<h1><span style="font-size:16px;"><strong>Une d&eacute;marche empirique et globale</strong></span></h1> <p style="text-align: justify;">&laquo; Fruit de la mission confi&eacute;e par Olivier V&eacute;ran &agrave; Mathieu Klein en janvier 2022, le Livre vert du travail social formule une s&eacute;rie de constats sur le contexte social et &eacute;conomique, les &eacute;volutions du travail social, la situation actuelle des formations sociales et les enjeux d&rsquo;attractivit&eacute; des m&eacute;tiers &raquo;2 . Sur la base de ce travail, les membres du Haut Conseil du Travail Social (HCTS) ont particuli&egrave;rement point&eacute; trois enjeux. Il s&rsquo;agit de promouvoir un travail social qui articule plus finement vie professionnelle et vie politique, qui doit tendre vers une revalorisation de l&rsquo;importance des fonctions sociales du secteur et qui&nbsp;in fine doit permettre d&rsquo;accro&icirc;tre le pouvoir d&rsquo;agir des travailleurs sociaux et des personnes accompagn&eacute;es. Ces enjeux appellent &agrave; construire un mod&egrave;le du travail social a) de proximit&eacute;, b) producteur de valeurs relationnelles, intellectuelles et mat&eacute;rielles durables et c) s&rsquo;appuyant sur la diversit&eacute; des exp&eacute;riences empiriques individuelles (Klein, 2022). La notion de Travail Social Vert (TSV) semble r&eacute;pondre &agrave; ces enjeux en proposant une action sociale en milieu ouvert ou dans les services de droit commun afin de concilier accompagnement social, autod&eacute;termination des publics et des acteurs et enjeux &eacute;cologiques locaux. Cette innovation sociale, mise en &oelig;uvre par et pour les acteurs d&rsquo;un territoire, s&rsquo;inscrit dans une perspective de lutte durable contre les vuln&eacute;rabilit&eacute;s et pour l&rsquo;am&eacute;lioration de l&rsquo;environnement de vie. Nous parlerons en ce sens d&rsquo;une logique de transition socio-environnementale du travail social. Notre article vise &agrave; identifier les leviers permettant aux futurs travailleurs sociaux de s&rsquo;inscrire, au cours de leur formation, dans cette mutation sociale et environnementale.</p> <h1><span style="font-size:16px;"><strong>De la transition socio-&eacute;cologique au travail social vert</strong></span></h1> <p style="text-align: justify;">La transition socio-&eacute;cologique interroge la relation entre les soci&eacute;t&eacute;s et leur environnement. Il s&rsquo;agit alors de repenser les modes de participation, de nos valeurs et notre mod&egrave;le &eacute;conomique (Laigle, 2018). Dans un monde en mutation, la transition implique une conscience collective et un pouvoir d&rsquo;agir des soci&eacute;t&eacute;s tant le sujet des mutations est global. C&rsquo;est pourquoi nous caract&eacute;risons ici la transition comme avant tout le fruit de la mise en relation d&rsquo;acteurs citoyens, associatifs et &eacute;conomiques, sur un territoire (g&eacute;ographique, social, culturel, naturel) dont l&rsquo;objectif est de redonner un sens &eacute;cologique aux pratiques sociales. La transition est donc prot&eacute;iforme et contextuelle. Il peut s&rsquo;agir d&rsquo;une contribution des citoyens et des acteurs territoriaux &agrave; une r&eacute;silience locale (Hopkins &amp; Becken, 2014) ; de l&rsquo;&eacute;mergence de niches d&rsquo;exp&eacute;rimentations (Geels &amp; Schot, 2007) afin de faire &eacute;voluer les solutions sociotechniques &eacute;nerg&eacute;tiques ou encore d&rsquo;une restructuration des modes de vie, des institutions ou des actions sociales (Rotmans &amp; Ficher-Kowalski, 2009). De toutes ces approches, il ressort que la transition n&rsquo;est pas un processus lin&eacute;aire. Elle est mise en mouvement par des rencontres entre des syst&egrave;mes de valeurs, des exp&eacute;rimentations et une &eacute;volution des pratiques de vie qui s&rsquo;inscrivent dans des dynamiques d&rsquo;action collective, une mise en synergie des initiatives et une capitalisation des savoir-faire. Cette mise en synergie est document&eacute;e dans l&rsquo;histoire du travail social &agrave; partir de la notion de TSV. Il s&rsquo;agit d&rsquo;une approche transdisciplinaire qui aspire &agrave; g&eacute;n&eacute;rer des r&eacute;ponses aux multiples crises environnementales de la plan&egrave;te, car les crises environnementales perp&eacute;tuent des injustices environnementales qui doivent &ecirc;tre &eacute;radiqu&eacute;es avant que ses cons&eacute;quences d&eacute;l&eacute;t&egrave;res ne deviennent irr&eacute;versibles selon Dominelli (2018). Le TSV est donc d&eacute;fini comme &laquo; une pratique professionnelle holistique du travail social &raquo; (Dominelli, 2012), qui se concentre sur les interd&eacute;pendances entre les personnes, l&rsquo;organisation sociale des relations entre les personnes, l&rsquo;&eacute;cosyst&egrave;me naturel ainsi que la corr&eacute;lation entre les crises socio-&eacute;conomiques et individuelles. Dans la litt&eacute;rature (i.e. Besthorn, 2012) le TSV questionne &eacute;galement les sch&eacute;mas de production et de consommation &agrave; l&rsquo;&eacute;chelle locale ou nationale. Ainsi le but du TSV est d&rsquo;&oelig;uvrer pour une r&eacute;forme des pouvoirs socio-politiques et &eacute;conomiques qui ont un impact d&eacute;l&eacute;t&egrave;re sur la qualit&eacute; de vie des populations pr&eacute;caris&eacute;es d&rsquo;un territoire. Cette approche sugg&egrave;re d&rsquo;aborder ces probl&eacute;matiques en transformant, notamment, la mani&egrave;re dont les acteurs sociaux locaux conceptualisent leur soci&eacute;t&eacute;, leurs relations interpersonnelles et leurs relations avec l&rsquo;&eacute;cosyst&egrave;me vivant. La notion d&rsquo;&eacute;galit&eacute; est fondamentale dans cette conceptualisation. Doyle insiste m&ecirc;me sur le fait que la notion de justice environnementale est une valeur fondamentale des travailleurs sociaux &laquo; verts &raquo; (cit&eacute;s par&nbsp;Portillo, 2019). Ainsi, le TSV poss&egrave;de un caract&egrave;re ambitieux, car il demande le d&eacute;veloppement constant de nouveaux concepts th&eacute;oriques et de nouveaux mod&egrave;les de pratiques. Les groupes sociaux d&rsquo;un territoire sont alors amen&eacute;s, sous l&rsquo;impulsion d&rsquo;un travailleur social ou d&rsquo;une exp&eacute;rimentation sociale, &agrave; construire des r&eacute;ponses aux probl&eacute;matiques environnementales en fonction d&rsquo;un contexte local. Les travailleurs sociaux ont un r&ocirc;le de pivot &agrave; remplir &agrave; travers la mobilisation de communaut&eacute;s autour d&rsquo;un nouveau pouvoir d&rsquo;action. Pour interroger la mise en &oelig;uvre de ces concepts de transition et de TSV, il nous faut des approches scientifiques qui d&eacute;passent les barri&egrave;res entre les disciplines et les m&eacute;thodes. Le Rapport mondial sur les sciences sociales (Clair, 2015) satisfait &agrave; cette exigence en enclenchant une dynamique vers des syst&egrave;mes de connaissances plus int&eacute;gr&eacute;s, vers ce que l&rsquo;on appelle parfois la &laquo; science de la durabilit&eacute; &raquo;. Le rapport analyse les tendances et leurs cons&eacute;quences, les conditions n&eacute;cessaires au changement dans les pratiques et les interpr&eacute;tations sociales, ainsi que les responsabilit&eacute;s et l&rsquo;&eacute;thique, les processus d&eacute;cisionnels et les questions de gouvernance. Il s&rsquo;agit alors, dans cet article, de poser les bases d&rsquo;un programme de recherche empirique du travail social en faveur de la compr&eacute;hension des leviers &agrave; actionner pour engager les futurs travailleurs sociaux dans un processus collectif de transition. Par la notion de collectif, nous entendons l&rsquo;ensemble des relations construites entre l&rsquo;aidant et l&rsquo;aid&eacute; sur un m&ecirc;me plan d&rsquo;&eacute;galit&eacute;. Il s&rsquo;agit par exemple du fait d&rsquo;&ecirc;tre citoyen, acteur d&rsquo;une transition &eacute;cologique ou encore co-architecte d&rsquo;une politique publique dans un espace g&eacute;ographique auquel chacun s&rsquo;identifie.