<p><strong>Abstract</strong> :&nbsp;The categorization of French determiner is one of the learning difficulties encountered by Chinese learners. Before starting French, they have formed, through previous language learning, including Chinese and English, some categorical representations in their own mind, which are different from the traditional categorization of French determiner. Based on 23 French grammar books published in China, this research examines the ways in which local authors adapt the classification of French determiner according to the Chinese learners&rsquo; prior knowledge.</p> <p>&nbsp;</p> <p>La didactique du fran&ccedil;ais langue &eacute;trang&egrave;re est confront&eacute;e &agrave; la diversit&eacute; et &agrave; la complexit&eacute; des cultures &eacute;ducatives et linguistiques. L&rsquo;enseignement de la grammaire fran&ccedil;aise se trouve dans la m&ecirc;me situation. Si la grammaire peut &ecirc;tre compar&eacute;e au paysage d&rsquo;une langue, les ouvrages de grammaire correspondent &agrave;&nbsp;la mani&egrave;re de repr&eacute;senter et de d&eacute;crire ce paysage. Sous l&rsquo;influence de la mondialisation et de la globalisation, ce paysage tend &agrave; &ecirc;tre esquiss&eacute; d&rsquo;une mani&egrave;re plus ou moins identique. Autrement dit, la tendance g&eacute;n&eacute;rale est de mettre en pratique un discours grammatical universel, qui est suppos&eacute; pouvoir s&rsquo;appliquer &agrave; tous les apprenants. Pourtant, les grammaires ne constituent pas des produits automatiquement exportables (ou importables) en ce qu&rsquo;elles sont &laquo; &eacute;labor&eacute;es dans un contexte donn&eacute; (un lieu, une &eacute;poque) et proc&egrave;dent d&rsquo;un point de vue sur la langue &raquo; (Vigner, 2004 : 12). Des probl&egrave;mes se posent in&eacute;vitablement lorsque l&rsquo;on impose des cat&eacute;gories grammaticales qui sont en d&eacute;calage avec la conceptualisation des apprenants. Rien ne permet de consid&eacute;rer a priori que les cat&eacute;gories auxquelles sont expos&eacute;s les apprenants correspondent &agrave; la fa&ccedil;on dont ils les per&ccedil;oivent eux-m&ecirc;mes. En effet, ils poss&egrave;dent, gr&acirc;ce &agrave; leur parcours scolaire sp&eacute;cifique, une &laquo; culture m&eacute;talinguistique &raquo; (Beacco, 1997). Cette culture ne se r&eacute;duit pas &agrave; des connaissances &laquo; pures &raquo;, mais repr&eacute;sente un ensemble de pass&eacute; m&eacute;talinguistique des apprenants baign&eacute;s dans une communaut&eacute; et une culture homog&egrave;nes. Ce &laquo; d&eacute;j&agrave;-l&agrave; &raquo; permet de structurer et de remodeler l&rsquo;appr&eacute;hension de nouvelles donn&eacute;es de la langue cible (ci-apr&egrave;s LC).</p> <p>La d&eacute;marche de contextualisation du discours grammatical avanc&eacute;e par l&rsquo;&eacute;quipe de recherche Grammaires et contextualisations (GRAC) semble constituer une voie de sortie, car elle permet d&rsquo;am&eacute;nager le conflit entre ces cultures m&eacute;talinguistiques pr&eacute;alables et une nouvelle description de la LC en vue de faciliter la conceptualisation des apprenants. Dans cette perspective, les discours grammaticaux &eacute;dit&eacute;s &agrave; l&rsquo;&eacute;tranger restent le point central des pr&eacute;occupations du GRAC dans la mesure o&ugrave; ces ouvrages sont susceptibles de refl&eacute;ter des adaptations r&eacute;alis&eacute;es et mises en circulation par les enseignants locaux (Fouillet et al., 2015 : 38). Ces adaptations, appel&eacute;es &eacute;galement contextualisations, renvoient &agrave; des modifications de la description du fran&ccedil;ais qui &laquo; tendent &agrave; adapter celle-ci aux cat&eacute;gories m&eacute;talinguistiques de langue du contexte (famili&egrave;res aux apprenants) ou &agrave; d&eacute;crire des ph&eacute;nom&egrave;nes morphosyntaxiques de mani&egrave;re sp&eacute;cifique, en fonction de difficult&eacute;s d&rsquo;apprentissage du fran&ccedil;ais [&hellip;] ou de fonctionnements de la langue du contexte &raquo; (GRAC, 2011 : 6).</p> <p>La pr&eacute;sente recherche aborde la question de la contextualisation de la description du fran&ccedil;ais en contexte chinois. Nous choisirons comme objet de recherche le discours pr&eacute;sent dans vingt-trois ouvrages de grammaire fran&ccedil;aise produits sur place. Nous nous int&eacute;resserons &agrave; la cat&eacute;gorisation des d&eacute;terminants fran&ccedil;ais en supposant qu&rsquo;elle fait l&rsquo;objet des adaptations effectu&eacute;es par les auteurs chinois en fonction de la culture m&eacute;talinguistique de leur public. Ce point particulier n&rsquo;a pas &eacute;t&eacute; choisi au hasard : il constitue l&rsquo;une des zones de difficult&eacute; des apprenants sinophones. Nous nous attacherons avant tout &agrave; mettre en &eacute;vidence cette difficult&eacute; envisag&eacute;e du point de vue formel et culturel. Apr&egrave;s une pr&eacute;cision m&eacute;thodologique de la recherche et une pr&eacute;sentation du corpus, nous verrons comment les auteurs chinois des ouvrages retenus adaptent la cat&eacute;gorisation de cette classe grammaticale au contexte chinois.