<h2>Introduction</h2> <p>Si certains intellectuels de renom vont jusqu&rsquo;&agrave; pr&eacute;dire la disparition de la Po&eacute;sie (Yves Bonnefoy), du Roman (Milan Kundera) voire de la Litt&eacute;rature (Tzvetan Todorov), ces &eacute;minents haruspices contemporains qui analysent la fin des Lettres de noblesse ont en commun d&rsquo;&eacute;voquer le r&eacute;tr&eacute;cissement du monde et de l&rsquo;individu. Le corps, omnipr&eacute;sent et fascinant, &eacute;galement soumis au risque d&rsquo;annihilation &agrave; cause de&nbsp; &laquo; l&rsquo;utopie transhumaniste &raquo; (Le Breton, 2015), symbolise le d&eacute;tachement paroxystique de l&rsquo;Homme &agrave; sa propre mati&egrave;re. Ces nouveaux d&eacute;doublements et ces &eacute;ternels d&eacute;bats, jamais us&eacute;s, dont la subsistance et les morts annonc&eacute;es participent d&rsquo;une paling&eacute;n&eacute;sie redoutable, touchent aux fondements de notre anthropologie. Par ricochet, la grammaire semble &eacute;galement travers&eacute;e par cette alt&eacute;ration provoqu&eacute;e par les incitations, selon les cas, &agrave; la simplification ou &agrave; la dissolution. Victime probable d&#39;anesth&eacute;sie g&eacute;n&eacute;rale ou patiente en soin palliatif, la dichotomie opposant d&eacute;litement ou r&eacute;investissement de la grammaire ne semble pas tant se poser du c&ocirc;t&eacute; de son utilit&eacute; que, finalement, de sa conception. Apr&egrave;s avoir subi un fort d&eacute;clin dans l&rsquo;enseignement en Angleterre depuis des d&eacute;cennies en langue maternelle malgr&eacute; un regain d&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t inspir&eacute; par la didactique en langue &eacute;trang&egrave;re (Kasazian, 2016), ce signe annonciateur de la r&eacute;trogradation de la grammaire outre-manche permet d&rsquo;envisager, a priori, la v&eacute;racit&eacute; de la dystopie orwellienne ou au contraire, la r&eacute;g&eacute;n&eacute;ration qu&rsquo;offre l&rsquo;enseignement-apprentissage des langues &eacute;trang&egrave;res. Cependant, &agrave; l&rsquo;heure o&ugrave; les promesses d&rsquo;apprendre rapidement ou &agrave; son rythme en autonomie compl&egrave;te ou partielle gr&acirc;ce aux sciences cognitives, aux technologies et aux &laquo; nouvelles &raquo;&nbsp;p&eacute;dagogies font flor&egrave;s dans un monde satur&eacute; d&rsquo;informations, il peut &ecirc;tre pertinent et souhaitable, avant toute chose, d&rsquo;interroger notre rapport aux langues et &agrave; notre corps pour ensuite f&eacute;conder ou accompagner les progr&egrave;s techniques plut&ocirc;t que l&rsquo;inverse. Les avanc&eacute;es technologiques et les potentialit&eacute;s p&eacute;dagogiques du m&eacute;tavers (&laquo; apr&egrave;s l&rsquo;univers &raquo;), illustrent le brouillon du corps contemporain (Le Breton, 2005) face &agrave; la &laquo; r&eacute;alit&eacute; virtuelle &raquo;&nbsp;(oxymore invent&eacute; en 1938 par Antonin Artaud pour d&eacute;signer le th&eacute;&acirc;tre&hellip;) num&eacute;rique. Le m&eacute;tavers n&rsquo;est-il pas la continuit&eacute; persistante d&rsquo;une conception m&eacute;taphysique ancienne du corps ? Le corps biologique s&rsquo;oppose-t-il &agrave; la personne sociale ? Dans ce nouveau laboratoire qu&rsquo;offre la &laquo; r&eacute;alit&eacute; augment&eacute;e &raquo;&nbsp;du corps, divergente de l&rsquo;ogrerie de Gargantua, et un contexte r&eacute;ducteur de la grammaire par son image surann&eacute;e mais in&eacute;puisable en didactique des langues premi&egrave;res et vivantes, comment envisager de relier grammaire et corporalit&eacute; quand l&rsquo;une et l&rsquo;autre se destinent &agrave; &ecirc;tre diminu&eacute;es ?&nbsp;</p> <h2>1.L&#39;acquisition du langage et de la grammaire (du vivant &agrave; l&#39;humain)&nbsp;</h2> <p>Un lieu commun admet que la grammaire s&rsquo;apprend &agrave; l&rsquo;&eacute;cole et la parole &agrave; l&rsquo;ext&eacute;rieur, dans la &laquo; vraie vie &raquo;. D&rsquo;o&ugrave; cette d&eacute;fiance vis-&agrave;-vis de la grammaire ressentie comme impos&eacute;e par l&rsquo;&eacute;cole, et la classant ainsi comme une composante purement scolaire et st&eacute;r&eacute;otyp&eacute;e. Pourtant, si l&rsquo;&eacute;cole va bien normer et structurer la grammaire &agrave; l&rsquo;aide de prescriptions, elle fait n&eacute;anmoins d&eacute;j&agrave; partie des structures linguistiques que va int&eacute;grer l&rsquo;enfant d&egrave;s son plus jeune &acirc;ge gr&acirc;ce &agrave; la syst&eacute;matisation des combinaisons de mots. Durant l&#39;ontogen&egrave;se qui va voir &eacute;voluer le f&oelig;tus pour passer du vivant &agrave; l&rsquo;humain, la parole va se complexifier &agrave; la diff&eacute;rence des animaux dont nos plus familiers, les chimpanz&eacute;s, sont capables de m&eacute;moriser des mots (parfois plus de cent) mais dans l&rsquo;incapacit&eacute; de juxtaposer plus de deux mots suite &agrave; un entra&icirc;nement tr&egrave;s exigeant tandis que les b&eacute;b&eacute;s y parviennent avant d&#39;atteindre l&rsquo;&acirc;ge de 3 ans. Cette capacit&eacute; de cr&eacute;er et g&eacute;n&eacute;raliser des repr&eacute;sentations diachroniques et abstraites d&eacute;tach&eacute;es du pur besoin imm&eacute;diat gr&acirc;ce &agrave; des signes (&eacute;tymologiquement la lettre cr&eacute;atrice de tout et le miracle) est &agrave; l&rsquo;origine m&ecirc;me de notre condition humaine. Sans aucune le&ccedil;on particuli&egrave;re, le nouveau-n&eacute; va acqu&eacute;rir le langage plus ou moins vite en fonction de son entourage dont le d&eacute;veloppement va imbriquer irr&eacute;guli&egrave;rement dans cet ordre : la phonologie, le lexique et la syntaxe. Si la gestation est longue chez l&rsquo;esp&egrave;ce humaine par rapport aux autres mammif&egrave;res, son d&eacute;veloppement cognitif et langagier se d&eacute;veloppe rapidement malgr&eacute; des variabilit&eacute;s contingentes qui n&rsquo;affectent en rien son acquisition d&eacute;corr&eacute;l&eacute;e de l&rsquo;intelligence. Toutes les &eacute;tapes de l&rsquo;acquisition, relatives et moyennes, proviennent d&rsquo;un instinct du langage qui nous relie &agrave; notre environnement et notre phylogen&egrave;se. La langue per&ccedil;ue dans le ventre de la m&egrave;re gr&acirc;ce au liquide amniotique va