</p> <h1><span style="font-size:16px;"><strong>Produire collectivement un processus de transition </strong></span></h1> <p style="text-align: justify;">En r&eacute;f&eacute;rence au courant de la cat&eacute;gorisation sociale (Castel &amp; Lacassagne, 2011), nous positionnons chacune des parties prenantes du TSV dans un r&ocirc;le d&rsquo;acteur, orient&eacute; vers un but commun, afin que tous disposent d&rsquo;une position psycho-sociale satisfaisante. L&rsquo;enjeu est alors de voir comment le travail social peut s&#39;inscrire dans les diff&eacute;rentes formes d&rsquo;ing&eacute;nierie de &ldquo;capacitation territoriale&rdquo; telles qu&rsquo;elles &eacute;mergent dans le champ de la transition socio&eacute;cologique. Cette ing&eacute;nierie d&eacute;finit comment le territoire, en&nbsp;maillant ses dimensions g&eacute;ographiques, historiques, &eacute;conomiques, &eacute;cologiques et politiques peut s&rsquo;envisager comme un espace d&rsquo;enqu&ecirc;te, de participation et de d&eacute;lib&eacute;ration pour constituer un environnement favorable au pouvoir de r&eacute;alisation des personnes&quot; (Lapostolle, 2021). Il s&rsquo;agit de d&eacute;velopper l&rsquo;agenc&eacute;it&eacute; collective, c&rsquo;est-&agrave;-dire la capacit&eacute; d&rsquo;action des groupes &agrave; atteindre des objectifs fix&eacute;s collectivement d&eacute;passant les int&eacute;r&ecirc;ts individuels (Ibrahim 2008). La sp&eacute;cificit&eacute; de cette capacit&eacute; collective est qu&rsquo;elle n&rsquo;existe qu&rsquo;avec le groupe, tout en gardant &agrave; l&rsquo;esprit que les capacit&eacute;s individuelles ne sont qu&rsquo;une condition&nbsp;n&eacute;cessaire, mais non suffisante, des capacit&eacute;s collectives (Loubet et al, 2011). Il s&rsquo;agit d&rsquo;activer les processus sous-jacents aux relations intergroupes (Tajfel, 1982) pour mettre au jour ce qui peut g&ecirc;ner ou au contraire faciliter le passage d&rsquo;une posture individuelle de travailleur social ou de personne vuln&eacute;rable vers une identit&eacute; collective d&rsquo;acteur de la transition au travers de la co-construction d&rsquo;une perception territoriale &eacute;cologique et sociale. Ainsi, la saisie collective d&rsquo;une exp&eacute;rimentation territoriale autour&nbsp;d&rsquo;un projet de transition dans laquelle se joue une mission d&rsquo;accompagnement sociale, participe d&rsquo;une d&eacute;marche capabilisante ou les activit&eacute;s et ressources du territoire sont les objets permettant l&rsquo;agenc&eacute;it&eacute; collective. Il s&rsquo;agit, pour les travailleurs sociaux, d&rsquo;inviter et d&rsquo;accompagner les citoyens a, a) investiguer la nature et la potentialit&eacute; de leur territoire en termes d&rsquo;activit&eacute; &agrave; mettre au travail et b) mobiliser un capital social commun, c&#39;est-&agrave;-dire de mettre en &oelig;uvre leurs ressources sociales, intellectuelles et mat&eacute;rielles, issues des interactions culturelles, structurelles qu&rsquo;ils entretiennent et qui leur permettra, &agrave; terme de g&eacute;n&eacute;rer des actions concr&egrave;tes qui transforment l&rsquo;&eacute;cosyst&egrave;me territorial. Cette approche entra&icirc;ne une vision non lin&eacute;aire du d&eacute;veloppement et s&rsquo;accorde pleinement avec une approche multidimensionnelle de la vuln&eacute;rabilit&eacute; et des in&eacute;galit&eacute;s. Elle apporte des justifications et des &eacute;l&eacute;ments de mod&egrave;les th&eacute;oriques et pratiques aux processus participatifs. Ainsi, renforcement de l&rsquo;autonomie et pouvoir des individus d&rsquo;une part, action collective et action sociale ou publique d&rsquo;autre part, sont &eacute;troitement li&eacute;s. Ces questionnements s&rsquo;inscrivent dans la dynamique plus g&eacute;n&eacute;rale du d&eacute;veloppement socialement durable et des conditions susceptibles d&rsquo;assurer cette durabilit&eacute; (Reboud, 2006). C&rsquo;est pourquoi, en compl&eacute;ment de ces approches, nous postulons pour une inscription de la d&eacute;marche dans les travaux relatifs &agrave; l&rsquo;Economie Sociale et Solidaire (Favreau, 2003) et &agrave; l&rsquo;&eacute;conomie territoriale (Soulage, 2015) qui encadre les perspectives de cr&eacute;ation de ressources locales dans un contexte soutenable. En effet, l&rsquo;&eacute;conomie sociale et solidaire territorialis&eacute;e se positionne comme une composante cach&eacute;e de la mondialisation (Favreau, 2003). A l&rsquo;&eacute;chelle mondiale, des &laquo; exp&eacute;riences in&eacute;dites d&#39;&eacute;conomie sociale et solidaire &raquo; comme les coop&eacute;ratives sociales italiennes, les r&eacute;gies de quartier fran&ccedil;aises ou les coop&eacute;ratives de d&eacute;veloppement &eacute;conomique communautaire qu&eacute;b&eacute;coises se d&eacute;veloppent de fa&ccedil;on &agrave; r&eacute;agir aux r&eacute;alit&eacute;s de la mondialisation n&eacute;olib&eacute;rale (Favreau, 2005). Il s&rsquo;agit alors d&rsquo;une &eacute;conomie alternative de n&eacute;cessit&eacute;. N&eacute;anmoins, les initiatives d&rsquo;&eacute;conomie sociale et solidaire s&rsquo;inscrivent aussi dans un mouvement plus profond qui s&rsquo;active &agrave; croiser un nouveau mod&egrave;le &eacute;conomique et d&eacute;mocratique (Demoustier, 2001). C&rsquo;est ce mouvement qui favorise la multiplication des courants politiques nouveaux valorisant le partage du travail et le d&eacute;veloppement d&#39;une &eacute;conomie autre que marchande. Ces initiations passent par la cr&eacute;ation de plateformes d&rsquo;&eacute;changes de services gracieux ou encore par l&rsquo;animation d&rsquo;actions sociales locales pour la protection de l&#39;environnement. Le TSV peut se r&eacute;clamer de ces deux origines. D&rsquo;une part en luttant contre les in&eacute;galit&eacute;s induites par le mode de gouvernance &eacute;conomique national et mondial, d&rsquo;autre part en souhaitant construire une autre relation &agrave; l&rsquo;&eacute;conomie locale, &agrave; l&rsquo;environnement et &agrave; l&rsquo;&eacute;cosyst&egrave;me territorial. Relation qui se veut soutenable pour tous et p&eacute;renne. Nous parlerons alors de coop&eacute;ration locale &agrave; but de d&eacute;veloppement social et environnemental, qui vient d&eacute;passer l&rsquo;objectif unilat&eacute;ral &laquo; d&rsquo;action sociale &raquo; pour venir produire des ressources et des capacit&eacute;s collectives pour le bien social et environnemental.