</p> <h2>1. Le d&eacute;terminant fran&ccedil;ais&nbsp;: une difficult&eacute; de cat&eacute;gorisation</h2> <p>&nbsp;</p> <p>Le d&eacute;terminant fran&ccedil;ais ne trouve pas de cat&eacute;gorie &eacute;quivalente dans la langue maternelle (ci-apr&egrave;s LM) des apprenants chinois. On est alors confront&eacute; &agrave; des difficult&eacute;s aff&eacute;rentes &agrave; son introduction aupr&egrave;s de ce public. Ces difficult&eacute;s d&rsquo;enseignement-apprentissage ne sont pas uniquement &agrave; consid&eacute;rer d&rsquo;un point de vue formel, mais aussi d&rsquo;un point de vue culturel.</p> <h3>1.1. Le &laquo; d&eacute;terminant &raquo; chinois et le d&eacute;terminant fran&ccedil;ais</h3> <p>Le d&eacute;terminant constitue l&rsquo;une des parties du discours dans la grammaire fran&ccedil;aise. Mais il est appropri&eacute; de noter que l&rsquo;apparition du terme d&eacute;terminant est assez r&eacute;cente dans l&rsquo;histoire de la grammaire fran&ccedil;aise. Auparavant, dans la tradition scolaire, on distinguait g&eacute;n&eacute;ralement la cat&eacute;gorie du substantif, celle de l&rsquo;article et celle de l&rsquo;adjectif. Les adjectifs se subdivisent en adjectifs qualificatifs et en adjectifs d&eacute;terminatifs. Les premiers attribuent &agrave; une chose ou &agrave; un &ecirc;tre un caract&egrave;re qui lui est inh&eacute;rent et les derniers d&eacute;limitent un objet de l&rsquo;ext&eacute;rieur (Wilmet, 1986&nbsp;: 21-22).</p> <p>&Agrave; la suite des travaux de Bloomfield, les descriptions du groupe nominal sont nourries par le courant am&eacute;ricain, le distributionnalisme. &Agrave; partir de 1939, Gougenheim oppose en fran&ccedil;ais les d&eacute;terminatifs et les adjectifs, ce qui cr&eacute;e une confusion entre les nouveaux d&eacute;terminatifs et les adjectifs d&eacute;terminatifs que l&rsquo;on utilisait dans la tradition d&rsquo;enseignement scolaire. L&rsquo;apparition du terme d&eacute;terminant permet de lever cette &eacute;quivoque, et les deux cat&eacute;gories &ndash; d&eacute;terminant et adjectif &ndash; se sont install&eacute;es &agrave; partir de la Nouvelle grammaire du fran&ccedil;ais de Dubois &amp; Lagane (1973) (Wilmet, 1986&nbsp;: 22).</p> <p>Dans la grammaire chinoise, la notion de d&eacute;terminant existe sous le terme de d&igrave;ngyŭ, mais renvoie &agrave; une r&eacute;alit&eacute; linguistique totalement diff&eacute;rente. Selon les grammairiens chinois, le &laquo;&nbsp;d&eacute;terminant&nbsp;&raquo; (d&igrave;ngyŭ) constitue l&rsquo;un des constituants phrastiques1&nbsp;&agrave; l&rsquo;instar du sujet ou de l&rsquo;objet. Il s&rsquo;agit d&rsquo;un mot qui sert g&eacute;n&eacute;ralement &agrave; modifier ou &agrave; d&eacute;terminer un nom. D&rsquo;apr&egrave;s Ma (1994), il existe huit types de &laquo;&nbsp;d&eacute;terminants&nbsp;&raquo; en chinois. Nous en pr&eacute;senterons ci-dessous trois car ils reviennent tr&egrave;s souvent dans cette langue&nbsp;: pronom d&eacute;monstratif, pronom personnel et sh&ugrave;li&agrave;ngc&iacute;, qui est compos&eacute;&nbsp;d&rsquo;un sh&ugrave;c&iacute; (quantificateur, not&eacute; Q) et d&rsquo;un li&agrave;ngc&iacute;2 (classificateur, not&eacute; Cl.).&nbsp;</p> <p>zh&egrave;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; zhāng&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; zhuōzi</p> <p>celui-ci&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Cl.&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; &nbsp;&nbsp;&nbsp;table</p> <p>cette table</p> <p>tā&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; de&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; bĭ</p> <p>il&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Particule&nbsp;&nbsp; &nbsp;&nbsp;stylo</p> <p>son stylo</p> <p>yī&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; li&agrave;ng&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; chē</p> <p>une&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; Cl.&nbsp;&nbsp;&nbsp;&nbsp; voiture</p> <p>une voiture</p> <p>Ces trois exemples montrent que les mots en chinois qui jouent le r&ocirc;le des d&eacute;terminants fran&ccedil;ais renvoient aux diff&eacute;rents faits de langue et donc ne peuvent pas &ecirc;tre class&eacute;s sous une partie du discours. Diff&eacute;rent du d&eacute;terminant fran&ccedil;ais, le &laquo;&nbsp;d&eacute;terminant &raquo; chinois&nbsp;reste une notion formelle et syntaxique. Cette diff&eacute;rence li&eacute;e au d&eacute;coupage des r&eacute;alit&eacute;s linguistiques pose ainsi une premi&egrave;re difficult&eacute; de cat&eacute;gorisation aux apprenants chinois lors de l&rsquo;enseignement du d&eacute;terminant fran&ccedil;ais.