;inscription de l&rsquo;acte de naissance qu&rsquo;au prix de mille ennuis, de mille d&eacute;penses et de peines &eacute;dict&eacute;es par le code &raquo;. </span></span></span></span></i><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">(Baronne Staffe, 1891 : 1)<i>&nbsp; </i></span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:-0.5pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><i><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">&laquo; Si l&rsquo;enfant est n&eacute; mort, il faut quand-m&ecirc;me d&eacute;clarer sa naissance, et un m&eacute;decin doit attester que sa mort a pr&eacute;c&eacute;d&eacute; sa naissance &raquo; </span></span></span></span></i><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">(Baronne Staffe, 1891 : 1-2)<i> </i>&nbsp;</span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:-0.5pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><i><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">La pi&egrave;ce de Lagarce&nbsp; </span></span></span></span></i></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:-0.5pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><i><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">LA DAME &ndash; <u style="text-underline:black">Si l&rsquo;enfant</u> na&icirc;t mort, <u style="text-underline:black">est n&eacute; mort</u>, <u style="text-underline:black">il faut quand-m&ecirc;me</u>, tout de m&ecirc;me, <u style="text-underline:black">d&eacute;clarer sa</u> <u style="text-underline:black">naissance</u>, d&eacute;clarer sa naissance et sa mort et<u style="text-underline:black"> un m&eacute;decin devra attester que la mort a</u> <u style="text-underline:black">pr&eacute;c&eacute;d&eacute; la naissance</u>.&nbsp; </span></span></span></i></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:-0.5pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><i><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Ainsi que cela commence.&nbsp; </span></span></span></span></i></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:-0.5pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><i><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:171%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Si l&rsquo;enfant na&icirc;t vivant, est n&eacute; vivant, il arrive parfois que cela arrive, si l&rsquo;enfant na&icirc;t vivant, sa naissance doit &ecirc;tre d&eacute;clar&eacute;e &agrave; la mairie du lieu o&ugrave; la m&egrave;re a accouch&eacute;. <u style="text-underline:black">La d&eacute;claration doit &ecirc;tre faite dans les trois jours </u>suivant <u style="text-underline:black">l&rsquo;accouchement</u>,</span></span></span></span></i></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:-0.5pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><i><u style="text-underline:black"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">apr&egrave;s il sera trop tard</span></span></span></u></i><i><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">, <u style="text-underline:black">on n&rsquo;obtiendrait l&rsquo;inscription qu&rsquo;au prix de mille ennuis, de mille</u> <u style="text-underline:black">d&eacute;penses</u>, ce n&rsquo;est pas n&eacute;gligeable, <u style="text-underline:black">et de peines</u>, encore, <u style="text-underline:black">&eacute;dict&eacute;es par le code</u><a href="#_ftn3" name="_ftnref3" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><b><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">[3]</span></span></span></b></span></span></span></span></span></span></a>. </span></span></span></i><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">(Lagarce, 2002 [1995] : 13)<i> </i>&nbsp;</span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Le manuel de la Baronne d&eacute;taille un ensemble de r&egrave;gles pr&eacute;cises et rigoureuses afin de ne rien laisser au hasard, de ne rien laisser &agrave; d&eacute;sirer. Les r&egrave;gles de savoir-vivre tendent &agrave; s&rsquo;&eacute;noncer au travers d&rsquo;une langue r&eacute;duite &agrave; un code univoque qui fonctionne sur le mode de l&rsquo;ordre, de la parole efficace. Or, d&rsquo;embl&eacute;e et au-del&agrave; du discours intentionnel de la Baronne, un effet comique se produit au travers de la formule paradoxale &laquo; le m&eacute;decin doit attester que [la] mort a pr&eacute;c&eacute;d&eacute; [la] naissance &raquo;. Ici le sens vacille, l&rsquo;univocit&eacute; vole en &eacute;clat sous le paradoxe que la Baronne ne semble pas remarquer.&nbsp; </span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Sur le plan de l&rsquo;&eacute;criture dramatique, la voix de Lagarce s&rsquo;immisce dans les &eacute;crits de la Baronne et en exacerbe les travers. En occultant le pr&eacute;sentatif &laquo; c&rsquo;est &raquo; dans la formule &laquo; Ainsi que cela commence &raquo;, Lagarce pousse jusqu&rsquo;&agrave; l&rsquo;exc&egrave;s le d&eacute;sir de la Baronne de pr&eacute;senter les r&egrave;gles de savoir-vivre comme des r&egrave;gles absolues, d&eacute;subjectiv&eacute;es. Sous forme d&rsquo;incises - &laquo; tout de m&ecirc;me &raquo;, &laquo; ce n&rsquo;est pas n&eacute;gligeable &raquo;, &laquo; encore &raquo; - la voix de Lagarce commente, corrige, caricature ses propos. Cette voix autre peut &ecirc;tre entendue comme une voix ext&eacute;rieure introduite par effraction dans le fil du discours ou encore comme une voix int&eacute;rieure, refoul&eacute;e, celle des &laquo; mauvais sentiments &raquo; que la Baronne tente de r&eacute;primer. Dans cette tension entre &eacute;nonc&eacute; du code de bonne conduite et parole intempestive, l&rsquo;&eacute;criture de Lagarce met en relief l&rsquo;alt&eacute;rit&eacute; qui travaille toute &eacute;nonciation, celle dont le discours intentionnel cherche &agrave; aplanir les incoh&eacute;rences, les heurts.&nbsp; </span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Toute l&rsquo;&eacute;criture de Lagarce consiste &agrave; mettre en &eacute;chec l&rsquo;univocit&eacute; du code de bonne conduite par des r&eacute;p&eacute;titions (&laquo; il arrive que cela arrive &raquo;), l&rsquo;homophonie (&laquo; <i>Si l&rsquo;enfant na&icirc;t mort, est n&eacute; mort &raquo;</i>)<i> </i>qui viennent interroger le fonctionnement de la langue comme syst&egrave;me de diff&eacute;rences et d&rsquo;opposition (Saussure). En effet, si la valeur du signe est purement diff&eacute;rentielle - &laquo; leur plus exact caract&eacute;ristique est d&rsquo;&ecirc;tre ce que les autres ne sont pas<a href="#_ftn4" name="_ftnref4" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">[4]</span></span></span></span></span></span></span></span></span></a> &raquo; -, la r&eacute;p&eacute;tition, l&rsquo;homophonie viennent brouiller ce rep&eacute;rage de la diff&eacute;rence et perturber la saisie du sens.