Introduction <h2 style="margin-top:3px">1-Une recherche impliquée sans faire porter dans un environnement humain</h2> La réflexivité : une définition choisie Ce que la démarche réflexive apporte à sa recherche <h2 style="margin-top:3px">2-Un parcours de vie personnel et professionnel dans le travail social</h2> Se défaire de ses représentations bi-catégorisées de genre Faire avec les représentations de genre dans un monde professionnel <h2 style="margin-top:3px">3-Ce que le terrain d’enquête apporte au chercheur</h2> Une recherche inductive par théorisation ancrée Mener l’enquête sous le prisme du genre en tant qu’homme <h2 style="margin-top:3px">4-Une recherche qui questionne les représentations genrées bi-catégorisées</h2> Ce que la recherche montre sur le genre dans le travail social Ce que la recherche déconstruit de mes représentations de genre Conclusion Bibliographie                             Introduction Cet article propose de montrer comment le genre, comme objet de recherche en sciences de l’éducation, interroge le rapport à ses différentes composantes sociales et mobilise l’homme que je suis par un retour réflexif sur soi. Affirmer qu’il y de soi dans une recherche est accepté aujourd’hui sur un plan académique (Pfefferkorn, 2016). Il s’agit ici de décrire ce que la réflexivité apporte de manière dynamique à une recherche en cours, tant vis-à-vis de mon regard posé sur le monde professionnel étudié, celui des chefs-fes de service du travail social en France, que sur mes propres représentations de genre. En quoi celles-ci, issues de mon éducation, influencent mes postures de chercheur dans mon rapport à l’objet, dans la démarche empirique, et dans l’évolution même des analyses sociologiques formulées. Mon histoire personnelle s’inscrit dans une filiation familiale. Elle donne à voir comment les transmissions dites et non dites passent de génération en génération à propos des hommes et des femmes comme des évidences à porter, à faire porter à d’autres sans regard critique, comme une vérité où les affects et les constructions genrées trouvent une place centrale dans le discours des femmes et des hommes. Dans cette recherche doctorale, je regarde moins la carrière professionnelle des personnes interrogées que leurs parcours singuliers pour s’y engager, s’y tenir ou pour s’en dégager. Le travail social est investi par des femmes et des hommes mobilisés par des valeurs et convictions personnelles du soutien à l’autre. Leurs parcours de vie sont regardés ici sous le prisme du genre tel un marqueur social qui poserait des différences de temporalités, de cheminements et de portage. Ne pouvant me détacher totalement de mon genre construit, une veille éthique sera nécessaire. A ce stade de ma recherche, je projette l’impérative nécessité de faire le lien avec la formation des futurs-es managers intermédiaires dans le travail social en prenant en compte la dimension du genre comme élément d’analyse des inégalités de parcours de vie. Engagé personnellement dans un itinéraire de recherche nécessite des étapes ; dans un premier temps c’est par un travail de réflexivité puis d’apprentissage des techniques d’entretiens biographiques et, dans un second temps, il s’agira de regarder sociologiquement les récits pour dégager une problématique. (Beaud, Weber, 2001 : 274) Pour répondre à ce besoin de formation par une pédagogie genrée des travailleurs-es sociaux-les, je préciserai dans l’article une définition de la réflexivité, j’exposerai ensuite mon entrée sur le terrain d’enquête, enfin je développerai quelques éléments de retour d’enquête qui permettent une analyse sous le prisme du genre des parcours des chefs-es de service dans le travail social.         <h2 style="margin-top:3px">1-Une recherche impliquée sans faire porter dans un environnement humain</h2> · La réflexivité : une définition choisie Une interrogation scientifique commence toujours par soi, à propos de soi, dans les sciences humaines et sociales peut-être plus que dans d’autres disciplines « l’objet d’une recherche est en nous » précise Michèle Ledoeuff (Femmage à Nicole Mosconi, Sorbonne, 11/10/2021). La réflexivité fait bouger le regard du chercheur posé sur son objet de recherche en direction du sujet-chercheur. Le contexte de l’étude prend ainsi une couleur interprétative lorsque mon regard de chercheur interroge mon identité de genre (Clair, 2015). La posture réflexive du chercheur introduit ici une dimension subjective qui concourt à une méthodologie objectivante. Se défamiliariser avec son objet de recherche qu’est le genre, m’oblige à une exigence de travail de mise à distance de tout ce qui fait ou faisait sens, marqué de l’intuition, du ressentis, des pensées et des sensations, précise Léo Thiers Vidal (2002 : 80). Je suis donc un chercheur-homme qui se présente avec cette double identité : celle de chercheur, posture que j’apprends dans mon parcours de formation doctorale et, celle de sexe « homme ». L’apprentissage du métier de sociologue passe par la rupture épistémologique d’avec l’intuition qui est nécessaire comme préalable à toute formulation de problématique à visée scientifique comme le sont les prénotions et pré-constructions sociologiques déclinées par Emile Durkheim. Ainsi, l’objectivation recherchée doit permettre la scientifisation des faits énumérés (Bourdieu, Chamboredon, Passeron, 1983). · Ce que la démarche réflexive apporte à sa recherche La sociologie contemporaine ne questionne plus uniquement ce qu’est l’objet de la recherche révélé au chercheur dans une démarche d’objectivité (Durkheim, 1981), ce qui est un préalable à toute formulation le-la chercheur-e à l’introspection réflexive afin de se voir pour mieux regarder les mondes sociaux qu’il ou elle observe. (Bourdieu, 2022). C’est dans ce sens que Julien Freund précise la pensée de Max Weber à propos de la neutralité axiologique : « Ce qu’il n’admettait pas [Weber] c’est que l’on présente pour vérités scientifiques des convictions personnelles et subjectives… » (1983 : 68). Ainsi, ma recherche mobilise mes affects et mon histoire, sans entacher ma probité intellectuelle. Elle peut également prendre la forme d’un engagement. (Genard, 2024 : 112). Mettre de côté ne signifie pas ignorer ou abandonner, il s’agit là d’une déconstruction à l’&oelig;uvre d’un imaginaire transmis et construit sur le plan socio-affectif et généalogique où le parcours singulier qui m’est propre m’invite à la réflexion. Il s’agit ici de développer ma pensée en mouvement, et par conséquent de faire des choix. (Becker, 1986 : 22). Un monde social à observer, tel que l’envisage Howard Becker (1998, 2002, 2004, 2016, 2017), en tant que sociologue, nécessite « la bonne focale », ainsi que la conscience du chercheur « de penser juste et d’écrire clair » quant à l’écriture comme support à sa démonstration scientifique (Becker, 1986/2004 : 35). Dans sa thèse de doctorat en sociologie Pascal Fugier s’intéresse aux identités et postures du chercheur. Il interroge les identités à l’&oelig;uvre et les modalités d’entrée sur le terrain de l’enquête de sociologues à partir de leurs dits et écrits. Il met en exergue deux postions épistémologiques de chercheur : celle de la rupture basée sur l’éradication de ses présupposés durant l’ensemble du procès de recherche et celle de la vigilance basée sur la mise à l’épreuve conceptuelle et empirique de ses présupposés durant le procès de recherche. A l’instar de Pascal Fugier, je souhaite insister sur la nécessité de distinguer la posture de neutralité du sociologue et son travail d’objectivation (p.228). S’extraire de l’implicite, de l’évidence, où mon imaginaire construit viendrait détruire la démarche de recherche, telle une règle qui s’impose à moi comme un apprentissage nécessaire. Ma problématique de recherche présuppose donc que toute neutralité axiologique est impossible, entendue comme mise en suspens des valeurs mais aussi des « intérêts de connaissance » du sociologue durant l’ensemble de son procès de travail (p.205). Il me reviendra alors durant ce long cheminement des cinq années de formation doctorale de mettre en &oelig;uvre non pas l’éradication de mes partis pris mais plutôt d’investir sociologiquement les dominantes précitées grâce aux efforts d’explicitation de mes partis pris (p.211). Dans ma démarche empirique, l’observation des parcours de vie sous le prisme du genre rend indissociable le regard sociologique porté à la fois sur les représentations du féminin et celles du masculin. Dans cette perspective épistémologique, le sujet-connaissant qui est incarné chez l’interviewer-chercheur que je suis, en lien avec l’objet de connaissance du genre est posé au carrefour des tensions du fait d’une double position sociale masculine : celle de chercheur et celle d’homme. L’enjeu expérientiel pour moi consiste alors à me poser les interrogations suivantes : Que peut apporter ma démarche réflexive à la recherche ? Et, comment et jusqu’où mettre en &oelig;uvre cette dynamique réflexive ? » (Pezeril, 2006 : 1).   <h2 style="margin-top:3px">2-Un parcours de vie personnel et professionnel dans le travail social</h2> · Se défaire de ses représentations bi-catégorisées de genre En 2021, j’ai entamé une formation doctorale en sciences de l’éducation et de la formation à l’Université de Cergy-Paris au sein du Laboratoire Ecole, Mutations, Apprentissages. Tout en poursuivant ma profession de directeur d’un établissement de l’action sociale, j’ai suivi les séminaires doctoraux, je me suis engagé dans l’aventure périlleuse du savoir reconnue par l’obtention d’un diplôme toujours exigeant. L’enseignement, non sans lien familial puisque mes grands-parents furent institutrice et instituteur dans un petit village de la Somme, en complément de mes autres activités, a toujours été une voie d’émancipation citoyenne par le savoir partagé. Identification naissante lorsque enfant j’assistais au