<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><em><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="background:white">Afin de faciliter la lecture de ce texte, nous avons </span>employé<span style="background:white"> le </span>masculin<span style="background:white"> comme genre neutre </span>pour<span style="background:white"> désigner </span>aussi bien<span style="background:white"> les </span>femmes<span style="background:white"> que les hommes.</span></span></span></span></em></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:16pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-weight:bold">Contexte du projet de recherche</span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Cet article s’intéresse aux compétences et stratégies des personnes non ou peu scolarisées lorsqu’elles doivent se déplacer dans la ville à leur arrivée dans le pays d’accueil et notamment dans la métropole de Lyon, lieu de notre<a href="#_ftn1" name="_ftnref1" style="color:blue; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="font-family:"Arial",sans-serif">[1]</span></span></span></span></a> projet de recherche.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">À Lyon, en 2022, environ 13 % des adultes migrants sont illettrés c’est-à-dire n’ont pas été scolarisés dans leur pays d’origine, ou très peu et ne possèdent donc pas de compétences à l’écrit<a href="#_ftn2" name="_ftnref2" style="color:blue; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="font-family:"Arial",sans-serif">[2]</span></span></span></span></a>. Ces personnes en situation d’alphabétisation peuvent également être allophones c’est-à-dire qu’elles ne maîtrisent pas suffisamment l’oral en langue cible pour s’appuyer sur ces compétences dans le processus d’acquisition de l’écrit ou dans leurs expériences de mobilité. </span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Comme le mentionne Tabbal Amella (2013), il existe peu de littérature sur le processus d’acquisition des compétences littéraciques des adultes migrants non ou peu scolarisés (Adami, 2020 ; Leclère M., Le Ferrec L., 2018 ; Adami et Leclercq, 2012). À notre connaissance, la question de la mobilité et des stratégies pour se déplacer sans compétences en lecture pour ce public spécifique n’est que peu étudiée (Rivière et al., à paraître en 2024).</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">De janvier 2021 à mars 2022, au laboratoire ICAR à Lyon, une petite équipe constituée des praticiennes de terrain et de chercheures se regroupe régulièrement autour du projet ECAEST Étude des CAtégorisations de l’ESpace et Temps dans des pratiques interactionnelles multimodales chez les adultes allophones non alphabétisés, dirigé par Véronique Rivière. Ce projet s’est intéressé aux stratégies que ces personnes non scolarisées et non alphabétisées mettent en place pour organiser et effectuer leurs déplacements. Ce projet de recherche avait pour objectif, entre autres, d’entamer une réflexion sur les supports et activités pédagogiques spécifiques utiles en formation pour favoriser la compétence de mobilité pour ces publics. Il existe en effet peu d’outils pédagogiques pour travailler sur les compétences alliant littératie et mobilité. </span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Nous nous sommes intéressées à la mobilité après de nombreuses observations de terrain qui montraient des difficultés éprouvées par des personnes en situation d’alphabétisation pour se rendre à des rendez-vous. Les difficultés vécues étaient notamment de lire les affichages et panneaux (de signalisation, publicités, nom des rues…), les plans, cartes, d’identifier une adresse ou de prévoir un trajet, mais également d’appréhender toutes les formes graphiques et différentes représentations sémiotiques et culturelles dans l’espace urbain (Lynch, 1960, Barthes, 1985, Mondada, 2000). D’autant plus que les personnes non scolarisées ne peuvent pas s’appuyer sur le « geste » de noter dans un carnet de rendez-vous, un agenda, et la possibilité de les consulter (Barré-de Miniac, 1994).</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:16pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-weight:bold">Cadrage théorique : quelques définitions préalables</span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Questionner la mobilité quotidienne d’adultes migrants non scolarisés et non lecteurs impliquent de se poser un certain nombre de question sur les termes utilisés.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Tout d’abord, il nous semble que la notion de mobilité, partagée par de nombreuses disciplines, doit être définie. Dans notre contexte, la notion de mobilité peut être décrite comme « la facilité à se mouvoir, à changer, à se déplacer » (Bonerandi, 2004), d’un point géographique à un autre, dans la ville ou sa périphérie : avec les transports en commun, mais également à pied dans la rue. Nous employons donc cette notion d’un point de vue géographique et urbain, et non d’un point de vue des flux migratoires (comme elle peut être parfois employée lorsqu’on parle d’adultes migrants).</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Nous pouvons également nous interroger sur les types de déplacement qu’effectuent ces personnes. Nos données montrent par exemple que leurs déplacements sont principalement guidés par des « contraintes externes », « indépendantes de la volonté individuelle » (Ramadier, 2010) : rendez-vous administratifs et médicaux, en lien avec la demande d’asile, la formation, la scolarité des enfants… Elles se déplacent peu pour se promener sans but, se détendre ou pour exercer une activité physique. Elles se déplacent dans l’environnement urbain pour se rendre au travail ou à un rendez-vous. </span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Il nous semble également pertinent de nous intéresser à la notion de stratégie cognitive. En effet, les déplacements urbains comme se rendre un rendez-vous administratif ou médical peuvent être envisagés comme étant des « tâches » à effectuer. Ces tâches sont identifiées par un individu comme des « problèmes pertinents à résoudre dans sa situation » (Cantor et al., 1987 : 1179) et pour lesquels chaque individu doit consacrer du temps et de l'énergie, au cours d'une période déterminée (Ibid.). Nous postulons que la résolution de ces tâches du quotidien, comme dans la situation d’apprentissage, peut s’accomplir grâce à des stratégies qu’un individu met en place. Dans le contexte d’apprentissage, la notion de stratégie cognitive se définit comme l’« utilisation du cerveau (cognition) pour résoudre un problème ou une tâche ». <span style="background:white"><span style="color:#333333">Les stratégies cognitives sont en quelques sortes des « facilitateurs procéduraux » (Bereiter & Scardamalia, 1987) car le fait de les mobiliser par le biais d’une ou plusieurs procédures va permettre l’accomplissement de la tâche. </span></span>Par ailleurs, selon Klinger (1977, cité par Cantor et al.), les tâches que tout individu identifie ainsi que les activités associées à ces différentes tâches sont la plupart du temps effectuées de manière inconsciente, tout comme peuvent l’être les stratégies cognitives.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Les déplacements à pied, en transports en commun ou en transport individuel sont effectivement des tâches quotidiennes qui requièrent à la fois une « résolution de problème » nécessitant du temps, de l’énergie au cours d’une période déterminée : lire un plan de la ville, suivre un itinéraire sur une appli, retrouver une adresse sur un plan puis sur le terrain en situation « réelle ». Pour réussir à effectuer une tâche de mobilité, il faut donc mettre en œuvre des stratégies cognitives. Mais comment l’individu mobilise-t-il ces stratégies ? Selon Ramadier, (2010 : 22), chaque individu possède une « histoire environnementale » qui lui a permis d’acquérir des prédispositions. Ainsi chaque individu qui évolue dans l’espace urbain développe simultanément deux processus socio-cognitifs : il s’approprie et se familiarise avec les attributs physiques et spatiaux de l’espace géographique jusqu’à ce qu’ils deviennent signifiants, et en même temps, il décode ce qui est signifiant dans l’espace urbain, grâce aux compétences cumulées acquises au cours de toutes ses expériences.