</p> <h3>1.2. La culture m&eacute;talinguistique des apprenants chinois</h3> <p>Avant le contact avec le fran&ccedil;ais &agrave; l&rsquo;universit&eacute;, les &eacute;tudiants chinois ma&icirc;trisent g&eacute;n&eacute;ralement d&eacute;j&agrave; plus ou moins bien le chinois et l&rsquo;anglais, langue &eacute;trang&egrave;re impos&eacute;e dans l&rsquo;enseignement secondaire et sup&eacute;rieur. Le parcours scolaire sp&eacute;cifique des apprenants chinois permet &agrave; ceux-ci de construire au moins une comp&eacute;tence bilingue et une culture m&eacute;talinguistique. Nous allons examiner celle-ci &agrave; travers les connaissances m&eacute;talinguistiques de quelques manuels scolaires de chinois et d&rsquo;anglais en mettant en &eacute;vidence les termes m&eacute;talinguistiques et les repr&eacute;sentations cat&eacute;gorielles &agrave; leur disposition.</p> <p>Les connaissances grammaticales qui n&rsquo;occupent que quelques pages sont pr&eacute;sentes dans les annexes des manuels de chinois. Nous avons rep&eacute;r&eacute; dans Le chinois &ndash; septi&egrave;me ann&eacute;e II (2013b)&nbsp;douze parties du discours, dont&nbsp;m&iacute;ngc&iacute; (nom), x&iacute;ngr&oacute;ngc&iacute; (adjectif), sh&ugrave;c&iacute; (Q), et li&agrave;ngc&iacute; (Cl.) (Sun, 2013b&nbsp;: 227 -229).</p> <p>Par ailleurs, les auteurs &eacute;tablissent une distinction entre deux grandes classes de mots &ndash; sh&iacute;c&iacute; (mots pleins) et xūc&iacute; (mots vides) &ndash; qui sont inspir&eacute;es par les pens&eacute;es tao&iuml;stes. Les mots pleins renvoient &agrave; des mots dot&eacute;s d&rsquo;un sens relativement r&eacute;el alors que les mots vides poss&egrave;dent un sens moins concret que les mots pleins, et aident ceux-ci &agrave; exprimer des id&eacute;es (Lu, 2002&nbsp;: 17-18). Cette distinction est propre &agrave; la grammaire chinoise, mais n&rsquo;aboutit pas &agrave; une th&eacute;orie des parties du discours. Les deux classes de mots fonctionnement ensemble pour construire des &eacute;nonc&eacute;s dans la langue chinoise mais aussi dans d&rsquo;autres langues.</p> <p>Dans l&rsquo;annexe du manuel Le chinois &ndash; 9e ann&eacute;e II (Sun, 2013a: 241-245), on recense les mots vides du chinois classique &agrave; ma&icirc;triser par les &eacute;l&egrave;ves chinois. Au sein des manuels Le chinois &ndash; 7e ann&eacute;e II (2001a) et Le chinois &ndash; 8e ann&eacute;e I (2001b), on adopte ces deux grandes classes pour cat&eacute;goriser les parties du discours du chinois moderne. Faute de d&eacute;finition, les mots pleins incluent le nom, le verbe, l&rsquo;adjectif et le quantificateur (Zhongxue yuwenshi, 2001a&nbsp;: 270) et les mots vides englobent l&rsquo;adverbe, la pr&eacute;position, la conjonction, la particule, l&rsquo;interjection et l&rsquo;onomatop&eacute;e (Zhongxue yuwenshi, 2001b&nbsp;: 266).</p> <p>Si les repr&eacute;sentations cat&eacute;gorielles chez les &eacute;l&egrave;ves chinois sont construites &agrave; travers ces m&eacute;talangages utilis&eacute;s pour d&eacute;crire la langue chinoise, elles ne cessent d&rsquo;&ecirc;tre renforc&eacute;es lors du processus de l&rsquo;apprentissage de la premi&egrave;re langue &eacute;trang&egrave;re &ndash; l&rsquo;anglais. En anglais, les auteurs chinois des manuels analys&eacute;s distinguent dix parties du discours, dont l&rsquo;article et l&rsquo;adjectif num&eacute;ral. Ils sont mis en parall&egrave;le avec le nom, le pronom, l&rsquo;adjectif, le verbe, l&rsquo;adverbe, la pr&eacute;position, la conjonction et l&rsquo;interjection au lieu d&rsquo;&ecirc;tre regroup&eacute;s sous le terme determiner. Cette classification des mots g&eacute;n&egrave;re chez les apprenants chinois des repr&eacute;sentations cat&eacute;gorielles sur l&rsquo;article anglais, qui est consid&eacute;r&eacute; comme l&rsquo;une des parties du discours, et la notion de determiner n&rsquo;est pas abord&eacute;e. En outre, afin d&rsquo;expliquer ce qu&rsquo;est l&rsquo;article, les auteurs chinois se servent du terme xūc&iacute;&nbsp;(mot vide) pour cat&eacute;goriser l&rsquo;article puisqu&rsquo;il aide les noms &agrave; exprimer le sens&nbsp;: &laquo;&nbsp;L&rsquo;article, une sorte de mot vide, est souvent plac&eacute; devant un nom pour aider &agrave; indiquer le sens du r&eacute;f&eacute;rent auquel le nom renvoie.&nbsp;&raquo; (Liu et al., 2014&nbsp;: 116).</p> <p>&Agrave; travers l&rsquo;apprentissage ant&eacute;rieur du chinois et de l&rsquo;anglais, les apprenants chinois ont ainsi construit une culture m&eacute;talinguistique stabilis&eacute;e et partag&eacute;e. Besse souligne &agrave; ce titre l&rsquo;importance de la prendre en compte :</p> <p>Si les &eacute;tudiants ont appris un m&eacute;talangage (&agrave; propos de leur langue maternelle ou d&rsquo;une premi&egrave;re langue &eacute;trang&egrave;re) et qu&rsquo;ils ont retenu une partie des cat&eacute;gorisations et des op&eacute;rations, on ne peut &eacute;viter p&eacute;dagogiquement de tenir compte de ce m&eacute;talangage, parce que c&rsquo;est &agrave; travers son prisme qu&rsquo;est per&ccedil;u et interpr&eacute;t&eacute; le fonctionnement de langue cible. &nbsp;(Besse, 1980&nbsp;: 127).