cours de mon grand-père dans sa classe de CM2. Qu’elle soit universitaire ou dans le cadre de centres de formation des travailleurs sociaux, aujourd’hui liées par leur rapprochement, la pédagogie se présente à moi comme un art de transmettre des connaissances expériencielles aux autres dans une visée humanisante. Il s’agit de mettre en &oelig;uvre un travail de déconstruction personnelle dans un parcours de longue haleine. Mes résistances identitaires vécues et ressenties personnellement et professionnellement montrent la cristallisation de mes certitudes, construites originellement, notamment dans et par ma famille. Elles nécessitent l’apprentissage de nouveaux points de vue, comme des appuis identitaires complétées de références conceptuelles. Penser le genre, écrire sur le genre, communiquer dans une perspective déconstructiviste des représentations de genre, me prédisposent aux malentendus, aux résistances et aux débats idéologiques. Le risque des évidences d’un « tout se passe comme si » est un écueil. Jean Yves le Naour, historien, nous propose une réflexion qui touche sensiblement à une partie centrale de mes affects, ceux-ci m’ont construit psychiquement. Dans son ouvrage Il faut sauver notre pantalon (2001), il pose la question de l’héroïsme des poilus de la guerre de 1914-1918, seuls sur le front pour défendre la patrie loin de leurs femmes restées à l’arrière, perçue comme « privilégiées » qui travaillent et s’émancipent. Les remarques levées par l’historien déroulent leur cortège de contradictions face aux discours de ces femmes à leur propos dans l’éducation des fils, en bas âge, restés sous leur coupe, qu’elles protègent de l’enfer carnassier des tranchées. Les marques genrées pour caractériser la féminité sont légion : larmes, asthénie, hystérie, sensibilité, émotivité, fragilité, en parfaite contradiction avec celles portées par le masculin : force, virilité, héroïsme, courage, soldat, combattant, poilus. De leur côté, les femmes doivent : attendre, être passives, fidèles, et soutenir leurs hommes qui se battent par leurs courriers dont les pièces historiques révèlent combien ces correspondances épistolaires témoignaient de profonds désarrois et de grandes tristesses. Restées à la maison, elles transmettront aux descendantes filles, petites filles et arrières petites filles un modèle bi-catégorisé de genre dont nous ne tarderons pas à en percevoir les stigmates comme garçon dès notre enfance. Tel un miroir inversé, Jean Yves Le Naour nous montre comment les représentations à l’&oelig;uvre bouleversent les postures de femmes et d’hommes pour lesquels plaisir et souffrance mobilisent chacun et chacune pour et dans une position inhabituelle : la femme travaille, l’homme fait la guerre, ce dernier souffre, ressent son émasculation par la mort qui s’approche et le « dévirilise » au moment même ou celle qui l’attend se virilise en s’autonomisant. Ainsi libérées de la tutelle masculine, affranchies économiquement les femmes de l’arrière deviennent naturellement des femmes légères, la souffrance laisse la place au mépris. La menace de dépossession masculine dans la perte d’autorité confirme en creux la domination masculine. En effet, en méprisant (les femmes), les hommes se défendent, telle une communauté virile traumatisée. Et de conclure, Jean Yves le Naour précise : « la fragilité des hommes a fortifié l’idéal de la virilité. ». Devenir un héros guerrier et disparaitre… telle était ma destinée d’homme comme une vie qui va de soi (Mosconi, 2016 : 24). Ce récit historique transposé dans ma biographie est choisi comme élément réflexif fondamental dans cette recherche. Il permet de répondre à la question posée à tout-e doctorant-e en sciences de l’éducation : Quelles sont les raisons qui m’ont amené à m’engager dans cette recherche ? · Faire avec les représentations de genre dans un monde professionnel Ma « guerre » fût engagée dans le travail social : un rôle investi dans un habillage de genre qui s’inscrivait dans des liens sur les traces de mon passé et qui consistait à réguler la gestion des conflits, des crises et des violences humaines en Centre d’Hébergement et de Réinsertion Sociale (C.H.R.S.). Il y a une trentaine d’années environ je commençais une carrière de cadre dans le travail social. D’abord comme chef de service durant cinq ans puis directeur dans le même établissement du champ de l’insertion. Cette progression fulgurante de carrière je l’attribuais à mes compétences. J’ose espérer qu’elles contribuèrent à forger mon souhait d’évolution professionnelle. Pour autant, c’est par la connaissance des recherches en sciences sociales sur l’état des inégalités de sexe dans le travail social, comme l’ont montré Yvonne Guichard-Claudic, Danièle Kergoat, et Alain Vilbrod (2008), que j’ai découvert notamment comment les hommes parvenaient plus rapidement que les femmes aux postes de chef de service. Celles-ci proportionnellement devenaient, et sont encore