</p> <p><strong>S&rsquo;appuyer sur le TSV pour impulser de nouveaux apprentissages &eacute;thiques et politiques</strong></p> <p style="text-align: justify;">L&rsquo;objet de notre article est d&rsquo;interroger la mani&egrave;re dont les &eacute;tablissements de formation au travail social ont la capacit&eacute; de s&rsquo;emparer des enjeux de la transition socio-&eacute;cologique dans la mise en &oelig;uvre de processus didactiques et p&eacute;dagogiques. Comment ces nouveaux enjeux impactent la fa&ccedil;on de former les &eacute;tudiants ? Nous posons ici deux hypoth&egrave;ses. La premi&egrave;re consiste &agrave; affirmer que cette d&eacute;marche est envisageable d&egrave;s lors que les &eacute;tudiants ou apprenants ont la capacit&eacute; de se positionner comme acteurs de leur formation. La seconde en insistant sur la n&eacute;cessit&eacute; de cr&eacute;er les conditions de l&rsquo;&eacute;mergence des capacit&eacute;s d&rsquo;action et de r&eacute;flexion non seulement orient&eacute;es sur les parcours individuels de vie, mais davantage sur la transformation collective d&rsquo;un milieu de vie, d&rsquo;un territoire. Ces conditions posent alors la question des moyens &agrave; d&eacute;ployer pour produire un effet formatif durable et constructif. Nous proposons ici une vision didactique ax&eacute;e sur une multiplicit&eacute; des exp&eacute;riences d&rsquo;apprentissage (construction des connaissances techniques et th&eacute;oriques, mise en action des r&eacute;seaux d&rsquo;acteurs, identification des tiers lieux de l&rsquo;action sociale) et une diversit&eacute; des positionnements d&rsquo;apprentissages (&eacute;tudiant, exp&eacute;rimentateur, d&eacute;couvreur). De fa&ccedil;on plus pr&eacute;cise, nous nous appuierons sur plusieurs modalit&eacute;s p&eacute;dagogiques identifi&eacute;es par Eric Grasset (2021) dans le domaine de la formation &agrave; l&rsquo;ing&eacute;nierie des transitions notamment a) l&rsquo;organisation d&rsquo;un s&eacute;minaire transversal sur le th&egrave;me du d&eacute;veloppement social en formation initiale &eacute;ducateurs sp&eacute;cialis&eacute;s, &eacute;ducateurs jeunes enfants et assistants de service social lors duquel des visites sur sites dans des structures mettant en &oelig;uvre des pratiques socio-&eacute;cologiques sont organis&eacute;es; b) la mise en place d&rsquo;un module de formation &agrave; l&rsquo;IRTS de Besan&ccedil;on &agrave; destination des travailleurs sociaux dans une logique participative sur la base d&rsquo;une pr&eacute;sentation d&rsquo;une recherche-action ; c) une exp&eacute;rience v&eacute;cue d&#39;un groupe d&#39;&eacute;tudiants lors d&rsquo;un stage collectif inscrit dans la formation pr&eacute;paratoire au Dipl&ocirc;me d&rsquo;Etat d&rsquo;Assistant de Service Social. Il s&rsquo;agit ici de tracer les savoirs exp&eacute;rientiels (Gardien, 2017) mis en &oelig;uvre dans le cadre d&#39;une &eacute;tude de territoire pour l&#39;&eacute;laboration d&#39;un Agenda 2030 (Quetigny, C&ocirc;te d&rsquo;Or) ; d) la participation aux &quot;Journ&eacute;es de l&#39;Economie Autrement&quot; sur &laquo; la transition &eacute;cologique et solidaire qu&rsquo;il nous faut mettre en &oelig;uvre pour faire face au d&eacute;fi immense du changement climatique &raquo;  auxquelles participent les &eacute;ducateurs sp&eacute;cialis&eacute;s en deuxi&egrave;me ann&eacute;e de formation &agrave; l&rsquo;IRTESS de Dijon en rapport avec l&rsquo;objectif de la loi sur l&#39;&eacute;conomie sociale et solidaire de 2014 qui mentionne l&rsquo;id&eacute;e de &quot;Renforcer les politiques de d&eacute;veloppement local durable&quot;. L&rsquo;analyse des diff&eacute;rentes modalit&eacute;s p&eacute;dagogiques utilis&eacute;es est bas&eacute;e sur la distinction utilis&eacute;e par &Eacute;ric Grasset (2021). Ainsi, si la fabrication du processus de formation cherche classiquement &agrave; r&eacute;pondre aux propos de Philippe Zarifian (1996) pour qui travailler consiste &agrave; rentrer dans un ordre pr&eacute;&eacute;tabli, de mani&egrave;re qualifi&eacute;e. La formation aux diff&eacute;rentes professions du secteur du travail social se singularise par des &eacute;coles professionnelles qui forment les &eacute;tudiants sur la base de l&rsquo; alternance int&eacute;grative. Il s&rsquo;agit alors de construire des comp&eacute;tences situ&eacute;es et mobilisables dans l&rsquo;action sous forme de savoirs exp&eacute;rientiels. Ce processus de construction s&rsquo;appuie sur un continuum allant de la d&eacute;couverte du milieu &agrave; l&rsquo;investissement du milieu ; de la connaissance d&eacute;sincarn&eacute;e &agrave; l&rsquo;incarnation de la connaissance.</p> <h1><span style="font-size:16px;"><strong>D&eacute;couverte : initier la r&eacute;flexion professionnelle des &eacute;tudiants autour des enjeux socio-&eacute;cologiques</strong></span></h1> <p style="text-align: justify;">Depuis 5 ans, l&rsquo;IRTESS de Dijon propose un s&eacute;minaire transversal de 2 jours sur la th&eacute;matique du d&eacute;veloppement social local en formation initiale &eacute;ducateurs sp&eacute;cialis&eacute;s (ES), &eacute;ducateurs jeunes enfants (EJE) et assistants de service social (ASS). Ce s&eacute;minaire est ponctu&eacute; de visites sur site dans des structures mettant en &oelig;uvre des projets et actions de d&eacute;veloppement social, souvent bas&eacute;s sur des pratiques socio-&eacute;cologiques, des apports th&eacute;oriques et m&eacute;thodologiques sous forme de conf&eacute;rences et de tables rondes avec, cette ann&eacute;e, un axe sp&eacute;cifique sur la transition sociale et &eacute;cologique. Des ateliers de mise en situation et d&rsquo;animation des outils participatifs, ainsi que des travaux d&rsquo;appropriation avec restitution sont les autres moments qui ponctuent la participation &agrave; ce s&eacute;minaire. Ce s&eacute;minaire associe &eacute;galement des partenaires du territoire et/ou du d&eacute;veloppement social tels que Trajectoire Ressources (centre de ressources politique de la ville), la f&eacute;d&eacute;ration des centres sociaux ou encore l&rsquo;UNADEL. Les objectifs de ce s&eacute;minaire sont essentiellement tourn&eacute;s sur l&rsquo;initiation aux aspects du travail social ayant trait aux d&eacute;marches collectives, communautaires, territoriales et participatives, positionn&eacute;es de fa&ccedil;on compl&eacute;mentaire aux d&eacute;marches d&rsquo;accompagnement individuel. Il prend place de diff&eacute;rentes mani&egrave;res dans les cursus des 3 fili&egrave;res et alimente diff&eacute;remment les objectifs p&eacute;dagogiques respectifs. Alors que le s&eacute;minaire alimente des d&eacute;marches d&rsquo;&eacute;tude de territoire et d&rsquo;intervention sociale d&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t collectif (ISIC) chez les ASS et les EJE en d&eacute;but de formation et lors de stages collectifs de plusieurs semaines, il alimente plus ponctuellement la d&eacute;marche de projet &eacute;ducatif sp&eacute;cialis&eacute; et inter-institutionnel chez les ES 2e ann&eacute;e. La transversalit&eacute; du s&eacute;minaire prend sens par rapport &agrave; l&rsquo;enjeu d&rsquo;une prise de conscience de la compl&eacute;mentarit&eacute; des places des diff&eacute;rents professionnels dans la mise en &oelig;uvre de dynamique de d&eacute;veloppement social d&rsquo;un territoire. Les sujets de la transition socio-&eacute;cologique ou du TSV sont introduits dans le s&eacute;minaire &laquo; chemin faisant &raquo;, au fil des ann&eacute;es, sous-jacents au d&eacute;part, de fa&ccedil;on plus explicite depuis cette ann&eacute;e. D&rsquo;une part, il est int&eacute;ressant de constater que les initiatives