participer au d&eacute;veloppement langagier et psychique du sujet. L&rsquo;apparition des premiers mots et l&#39;&eacute;mergence de la reconnaissance des bases grammaticales d&eacute;butent vers 8 mois pour augmenter rapidement gr&acirc;ce &agrave; une perception universelle propre aux b&eacute;b&eacute;s qui va se sp&eacute;cialiser et se d&eacute;grader avec le temps et permettre des combinaisons peu avant l&rsquo;&acirc;ge de 3 ans. Le babillage laisse place &agrave; la r&eacute;p&eacute;tition de noms et objets familiers pour se complexifier avec l&rsquo;ajout de mots grammaticaux, la diversification de temps et l&rsquo;emploi de propositions subordonn&eacute;es. Ces progr&egrave;s se font toujours en concordance avec des actes moteurs pr&eacute;cis : mouvements, rires, d&eacute;placements, marche, pointage du doigt&hellip; Malgr&eacute; des variations selon les langues, les enfants ma&icirc;trisent normalement vers 4 ans les structures morphologiques et syntaxiques de base (Bassano, 2008). Parall&egrave;lement au langage, le d&eacute;veloppement global de l&rsquo;enfant (Bouchard, 2019) mettra en jeu conjointement la motricit&eacute;, la cognition, l&rsquo;affect, la sociabilit&eacute; pour se d&eacute;velopper r&eacute;ciproquement (Joly, 2010). Cette interd&eacute;pendance tr&egrave;s nette durant l&rsquo;enfance tend &agrave; &ecirc;tre oubli&eacute;e par la suite au profit d&rsquo;une vision dualiste corps-esprit que l&rsquo;&eacute;cole va valoriser et accentuer. La grammaire au d&eacute;part pratique en lien avec l&rsquo;&eacute;volution de sa physiologie (respiration, maturation et conduit vocal notamment), ses capacit&eacute;s motrices et ses interactions de toute nature (regards, gestes, postures, expressions faciales&hellip;), devient une mati&egrave;re reposant sur le m&eacute;talangage mais d&eacute;connect&eacute;e de son ancrage corpo-rythmique. Pourtant, selon une &eacute;tude (Gordon, Shivers, et al, 2015) aupr&egrave;s d&rsquo;enfants de 6 ans, la perception du rythme, la conscience phonologique, les comp&eacute;tences morpho-syntaxiques et les capacit&eacute;s cognitives non-verbales sont li&eacute;es.&nbsp;</p> <h2>2.Rythme et langage, po&eacute;sie de l&rsquo;apprenant</h2> <p>Rel&eacute;gu&eacute; aux oubliettes, le corps grammairien de l&rsquo;apprenant en fran&ccedil;ais langue &eacute;trang&egrave;re (d&eacute;sormais FLE), unique et reli&eacute; &agrave; la structure m&ecirc;me de la langue, pourrait permettre d&rsquo;esquisser une refonte de l&rsquo;enseignement de la grammaire en FLE par le rythme. Cette puissance du rythme qui structure nos vies et &laquo; l&rsquo;architecture sonore &raquo; de notre langue, implique d&rsquo;en changer dans l&rsquo;apprentissage d&rsquo;une langue &eacute;trang&egrave;re et de &laquo; subir une sorte de &lsquo;recyclage&rsquo; rythmique et intonatif &raquo; (Meschonnic, 1982). Sommes-nous condamn&eacute;s &agrave; &laquo; subir &raquo; ce nouveau rythme ou comme dirait Georges Bataille : &laquo; le rythme de l&rsquo;autre, c&rsquo;est l&rsquo;enfer &raquo; (Bataille, 1992 [1937] : 24) ? Seul ou en interaction, notre corps d&eacute;ploie et module des rythmes vari&eacute;s qui se r&eacute;-accordent en permanence. Il nous faudra donc aborder la question du rythme et du corps &agrave; partir de Meschonnic car parler est en soi un rapport physique au centre de sa conception du langage :&nbsp;</p> <blockquote> <p>&nbsp;&laquo; Je d&eacute;finis le rythme dans le langage comme l&rsquo;organisation des marques par lesquelles les signifiants, linguistiques et extra-linguistiques (dans le cas de la communication orale surtout) produisent une s&eacute;mantique sp&eacute;cifique, distincte du sens lexical, et que j&rsquo;appelle la signifiance : c&rsquo;est-&agrave;-dire les valeurs propres &agrave; un discours et &agrave; un seul. Ces marques peuvent se situer &agrave; tous les &ldquo;niveaux&rdquo; du langage : accentuelles, prosodiques, lexicales, syntaxiques. &raquo; (Meschonnic, 1982 : 216-217)</p> </blockquote> <p>A l&rsquo;inverse de la psychanalyse qui tend &agrave; int&eacute;grer du langage au corps, nous poserons un rapport po&eacute;tique &agrave; la langue qui fait toujours entrer du corps dans le langage. A cet &eacute;gard, la corporalisation plus &eacute;vidente de l&rsquo;oral est &agrave; rapprocher de celle de la litt&eacute;rature gr&acirc;ce &agrave; la prosodie et particuli&egrave;rement le rythme, ce que Meschonnic appelle &laquo; le continu&nbsp;&raquo;&nbsp;afin de rompre avec la repr&eacute;sentation platonicienne du langage qui s&eacute;pare les mots et les choses. Nous chercherons &agrave; inventer une d&eacute;marche sensorimotrique (assemblage de sensorim&eacute;trie et sensorimoteur) qui pose la conversion po&eacute;tique du corps de l&rsquo;apprenant comme approche originale apte &agrave; cr&eacute;er de nouveaux sentiers dans l&rsquo;enseignement-apprentissage du FLE. <em>Ad augusta per angusta</em>, apprendre une langue &eacute;trang&egrave;re pour le plaisir, le travail ou l&rsquo;&eacute;cole, rel&egrave;ve toujours d&rsquo;op&eacute;rations mentales complexes, non-lin&eacute;aires, chaotiques, dynamiques ; en fin de compte, alchimiques, o&ugrave; science et art s&#39;entrem&ecirc;lent. Penser le langage &agrave; partir du rythme, revient &agrave; lancer une nouvelle &eacute;nigme au linguiste et un nouveau d&eacute;fi &agrave; l&rsquo;enseignant qui d&eacute;sire participer &agrave; l&rsquo;&eacute;dification de cette &eacute;piphanie didactique afin de passer d&rsquo;une image de la langue en deux dimensions &agrave; une parole charnelle en trois dimensions. Reprenant les remarques du formaliste russe Ossip Brik, Robert Georgin consid&egrave;re :</p> <blockquote> <p>&laquo; Il existe une rythmique propre &agrave; chaque langue, qui fait partie de la structure de la langue et &agrave; laquelle aucun locuteur parlant cette langue, ne peut &eacute;chapper. La po&eacute;sie serait seulement un suremploi de cette rythmique, elle en rajouterait par rapport &agrave; ce qui est n&eacute;cessaire.