</p> <p>Leurs exp&eacute;riences avec l&rsquo;enseignement-apprentissage de la L1 (langue premi&egrave;re) et de la L2 (langue seconde) constituent un pr&eacute;-acquis non n&eacute;gligeable. Elles permettent aux apprenants d&rsquo;acc&eacute;der &agrave; un certain degr&eacute; de culture m&eacute;talinguistique. C&rsquo;est &agrave; cette culture que viendra se surimposer la description d&rsquo;une nouvelle langue, dans laquelle l&rsquo;article est joint aux autres adjectifs d&eacute;terminatifs dans la classe du d&eacute;terminant. Nous supposons que les enseignants chinois ont am&eacute;nag&eacute; ce contact en modifiant la &laquo;&nbsp;grammaire fran&ccedil;aise du fran&ccedil;ais&nbsp;&raquo; selon la culture m&eacute;talinguistique de leur public. Cette prise en compte du &laquo;&nbsp;d&eacute;j&agrave;-l&agrave;&nbsp;&raquo; des apprenants est susceptible de donner naissance &agrave; de nouvelles formes de descriptions qui diff&egrave;rent de celles produites pour les utilisateurs locuteurs natifs.</p> <h2>2. M&eacute;thodologie de recherche et corpus</h2> <p>&nbsp;</p> <p>Nous avons choisi de caract&eacute;riser les contextualisations &agrave; partir des ouvrages de grammaire publi&eacute;s en contexte chinois en ce qu&rsquo;ils sont des mat&eacute;riaux stabilis&eacute;s et faciles d&rsquo;acc&egrave;s, qui&nbsp;permettent de s&rsquo;assurer d&rsquo;une certaine repr&eacute;sentativit&eacute; quantitative (Beacco et al., 2014&nbsp;: 8). La d&eacute;marche m&eacute;thodologique de cette recherche consiste &agrave; effectuer une comparaison afin d&rsquo;identifier des &eacute;carts entre les descriptions r&eacute;dig&eacute;es par les auteurs chinois et les descriptions de r&eacute;f&eacute;rence propos&eacute;es par les grammairiens francophones. Celles-ci d&eacute;signent &agrave; la fois &laquo;&nbsp;ce &agrave; quoi on se r&eacute;f&egrave;re&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;ce qui est reconnu comme faisant autorit&eacute; par l&rsquo;ensemble de la communaut&eacute;&nbsp;&raquo; (Fouillet et al., 2015&nbsp;: 40). Nous avons retenu Grammaire m&eacute;thodique du fran&ccedil;ais de Riegel et al. (1999)&nbsp;et Le bon usage de Grevisse &amp; Goosse (2008) en tant que grammaires de r&eacute;f&eacute;rence car ce sont les plus cit&eacute;es par les auteurs chinois. Le corpus qui servira &agrave; effectuer la comparaison est constitu&eacute; d&rsquo;un ensemble de vingt-trois ouvrages de grammaire fran&ccedil;aise publi&eacute;s en Chine entre 1949 et 2017.</p> <p>Parmi une centaine d&rsquo;ouvrages &eacute;dit&eacute;s pendant cette p&eacute;riode, nous avons d&rsquo;abord effectu&eacute; une s&eacute;lection des corpus en excluant les ouvrages import&eacute;s3, dans lesquels le niveau d&rsquo;intervention des auteurs chinois reste tr&egrave;s bas, et en conservant seulement ceux &eacute;labor&eacute;s par des enseignants chinois pour les lecteurs chinois. Ensuite, une deuxi&egrave;me s&eacute;lection a &eacute;t&eacute; r&eacute;alis&eacute;e en fonction du contenu&nbsp;: afin d&rsquo;examiner la mani&egrave;re de cat&eacute;goriser le d&eacute;terminant fran&ccedil;ais, nous avons privil&eacute;gi&eacute; les grammaires de synth&egrave;se qui essaient de d&eacute;crire des faits langagiers du fran&ccedil;ais d&rsquo;une mani&egrave;re globale, et non celles qui ne traitent que des difficult&eacute;s d&rsquo;apprentissage du fran&ccedil;ais chez les apprenants chinois.</p> <p>Les ouvrages retenus relevant du type de grammaires dites p&eacute;dagogiques sont, en g&eacute;n&eacute;ral, con&ccedil;us pour les &eacute;tudiants &agrave; l&rsquo;universit&eacute; qui apprennent le fran&ccedil;ais comme sp&eacute;cialit&eacute; ou comme deuxi&egrave;me langue &eacute;trang&egrave;re. Dans tous les ouvrages analys&eacute;s, l&rsquo;unique langue de pr&eacute;sentation des descriptions est le chinois. Les entr&eacute;es grammaticales du sommaire sont pr&eacute;sent&eacute;es en LM des apprenants dans la plupart des ouvrages analys&eacute;s tandis que dans le reste des ouvrages, elles sont r&eacute;dig&eacute;es en chinois et en fran&ccedil;ais.</p> <p>Nous avons proc&eacute;d&eacute; &agrave; l&rsquo;analyse de la cat&eacute;gorisation du d&eacute;terminant fran&ccedil;ais en examinant le sommaire ainsi que les descriptions du d&eacute;terminant dans ces grammaires produites sur place. Il est hors de notre port&eacute;e d&rsquo;&eacute;valuer l&rsquo;influence de ces descriptions sur l&rsquo;appropriation effective de la LC. En outre, nous tenons &agrave; pr&eacute;ciser que seuls des extraits traduits en fran&ccedil;ais par nos soins seront &eacute;tudi&eacute;s ici.</p> <h2>3. La recat&eacute;gorisation du d&eacute;terminant fran&ccedil;ais dans les ouvrages de grammaire produits en Chine</h2> <p>&nbsp;</p> <p>Il ressort de l&rsquo;analyse du corpus que la cat&eacute;gorisation du d&eacute;terminant fran&ccedil;ais par les auteurs chinois pr&eacute;sente certains &eacute;carts par rapport &agrave; celle propos&eacute;e par les grammairiens des grammaires de r&eacute;f&eacute;rence. Ces &eacute;carts rel&egrave;vent d&rsquo;une formalit&eacute; de contextualisation que nous choisissons de d&eacute;nommer recat&eacute;gorisation de la LC, proc&eacute;d&eacute; qui consiste &agrave; recat&eacute;goriser les classes grammaticales ou faits de langue en fonction des repr&eacute;sentations cat&eacute;gorielles des apprenants forg&eacute;es &agrave; travers l&rsquo;apprentissage ant&eacute;rieur des langues.