&nbsp; </span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">O</span></span></span></span><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">&ugrave; le sens vacille-t-il dans cette sc&egrave;ne inaugurale ? Sur la question de l&rsquo;origine, l&rsquo;origine de la vie mais aussi l&rsquo;origine du langage. Les cat&eacute;gories de langue &laquo; naissance &raquo; et &laquo; mort &raquo; s&rsquo;opposent logiquement (on est soit mort, soit vivant) et chronologiquement (pour &ecirc;tre mort, il faut avoir &eacute;t&eacute; vivant). Or l&rsquo;ordre logique se renverse dans la formule qui se saisit du cas de la mort <i>in utero</i> de l&rsquo;enfant : &laquo; le m&eacute;decin doit attester que sa mort a pr&eacute;c&eacute;d&eacute; sa naissance &raquo;. La formule se charge d&rsquo;autant plus d&rsquo;un effet comique que le savoir de la science, celui du m&eacute;decin, est convoqu&eacute; pour attester d&rsquo;un tel paradoxe. Le paradoxe na&icirc;t de ce qui appara&icirc;t comme un hiatus entre les cat&eacute;gories de langues et la r&eacute;alit&eacute;. Lagarce interroge ainsi l&rsquo;origine du langage, met en &eacute;vidence son autonomie s&eacute;miotique et d&eacute;nonce ainsi l&rsquo;illusion r&eacute;f&eacute;rentielle qui le sous-tend<a href="#_ftn5" name="_ftnref5" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">[5]</span></span></span></span></span></span></span></span></span></a>.&nbsp; </span></span></span></span></span></span></span></p> <h3 class="Standard" style="text-align: justify; margin-bottom: 11px;"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">I.2 Enonc&eacute; du code de bonne conduite <i>vs</i> parole intempestive</span></span></span></span></span></span></span></h3> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Tout au long de la pi&egrave;ce, l&rsquo;&eacute;criture de Lagarce proc&egrave;de d&rsquo;une mise en tension entre d&rsquo;une part l&rsquo;&eacute;nonc&eacute; du code qui voudrait dire le r&eacute;el, tout le r&eacute;el, sans souffrir de contradiction et une parole intempestive qui jette le soup&ccedil;on sur le pouvoir de cette langue &agrave; nommer le r&eacute;el, &agrave; le r&eacute;genter. D&egrave;s l&rsquo;incipit, nous l&rsquo;avons vu, l&rsquo;&eacute;nonc&eacute; du code de bonne conduite prend la forme d&rsquo;un discours d&eacute;subjectiv&eacute; avec l&rsquo;occultation du pr&eacute;sentatif &laquo; c&rsquo;est &raquo;, cette d&eacute;subjectivation caract&eacute;rise tout au long de la pi&egrave;ce l&rsquo;&eacute;nonc&eacute; des r&egrave;gles de savoir-vivre par la disparition du pronom &laquo; je &raquo;, le recours aux phrases nominales et au pronom &laquo; on &raquo;. Le code se voudrait &eacute;nonc&eacute; depuis une position hors langage et cet &eacute;nonciateur &laquo; omniscient &raquo; rejette &agrave; priori tout sentiment, tout &eacute;panchement qui pourrait perturber la parfaite m&eacute;canique d&rsquo;une vie bien r&eacute;gl&eacute;e : &laquo; Il serait imb&eacute;cile de se laisser d&eacute;border par les futilit&eacute;s accessoires que sont les sentiments &raquo; (Lagarce, 2002 [1995] : 27). L&rsquo;&eacute;nonc&eacute; du code se dote m&ecirc;me d&rsquo;une vis&eacute;e totalisante par l&rsquo;accumulation sur la ligne syntagmatique du discours de mots, de propositions, qui auraient d&ucirc; faire l&rsquo;objet d&rsquo;un choix sur l&rsquo;axe paradigmatique.</span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:-0.5pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:95%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">&laquo; On peut aussi d&eacute;sirer, souhaiter, on peut souhaiter assurer &agrave; ses enfants des appuis en dehors de la famille [&hellip;] &raquo; (Lagarce, 2002 [1995] : 15-16)</span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:-0.5pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:95%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">&laquo; On doit faire conna&icirc;tre l&rsquo;ordre dans lequel ils sont n&eacute;s, afin qu&rsquo;on puisse &eacute;tablir quel est l&rsquo;a&icirc;n&eacute;, qui est l&rsquo;a&icirc;n&eacute;, lequel est l&rsquo;a&icirc;n&eacute;. (Lagarce, 2002 [1995] : 14)</span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:">&nbsp;</span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Par ce renoncement au choix qu&rsquo;implique la lin&eacute;arit&eacute; de la langue, le discours voudrait couvrir tout le champ du r&eacute;el et renoncer &agrave; la perte qu&rsquo;implique le fait m&ecirc;me de parler.</span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">L&rsquo;&eacute;nonc&eacute; du code r&eacute;duit &agrave; n&eacute;ant non seulement la place de l&rsquo;&eacute;nonciateur mais aussi la place de l&rsquo;interlocuteur comme co-&eacute;nonciateur :&nbsp; </span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:3pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:95%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">&laquo; Mais avant d&rsquo;entamer l&rsquo;affaire matrimoniale, car affaire c&rsquo;est, ne nous cachons pas la v&eacute;rit&eacute; des mots &hellip; &raquo; (Lagarce, 2002 [1995] : 24)</span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:-0.5pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:95%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">&laquo; Plus tard, esp&eacute;rons-le, les dissonances, car dissonances et pas autre chose, les dissonances se fondront dans un accord plus parfait &raquo;. (Lagarce, 2002 [1995] : 39)</span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:-0.5pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:95%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">&laquo; On a convenu au moins huit jours &agrave; l&rsquo;avance, avec le pr&ecirc;tre qui la b&eacute;nira, de l&rsquo;heure, des d&eacute;tails, et du prix de la c&eacute;r&eacute;monie, in&eacute;vitable, car prix &agrave; payer et pas d&rsquo;autre mot &raquo; (Lagarce, 2002 [1995] : 37)</span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:">&nbsp;</span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Voici donc un discours qui revendique d&rsquo;avoir le &laquo; bon mot &raquo;, celui dont le lien au r&eacute;el ne pourrait &ecirc;tre contest&eacute;. D&eacute;tenir la seule fa&ccedil;on de d&eacute;crire le monde, c&rsquo;est annuler par avance toute alt&eacute;rit&eacute;, la place que le langage laisse non seulement &agrave; l&rsquo;&eacute;nonciateur mais aussi &agrave; l&rsquo;autre de l&rsquo;adresse.</span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Or la vis&eacute;e totalisante du code pouss&eacute;e &agrave; l&rsquo;exc&egrave;s finit par produire l&rsquo;effet contraire. Dans cette boucle que le discours fait sur lui-m&ecirc;me pour nier qu&rsquo;un autre mot pourrait &ecirc;tre choisi, l&rsquo;&eacute;nonciation cesse de se d&eacute;rouler sur le mode de l&rsquo;&eacute;vidence et se redouble d&rsquo;un commentaire confirmant par la d&eacute;n&eacute;gation le hiatus entre la langue et le monde. Il s&rsquo;agit ici de ph&eacute;nom&egrave;nes de non co&iuml;ncidence du dire tels que conceptualis&eacute;s par Authier-Revuz et qui prennent cette forme singuli&egrave;re dans l&rsquo;&eacute;criture de Lagarce (Authier-Revuz, 1995).