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Cette expérience de vie et ce « décodage<a href="#_ftn3" name="_ftnref3" style="color:blue; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="font-family:"Arial",sans-serif"><span style="color:black">[3]</span></span></span></span></span></a> » permettent donc à chaque individu de développer des stratégies dans ses déplacements mais également d’enrichir son « histoire environnementale » : même si elles peuvent avoir été négatives (par exemple, perdre son chemin) les expériences vécues sont des expériences d’apprentissage. Pour se déplacer dans l’espace urbain, les individus qui possèdent des compétences en littératie développent des stratégies cognitives en lien avec la lecture, par exemple en décodant des mots écrits sur des panneaux de signalisation, (voie phonologique de la lecture) ou bien en repérant des mots reconnus comme des formes globales, des silhouettes (lecture idéo-visuelle et voie lexicale).</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Mais que se passe-t-il pour un individu qui ne maîtrise pas les compétences de lecture ? Quelle(s) stratégie(s) développe-t-il ? Peut-il mettre en œuvre un autre type de « décodage » ? Dans cet article, nous tentons de répondre à ces différentes questions.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:16pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-weight:bold">Méthodologie de recueil de données </span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">L’étude du projet ECAEST était essentiellement constituée de données vidéos de séances de formation et d’entretien d’accueil en plateforme linguistique et socio-professionnelle. Mais très rapidement au cours du projet, nous avons pris conscience que les résultats extraits de nos données pourraient avantageusement être enrichies par des témoignages des personnes migrantes en situation d’alphabétisation, par le récit de leurs expériences, de leur vécu et des ressources et stratégies qu’elles déployaient. Nous avons ainsi démarré un protocole de recueil de données complémentaire et enregistré des entretiens biographiques auprès de personnes adultes en situation d’alphabétisation. Cet article s’appuie sur l’analyse de données issues d’un corpus regroupant quatre entretiens biographiques de personnes en situation d’alphabétisation qui décrivent les difficultés rencontrées lors de leurs expériences de mobilité dans la ville, les stratégies mises en œuvre et les sentiments et émotions vécus dans ces situations.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"> </p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Dans le récit biographique, c’est le travail de la mémoire d’un individu qui se manifeste, c’est une partie des événements de sa vie, selon une suite de faits temporels et sur un sujet donné, qui est captée par le chercheur. Selon Delory-Momberger (2019 : 343), l’entretien biographique possède deux objectifs. D’abord, il doit permettre de « recueillir et d’entendre la parole singulière d’une personne à un moment T de son existence et de son expérience ». Concernant la recherche, l’objectif est de « recueillir des matériaux » sur les comportements, sur les pratiques, les représentations des enquêtés qui soient utiles au projet de recherche.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">L’entretien de recherche biographique peut se définir selon trois caractéristiques : tout d’abord, la personne qui raconte son histoire, le « sujet-auteur » doit être au centre de l’entretien tout au long des échanges. Une autre spécificité est que l’enquêteur et l’enquêté sont engagés dans un processus commun impliquant une collaboration : l’entretien se mène dans une sorte de dialogue co-écrit par les deux parties (Delory-Momberger, 2019 : 342). La troisième caractéristique est le processus de subjectivation qui se déroule : le récit biographique n’est pas toujours raconté chronologiquement, et ne possède pas non plus forcément d’exactitude dans la chronologie des faits (Bouchetal, 2022 : 231). Le chercheur doit donc analyser les données en tenant compte de cette subjectivation.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Au regard de ses caractéristiques, on peut évidemment se poser une certain nombre de questions : Quelle relation l’entretien biographique introduit-il entre enquêté et enquêteur ? La place et le statut du chercheur permettent-ils à l’enquêté de se sentir réellement en situation de collaboration ? Quels effets ce rapport peut-il avoir sur la production du matériau biographique ? De quelle manière faire en sorte que la place du chercheur n’intimide pas les personnes et ne fausse pas le récit ? Comment éviter que les enquêtés, désireux de répondre aux attentes, soient complètement authentiques face à aux questions au cours de l’entretien ?</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Ce sont autant de questions que nous nous sommes posées dans le cadre de ce projet. Nous savions notamment que le succès des entretiens biographiques allait dépendre « de la capacité de l'enquêteur à créer les conditions suffisantes pour que l'enquêté consente à dévoiler son vécu et sa subjectivité » (Paye, 2012 : 6). Pour nos entretiens, nous avons donc pensé à des personnes qui connaissaient très bien les deux formatrices participant au projet ECAEST et qui se sentiraient dans une situation de confiance. Les enquêtés avaient en effet suivi une formation longue à l’association Langue Comme Une. Ainsi les formatrices avec lesquelles des liens de confiance avaient été tissés leur ont très clairement explicité nos objectifs en amont (l’introduction que nous avions « rédigée » faisait aussi partie du guide d’entretien). Nous leur avons par exemple expliqué que leur récit pourrait être utile pour la formation et l’apprentissage à d’autres personnes non scolarisées. C’est ainsi que la collaboration a pu se faire. Comme le précise Paye (2012), tout ne se passe pas uniquement durant la séquence de recueil de données, lorsque le dictaphone enregistre. La première prise de contact est très importante et va conditionner le déroulement de l’enquête. </span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Cela était a fortiori très important dans notre cas puisque les sujets que nous allions aborder au cours de l’entretien (l’exil, la scolarisation, la maîtrise de l’écrit…) pouvaient rappeler des souvenirs de récits faits à différentes instances dans le cadre du parcours de demande d’asile. La phase d’explication de notre projet ainsi que la confiance que les personnes pouvaient poser en nous étaient primordiale pour la réussite du projet.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Outre la barrière de la langue qui peut parfois s'avérer un frein pour le recueil de données, l’une des difficultés avec ce public est la méfiance envers l’enquêteur et l'appréhension à se retrouver dans une situation où il va devoir une énième fois être enquêté, interrogé. Le fait que la situation de l’entretien biographique est souvent éprouvante avec ce public, se remémorer des évènements ou passages de vie difficiles peut rapidement faire échouer le recueil de données. Ainsi l'entretien avec une cinquième personne n'a pas pu être achevé car cette personne était trop émue à l’idée de revivre le récit de certaines expériences et passages de sa vie. </span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Les données ont été recueillies entre 2021 et 2023. Bien que le projet ECAEST soit terminé depuis 2021, l'équipe a poursuivi la recherche et notamment en continuant à rencontrer des personnes en situation d'alphabétisation afin d'obtenir davantage de données sur les stratégies de déplacement de ces personnes. Ce qui est présenté ici ne reflète qu'un aperçu partiel de la recherche puisque le recueil de données est en cours et se poursuit.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"> </p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Les questions de notre guide d’entretien ont été pensées assez ouvertes afin de susciter la mémoire des personnes et afin qu’elles se sentent encouragées à s’exprimer sur leurs expériences vécues, à raconter une partie de leur vie ou certains événements de leur vie en lien avec leurs scolarités ou leurs expériences de déplacement et mobilité dans leur pays et en France. Les questions posées s’intéressent par exemple à la manière dont elles s’organisent pour un rendez-vous (anticipation, différentes étapes…), se déplacent pour se rendre à un rendez-vous (outils utilisés), quels types d’aides elles sollicitent…</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Les entretiens se sont déroulés avec différentes enquêtrices, toutes participant au projet ECAEST et dans différents lieux car nous avons souhaité proposer un lieu familier aux enquêtés afin de leur procurer confiance et sécurité. L’un des entretiens s'est déroulé au laboratoire ICAR<a href="#_ftn4" name="_ftnref4" style="color:blue; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="font-family:"Arial",sans-serif">[4]</span></span></span></span></a>, un autre s’est déroulé dans les locaux de l’association Langue Comme Une<a href="#_ftn5" name="_ftnref5" style="color:blue; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="font-family:"Arial",sans-serif">[5]</span></span></span></span></a>, et les deux autres entretiens se sont déroulés au domicile des personnes. Notre matériel d’enregistrement était un dictaphone numérique. Nous avons fait volontairement le choix d'un enregistrement uniquement audio afin de ne pas perturber les enquêtés et d'instaurer un climat de confiance, le dictaphone se faisant peut-être davantage oublier qu’un dispositif vidéo. Chaque entretien dure plus ou moins une heure. Ces quatre personnes sont des adultes migrants installés à Lyon ou en périphérie depuis quelques années, depuis vingt ans pour l’une d’entre elles. Elles ont suivies pour certaines la formation préconisée dans le cadre du CIR<a href="#_ftn6" name="_ftnref6" style="color:blue; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="font-family:"Arial",sans-serif"><span style="color:black">[6]</span></span></span></span></span></a> du parcours OFII<a href="#_ftn7" name="_ftnref7" style="color:blue; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="font-family:"Arial",sans-serif"><span style="color:black">[7]</span></span></span></span></span></a> et pour d’autres une formation destinée aux personnes en situation d’alphabétisation au sein de l’Association Langue Comme Une à Lyon :</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"> </p>