&nbsp;&raquo;&nbsp;(Robert Georgin, 1977)</p> </blockquote> <p>Allant jusqu&rsquo;&agrave; pointer une correspondance &laquo; naturelle&nbsp;&raquo;&nbsp;inconsciente entre le rythme de la langue fran&ccedil;aise et celui de l&rsquo;alexandrin (expliquant son succ&egrave;s semble-t-il), Georgin affirme que l&rsquo;objectif de la po&eacute;sie classique vise &agrave; faire co&iuml;ncider la syntaxe &agrave; travers le temps fort avec la fin d&rsquo;un groupe rythmique qui forme un ensemble s&eacute;mantique coh&eacute;rent. Malgr&eacute; un abandon relatif &agrave; partir du romantisme, il semble que cette tendance se poursuive dans les vers libres. Cette conception de la po&eacute;sie peut &ecirc;tre mise en parall&egrave;le avec celle que nous avons de l&rsquo;apprenant cherchant &agrave; s&rsquo;approprier la langue en &laquo; suremployant&nbsp;&raquo;&nbsp;le rythme. La n&eacute;gativit&eacute; syst&eacute;mique du langage confronte ici deux syst&egrave;mes rythmiques dont les diff&eacute;rences et les oppositions am&egrave;nent l&rsquo;apprenant &agrave; inventer et donc &agrave; composer (avec) un rythme impos&eacute; par une langue &eacute;trang&egrave;re en venant perturber la musicalit&eacute; coutumi&egrave;re. En fran&ccedil;ais, la versification de la langue, en quelque sorte, renseigne sur la structure grammaticale &agrave; acqu&eacute;rir. La prose d&eacute;finie dans le Bourgeois gentilhomme ne serait pas exempte de sorte que &laquo; tout ce qui n&rsquo;est pas prose, est vers ; et tout ce qui n&rsquo;est point vers, est prose&nbsp;&raquo;&nbsp;repr&eacute;sente une fronti&egrave;re dialectique superficielle et biens&eacute;ante. D&rsquo;apr&egrave;s notre pr&eacute;suppos&eacute;, la cr&eacute;ation po&eacute;tique du corps au langage et du rythme &agrave; la langue, aussi bien en prose qu&rsquo;en vers, se retrouve au centre de l&rsquo;apprentissage en langue &eacute;trang&egrave;re. Meschonnic pr&eacute;cise :&nbsp;</p> <blockquote> <p>&laquo; Il me semble que la relation ne peut pas s&#39;expliquer par les mots, en reliant sapor &agrave; sapientia, et qu&#39;elle suppose une th&eacute;orie du corps dans le langage, donc du rythme &raquo; (Meschonnic, 1982 : 84).&nbsp;&nbsp;</p> </blockquote> <p>Ainsi, le corps &agrave; travers le rythme est per&ccedil;u comme &eacute;l&eacute;ment inh&eacute;rent &agrave; la linguistique de l&rsquo;&eacute;nonciation comme le propose Benveniste avant lui. C&rsquo;est pourquoi dans sa Critique du rythme, Meschonnic le place au centre de la production de sens :&nbsp;</p> <blockquote> <p>&laquo; Parce que le rythme n&rsquo;est pas seulement un secteur du langage parmi d&rsquo;autres, un niveau linguistique, comme le lexique ou la syntaxe, mais que, plus puissamment, il peut &ecirc;tre pris comme la structuration d&rsquo;ensemble de tous les signifiants, il est l&rsquo;inscription du sujet dans l&rsquo;ensemble de l&rsquo;&oelig;uvre comme syst&egrave;me de valeurs de langage, &agrave; travers le sens &raquo;&nbsp;(Meschonnic, 1982 : 363).&nbsp;</p> </blockquote> <h2>3.Relier prosodie et syntaxe&nbsp;</h2> <p>A la diff&eacute;rence du sens commun, le paysage po&eacute;tique emp&ecirc;che la traduction transparente puisque la valeur du sens est irr&eacute;m&eacute;diable. L&rsquo;effet po&eacute;tique surpasse l&rsquo;effet du sens d&rsquo;un message. L&rsquo;organisation complexe de la po&eacute;sie &eacute;chappe aux lois de la communication au m&ecirc;me titre que son analyse minutieuse ne permet d&rsquo;aucune fa&ccedil;on la capacit&eacute; &agrave; produire un po&egrave;me, de m&ecirc;me pour la grammaire. Nous posons qu&rsquo;il existe une analogie avec l&rsquo;apprenant en langue et que l&rsquo;effet po&eacute;tique nous semble correspondre &agrave; l&rsquo;&eacute;motion que peut produire la simplicit&eacute; du langage dans sa pratique la plus &eacute;l&eacute;mentaire lorsqu&rsquo;on se charge de se l&rsquo;approprier en la r&eacute;-inventant en permanence. Nous l&#39;oublions trop souvent, les langues sont des organismes vivants dont la vitalit&eacute; d&eacute;pend des locuteurs. Les &laquo; langues mortes &raquo;&nbsp;ne sont plus parl&eacute;es ou seulement &eacute;crites. D&egrave;s lors, seules les repr&eacute;sentations visuelles sont possibles. Telle les notes de musique, les po&egrave;mes ou les pi&egrave;ces de th&eacute;&acirc;tre, l&rsquo;&eacute;crit s&#39;essouffle lorsqu&rsquo;il n&rsquo;entretient pas une relation &eacute;troite avec l&rsquo;oral. Le gueuloir de Flaubert rappelle ce lien oral-&eacute;crit qui traverse la litt&eacute;rature depuis l&rsquo;&eacute;pop&eacute;e de Gilgamesh et la naissance de l&rsquo;&eacute;criture. Les po&egrave;mes sont au d&eacute;part destin&eacute;s &agrave; raconter des l&eacute;gendes aux nouvelles g&eacute;n&eacute;rations, Les Mille et Une Nuits des contes moraux pour les nobles, les textes religieux pour &ecirc;tre r&eacute;cit&eacute;s par les croyants, L&rsquo;Ing&eacute;nieux Hidalgo Don Quichotte de la Manche des nouvelles qui s&#39;encha&icirc;nent pour des gens se r&eacute;unissant aux moissons et ne sachant pas lire. La forme &eacute;crite ne se s&eacute;pare jamais de la forme orale bien que la litt&eacute;rature soit pr&eacute;sent&eacute;e en r&eacute;gime autarcique. Les Essais dict&eacute;s par Montaigne t&eacute;moignent de l&rsquo;importance de la voix haute qui n&rsquo;a jamais si bien port&eacute;e son nom, et Paul Val&eacute;ry de tempester contre l&rsquo;enseignement des Fables et des classiques :&nbsp;</p> <blockquote> <p>&laquo; La diction scolaire telle qu&rsquo;elle est pratiqu&eacute;e est tout bonnement criminelle. Allez donc entendre du La Fontaine, du Racine, r&eacute;cit&eacute; dans une &eacute;cole quelconque ! La consigne est litt&eacute;ralement d&rsquo;&acirc;nonner, et, d&rsquo;ailleurs, jamais la moindre id&eacute;e du rythme, des assonances et des allit&eacute;rations qui constituent la substance sonore de la po&eacute;sie n&rsquo;est donn&eacute;e et d&eacute;montr&eacute;e aux enfants &raquo; (Val&eacute;ry, 1935)</p> </blockquote> <p>Ainsi, apprendre la grammaire orale ou &eacute;crite d&rsquo;une langue, revient &agrave; s&rsquo;approprier le rythme de la grammaire. La confusion entre &laquo; avoir un accent &raquo;&nbsp;(notion relative qui rend compte d&rsquo;un contraste dans un espace localis&eacute;) et &laquo; accentuer &raquo;&nbsp;(caract&eacute;ristique physique structurelle), emp&ecirc;che d&rsquo;aborder &agrave; l&rsquo;oral ce qui est commun &agrave; la langue fran&ccedil;aise dans toute