aujourd’hui, minoritaires dans les fonctions hiérarchiques plus élevées (direction générale). Les recherches récentes ont montré comment la rareté des hommes dans ce secteur professionnel demeure un indicateur d’observation de cette inégalité. D’autres éléments de constructions socio-sexuées appuient encore ces différenciations essentialisées (Modak, 2008) comme le sont les attributions de rôles en fonction des représentations de genre stéréotypées dans les fonctions intégrées au travail social (care et gestion, sensibilité et force physique…). A ce sujet, je conseille la lecture de l’audition de Marc Bessin par le Haut Conseil du Travail Social (HCTS) à propos de l’ordre du genre, dans la perspective de publication du Livre Blanc du travail social en 2023. A l’époque, en 1993, il n’était pas question de recruter des femmes professionnelles dans l’établissement associatif où j’exerçais. Leurs savoir-faire étaient identifiés comme trop sensibles, trop compréhensifs, manquant de fermeté physique… bref, je devais conjuguer ma pratique professionnelle de cadre avec la présence de stéréotypes de genre mis en &oelig;uvre comme une vérité totale au sein d’une institution (Goffman, [1977], 2002). Progressivement, et pour des raisons multiples que j’attribue à une évolution en France du travail social en matière de recrutement, liée à des normes inégales de genre questionnées puis modifiées légalement et socialement (08/2016). Et plus précisément avec l‘émergence d’une nouvelle population professionnelle, surtout celle des femmes, plus précaires et parfois moins diplômées qu’auparavant sur le marché du travail, une forme de sous-emploi invisibilisé a vu le jour, précise Margaret Maruani (2003). Une mixité de sexe s’est imposée dans l’équipe de travailleurs sociaux de l’établissement. En premier lieu, le recrutement d’une psychologue, dans un deuxième temps j’ai pu négocier avec mon conseil d’administration l’embauche d’une collaboratrice comme cheffe de service. Enfin l’équipe d’éducateurs s’est ouverte aux femmes. Cette évolution vers la mixité professionnelle dans un secteur plutôt représenté par une majorité d’hommes, est devenue la règle. Il s’agit d’une situation assez exceptionnelle au regard d’autres secteurs du travail social majoritairement occupés par des femmes (Olivier, 2023). Cette évolution respectueuse de la législation quant à la non-discrimination de sexe à l’embauche ouvrait dans mon esprit un chemin vers d’autres questionnements notamment celui de la complémentarité de genre (Mathieu, 2013, 2014 ; Guillaumin, 2016 ; Delphy, 2017-2019). Nicole Mosconi présente le travail social sous le trait d’une ségrégation horizontale, composée d’une division sexuée fondamentale entre production et reproduction (2023 : 28).  Certaines questions demeurent quant à la pertinence de la mixité des sexes comme substrat de la disparition des inégalités. La mixité dans le travail social, regroupant les femmes et les hommes, est-elle suffisante pour créer une égalité de droit et permettre d’effacer les préconstruits sociaux de sexe essentialisés tels qu’ils sont décrits par Marc Bessin (2005, 2008) ? Les publications récentes concernant les recherches sur le genre nous confirment le contraire notamment dans la revue -Nouvelles questions féministes- faisant suite aux observations de Monique Haicault (2000) quant à la déconstruction des limites traditionnelles du champ de la sociologie du travail et de la famille. Dans mon enquête, une cheffe de service, Valérie, affirme à propos de la notion de sacrifice dans le couple : « Je pense que lui s’est jamais… n’a jamais eu ces états d’âme… ». Elle complète par ces propos : « Je pense que c’est le poids du passé, c’est normal qu’une femme s’occupe de ses enfants mais pour obtenir que ce soit l’homme… faut se battre quoi… ». En parallèle de mon parcours professionnel, j’ai effectué des allers-retours du terrain aux formations universitaires. Ce fût pour moi l’occasion de réaliser le « pas de côté » nécessaire aux interrogations sur une pratique professionnelle qui engage celui ou celle qui entre en relation avec les autres. C’est à cet endroit que mon éthique fût, et est encore, mobilisée dans et par les épreuves traversées où les interrogations demeurent toujours vivaces (Ravon, Vidal Naquet, 2018 : 74 à 81).   <h2 style="margin-top:3px">3-Ce que le terrain d’enquête apporte au chercheur</h2> · Une recherche inductive par théorisation ancrée Dans le cadre d’une recherche inductive (Hughes, Strauss, Becker), j’ai effectué, entre 2021 et 2022, une première phase exploratoire d’enquête de 12 entretiens biographiques auprès de 7 femmes et 5 hommes, managers intermédiaires dans le travail social en France, les âges des personnes interviewées se situent entre 36 et 49 ans. Toutes et tous disposaient du statut de chef-fe de service. Les entretiens se sont déroulés à l’aide d’un guide d’entretien. La durée moyenne des entretiens exploratoires fût de 1h30. Un seul entretien s’est déroulé en distanciel par visio-conférence. A ce jour tous ces entretiens sont retranscrits. J’ai réalisé un tableau des curricula pour les 12 entretiens exploratoires qui servira à l’analyse qualitative. La méthode de prise de rendez-vous s’est effectuée par le réseau Linkedin. Sur le site, mon parcours de formation est accessible au public. Mon statut professionnel est : directeur de l’action sociale. A l’aide d’un message individualisé de proposition d’entretien je me présente comme doctorant en précisant le thème de ma recherche sur les parcours des managers intermédiaires dans le travail social. Le thème de ma recherche peut être lu par les personnes contactées via ADUM. L’utilisation d’entretiens compréhensifs (Kaufmann, 2001) m’a semblé, dans un premier temps, suffisamment souple et adaptée à ma démarche méthodologique, ouvrant la voie à l’expression des dimensions singulières des personnes rencontrées. Alors que l’observé et l’observateur, à ce stade de cette recherche, n’étaient pas encore suffisamment démêlés, je prenais conscience des imbrications par lesquelles je cheminais, ce qui semble cohérent pour tout chercheur débutant. C’est justement à cet endroit que le choix d’une posture inductive, m’a permis ensuite de distinguer le recueil des données du terrain d’avec une théorisation préconstruite et surtout pré-choisie. Lors de mon retour sur le terrain en 2023 pour la phase 2 de mon enquête (P2, N=16), j’ai délaissé pratiquement le guide d’entretien et j’ai utilisé comme support partagé avec l’interviewé-e un nouvel outil d’entretien : le calendrier de parcours de vie. Prenant conscience que l’entretien compréhensif classique pouvait servir davantage au chercheur dans le maintien de son fil conducteur au détriment du recueil du cheminement de l’interviewé-e dans ses allers et retours, passés et présents, sur son parcours de vie (Kaufmann, 2001, Ramos, 2015). Ce faisant, « l’entretien peu structuré » (Blanchet et Gotman, 2003 : 62), et plus précisément lorsque celui-ci concerne les parcours de vie, nécessite une préparation de consigne en amont de celui-ci et la préfiguration d’axes thématiques construits de manière dynamique dans des aller-retour entre le terrain et les lectures sociologiques (méthodologies, études féministes, parcours biographiques). L’évidence pour le chercheur comme pour les personnes interviewées est à interroger, à observer, à mettre en perspective argumentative afin de démontrer la pertinence de la démarche de recherche (Mosconi, 2016). Au fil des entretiens, dans une expérience d’apprentissage du « métier de sociologue » (1983), le lâcher prise m’a permis de moins conduire l’entretien, et de le laisser plus ouvert en me rendant disponible sur une trame, celle de l’interviewé-e, ainsi « la relation [enquêté] à enquêteur est à analyser » (Monjaret, 2014 : 27). Il semble difficile pour l’enquêteur de s’affranchir de sa bibliographie passée quand bien même il découvrirait une lecture différenciée liée aux mouvements féministes et aux recherches sociologiques sur le genre. C’est ici sans doute la limite d’une posture de recherche inductive laissant croire au chercheur qu’il dispose d’une forme d’objectivité par sa propre neutralité. De plus, l’environnement humain au sein de la formation doctorale m’a permis de rencontrer celles et ceux qui participent dans le cadre de leurs recherches aux échanges pédagogiques. Les conversations avec Sigolène Couchot-Schiex, professeure en sciences de l’éducation et de la formation, les échanges avec Catherine Négroni, maitresse de conférences en sociologie, toutes deux membres de mon comité de suivi individuel, travaillent sur des dimensions sociales en lien avec ma recherche. Celles-ci m’ont accompagné sur mon rapport à l’objet. Elles ont enrichi mon point de vue sur le genre et les parcours de vie. L’approche scientifique du genre en sciences de l’éducation nécessite beaucoup d’humilité de la part du chercheur au regard de l’histoire multiforme des luttes et des recherches féministes, s’y ajoutent les approches complexes de la notion de genre, m’a précisé Sigolène Couchot-Schiex. De son côté, Catherine Négroni m’a invité à ouvrir mon regard sociologique sur les axes complémentaires aux temporalités notamment à propos des bifurcations individuelles en lien avec une profession dans des parcours de vie non linéaires. Cette présence interrelationnelle, avec Valérie Becquet, ma directrice de thèse, et les membres du comité de suivi individuel, demeure centrale quant à mon regard d’homme sur le terrain de l’enquête, ne serait-ce que par le choix de l’objet dans cette recherche : le genre. Ces échanges ont su orienter mon cheminement de recherche, à propos de ma phase d’exploration, et comment mon attitude pouvait être différente selon l’interlocuteur interviewé en prenant par exemple certains entretiens enregistrés où j’adoptais une posture plus ascendante envers certaines