</p> <h3>3.1. L&rsquo;article fran&ccedil;ais pos&eacute; comme une partie du discours</h3> <p>La premi&egrave;re forme de la recat&eacute;gorisation de la LC est illustr&eacute;e par le cas de l&rsquo;article fran&ccedil;ais. Chez Riegel et al. (1999), la pr&eacute;sentation du groupe nominal se situe dans le chapitre VI de la deuxi&egrave;me partie de l&rsquo;ouvrage, Dans ce chapitre, un sous-chapitre appel&eacute; &laquo;&nbsp;les d&eacute;terminants&nbsp;&raquo; est divis&eacute; en cinq parties&nbsp;: formes et fonction, les d&eacute;terminants d&eacute;finis, les d&eacute;terminants ind&eacute;finis, autres d&eacute;terminants et l&rsquo;absence de d&eacute;terminant. La pr&eacute;sentation est bien hi&eacute;rarchis&eacute;e&nbsp;: on arrive &agrave; l&rsquo;article fran&ccedil;ais en passant par la partie du discours d&eacute;terminant et ses sous-classes les d&eacute;terminants d&eacute;finis et ind&eacute;finis. Mais force est de constater que l&rsquo;article n&rsquo;appara&icirc;t pas dans le sommaire. L&agrave;, nous nous demandons comment les apprenants d&eacute;butants qui n&rsquo;ont pas encore &eacute;tabli le syst&egrave;me grammatical du fran&ccedil;ais peuvent y retrouver facilement l&rsquo;article. Chez Grevisse &amp; Goosse (2008), le d&eacute;terminant s&rsquo;installe toujours en tant qu&rsquo;une des parties du discours dans le sommaire de l&rsquo;ouvrage. &Eacute;tant une sous-classe du d&eacute;terminant, l&rsquo;article se trouve en parall&egrave;le avec les d&eacute;terminants4 num&eacute;ral, d&eacute;monstratif, ind&eacute;fini, possessif, relatif, interrogatif et exclamatif.</p> <p>Or, l&rsquo;article fran&ccedil;ais devient une partie du discours &agrave; part enti&egrave;re dans certains ouvrages de grammaire &eacute;dit&eacute;s en Chine comme celui de Wu (1965). Notons que la notion de d&eacute;terminant n&rsquo;est pas encore apparue dans la grammaire fran&ccedil;aise &agrave; l&rsquo;&eacute;poque de la publication de cet ouvrage. L&rsquo;auteur propose onze parties du discours, dont l&rsquo;article fait partie, et s&eacute;pare l&rsquo;amalgame d&rsquo;adjectifs en &laquo;&nbsp;adjectif de nombre&nbsp;&raquo;, &laquo;&nbsp;d&eacute;terminatif&nbsp;&raquo; et &laquo;&nbsp;adjectif qualificatif&nbsp;&raquo; (Wu, 1965&nbsp;: 13-14). Voici sa justification de cette classification&nbsp;: &laquo;&nbsp;Il est difficile pour les apprenants chinois, surtout d&eacute;butants, d&rsquo;accepter le fait que certains adjectifs qui qualifient les noms peuvent &ecirc;tre utilis&eacute;s avec l&rsquo;article (par exemple, le drapeau rouge) alors que d&rsquo;autres mots appel&eacute;s &eacute;galement &laquo;&nbsp;adjectifs&nbsp;&raquo; ne le peuvent pas (par exemple, notre drapeau rouge)&nbsp;&raquo; (Wu, 1965&nbsp;: 13). Donc, le fait de ne pas regrouper l&rsquo;article et le d&eacute;terminatif sous le terme de d&eacute;terminant est li&eacute; d&rsquo;une part &agrave; la non apparition de cette notion &agrave; cette &eacute;poque-l&agrave;, et d&rsquo;autre part, &agrave; la prise en compte des difficult&eacute;s d&rsquo;apprentissage rencontr&eacute;es par les apprenants chinois.</p> <p>Parmi les ouvrages de grammaire fran&ccedil;aise publi&eacute;s apr&egrave;s l&rsquo;apparition du terme d&eacute;terminant en 1973,&nbsp;sept auteurs (Wu (1979), Xu (1982)&nbsp;; Gu (1989) ; Ruan et al. (1999)&nbsp;; Chen (2007)&nbsp;; Gao &amp; Li (2011)&nbsp;; Liu et al., (2017)) font preuve d&rsquo;un certain conservatisme en gardant toujours la tradition grammaticale, dans laquelle on distingue au sein des &laquo; parties du discours &raquo; le nom, l&rsquo;article et l&rsquo;adjectif.</p> <p>Mais la position de certains auteurs chinois semble moins claire : le terme d&eacute;terminant ne figure pas dans le sommaire, mais appara&icirc;t dans leurs descriptions grammaticales. Citons un extrait du sommaire de&nbsp;Yan (2012)&nbsp;:</p> <p style="text-align: center;"><em>Sch&eacute;ma 1. La cat&eacute;gorisation de l&rsquo;article fran&ccedil;ais chez Yan (2012&nbsp;: 1-2)</em></p> <p class="MsoCaption" style="margin-top: 8px; margin-bottom: 8px; text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_2710_6_微信图片_20221212230643.png" style="width: 500px; height: 112px;" /></p> <p>La classification illustr&eacute;e s&rsquo;inscrit &agrave; premi&egrave;re vue dans la grammaire traditionnelle. Pourtant, l&rsquo;auteur se sert du terme d&eacute;terminant&nbsp;dans sa pr&eacute;sentation de l&rsquo;article :</p> <p>[Extrait 1]&nbsp;Le nom est g&eacute;n&eacute;ralement pr&eacute;c&eacute;d&eacute; d&rsquo;un d&eacute;terminant dans la langue fran&ccedil;aise. Le d&eacute;terminant