sa diversit&eacute; et les aspects prosodiques pertinents pour favoriser l&rsquo;apprentissage de la syntaxe sans renier l&rsquo;originalit&eacute; de chacun. L&rsquo;&eacute;nonciation du fran&ccedil;ais, quelle que soit la situation g&eacute;ographique ou linguistique, con&ccedil;oit une structure orale pr&eacute;cise (diff&eacute;rente de l&rsquo;&eacute;crit oralis&eacute;) et unique parmi les autres langues europ&eacute;ennes, notamment par l&rsquo;absence d&rsquo;accent lexical. Le caract&egrave;re authentique de la grammaire de l&rsquo;oral, naturel pour ceux dont c&rsquo;est la langue maternelle, th&eacute;orique voire &eacute;sot&eacute;rique pour l&rsquo;apprenant en FLE, admet que les sons et les mots phon&eacute;tiques poss&egrave;dent bien un ordre et un rythme coh&eacute;rent, l&rsquo;accent fixe. M&ecirc;me la gestualit&eacute; s&rsquo;accorde avec le syst&egrave;me rythmique malgr&eacute; des variations, c&rsquo;est le cas des gestes synchroniques avec l&rsquo;accentuation sur la derni&egrave;re syllabe du groupe rythmique (Llorca, 1981). Se pose alors &agrave; l&rsquo;enseignant un paradoxe didactique, comment relier un enseignement g&eacute;n&eacute;ral &agrave; des cas particuliers &eacute;tant donn&eacute; que l&rsquo;oral (le fran&ccedil;ais parl&eacute; pr&eacute;cis&eacute;ment) est toujours singulier ? Comme le rappelle Fran&ccedil;ois Wioland :&nbsp;</p> <blockquote> <p>&laquo; L&rsquo;oral et l&rsquo;&eacute;crit sont deux syst&egrave;mes distincts de structuration de la langue&nbsp;&raquo;&nbsp;(Wioland, 2012 : 44).&nbsp;</p> </blockquote> <p>Distincts mais pas oppos&eacute;s, si l&rsquo;&eacute;crit souffre de plus en plus d&rsquo;un manque de valorisation de la grammaire, l&rsquo;oral n&rsquo;en est que plus d&eacute;ficitaire alors que l&rsquo;un et l&rsquo;autre pourraient se renforcer mutuellement au lieu de s&rsquo;exclure. En effet, le d&eacute;s&eacute;quilibre et le d&eacute;centrage n&eacute;cessaire &agrave; l&rsquo;appropriation du fran&ccedil;ais n&rsquo;est pas seulement d&rsquo;ordre lexical ou grammatical mais intrins&egrave;quement prosodique. Dans le cas sp&eacute;cifique du fran&ccedil;ais, il existe une relation entre la structure rythmique et la structure syntaxico-s&eacute;mantique (Billi&egrave;res, 2014) alors m&ecirc;me que les correspondances asym&eacute;triques entre lettres (les consonnes finales amu&iuml;es par exemple) et phon&egrave;mes provoquent de nombreuses frustrations chez certains apprenants &agrave; cause de l&rsquo;orthographe &eacute;tymologique pr&eacute;f&eacute;r&eacute; &agrave; l&rsquo;orthographe phon&eacute;tique. L&agrave; encore, les repr&eacute;sentations visuelles pr&eacute;dominent au d&eacute;triment d&rsquo;autres sens. Cette concordance des composantes de la langue contraint et ouvre la porte &agrave; une accordance rythmique &agrave; effectuer de la part de l&rsquo;apprenant pour s&rsquo;en saisir malgr&eacute; toutes les exceptions fran&ccedil;aises, commun&eacute;ment admises pour entraver la route de l&rsquo;apprentissage. Au m&ecirc;me titre que la valeur des signes, s&#39;approprier le rythme est le premier pas pour s&rsquo;approprier la langue en fonction des idiosyncrasies et des t&acirc;tonnements au niveau spatio-temporel de chacun. Cette incorporation du langage int&egrave;gre une incorporation du rythme de la grammaire. Ce &laquo; rapport d&rsquo;ad&eacute;quation &raquo;&nbsp;du langage et de la langue avec un contexte &eacute;cologique pr&eacute;cis oblige l&rsquo;apprenant, et donc l&rsquo;enseignant, &agrave; se saisir corporellement du lien entre prosodie et syntaxe.</p> <h2>4.Conversion et mesure de la position du corps&nbsp;</h2> <p>Pour acc&eacute;der &agrave; la sagesse, les premiers philosophes originaires d&rsquo;Inde (Pol-Droit, 2004), appel&eacute;s gymnosophistes (&laquo; sages nus &raquo;), d&eacute;ambulaient tels quels et ont inspir&eacute; par la suite les philosophes grecs dont les p&eacute;ripat&eacute;ticiens (&laquo; qui se prom&egrave;nent en discutant &raquo;) d&rsquo;Aristote. Diff&eacute;rentes &eacute;coles vont na&icirc;tre dont les sto&iuml;ciens, les &eacute;picuriens et les cyniques (appel&eacute;s &agrave; tort &laquo; pr&eacute;socratiques &raquo;). Le corps en mouvement est au centre de la pens&eacute;e et de la pratique philosophique car celle-ci vise &agrave; mieux vivre, ou mourir, &agrave; l&rsquo;inverse de la cr&eacute;ation de concepts abstraits qui ont envahi depuis les enseignements. Ainsi, certaines &eacute;coles pratiquent des exercices spirituels comme le remarquent Michel Foucault et surtout Pierre Hadot. Si on les retrouve dans la philosophie contemporaine chez Goethe, Husserl, le pragmatisme, Bergson, Merleau-Ponty ou Wittgenstein, la philosophie antique se caract&eacute;rise d&rsquo;abord par une volont&eacute; en acte de se trans-former dans tous les aspects de vie. Ce n&rsquo;est pas un m&eacute;tier mais un travail sur soi qui ne s&rsquo;arr&ecirc;te jamais. Pierre Hadot pr&eacute;cise :&nbsp;</p> <blockquote> <p>&laquo; pour produire un effet de formation : le philosophe voulait faire travailler les esprits de ses lecteurs ou auditeurs, pour qu&rsquo;ils se mettent dans une certaine disposition &raquo; (Hadot, 2003).&nbsp;</p> </blockquote> <p>Former plut&ocirc;t qu&rsquo;informer, par des exercices &laquo; exp&eacute;riment&eacute;s &raquo;, &laquo; existentiels &raquo;, &laquo; une pratique destin&eacute;e &agrave; op&eacute;rer un changement radical de l&rsquo;&ecirc;tre &raquo; ou la d&eacute;couverte d&rsquo;un &laquo; nouvel univers mental &raquo; pour le sujet (Misrahi, 2011). La le&ccedil;on de philosophie se transmet &agrave; l&rsquo;oral car les philosophes n&rsquo;&eacute;crivent pas &agrave; ce moment-l&agrave;. Connot&eacute;e religieusement, la conversion vise &agrave; un retournement, changer de direction et donc de position. Si notre langue source est une ressource et un r&eacute;pertoire d&eacute;terminant, il faut &ecirc;tre en mesure de subir un d&eacute;r&egrave;glement rythmique important, articulant les ph&eacute;nom&egrave;nes linguistiques et extra-linguistiques. Les exercices quotidiens, concrets et pratiques, des philosophes rejoignent le &laquo; travail laborieux&nbsp;&raquo;&nbsp;de l&rsquo;apprenant en langue comme le souligne Akira Mizubayashi :&nbsp;</p> <blockquote> <p>&laquo; Mais j&rsquo;eus une musique &agrave; moi seul, c&rsquo;&eacute;tait le fran&ccedil;ais. Personne dans ma famille ne s&rsquo;en aper&ccedil;ut. Car cette langue venue d&rsquo;ailleurs &eacute;tait pour moi l&rsquo;objet d&rsquo;un travail laborieux, d&rsquo;un exercice patient, d&rsquo;une discipline asc&eacute;tique de tous les jours comme l&rsquo;a &eacute;t&eacute; le violon pour mon fr&egrave;re qui se l&rsquo;est appropri&eacute;, incorpor&eacute; pour en lib&eacute;rer la musique&nbsp;&raquo;&nbsp; (Mizubayashi, 2013 : 39)&nbsp;</p> </blockquote> <p>L&rsquo;appropriation se fait jour par l&rsquo;incorporation. Les conceptions du langage d&egrave;s l&lsquo;antiquit&eacute; apparaissent d&eacute;terminantes quant &agrave; sa mesure dans l&rsquo;ordre cosmique et humain. Dans le Cratyle, Platon met en sc&egrave;ne deux visions apparemment antagonistes de l&rsquo;origine du langage : la langue d&eacute;termin&eacute;e par la&nbsp; nature (position de Cratyle, disciple d&rsquo;H&eacute;raclite) et celle &eacute;tablie par la convention des hommes (position d&rsquo;Hermog&egrave;ne, disciple de Parm&eacute;nide) &agrave; partir de noms &eacute;tablis par des signes et form&eacute;s par un &laquo; l&eacute;gislateur &raquo;&nbsp;pour parvenir &agrave; la &laquo; justesse &raquo;. Si aucune version d&eacute;finitive d&eacute;nu&eacute;e de contradictions n&rsquo;est encore possible, reste que le conventionnalisme sera repris par Wilhelm Von Humboldt, pionnier de la philosophie du langage qui inspirera Saussure pour dominer la linguistique contemporaine. Entre les deux philosophes appara&icirc;t Socrate, sollicit&eacute; imm&eacute;diatement pour arbitrer et trancher le d&eacute;bat. Or, le fils (symbolique) d&rsquo;un sculpteur et d&rsquo;une sage-femme va choisir la mesure pour r&eacute;fl&eacute;chir avec ses camarades, s&rsquo;approcher (et accoucher) de la v&eacute;rit&eacute;. La ma&iuml;eutique et l&rsquo;heuristique de Socrate, son attitude ouverte &agrave; la discussion et &agrave; l&rsquo;&eacute;change, permet une interaction et une remise en cause des th&egrave;ses avanc&eacute;es. Pour Socrate, le langage n&rsquo;est qu&rsquo;une imitation approximative du r&eacute;el et ne peut donc incarner la v&eacute;rit&eacute; de l&rsquo;objet mais une image qui tente d&rsquo;&ecirc;tre la plus repr&eacute;sentative possible sans pouvoir &eacute;tablir, ni une th&eacute;orie linguistique satisfaisante, ni une connaissance parfaite de la r&eacute;alit&eacute; (les &laquo; choses m&ecirc;mes &raquo;). La distinction des termes s&rsquo;effectue par rapport aux autres &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur d&rsquo;un syst&egrave;me singulier dont le passage &agrave; un autre emp&ecirc;che l&rsquo;exactitude de la valeur. Le dualisme platonicien que l&rsquo;on retrouve dans la binarit&eacute; du signe (signifiant/signifi&eacute;) emp&ecirc;che finalement d&rsquo;envisager l&rsquo;origine du langage en &eacute;vacuant la question de la n&eacute;gativit&eacute; ainsi que les porosit&eacute;s et les asp&eacute;rit&eacute;s de la parole. L&rsquo;oral rel&egrave;ve de l&rsquo;instant, de subtilit&eacute;s et d&rsquo;implicites qui renvoient au monde sensible et au monde intelligible. Socrate, pour cl&ocirc;re sans conclure le dialogue entre Cratyle et Hermog&egrave;ne, admet que le langage est affaire d&rsquo;images mais imparfaites. La parole va permettre de ne pas jouer les mots tel un ventriloque mais de les d&eacute;jouer pour retrouver l&rsquo;&eacute;lan musculaire et spirituel avant la trahison de l&rsquo;&eacute;nonciation.&nbsp;</p> <blockquote> <p>&laquo; L&rsquo;homme est la mesure de toute chose&nbsp;&raquo;&nbsp;(Protagoras)&nbsp;</p> </blockquote> <p>Influenc&eacute; par la fameuse locution philosophique de Protagoras o&ugrave; le sens du monde est invent&eacute; par la m&eacute;diation de l&rsquo;homme pour convenir et former un langage, Hermog&egrave;ne admet la cr&eacute;ation humaine derri&egrave;re la langue. Protagoras d&eacute;passe la connotation p&eacute;jorative associ&eacute;e habituellement aux sophistes. Reconnu par Socrate pour l&rsquo;harmonie de sa parole et se distinguant des monologues r&eacute;p&eacute;titifs d&rsquo;orateurs politiques en permettant l&rsquo;&eacute;coute et la &laquo; discussion dialogu&eacute;e&nbsp;&raquo;&nbsp;malgr&eacute; un ton qu&rsquo;il juge trop consensuel dans le Th&eacute;&eacute;t&egrave;te (Soulez, 1981), Protagoras consid&egrave;re la perception comme premi&egrave;re dans la formation du jugement et de la v&eacute;rit&eacute; et sera r&eacute;interpr&eacute;t&eacute; par nombre de penseurs. Les divinit&eacute;s sont ainsi &eacute;vacu&eacute;es (en partie) du ciel o&ugrave; le relativisme, particuli&egrave;rement le d&eacute;terminisme de l&rsquo;homme &agrave; devoir se d&eacute;terminer, malgr&eacute; les biais d&rsquo;intentionnalit&eacute; et les risques de solipsisme, ouvre la porte &agrave; un appel &agrave; la mesure que l&rsquo;on retrouve chez Socrate (&laquo; Connais-toi toi-m&ecirc;me &raquo;). Ainsi, le positionnement de son corps dans l&rsquo;ordre physique devient l&rsquo;enjeu d&rsquo;une connaissance qui d&eacute;bute &agrave; partir de soi. Les conceptions po&eacute;tiques ou philosophiques du langage, que nous exposons parmi une infinit&eacute;, permettent d&rsquo;enrichir et de d&eacute;passer l&rsquo;&eacute;pist&eacute;m&egrave; dominante en didactique du FLE qui consiste &agrave; aseptiser et standardiser la langue. La mesure de sa position s&rsquo;oppose ainsi au calcul des b&eacute;n&eacute;fices. Subs&eacute;quemment, peu importe que les mots trompent ou soient insuffisants, l&#39;&oelig;uvre de l&rsquo;apprenant (autant que du po&egrave;te ou du philosophe), tente de pr&eacute;ciser sans cesse sa pens&eacute;e, en tension, quelle que soit la forme des circonvolutions verbales, pour parvenir &agrave; la chair. S&rsquo;approprier une langue constitue une conqu&ecirc;te &agrave; bien des &eacute;gards, une qu&ecirc;te avec autrui comme port d&rsquo;attache et nouvel horizon. Pour transformer cette errance en odyss&eacute;e, la perception et la conscience de cette aventure improbable se re-lient &eacute;troitement, nous encourageons donc &agrave; prendre (la) mesure de la langue qu&rsquo;introduit l&rsquo;acte de parole et la mise en perspective singuli&egrave;re de soi et du monde dans la diversit&eacute; des langues. Pour ce faire, nous proposons une d&eacute;-marche o&ugrave; le rythme correspond &agrave; la mesure des sens et du sens.