<table class="Table" style="width:604px; border-collapse:collapse; border:none" width="604">
<tbody>
<tr>
<td style="border-bottom:1px solid black; width:104px; padding:0cm 5px 0cm 5px; height:18px; border-top:1px solid black; border-right:1px solid black; border-left:1px solid black"> </td>
<td style="border-bottom:1px solid black; width:38px; padding:0cm 5px 0cm 5px; height:18px; border-top:1px solid black; border-right:1px solid black; border-left:none">
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><b><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Calibri",sans-serif">Sexe</span></span></b></span></span></span></p>
</td>
<td style="border-bottom:1px solid black; width:157px; padding:0cm 5px 0cm 5px; height:18px; border-top:1px solid black; border-right:1px solid black; border-left:none">
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><b><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Calibri",sans-serif">Origine</span></span></b></span></span></span></p>
</td>
<td style="border-bottom:1px solid black; width:183px; padding:0cm 5px 0cm 5px; height:18px; border-top:1px solid black; border-right:1px solid black; border-left:none">
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><b><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Calibri",sans-serif">Scolarisé.e antérieurement</span></span></b></span></span></span></p>
</td>
<td style="border-bottom:1px solid black; width:122px; padding:0cm 5px 0cm 5px; height:18px; border-top:1px solid black; border-right:1px solid black; border-left:none" valign="top">
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><b><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Calibri",sans-serif">Au moment de l’entretien, en France depuis…</span></span></b></span></span></span></p>
</td>
</tr>
<tr>
<td nowrap="nowrap" style="border-bottom:1px solid black; width:104px; padding:0cm 5px 0cm 5px; height:19px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:1px solid black" valign="bottom">
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Calibri",sans-serif">Zoya<a href="#_ftn8" name="_ftnref8" style="color:blue; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Calibri",sans-serif"><span style="color:black">[8]</span></span></span></span></span></a></span></span></span></span></span></p>
</td>
<td nowrap="nowrap" style="border-bottom:1px solid black; width:38px; padding:0cm 5px 0cm 5px; height:19px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:none" valign="bottom">
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Calibri",sans-serif">F</span></span></span></span></span></p>
</td>
<td nowrap="nowrap" style="border-bottom:1px solid black; width:157px; padding:0cm 5px 0cm 5px; height:19px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:none" valign="bottom">
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Calibri",sans-serif">Moyen-Orient</span></span></span></span></span></p>
</td>
<td nowrap="nowrap" style="border-bottom:1px solid black; width:183px; padding:0cm 5px 0cm 5px; height:19px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:none" valign="bottom">
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Calibri",sans-serif">non</span></span></span></span></span></p>
</td>
<td style="border-bottom:1px solid black; width:122px; padding:0cm 5px 0cm 5px; height:19px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:none" valign="top">
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Calibri",sans-serif">4 ans</span></span></span></span></span></p>
</td>
</tr>
<tr>
<td nowrap="nowrap" style="border-bottom:1px solid black; width:104px; padding:0cm 5px 0cm 5px; height:19px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:1px solid black" valign="bottom">
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Calibri",sans-serif">Kadiatou</span></span></span></span></span></p>
</td>
<td nowrap="nowrap" style="border-bottom:1px solid black; width:38px; padding:0cm 5px 0cm 5px; height:19px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:none" valign="bottom">
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Calibri",sans-serif">F</span></span></span></span></span></p>
</td>
<td nowrap="nowrap" style="border-bottom:1px solid black; width:157px; padding:0cm 5px 0cm 5px; height:19px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:none" valign="bottom">
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Calibri",sans-serif">Afrique sub-saharienne</span></span></span></span></span></p>
</td>
<td nowrap="nowrap" style="border-bottom:1px solid black; width:183px; padding:0cm 5px 0cm 5px; height:19px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:none" valign="bottom">
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Calibri",sans-serif">3 ans (école coranique)</span></span></span></span></span></p>
</td>
<td style="border-bottom:1px solid black; width:122px; padding:0cm 5px 0cm 5px; height:19px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:none" valign="top">
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Calibri",sans-serif">20 ans</span></span></span></span></span></p>
</td>
</tr>
<tr>
<td nowrap="nowrap" style="border-bottom:1px solid black; width:104px; padding:0cm 5px 0cm 5px; height:19px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:1px solid black" valign="bottom">
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Calibri",sans-serif">Aïssatou </span></span></span></span></span></p>
</td>
<td nowrap="nowrap" style="border-bottom:1px solid black; width:38px; padding:0cm 5px 0cm 5px; height:19px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:none" valign="bottom">
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Calibri",sans-serif">F</span></span></span></span></span></p>
</td>
<td nowrap="nowrap" style="border-bottom:1px solid black; width:157px; padding:0cm 5px 0cm 5px; height:19px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:none" valign="bottom">
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Calibri",sans-serif">Afrique sub-saharienne</span></span></span></span></span></p>
</td>
<td nowrap="nowrap" style="border-bottom:1px solid black; width:183px; padding:0cm 5px 0cm 5px; height:19px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:none" valign="bottom">
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Calibri",sans-serif">non</span></span></span></span></span></p>
</td>
<td style="border-bottom:1px solid black; width:122px; padding:0cm 5px 0cm 5px; height:19px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:none" valign="top">
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Calibri",sans-serif">3 ans</span></span></span></span></span></p>
</td>
</tr>
<tr>
<td nowrap="nowrap" style="border-bottom:1px solid black; width:104px; padding:0cm 5px 0cm 5px; height:19px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:1px solid black" valign="bottom">
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Calibri",sans-serif">Issa</span></span></span></span></span></p>
</td>
<td nowrap="nowrap" style="border-bottom:1px solid black; width:38px; padding:0cm 5px 0cm 5px; height:19px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:none" valign="bottom">
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Calibri",sans-serif">M</span></span></span></span></span></p>
</td>
<td nowrap="nowrap" style="border-bottom:1px solid black; width:157px; padding:0cm 5px 0cm 5px; height:19px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:none" valign="bottom">