femmes, au travers par exemple d’une formulation fermée des questions, d’une manière plus directe de relancer l’entretien, ou encore d’une prise de hauteur dans l’échange. Il me semblait évident, comme normal, dans une carrière différenciée entre un homme et une femme dans un couple, &oelig;uvrant dans le même champ du travail social, que la femme se devait de rattraper le niveau supérieur statutaire du conjoint. Ce qui confirmait dans mes représentations stéréotypées la place de leader économique de l’homme au sein du couple et la division genrée du travail social. Cette traduction s’est faite dans la réponse d’Isabelle, (les prénoms mentionnés sont anonymisés), cheffe de service, lors de mes premiers entretiens exploratoires, par un constat d’inégalité de parcours : « Dans la recherche d’un équilibre familial, avez-vous rattrapé votre compagnon ? », « beh non puisque lui continue à monter… Il a toujours un échelon d’avance sur moi, je pense qu’il est plus intéressé par sa carrière que moi. ». La place subalterne d’Isabelle dans son couple par rapport à son conjoint fût appuyée par ma question : « Vous sentiez qu’il vous fallait apprendre d’autres choses [pour évoluer professionnellement] ? « Oui c’est ça », « … dans vos échanges avec votre compagnon ? ». Là encore, dans mes représentations de genre, le conjoint détenait le savoir qu’il pouvait à sa guise mettre à disposition de sa conjointe. J’apprenais et j’apprends encore tout en désapprenant. De prime abord cela peut sembler périlleux sur le plan identitaire. Déconstruire les évidences de représentations de genre (Mosconi, 2016 : 29) demeure la démarche centrale dans une recherche en sciences de l’éducation portée sur les parcours de vie. · Mener l’enquête sous le prisme du genre en tant qu’homme Le questionnement enfin posé sur le discours du modèle social de genre s’ouvre au regard objectivant du chercheur que je suis. Cette démarche par l’épreuve d’authenticité est mise en discussion avec mes pairs, professeurs-es et doctorants-es. Cet article y contribue également. Sur le terrain d’enquête, lors de la phase exploratoire (=12, 2022), je découvre plusieurs aspects soulevés par Anne Monjaret (2014 : 25). Une série de questions posées par les interviewés-es retiennent mon attention quant à ma place subjective : Connaissez-vous le travail social ? Vous devez connaitre cette situation en tant qu’homme ? Ces questions relèvent de « l’attribution d’une identité acceptable » (Monjaret, 2014 : 27). Lors des premiers entretiens exploratoires réalisés, j’ai été confronté à des positions genrées binaires, exprimées de la part des personnes interviewées comme des évidences projetées sur les qualités relevant des femmes et des hommes qui leur seraient propres, voire naturelles, dans le travail social.  Ainsi, pour un chef de service que je nomme Jacques, rencontré dans notre enquête, la posture d’autorité dans son récit se traduit par : « c’est juste naturel… y a rien de travaillé ». Dans un autre entretien, Patrick précise : « L’homme c’est l’interdit, c’est l’autorité. C’est lui qui pose le cadre ». Enfin, Laurent confirme que « la technique est maitrisée par l’homme ce qui facilite son recrutement » dans le travail social. Le naturel concerne également certaines femmes dans leurs récits de vie, Catherine précise : « Je me suis toujours occupée des autres, de mes frères et s&oelig;urs, il a fallu que je me fasse toute petite… j’ai été élevée comme ça, ahah… m’occuper d’avantage des autres que de moi… ». La parole chez une cheffe de service où le genre intégré se manifeste avec affirmation : « Je dispose d’un gros care-giving compulsif » montre l’intégration d’un construit social de genre. La conscience des inégalités de certaines femmes interviewées concerne également les parcours de vie liées aux carrières professionnelles, Catherine a conscience que « dans le travail social on est moins regardant sur les compétences des hommes pour les faires monter. ». Thierry, chef de service, ajoute « j’ai conscience que dans un secteur très féminisé la rareté d’être un homme me permet de négocier mon salaire ». L’imaginaire transmis dans une dimension symbolique trouve ici une place forte chez Mireille : « Je suis très comtesse de Ségur, c’est l’héritage historique, c’est un métier très féminin, l’empathie, faire pousser les autres, c’est quelque chose de très féminin… bien que ce soit mon directeur qui m’ait tout appris… ». Ici, l’observation porte sur un autrui aidant genré. Pour que les femmes gravissent les strates de la carrière dans le travail social, un homme hiérarchiquement supérieur se trouve en position de transmission de son pouvoir. Véronique Bayer, lors de notre entretien, m’a confirmé sa difficulté dans son enquête sur le genre pour sa thèse de doctorat en sociologie sur les cadres dans le travail social, à aborder les questions de genre auprès des personnes qu’elle interviewait et à être confrontée à des réponses toutes