rep&eacute;r&eacute;es pour les visites sur site depuis 2017 sont majoritairement porteuses de projets bas&eacute;s sur des pratiques &eacute;co-sociales telles que Territoire z&eacute;ro ch&ocirc;meur, Atelier d&rsquo;Autun, Pirouette Cacahu&egrave;te, Centre social de Qu&eacute;tigny, Maison Phare, etc. Quasiment toutes ces initiatives figurent dans la recherche-action &laquo; BFC en transition &raquo;, cit&eacute;e ci-dessous, sans qu&rsquo;il n&rsquo;ait eu v&eacute;ritablement collaboration avant entre l&rsquo;IRTESS et la DREAL &agrave; ce moment. D&rsquo;autre part, dans les espaces p&eacute;dagogiques au sein du s&eacute;minaire o&ugrave; les &eacute;tudiants sont mis &agrave; contribution via des travaux d&rsquo;appropriation, nous observons que la th&eacute;matique du lien entre &laquo; travail social et &eacute;cologique &raquo; &eacute;merge spontan&eacute;ment. Ainsi, en 2017, en guise d&rsquo;un travail de restitution un groupe d&rsquo;&eacute;tudiants r&eacute;alise jardin partag&eacute; au sein du patio de l&rsquo;IRTESS. En 2019, un autre groupe d&rsquo;&eacute;tudiants organise un forum d&rsquo;initiatives avec des ateliers &ldquo;do it yourself&rdquo; (fabriquer soi-m&ecirc;me) comme supports de m&eacute;diation socio-&eacute;ducatifs et des stands pr&eacute;sentant des acteurs de ce secteur. Cela appara&icirc;t comme l&rsquo;effet d&rsquo;une forte pr&eacute;sence de pratiques socio-&eacute;cologiques dans l&rsquo;environnement professionnel des travailleurs sociaux depuis plusieurs ann&eacute;es. Cela explique probablement une certaine facilit&eacute; avec laquelle les &eacute;tudiants ont fait le lien avec les concepts de la &laquo; social-&eacute;cologie &raquo; et de la transition, qui &eacute;taient les notions centrales introduites lors de la table ronde de cette ann&eacute;e. Lors du d&eacute;bat en pl&eacute;ni&egrave;re &agrave; la suite de la table ronde ou lors d&rsquo;&eacute;changes dans les ateliers d&rsquo;&eacute;laboration des restitutions, ces termes sont utilis&eacute;s avec une certaine aisance et semblent faire sens imm&eacute;diatement. Un questionnaire &laquo; bilan et perspective &raquo;, rempli par les &eacute;tudiants, fait &eacute;galement ressortir ces th&eacute;matiques. A ce sujet, il est int&eacute;ressant d&rsquo;analyser les r&eacute;ponses des &eacute;tudiants de plus pr&egrave;s. Dans la fili&egrave;re ES, 42 r&eacute;ponses sur une promotion de 63 personnes, permettent de constater, qu&rsquo;aux questions &laquo; Quelle(s) id&eacute;e(s) principale(s) retenez-vous de ce s&eacute;minaire ? &raquo;, ainsi que &laquo; Au terme des r&eacute;flexions qui ont &eacute;t&eacute; d&eacute;velopp&eacute;es au cours de ce s&eacute;minaire, quelles sont les questions qui se posent &agrave; vous au regard de la construction de votre professionnalit&eacute;, de votre future pratique professionnelle ? &raquo;, il ressort avant tout l&rsquo;importance de la participation citoyenne (13 occurrences) et la participation des personnes dans les projets (9 occurrences), ainsi que l&rsquo;importance de la connaissance du territoire et d&rsquo;une d&eacute;marche multi-acteurs (environ 10 occurrences). La perception d&rsquo;une d&eacute;marche et posture sp&eacute;cifiques dans ces approches est verbalis&eacute;e ainsi : les &eacute;tudiants ont retenu &laquo; l&rsquo;importance de d&eacute;velopper un r&eacute;seau pluripartenarial sur un territoire donn&eacute; dans l&rsquo;objectif de viser &agrave; la transformation sociale des habitants et &agrave; des responsabilit&eacute;s collectives &raquo; ; l&rsquo;importance de &laquo; partir des personnes, d&rsquo;utiliser et de d&eacute;velopper les forces du territoire, jardin partag&eacute;, transition &eacute;cologique &raquo; ; &laquo; La question de libert&eacute; des ateliers, de l&acirc;cher prise et de laisser le public concern&eacute; les cr&eacute;er en partie &raquo; ; &laquo; Le travail aupr&egrave;s des personnes, &agrave; leurs c&ocirc;t&eacute;s, leur participation. Les projets &eacute;mergent des habitants &raquo;.</p> <p style="text-align: justify;"> Ainsi, l&rsquo;entr&eacute;e dans le sujet des transitions et de l&rsquo;articulation entre le social et l&rsquo;&eacute;cologie semble facilit&eacute;e par la d&eacute;couverte d&rsquo;initiatives citoyennes, de d&eacute;marches locales, hors les murs, sur un territoire o&ugrave; ces deux aspects sont d&rsquo;embl&eacute;e nou&eacute;s.</p> <p style="text-align: justify;">Dans la m&ecirc;me logique, depuis trois ans, l&rsquo;IRTS de Besan&ccedil;on propose un module de cours d&rsquo;une journ&eacute;e pour sensibiliser les &eacute;tudiants en deuxi&egrave;me ann&eacute;e de formation d&rsquo;assistant de service social &agrave; la question &eacute;cologique. Celui-ci est construit &agrave; partir des r&eacute;sultats d&rsquo;une recherche action participative men&eacute;e par la Direction R&eacute;gionale Environnement Am&eacute;nagement Logement Bourgogne Franche-Comt&eacute; et la Maison de Sciences de l&rsquo;Homme de Dijon intitul&eacute;e &ldquo;BFC en transition&rdquo;. Cette enqu&ecirc;te questionne les conditions de consolidation, de maillage et d&rsquo;essaimage des initiatives locales de transition &agrave; l&rsquo;&eacute;chelle de la r&eacute;gion Bourgogne FrancheComt&eacute; &agrave; partir d&rsquo;entretiens et d&rsquo;ateliers participatifs avec des citoyens, des associations, des institutions et des chercheurs. La question de l&rsquo;articulation des enjeux sociaux (lutte contre la pr&eacute;carit&eacute;, bien &ecirc;tre, lien social, etc.) avec les enjeux environnementaux (biodiversit&eacute;, changement climatique, etc.) est au c&oelig;ur de cette recherche. Le module de cours r&eacute;alis&eacute; aupr&egrave;s d&rsquo;une trentaine d&rsquo;&eacute;tudiants est construit sur plusieurs s&eacute;quences : un photolangage et un d&eacute;bat mouvant sur les perceptions de l&rsquo;&eacute;cologie ; une pr&eacute;sentation des concepts de transition socio&eacute;cologique, de TSV et de justice environnementale ; la description d&rsquo;exemples concrets et le visionnage de t&eacute;moignages vid&eacute;os ; un travail en groupe de cinq ou six pour d&eacute;cortiquer des th&eacute;matiques sous le double prisme &eacute;cologique et social (alimentation, mobilit&eacute;, &eacute;nergie, nature et sobri&eacute;t&eacute;). L&rsquo;enjeu p&eacute;dagogique est de passer d&rsquo;une sensibilit&eacute; personnelle sur l&rsquo;&eacute;cologie &agrave; des perspectives professionnelles. Lors du photolangage, les sensibilit&eacute;s &eacute;cologiques des &eacute;tudiants s&rsquo;expriment autour du respect de la nature, le bien-&ecirc;tre animal, quelques r&eacute;flexions internationales sur les pays du sud et le changement climatique, la gestion de la ressource en eau, etc. On retrouve quelques d&eacute;fenseurs des &eacute;cogestes, mais aussi quelques profils militants des marches pour le climat. &Agrave; ce stade du cours, l&rsquo;expression potentielle d&rsquo;un rejet de l&rsquo;&eacute;cologie est absente ou cach&eacute;e. Le d&eacute;bat mouvant permet alors de d&eacute;passer les non-dits. &Agrave; la question de savoir si les &eacute;tudiants se sentent concern&eacute;s par la crise &eacute;cologique, quelques-uns osent aller &agrave; l&rsquo;encontre de la majorit&eacute; pour &eacute;voquer un sentiment de d&eacute;sint&eacute;r&ecirc;t. Avec la deuxi&egrave;me