&nbsp;&nbsp; </span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Ainsi, l&rsquo;&eacute;nonc&eacute; du code de bonne conduite &eacute;choue-t-il dans un dire non co&iuml;ncident &agrave; lui-m&ecirc;me qui ouvre la voie &agrave; une parole intempestive. Le pronom &laquo; je &raquo; et les diff&eacute;rentes formes de modalisation r&eacute;apparaissent alors comme l&rsquo;&eacute;nonciation d&rsquo;une parole refoul&eacute;e qui brise les convenances : &laquo; Il y a des fianc&eacute;es qui ont peur des perles, parce qu&rsquo;elles s&rsquo;imaginent qu&rsquo;elles pr&eacute;sagent des larmes. C&rsquo;est cr&eacute;tin, mais on ne peut commencer d&egrave;s le jour des fian&ccedil;ailles &agrave; le dire &raquo; (Lagarce, 2002 [1995] : 28). Cette parole intempestive s&rsquo;affranchit des bonnes mani&egrave;res en dispensant par exemples des conseils pour &eacute;viter aux parrains la charge des cadeaux ou encore en prof&eacute;rant des st&eacute;r&eacute;otypes : &laquo; Or s&rsquo;il est bon qu&rsquo;une jeune fille n&rsquo;ait jamais trop haute opinion d&rsquo;elle-m&ecirc;me, il ne faut pas davantage qu&rsquo;elle se croie au-dessous de ce qu&rsquo;elle est &raquo; (Lagarce, 2002 [1995] : 28). La th&eacute;matique de la mort r&eacute;apparait sans cesse dans le texte, comme un sous-texte qui viendrait briser les apparences savamment entretenues. A chaque fois qu&rsquo;une personne est &eacute;voqu&eacute;e, une incise vient rappeler qu&rsquo;il faut aussi envisager la possibilit&eacute; que cette personne soit morte :&nbsp;&nbsp; </span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:-0.5pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:95%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">&laquo; Un bapt&ecirc;me est toujours l&rsquo;occasion d&rsquo;une f&ecirc;te &agrave; moins de circonstances exceptionnelles et douloureuses, mort de l&rsquo;enfant possible, mort de la m&egrave;re, envisageable. &raquo; (Lagarce, 2002 [1995] : 22)</span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:3pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:95%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">&laquo; [L&rsquo;enfant baptis&eacute;] s&rsquo;ouvre de ses intentions &agrave; ses parents ou, &agrave; leur d&eacute;faut &ndash; ils sont absents, envisageable, ou morts, possible &ndash; &agrave; leur d&eacute;faut, &agrave; un ami &acirc;g&eacute;, &agrave; son professeur&hellip; &raquo; (Lagarce, 2002 [1995] : 23)</span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:">&nbsp;</span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">La ligne syntagmatique du r&eacute;cit se brise ainsi par les incises que lui impose la possibilit&eacute; de la mort. L&rsquo;&eacute;nonc&eacute; des r&egrave;gles de savoir-vivre voudrait bien occulter l&rsquo;id&eacute;e de la mort mais celle-ci ne cesse de faire retour dans le fil du discours. Dans la sc&egrave;ne finale de l&rsquo;enterrement, c&rsquo;est la sexualit&eacute; qui r&eacute;appara&icirc;t sous forme d&rsquo;une &eacute;quivoque &laquo; Le corbillard s&rsquo;&eacute;branle, les corbillards s&rsquo;&eacute;branlent toujours, ce sont des mots qui vont tr&egrave;s bien ensemble. &raquo; (Lagarce 2002 [1995] : 46)&nbsp; </span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Ainsi Lagarce invente-t-il son &eacute;criture &agrave; partir d&rsquo;une r&eacute;-&eacute;nonciation d&rsquo;un manuel de savoir-vivre de la fin du XIX si&egrave;cle. En cr&eacute;ant une tension entre l&rsquo;&eacute;nonc&eacute; d&rsquo;un code de bonne conduite et une parole intempestive, il livre au final une le&ccedil;on sur langage. Comment deux &eacute;tudiantes-com&eacute;diennes lettones se sont-elles appropri&eacute; la singularit&eacute; de cette &eacute;criture ? Comment ont-elles construit leurs deux personnages, comment leur ont-elles donner voix ?&nbsp; </span></span></span></span></span></span></span></p> <h2>II.&nbsp; L&#39;adapatation : dialogue et dialogisme</h2> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><b>&nbsp;</b><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Le travail d&rsquo;adaptation de la pi&egrave;ce de Jean-Luc Lagarce s&rsquo;est d&eacute;roul&eacute; durant quatre mois environ, &agrave; raison d&rsquo;une s&eacute;ance hebdomadaire de deux heures et de huit &agrave; dix heures de r&eacute;p&eacute;tition pendant une demi-douzaine de &laquo; fins de semaine &raquo;. Le r&eacute;sultat de ce travail a &eacute;t&eacute; peaufin&eacute; lors des r&eacute;p&eacute;titions qui ont pr&eacute;c&eacute;d&eacute; les repr&eacute;sentations d&rsquo;<i>Ainsi que cela continue </i>en mai 2016 &agrave; Riga puis &agrave; Besan&ccedil;on. Du temps des lectures et des r&eacute;p&eacute;titions au temps de la repr&eacute;sentation s&rsquo;est progressivement mis en place le rep&eacute;rage et l&rsquo;&eacute;mergence des diff&eacute;rentes voix &agrave; travers lesquelles l&rsquo;appropriation du texte par les &eacute;tudiantes-com&eacute;diennes s&rsquo;est jou&eacute;e.</span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">En effet, tout au long du processus d&rsquo;adaptation th&eacute;&acirc;trale, il s&rsquo;est agi principalement de transformer le monologue de &laquo; la dame &raquo; &eacute;crit par Jean-Luc Lagarce<i> </i>en un dialogue pour deux personnages, Dame A et Dame B. Cette transformation du monologue en dialogue a impos&eacute; peu &agrave; peu au metteur en sc&egrave;ne, &agrave; son assistante mais surtout aux deux &eacute;tudiantes com&eacute;diennes d&rsquo;entendre et de faire entendre les diff&eacute;rentes voix qui travaillent &agrave; la fois l&rsquo;&eacute;nonc&eacute;, par le bais du dialogisme, et l&rsquo;acte d&rsquo;&eacute;nonciation au travers de la question de l&rsquo;adresse (Bakhtine). C&rsquo;est de cet entrem&ecirc;lement de voix constitutif de l&rsquo;adaptation dont nous allons rendre compte ici.</span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">En effet, l&rsquo;adaptation du monologue en dialogue suppose d&rsquo;abord de rep&eacute;rer, comme nous l&rsquo;avons fait dans la premi&egrave;re partie de ce travail, les diff&eacute;rentes voix qui travaillent le texte m&ecirc;me de Lagarce. En outre, l&rsquo;interpr&eacute;tation th&eacute;&acirc;trale implique la voix du metteur en sc&egrave;ne, de son assistante, des deux &eacute;tudiantes-com&eacute;diennes qui vont apporter un sens nouveau &agrave; la pi&egrave;ce et qui participent de ce que Barthes rep&egrave;re comme la &laquo; mort de l&rsquo;auteur &raquo; (Barthes, 1977). Sur le plateau, les &eacute;tudiantes-com&eacute;diennes entre elles</span></span></span></span> <span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">se constituent r&eacute;ciproquement comme partenaire de jeu. Beaucoup d&rsquo;exercices au temps des r&eacute;p&eacute;titions travaillaient cette dimension<a href="#_ftn6" name="_ftnref6" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">[6]</span></span></span></span></span></span></span></span></span></a>. Sur la sc&egrave;ne fictive, les personnages de la dame A et de la dame B ont &eacute;merg&eacute; l&rsquo;une par rapport &agrave; l&rsquo;autre dans la transformation du monologue en dialogue. Dans ce dialogue, l&rsquo;adresse au &laquo; public imagin&eacute; &raquo;, jeunes gens r&eacute;unis pour &ecirc;tre &eacute;duqu&eacute;s par leur soin, a jou&eacute; un r&ocirc;le crucial. Enfin, au temps des repr&eacute;sentations, est intervenu la voix du public, qui par son &eacute;coute, ses rires, fait de la repr&eacute;sentation non pas une nouvelle r&eacute;p&eacute;tition mais une &eacute;nonciation in&eacute;dite.