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Calibri",sans-serif">Afrique sub-saharienne</span></span></span></span></span></p>
</td>
<td nowrap="nowrap" style="border-bottom:1px solid black; width:183px; padding:0cm 5px 0cm 5px; height:19px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:none" valign="bottom">
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Calibri",sans-serif">non</span></span></span></span></span></p>
</td>
<td style="border-bottom:1px solid black; width:122px; padding:0cm 5px 0cm 5px; height:19px; border-top:none; border-right:1px solid black; border-left:none" valign="top">
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Calibri",sans-serif">1 an</span></span></span></span></span></p>
</td>
</tr>
</tbody>
</table>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:16pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-weight:bold">Quelques résultats</span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Les entretiens ont été analysés manuellement, sans logiciel. Nous avons cherché les « repères saillants », en tentant de « déplier la complexité » et de « déconstruire l’envers du récit » (Nicourd, 2023). Ce que nous allons présenter est le fruit de réflexions qui s’appuient sur une sélection d’extraits de discours de seulement quatre enquêtés et n’a donc aucune vocation généralisante. Ces résultats, par sélection, croisement, recoupement, peuvent néanmoins permettre de brosser un portrait (partiel) du vécu des personnes en situation d’alphabétisation. Nous avons tenté de soulever ce qui est récurrent chez ces personnes, ou ce qui, pour un même aspect, peut être vécu ou perçu différemment. Les résultats sont étayés de verbatims extraits des entretiens.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Le « dépouillement » des données donnent des résultats intéressants concernant les stratégies mises en œuvre par les personnes pour parvenir à un double objectif : se présenter à un rendez-vous (administratif, médical), à l’heure convenue. Comment font les personnes pour s'organiser sans passer par la trace écrite, sans passer par l’agenda ou le calendrier, sans avoir le « geste » de noter décrit par Barré-de Miniac (1994) ?</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Nous commencerons par présenter les difficultés évoquées au cours de l’entretien. Le manque d’autonomie est ce qui revient le plus souvent. Le fait de ne pas avoir de compétences littéraciques les rend dépendantes d’autrui, les empêche de sortir seules. Elles mentionnent par exemple la peur de se perdre (nous développerons les sentiments éprouvées infra) : « Ça m’a pris 5 ou 6 mois pour oser partir seule » (Zoya) ; « je me promène jamais toute seule, toujours avec les assistants [sociaux] » (Aïssatou) ; « Un jour, je suis sorti tout seul, je me suis perdu » (Issa).</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">On relève également des difficultés dans les compétences visuo-spatiales. </span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">On voit par exemple que pour Zoya c’est compliqué de suivre des consignes d’orientation. Elle mentionne qu'elle confond sa gauche et sa droite, ce qui lui pose problème lorsque ses proches lui indiquent une direction à prendre (au téléphone par exemple) et elle ne parvient pas à mémoriser la différence entre le métro et le tramway, entre le haut et le bas en quelque sorte : « Celui d’"en haut", c’est le tram ou le métro ? (…) Celui-là il me pose un vrai problème. Je ne sais pas les distinguer ! ».</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">D’autres difficultés qui compliquent les déplacements sont celles liées aux compétences de littératie numérique. Par exemple, aucune des personnes enquêtées n’utilise les applis de téléphone pour connaître les horaires de bus, s’orienter ou calculer un itinéraire. Kadiatou précise qu’elle n’utilise pas l’automate pour acheter les tickets de bus : « Je sais pas acheter avec la machine ».</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">La difficulté principale reste le manque de compétences écrites. Les personnes ne peuvent pas lire leurs courriers : « Si j'ai un courrier, je peux juste regarder la date, l'heure » (Issa) ; lire les cartes et panneaux par exemple dans les stations de métro : « Les cartes affichées dans la station, je ne sais pas les lire, je n’essaie même pas ! » (Zoya) ; « quand je prends le bus, je n’arrive pas à lire la direction » (Aïssatou).</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Voyons à présent quels types de stratégies elles vont mettre en peuvre pour contourner ces difficultés.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:16pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-weight:bold">Les stratégies </span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-titre2" style="text-align:justify"><span style="font-size:14pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-weight:bold">La zone de confort</span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">L’une des stratégies développées est de se déplacer presque exclusivement sur des trajets connus, un processus d’appropriation où les personnes se ménagent des « zones de confort » (Guichon et al., 2022 : 4). Ainsi, à son arrivée à Lyon, Zoya se déplaçait seule uniquement dans des lieux se trouvant sur les lignes de bus connues et qui passent près de chez elle. Elle dit : « mais je n'osais pas changer de ligne ». Kadiatou explique : « Je sors toujours les endroits vraiment que je connais ». Aïssatou précise « Le métro, je maîtrise. Ça suffit si on m'indique où je dois aller ». Tous les enquêtés se déplacent la veille pour repérer les lieux avec une personne qui peut les guider, leur monter le trajet : « Toujours quand j’ai des rendez-vous, on me ramène en avance le lendemain avant je pars de mon rendez-vous. Au moins je sais exactement où c’est » (Kadiatou). On voit que les enquêtés parviennent à retourner à un endroit si elles y sont déjà allées auparavant avec une tierce personne. Elles parviennent également à se déplacer sur des trajets connus et couramment empruntés ou ayant un rapport avec leur domicile, privilégiant un trajet bien connu plutôt qu’un trajet un peu plus compliqué quitte à avoir un déplacement plus long : « Tout ce qui est changement [de ligne] ou autre, non. Je préfère des fois même repérer en marchant et aller plutôt en avance. » (Kadiatou).</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Ces « zones de confort » sont souvent co-élaborées avec des proches ou des personnes qui aident, qui accompagnent. La stratégie compensatoire mise en œuvre par les quatre enquêtés est la stratégie sociale : le fait de demander de l’aide à une tierce personne. Cette stratégie va permettre de « ménager la zone de confort ». La personne sollicitée est souvent un proche ou un travailleur social. Par exemple, Zoya dit qu’elle et son mari font souvent appel à leurs enfants pour les accompagner ou leur montrer de quelle manière ils peuvent « se débrouiller » : « [mon mari] partait avec notre fils qui sait lire en français et peut donc l’aider » ; « J’ai dit à ma fille, elle m’a promis de m’aider en cherchant l’itinéraire sur l’application TCL » (Zoya). Si les proches ne sont pas disponibles « physiquement », les enquêtés contactent leurs proches avec le téléphone comme nous l’expliquerons plus bas.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Lorsque les proches ou les personnes habituellement sollicitées ne sont pas disponibles, les enquêtées font appel à d’autres personnes. Cela peut être un conducteur de bus, un commerçant, en leur montrant l’adresse écrite sur un document : « finalement je suis entrée plutôt dans une pharmacie, et j’ai montré à la pharmacienne le papier… » (Zoya). C’est quelqu’un à qui on montre une adresse, le nom d’un arrêt de bus sur un papier : « Je m'en vais à cette adresse là et je sais pas où il faut aller, qu'est-ce qu'il faut faire » (Aïssatou)</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Les quatre personnes enquêtées expliquent que les passants sont toujours « pressés » et « ne te voient même pas ». Ainsi lorsqu’elles se décident à demander de l’aide, elles mettent en œuvre plusieurs stratégies particulières : les passants ne sont pas interpellés au hasard. Le plus souvent, elles prennent soin de s’adresser à des personnes qui leur inspirent confiance, plutôt dans la même tranche d’âge, pour les femmes, pour Zoya plutôt des femmes et plutôt « des femmes voilées en espérant qu’elles soient arabes et qu’elles me comprennent ». </span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Kadiatou, Issa et Aïssatou disent tous les trois préférer s’adresser et demander de l’aide à des personnes qui ont la même couleur de peau qu’eux, à des « blacks » explique Kadiatou qui, selon elle, vont peut-être parler la même langue mais surtout, elle pense qu’ils vont avoir une culture commune, une culture de l’entraide qu’elle ne trouve pas chez tous les « Français blancs ». Issa aussi, c’est la plupart du temps à une personne noire qu’il s’adresse : « Un noir, quand il voit son frère noir, même s’il connaît pas l'endroit, il va dire : « Moi, je connais pas l'endroit ». Mais il va essayer [de t’aider] ». Aïssatou explique quant à elle qu’à son arrivée à Lyon, c’est une femme noire originaire d’un pays frontalier au sien qui s’est arrêtée pour lui proposer son aide. Elle explique qu’à son arrivée en France, elle a tout de suite compris qu’elle ne pouvait pas demander de l’aide à n’importe qui contrairement à son pays d’origine : « Tu vas t'approcher à quelqu'un : “Je suis pressé, je suis pressé, je suis pressé !”