<p>Cet article pose quelques bases théoriques (et d'une certaine façon pratiques) non exhaustives, de notre réflexion globale d'un point de vue critique (de la critique car « toute critique est critiquable ») en construction et par définition, non aboutie. Malgré sa nécessité et sa richesse dans les frontières mouvantes du langage et de la langue, la grammaire demeure l’objet d’une conception bien souvent étriquée et limitée à l’écrit dans l’imaginaire commun. La prépondérance d’un modèle mondialisé de la communication et de la consommation donne l’impression d’une amplification d’un affaiblissement général de la langue où prédomine un utilitarisme standardisé élevé au rang de vertu. S’il ne s’agit pas ici de s’indigner face à une « vague communicationnelle » ou de défendre « le génie de la langue », loin de là, nous pensons que l’enjeu réside principalement dans la représentation de la grammaire in principio avec ses implications didactiques, symptômes d’une hypertrophie de la sémiotique héritée des théories canoniques du langage. Perçue comme inaccessible voire élitiste, le rejet de la grammaire correspond également à la survivance d’une série de dualismes (signifiant/signifié, langue/parole, oral/écrit, vers/prose, classe/vie, théorie/pratique, etc…) assignant la grammaire à une conceptualisation idéale d’assemblage de mots au détriment d’un agencement concret du discours, force est de constater cette tendance générale en FLE. Rappelant l’importance de la grammaire dans l’acquisition du langage et son émergence avec l’oral dès les premières années, nous proposons de relier plusieurs éléments du continu corps-langage oubliés en didactique : proprioception, prosodie, poétique, philosophie, littérature et sémantique pour envisager la grammaire parlée comme porte d’entrée de la parole. La mise en valeur légitime de la multimodalité de l’apprentissage, par la variété des voies sensorielles ou du numérique, semble encore considérer la langue comme allant de soi, séparée en composantes consensuelles isolées et observables par les signes. C’est pourquoi nous abordons le lien entre prosodie et syntaxe dans et par le rythme en reconnaissant l'idiosyncrasie de l'apprenant. Nous envisageons ainsi une conception poétique du langage inspirée par la critique meschonnicienne à travers une conversion philosophique héritée de l’antiquité pour renouer avec la grammaire pédagogique de l’<em>enkuklios paideia</em>. Pour cela, nous invitons à inventer une didactique sémantique du FLE et ne pas limiter notre vision à la vue. </p>