regroupe l&rsquo;article, l&rsquo;adjectif possessif, l&rsquo;adjectif d&eacute;monstratif, l&rsquo;adjectif interrogatif, l&rsquo;adjectif exclamatif, l&rsquo;adjectif ind&eacute;fini et l&rsquo;adjectif num&eacute;ral. (Yan, 2012&nbsp;: 30)</p> <p>Dans sa description, Yan englobe l&rsquo;article et les adjectifs non qualificatifs sous le chef de d&eacute;terminant. Cette mani&egrave;re de cat&eacute;gorisation, retrouv&eacute;e &eacute;galement chez Xu (1978), Zhang (2003), Zhang (2006), Wang et al. (2009), et Wang et al. (2011), rel&egrave;ve ainsi d&rsquo;une incoh&eacute;rence au niveau de la th&eacute;orie linguistique. Mais nous y voyons quand m&ecirc;me une tendance &agrave; placer l&rsquo;article sur le plan des parties du discours en fran&ccedil;ais, au moins dans le sommaire.</p> <p>La classification relevant de la grammaire traditionnelle pr&eacute;sente des inconv&eacute;nients&nbsp;: l&rsquo;adjectif qualificatif sert &agrave; qualifier un nom et peut &ecirc;tre attribut ou &ecirc;tre transform&eacute; en nom ou en adverbe, tandis que les autres adjectifs ont la fonction de d&eacute;terminer un nom. Ces deux types d&rsquo;adjectifs ne pr&eacute;sentent pas la m&ecirc;me caract&eacute;ristique grammaticale. Malgr&eacute; ces inconv&eacute;nients, presque la moiti&eacute; des auteurs chinois maintiennent ou ont tendance &agrave; maintenir cette classification traditionnelle probablement parce qu&rsquo;ils se basent sur les repr&eacute;sentations cat&eacute;gorielles des apprenants chinois sur l&rsquo;article anglais, class&eacute; de la m&ecirc;me mani&egrave;re dans les manuels d&rsquo;anglais. Aux yeux de ces apprenants, l&rsquo;article reste l&rsquo;une des parties du discours. Nous supposons que les auteurs ne veulent pas prendre le risque de d&eacute;truire ces repr&eacute;sentations pr&eacute;&eacute;tablies afin de rendre la description plus accessible &agrave; leurs lecteurs.</p> <h3>3.2. Le transfert des faits de langue chinois dans la grammaire du fran&ccedil;ais</h3> <p>Le second type de recat&eacute;gorisation de la LC consiste &agrave; introduire dans la grammaire fran&ccedil;aise une classe grammaticale typique de la grammaire chinoise. Il s&rsquo;agit d&rsquo;abord du cas de la classe grammaticale nomm&eacute;e fŭzh&ugrave;c&iacute; (mot de support), appel&eacute;e &eacute;galement xūc&iacute; (mot vide) (Lu, 2002). Ces deux termes sont utilis&eacute;s pour classer les parties du discours dans la grammaire chinoise. Sept auteurs chinois (Wu (1965&nbsp;: 61)&nbsp;; Chen &amp; Zhou (1983&nbsp;: 50)&nbsp;; Huang (1997)&nbsp;; Mao (2002)&nbsp;; Gui (2010&nbsp;: 70)&nbsp;; Zhou (2015&nbsp;: 276) et Xia et al. (2017)) les introduisent dans les descriptions du d&eacute;terminant ou de l&rsquo;article. Citons entre autres&nbsp;:</p> <p>[Extrait 2] &Eacute;tant une sorte de fŭzh&ugrave;c&iacute;, le d&eacute;terminant sert &agrave; d&eacute;terminer le nom. Son utilisation est g&eacute;n&eacute;ralement obligatoire dans un groupe nominal pour garantir la correction de la phrase au niveau s&eacute;mantique et au niveau grammatical. (Gui, 2010&nbsp;: 70)</p> <p>[Extrait 3] L&rsquo;article est une sorte de xūc&iacute;. (Xia et al., 2017&nbsp;: 57)</p> <p>Au lieu de d&eacute;crire d&rsquo;embl&eacute;e les propri&eacute;t&eacute;s morphologiques et syntaxiques du d&eacute;terminant, Gui emploie un terme familier aux lecteurs chinois. En chinois, fŭzh&ugrave; veut dire aider ou assister. Fŭzh&ugrave;c&iacute; peut &ecirc;tre interpr&eacute;t&eacute; comme un mot qui aide &agrave; bien former un syntagme nominal ou verbal. Son utilisation d&eacute;voile la fonction du d&eacute;terminant qui est de &laquo;&nbsp;supporter&nbsp;&raquo; un nom. Xia et al. se servent de leur part du mot vide pour expliquer l&rsquo;article fran&ccedil;ais, ce qui donne l&rsquo;impression que celui-ci poss&egrave;de un sens peu concret et une fonction grammaticale. Il r&eacute;sulte de ces deux descriptions que les auteurs construisent une classe sup&eacute;rieure au d&eacute;terminant - fŭzh&ugrave;c&iacute;&nbsp;ou xūc&iacute; - qui est in&eacute;dite au sein des grammaires de r&eacute;f&eacute;rence.</p> <p>Les auteurs locaux rapprochent ainsi la description du d&eacute;terminant fran&ccedil;ais des apprenants chinois. Ces derniers ont appris &agrave; subdiviser les faits de la L1 en mots vides et mots pleins et ensuite en parties du discours au cours de l&rsquo;apprentissage du chinois. Cette tradition de cat&eacute;gorisation est prolong&eacute;e dans la pr&eacute;sentation de l&rsquo;article anglais et dans celle du d&eacute;terminant fran&ccedil;ais.