. En Afrique, c’est pas comme ça. »</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:14pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-weight:bold">Stratégie qui consiste à s’appuyer sur l’exploitation des repères visuels</span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Les personnes que nous avons enquêtées expliquent que pour se déplacer lorsqu’elles sont seules, elles s’appuie sur des repères visuels mais également auditifs. </span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Par exemples, même si elles ne peuvent pas lire le nom de la rue ni utiliser une appli sur smartphone pour savoir quel itinéraire prendre, elles repèrent et mémorisent un commerce dans l’environnement urbain qui leur permet de savoir où elles se trouvent et de se repérer : « Je mémorise beaucoup. Je regarde bien autour de moi s’il y a un Carrefour, un café, un restaurant » (Zoya) ou bien « Je regarde s’il y a une pharmacie, un restaurant, une boulangerie, une laverie, un bâtiment de service public comme la Poste. » (Zoya), « À mon premier cours, je me repérais par rapport au stade » (Kadiatou).</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Les personnes enquêtées font appel à<b> </b>la mémoire des lieux et des trajets effectués avec une tierce personne : « Quand mon amie m’a accompagnée pour aller à l’association, j’ai bien mémorisé l’adresse pour y aller toute seule » (Zoya). Une analyse comportementale montre qu’il existe deux groupes d’individus : certains vont utiliser les repères visuels mémorisés pour se guider dans leur trajet et d’autres vont employer une stratégie basée sur la mémorisation de la série des mouvements à effectuer pour atteindre le lieu : prendre la première à gauche, puis prendre puis descendre les escaliers… (Denis, 2016 : 90-91)</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Les personnes que nous avons enquêtées s’appuient également sur des repères auditifs comme le font les lecteurs scripteurs, en s’appuyant notamment sur l’écoute de annonces diffusée dans les transports en commun : « J’écoute bien le nom de la station » (Zoya) ; « je vais attendre qu’est-ce qu’il dit (la voix de l’annonce ?) où aller comme ça je te répète comme ça je me dis combien d’arrêts il reste » (Kadiatou).</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Ce que nous explique Kadiatou, c'est qu'elle s’appuie sur cette annonce sonore, mais que plus encore, elle attend cette annonce pour la répéter au téléphone à un proche qui va lui dire si elle doit descendre ou non. On observe que cette stratégie qui consiste à s’appuyer sur des repères auditifs dans le bus ou dans le tramway peut être défaillante puisqu’il arrive que parfois l'enregistrement ne fonctionne pas, ou qu’à cause du bruit environnant, on puisse ne pas entendre ce que dit l'annonce : « Le métro ou tram des fois, il parle pas et donc c’est pas ici que je descends, alors il m’amène loin et le retour, c’est compliqué » (Kadiatou).</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:14pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-weight:bold">La mémorisation « par cœur »</span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Les quatre personnes expliquent qu’elles essaient de mémoriser les trajets faits en amont avec une personne qui les accompagnent : « Quand mon amie m’a accompagnée pour aller à l’association qui nous aidait et qui se trouve à Hôtel de Ville, j’ai bien mémorisé l’adresse pour y aller toute seule » (Zoya). Les compétences de mémorisation sont également mobilisées dans le cadre professionnel. Par exemple, Issa nous explique qu’il a appris son métier de chauffeur de bus dans son pays d’origine sans savoir lire : « il [le chauffeur] prend un apprenti [qui] monte en haut et place les bagages sur le bus… Toi, tu es là pour accompagner le chauffeur. Toi, tu es là comme apprenti. Tu apprends le trajet comme ça, un peu, un peu ». Il précise qu’il apprend ainsi à la fois le trajet et les panneaux par cœur. (Issa).</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Dans le cadre des entretiens, nous avons également remarqué que trois des enquêtées disait éprouver des difficultés à mémoriser les lettres, les dates et même à mémoriser tout simplement. Aïssatou par exemple, raconte qu’elle ne peut pas connaître les dates de naissance des membres de sa famille. Elle parvient à donner le jour et le mois de naissance de son mari mais ne sait pas en quelle année il est né. Et Zoya explique qu’elle oublie tout ce qu’elle apprend en formation presque instantanément, dès que la séance est terminée. Kadiatou mentionne également un problème de mémoire depuis sa jeune enfance : « J’ai un problème depuis ma naissance, j’ai un problème de mémoire. J’ai quelque chose : j’oublie vite et je n’arrive pas à retenir ».</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">En tentant d’analyser les raisons de ces problématiques de mémorisation, toujours en observant les données issues des entretiens, on s’aperçoit que ces difficultés peuvent être corrélées au parcours de vie des personnes. Lorsque Zoya nous explique qu’elle oublie tout ce qu’elle vient d’apprendre en formation, elle précise : « J’apprends des choses en classe, mais dès que je sorte, j’oublie tout. J’ai une mauvaise mémoire à cause du désespoir que j’ai vécu. Ça me fatigue ». Elle donnera des détails concernant le « désespoir » : violences subies dans l’enfance, mauvaises conditions de vie lors des premiers mois de son arrivée en France, vie dans la rue, difficultés économiques. </span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Kadiatou raconte la maltraitance à l’école coranique : « À l’école, il n’y avait pas de patience, quand tu comprends pas, ils tapent. Moi, j’avais peur. » Ces conditions difficiles sur l’école coranique sont également décrits dans un autre travail de recherche (Bonnet et Delanoë (2023 : 180) : « Là-bas, si on ne travaille pas (…) J’ai été tapé beaucoup de fois. Même parfois on ne mange pas. ».</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Les parcours de vie difficiles provoquent un épuisement intellectuel et une « indisponibilité cognitive » (Pourtois, 2004 : 54) observables chez les personnes migrantes en général et pas uniquement chez les personnes en situation d’alphabétisation. Les difficultés à mémoriser peuvent également venir des problèmes de sommeil, par exemple mentionnés par Zoya et Kadiatou, eux-mêmes provenant des parcours de vie traumatisants ou difficiles. Or, les travaux en psychologie cognitive nous montrent que le sommeil est l’un des piliers ou mécanismes qui modulent la capacité d’apprendre (Dehaene, 2020).</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:14pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-weight:bold">Compétences littéraciques </span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Nous avons précédemment mentionné les difficultés des personnes en situation d’alphabétisation pour s'organiser sans passer par la trace écrite. </span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Ça ne veut pas dire que ce « geste de noter » n'existe pas ou qu’il n’y ait pas du tot de trace écrite dans leur quotidien. on voit par exemple que Zoya va noter, sans doute recopier, une date un rendez-vous, et sa stratégie personnelle ça va être de l'afficher chez elle dans des endroits stratégiques, où elle ne risque pas de les oublier, ou de garder une trace écrite dans son sac partout avec elle (on peut supposer qu’elle pourra les montrer à une tierce personne pour se faire aider si besoin). Pour Issa et Aïssatou, </span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">« Pourquoi j’oublie pas mes rendez-vous ? Je les colle ici < elle montre un endroit à côté du coin cuisine sur le mur où sont collés des post-it > Quand c'est là comme ça, je vois ».