question demandant si les enjeux environnementaux font partie du travail social, beaucoup se positionnent au milieu de la salle pour indiquer leur ambivalence. Le d&eacute;bat qui suit entre ceux qui d&eacute;fendent l&rsquo;id&eacute;e que l&rsquo;&eacute;cologie n&rsquo;est pas la priorit&eacute; face &agrave; la crise sociale et ceux qui pensent au contraire qu&rsquo;il est possible d&rsquo;investir ce champ au m&ecirc;me titre que d&rsquo;autres th&eacute;matiques permettent de passer de la sensibilit&eacute; personnelle vers des r&eacute;flexions professionnelles. Globalement, c&rsquo;est souvent la premi&egrave;re fois que les &eacute;tudiants se posent cette question. L&rsquo;&eacute;cologie dans le travail social n&rsquo;est pas une &eacute;vidence pour eux comme l&#39;indiquent les discussions informelles dans lesquelles certains &eacute;voquent leur incompr&eacute;hension de d&eacute;part sur la n&eacute;cessit&eacute; de ce cours dans leur formation. La partie descendante du cours permet alors de poser la d&eacute;finition de la transition socio-&eacute;cologique et de TSV (telle que propos&eacute;e en introduction de cet article). Les travaux sur la justice environnementale sont &eacute;galement un levier int&eacute;ressant pour permettre aux &eacute;tudiants de r&eacute;aliser les interconnexions entre les enjeux sociaux et &eacute;cologiques. Mais c&rsquo;est surtout la pr&eacute;sentation de la galaxie des initiatives citoyennes, associatives et institutionnelles de transition qui suscitent de l&rsquo;int&eacute;r&ecirc;t (remarqu&eacute; au travers des questions pos&eacute;es). En particulier, les exemples d&rsquo;exp&eacute;rimentations hybrides socio-&eacute;cologiques donnent des rep&egrave;res, &agrave; l&rsquo;instar des incroyables comestibles qui investissent des quartiers prioritaires de la politique de la ville &agrave; Montb&eacute;liard, d&rsquo;un chantier d&rsquo;insertion dans un restaurant associatif &eacute;cologique &agrave; Belfort, d&rsquo;un dispositif territoire z&eacute;ro ch&ocirc;meur de longue dur&eacute;e qui propose une activit&eacute; de mara&icirc;chage biologique et une recyclerie &agrave; Pr&eacute;mery, d&rsquo;une association de d&eacute;veloppement social local qui anime un jardin partag&eacute; &agrave; Autun, d&rsquo;un Centre Communal d&rsquo;Action Sociale qui porte une &eacute;picerie sociale avec des ateliers cuisine &agrave; Bethoncourt, etc. Ces exemples concrets incarnent la transition et permettent de souligner les diff&eacute;rents leviers d&rsquo;articulation entre les enjeux sociaux et &eacute;cologiques : le d&eacute;veloppement du pouvoir d&rsquo;agir, la recherche de lien social et d&rsquo;&eacute;conomies financi&egrave;res pour les personnes en situation de pr&eacute;carit&eacute; ; les comp&eacute;tences des nouveaux m&eacute;tiers de la transition pour les personnes en recherche d&rsquo;emploi ; le d&eacute;cloisonnement entre les acteurs du secteur social et de l&rsquo;&eacute;cologie pour construire des projets partenariaux, etc. Enfin, les ateliers participatifs permettent de conclure le cours de mani&egrave;re active sur le th&egrave;me suivant : &laquo; action sociale et &eacute;cologique, m&ecirc;me combat ? &raquo; au travers du s&eacute;quen&ccedil;age suivant :</p> <p>Phase 1 : Constitution de groupes de 5 ou 6 personnes. Choix du th&egrave;me : alimentation, mobilit&eacute;, &eacute;nergie, nature, sobri&eacute;t&eacute;. R&eacute;partition des r&ocirc;les : un animateur, un gardien du temps, deux prises de notes et un rapporteur.</p> <p>Phase 2 : Lister les enjeux du point de vue &eacute;cologique.</p> <p>Phase 3 : Lister les enjeux du point de vue social</p> <p>Phase 4 : Pistes concr&egrave;tes pour l&rsquo;action sociale (imaginer des aides/dispositifs pour des personnes accompagn&eacute;es, imaginer des projets collectifs et partenariaux &agrave; mener).</p> <p>Phase 5 : Restitution et d&eacute;bat.</p> <p>Les &eacute;tudiants entrent dans la transition au travers d&rsquo;un th&egrave;me plus pr&eacute;cis, &agrave; l&rsquo;instar de l&rsquo;alimentation qui est g&eacute;n&eacute;ralement tr&egrave;s pris&eacute;e. Avec l&rsquo;aide de l&rsquo;intervenant qui passe dans les groupes pour apporter du contenu et d&rsquo;internet, cet exercice permet un d&eacute;frichage des enjeux &eacute;cologiques. La restitution et le d&eacute;bat cr&eacute;ent un moment de r&eacute;flexivit&eacute; collective autour des pistes d&rsquo;articulation socio-&eacute;cologiques, mais aussi les enjeux contradictoires li&eacute;s aux in&eacute;galit&eacute;s sociales qui sont favoris&eacute;es par certaines solutions &eacute;cologiques (le bio, la voiture &eacute;lectrique, la taxe carbone, etc.)</p> <h1><span style="font-size:16px;"><strong>Atelier-projet : comprendre les enjeux et exp&eacute;rimenter</strong></span></h1> <p style="text-align: justify;">Situ&eacute;e dans le d&eacute;partement de la C&ocirc;te d&rsquo;Or et la M&eacute;tropole de Dijon, la ville de Quetigny (9100 habitants) a adopt&eacute; une d&eacute;lib&eacute;ration d&rsquo;urgence climatique et sociale le 24 novembre 2020. Accompagn&eacute;e par la Direction R&eacute;gionale Environnement Am&eacute;nagement Logement Bourgogne Franche-Comt&eacute; (DREAL BFC) et le centre d&rsquo;expertise du minist&egrave;re de la transition &eacute;cologique (CEREMA), la collectivit&eacute; s&rsquo;est alors engag&eacute;e dans l&rsquo;&eacute;laboration d&rsquo;une strat&eacute;gie territoriale de &laquo; transition &eacute;cologique inclusive &raquo; &agrave; l&rsquo;horizon 2030. Cette d&eacute;marche intitul&eacute;e Agenda 2030 consiste &agrave; mener une r&eacute;flexion collective &agrave; partir de la mobilisation des acteurs du territoire (associations, entreprises, &eacute;lus, agents de la collectivit&eacute;, etc.) et de la participation citoyenne, notamment celle des personnes en situation de pr&eacute;carit&eacute;. Dans ce contexte, la DREAL BFC, le CEREMA et la ville de Quetigny se sont associ&eacute;s &agrave; l&rsquo;IRTESS de Dijon pour r&eacute;aliser un diagnostic territorial par une &eacute;quipe de trois stagiaires. C&rsquo;est un agent de la DREAL en partenariat avec une formatrice de l&rsquo;IRTESS qui accompagne le stage. Ceci s&rsquo;inscrit dans une dynamique r&eacute;gionale de recherche-action participative sur la transition socio-&eacute;cologique port&eacute;e par la DREAL dans le cadre d&rsquo;un projet intitul&eacute; &laquo; Bourgogne Franche-Comt&eacute; en transition &raquo;. L&rsquo;articulation des attendus de la DREAL et de l&rsquo;IRTESS d&eacute;bouche sur la construction d&rsquo;un dispositif innovant que nous appelons &laquo; diagnostic socio-&eacute;cologique &raquo; (Roy et al., 2022) visant la production collective d&rsquo;un processus de transition. D&rsquo;un point de vue p&eacute;dagogique, ce diagnostic reprend le format des &laquo; ateliers-projet &raquo; (Grasset, 2021). Pour les trois stagiaires en travail social, cette exp&eacute;rience permet une sensibilisation aux enjeux socio-&eacute;cologiques et le d&eacute;veloppement de comp&eacute;tences transversales li&eacute;es &agrave; l&rsquo;ing&eacute;nierie de projets. D&rsquo;un point de vue op&eacute;rationnel, l&rsquo;objectif des commanditaires est d&rsquo;aboutir &agrave; une feuille de route avec des &eacute;l&eacute;ments de r&eacute;flexions et des pistes d&rsquo;action concr&egrave;tes. Le