&nbsp;</p> <h2>5.Vers une d&eacute;marche rythmique dans une approche concr&egrave;te&nbsp;</h2> <p>Comme l&rsquo;indique avec entrain Michel Billi&egrave;res, &laquo; la parole est mouvement &raquo;. La prendre ou la recevoir revient &agrave; se positionner et se repositionner en permanence, dans des environnements familiers et incertains. Telle la fameuse expression d&rsquo;H&eacute;raclite &laquo; on ne se baigne jamais deux fois dans le m&ecirc;me fleuve &raquo;, on ne dit jamais deux fois la m&ecirc;me chose, m&ecirc;me si ce qu&rsquo;on &laquo; r&eacute;p&egrave;te &raquo;&nbsp;a le m&ecirc;me sens. La traduction d&rsquo;une langue &agrave; une autre ou d&rsquo;un individu &agrave; un autre, ne peut se revendiquer transparente et id&eacute;ale. Chaque m&eacute;moire est singuli&egrave;re et s&rsquo;inscrit dans une m&eacute;moire plus large. Si notre langue maternelle &agrave; laquelle nous nous identifions nous fa&ccedil;onne et reste notre r&eacute;f&eacute;rence, notre rapport aux langues &eacute;trang&egrave;res ne va pas de soi. La parole, m&ecirc;me int&eacute;rieure et/ou &agrave; soi, rencontre et re&ccedil;oit les mots d&rsquo;autrui pour y adh&eacute;rer ou non. La diversit&eacute; et parfois l&rsquo;opposition des discours va produire un &eacute;cho chez l&rsquo;apprenant o&ugrave; diff&eacute;rentes voix vont s&rsquo;entrelacer et provoquer un rapport d&rsquo;identification et d&rsquo;affection. Dans cette optique, Henri Meschonnic esquisse &laquo; le rythme d&rsquo;un discours&nbsp;&raquo;&nbsp;dans une vision dynamique en tant qu&rsquo;&laquo; organisation du mouvement de la parole dans l&rsquo;&eacute;criture &raquo;. M&ecirc;me et surtout &agrave; l&rsquo;oral, les &eacute;l&eacute;ments linguistiques et extra-linguistiques forment un tout indissociable que l&rsquo;enseignant va devoir conditionner pour viser une appropriation correcte de la grammaire. Ce bouleversement ne peut s&rsquo;engendrer que par une m&eacute;ta-morphose qui va activer la singularit&eacute; de l&rsquo;apprenant. Plus que l&rsquo;acquisition d&rsquo;une posture co&ucirc;teuse en &eacute;nergie et inappropri&eacute;e, il s&rsquo;agit pour l&rsquo;apprenant de se positionner ad&eacute;quatement dans &laquo; la partie individuelle du langage, c&rsquo;est-&agrave;-dire la parole y compris la phonation&nbsp;&raquo;&nbsp;pour se construire une place dans la langue et dans sa personnalit&eacute;. Cette &eacute;cologie du langage constitue alors une transformation int&eacute;rieure qui affecte la subjectivit&eacute; et le regard pos&eacute; sur le monde ou comme le souligne Humboldt : &laquo; la conqu&ecirc;te d&rsquo;une perspective nouvelle et le renouvellement de la vision du monde qui dominait jusque-l&agrave; &raquo;. Selon D&eacute;mocrite, dont les propos sont rapport&eacute;s par Aristote d&rsquo;apr&egrave;s Benveniste, &laquo; les relations fondamentales entre les corps s&rsquo;&eacute;tablissent par leurs diff&eacute;rences mutuelles &raquo;&nbsp;&agrave; savoir l&rsquo;ordre, la forme et la position. Benveniste pr&eacute;cise que le rythme ne provient pas s&eacute;mantiquement de &laquo; l&rsquo;&eacute;coulement &raquo;&nbsp;mais de &laquo; la forme&nbsp;&raquo;&nbsp;qui diff&eacute;rencie les atomes entre eux. Pour Platon, le rythme est une arithm&eacute;tique du corps &agrave; travers la forme du mouvement et la recherche de l&rsquo;harmonie. Les conceptions du rythme sont nombreuses. En fran&ccedil;ais, la caract&eacute;ristique fondamentale de la structure rythmique proc&egrave;de de l&rsquo;allongement, et non de l&rsquo;intensit&eacute;, de la derni&egrave;re syllabe du groupe rythmique au niveau articulatoire, et non acoustique (Wioland, 2012 : 91). Cette modification du rythme et donc de la forme, repr&eacute;sente ainsi une transformation de sa dis-position individuelle et distinctive dans l&rsquo;ordre contraignant de la langue. Ce r&eacute;arrangement de soi provient de ce qui est mouvant, mobile, fluide. Ainsi, le rythme intrins&egrave;que est li&eacute; au corps, reli&eacute; au rythme extrins&egrave;que, le cosmos. Le sens r&eacute;side ainsi dans la saisie des sens, et dont l&rsquo;essence se transmet, imparfaitement certes, par l&rsquo;agencement des sons. Cette appropriation po&eacute;tique par images mentales de la phonologie va &agrave; l&rsquo;oppos&eacute; de l&rsquo;id&eacute;e que ma&icirc;triser une langue consiste &agrave; s&rsquo;adapter &agrave; des situations de communications st&eacute;r&eacute;otyp&eacute;es et purement fonctionnelles. Le d&eacute;s&eacute;quilibre de la d&eacute;-marche qui re-d&eacute;finit notre rapport &agrave; l&rsquo;autre induit par ce pas de c&ocirc;t&eacute; va engendrer l&rsquo;humanit&eacute; du sujet po&egrave;te tel un a&egrave;de o&ugrave; &laquo; marcher, parler et penser ne forment qu&rsquo;un seul mouvement &raquo; (Pol-Droit, 2016 : 2). Ce processus est l&rsquo;expression d&rsquo;une danse, avec ses premiers pas, ses balbutiements, ses rythmes im-propres, im-probables et chaotiques, dont l&rsquo;arythmie r&eacute;side dans le manque d&rsquo;&eacute;veil, de sensibilisation et d&rsquo;&eacute;coute. Le corps et la parole ne forment plus qu&rsquo;un. L&rsquo;apprenant ne saurait copier &agrave; l&rsquo;identique ses pr&eacute;d&eacute;cesseurs car vouloir imiter permet d&rsquo;apprendre mais ne peut consister sur la dur&eacute;e qu&rsquo;&agrave; singer illusoirement tandis que chacun &eacute;volue dans un monde subjectif et sui generis dont l&rsquo;&eacute;nonciation est modifiable &agrave; l&rsquo;infini. Dans l&rsquo;exp&eacute;rience de la langue, le corps po&eacute;tique se frotte au r&eacute;el de la langue dans la mat&eacute;rialit&eacute; sonore et dans le d&eacute;voilement de sa propre sculpture. Une question &eacute;pineuse d&rsquo;&eacute;piderme, o&ugrave; l&rsquo;on passe du chaos &agrave; la forme pour d&eacute;-finir la mise en suspens du mouvement originel, et dont l&rsquo;exp&eacute;rience po&eacute;tique n&rsquo;est pas forc&eacute;ment compr&eacute;hensible ni traduisible d&egrave;s le d&eacute;but. Une d&eacute;marche rythmique peut en partie r&eacute;pondre &agrave; cette qu&ecirc;te sensuelle, existentielle et &eacute;mancipatrice.