faites, préconstruites. Le terrain d’enquête socialise aux modalités locales du genre en invitant à s’adapter aux fortes contraintes (Monjaret, 2014 : 33), ce qui active et ou renforce une posture déjà bien engagée chez la personne qui déroule son parcours de vie. Les contraintes dans la démarche d’enquête sociologique lorsqu’elles ne touchent pas aux environnements, aux modalités de prise de contact, à l’organisation même de l’entretien, s’inscrivent dans ce déséquilibre du « sachant » envers celui ou celle qui devrait révéler la chose cachée. Tel un apprentissage sur soi, de soi, permet aussi de jouer avec elles. (Monjaret, 2014 : 34) Ma place de chercheur est aussi interrogée par les personnes rencontrées sur le terrain (2022). Elles marquent une affirmation d’acceptation de ma démarche d’enquête. Un certain plaisir et une curiosité intellectuelle nouvelle sont verbalisés en fin d’entretien pour une majorité d’interviewés-es : « Je pensais qu’on allait parler de mon travail, c’est intéressant cette approche, enfin on s’intéresse à nous en tant que personne », « Cet entretien m’ouvre à plein de questions personnelles à présent », « Merci pour ces questions, j’aimerai bien assister à votre soutenance de thèse. », « Est-il possible de disposer des résultats de votre recherche ? ». Le sociologue-interviewer dans une posture ouverte à la démarche biographique adopte, par l’expérience des entretiens, une « descente souple » disponible à l’inattendu singulier des témoignages. D’une part, un travail théorique est nécessaire, parcourir la littérature des recherches sociologiques sur le genre s’avère indispensable. D’autre part, comment « gagner la confiance » de l’interviewé-e tout en comprenant une forme de « contrat » menant au pacte de l’entretien ? A l’instar de Daniel Bertaux (2001) évoquant sa démarche d’enquête sur le terrain auprès des boulangers, découvrant la posture réflexive du couple. (cité par Monjaret, 2014 : 30). La double rupture nécessaire à la démarche sociologique consiste alors dans une invitation de l’interviewé-e à dérouler son parcours singulier d’une carrière sous la forme de parcours de vie qui lui est propre telle une histoire en train de se faire non pas mécanique mais dynamique, non pas enfouie dans l’inconscient mais prête à être ressentie au présent par et dans le dialogue. Elle est nécessaire car elle évite toute assignation, désignation, imputation ou lutte sous la forme de résistances dans des dimensions essentialistes où le sociologue doit dénaturaliser son regard sur l’objet qu’il se doit de « refroidir ».   <h2 style="margin-top:3px">4-<a name="_Hlk172904285">Une recherche qui questionne les représentations genrées bi-catégorisée</a>s</h2> •          Ce que la recherche montre sur le genre dans le travail social Les parcours de vie des personnes interviewées relèvent parfois de l’intime. Ils touchent aux épreuves traversées avec de multiples postures et conséquences imprévisibles et/ou irréversibles (Grossetti, [2004], 2021). Posez un regard sociologique sur les parcours de vie des personnes en situation de chefs-es de service dans le travail social ajoute à la biographie temporelle classique où les rythmes de vie sont observés selon des âges institutionnalisés, intégrés, normalisés (Bessin, 1996), une dimension ouverte aux temporalités diverses, complexes et inattendus, courtes ou longues, où le genre pourrait se manifester par sa prégnance contingente sous la forme de contraintes et/ou de ressources (Grossetti, opus cité) selon que l’on est un homme ou une femme. C’est par ce cheminement personnel dans la recherche que découvrir lors de mon enquête comment les durées de parcours sont plus longs chez les femmes (Bayer, 2023) pour parvenir à la fonction de chef-fe de service. Ce qui confirme les inégalités de rapports sociaux de sexe en lien avec la vie en deux (Haicault, 1984). Les assignations par le care faites aux femmes, dans un présentiel de genre (Bessin, 2009), comme des « logiques de rôles » à la disponibilité à l’autre dans le travail social (Bessin, 2015) apparaissent telles des constructions sociales qui conviennent à ceux qui en bénéficient (publics et professionnels). De manière compréhensive mais paradoxale, ces postures de genre vécues par les femmes demeurent trop lourdes à modifier dans le champ professionnel. Elles affirment rester impuissantes à les changer (enquête, 2022). Et pour les femmes interviewées qui en ont conscience, ou qui le manifeste de cette façon dans les entretiens, elles questionnent, composent et acceptent ce portage de genre des rôles dits « complémentaires » attribués tant dans la sphère domestique que professionnelle, non sans lassitude ni découragement. De leur côté, bien que certains hommes interviewés dans mon enquête verbalisent un souhait d’égalité des sexes, ils ont conscience de leur statut privilégié dans le travail social sans pour autant proposer des actions novatrices qui respecteraient