premier volet du diagnostic visait &agrave; mettre en lumi&egrave;re les conditions de mobilisation des acteurs sociaux dans la transition &eacute;cologique, en analysant leur rapport &agrave; l&rsquo;&eacute;cologie et en rep&eacute;rant l&rsquo;ensemble des initiatives citoyennes, associatives et communales du territoire disposant d&rsquo;un potentiel de croisement entre les enjeux de lutte contre la pr&eacute;carit&eacute; et les enjeux environnementaux. Cette enqu&ecirc;te repose sur 12 entretiens semi-directifs aupr&egrave;s des acteurs sociaux et socioculturels de la commune de Quetigny et sur 2 entretiens compl&eacute;mentaires aupr&egrave;s des acteurs &eacute;cologiques. Ce volet a permis de mettre en exergue une reconnaissance de la part des acteurs interrog&eacute;s de l&rsquo;importance du d&eacute;cloisonnement afin d&rsquo;imaginer des actions &agrave; la crois&eacute;e du social et de l&rsquo;&eacute;cologie. Toutefois lorsqu&rsquo;il s&rsquo;agit de mettre cela en pratique dans le cadre professionnel ou b&eacute;n&eacute;vole, plusieurs profils se d&eacute;gagent entre des acteurs d&eacute;j&agrave; engag&eacute;s dans l&rsquo;action, d&rsquo;autres qui sont volontaires pour le faire mais avec un manque de rep&egrave;res et de ressources, et quelques r&eacute;ticents (Roy et al. 2022). Le deuxi&egrave;me volet du diagnostic s&rsquo;inscrivait dans une d&eacute;marche d&rsquo;intervention sociale, &agrave; la fois individuelle et collective visant le &laquo; d&eacute;veloppement du pouvoir d&rsquo;agir &eacute;cologique des personnes en situation de pr&eacute;carit&eacute; &raquo;. D&rsquo;une part, une intervention individuelle par entretiens consistait &agrave; aller &agrave; la rencontre des personnes en situation de pr&eacute;carit&eacute; afin d&rsquo;appr&eacute;hender leur mode de vie, leurs enjeux et envies, sans a priori. La question environnementale n&rsquo;&eacute;tait pas pos&eacute;e d&rsquo;embl&eacute;e afin d&rsquo;&eacute;viter d&rsquo;orienter les personnes et d&rsquo;&eacute;viter l&rsquo;&eacute;cueil de la moralisation &eacute;cologique. D&rsquo;autre part, une intervention collective par ateliers consistait &agrave; croiser les exp&eacute;riences individuelles et &agrave; favoriser le d&eacute;veloppement du pouvoir d&rsquo;agir en invitant les participants &agrave; r&eacute;aliser des propositions d&rsquo;action &agrave; partir de leurs enjeux dans le cadre de la strat&eacute;gie de la ville de Quetigny. Ce volet du diagnostic repose sur 10 entretiens individuels et un entretien collectif (6 participants) de personnes en situation de pr&eacute;carit&eacute;, ainsi qu&rsquo;un atelier d&eacute;bat r&eacute;alis&eacute; lors d&rsquo;un &eacute;v&eacute;nement convivial r&eacute;unissant un public socialement mixte (25 participants). Ce volet a permis notamment de souligner l&rsquo;existence d&rsquo;un int&eacute;r&ecirc;t des personnes en situation de pr&eacute;carit&eacute; sur les enjeux environnementaux, m&ecirc;me si certains aspects sont controvers&eacute;s (&agrave; l&rsquo;instar de l&rsquo;agriculture biologique). Le diagnostic met aussi en exergue une &laquo; d&eacute;brouillardise populaire &eacute;cologique &raquo; entendue comme &laquo; un ensemble de pratiques de la vie quotidienne des personnes en situation de pr&eacute;carit&eacute; qui sont r&eacute;alis&eacute;es pour des motivations &eacute;conomiques, mais qui limitent &eacute;galement l&rsquo;impact carbone &raquo; (Roy et al., 2022). Au travers du diagnostic socio-&eacute;cologique, les &eacute;tudiantes en travail social ont ainsi initi&eacute; une forme d&rsquo;agenc&eacute;it&eacute; collective. Des propositions concr&egrave;tes ont &eacute;merg&eacute; autour de la valorisation des acteurs sociaux et socioculturels engag&eacute;s et des actions socio-&eacute;cologiques qui ne portent pas n&eacute;cessairement leur nom (ateliers cuisine, ateliers z&eacute;ro d&eacute;chet, jardins partag&eacute;s, etc.). Une action de sensibilisation aupr&egrave;s des acteurs a &eacute;galement &eacute;t&eacute; propos&eacute;e afin de d&eacute;construire un a priori fortement ancr&eacute; de d&eacute;sint&eacute;r&ecirc;t des personnes en situation de pr&eacute;carit&eacute; sur les questions &eacute;cologiques. La d&eacute;marche d&rsquo;enqu&ecirc;te participative r&eacute;alis&eacute;e aupr&egrave;s des habitants de Quetigny a permis, quant &agrave; elle, de faire &eacute;merger des pistes d&rsquo;action autour de la valorisation et le d&eacute;veloppement de la d&eacute;brouillardise populaire &eacute;cologique, notamment sur le th&egrave;me de l&rsquo;alimentation, de l&rsquo;&eacute;conomie circulaire, de la mobilit&eacute;, de l&rsquo;&eacute;nergie, etc. Par la d&eacute;marche d&rsquo;atelier-projet, les &eacute;tudiantes se sont exerc&eacute;es &agrave; la r&eacute;ponse d&rsquo;une commande institutionnelle d&rsquo;un service d&eacute;concentr&eacute; de l&rsquo;&Eacute;tat et d&rsquo;une collectivit&eacute; territoriale, mais aussi &agrave; l&rsquo;animation d&rsquo;une d&eacute;marche territoriale et participative. Les comp&eacute;tences qui se d&eacute;veloppent sont celles du d&eacute;veloppement social local et du diagnostic territorial. Mais cette d&eacute;marche inscrite sur pr&egrave;s de quatre mois a permis aux &eacute;tudiantes de s&rsquo;immerger dans les enjeux socio-&eacute;cologiques. Un cheminement de la d&eacute;couverte &agrave; la d&eacute;construction de certains a priori s&rsquo;est r&eacute;alis&eacute; au fur et &agrave; mesure des enqu&ecirc;tes en discutant avec d&rsquo;autres travailleurs sociaux sur leur perception de la transition, en rencontrant des acteurs pionniers qui sont d&rsquo;ores et d&eacute;j&agrave; engag&eacute;s dans ce processus et en d&eacute;couvrant les r&eacute;alit&eacute;s de vie des personnes en situation de pr&eacute;carit&eacute; en prise avec les in&eacute;galit&eacute;s environnementales ainsi que leurs discours sur l&rsquo;&eacute;cologie. Enfin, la transition socio&eacute;cologique est alors devenue concr&egrave;te et collective au travers de l&rsquo;&eacute;criture de propositions d&rsquo;action, compil&eacute;es par les &eacute;tudiantes, pour la collectivit&eacute; &agrave; inscrire &agrave; son agenda 2030.</p> <h1><span style="font-size:16px;"><strong>Ancrage : co-construire une &eacute;conomie sociale et solidaire</strong></span></h1> <p style="text-align: justify;">Les &eacute;ducateurs sp&eacute;cialis&eacute;s en deuxi&egrave;me ann&eacute;e de formation &agrave; l&rsquo;IRTESS de Dijon ont particip&eacute; aux &quot;Journ&eacute;es de l&rsquo;Economie Autrement&quot; (JEA) sur le th&egrave;me de &quot;la transition &eacute;cologique et solidaire qu&rsquo;il nous faut mettre en &oelig;uvre pour faire face au d&eacute;fi immense du changement climatique&quot;. Cette participation r&eacute;pond &eacute;galement &agrave; un des objectifs de la loi sur l&#39;&eacute;conomie sociale et solidaire de 2014 qui mentionne l&rsquo;id&eacute;e de &quot;Renforcer les politiques de d&eacute;veloppement local durable&quot;. A l&rsquo;origine des &quot;Journ&eacute;es de l&rsquo;Economie Autrement&quot; se trouve la volont&eacute; partag&eacute;e entre acteurs de l&rsquo;ESS et &eacute;lus locaux de porter le d&eacute;bat des enjeux de soci&eacute;t&eacute; en place publique. L&rsquo;id&eacute;e &eacute;tait de rendre lisible la contribution de l&rsquo;ESS dans l&rsquo;&eacute;mergence d&rsquo;un monde plus juste et plus durable. Depuis 2016, les JEA se tiennent &agrave; Dijon &agrave; l&rsquo;initiative de la Scop Alternatives Economiques et sont port&eacute;es par la M&eacute;tropole et le Conseil R&eacute;gional de Bourgogne Franche Comt&eacute;.  