</p> <p>Le cas du li&agrave;ngc&iacute; (Cl.) est tout aussi repr&eacute;sentatif d&rsquo;un transfert classificatoire de la grammaire du chinois &agrave; la grammaire du fran&ccedil;ais. Il s&rsquo;agit d&rsquo;une partie du discours typique et tr&egrave;s courant en chinois, mais qui n&rsquo;a pas d&rsquo;&eacute;quivalent en fran&ccedil;ais. Son importance pousse malgr&eacute; tout Gui (2010) et Zhang (2010) &agrave; introduire cette &eacute;tiquette classificatoire chinoise dans le sommaire de leur ouvrage et m&ecirc;me &agrave; y consacrer une section&nbsp;:</p> <p>[Extrait 4] On emploie peu souvent le classificateur dans la langue fran&ccedil;aise. La notion de classificateur est g&eacute;n&eacute;ralement impliqu&eacute;e dans l&rsquo;article ind&eacute;fini ou les adjectifs num&eacute;raux cardinaux. [&hellip;] Mais [&hellip;] nous avons trouv&eacute; que le classificateur poss&egrave;de bien des sous-cat&eacute;gories et se caract&eacute;rise par l&rsquo;utilisation de la pr&eacute;position de apr&egrave;s le classificateur pour introduire des noms et par l&rsquo;omission d&rsquo;article devant les noms.&nbsp; (Zhang, 2010&nbsp;: 109)</p> <p>[Extrait 5]&nbsp;On utilise, dans la plupart des cas, le nom avec l&rsquo;adjectif num&eacute;ral sans intercaler de classificateur. [&hellip;] mais on emploie parfois le classificateur, [&hellip;] on en distingue trois types dans la langue fran&ccedil;aise,des noms qui expriment une unit&eacute; de mesure, des mots qui ont leur sens original mais qui sont utilis&eacute;s en tant que classificateur, des mots qui expriment une quantit&eacute; approximative. (Gui, 2010&nbsp;: 108)</p> <p>Le &laquo;&nbsp;classificateur fran&ccedil;ais&nbsp;&raquo; renvoie, selon Zhang, au nom utilis&eacute; dans les expressions de quantit&eacute; construites avec la pr&eacute;position de, par exemple, une tablette de, o&ugrave; tablette est un &laquo;&nbsp;classificateur&nbsp;&raquo;. Ces deux auteurs effectuent une comparaison implicite entre le chinois et le fran&ccedil;ais&nbsp;en soulignant que l&rsquo;utilisation du &laquo;&nbsp;classificateur&nbsp;fran&ccedil;ais &raquo; est moins fr&eacute;quente que celle du classificateur chinois. Ils emploient le terme li&agrave;ngc&iacute; comme s&rsquo;il faisait partie de la grammaire fran&ccedil;aise et le maintiennent en fonction de leurs besoins de descriptions. On reconna&icirc;t bien la proximit&eacute; entre les classificateurs chinois et les &laquo;&nbsp;classificateurs&nbsp;&raquo; fran&ccedil;ais, mais ils ne recouvrent pas les m&ecirc;mes faits langagiers : les premiers sont de deux types, nominal ou verbal, tandis que les derniers ne renvoient qu&rsquo;aux noms dans les expressions de quantit&eacute;.</p> <p>En plus du li&agrave;ngc&iacute;, la partie du discours sh&ugrave;c&iacute; ainsi que le fait de langue chinois sh&ugrave;li&agrave;ngc&iacute; (Q + Cl.) font &eacute;galement l&rsquo;objet d&rsquo;un transfert classificatoire. Quatre auteurs (Wu (1959)&nbsp;; Chen &amp; Zhou (1983)&nbsp;; Wang et al. (2009) et Xia et al. (2017)) d&eacute;nomment par abr&eacute;viation l&rsquo;adjectif num&eacute;ral sh&ugrave;c&iacute; au lieu de proposer une traduction litt&eacute;rale, soit sh&ugrave;z&igrave; x&iacute;ngr&oacute;ngc&iacute;. D&rsquo;ailleurs, Wu (1959) et Wang et al. (2009) le s&eacute;parent du d&eacute;terminant pour cr&eacute;er une nouvelle partie du discours et y consacrent m&ecirc;me un autre chapitre. Nous supposons que cela refl&egrave;te une influence de la classification de la grammaire chinoise dans laquelle on retrouve facilement la partie du discours sh&ugrave;c&iacute;.</p> <p>Zhang (2010), quant &agrave; lui, consid&egrave;re que le d&eacute;terminant n&rsquo;englobe que l&rsquo;article, le d&eacute;terminant d&eacute;monstratif, le d&eacute;terminant possessif, et le d&eacute;terminant ind&eacute;fini. On assiste &agrave; la cr&eacute;ation d&rsquo;une nouvelle partie du discours appel&eacute;e sh&ugrave;li&agrave;ngc&iacute; (&laquo;&nbsp;num&eacute;raux&nbsp;&raquo; selon le terme utilis&eacute; par l&rsquo;auteur) qui regroupe les mots et expressions relatifs aux nombres&nbsp;:</p> <p style="text-align: center;"><i><span lang="FR" style="font-size:12.0pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">S</span></span></span></i><em>ch&eacute;ma 2. La cat&eacute;gorisation des &laquo;&nbsp;num&eacute;raux&nbsp;&raquo; (Zhang, 2010&nbsp;: 1)</em></p> <p style="text-align: center;"><img src="https://www.numerev.com/img/ck_2710_6_微信图片_20221212230758.png" style="width: 500px; height: 159px;" /></p> <p>L&rsquo;auteur modifie la classification du d&eacute;terminant en incluant sh&ugrave;li&agrave;ngc&iacute; car il tient compte d&rsquo;une relation &eacute;troite entre le sh&ugrave;c&iacute; et le li&agrave;ngc&iacute;, qui fonctionnent souvent ensemble pour d&eacute;terminer les noms en chinois.