le sens de leurs valeurs d’égalité. Les savoir-faire discrets des femmes dans l’aide et le soutient aux autres (Molinier, 2010), dont la reconnaissance est insuffisante et qui demeurent essentialisés dans le travail social, ces savoir-faire genrés s’apprennent-ils en formation de travailleurs sociaux ? Comment sont-ils transmis et par qui ? Ne faut-il pas les interroger sur leurs origines dans le cadre des formations professionnelles ? <a name="_Hlk172910006">· Ce que la recherche déconstruit de mes représentations de genre</a> Les discours stéréotypés sont construits et deviennent une croyance dans le sens que développe Nicole Mosconi (2016) et confirment la différence des sexes comme naturelle. Cette différence est portée et transportée dans les générations familiales qui suivront, j’ai grandi avec elles. Pourtant une autre réalité est possible dès lors que les questionnements personnels interrogent l’imaginaire produisant des inégalités. Les représentations bi-catégorisées de complémentarité de sexe et de genre (Bessin, 2008) que j’observe dans cette recherche, ont modelé mes pensées et mon discours tout au long de mon parcours personnel et professionnel. Au regard des configurations sociétales sur les attendus dans le travail social, à l’insu de toute auto critique, comme allant de soi, celles-ci auraient pu figer et fermer toute tentative de découvertes sociologiques. Les forces créatrices des représentations (Monjaret, 2014 : 36) obligent le chercheur que je suis au pas de côté, aux méfiances des faux-rebonds des évidences et des dénis avancés sur la place du dialogue dans les entretiens décrits plus haut. Cela ne risque-t-il pas à ce stade de la recherche de perturber toute tentative d’analyse des contenus d’entretien ? « Assignation de place » (Monjaret, 2014 : 29) … par qui ? Pour qui ? Howard Becker, dans son ouvrage Les ficelles du métier (pp. 30-31), nous montre comment les groupes d’appartenance du chercheur mobilisent le discours légitime dans ses représentations. Dès lors qu’il s’agit de faire appel aux notions de genre le sociologue en apprentissage que je suis est impacté. Dans ce sens, mon groupe d’appartenance de genre risque de figer, modéliser et confirmer les stéréotypes de sexe dans l’échange au moment de l’entretien. De plus, en tant que professionnel du travail social qui connait et sait de quoi il parle. En tant que chercheur dans ma démarche d’entretien qui engage son savoir, conscient de ce double enjeu identitaire dans la perception par l’interviewé-e, cela nécessite le regard sur soi par questionnements jalonnés, ce qui m’apporte un regard nouveau sur mes propres représentations. C’est bien dans l’utilisation méthodologique du « par la comparaison croisée » des parcours de vie diachroniques et synchroniques sous le prisme du genre que je pourrais y voir, dans une perspective de codification et de catégorisation, l’épaisseur des attributions, des assignations et des marqueurs de genre ouvrant la voie à des chemins expérientiels composés de bifurcations, de ruptures et de renoncements, dont les temporalités faites de dissemblances, fabriquent des mobilités de genre. (Bessin, 2008, 2009, 2010 : Bertaux-Wiame, 2006). Le recours aux calendriers biographiques (Gaudet, 2021) abordés plus haut a complété ma panoplie d’outils méthodologiques au service de l’objectivation. Conclusion Le parcours de délestage d’un construit social imaginaire personnel présenté ici comme évidence à questionner, m’a amené à analyser mes résistances. C’est dans mon cheminement singulier, regard sociologique proposé par Danilo Martuccelli (2010 : 123) que j’y trouve des ébauches de réponses dans mes expériences sociales telles que François Dubet les analyse (1994). La carrière masculine qui est la mienne doit être regardée avec une attention particulière dans un enjeu de réflexivité tel un outil de rupture comme le précise Muriel Darmon (2008 : 152) avec le construit social genré. Cette prise de conscience personnelle, lors de la réalisation des entretiens, touche au sensible personnel, quand bien même l’objet d’une recherche se veut objectivé, c’est à cet endroit que se glisse subrepticement l’engagement féministe, et je prends à mon compte la paraphrase de Christine Détrez : « On ne nait pas féministe on le devient… ! ».                                         Références bibliographiques Bayer, V. (2023), Le travail social toujours une affaire de femmes ? Ed. Champ social <a name="_Hlk171152177">Beaud, S, Florence, W. (2001), Guide de l’enquête de terrain, Ed. La Découverte</a> Becker, H. S. (1986), Ecrire les sciences sociales, Ed. Economica Becker, H. S. (1998), Les ficelles du métier, Ed. La Découverte Becker, H. S. (2016), La bonne focale, Ed. La découverte Becker, H. S. (2017), Faire preuve, Des faits aux théories, Ed. La Découverte Bertaux, D. (2001), Les récits de vie, Ed. Nathan Bertaux-Wiame, I. Tripier, P. 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