</p> <p>Si le langage structure notre pens&eacute;e, la langue sugg&egrave;re beaucoup plus qu&rsquo;elle ne peut l&#39;exprimer avec des mots. Selon Meschonnic, il n&rsquo;existe que la po&eacute;tique &agrave; m&ecirc;me de cr&eacute;er une th&eacute;orie du langage en tant que th&eacute;orie du sujet par sa capacit&eacute; r&eacute;flexive et critique des repr&eacute;sentations du langage. Par cons&eacute;quent, une approche concr&egrave;te peut donc permettre aux apprenants de prendre mesure de la non co&iuml;ncidence du rythme gr&acirc;ce aux formes des processus d&rsquo;appropriation, sans tomber dans le formalisme. Le terme concret s&rsquo;oppose &agrave; ce qui est abstrait, et tend &agrave; appliquer des savoirs th&eacute;oriques (ou pas) dans la vie r&eacute;elle (pl&eacute;onasme nous en convenons). Ce qui est concret renvoie &agrave; ce qui est &laquo; r&eacute;el, tangible, perceptible&nbsp;&raquo;&nbsp;et se rattache &agrave; la substance, la mati&egrave;re ou de &laquo; consistance &eacute;paisse &raquo;. C&rsquo;est donc &agrave; partir de ce pr&eacute;suppos&eacute; et en nous inspirant de la psychologie concr&egrave;te de Georges Politzer que nous souhaitons donner de l&rsquo;&eacute;paisseur &agrave; l&rsquo;exp&eacute;rience et &agrave; la perception de l&rsquo;apprenant dans notre d&eacute;marche rythmique :&nbsp;</p> <blockquote> <p>&laquo; Si l&#39;on commence par d&eacute;tacher les faits psychologiques de l&#39;individu singulier, on se situe, d&#39;embl&eacute;e, sur un plan abstrait, sur le plan des g&eacute;n&eacute;ralit&eacute;s avec lesquelles travaillent les psychologues. On se mouvra donc au milieu des consid&eacute;rations qui resteront au-dessous ou au-dessus de l&#39;individu particulier, et comme celui-ci seul peut introduire dans la th&eacute;orie la diversit&eacute; concr&egrave;te qui la rend applicable aux cas particuliers, l&#39;abstraction aboutit forc&eacute;ment &agrave; la tautologie, et c&#39;est le hasard qui devra remplir le vide cr&eacute;&eacute; par l&#39;&eacute;limination du concret individuel. L&#39;exp&eacute;rience ne nous pr&eacute;sente, en effet, que des faits individuels, mais comme on s&#39;est condamn&eacute; par l&#39;abstraction &agrave; ne pouvoir invoquer que des g&eacute;n&eacute;ralit&eacute;s, on sera forc&eacute;, &agrave; propos de chaque cas individuel, de r&eacute;p&eacute;ter des g&eacute;n&eacute;ralit&eacute;s, et l&#39;explication sera incapable de se modeler sur le fait &agrave; expliquer&nbsp;&raquo;&nbsp;(Politzer, 1928 : 35).&nbsp;</p> </blockquote> <p>Pour proc&eacute;der &agrave; une individuation de l&rsquo;apprentissage et participer &agrave; une &eacute;nonciation singuli&egrave;re, nous sugg&eacute;rons de consid&eacute;rer le rapport &agrave; la langue et &agrave; la musicalit&eacute; de l&rsquo;apprenant afin de soutenir l&rsquo;appropriation de la grammaire par une perspective organismique. Se d&eacute;couvrir, se mettre &agrave; nu et devenir autre sans jamais renoncer &agrave; soi. Nonobstant, il ne s&rsquo;agit pas de devenir un acteur qui surjoue et th&eacute;&acirc;tralise une prestation unique lorsqu&rsquo;il parle une autre langue qui lui reste &eacute;trang&egrave;re. Au contraire, il s&rsquo;agit plut&ocirc;t de devenir une sorte de com&eacute;dien, au sens de Louis Jouvet (et non jouer la com&eacute;die) qui se r&eacute;invente et r&eacute;invente la langue, capable de se re-produire autant qu&rsquo;il le souhaite afin de transmettre sa singularit&eacute; au-del&agrave; des mots qu&rsquo;il emploie et d&rsquo;affronter &laquo; bien des m&eacute;prises et des surprises&nbsp;&raquo;&nbsp;(Jouvet, 2009 : 90). Nous l&rsquo;avons mentionn&eacute; plus haut, il existe une imbrication intrins&egrave;que des composantes linguistiques, mais aussi un lien entre appropriation prosodique et appropriation langagi&egrave;re. Nous ne parlons pas avec des phrases mais avec des &eacute;nonc&eacute;s divis&eacute;s en groupes rythmiques ou en mots phon&eacute;tiques. Ce qui veut dire que nous ne respectons pas la ponctuation d&rsquo;un texte souvent d&eacute;finie comme la possibilit&eacute; de respirer ou de reprendre son souffle qui pourtant ne s&rsquo;arr&ecirc;te pas. D&rsquo;apr&egrave;s notre exp&eacute;rience d&rsquo;enseignant, nous remarquons une grande difficult&eacute; &agrave; s&rsquo;exprimer pour les apprenants ma&icirc;trisant mal, souvent inconsciemment, le lien entre le rythme, la grammaire et l&rsquo;&eacute;nonciation. Bien que les r&egrave;gles soient ma&icirc;tris&eacute;es, les difficult&eacute;s pour s&rsquo;exprimer &agrave; l&rsquo;oral et structurer un discours appara&icirc;ssent sous l&rsquo;effet du stress ou d&rsquo;automatismes insuffisamment incorpor&eacute;s. M&ecirc;me avec un texte &eacute;crit, la ponctuation ne constitue pas les limites du rythme &agrave; respecter mais un balisage graphique pour faciliter la lecture et non le dire. Pour illustrer notre propos, nous reprenons &agrave; notre compte l&rsquo;exemple souvent cit&eacute; par Jean-Laurent Cochet d&#39;une c&eacute;l&egrave;bre fable de La Fontaine. Le premier vers : &laquo; Ma&icirc;tre Corbeau, sur un arbre perch&eacute;,&raquo;&nbsp;nous am&egrave;ne &agrave; la question suivante, qui est perch&eacute; ? Est-ce l&rsquo;arbre ou le corbeau ? Cette erreur souvent commise d&eacute;montre &agrave; quel point le rythme est li&eacute; au(x) sens, et donc le pr&eacute;alable &agrave; une parole &laquo; juste&nbsp;&raquo;&nbsp;(pas au sens conventionnel de ce que la soci&eacute;t&eacute; d&eacute;finit comme &laquo; juste &raquo;) dont l&rsquo;enseignant doit tenter de faire prendre mesure aux apprenants. <em>Mutatis Mutandis</em>, l&rsquo;apprenant entreprend d&rsquo;intercaler la grammaire &eacute;trang&egrave;re avec le rythme de sa parole.