</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:14pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-weight:bold">Décoder la première lettre </span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Bien que les personnes enquêtées ne possèdent pas réellement de compétences de lecture, cela ne signifie pas qu’elles ne mobilisent aucune compétence littéracique. Les quatre personnes enquêtées disent s’appuyer sur la connaissance des lettres de l’alphabet pour repérer des mots qu’elles ne sont pas en mesure de lire en entier. </span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Aïssatou explique par exemple que lorsqu’elle reçoit un courrier ou un SMS de l’OFII, ou de la CAF, elle reconnaît les lettres associée ensemble et sait qui lui écrit. Il est difficile de dire si elle fait appel aux compétences liées au stade logographique ou si elle décode mais il est probable qu’elle identifie à présent ce signe en tant que tel. </span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Les quatre personnes enquêtées font également appel à leur mémoire pour déchiffrer des lettres et des noms d’arrêts de métro ou de bus. Elles ne s’appuient pas uniquement sur les repères visuels mais également sur l’écrit en essayant de décoder les mots dont elles ont besoin pour se déplacer en faisant appel à leur connaissance de lettres qui font partie de leur répertoire connu. Issa s’appuie sur le P et le D pour reconnaître « direction Part-Dieu » (centre commercial à Lyon, lieu où il se rend régulièrement). Zoya sait reconnaître le F pour Flachet ou le G pour Gratte-Ciel (arrêts de métro à Villeurbanne où elle s’arrête souvent). Elle explique elle-même : « Je travaille sur la reconnaissance de la première lettre pour éviter de me perdre ». Aïssatou repère des mots qui commencent par la lettre D (comme Doctolib) parce que c’est la première lettre de son nom de famille : « Sur mon téléphone, j’ai vu D comme mon nom. J’ai dit : ça c’est Doctolib ».</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">La réussite dans la mobilité tient donc une place importante dans le processus d'entrée dans l'écrit. En effet, Issa et Zoya ne parviennent pas à écrire leur nom. Zoya explique qu'elle ne connaît que les lettres de l’alphabet dont elle a besoin pour aller dans les lieux importants pour elle. Comme l’écrit Barth-Rabot (2023), « l’absence affichée de pratique ne signifie pas nécessairement une non-lecture absolue, mais plutôt une présentation de soi comme non-lecteur/non-lectrice, qui est une manière de se situer par rapport à des normes sociales ».</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:14pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-weight:bold">Stratégie qui consiste à contourner l’utilisation des outils numériques</span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">On l’a vu, le téléphone n’est pas utilisé pour l’utilisation des applications. Mais il se trouve que les personnes enquêtées utilise cet outil d’une autre manière. </span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Elles vont par exemple utiliser le téléphone pour prendre des photos ou filmer leur environnement qu’elles envoient par téléphone à un proche, qui va identifier le lieu et les orienter à distance. Zoya explique : « J’appelle mon mari par exemple et je lui dis que dans cette station, je vois telle chose, et lui, il me dit quoi faire » ou « J’ai appelé mon fils, il m’a demandé de prendre une photo de la station où je me trouvais. J’étais dans la rue et j’ai pris une photo. Alors, il m’a indiqué quel métro prendre ».</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Concernant l’achat de ticket à la machine, aucune des personnes enquêtées n’utilise cette fonctionnalité. Kadiatou explique par exemple que lorsqu’elle est seule et que personne ne peut l’aider à acheter un ticket à la machine, elle monte dans n'importe quel bus pour acheter un ticket et elle en ressort aussitôt, avant que le conducteur ne démarre, pour aller prendre le tramway. Aïssatou, elle, utilise une autre stratégie lorsqu’elle ne sait pas comment acheter un ticket : « Si j'ai pas de tickets, il y a des gens qui sortent du métro, ils savent qu'ils vont plus l'utiliser, ils déposent ».</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:14pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-weight:bold">Combinaison de plusieurs stratégies</span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Au cours de l’analyse des données, on observe que les personnes ne se contentent pas d’une seule stratégie. En réalité, lorsqu’elles préparent ou réalisent un trajet dans la ville, elles combinent presque systématiquement plusieurs stratégies, très souvent deux stratégies mais parfois même trois ou quatre stratégies. La stratégie sociale, la plus couramment mobilisée (par exemple demander à un passant d’indiquer où prendre le bus), est souvent associée à celle qui consiste à s’appuyer sur des repères visuels : « Quand c’est important, je préfère aller avec mon mari une fois avant le RDV et je regarde ce qu’il y a de très repérable dans le coin : restaurant, boulanger. » (Zoya), mais également, s’appuyer sur des repères visuels et auditifs puis demander à un proche : « Quand je vois que c’est bientôt l’arrêt, je demande au téléphone à Dina, je répète le nom de l’arrêt et comme ça, elle dit combien d’arrêts il reste et quand je descends » (Kadiatou).</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:14pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-weight:bold">Les sentiments et les émotions</span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Même s’ils ont été évidemment évoqués en filigrane, dans la dernière partie de cet article nous souhaitons présenter les émotions et les sentiments décrits par ces quatre personnes, et qui, nous en faisons l'hypothèse peuvent être partagés par de nombreuses personnes en situation d'alphabétisation.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Pour reprendre les propos de Guichon, Grassin, Mathian et Cunty (2022 : 4) : « la familiarisation avec une nouvelle ville se fait au prix d’un travail émotionnel » ; « les émotions liées à la fréquentation des lieux sont les traces d’un travail d’adaptation à l’inconnu ». Nous pensons que s’intéresser aux émotions peut aider à comprendre les stratégies mises en place pour se déplacer dans la ville. </span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Les personnes enquêtées mentionnent particulièrement le sentiment de honte et de gêne qu’elles éprouvent régulièrement dans Les situations où elles sont confrontées à demander de l’aide. Mais elles évoquent également la honte, la gêne de ne pas avoir été scolarisées, d’être « sans connaissance » : « Au début, j’avais honte de devoir commencer à zéro parce que je suis “sans connaissances”. J’ai grandi sans aller à l’école » (Zoya) ; la honte de ne pas comprendre : « J’ai honte de ne pas comprendre si quelqu’un me pose une question et de répondre » (Zoya), honte de ne pas réussir à apprendre, de ne pas pouvoir aller pour communiquer : « je voudrais parler pour expliquer les gens, aller vers les gens, discuter ou autre, sans avoir la gêne ou la honte » (Kadiatou).</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Le sentiment d’impuissance a été évoqué par Zoya : « Je veux faire partie de cette société. Je ne veux plus ignorer ! Je ne veux plus me sentir impuissante ! » mais également par Aïssatou lorsqu’elle a dû signer des documents de décharge médicale pour sa fille sans les comprendre réellement alors qu’elle sentait qu’ils étaient malgré tout importants. </span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Le stress et la peur sont également des sentiments qui sont très présents tout au long des entretiens et notamment celui de Kadiatou. Sur une heure d’entretien, elle prononce dix-neuf fois le mot peur. Elle emploie également les mots angoisse, panique et même je pleure panique. Elle évoque un stress qui donne des maux de ventre : « Quand je prends un téléphone pour appeler, j’ai peur, je suis stressée, j’ai mal au ventre » (Kadiatou). Un stress qui ne semble donc pas généré uniquement par le fait de ne pouvoir lire ou de ne pas pouvoir se déplacer, mais aussi le fait de ne pas pouvoir communiquer à l’oral. Par exemple, Kadiatou explique que s’exprimer au téléphone pour prendre un rendez-vous la stresse énormément, mais également tout type de situation nouvelle ou inconnue. La peur et la panique sont évoquées par Kadiatou lorsqu'elle ne sait pas où descendre du tramway et que sa cousine ne répond pas au téléphone pour l'aider. Tout comme le stress qui s'accompagne de maux de ventre, la peur s'accompagne de bouffées de chaleur et de pleurs. C’est la peur de devoir se déplacer seule, la peur de ne pas réussir, la peur d’utiliser la machine pour acheter un ticket ou retirer de l’argent, la peur de se perdre dans les transports : « Il y a toujours aussi la peur, des fois même je panique, et si je prends le contraire [la direction contraire], que c’était pas le bon [bus] ! » (Kadiatou) ; ou la peur d’aller voir un nouveau médecin qu’elle ne connaît pas, à qui il va falloir tout réexpliquer, peur de manquer un rendez-vous, peur également de manquer d’argent.