Ces journ&eacute;es prennent la forme de rencontres, d&eacute;bats et tables rondes publics&nbsp;et ouverts &agrave; tous. Elles font la part belle aux initiatives en mati&egrave;re d&rsquo;innovation et de pratiques respectueuses des personnes et de leur environnement. L&rsquo;&eacute;dition 2021 de cet &eacute;v&egrave;nement&nbsp;national, a propos&eacute; au public la participation &agrave; deux s&eacute;ances pl&eacute;ni&egrave;res, seize tables rondes, seize conf&eacute;rences-d&eacute;bats, quatre ateliers, deux projections-d&eacute;bat, deux visites guid&eacute;es dans une programmation qui a rassembl&eacute; 182 intervenants et attir&eacute; 1700 visiteurs. La caract&eacute;ristique de cette 6&egrave;me &eacute;dition a &eacute;t&eacute; de valoriser les enjeux en mati&egrave;re de transition &eacute;cologique et solidaire au regard du d&eacute;fi que repr&eacute;sente le changement climatique&quot;. L&rsquo;ESS se caract&eacute;rise en effet par un ancrage sur les territoires o&ugrave; les probl&eacute;matiques locales sont consid&eacute;r&eacute;es et reconnues et avec elles les questions environnementales, sociales et citoyennes. Comme l&rsquo;explique Jeantet et al (2014), les points de convergence entre ESS et transition &eacute;cologique sont nombreux : inscription dans le &laquo; temps long &raquo;, pr&eacute;occupation pour les g&eacute;n&eacute;rations futures et culture du faire ensemble via l&rsquo;association d&rsquo;acteurs pour une cause collective. Ainsi, en &eacute;cho &agrave; cette mobilisation collective, mais &eacute;galement &agrave; l&rsquo;invitation de Bruno Latour (1995) qui milite pour aborder la question &eacute;cologique au croisement des savoirs, l&rsquo;IRTESS s&rsquo;est impliqu&eacute; de mani&egrave;re progressive dans la participation, puis dans l&rsquo;organisation de ces journ&eacute;es de l&rsquo;&eacute;conomie autrement. Si depuis trois &eacute;ditions, les &eacute;tudiants assistent en spectateurs aux JEA, ils ont &eacute;t&eacute; invit&eacute;s pour cette &eacute;dition &agrave; collecter l&rsquo;essence des d&eacute;bats dans un r&ocirc;le d&rsquo;observateurs participants. Collectivement en tables-rondes ou individuellement en atelier (fresque pour le climat), ils ont &eacute;prouv&eacute; et questionn&eacute; les th&eacute;matiques fortes propos&eacute;es. Les 65 &eacute;tudiants ont particip&eacute; au minimum &agrave; deux s&eacute;ances, dont deux d&eacute;bats qui ont &eacute;t&eacute; pour la premi&egrave;re fois anim&eacute;s par leur propre institut de formation, partenaire des JEA. Ils ont &eacute;t&eacute; invit&eacute;s &agrave; produire six restitutions collectives de douze ateliers v&eacute;cus, en vue d&rsquo;alimenter les supports communicationnels dans la perspective de la prochaine &eacute;dition. Ces contributions alimentent &eacute;galement le d&eacute;bat d&rsquo;une &eacute;valuation collective &agrave; l&rsquo;occasion des apports sur les fondements de l&rsquo;ESS qu&rsquo;ils vont int&eacute;grer ult&eacute;rieurement. C&rsquo;est donc par une participation active et &eacute;prouv&eacute;e qu&rsquo;ils ont dans un premier temps approch&eacute; les enjeux de l&rsquo;ESS et qu&rsquo;ils l&rsquo;ont constat&eacute;e et entendue comme &laquo; r&eacute;aliste et radicale &raquo; (Viveret, 2012). C&rsquo;est un choix p&eacute;dagogique d&rsquo;inscrire cette dynamique participative en deuxi&egrave;me ann&eacute;e au mitan de la d&eacute;couverte et de la professionnalisation. En cette deuxi&egrave;me ann&eacute;e de formation, c&rsquo;est la question de l&rsquo;implication et de la capacit&eacute; &agrave; identifier le cadre des actions et des pratiques du travailleur social qui est ici mise au travail. Les apports sur les fondements de l&rsquo;ESS sont partag&eacute;s en aval de cette dimension &eacute;prouv&eacute;e et approfondis en troisi&egrave;me ann&eacute;e de formation par des apports sur l&rsquo;approche socio&eacute;conomique du territoire. Ainsi, c&rsquo;est la conscientisation d&rsquo;un ancrage dans un processus globalisant qui est vis&eacute;e par cette d&eacute;marche. Avant d&rsquo;aborder la question des connaissances, c&#39;est en &eacute;prouvant l&rsquo;objet que le travailleur social, sp&eacute;cialis&eacute; dans la lutte contre les in&eacute;galit&eacute;s sociales, peut saisir la port&eacute;e &eacute;largie de son c&oelig;ur de m&eacute;tier aux in&eacute;galit&eacute;s g&eacute;osociales (Latour, 1995). Cet ancrage vis&eacute; ici est &eacute;galement celui des pratiques du travailleur social, acteur de l&rsquo;ESS, dans un mod&egrave;le de soci&eacute;t&eacute; structur&eacute; et affirm&eacute; o&ugrave; il a toute sa place. Ainsi, les &eacute;tudiants ont la possibilit&eacute; d&rsquo;&eacute;largir le canevas de leurs futures missions au-del&agrave; des exp&eacute;riences d&rsquo;investigation localis&eacute;es. C&rsquo;est un ancrage indispensable pour croire en sa capacit&eacute; &agrave; avancer dans cette transition &eacute;co-sociale. </p> <h1><span style="font-size:16px;"><strong>T&eacute;moignage : rendre compte de son parcours d&rsquo;&eacute;tudiant</strong></span></h1> <p>Le t&eacute;moignage de L&eacute;a (&eacute;tudiante en 3&egrave;me ann&eacute;e de formation &eacute;ducatrice sp&eacute;cialis&eacute;e) sur son parcours de formation et ses adh&eacute;rences aux diff&eacute;rents moments et modalit&eacute;s p&eacute;dagogiques, permet de comprendre comment peuvent se construire des exp&eacute;riences et une professionnalisation en lien avec le TSV. Le profil de L&eacute;a n&rsquo;est pas celui d&rsquo;une novice sur ces questions, mais lors de l&rsquo;entr&eacute;e en formation au travail social, elle est &agrave; la fois en reconversion professionnelle et d&eacute;j&agrave; dot&eacute;e d&rsquo;un parcours personnel et associatif orient&eacute; sur des exp&eacute;riences de lutte contre la pauvret&eacute;, articul&eacute;es aux enjeux &eacute;cologiques. Apr&egrave;s une formation en multim&eacute;dia et une premi&egrave;re vie professionnelle, elle s&rsquo;engage tout d&rsquo;abord dans un parcours associatif &agrave; partir d&rsquo;un &eacute;lan personnel : &laquo; j&rsquo;avais envie de bricoler, mais je n&rsquo;avais pas les moyens, j&rsquo;ai appris &agrave; faire avec ce que j&rsquo;avais. &raquo; Les actions bas&eacute;es sur la revalorisation des objets, &laquo; l&rsquo;anti-gaspi &raquo; et le lien social, telles que pratiqu&eacute;es &agrave; la &laquo; Recyclade &raquo; ou au &laquo; Frigos solidaires &raquo; (tiers lieux &agrave; vis&eacute;es environnementales de Dijon, C&ocirc;te d&rsquo;Or), s&rsquo;av&egrave;rent particuli&egrave;rement attractives pour L&eacute;a. En s&rsquo;engageant dans des projets bas&eacute;s sur la customisation, le bricolage, le recyclage, elle &eacute;prouve plus particuli&egrave;rement la satisfaction &laquo; de travailler les d&eacute;chets, de revaloriser des choses, de donner une seconde vie &raquo; et la joie &laquo; d&rsquo;&ecirc;tre capable de faire les choses &raquo;. L&rsquo;&eacute;v&eacute;nementiel culturel et solidaire, ainsi que l&rsquo;autogestion compl&egrave;tent son