&nbsp;</p> <h2>6.Pour une grammaire p&eacute;dagogique&nbsp;</h2> <p>Tout au long de cet article, nous avons essay&eacute; de tracer une autre fa&ccedil;on de consid&eacute;rer la grammaire dans une conception po&eacute;tique du langage afin d&rsquo;engendrer une conversion philosophique de l&rsquo;apprenant qui n&rsquo;est pas nouvelle mais m&eacute;rite d&rsquo;exister et d&rsquo;&ecirc;tre pratiqu&eacute;e en didactique du FLE. Le corps, r&eacute;ceptacle et caisse de r&eacute;sonance de la vitalit&eacute; de l&rsquo;apprenant s&rsquo;accorde et se positionne par rapport &agrave; la langue &eacute;trang&egrave;re. Si bien qu&rsquo;avant la naissance et la parole, l&rsquo;&eacute;mergence de la proprioception (Whitehead, Meek &amp; Fabrizi, 2018) et de la prosodie (Dodane, 2021) sont d&eacute;j&agrave; d&eacute;terminantes dans la constitution d&rsquo;une sensibilit&eacute; n&eacute;cessaire au d&eacute;veloppement langagier et sensori-moteur. La corpor&eacute;it&eacute; de la parole encourage donc &agrave; une corporisation de la didactique et de la grammaire qui ne soit pas d&rsquo;ordre conceptuel mais existentiel. D&egrave;s l&rsquo;antiquit&eacute;, aussi bien chez les Socratiques, les Sophistes ou les Atomistes, et dans la continuit&eacute; des recommandations d&rsquo;Henri Portine, la grammaire s&rsquo;inscrivait dans un ensemble prop&eacute;deutique et p&eacute;dagogique initi&eacute; par l&rsquo;enkuklios paideia (encyclop&eacute;die) &agrave; Alexandrie au IIe si&egrave;cle environ avant J.-C., lieu de naissance de la grammaire occidentale et de la philologie (Portine, 1999). Afin de favoriser la circularit&eacute; de la parole tant &agrave; l&rsquo;int&eacute;rieur de soi qu&rsquo;&agrave; l&rsquo;ext&eacute;rieur de l&rsquo;interaction, l&rsquo;activit&eacute; discursive de l&rsquo;apprenant doit &ecirc;tre encourag&eacute;e et multipli&eacute;e pour produire un dialogisme au service de la production d&rsquo;actes &eacute;nonciatifs performants. La grammaire en tant que &laquo; moteur des strat&eacute;gies discursives&nbsp;&raquo;&nbsp;(Portine, 1999), doit aborder la syntaxe de l&rsquo;oral pour &laquo; prendre corps&nbsp;&raquo;&nbsp;comme dans le po&egrave;me du m&ecirc;me nom de Gh&eacute;rasim Luca et retrouver une physique du langage. Jamais d&eacute;pourvue de sensible, cette disposition &agrave; la prise de parole induite par un repositionnement dans une nouvelle langue en chantier inqui&egrave;te tant pour sa connotation n&eacute;gative que pour sa mise en pratique. L&rsquo;engagement du corps apprenant (Lapaire, 2014) peut aider &agrave; p&eacute;n&eacute;trer la langue et &agrave; apaiser les troubles que suscitent les &laquo; risques de non-conformit&eacute;&nbsp;&raquo;&nbsp;d&rsquo;un monde nouveau. Au m&ecirc;me titre que la prononciation, les difficult&eacute;s et donc les rem&eacute;diations, sont toujours &agrave; remettre en perspective avec les langues sources et les sp&eacute;cificit&eacute;s de l&rsquo;apprenant. La multiplicit&eacute; des contextes plurilingues et interculturels, mais aussi corporels, dont on ne peut s&rsquo;extraire &agrave; moins d&rsquo;hypostasier l&rsquo;apprenant, et d&rsquo;en hypoth&eacute;quer les chances, constitue une toile de fond impossible &agrave; circonscrire totalement mais n&eacute;cessaire pour ne jamais prendre pour acquis ce qui rel&egrave;ve de l&rsquo;ind&eacute;passable et de l&rsquo;inconnu, aussi bien le langage que la po&eacute;sie comme le mentionne Paul Val&eacute;ry :&nbsp;</p> <blockquote> <p>&laquo; La plupart des hommes ont de la po&eacute;sie une id&eacute;e si vague que ce vague m&ecirc;me de leur id&eacute;e est pour eux la d&eacute;finition de la po&eacute;sie. &raquo;&nbsp;(Val&eacute;ry, 1941).&nbsp;</p> </blockquote> <p>Jouant de malentendus et d&rsquo;id&eacute;es, le vague n&rsquo;est-il pas justement immanent &agrave; l&rsquo;irr&eacute;ductibilit&eacute; du langage ? Dans la lign&eacute;e d&rsquo;une &laquo; po&eacute;tique du corps langage &raquo;&nbsp;(Martin, 2006) et &laquo; puisqu&#39;il n&#39;y a plus de place pour les po&egrave;tes dans ce monde &raquo;, laissons au moins la place &agrave; une po&eacute;tique du corps apprenant.&nbsp;</p> <h2>Bibliographie</h2> <p>Bataille, G. (1992 [1937]). L&rsquo;apprenti sorcier. Paris: Gallimard.&nbsp;</p> <p>Benveniste, E. (1966). Probl&egrave;mes de linguistique g&eacute;n&eacute;rale 1. Paris: Gallimard.&nbsp;</p> <p>De Saussure, F. (1971 [1916]). Cours de linguistique g&eacute;n&eacute;rale. Payot, version num&eacute;ris&eacute;e.&nbsp;</p> <p>Di Cristo, A. (2013). La prosodie de la parole. Paris: DE BOECK SUP ; 1er &eacute;dition.&nbsp;</p> <p>Dodane, C. (2020). Au commencement &eacute;tait la prosodie : du langage en &eacute;mergence &agrave; l&rsquo;histoire de la description de la parole. Linguistique. Universit&eacute; de Toulouse Jean Jaur&egrave;s. doi:fftel-03173746</p> <p>Hadot, P. (2002). Exercices spirituels et philosophie antique. Paris: Albin Michel.</p> <p>Hadot, P. (2003). La Philosophie comme mani&egrave;re de vivre. Paris: Biblio Essais.&nbsp;</p> <p>Jakobson, R. (1963). &laquo; Linguistique et po&eacute;tique &raquo;, Essais de linguistique g&eacute;n&eacute;rale. Paris: &Eacute;ditions de Minuit.</p> <p>Jouvet, L. (2009). Le com&eacute;dien d&eacute;sincarn&eacute;. Paris: Flammarion.&nbsp;</p> <p>Le Breton, D. (1992 ). La sociologie du corps. Paris: P.U.F.&nbsp;</p> <p>Le Breton, D. (2015). L&#39;Adieu au corps. Paris: &Eacute;ditions M&eacute;taili&eacute;.</p> <p>Meschonnic, H. (1982). Critique du rythme. Anthropologie historique du langage. Lagrasse: &Eacute;DITIONS VERDIER.&nbsp;</p> <p>Meschonnic, H. (1998). Trait&eacute; du rythme, des vers et des proses. Malakoff: Dunod.&nbsp;</p> <p>Meschonnic, H. (1999). Po&eacute;tique du traduire. Paris: Verdier.&nbsp;</p> <p>Misrahi, R. (2011). Le bonheur essai sur la joie. Nantes: &Eacute;DITIONS C&Eacute;CILE DEFAUT.&nbsp;</p> <p>Mizubayashi, A. (2013). Une langue venue d&rsquo;ailleurs. Paris: Gallimard.</p> <p>Platon. (1999 [IVe si&egrave;cle avant J.-C.]). Le Cratyle, traduit par Catherine Dalimier. Paris: Flammarion.&nbsp;</p> <p>Pol-Droit, R. (2004). L&#39;Oubli de l&#39;Inde. Paris: Points Essais.&nbsp;</p> <p>Pol-Droit, R. (2016). Comment marchent les philosophes. Paris: Paulsen.&nbsp;</p> <p>Politzer, G. (1928). Critique des fondements de la psychologie. &Eacute;dition num&eacute;rique hors commerce.</p> <p>Volle, R.-M. (2019). La cr&eacute;ativit&eacute; d&rsquo;une langue &agrave; l&#39;autre : m&eacute;moire des mots et &eacute;nonciation singuli&egrave;re. Revue TDFLE, (Hors s&eacute;rie n&deg;9). doi:https://doi.org/10.34745/numerev_1375</p>