&nbsp;&nbsp; </span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:">&nbsp;</span></span></span></p> <h3>II.1 Du monoloque au dialogue : les voix entrem&ecirc;l&eacute;es au temps des r&eacute;p&eacute;titions&nbsp;</h3> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:">&nbsp;<span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">A partir d&rsquo;un extrait du texte de Jean-Luc Lagarce que l&rsquo;&eacute;quipe d&rsquo;adaptation nommait &laquo; la sc&egrave;ne des pr&eacute;noms &raquo;, nous allons tenter de pr&eacute;ciser comment les deux personnages ont peu &agrave; peu &eacute;merg&eacute; par le jeu des voix entrem&ecirc;l&eacute;es.&nbsp; </span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:">&nbsp;</span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:-0.5pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><i><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Le premier pr&eacute;nom est choisi par la marraine, le second par le parrain, le troisi&egrave;me l&rsquo;est par la m&egrave;re. Mais le parrain, quant &agrave; lui, laissera toujours le choix des pr&eacute;noms &agrave; donner aux p&egrave;re et m&egrave;re et &agrave; la marraine.</span></span></span></span></i></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:-0.5pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><i><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">[&hellip;]</span></span></span></span></i></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:-0.5pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><i><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Ce n&rsquo;est pas compliqu&eacute;.</span></span></span></span></i></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:-0.5pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><i><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Les pr&eacute;noms ne doivent pas &ecirc;tre choisis en dehors de ceux que la loi permet d&rsquo;employer, ce qui limite l&rsquo;ampleur de l&rsquo;embarras mais les personnes, il en est, les personnes d&eacute;pourvues d&rsquo;imagination n&rsquo;ont qu&rsquo;&agrave; consulter le calendrier, et pallier ainsi habilement le vide qui les habite.</span></span></span></span></i></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:-0.5pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><i><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">[&hellip;] si vous voulez, parrain, marraine, pousser plus avant la complexit&eacute; du choix et &eacute;tablir relation entre le pr&eacute;nom choisi et quelques notions d&rsquo;ordre g&eacute;n&eacute;ral, rappelez-vous que, par exemple, Georges signifie &laquo; travailleur de la terre &raquo; ; Victor : &laquo; vainqueur &raquo; ; Maximilien : &laquo; le plus grand &raquo; ; Philippe : &laquo; qui aime les chevaux &raquo; ; Bernard : &laquo; chasseur d&rsquo;ours &raquo; ; Louis : &laquo; qui s&rsquo;y conna&icirc;t en hommes &raquo; ; Maurice : &laquo; le fils du Maure &raquo; : Gustave : &laquo; sur qui Dieu s&rsquo;appuie &raquo; ; Sophie : &laquo; pleine de sagesse &raquo; [&hellip;]</span></span></span></span></i></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:-0.5pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><i><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Il peut para&icirc;tre fastidieux d&rsquo;&ecirc;tre &eacute;clair&eacute; sur ces &eacute;tymologies, [&hellip;], mais on voudra bien r&eacute;fl&eacute;chir tout de m&ecirc;me,&nbsp; suis l&agrave; pour &ccedil;a, on voudra bien r&eacute;fl&eacute;chir qu&rsquo;il est bon en cette circonstance, et en toutes circonstances, l&rsquo;ai d&eacute;j&agrave; dit, il est bon d&rsquo;&ecirc;tre &eacute;clair&eacute; pour &eacute;viter de donner le nom de Maximilien &agrave; un enfant n&eacute; de parents minuscules auxquels il ressemblera, ou le nom de Maurice quand il est &agrave; craindre que la m&egrave;re ait fr&eacute;quent&eacute; &agrave; l&rsquo;exc&egrave;s les dancings aux professeurs mul&acirc;tres. On rit, on plaisante et on sombre sans le savoir dans l&rsquo;infamie.&nbsp; </span></span></span></span></i><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">(Lagarce, 2002 [1995] : 1819)</span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:">&nbsp;<span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Comment adapter le monologue de Lagarce en un dialogue pour deux personnages &agrave; partir de la tension, pr&eacute;c&eacute;demment rep&eacute;r&eacute;e, entre &eacute;nonc&eacute; du code de bonne conduite et parole intempestive ? Le choix aurait pu &ecirc;tre fait de confier &agrave; un des personnages l&rsquo;&eacute;nonc&eacute; du code et &agrave; l&rsquo;autre la parole intempestive. Or, dans l&rsquo;adaptation <i>Ainsi que cela continue</i>, les deux personnages f&eacute;minins se construisent sur une relation de concurrence pour l&rsquo;&eacute;nonc&eacute; du code de bonne conduite, chacune voulant en &ecirc;tre l&rsquo;&eacute;nonciatrice. La parole intempestive se trouve d&egrave;s lors &ecirc;tre le moyen de reprendre la parole &agrave; l&rsquo;autre, de refuser d&rsquo;&ecirc;tre rel&eacute;gu&eacute;e au second plan. Dans ce jeu de concurrence entre la dame A et la dame B, le public imagin&eacute;, les jeunes gens &agrave; &eacute;duquer, devient le troisi&egrave;me personnage-clef.&nbsp; La dame A et la dame B s&rsquo;adressent &agrave; lui, le prennent &agrave; parti, pour se mettre en valeur, valoriser leurs connaissances et d&eacute;voiler les faiblesses de l&rsquo;autre. Les personnages de deux dames se construisent donc sur un rapport de force qui implique fondamentalement la question de l&rsquo;adresse. Au fil de l&rsquo;adaptation, ce rapport de force &eacute;voluera vers une relation de plus en plus apais&eacute;e.&nbsp; </span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:">&nbsp;<span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Sur le plateau se m&ecirc;lent ainsi plusieurs jeux d&rsquo;adresse : les dames s&rsquo;adressant &agrave; l&rsquo;assistance des jeunes gens &agrave; &eacute;duquer, les dames se parlant entre elles, leurs messes basses cens&eacute;es &eacute;chapper &agrave; l&rsquo;assistance des jeunes gens mais qui seront bien s&ucirc;r per&ccedil;ues par le vrai public, les sous-entendus adress&eacute;s &agrave; l&rsquo;audience par l&rsquo;une des deux cens&eacute;s &eacute;chapper &agrave; l&rsquo;autre et enfin une dame ne s&rsquo;adressant qu&rsquo;&agrave; elle-m&ecirc;me.