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Kadiatou évoque par ailleurs, nous l’avons abordé, la peur des violences physiques et psychologiques qu’elle a pu subir dans sa vie, à l’école par exemple mais aussi à d’autres moments de son parcours de vie.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Zoya et Aïssatou évoque beaucoup la peur de se perdre : « j’avais peur quand je connaissais pas les lignes » et la peur à cause des documents qu’on lui demande de signer à la maternité à la naissance de sa fille alors qu’elle ne comprend rien à l’oral et surtout ne peut pas lire les documents (Aïssatou)</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Ce qui ressort également énormément de ces entretiens, c'est la solitude et le sentiment d'être isolée, l'impression de ne pas pouvoir faire appel à quelqu'un lorsqu'on est en difficulté exacerbé par le fait que les situations de difficulté sont courantes : « C’était trop difficile ! Je me suis sentie trop seule, sans amis, sans proches » ; « J’étais comme une personne mal voyante ! » </span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Le manque de confiance en soi est également très prégnant dans le discours de ces personnes. On perçoit également dans le discours une certaine dévalorisation de soi et un faible sentiment d’auto-efficacité. Les difficultés vécues influencent consciemment ou non, les attitudes, la motivation, la persévérance face à une situation d’apprentissage. Par exemple, Kadiatou dit : « Je suis bloquée (…) c’est ça qui me coince, c’est le manque de confiance » (Kadiatou). Ce manque de confiance peut expliquer pour quelles raisons les personnes que nous avons interrogées éprouvent des difficultés à essayer de se déplacer en autonomie dans des endroits nouveaux. Selon Lavoie, Levesque, Abin-Horth (2008), « les adultes qui ont un faible sentiment d’auto-efficacité au regard d’une tâche la perçoivent comme potentiellement difficile, vivent un stress et se sentent plus vulnérables devant celle-ci.» Donc lorsque la tâche est décrite comme difficile, on observe un sentiment de vulnérabilité, une peur de l'échec. </span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:16pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-weight:bold">Conclusion</span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Bien que les personnes que nous avons rencontrées évoquent la peur et l'angoisse à l'idée de communiquer et de ne pouvoir être autonomes, elles réussissent chacune à leur façon étonnamment bien à exprimer leurs sentiments vis-à-vis de leur situation d'insécurité socio-langagière et socio-scripturale et décrivent précisément les stratégies cognitives qu’elles mettent en place pour se déplacer.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Les éléments saillants dans cette analyse montrent que les personnes non scolarisées et non lectrices développent des stratégies au sens large, stratégies de déplacement mais également stratégies d’apprentissage en autonomie, par exemple développer la conscience qu’un mot peut être décodé dans son contexte grâce à son initiale. Cette stratégie peut être considérée comme une stratégie très élaborée si l’on considère que le fait de ne pas avoir été scolarisé implique un défaillance des compétences de l’« apprendre à apprendre ». Ces éléments sont très utiles aux formateurs sur le terrain qui peuvent s’intéresser aux stratégies des apprenants en les interrogeant, prenant en compte qu’il existe certaines récurrences dans les stratégies utilisées par les non-lecteurs, comme nous l’avons montré ici. Une démarche intéressante serait donc de s’appuyer sur ces stratégies, les utiliser pour la conception de supports pédagogiques et séances, de s’adosser comme l’a préconisé Gaté (2005 : 80) sur une approche à la fois individualisée et triple : phonique, scripturale et sémantique, où le formateur prend en compte l’approche avec laquelle chacun se sent mieux pour apprendre et développer une mobilité autonome.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:16pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="font-weight:bold">Bibliographie</span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Adami, H. (2020). Enseigner le français aux adultes migrants. Hachette FLE.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="background:white"><span style="color:#323232">Adami, H., & Leclercq, V. (Éds.). (2012). <i>Les migrants face aux langues des pays d’accueil : Acquisition en milieu naturel et formation</i>. Presses Universitaires du Septentrion.</span></span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="background:white"><span style="color:#323232">Barré-de Miniac, C. (1994) Écrire et faire écrire: actes de l'Université d’été. ENS Éditions.</span></span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="background:white"><span style="color:#323232">Barth-Rabot</span></span><span style="background:white"><span style="color:#323232">, C. (2023). Chapitre 5. Se dire non-lecteur/non-lectrice. Dans : , C. Barth-Rabot, La lecture: Valeur et déterminants d'une pratique (pp. 113-134). Paris: Armand Colin.</span></span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="background:white"><span style="color:#232323">Barthes R., 1985, L’aventure sémiologique, Seuil, Paris.</span></span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="background:white"><span style="color:#232323">Bereiter, C., & Scardamalia, M. (1987). The Psychology of Written Composition. Hillsdale, NJ : Lawrence Erlbaum Associates.</span></span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Bonerandi, E. (2004) « De la mobilité en géographie », Géoconfluences, novembre 2004. http://geoconfluences.ens-lyon.fr/doc/transv/Mobil/MobilScient.htm </span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="background:white"><span style="color:#323232">Bonnet</span></span><span style="background:white"><span style="color:#323232">, D. & Delanoë, D. (2023). L’évolution des modèles éducatifs en situation migratoire Des pères originaires d’Afrique subsaharienne. L'Autre, 24, 174-185.</span></span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="background:white"><span style="color:#323232">Bouchetal</span></span><span style="background:white"><span style="color:#323232">, T. (2022). Chapitre 6. L’entretien biographique : comprendre la formation du sujet et l’épaisseur du social. Dans : Brigitte Albero éd., Enquêter dans les métiers de l’humain: Traité de méthodologie de la recherche en sciences de l’éducation et de la formation. Tome II (pp. 231-242). Dijon: Éditions Raison et Passions.</span></span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Cantor M., Norem J., Brower A. (1987) Life Tasks, Self-Concept Ideals, and Cognitive Strategies in a Life Transition. Journal of Personality and Social Psychology, Vol. 53, No. 6.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Defays, J-M. (2003) Le français langue étrangère et seconde. Enseignement et apprentissage, avec la collaboration de Deltour Sarah. Mardaga.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="background:white"><span style="color:#323232">Dehaene, S. (2020). « Psychologie cognitive expérimentale », L’annuaire du Collège de France [En ligne], 118 |</span></span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="background:white"><span style="color:#323232">Delory-Momberger</span></span><span style="background:white"><span style="color:#323232">, C. (2019). Vocabulaire des histoires de vie et de la recherche biographique. Érès.</span></span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="background:white"><span style="color:#323232">Denis</span></span><span style="background:white"><span style="color:#323232">, M. (2016). Petit traité de l’espace : Un parcours pluridisciplinaire. Mardaga.</span></span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Dion E., Kushtanina V., Lagier E., Pape E., Perrin-Joly C., Plé J., Robin P., Savinel B., Schlagdenhauffen, R. (dir.), Parler de soi. Méthodes biographiques en sciences sociales, Paris, EHESS, series: « En temps et lieux », 2020, 314 p. </span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black"><span style="background:white"><span style="color:#323232">Gaté</span></span><span style="background:white"><span style="color:#323232">, J. (2005). Les difficultés de lecture : approche plurielle. Enfances & Psy, n°28, 78-86.</span></span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Guichon, N., Grassin, J.F., Mathian, H. & Cunty, C. (2022). Représentations du processus d'inscription dans le territoire des étudiants chinois pendant leur séjour en France. In L. Ouvrard, & C. Brumelot (Éds.)