parcours avant l&rsquo;entr&eacute;e en formation en travail social. Cependant, c&rsquo;est avant tout &agrave; partir d&rsquo;un int&eacute;r&ecirc;t port&eacute; &agrave; l&rsquo;art-th&eacute;rapie, un milieu familial vers&eacute; dans le travail social et surtout un besoin fort de justice sociale, que L&eacute;a d&eacute;cide de s&rsquo;engager dans cette formation. C&rsquo;est &eacute;galement sur cette question de justice sociale que L&eacute;a s&rsquo;ancre en formation et commence &agrave; &eacute;laborer son identit&eacute; professionnelle. Elle d&eacute;couvre le courant p&eacute;dagogique de Paolo Freire (2009) en 1&egrave;re ann&eacute;e de formation Educateur Sp&eacute;cialis&eacute;, qui lui donne &agrave; voir les possibilit&eacute;s concr&egrave;tes pour travailler cette question. Des modules de formation consacr&eacute;s en 2&egrave;me ann&eacute;e &agrave; la participation des personnes aux diff&eacute;rents projets en institutions, ainsi qu&rsquo;&agrave; la participation citoyenne lui permettent de poursuivre cette r&eacute;flexion et de l&rsquo;ancrer dans sa professionnalit&eacute; en construction. Avec le s&eacute;minaire D&eacute;veloppement social, les cours et journ&eacute;es d&rsquo;&eacute;tude consacr&eacute;s &agrave; l&rsquo;ESS, elle d&eacute;couvre surtout la n&eacute;cessit&eacute; d&rsquo;intervenir sur un territoire, avec les &eacute;lus et les partenaires : &laquo; j&rsquo;ai toujours bidouill&eacute; seule. Mais pour avoir un impact coh&eacute;rent sur un territoire, il y a besoin des autres, associations, commer&ccedil;ants et toutes les personnes qui construisent un territoire. &raquo; L&eacute;a per&ccedil;oit &eacute;galement la difficult&eacute; de ses coll&egrave;gues de promotion de se projeter dans l&rsquo;aspect collectif du m&eacute;tier, ainsi que le peu d&rsquo;&eacute;ducateurs sp&eacute;cialis&eacute;s qui exercent en centre social, par exemple, ce qui rend difficile une projection professionnelle dans cet aspect du m&eacute;tier. N&eacute;anmoins, L&eacute;a ne s&eacute;pare pas &eacute;ducation populaire et &eacute;ducation sp&eacute;cialis&eacute;e. Elle reste convaincue qu&rsquo;il y a besoin d&rsquo;&eacute;ducateurs hors du secteur de l&rsquo;accompagnement individuel pour faire le lien avec les personnes qui passent &laquo; sous les radars &raquo;, ceux que l&rsquo;on nomme les &laquo; invisibles &raquo; : &laquo; si on ne se focalise que sur les institutions, les &eacute;coles, etc., on ne per&ccedil;oit pas ces autres besoins. C&rsquo;est une autre fa&ccedil;on de cibler les individus. &raquo; En tout cas, pour son stage de professionnalisation de derni&egrave;re ann&eacute;e de formation, elle d&eacute;marche un centre social avec lequel elle a d&eacute;j&agrave; travaill&eacute; avant d&rsquo;entrer en formation, avec l&rsquo;intention de d&eacute;velopper ces d&eacute;marches qui lui tiennent &agrave; c&oelig;ur. Ainsi, les questions &eacute;cologiques n&rsquo;apparaissent pas comme premi&egrave;re motivation d&rsquo;orientation de son parcours, mais se greffent, d&rsquo;une part, assez naturellement sur les enjeux de justice sociale. En effet, L&eacute;a a notamment investi explicitement la question de la justice environnementale et du TSV, en choisissant l&rsquo;angle du travail social radical, lors d&rsquo;un travail au sujet libre. D&rsquo;autre part, l&rsquo;enjeu &eacute;cologique rentre dans le travail social par le biais des supports d&rsquo;action ou de m&eacute;diation socio-&eacute;ducative, mais o&ugrave; il importe pour L&eacute;a que &laquo; &ccedil;a vienne des gens, qu&rsquo;on laisse la place au collectif de devenir acteur &raquo;. Ce parcours montre &agrave; quel point le support &eacute;co-social semble particuli&egrave;rement propice pour travailler l&rsquo;estime de soi, la confiance en soi et en autrui, en prenant soin des objets, en les personnalisant, en leur donnant une seconde vie.</p> <h1><span style="font-size:16px;"><strong>Conclusion</strong></span></h1> <p style="text-align: justify;">La notion de travail social vert dans les &eacute;tablissements de formation au travail social semble &eacute;mergente. Pourtant elle s&rsquo;av&egrave;re effective depuis plusieurs ann&eacute;es d&eacute;j&agrave;, en concomitance et en interaction avec, d&rsquo;une part, la crise &eacute;cologique qui impacte concr&egrave;tement la vie quotidienne et les consciences citoyennes, et, d&rsquo;autre part, avec les mouvances concr&egrave;tes issues de la soci&eacute;t&eacute; civile. Le TSV existe alors &agrave; travers une multitude d&rsquo;initiatives, d&rsquo;exp&eacute;rimentations qui articulent les enjeux sociaux et &eacute;cologiques sans formalisme. Ces exp&eacute;riences n&eacute;cessitent davantage d&rsquo;&ecirc;tre valoris&eacute;es et caract&eacute;ris&eacute;es afin de leur permettre un essor en ad&eacute;quation avec les enjeux qui se pr&eacute;sentent. Cette caract&eacute;risation, indispensable &agrave; la mise en pratique par les acteurs du travail social, passe par la concr&eacute;tisation d&rsquo;un parcours p&eacute;dagogique. Ce parcours fa&ccedil;onne le processus de production des savoirs relatifs &agrave; la transition sociale et &eacute;cologique en permettant successivement de d&eacute;couvrir, d&rsquo;exp&eacute;rimenter, d&rsquo;ancrer puis de t&eacute;moigner. C&rsquo;est &agrave; travers ce processus pragmatique que l&rsquo;on cherche &agrave; &laquo; montrer &raquo; puis &laquo; co-construire &raquo; et enfin &agrave; &laquo; &eacute;prouver &raquo;. Symbole d&rsquo;une m&eacute;ta-transition - une transition didactique pour une transition socio-&eacute;cologique - le chemin d&rsquo;apprentissage propos&eacute; ici permet de satisfaire &agrave; la fois les exigences de transformations sociales voulues par le TSV mais &eacute;galement de transformations individuelles impuls&eacute;es par l&rsquo;&eacute;tablissement de formation. L&agrave;, convergent &agrave; la fois le but commun (un changement global port&eacute; par tous) et le parcours individuel (une maturation des savoirs, des pratiques, du positionnement identitaire). Le travailleur social tend &agrave; devenir, au m&ecirc;me titre que chaque acteur du projet de transition, un ouvrier de l&rsquo;&oelig;uvre commune. Ce passage du &laquo; faire pour &raquo; au &laquo; faire avec &raquo; (Laville &amp; Salmon, 2022) devient le fil rouge de ces pratiques p&eacute;dagogiques. L&rsquo;intervention sociale se transformant alors progressivement en une coop&eacute;ration sociale. Chaque futur professionnel doit donc &ecirc;tre capable de s&rsquo;appuyer sur son socle de connaissances et de pratiques pour parvenir &agrave; faire l&rsquo;exp&eacute;rience, en situation, d&rsquo;une solution nouvelle, collective et durable r&eacute;pondant aux besoins d&rsquo;un territoire en transition.</p> <h1><span style="font-size:16px;"><strong>R&eacute;f&eacute;rences bibliographiques</strong></span></h1> <p class="paragraph" style="text-align:justify"><span style="font-size:12pt"><span style="vertical-align:baseline"><span new="" roman="" style="font-family:" times=""><span style="color:black">B</span></span></span></span><span style="text-align:justify;">ertezene, S., &amp; Vallat, D. (2016). Changement et engagement dans une strat&eacute;gie RSE le cas des &eacute;tablissements sociaux et m&eacute;dico-sociaux fran&ccedil;ais. 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