&nbsp; </span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:">&nbsp;<span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">La vari&eacute;t&eacute; des jeux d&rsquo;adresse donne lieu &agrave; diff&eacute;rents jeux sc&eacute;niques. La concurrence entre les deux dames pour l&rsquo;&eacute;nonc&eacute; du code de bonne conduite se traduit par des variations dans la distribution et la longueur des tours de parole mais aussi dans leur encha&icirc;nement et dans les intonations prises par les deux personnages. Madame A engage son discours calmement mais Madame B lui coupe la parole &agrave; deux reprises, ce que Madame A n&rsquo;accepte pas en reprenant tout de suite cette parole par &laquo; (quant &agrave;) lui &raquo; puis &laquo; je recommence &raquo; suivis d&rsquo;une longue pause pour v&eacute;rifier qu&rsquo;elle a bien gagn&eacute; le tour de parole. Madame B utilise un autre moyen pour reprendre cette parole en intervenant simplement apr&egrave;s que Madame A a fini son discours. Elle lance alors un &eacute;change tr&egrave;s rythm&eacute; avec Madame A, ponctu&eacute; de courtes pauses, ce qui lui permet finalement de monopoliser la parole (apr&egrave;s &laquo; Sophie &raquo;) dans une tirade qui se cl&ocirc;t par l&rsquo;intervention d&eacute;finitive de Madame A, qui reprend ainsi son positionnement dominant avec &laquo; On rit, on plaisante et on sombre sans le savoir dans l&rsquo;infamie &raquo;. Les &eacute;volutions du positionnement des deux personnages, entre dominante et domin&eacute;e, marqu&eacute;es par le ph&eacute;nom&egrave;ne des tours de parole sont renforc&eacute;es par leurs d&eacute;placements dans l&rsquo;espace et leur rapport corporel et visuel au public. Ainsi, au d&eacute;but de la sc&egrave;ne, Madame A est debout &agrave; l&rsquo;avant de l&rsquo;espace sc&eacute;nique en contact direct avec le public alors que Madame B se trouve plus loin, derri&egrave;re une table de service. Pendant l&rsquo;&eacute;change de paroles o&ugrave; les deux personnages s&rsquo;affrontent, leur rapport au public est parfois rompu et elles se tournent alors l&rsquo;une vers l&rsquo;autre. Madame B remportant l&rsquo;&eacute;change, Madame A vient s&rsquo;asseoir au centre de la sc&egrave;ne, laissant &agrave; Madame B le droit de s&rsquo;adresser au public directement &agrave; l&rsquo;avant de la sc&egrave;ne. Quand Madame A reprend la parole, elle reste dans son fauteuil au centre de la sc&egrave;ne alors que Madame B bat en retraite derri&egrave;re la table de service.&nbsp; </span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:">&nbsp;</span></span></span></p> <h3 class="Standard" style="text-align: justify; margin-bottom: 11px;">II.2 L&rsquo;autre, l&rsquo;audience des invit&eacute;s, imagin&eacute;e au temps des lectures et des r&eacute;p&eacute;titions&nbsp;<span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black"> </span></span></span></span></span></span></span></h3> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:">&nbsp;<span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Les diff&eacute;rents niveaux d&rsquo;adresse qui apparaissent dans cette sc&egrave;ne ont &eacute;t&eacute; mis en &eacute;vidence sur le plateau en cherchant &agrave; se repr&eacute;senter les voix hypoth&eacute;tiques de ceux &agrave; qui s&rsquo;adressent les personnages : l&rsquo;audience des jeunes gens &agrave; &eacute;duquer. Durant les r&eacute;p&eacute;titions et les repr&eacute;sentations, l&rsquo;adresse &agrave; cette audience &eacute;tait un &eacute;l&eacute;ment primordial de la pi&egrave;ce. Les com&eacute;diennes ont donc d&ucirc; &laquo; &eacute;couter &raquo; les voix de ceux auxquels elles s&rsquo;adressaient, en convenant que ces personnes avaient &eacute;t&eacute; invit&eacute;es pour &ecirc;tre &eacute;clair&eacute;es par elles et, finalement, pour servir de faire-valoir. Il &eacute;tait donc n&eacute;cessaire pour les com&eacute;diennes d&rsquo;imaginer continuellement quelles pouvaient &ecirc;tre les r&eacute;actions des &laquo; invit&eacute;s &raquo;. Cela se d&eacute;couvre dans cette sc&egrave;ne &agrave; travers le rapport de force qui s&rsquo;organise dans l&rsquo;entrem&ecirc;lement des voix, Madame A et Madame B jouant entre elles mais aussi avec l&rsquo;audience. Madame A indique aux invit&eacute;s d&rsquo;un air d&eacute;tach&eacute; et rassurant que &laquo; ce n&rsquo;est pas compliqu&eacute; &raquo; de d&eacute;cider qui doit donner ses pr&eacute;noms &agrave; l&rsquo;enfant, comme on le ferait &agrave; un enfant apprenant sa le&ccedil;on. Madame B se comporte de la m&ecirc;me fa&ccedil;on face au public lorsqu&rsquo;elle lui dit &laquo; (&hellip;) on voudra bien r&eacute;fl&eacute;chir tout de m&ecirc;me, suis l&agrave; pour &ccedil;a, (&hellip;) &raquo;.</span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:">&nbsp;</span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">&nbsp;La parole adress&eacute;e aux jeunes gens &agrave; &eacute;duquer permet &eacute;galement &agrave; chaque personnage de se valoriser tout en d&eacute;valorisant l&rsquo;autre. C&rsquo;est le cas, par exemple, lorsque Madame A dit &laquo; les personnes d&eacute;pourvues d&rsquo;imagination n&rsquo;ont qu&rsquo;&agrave; consulter le calendrier, et pallier ainsi habilement le vide qui les habite &raquo; tout en se d&eacute;calant tr&egrave;s l&eacute;g&egrave;rement afin de montrer au public de qui elle parle, c&rsquo;est-&agrave;-dire Madame B, et d&rsquo;attendre du public une approbation. C&rsquo;est le cas, encore, lorsque Madame B r&eacute;p&egrave;te plusieurs fois &laquo; Sophie &raquo; afin que le silence de Madame A, qu&rsquo;elle sait ne pas conna&icirc;tre la r&eacute;ponse attendue sur l&rsquo;&eacute;tymologie de ce pr&eacute;nom, la discr&eacute;dite aux yeux du public, pris &agrave; t&eacute;moin de la d&eacute;faillance de celle qui se veut la ma&icirc;tresse de c&eacute;r&eacute;monie. Madame A se venge en fermeture de la sc&egrave;ne et reprend la main sur les &eacute;v&eacute;nements. Pour cela, elle utilise le pronom &laquo; on &raquo; dans &laquo; On rit, on plaisante et on sombre sans le savoir dans l&rsquo;infamie &raquo; qui discr&eacute;dite la parole de Madame B. Le pronom ind&eacute;fini &laquo; on &raquo; incite le public &agrave; se d&eacute;solidariser de la parole de Madame B, qui vient de commettre une faute de go&ucirc;t inacceptable, et &agrave; se rapprocher &agrave; nouveau de Madame A, garante des r&egrave;gles de biens&eacute;ance et digne d&rsquo;&ecirc;tre &eacute;cout&eacute;e et regard&eacute;e.&nbsp; </span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:">&nbsp;</span></span></span></p> <h3>II.3 Du texte dramatique &agrave; la sc&egrave;ne : l&rsquo;autre du public au temps de la repr&eacute;sentation&nbsp;</h3> <p class="Standard" style="margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:">&nbsp;</span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Au temps de la repr&eacute;sentation, la parole th&eacute;&acirc;trale se dote d&rsquo;un niveau d&rsquo;adresse suppl&eacute;mentaire : le public r&eacute;el et plus seulement celui qui a &eacute;t&eacute; imagin&eacute; au temps des r&eacute;p&eacute;titions. C&rsquo;est ce que P. Brook rep&egrave;re comme la relation d&rsquo;assistance entre les deux parties :</span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:">&nbsp;&nbsp;&nbsp; </span></span></span></p> <p><q>Les spectateurs peuvent tr&egrave;s bien regarder passivement le spectacle, attendant de l&rsquo;acteur qu&rsquo;il fasse tout le travail, et sous ce regard passif, l&rsquo;acteur peut d&eacute;couvrir qu&rsquo;il ne peut produire qu&rsquo;une r&eacute;p&eacute;tition des r&eacute;p&eacute;titions. (&hellip;) Il dit alors que la salle est &laquo; mauvaise &raquo;. Parfois, au contraire, au cours de ce qu&rsquo;il appelle une &laquo; bonne &raquo; soir&eacute;e, il