., Numérique et didactique des langues et cultures. Nouvelles pratiques et compétences en développement, Paris : Éditions des archives contemporaines.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Lavoie N., Levesque J.-Y., Aubin-Horth S. (2008). La persévérance des adultes en alphabétisation. Modèle théorique et fiches pratiques. Les Éditions Appropriation. Université du Québec.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Leclère M., Le Ferrec L. (2018). Faire entrer dans l’écrit à l’âge adulte : discours de formateurs-trices et perspectives pour la formation des enseignant-e-s. Revue en ligne leseforum.ch. Nummer 2/2018.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Lynch K., 1960, K. (1960). The image of the city. Cambridge, MA : The MIT Press.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Mondada L., 2000, Décrire la ville : construction des savoirs urbains dans l’interaction et dans le texte, Paris, Anthropos.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Nicourd, S., (2023), « Rendre intelligible le “baroque des biographies” par une analyse des temporalités ». Journée d’étude Ouvrir la boîte noire de l’analyse de l’entretien biographique. Centre Max Weber et Laboratoire de l’Éducation-LLE. Lyon.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Orofiamma, R. (2008). Les figures du sujet dans le récit de vie: En sociologie et en formation. Informations sociales, 145, 68-81. </span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Paye, S. (2012). L’entretien biographique en milieu savant : implications méthodologiques. PUN-Éditions universitaires de Lorraine. Les uns et les autres. Biographies et prosopographies en histoire des sciences, Presses Universitaires de Nancy, pp. 447-482.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Pourtois, J-P et al. (2004) Souffrances affectives, cognitives et sociales des parents en exil. Pensée plurielle n°8 (p. 51-60)</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Rivière V., Gandon E., Kachee B. Les supports pédagogiques dans le champ de l’alphabétisation des adultes : analyse d’une séance de formation sur la mobilité urbaine. <span style="background:white">In. Bruley C., Cadet L. (dir.), </span><span lang="FR-BE" style="background:white">Enseigner le français en contexte en migratoire : ingénieries, littératie, inclusion, </span><span style="background:#fdfdfd">Bruxelles, Peter Lang, col. Champs didactiques plurilingues, (à paraître en 2024). </span></span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Thierry Ramadier. La géométrie socio-cognitive de la mobilité quotidienne : distinction et continuité spatiale en milieu urbain. Psychologie. Université de Nîmes, 2010. </span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Stévenin, F., & Touati, A. (2018). La prise en compte du trauma dans la pratique professionnelle auprès des jeunes étrangers isolés. VST - Vie sociale et traitements, 138(2), 5‑12.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Tabbal Amella S. (2013) Analyser des parcours d'alphabétisation : les enjeux de l’écart entre recherche et Pratique. Revue TFREFA.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Thibaudeau, C. (2006). Mineurs étrangers isolés : Expérience brutale de la séparation. La lettre de l’enfance et de l’adolescence, 64(2), 97‑104.</span></span></span></p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"> </p>
<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"><em><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:Arial, sans-serif"><span style="color:black">Nous remercions le LABEX ASLAN (ANR-10-LABX-0081) de l'Université de Lyon pour son soutien financier dans le cadre du programme "Investissements d'Avenir" (ANR-11-IDEX-0007) de l'Etat Français géré par l'Agence Nationale de la Recherche (ANR).</span></span></span></em></p>
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<p class="TDFLE-Corpsdetexte" style="text-align:justify"> </p>
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<hr align="left" size="1" width="33%" />
<div id="ftn1">
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="color:black"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><a href="#_ftnref1" name="_ftn1" style="color:blue; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="font-family:"Arial",sans-serif"><span style="color:black">[1]</span></span></span></span></span></a> <span style="font-size:10.0pt"><span style="background:white"><span style="font-family:"Aptos Display",sans-serif"><span style="color:#373737">Le <i>nous</i> (ainsi que les autres marques de quatrième personne) employé ici fait référence à un <i>nous</i> de pluriel impliquant les six personnes (chercheures et praticiennes) constituant ce projet de recherche.</span></span></span></span></span></span></span></p>
</div>
<div id="ftn2">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:-16.95pt"><span style="font-size:12pt"><span style="color:black"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><a href="#_ftnref2" name="_ftn2" style="color:blue; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:"Arial",sans-serif"><span style="color:black">[2]</span></span></span></span></span></a> <span style="background:white"><span style="font-family:"Aptos Display",sans-serif"><span style="color:#373737">chiffres issus de https://www.observatoire-des-territoires.gouv.fr/part-des-immigres-dans-la-population</span></span></span></span></span></span></p>
</div>
<div id="ftn3">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:-16.95pt"><span style="font-size:12pt"><span style="color:black"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><a href="#_ftnref3" name="_ftn3" style="color:blue; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:"Arial",sans-serif"><span style="color:black">[3]</span></span></span></span></span></a> Décodage : terme emprunté à la sémiologie renvoyant à la relation entre signifiant et signifié d’un élément matériel et non à la notion de décodage en littératie (Ramadier, 2010)</span></span></span></p>
</div>
<div id="ftn4">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:-16.95pt"><span style="font-size:12pt"><span style="color:black"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><a href="#_ftnref4" name="_ftn4" style="color:blue; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:"Arial",sans-serif"><span style="color:black">[4]</span></span></span></span></span></a> Le laboratoire ICAR finance le projet ECAEST et où se déroule les réunions de travail de l’équipe</span></span></span></p>
</div>
<div id="ftn5">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:-16.95pt"><span style="font-size:12pt"><span style="color:black"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><a href="#_ftnref5" name="_ftn5" style="color:blue; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:"Arial",sans-serif"><span style="color:black">[5]</span></span></span></span></span></a> association loi 1901 créée en janvier 2017, l'un des terrains de recherche du projet ECAEST</span></span></span></p>
</div>
<div id="ftn6">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:-16.95pt"><span style="font-size:12pt"><span style="color:black"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><a href="#_ftnref6" name="_ftn6" style="color:blue; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:"Arial",sans-serif"><span style="color:black">[6]</span></span></span></span></span></a> Contrat d’Intégration Républicaine</span></span></span></p>
</div>
<div id="ftn7">
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:-16.95pt"><span style="font-size:12pt"><span style="color:black"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><a href="#_ftnref7" name="_ftn7" style="color:blue; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:10.0pt"><span style="font-family:"Arial",sans-serif">[7]</span></span></span></span></a> Office français de l’immigration et de l’intégration</span></span></span></p>
</div>
<div id="ftn8">
<p style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="color:black"><span style="font-family:"Times New Roman", serif"><a href="#_ftnref8" name="_ftn8" style="color:blue; text-decoration:underline" title=""><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span class="MsoFootnoteReference" style="vertical-align:super"><span style="font-size:12.0pt"><span style="font-family:"Arial",sans-serif">[8]</span></span></span></span></a> <span style="font-size:10.0pt"><span style="background:white">Par souci de confidentialité, nous avons modifié les prénoms des personnes enquêtées.</span></span></span></span></span></p>
<p class="MsoFootnoteText" style="text-align:justify; text-indent:-16.95pt"> </p>
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