</p> <p>Les faits de langues mentionn&eacute;s ci-dessus&nbsp;ne sont plus repr&eacute;sent&eacute;s &agrave; travers les cat&eacute;gories descriptives &eacute;labor&eacute;es tout au long de l&rsquo;histoire grammaticale de la LC, mais par le biais des cat&eacute;gories &agrave; la disposition des apprenants. Les nouvelles &laquo;&nbsp;parties du discours&nbsp;&raquo; telles que &laquo;&nbsp;fŭzh&ugrave;c&iacute;&nbsp;&raquo;, &laquo; sh&ugrave;li&agrave;ngc&iacute; &raquo;, &laquo;&nbsp;sh&ugrave;c&iacute;&nbsp;&raquo; &laquo;&nbsp;li&agrave;ngc&iacute;&nbsp;&raquo; sont apparues de mani&egrave;re un peu &laquo;&nbsp;exotique&nbsp;&raquo; dans les grammaires destin&eacute;es aux apprenants chinois. Ceux-ci per&ccedil;oivent les r&eacute;alit&eacute;s linguistiques d&rsquo;une nouvelle langue &agrave; travers les repr&eacute;sentations cat&eacute;gorielles pr&eacute;construites en L1 et en L2. Leur riche pass&eacute; &eacute;chappe pourtant aux descriptions grammaticales de r&eacute;f&eacute;rence, mais est pris en compte par les enseignants locaux, qui partagent des repr&eacute;sentations et termes m&eacute;talinguistiques avec les apprenants. Les auteurs chinois mettent ainsi en &eacute;vidence une cat&eacute;gorisation du d&eacute;terminant fran&ccedil;ais qui n&rsquo;est pas habituellement propos&eacute;e par les auteurs francophones.</p> <p class="TDFLE-titre2" style="text-indent:0cm">&nbsp;</p> <p>Cette recherche a montr&eacute; que les auteurs chinois, conscients de l&rsquo;incompatibilit&eacute; des cat&eacute;gorisations des d&eacute;terminants fran&ccedil;ais avec celles que construisent les apprenants au cours de leur apprentissage, adaptent la description de r&eacute;f&eacute;rence &agrave; la culture m&eacute;talinguistique de leur public. Ces adaptations consistent &agrave; recat&eacute;goriser cette classe grammaticale en fonction des repr&eacute;sentations cat&eacute;gorielles pr&eacute;construites des apprenants. D&rsquo;une part, la moiti&eacute; des auteurs chinois consid&egrave;rent ou ont tendance &agrave; consid&eacute;rer l&rsquo;article fran&ccedil;ais comme une partie du discours en soi. Le fait d&rsquo;&laquo;&nbsp;isoler&nbsp;&raquo; l&rsquo;article fran&ccedil;ais est li&eacute; soit aux difficult&eacute;s d&rsquo;apprentissage, soit au choix du fondement th&eacute;orique linguistique, soit &agrave; la volont&eacute; de prolonger le mod&egrave;le m&eacute;talinguistique en anglais acquis par les &eacute;l&egrave;ves chinois. D&rsquo;autre part, nous avons rep&eacute;r&eacute; des descriptions o&ugrave; les classes grammaticales en L1 sont introduites en vue d&rsquo;une meilleure appropriation de la LC. Il s&rsquo;agit de l&rsquo;introduction de fŭzh&ugrave;c&iacute; (mot de support), xūc&iacute; (mot vide), li&agrave;ngc&iacute; (Cl.), sh&ugrave;c&iacute; (Q), sh&ugrave;li&agrave;ngc&iacute; (Q + Cl.).</p> <p>Ces formes de contextualisations &laquo;&nbsp;ne sauraient garantir m&eacute;caniquement un &laquo;&nbsp;meilleur&nbsp;&raquo; apprentissage ni constituer une rem&eacute;diation efficace aux difficult&eacute;s d&rsquo;appropriation&nbsp;&raquo; (Beacco et al., 2014&nbsp;: 7), mais r&eacute;pondent &agrave; un souci de rendre le discours grammatical plus accessible au public local. Elles permettent aux apprenants de partir du connu pour s&rsquo;approprier l&rsquo;inconnu.</p> <p>Nous esp&eacute;rons, par la pr&eacute;sente recherche portant sur la contextualisation, avoir donn&eacute; des &eacute;l&eacute;ments pour orienter les futurs enseignants vers des approches didactiques &eacute;troitement &eacute;labor&eacute;es en fonction des sp&eacute;cificit&eacute;s linguistiques, &eacute;ducatives et culturelles du public, non plus exclusivement con&ccedil;ues dans une perspective universaliste de l&rsquo;enseignement du fran&ccedil;ais.</p> <p>&nbsp;</p> <h2 class="Texte" style="text-align: justify; margin-top: 4px; margin-bottom: 4px;">Bibliographie<span style="font-size:12pt"><span style="line-height:150%"><span style="font-family:等线"><b><span lang="FR" style="font-size:14.0pt"><span arial="" style="font-family:"><span style="color:black">&nbsp;</span></span></span></b></span></span></span></h2> <p>&nbsp;</p> <p>Beacco, J.-C. (1997). Grammaires excentriques et cultures m&eacute;talinguistiques. <em>Linx</em>, 36(1), 131-137.</p> <p>Beacco, J.-C., Kalmbach, J.-M. et Lopez, J.S. (2014). Les contextualisations de la description du fran&ccedil;ais dans les grammaires &eacute;trang&egrave;res : pr&eacute;sentation. <em>Langue fran&ccedil;aise</em>, 181(1), 3-17.</p> <p>Besse, H. 1980. M&eacute;talangages et apprentissage d&rsquo;une langue &eacute;trang&egrave;re. <em>Langue fran&ccedil;aise</em>, 47, 115-128.</p> <p>Fouillet, R., Stratilaki-Klein, S. et&nbsp;Weber, C. (2015). Questionner les grammaires du fran&ccedil;ais langue &eacute;trang&egrave;re produites en contexte allophone. Fran&ccedil;ais dans le monde - <em>Recherches et applications</em>, 57, 38-46.</p> <p>GRAC. 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Le classificateur est souvent pr&eacute;c&eacute;d&eacute; d&rsquo;un quantificateur et ils fonctionnent ensemble pour d&eacute;terminer un nom.</small></p> <p><small>3. Il s&rsquo;agit des ouvrages de grammaire qui sont &eacute;labor&eacute;s par des auteurs francophones et dont les descriptions grammaticales sont traduites par des auteurs chinois.</small></p> <p><small>4. Grevisse et Goosse emploient le terme d&eacute;terminant &agrave; la place du terme adjectif.</small></p> <div>&nbsp; <div id="edn1"> <p class="MsoEndnoteText" style="text-align:justify; text-indent:-16.95pt; margin-left:23px">&nbsp;</p> </div> </div>