se trouve devant un public qui, par hasard, tient activement son r&ocirc;le de spectateur vivant. Ce public &laquo; l&rsquo;assiste &raquo;. C&rsquo;est gr&acirc;ce &agrave; cette &laquo; assistance &raquo; - l&rsquo;assistance des regards, des d&eacute;sirs, du plaisir et de la contestation &ndash; que la r&eacute;p&eacute;tition devient repr&eacute;sentation. Alors, ce qui est &laquo; repr&eacute;sentation &raquo; n&rsquo;isole plus l&rsquo;acteur de la salle ni le spectacle du public. Il les englobe : ce qui est pr&eacute;sent pour l&rsquo;un est pr&eacute;sent pour l&rsquo;autre. (&hellip;) Le public assiste au spectacle, mais, en m&ecirc;me temps, l&rsquo;acteur assiste le public. (Brook, 1977 : 182-183)</q></p> <p class="Standard" style="margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:">&nbsp;</span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Ce que P. Brook envisage comme une &laquo; relation d&rsquo;assistance &raquo; propre &agrave; la repr&eacute;sentation th&eacute;&acirc;trale, nous l&rsquo;appr&eacute;hendons sous le terme de co-&eacute;nonciation qui implique une nouvelle &laquo; mort de l&rsquo;auteur &raquo;. Toutes les voix qui ont constitu&eacute; l&rsquo;&eacute;nonciation au temps des r&eacute;p&eacute;titions (dramaturge, metteur en sc&egrave;ne, com&eacute;diens) mais aussi dans la sc&egrave;ne fictive de la pi&egrave;ce (personnages, audience pr&eacute;sum&eacute;e) vont se rejouer au temps de la repr&eacute;sentation dans cette nouvelle adresse, toujours unique et en partie impr&eacute;visible.&nbsp; Cette relation d&rsquo;assistance, cette co-&eacute;nonciation, est vitale pour que la repr&eacute;sentation ne se r&eacute;duise pas &agrave; une &laquo; r&eacute;p&eacute;tition de r&eacute;p&eacute;titions &raquo;. Un sens nouveau doit advenir &agrave; chaque repr&eacute;sentation. La qualit&eacute; de cette relation d&rsquo;assistance, contrairement &agrave; ce que P. Brook note, ne d&eacute;pend pas du hasard mais de la fa&ccedil;on dont le com&eacute;dien joue pour son public, et comment le public l&rsquo;&eacute;coute. C&rsquo;est ce que les &eacute;tudiantes-com&eacute;diennes ont pu exp&eacute;rimenter dans les deux repr&eacute;sentations d&rsquo;<i>Ainsi que cela continue</i> dont l&rsquo;une a &eacute;t&eacute; donn&eacute;e &agrave; Riga, devant un public compos&eacute; principalement d&rsquo;&eacute;tudiants et d&rsquo;enseignants de fran&ccedil;ais langue &eacute;trang&egrave;re, et l&rsquo;autre &agrave; Besan&ccedil;on, devant un public venu pour un festival de th&eacute;&acirc;tre &eacute;tudiant consacr&eacute; &agrave; l&rsquo;&oelig;uvre de J-L Lagarce.</span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Au cours de la premi&egrave;re repr&eacute;sentation en Lettonie, pour elles-m&ecirc;mes et pour le public dans sa majorit&eacute;, les &eacute;tudiantes-com&eacute;diennes demeuraient des &eacute;tudiantes qui se trouvaient en situation de prouver leur &laquo; ma&icirc;trise du fran&ccedil;ais &raquo;, leurs &laquo; comp&eacute;tences &raquo; dans cette langue. Comme, en outre, la plupart des membres du public ne comprenaient pas une grande part des nuances du texte jou&eacute;, cette situation avait pour enjeu principal l&rsquo;appr&eacute;ciation de la r&eacute;ussite des &eacute;tudiantes-com&eacute;diennes dans leur exercice th&eacute;&acirc;tral plut&ocirc;t que le sens de la pi&egrave;ce. Les &eacute;tudiantes ont &eacute;t&eacute; d&rsquo;une certaine mani&egrave;re plac&eacute;es en situation de devoir &laquo; bien parler &raquo;, &laquo; bien jouer &raquo;. Cette situation ne manquait pas d&rsquo;ironie dans la mesure o&ugrave; la pi&egrave;ce jou&eacute;e d&eacute;nonce justement la port&eacute;e mortif&egrave;re du &laquo; bien parler &raquo;, du &laquo; bien dire &raquo;. Du fait de ce public, venu assister &agrave; un exercice scolaire plut&ocirc;t que venu assister - au sens de P. Brook &ndash; les &eacute;tudiantes-com&eacute;diennes pendant la repr&eacute;sentation th&eacute;&acirc;trale, celles-ci se sont retrouv&eacute;es &agrave; r&eacute;citer le texte au lieu de le dire avec tout ce que cela comporte d&rsquo;ouverture &agrave; l&rsquo;inconnu.&nbsp; </span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">A contrario, au cours de la seconde repr&eacute;sentation en France, les com&eacute;diennes ne connaissaient pas les membres du public qui, lui, &eacute;tait venu voir jouer une pi&egrave;ce de Lagarce. Port&eacute;es par ce public qui r&eacute;agissait au texte et &agrave; leur jeu, les &eacute;tudiantes-com&eacute;diennes pouvaient &agrave; la fois faire entendre toutes les voix qui au fil des r&eacute;p&eacute;titions avaient donn&eacute; sens au texte de Lagarce mais aussi faire entendre leur propre voix, leur interpr&eacute;tation singuli&egrave;re du texte.</span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:">&nbsp;</span></span></span></p> <h2>III. Une interpr&eacute;ation singuli&egrave;re</h2> <p class="Standard" style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">&nbsp;De l&rsquo;&eacute;criture dramatique &agrave; la repr&eacute;sentation, le texte est fondamentalement polyphonique. Si l&rsquo;&eacute;criture dramatique de Lagarce trouve sa singularit&eacute; dans le processus de r&eacute;&eacute;criture au cours duquel il vient interroger le fonctionnement m&ecirc;me du langage, se pose la question pour les &eacute;tudiantes-com&eacute;diennes de trouver leur singularit&eacute; dans le travail d&rsquo;interpr&eacute;tation. Comment s&rsquo;approprier le texte de Lagarce au sens d&rsquo;y mettre quelque chose de soi ?&nbsp;&nbsp; </span></span></span></span></span></span></span></p> <h3>III.1 Les mots de Lagarce, des mots &agrave; soi ?&nbsp;</h3> <p class="Standard" style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">&nbsp;Le metteur en sc&egrave;ne, Jonathan Durandin, a fait le choix de ne pas travailler avec les &eacute;tudiantes-com&eacute;diennes &agrave; partir d&rsquo;une &laquo; explication de texte &raquo;, refusant ainsi l&rsquo;id&eacute;e d&rsquo;un texte dont le sens, unique, pourrait &ecirc;tre rendu &laquo; transparent &raquo;. Au contraire, il a laiss&eacute; Ilze et Agita se confronter &agrave; tout ce qui dans le texte r&eacute;sistait &agrave; leur compr&eacute;hension.&nbsp; C&rsquo;est &agrave; partir de cette &laquo; opacit&eacute; &raquo; du texte qu&rsquo;elles &eacute;taient appel&eacute;es &agrave; s&rsquo;interroger sur le langage, l&rsquo;&eacute;criture singuli&egrave;re de Lagarce et trouver une mani&egrave;re singuli&egrave;re de l&rsquo;interpr&eacute;ter. Dans un entretien Agita raconte comment elle a r&eacute;-&eacute;ecrit le texte de Lagarce aves ses propres mots, en griffonnant le texte au point de ne plus savoir faire la diff&eacute;rence entre ses mots et ceux de Lagarce. Elle n&rsquo;a pas utilis&eacute; le dictionnaire mais les mots qu&rsquo;elle connaissait d&eacute;j&agrave; en fran&ccedil;ais. Elle a ensuite fait dispara&icirc;tre ses mots pour utiliser le texte exact de la pi&egrave;ce. C&rsquo;est elle qui a trouv&eacute; le plus rapidement son personnage. En voulant reproduire exactement le texte de Jean-Luc Lagarce dans les r&eacute;p&eacute;titions, Ilze s&rsquo;est enferm&eacute;e dans un exercice de r&eacute;citation cherchant &agrave; reproduire un mod&egrave;le, sans concevoir que son jeu &eacute;tait une r&eacute;-&eacute;nonciation qui impliquait une part de singularit&eacute;. Ce n&rsquo;est que le rep&eacute;rage progressif des diff&eacute;rentes voix comme nous l&rsquo;&eacute;voquions pr&eacute;c&eacute;demment qui lui a permis de trouver peu &agrave; peu son personnage. <b>&nbsp;</b></span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><b>&nbsp;</b><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">&nbsp;Sur le plan de l&rsquo;interpr&eacute;tation, Agita a invent&eacute; son propre langage th&eacute;&acirc;tral pour rendre compte de son appropriation des mots de Lagarce. Au cours d&rsquo;une sc&egrave;ne, son personnage, la dame A, est &agrave; l&rsquo;arri&egrave;re-plan, &agrave; c&ocirc;t&eacute; de la table de service o&ugrave; se trouve le th&eacute; et les petits g&acirc;teaux tandis que la Dame B occupe l&rsquo;avant-sc&egrave;ne et &eacute;dicte le code de bonne conduite. Alors que le regard du public est cens&eacute; se focaliser sur la dame B, la dame A note tout &agrave; coup la pr&eacute;sence de petits g&acirc;teaux sur la table de service et s&rsquo;en trouve fort tent&eacute;e. A partir de l&agrave;, s&rsquo;engage par un jeu de regards et une tension corporelle une lutte entre la tentation de s&rsquo;emparer &agrave; la sauvette d&rsquo;un petit g&acirc;teau ou de respecter les bonnes mani&egrave;res. La partie du public qui a commenc&eacute; &agrave; remarquer cela commence &agrave; rire et indique au reste du public que quelque chose se passe aussi &agrave; l&rsquo;arri&egrave;re-sc&egrave;ne. Par ce jeu totalement singulier, proche du cin&eacute;ma muet, Agita incarne non seulement la tension entre les bonnes mani&egrave;res et la parole intempestive mais donne aussi une nouvelle dimension &agrave; la concurrence avec la dame B en lui reprenant la vedette depuis l&rsquo;arri&egrave;re-sc&egrave;ne. Le texte dramatique, dans ses espaces non &eacute;crits, laisse une grande place aux com&eacute;diens pour inventer une interpr&eacute;tation singuli&egrave;re.&nbsp; </span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">&nbsp;Enfin, sur le plan de la parole ordinaire, Agita raconte comment la singularit&eacute; de l&rsquo;&eacute;criture de Lagarce a d&rsquo;abord &eacute;t&eacute; une difficult&eacute; avant de devenir tout &agrave; fait famili&egrave;re. En effet, les constructions syntaxiques, les &laquo; agencements singuliers &raquo; que Lagarce impose au syst&egrave;me de la langue fran&ccedil;aise rebutent d&rsquo;abord l&rsquo;&eacute;tudiante avant de lui devenir tout &agrave; fait familiers au point de s&rsquo;inviter dans son propre discours au cours de l&rsquo;entretien :&nbsp; </span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:-0.5pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:95%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">&laquo; quand on trouve quelques constructions / quelques phrases qu&rsquo;on ne peut pas comprendre / donc il faut faire plus d&rsquo;effort pour revenir en arri&egrave;re / trouver les mots qui sont li&eacute;s tout &ccedil;a donc / trouver le fran&ccedil;ais /// c&rsquo;&eacute;tait un petit peu dur au d&eacute;but mais quand on arrive de comprendre le principe, la m&eacute;thode qui est utilis&eacute;e pour &eacute;crire le texte / vers la fin c&rsquo;est vraiment facile &agrave; lire en fait /// oui, les petites constructions qu&rsquo;il utilise et tout &ccedil;a c&rsquo;est c&rsquo;est pas <i>juste&nbsp; une fois et &ccedil;a suffit</i>&nbsp; [rire] tu vois j&rsquo;arrive &agrave; citer Lagarce c&rsquo;est g&eacute;nial [rires]<a href="#_ftn7" name="_ftnref7" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">[7]</span></span></span></span></span></span></span></span></span></a></span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Ilze et Agita ont en effet t&eacute;moign&eacute; que des expressions et des constructions propres &agrave; l&rsquo;&eacute;criture de Lagarce avaient fini par rentrer dans leur r&eacute;pertoire, que ces mots leur venaient naturellement &agrave; la fois en fran&ccedil;ais mais en letton aussi.&nbsp; </span></span></span></span></span></span></span></p> <h3>III.2 Des mots ouverts sur l&rsquo;inconnu&nbsp;&nbsp;</h3> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Les deux &eacute;tudiantes-com&eacute;diennes ont choisi avec le metteur en sc&egrave;ne de jouer les derni&egrave;res parties de l&rsquo;adaptation de la pi&egrave;ce, celles qui traitent de la vieillesse, de la mort et du deuil avec un ton pos&eacute;, grave, respectueux, en accord avec le sens litt&eacute;ral du texte. L&rsquo;option retenue pour l&rsquo;interpr&eacute;tation est celle du songe triste ne soulignant pas les &eacute;quivoques du texte de Lagarce. Leur jeu qui am&egrave;ne une &eacute;motion empreinte de nostalgie laisse ainsi le public se saisir ou non de la dimension carnavalesque que Lagarce peut donner &agrave; la mort. Lors de la repr&eacute;sentation &agrave; Besan&ccedil;on, la sc&egrave;ne de l&rsquo;enterrement faisait donc coexister deux niveaux de r&eacute;ception du texte. Le public &eacute;tait &agrave; la fois touch&eacute; par le jeu de ces deux jeunes femmes qui appr&eacute;hendent la mort avec gravit&eacute; et respect mais il a aussi entendu en filigrane la voix de Lagarce retentir dans l&rsquo;&eacute;quivoque. Cela s&rsquo;est particuli&egrave;rement jou&eacute; au moment de la r&eacute;plique&nbsp; &laquo; Le corbillard s&rsquo;&eacute;branle, les corbillards s&rsquo;&eacute;branlent toujours, ce sont des mots qui vont tr&egrave;s bien ensemble. &raquo; (Lagarce, 2002 [1995] : 46). Connaissant la biographie et l&rsquo;&oelig;uvre de Lagarce dans laquelle mort et sexualit&eacute; se marient de mani&egrave;re dramatique et carnavalesque, le public s&rsquo;est saisi de cette &eacute;quivoque et ses rires ont renvoy&eacute; aux com&eacute;diennes un sens autre qu&rsquo;elles n&rsquo;avaient pas retenu durant les r&eacute;p&eacute;titions. Ainsi, Ilze et Agita qui se risquaient &agrave; jouer un texte d&rsquo;un auteur fran&ccedil;ais devant un public fran&ccedil;ais se retrouvaient-elles &agrave; entendre autrement les mots qu&rsquo;elles pronon&ccedil;aient. Peut-&ecirc;tre est-ce cela qu&rsquo;implique la cr&eacute;ativit&eacute; ? Ouvrir sa parole &agrave; de l&rsquo;inconnu, parler avec des mots venus d&rsquo;ailleurs, y mettre un peu de soi et l&rsquo;adresser &agrave; un autre qui en fera &agrave; son tour du nouveau.&nbsp; <b>&nbsp;</b></span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; text-indent:34.9pt; margin-bottom:11px">&nbsp;</p> <p class="Standard" style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Authier-Revuz, Jacqueline, <i>Ces mots qui ne vont pas de soi</i>. Tome I et II, Paris, Larousse, 1995.</span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Bakhtine, Mikha&iuml;l, <i>Esth&eacute;tique de la cr&eacute;ation verbale</i>, Paris, Gallimard, 1979/1984.</span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Baronne (De) Staffe, Usages du monde, R&egrave;gles du savoir-vivre dans la soci&eacute;t&eacute; moderne, Paris, Victor-Havard &eacute;diteur, 1891.&nbsp; </span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span lang="EN-US" style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Barthes, Roland, &ldquo;The Death of the Author&rdquo;, <i>Image Music Text</i>, London, Fontana Press, p.142 &ndash; 148, 1977.</span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Brook, Peter,<i>L&rsquo;espace vide</i>, Paris, Editions du Seuil, 1977.</span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Humboldt (von), Wilhem, <i>Introduction &agrave; l&rsquo;&oelig;uvre sur le Kavi et autres essais</i>, Paris, Le Seuil, 1974[1822-1830].</span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Lagarce, Jean-Luc, <i>Les r&egrave;gles du savoir-vivre dans la soci&eacute;t&eacute; moderne</i> in <i>Th&eacute;&acirc;tre complet IV,</i> Besan&ccedil;on, Les solitaires intempestifs, 2002 [1995]. &nbsp;</span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="text-align:justify; margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="font-size:12.0pt"><span style="line-height:100%"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">Saussure (de), Ferdinand, Cours de linguistique g&eacute;n&eacute;rale, Paris, Payot, 2004 [1916].</span></span></span></span></span></span></span></p> <p class="Standard" style="margin-bottom:11px"><span style="font-size:11pt"><span style="line-height:105%"><span calibri="" style="font-family:">&nbsp;</span></span></span></p> <div>&nbsp; <hr align="left" size="1" width="33%" /> <div id="ftn1"> <p class="footnotedescription" style="text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:103%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="color:black"><a href="#_ftnref1" name="_ftn1" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span calibri="" style="font-family:"><span style="color:black">[1]</span></span></span></span></span></span></span></span></span></a>Le Th&eacute;&acirc;tre Universitaire de Franche-Comt&eacute; (TUFC)&nbsp; en collaboration avec l&rsquo;acad&eacute;mie de la Culture de Lettonie (LKA) organisait du 24 au 27 mai 2016 des rencontres internationales de th&eacute;&acirc;tre universitaire autour de l&rsquo;&oelig;uvre de J-L Lagarce : &laquo; Les mots de Lagarce &raquo;. En parall&egrave;le, un projet de recherche sur la pratique th&eacute;&acirc;trale dans l&rsquo;enseignement/apprentissage du fran&ccedil;ais langue &eacute;trang&egrave;re (Projet BQF 2017) qui incluait un atelier de th&eacute;&acirc;tre avec les &eacute;tudiants du master &eacute;tait men&eacute; au sein du d&eacute;partement de Fran&ccedil;ais Langue Etrang&egrave;re de l&rsquo;Universit&eacute; de Franche-Comt&eacute; en partenariat avec le TUFC et LKA.</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn2"> <p class="footnotedescription"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:103%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="color:black"><a href="#_ftnref2" name="_ftn2" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span calibri="" style="font-family:"><span style="color:black">[2]</span></span></span></span></span></span></span></span></span></a>En r&eacute;f&eacute;rence au nom de la maison d&rsquo;&eacute;dition fond&eacute;e par J-L Lagarce et F. Berreur &laquo; Les solitaires intempestifs &raquo;, titre d&rsquo;un collage que Lagarce avait r&eacute;alis&eacute; en 1987 (cf. www.solitairesintempestifs.com)&nbsp; </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn3"> <p class="footnotedescription"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:103%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="color:black"><a href="#_ftnref3" name="_ftn3" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span calibri="" style="font-family:"><span style="color:black">[3]</span></span></span></span></span></span></span></span></span></a>Nous soulignons les mots que Lagarce reprend &agrave; l&rsquo;identique &agrave; la Baronne Staffe.</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn4"> <p class="footnotedescription"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:103%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="color:black"><a href="#_ftnref4" name="_ftn4" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span calibri="" style="font-family:"><span style="color:black">[4]</span></span></span></span></span></span></span></span></span></a>&laquo; Dans tous ces cas nous surprenons donc, au lieu d&rsquo;<i>id&eacute;es</i> donn&eacute;es d&rsquo;avance, des <i>valeurs </i>&eacute;manant du syst&egrave;me. Quand on dit qu&rsquo;elles correspondent &agrave; des concepts, on sous-entend que ceux-ci sont purement diff&eacute;rentiels, d&eacute;finis non pas positivement par leur contenu, mais n&eacute;gativement par leurs rapports avec les autres termes du syst&egrave;me. Leur plus exact caract&eacute;ristique est d&rsquo;&ecirc;tre ce que les autres ne sont pas &raquo; (Saussure, [1916] 2005 : 166)</span></span></span></span></p> <p class="footnotedescription"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:103%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="color:black">&nbsp;</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn5"> <p class="footnotedescription"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:103%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="color:black"><a href="#_ftnref5" name="_ftn5" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span calibri="" style="font-family:"><span style="color:black">[5]</span></span></span></span></span></span></span></span></span></a>Ce serait l&agrave; l&rsquo;occasion d&rsquo;une v&eacute;ritable le&ccedil;on sur le langage &agrave; partir de l&rsquo;approche non r&eacute;f&eacute;rentielle et non substantialiste du langage chez Humboldt et Saussure.&nbsp; </span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn6"> <p class="footnotedescription"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:103%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="color:black"><a href="#_ftnref6" name="_ftn6" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span calibri="" style="font-family:"><span style="color:black">[6]</span></span></span></span></span></span></span></span></span></a>Cf. Aur&eacute;lie SAILLARD, <i>Pratique th&eacute;&acirc;trale en fran&ccedil;ais langue &eacute;trang&egrave;re : l&#39;&eacute;mergence d&#39;une &eacute;nonciation singuli&egrave;re</i>, M&eacute;moire de Master II FLE, sous la dir. de R-M Volle, Universit&eacute; de Franche-Comt&eacute;, soutenu en 2016.</span></span></span></span></p> </div> <div id="ftn7"> <p class="footnotedescription"><span style="font-size:10pt"><span style="line-height:103%"><span calibri="" style="font-family:"><span style="color:black"><a href="#_ftnref7" name="_ftn7" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="position:relative"><span style="top:0pt"><span style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span calibri="" style="font-family:"><span style="color:black">[7]</span></span></span></span></span></span></span></span></span></a>Cf. M&eacute;moire d&rsquo;Aur&eacute;lie Saillard pr&eacute;c&eacute;demment cit&eacute;.</span></span></span></span></p> </div> </div>